Rapport n° 419 (2006-2007) de M. Gérard CÉSAR , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 25 juillet 2007

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N° 419

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 25 juillet 2007

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires économiques (1) sur la proposition de règlement du Conseil portant organisation commune du marché vitivinicole et modifiant certains règlements (E 3587),

Par M. Gérard CÉSAR,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Paul Emorine, président ; MM. Jean-Marc Pastor, Gérard César, Bernard Piras, Gérard Cornu, Marcel Deneux, Pierre Herisson, vice-présidents ; MM. Gérard Le Cam, François Fortassin, Dominique Braye, Bernard Dussaut, Jean Pépin, Bruno Sido, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Gérard Bailly, René Beaumont, Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Joël Billard, Michel Billout, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Jean-Pierre Caffet, Roland Courteau, Jean-Claude Danglot, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Mme Michelle Demessine, M.  Jean Desessard, Mme Evelyne Didier, MM. Philippe Dominati, Michel Doublet, Daniel Dubois, Alain Fouché, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Adrien Giraud, Mme Adeline Gousseau, MM. Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Odette Herviaux, MM. Michel Houel, Benoît Huré, Charles Josselin, Mme Bariza Khiari, M. Yves Krattinger, Mme Elisabeth Lamure, MM. Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Claude Lise, Daniel Marsin, Jean-Claude Merceron, Dominique Mortemousque, Jacques Muller, Mme Jacqueline Panis, MM. Jacques Pelletier, Jackie Pierre, Rémy Pointereau, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Thierry Repentin, Bruno Retailleau, Charles Revet, Henri Revol, Roland Ries, Claude Saunier, Daniel Soulage, Michel Teston, Yannick Texier.

Voir le numéro :

Sénat : 391 (2006-2007)

Mesdames, Messieurs,

La proposition de résolution dont est saisie votre commission des affaires économiques a été déposée par votre rapporteur dans la continuité du rapport d'information sur la réforme de l'organisation commune de marché (OCM) vitivinicole, également rédigé par votre rapporteur 1 ( * ) au nom de votre commission.

Ce rapport se référait au dernier état des propositions de réforme de l'OCM délivrées par la Commission européenne, datant d'une année auparavant 2 ( * ) . Les réactions hostiles qu'elles ont suscitées ont incité cette dernière à réexaminer son projet et à le modifier. C'est l'objet de la proposition de règlement portant OCM vitivinicole 3 ( * ) , qu'elle a rendue publique le 4 juillet dernier et à laquelle se réfère la présente proposition de résolution.

C'est bien de résolution, en effet, dont il va falloir faire preuve pour obtenir une réforme de l'OCM de 1999 4 ( * ) qui serve davantage les intérêts des viticulteurs français et, dans leur ensemble, européens. D'inspiration très libérale et remettant en cause bon nombre des instruments de régulation du marché communautaire du vin contenus dans l'actuelle OCM, les nouvelles propositions de la Commission ne sont que très partiellement amendées par rapport aux précédentes, et en tout état de cause insusceptibles de recueillir l'assentiment de notre pays.

Appréhendant un tel dénouement, votre rapporteur s'était proposé, dans le rapport d'information, d'exercer un « droit de suite » sur ce sujet. D'une part, en se rendant à Bruxelles auprès de la Commission pour y plaider en faveur du rapport sénatorial, ce qu'il a fait le 5 juillet dernier, accompagné par notre collègue Roland Courteau, au lendemain de l'annonce par la Commission de son projet de réforme 5 ( * ) . D'autre part, en se réservant la possibilité de déposer une proposition de résolution dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution.

Ce dernier texte commence tout d'abord par énumérer un certain nombre de constats et de principes.

Reconnaissant que l'actuelle OCM n'est plus adaptée à la structuration de la filière et à son contexte économique, et qu'elle doit à ce titre être réformée, il plaide ouvertement pour le maintien d'une OCM spécifique au secteur, et non pour sa fusion au sein de dispositifs d'intervention couvrant une multiplicité de produits agricoles.

Il défend par ailleurs un modèle d'organisation communautaire permettant de réguler un marché naturellement très versatile, que le libre jeu de la concurrence ne permet pas le plus souvent d'équilibrer.

Il réaffirme également l'importance du secteur vitivinicole pour l'Union européenne, dont les dimensions économique, sociale, environnementale et culturelle soulignent la singularité.

Puis la proposition de résolution prend position par rapport au projet de règlement communautaire sur les cinq points successifs examinés dans le rapport d'information, à savoir :

- la gestion du potentiel de production. Appelant à régulariser le problème des 120.000 hectares de plantations illégales sur le territoire communautaire comme préalable à tout nouveau programme d'arrachage, elle consent à ce qu'un tel programme soit mis en oeuvre dès lors que ses modalités seraient précisément encadrées. Elle s'oppose en revanche à toute libéralisation intégrale des droits à plantation à partir de 2013, qui contribuerait à accroître les déséquilibres déjà existants entre offre et demande ;

- les mécanismes de régulation des marchés. La résolution affirme clairement son hostilité au projet de suppression des dispositifs de distillation, notamment ceux dits de « prestations viniques » et de « crise », dont l'importance des enjeux environnementaux et économiques commandent qu'ils continuent de faire l'objet de financements communautaires ;

- la structuration de l'offre. La résolution insiste sur la nécessité de mettre en place des dispositifs incitant au regroupement des différents acteurs de la filière afin de gérer plus finement la production et de mieux la valoriser à l'export ;

- la politique de qualité. La résolution accueille favorablement l'alignement des différentes appellations sur le règlement transversal distinguant les appellations d'origine protégée (AOP) et les indications géographiques protégées (IGP) et au rapprochement des pratiques oenologiques autorisées sur celles prescrites par l'Organisation internationale du vin (OIV). En revanche, elle s'oppose formellement à tout projet d'autorisation de vinifier des moûts importés et de mélanger des vins communautaires avec des vins de pays tiers, à tout transfert de compétences dépossédant le Conseil au profit de la Commission, et surtout à la suppression du régime actuel d'aide à l'enrichissement ;

- la promotion. Préconisant une politique cohérente d'éducation des consommateurs européens à une consommation modérée et responsable, la résolution pointe l'insuffisance notable des crédits affectés à la promotion sur les marchés extérieurs et, plus encore, intracommunautaires, et demande à ce qu'ils soient conséquemment revalorisés.

Estimant qu'une telle résolution serait de nature à soutenir les représentants de notre pays dans les négociations communautaires qui vont s'ouvrir sur la base du projet de la Commission, votre rapporteur vous propose bien évidemment de l'adopter, après l'avoir modifiée, à la suggestion de notre collègue Roland Courteau, sur deux points visant à :

- préciser que l'incitation au regroupement des acteurs au niveau professionnel et interprofessionnel doit leur donner les moyens d'investir en vue de développer ou moderniser leurs structures de production ou de commercialisation (point n° 6) ;

- faire en sorte que l'utilisation de l'ensemble des crédits affectés à la promotion soit plus opérationnelle et rapide (point n° 15 nouveau).

*

* *

Lors de sa réunion du mercredi 25 juillet 2007, votre commission des affaires économiques a examiné le texte présenté par son rapporteur. Après avoir adopté les deux amendements présentés par ce dernier, elle a adopté, à l'unanimité, la proposition de résolution dont le texte suit.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

sur la réforme de l'organisation commune de marché vitivinicole

Article unique

Le Sénat,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de règlement portant organisation commune du marché vitivinicole et modifiant certains règlements (COM [2007] 372 du 4 juillet 2007),

Considérant que la filière vitivinicole européenne, qui traverse depuis plusieurs années une crise structurelle, n'en reste pas moins un secteur d'excellence occupant une place de leader au niveau mondial et assurant des fonctions économiques, sociales, environnementales et culturelles irremplaçables ;

Reconnaissant que l'actuelle organisation commune du marché (OCM) vitivinicole n'est plus en mesure de répondre aux défis que rencontre la filière européenne, à savoir une offre excédentaire sur un marché intérieur dont la consommation s'essouffle et une concurrence accrue des pays producteurs dits du « nouveau monde » ;

Considérant toutefois que le marché vitivinicole, dont la demande à l'échelle mondiale est en progression continue, demeure un marché d'avenir sur lequel les producteurs européens disposent potentiellement des moyens de conserver et de renforcer leur rang ;

Rappelant la spécificité, tant de nature physique qu'immatérielle, des produits de la vigne et du vin ;

Soulignant à cet égard la nécessité de conserver un système communautaire d'organisation et de régulation des marchés, dans le respect des règles concurrentielles émises au niveau international ;

1. Insiste sur l'indispensable maintien d'une OCM dotée d'instruments communautaires de soutien spécifiques à la filière vitivinicole ;

2. Consent à ce que soit instauré un dispositif d'arrachage dès lors qu'il est suffisamment incitatif, basé sur le volontariat et accompagné de mesures permettant d'en encadrer au niveau national les conséquences territoriales et environnementales ;

3. Rappelle que la régularisation des plantations illicites dans certains Etats doit être menée à terme, comme préalable à la mise en oeuvre de tout nouveau programme d'arrachage communautaire ;

4. S'oppose à une libéralisation entière et non encadrée, à partir de 2013, des droits à plantation, qui aurait irrémédiablement pour effet de créer de nouveaux déséquilibres entre offre et demande pesant négativement sur les prix de marché, et donc sur le revenu des professionnels de la filière ;

5. Demande à ce que soient maintenus et que continuent d'être financés par le budget communautaire les mécanismes de régulation des marchés que constituent, notamment le régime des prestations viniques et la distillation de crise, indispensables pour traiter de façon respectueuse de l'environnement les sous-produits de la vigne et pour faire face à des surplus d'offre conjoncturels ;

6. Juge nécessaire d'inciter les acteurs de la filière, par des mécanismes règlementaires ou financiers appropriés, à se regrouper et à investir au niveau professionnel et interprofessionnel afin de mieux équilibrer l'évolution de l'offre à celle de la demande et d'acquérir un poids et une visibilité réels à l'export sur les marchés des pays tiers ;

7. Est favorable à un rapprochement des différentes catégories de vins sur le règlement transversal distinguant les appellations d'origine protégée (AOP) des indications géographiques protégées (IGP), afin d'introduire une plus grande lisibilité pour les consommateurs, dès lors que sont maintenus les liens entre appellation, origine et qualité ;

8. Approuve l'alignement des pratiques oenologiques de l'Union européenne sur les prescriptions de l'Organisation internationale du vin (OIV) ;

9. Réaffirme son hostilité à toute autorisation de vinifier des moûts importés et de mélanger des vins communautaires avec des vins de pays tiers ;

10. S'oppose à tout transfert de compétences du Conseil vers la Commission européenne, s'agissant notamment de l'étiquetage et des pratiques oenologiques ;

11. Préconise, du fait de la diversité des pratiques spécifiques à chaque territoire et des traditions qui lui sont propres, un maintien du régime actuel d'aide à l'enrichissement ;

12. Réaffirme la nécessité de mener une action globale, cohérente et équilibrée d'information des consommateurs européens, associant pouvoirs publics et responsables professionnels, contribuant à la réduction des comportements à risque tout en valorisant, de façon respectueuse des exigences de santé publique, les produits de la vigne et du vin ;

13. Estime largement insuffisantes les sommes affectées à la promotion des produits vitivinicoles sur le marché intracommunautaire, au vu de l'importance essentielle qu'il revêt pour la commercialisation des productions européennes, et demande par conséquent leur augmentation dans une proportion substantielle ;

14. Juge également insuffisants les crédits mobilisés pour la promotion sur les marchés extérieurs et demande qu'ils soient accrus de façon significative afin de donner à nos entreprises les moyens de reconquérir des parts de marché à l'international ;

15. Souhaite que l'utilisation de l'ensemble des crédits affectés à la promotion soit rendue plus opérationnelle et plus rapide.

* 1 Réforme de l'OCM vitivinicole : sauvons notre filière et nos viticulteurs, rapport d'information n° 348 (2006-2007) fait au nom de la commission des affaires économiques par M. Gérard César.

* 2 Vers un secteur vitivinicole européen durable, communication de la Commission européenne au Conseil et au Parlement européen, COM (2006) 319 final du 22 juin 2006.

* 3 Proposition de règlement portant organisation commune du marché vitivinicole et modifiant certains règlements (COM [2007] 372 du 4 juillet 2007).

* 4 La dernière réforme de l'OCM date du règlement (CE) n° 1493/99 du Conseil du 17 mai 1999.

* 5 Ce déplacement a été l'occasion de s'entretenir avec M. Yves Madre, conseiller chargé de l'agriculture à la représentation permanente de la France, Mme Lene Naesager, conseillère de la commissaire, et M. Jean-Luc Demarty, directeur général chargé de l'agriculture.

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