III. TROIS QUESTIONS MAJEURES EN SUSPENS

A. LE RAPPORT DES FRANÇAIS AU TRAVAIL, DANS UN CONTEXTE DE DÉFICITS CROISSANTS DU SYSTÈME DE PROTECTION SOCIALE

1. Une durée annuelle de travail inférieure de 15 % à la moyenne des pays de l'OCDE

Alors qu'au début des années soixante-dix le nombre annuel d'heures travaillées par actif occupé était dans notre pays sensiblement équivalent à celui observé à l'étranger, il est aujourd'hui inférieur d'environ 15 % à la moyenne. La France est à la fois l'un des pays où l'on travaille le moins et où travaillent le moins de personnes.

Certes, la comparaison des durées légales ou conventionnelles du travail entre les pays industrialisés ne constitue pas un exercice aisé à réaliser. Il faut en effet tenir compte de l'importance du temps partiel, des heures supplémentaires, rémunérées ou non, du nombre de salariés dont la durée de travail n'est pas décomptée de façon hebdomadaire (forfaits en jours), ainsi que des modes de décompte des heures dites d'équivalence spécifiques à certaines professions.

Toutefois, malgré ces réserves techniques, il apparaît clairement que depuis l'entrée en vigueur de la législation sur les trente-cinq heures, la France se distingue par la faiblesse de la durée légale du travail qui, dans la plupart des autres pays industrialisés, est proche de trente-huit heures. Si l'on raisonne sur une base annuelle, en tenant compte des jours de congés légaux et fériés, les Français travaillent ainsi 10 % de moins que les Espagnols, 9 % de moins que les Néerlandais et 7 % de moins que leurs voisins allemands ou italiens.

On retrouve un écart similaire pour les salariés à temps plein qui, en France en 2005, ont travaillé en moyenne 1 660 heures, contre 1 720 heures au Danemark, 1 790 heures aux Pays-Bas et 1 910 heures au Royaume-Uni.

Il convient enfin de remarquer que le volume d'heures travaillées par habitant a diminué en moyenne de 0,2 % par an en France sur la période 1995-2005, alors qu'il augmentait de 0,5 % dans les quinze pays de l'OCDE pour lesquels cette information est disponible.

2. Des besoins de financement croissants à moyen et long termes

D'ores et déjà, la France présente des coûts salariaux élevés et un niveau de prélèvements obligatoires nettement supérieur à celui de ses voisins. Le poids des prestations sociales dans le produit intérieur brut (Pib), qui s'inscrit au deuxième rang des pays de l'OCDE après la Suède, s'est même encore accru de presque trois points au cours des quinze dernières années.

Poids des prestations sociales dans le Pib

En points de Pib

1990

2006

Santé

9,1 %

10,3 %

Vieillesse - Survie

11,2 %

13,1 %

Maternité - Famille

2,9 %

2,7 %

Emploi

2,3 %

2,0 %

Logement

0,8 %

0,8 %

Pauvreté - Exclusion sociale

0,2 %

0,5 %

Prestations totales

26,5 %

29,4 %

Source : Drees, comptes de la protection sociale - Année 2006

Le premier rapport du conseil d'orientation des finances publiques, établi par Gilles Carrez et publié en février 2007, est consacré exclusivement à la question de l'impact à long terme du vieillissement de la population. Ce document souligne la nécessité de tirer toutes les conséquences de ce phénomène en matière de gestion publique. La plupart des travaux réalisés en France ainsi que par les institutions européennes sur cette question, évaluent à terme les besoins sociaux supplémentaires entraînés par l'évolution démographique de notre pays à l'équivalent de trois à quatre points de richesse nationale. Mais il s'agit plutôt d'un minimum :

« Dans le pire des scénarios, c'est même un surcoût supplémentaire de plus de sept points [de Pib] qui pourrait être constaté. De telles projections sont évidemment entourées d'une part d'incertitude importante, liée à la démographie, l'environnement macroéconomique et aux comportements. Mais au final, elles font consensus sur un point : le vieillissement de la population va engendrer des dépenses supplémentaires importantes et il ne faut pas compter sur la diminution du chômage ou la baisse des dépenses d'éducation, pour en absorber le coût. Par conséquent, ces projections montrent la nécessité d'agir au plus vite pour assurer la soutenabilité de nos finances publiques. »

Compte tenu du niveau élevé des prélèvements obligatoires (44,4 % du Pib en 2006), notre pays ne dispose plus de marge de manoeuvre pour faire face aux besoins de financement futurs du système de protection sociale. Dans ces conditions, des redéploiements de ressources publiques et des économies seront indispensables. Les assurés sociaux devront aussi inévitablement travailler davantage et plus longtemps.

Dans ce contexte, le caractère symbolique de la journée de solidarité rappelle que l'extension, voire la simple préservation, d'un système de protection sociale généreux ne pourra être financée à long terme que par l'accroissement de la production de richesse permis par le travail.

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