Rapport n° 114 (2007-2008) de M. Jean-Léonce DUPONT , fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 6 décembre 2007

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N° 114

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 6 décembre 2007

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur la proposition de loi de MM. Francis GIRAUD, José BALARELLO, Bernard BARRAUX, Michel BÉCOT, Pierre BERNARD-REYMOND, Roger BESSE, Jean BIZET, Jacques BLANC, Paul BLANC, Joël BOURDIN, Dominique BRAYE, Mme Paulette BRISEPIERRE, MM. Louis de BROISSIA, Christian CAMBON, Jean-Claude CARLE, Auguste CAZALET, Gérard CÉSAR, Jean-Pierre CHAUVEAU, Marcel-Pierre CLÉACH, Christian COINTAT, Gérard CORNU, Mme Isabelle DEBRÉ, MM. Robert del PICCHIA, Gérard DÉRIOT, Éric DOLIGÉ, Michel DOUBLET, André DULAIT, Michel ESNEU, Jean-Claude ETIENNE, Bernard FOURNIER, Yves FRÉVILLE, René GARREC, Mmes Joëlle GARRIAUD-MAYLAM, Gisèle GAUTIER, MM. Patrice GÉLARD, François GERBAUD, Charles GINÉSY, Alain GOURNAC, Adrien GOUTEYRON, Francis GRIGNON, Louis GRILLOT, Georges GRUILLOT, Hubert HAENEL, Michel HOUEL, Mme Christiane HUMMEL, MM. Benoît HURÉ, Jean-Jacques HYEST, Jean-Marc JUILHARD, Mme Christiane KAMMERMANN, MM. Marc LAMÉNIE, André LARDEUX, Robert LAUFOAULU, Dominique LECLERC, Mmes Lucienne MALOVRY, Colette MÉLOT, MM. Alain MILON, Bernard MURAT, Mmes Monique PAPON, Catherine PROCACCIA, MM. Henri de RAINCOURT, Charles REVET, Philippe RICHERT, Mme Janine ROZIER, M. Bruno SIDO, Mme Esther SITTLER, MM. Louis SOUVET, Yannick TEXIER, André TRILLARD, François TRUCY, Jacques VALADE, Mmes Jacqueline PANIS, Béatrice DESCAMPS, MM. Pierre ANDRÉ, Alain VASSELLE, François-Noël BUFFET et Rémy POINTEREAU , relative aux personnels enseignants de médecine générale ,

Par M. Jean-Léonce DUPONT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Ambroise Dupont, Jacques Legendre, Serge Lagauche, Jean-Léonce Dupont, Ivan Renar, Michel Thiollière, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Pierre Martin, David Assouline, Jean-Marc Todeschini, secrétaires ; M. Jean Besson, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Yannick Bodin, Pierre Bordier, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Jean-Pierre Chauveau, Gérard Collomb, Yves Dauge, Christian Demuynck, Mme Béatrice Descamps, M. Denis Detcheverry, Mme Catherine Dumas, MM. Louis Duvernois, Jean-Paul Émin, Mme Françoise Férat, M. Bernard Fournier, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, M. Jean-François Humbert, Mme Christiane Hummel, MM. Soibahadine Ibrahim Ramadani, Alain Journet, Philippe Labeyrie, Pierre Laffitte, Alain Le Vern, Simon Loueckhote, Mme Lucienne Malovry, MM. Jean Louis Masson, Jean-Luc Mélenchon, Mme Colette Mélot, M. Jean-Luc Miraux, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jean-François Picheral, Jack Ralite, Philippe Richert, Jacques Siffre, René-Pierre Signé, Robert Tropéano, André Vallet, Jean-François Voguet.

Voir le numéro :

Sénat : 70 (2007-2008)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La création du diplôme d'études spécialisées de médecine générale par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 a rendu nécessaire l'institution d'une filière universitaire spécifique à cette spécialité, vers laquelle s'orientent environ la moitié des étudiants en médecine.

Dans un contexte de sous-effectif des enseignants universitaires dans ce domaine, mais d'un nombre croissant d'étudiants à former, la proposition de loi soumise à l'examen de votre commission apporte la traduction législative attendue en vue de créer de nouveaux corps de personnels enseignants en médecine générale. Suivant les recommandations d'un récent rapport de l'Inspection générale de l'enseignement supérieur et de la recherche et de l'Inspection générale des affaires sociales, ce texte propose de créer à leur intention un statut qui présente les caractéristiques suivantes :

- il s'appuie, comme pour les autres spécialités médicales, sur les triples missions enseignement-recherche-soins ;

- il tient compte des spécificités de la médecine générale, en imposant que l'activité de soins soit réalisée non pas au sein des centres hospitaliers universitaires (CHU) mais en médecine ambulatoire.

Le texte s'en tient à ces grands principes d'organisation et renvoie à un décret en Conseil d'Etat leurs modalités d'application.

Votre commission forme le voeu que ces dispositions permettent d'améliorer l'enseignement et la recherche dans ce domaine et qu'elles contribuent au renforcement de l'attractivité d'un mode d'exercice de la médecine aussi essentiel dans notre dispositif de soins.

Elle a approuvé ce texte qui lui paraît tout à fait adapté aux besoins spécifiques de la formation en médecine générale, tout en lui apportant quelques précisions rédactionnelles sur plusieurs points.

I. UNE RÉFORME PROGRESSIVE DES ÉTUDES EN MÉDECINE GÉNÉRALE

A. UNE RÉFORME À PAS COMPTÉS

Une réforme importante des études médicales est intervenue en 1981 , ayant pour objet d'améliorer la formation pratique des médecins généralistes et la formation théorique du troisième cycle. Elle s'est traduite, pour l'essentiel, par la mise en place :

- d'une formation hospitalière pour tous les étudiants, mettant ainsi fin à un système où la plupart des médecins généralistes n'effectuaient qu'un stage interné de 6 à 12 mois dans des services souvent peu formateurs ;

- d'une formation théorique de troisième cycle pour tous les étudiants ;

- d'une spécialisation en médecine générale, c'est-à-dire le résidanat.

En dépit de ces aménagements, les insuffisances de notre système de formations médicales devenaient de plus en plus criantes : sélection par l'échec à l'entrée des études, enseignement inadapté, non prise en compte des technologies nouvelles, dévalorisation de la médecine générale, incompatibilité avec les normes européennes...

En 1996, les professeurs Jean-François Mattei et Jean-Claude Etienne, alors députés, se sont vus confier une mission d'analyse de la formation initiale des médecins afin d'établir un état des lieux, nécessaire préalable à toute réforme des études de médecine.

Dans leur rapport, remis en 1997, ils prônaient notamment la création d'une filière « médecine générale » au concours d'internat.

Puis un arrêté du 10 octobre 2000 modifiant l'arrêté du 4 mars 1997 a réorganisé la deuxième partie du deuxième cycle des études médicales. L'enseignement ne se faisait donc plus par certificats mais par modules portant sur les grands processus pathologiques. En outre, cet arrêté a créé un diplôme de fin de deuxième cycle.

Enfin, l'article 60 de la loi n° 2002-73 de modernisation sociale du 17 janvier 2002 (article L. 632-2 du code de l'éducation) a réformé le 3 e cycle des études médicales . Votre commission des affaires culturelles s'était d'ailleurs saisie pour avis de ce texte, dont le rapporteur était notre collègue Jacques Legendre. 1 ( * )

Depuis cette réforme :

- l'accès au 3 e cycle est désormais subordonné à la validation de la totalité des modules d'enseignement, c'est-à-dire à l'obtention du diplôme de fin de deuxième cycle ;

- tous les étudiants voulant effectuer un 3 e cycle d'études médicales doivent se présenter aux épreuves de l'internat. Celui-ci devient un concours national classant, qui permet à tous les étudiants ayant obtenu le diplôme national de fin de 2 e cycle de choisir une discipline et un poste d'interne dans un centre hospitalier universitaire en fonction de leur rang ;

- la médecine générale est donc soumise au même régime que les autres spécialités d'internat. Elle est ainsi érigée au rang de discipline universitaire sanctionnée par un diplôme d'études spécialisées (DES) de médecine générale.

ARTICLE L. 632-2 DU CODE DE L'ÉDUCATION
(Article 60 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002)

« Le troisième cycle des études médicales est ouvert à tous les étudiants ayant validé le deuxième cycle des études médicales.

Pour l'accomplissement de ce cycle d'études, le choix des disciplines et du centre hospitalier universitaire de rattachement est subordonné au rang de classement aux épreuves de l'internat. Les élèves médecins des écoles du service de santé des armées exercent ce choix au sein d'une liste fixée par arrêté interministériel.

Des décrets en Conseil d'Etat déterminent les modalités des épreuves, l'organisation du troisième cycle des études médicales, la durée des formations nécessaires durant ce cycle et ultérieurement pour obtenir, selon les disciplines, une qualification et les modalités selon lesquelles les internes, quelle que soit la discipline choisie, peuvent, dans les limites compatibles avec l'évolution des techniques et de la démographie médicales, changer d'orientation et acquérir une formation par la recherche. »

B. LES ENJEUX ESSENTIELS DE LA CRÉATION D'UNE FILIÈRE UNIVERSITAIRE DE MÉDECINE GÉNÉRALE

1. Améliorer la formation de médecine généraliste et la recherche dans ce domaine

L'un des enjeux de la reconnaissance de la médecine générale comme spécialité d'internat, et de la création concomitante d'une filière universitaire spécifique, tient notamment à l'amélioration de la formation des futurs médecins concernés.

Cette formation doit être ainsi améliorée et harmonisée. En effet, il semble que l'enseignement des aspects spécifiques à la médecine générale soit très hétérogène entre les unités de formation et de recherche (UFR).

La recherche, aujourd'hui limitée dans ce domaine, doit également être renforcée.

A l'occasion du colloque organisé, les 8 et 9 mars derniers, par la Conférence des présidents d'université (CPU) sur « la place de l'université dans l'hôpital », M. Jean-François Dhainaut, alors président de l'université Paris-Descartes - Paris 5, affirmait que « nous sommes confrontés à deux défis majeurs : la crise de la démographie médicale, et la place de la recherche française, à laquelle s'ajoute la nécessité d'accélérer le transfert des résultats de la recherche vers les soins. »

Or, selon le récent rapport de l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR) et de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) 2 ( * ) , « le développement d'une recherche de haut niveau en médecine générale ne peut pas s'envisager sans qu'on constitue précisément une filière universitaire dans cette discipline ». Ceci va également dans le sens du rapport 3 ( * ) de M. de Pouvourville. Au titre des conditions de ce développement, celui-ci avance la nécessité de créer des postes d'enseignants-chercheurs, seuls susceptibles de former des étudiants « à et par la recherche », de structurer, développer et valoriser la recherche dans ce domaine.

2. Renforcer l'attractivité de cette discipline dans un contexte démographique préoccupant

En outre, le système en vigueur aboutissait souvent à une sélection des étudiants par l'échec. Il encourageait par conséquent une dévalorisation de la médecine générale et un amalgame, dans l'esprit de l'opinion publique, entre exercice spécialisé et compétence. Il comportait donc des effets pervers.

Renforcer l'attractivité de la médecine générale est d'autant plus urgent que notre pays devra faire face à une pénurie de médecins réellement généralistes.

En effet, différents facteurs expliquent la probable dégradation de la situation démographique des professionnels de santé dans les années à venir :

- un accroissement de la demande de soins exprimée par une population vieillissante ;

- une inégale répartition des professionnels de santé sur le territoire ;

- une réduction du nombre de professionnels de santé en activité ;

- la stratégie de certains médecins en exercice, tendant à restreindre leur pratique d'omnipraticien.

S'agissant des médecins généralistes, les perspectives démographiques sont particulièrement préoccupantes, d'autant qu'ils sont les plus à même de prendre en charge les soins de premier recours et ceux à qui la réforme de l'assurance maladie de 2004 a confié un rôle central dans l'organisation du parcours de soins.

Le nombre d'omnipraticiens pourrait diminuer de 13 % d'ici 2025.

Le niveau du numerus clausus a subi des « coups d'accordéon ». Dans ces conditions, et selon les projections du ministère de la santé, ce n'est qu'à partir de 2016 que les fortes augmentations du nombre d'étudiants en médecine décidées depuis 2004 produiront leurs premiers effets. Il faudra donc attendre 2025 pour que le nombre d'installations de médecins compense celui des cessations d'activités.

Ceci signifie que d'importants efforts devront être poursuivis dans les années à venir pour former les futurs médecins généralistes. Sachant que la médecine générale accueille la moitié des internes, ce sont environ 2 600 étudiants qui sont entrés dans cette formation en 2007. Cette dernière durant 3 années, près de 8 000 étudiants sont ainsi concernés.

Il est indispensable qu'ils bénéficient d'un enseignement de qualité, qui les prépare aux spécificités de ce type de médecine.

II. L'OBJECTIF DE LA PROPOSITION DE LOI : CRÉER UNE FILIÈRE UNIVERSITAIRE SPÉCIFIQUE, ASSOCIÉE À UNE FONCTION DE SOINS ET FONDÉE SUR LA « MONOVALENCE »

C'est dans ce contexte d'urgente nécessité que les auteurs de la proposition de loi, au premier titre desquels notre collègue Francis Giraud, ont souhaité intervenir.

La nomination de chefs de clinique en médecine générale, prévue par le Gouvernement en vue de former les étudiants concernés, suppose la création d'une filière universitaire spécifique, avec des corps de personnels enseignants en médecine générale.

La proposition de loi s'inspire des conclusions du rapport précité des inspections générales qui explicite la situation, liée à la fois au caractère dérogatoire des UFR de médecine au sein des universités, à celui du statut des personnels universitaires et praticiens hospitaliers (PU-PH) par rapport aux autres enseignants-chercheurs, et à la spécificité des médecins généralistes par rapport aux autres médecins.

Rappelons que la réforme initiée par le professeur Robert Debré s'était traduite par trois ordonnances et un décret en date des 11 et 30 décembre 1958. Ces textes ont créé les CHU et les médecins à temps plein « hospitalo-universitaires ».

Or, les inspections jugent les solutions de type « bi-appartenant hospitalo-universitaires » non adaptées aux enseignants de médecine générale.

Le statut des PU-PH repose sur une articulation forte entre les activités d'enseignement et de recherche d'une part, propres à tous les enseignants-chercheurs, et une activité professionnelle de soins, d'autre part.

En outre, cette dernière ne peut s'exercer que dans le cadre hospitalier, l'articulation entre les trois activités (enseignement, recherche et soins) ayant été jugée efficiente si elle se réalisait dans un établissement lui-même investi de cette triple mission, à savoir un centre hospitalier universitaire (CHU) ou un établissement conventionné.

Si ce cadre s'est imposé à toutes les spécialités médicales enseignées dans les facultés de médecine, il n'apparaît pas adapté à l'enseignement de la médecine générale dans la mesure où l'exercice de cette dernière ne se situe pas dans les hôpitaux, dont ce n'est pas la mission.

Par essence et par définition, la médecine générale est en effet à l'opposé de la médecine hospitalière, ainsi qu'il ressort des critères arrêtés par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour définir la médecine générale. Ainsi que le précise l'encadré ci-dessous, elle implique le caractère continu de la prise en charge du patient, dans son cadre de vie ordinaire, alors que l'hospitalisation concerne la phase aigüe de l'infection et une prise en charge extérieure au cadre de vie ordinaire.

LES SEPT CRITÈRES DE L'OMS
POUR CARACTÉRISER LA MÉDECINE GÉNÉRALE

- elle est « continue » : la médecine générale est centrée sur la personne avant d'être centrée sur la maladie. Elle est fondée sur des relations durables personnelles entre le patient et le médecin. Elle s'étend sur des périodes importantes de la vie des patients, sans se limiter à un épisode de recours aux soins ;

- elle est « générale » : elle s'adresse à toute la population sans restriction d'âge, de sexe, de milieu social, d'ethnie ou de religion ;

- elle est « globale » : la médecine générale comprend les soins préventifs, curatifs, de réhabilitation et palliatifs, ainsi que l'éducation pour la santé ;

- elle est « coordonnée » : le médecin généraliste devrait être préparé à travailler avec les autres professionnels et il est souhaitable que le médecin généraliste fasse partie d'une équipe pluridisciplinaire ;

- elle est « collaboratrice » : le médecin généraliste devrait être préparé à travailler avec les autres professionnels et il est souhaitable que le médecin généraliste fasse partie d'une équipe pluridisciplinaire ;

- elle est « orientée vers la famille » : en médecine générale, les problèmes individuels sont traités dans leur contexte familial, social et culturel ;

- elle est « orientée vers la communauté » : les problèmes du patient doivent être examinés en tenant compte du contexte communautaire local.

C'est pourquoi les inspections générales ont préconisé un statut spécifique de type « universitaire ».

Dans ce cadre, la proposition de loi - qui comporte un article unique - prévoit une dérogation au statut des enseignants-chercheurs en imposant, en outre, une activité de soins. Il s'agit ainsi de s'assurer que la formation s'appuiera, dans la durée, sur la pratique professionnelle.

Tel est l'objet du premier alinéa de l'article L. 952-23-1 proposé par la proposition de loi, qui insère une nouvelle section dans le chapitre II du titre V du livre IX du code de l'éducation, consacré aux dispositions propres aux personnels enseignants de médecine générale.

Le deuxième alinéa de l'article précise que les personnels concernés devront consacrer la totalité de leur activité professionnelle à ces trois fonctions, sous réserve des dérogations qui peuvent être prévues à leur statut. Afin de tenir compte des spécificités mentionnées ci-dessus, il précise que leur activité de soins est exercée en médecine ambulatoire.

Le troisième alinéa les soumet, pour leur activité d'enseignement et de recherche, à la juridiction disciplinaire mentionnée à l'article L. 952-22 du code de l'éducation. Celle-ci est une juridiction disciplinaire unique instituée sur le plan national et composée de membres pour moitié élus par les personnels intéressés et pour moitié nommés à parts égales par les mêmes ministres.

Le dernier alinéa renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer leur statut ainsi que les conditions de leur recrutement et d'exercice de leurs fonctions. Ce décret précisera, en outre, les mesures transitoires et les conditions dans lesquelles les enseignants associés de médecine générale peuvent être recrutés ou demander à être intégrés dans les nouveaux corps.

En effet, la formation des futurs médecins généralistes est, pour l'instant, assurée par des enseignants associés. Si tous n'ont pas nécessairement vocation à intégrer un corps d'enseignants-chercheurs, le décret devra cependant prévoir une période transitoire suffisamment longue pour permettre, le cas échéant, cette intégration et assurer la « montée en charge » du dispositif, en tenant compte aussi de la pyramide des âges des enseignants concernés.

L'un des points délicats sera de préciser l'encadrement quantitatif de l'activité de soins. Parmi les personnes auditionnées, ou consultées, par votre rapporteur, les points de vue variaient d'un jour par semaine à la moitié de la semaine.

Les modalités de rémunération de cette activité de soins ambulatoires devront être définies de façon à compenser la réduction d'activité professionnelle qu'entraînera, pour les intéressés, l'exercice de leurs fonctions d'enseignement et de recherche. D'après les informations fournies à votre rapporteur, la solution la plus simple et équitable pourrait passer par une convention entre les UFR de médecine et la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), afin que les médecins concernés perçoivent la rémunération afférente sous forme de traitements.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. UNE RECONNAISSANCE ATTENDUE

Après avoir verrouillé pendant de nombreuses années le numerus clausus , pensant qu'en réduisant l'offre de soins nous diminuerions la demande de soins, nous devons aujourd'hui former dans l'urgence de jeunes médecins généralistes pour remplacer ceux du « baby-boom » qui prendront prochainement leur retraite, mais aussi pour tenir compte de l'évolution culturelle des nouvelles générations vis-à-vis du temps qu'elles sont prêtes à consacrer à leur travail ainsi que, bien entendu, de la demande de soins de la population.

C'est pourquoi votre commission se réjouit de la proposition de créer une filière universitaire adaptée aux spécificités de la médecine générale.

Le texte repose sur le triptyque enseignement-recherche-soins, afin de garantir le continuum qui existe entre eux et qui est l'une des forces du modèle français.

Relevons qu'au Québec, à ces trois dimensions s'en ajoutent d'autres, en particulier la prévention et la promotion de la santé. Sans doute la formation et la recherche devront-elles prendre davantage en compte ces volets essentiels, qui relèvent de la pratique quotidienne des médecins traitants.

Avec le concours des équipes universitaires et de celles des organismes de recherche, notamment de ceux dont l'activité est plus particulièrement dévolue à la santé, il convient de poursuivre les efforts de développement de la recherche avec le souci d'associer étroitement recherche fondamentale et recherche clinique pour faire bénéficier le plus rapidement possible les malades du progrès de la connaissance et des innovations thérapeutiques qui en résultent.

Le Pacte et la loi de programme pour la recherche d'avril 2006 donnent de nouveaux moyens pour assurer les missions d'enseignement, de recherche et d'innovation. Rappelons, à cet égard, l'encouragement au développement des partenariats et coopérations entre les différents acteurs, notamment au travers des pôles de recherche et d'enseignant supérieur (PRES) et des réseaux thématiques de recherche et de soin (RTRS). Ces derniers, qui revêtent la forme de fondations de coopération scientifique, fournissent de nouveaux moyens à la recherche biomédicale. En outre, l'Agence nationale de la recherche (ANR) apporte des contributions financières supplémentaires aux équipes de recherche. La médecine généraliste doit y prendre toute sa place.

La réforme proposée est très attendue. Elle ne suffira sans doute pas à renforcer l'attractivité de la médecine générale, mais elle y contribuera incontestablement.

B. DES PROPOSITIONS DE SIMPLE PRÉCISION RÉDACTIONNELLE

Le texte proposé par votre commission apporte deux précisions rédactionnelles à celui de la proposition de loi :

- dans le premier alinéa, il apparaît plus adéquat de faire référence au personnel enseignant « non titulaire », plutôt que « temporaire ». Cette terminologie est en adéquation avec celle du statut de la fonction publique ;

- à la fin du deuxième alinéa, la notion d'activité de soins « généraux » est préférée à celle de soins « primaires ».

En outre, votre commission propose de compléter l'article L. 952-3 du code de l'éducation relatif aux fonctions des enseignants-chercheurs, afin de viser aussi désormais les nouveaux corps d'enseignants de médecine générale.

C. DES RÉFLEXIONS À POURSUIVRE

Outre les modalités d'application du texte, que viendra définir le décret en Conseil d'État, un certain nombre de réflexions devront se poursuivre.

Le domaine de la recherche médicale en est un. A cet égard, le rapport de votre commission sur le budget de la « Mission interministérielle enseignement supérieur et recherche » pour 2008 souligne la nécessité de donner une priorité à la recherche dans le domaine des sciences de la vie.

Par ailleurs, rappelons qu'en janvier 2008, des Etats généraux de la santé regrouperont l'ensemble des parties : professionnels de santé, représentants de patients, associations d'élus locaux. Ils seront organisés sous l'autorité du professeur Yvon Berland, président de l'Observatoire national de la démographie des professions de santé, et de Mme Annie Podeur, directrice de l'hospitalisation et de l'offre de soins au ministère de la santé. Parmi les sujets évoqués, figurera la formation. S'agissant de celle des futurs médecins généralistes, votre rapporteur souhaite que soient prises en compte les recommandations des inspections générales dans le rapport précité, qui portent notamment sur la nécessaire amélioration de la situation des maîtres de stage et sur le renforcement du pilotage et du dialogue entre le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche et le ministère de la santé.

* *

*

Au bénéfice des observations qui précèdent, votre commission vous demande d'adopter la proposition, dans le texte résultant de ses conclusions, et qui figure ci-après .

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du jeudi 6 décembre 2007, la commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Léonce Dupont , la proposition n° 70 (2007-2008) relative aux personnels enseignants de médecine générale .

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

Après avoir félicité ce dernier pour la qualité de son exposé , M. Jacques Valade, président , a estimé que la proposition de loi constituait un complément indispensable au dispositif existant si l'on souhaite améliorer l'enseignement de la médecine générale et éviter la pénurie de médecins généralistes. Il s'est déclaré très favorable à ce texte opportun.

Exprimant la crainte que l'enseignement de la médecine ne s'effectue plus en lien avec les CHU, Mme Brigitte Gonthier-Maurin a demandé des précisions à ce sujet.

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur, a rappelé que la formation en médecine générale était pilotée par les UFR de médecine et que le texte tendait à créer un corps d'enseignants-chercheurs dans cette discipline, tout en veillant à ce que cette formation soit en phase avec l'évolution de la pratique ambulatoire. Le cursus de formation lui-même n'est pas modifié.

A l'issue de ce débat, la commission a adopté la proposition de loi dans le texte proposé par son rapporteur.

TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

PROPOSITION DE LOI
relative aux personnels enseignants de médecine générale

Article 1er

Dans le chapitre II du titre V du livre IX du code de l'éducation, il est inséré une section 3 bis ainsi rédigée :

« Section 3 bis

« Dispositions propres aux personnels enseignants de médecine générale.

« Art. L. 952-23-1. - Les membres du personnel enseignant titulaire et non titulaire de médecine générale exercent conjointement les fonctions d'enseignement, de recherche et de soins en médecine générale.

« Ils consacrent à leurs fonctions de soins en médecine générale, à l'enseignement et à la recherche la totalité de leur activité professionnelle, sous réserve des dérogations qui peuvent être prévues par leur statut. Ils exercent leur activité de soins en médecine générale et ambulatoire.

« Pour leur activité d'enseignement et de recherche, ils sont soumis à la juridiction disciplinaire mentionnée à l'article L. 952-22.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application de la présente section et notamment le statut des personnels enseignants de médecine générale, les conditions de leur recrutement et d'exercice de leurs fonctions ainsi que les mesures transitoires et les conditions dans lesquelles les enseignants associés de médecine générale peuvent être recrutés ou demander à être intégrés dans les nouveaux corps. »

Article 2

« L'antépénultième alinéa de l'article L. 952-3 du code de l'éducation est ainsi rédigé :

« En outre, les fonctions des personnels enseignants et hospitaliers et des personnels enseignants de médecine générale comportent une activité de soins, conformément aux articles L. 952-21 à L. 952-23-1. »

* 1 Voir l'avis n° 276 (2000-2001) de M. Jacques Legendre , présenté au nom de la commission des affaires culturelles sur la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 et le rapport n° 275 (2000-2001) de MM. Claude Huriet, Bernard Seillier, Alain Gournac et Mme Annick Bocandé, présenté au nom de la commission des affaires sociales.

* 2 Voir le rapport de l'IGAENR et de l'IGAS sur la « création de la filière universitaire de médecine générale » - Février 2007.

* 3 Voir le rapport de M. de Pouvourville sur « la recherche en médecine générale » - Juin 2006.

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