CHAPITRE II - RECRUTEMENT DANS LA FONCTION PUBLIQUE

Article 9 (art. 3 des lois n°s 84-16 du 11 janvier 1984 et 84-53 du 26 janvier 1984) Remplacement momentané des fonctionnaires par des agents non titulaires

Cet article généralise la faculté de recruter temporairement des agents non titulaires pour remplacer des fonctionnaires momentanément absents. C'est le cas du temps partiel, des congés de maladie, de maternité, du congé parental ou encore de l'accomplissement du service civil ou national, du rappel ou du maintien sous les drapeaux ou bien d'une période de réserve opérationnelle, sanitaire, de sécurité civile.

Ce recrutement de non titulaires doit également permettre de pallier, pour une durée maximale d'un an, la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu.

Si ces dispositions sont déjà applicables à la fonction publique hospitalière (article 9-1 de la loi du 9 janvier 1986) et à la fonction publique territoriale (article 3 de la loi du 26 janvier 1984) à l'exception du cas des réserves (ce que vient combler le paragraphe II de l'article 9 du projet de loi), il n'est pas possible aujourd'hui, dans la fonction publique d'État, de recourir à des contractuels pour remplacer des fonctionnaires temporairement absents. En effet, le recrutement de contractuels est strictement encadré par la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984.

Outre un amendement de précision, votre commission vous soumet un amendement ayant pour objet de prévoir la faculté de recourir à des agents non titulaires pour le remplacement d'un fonctionnaire de l'État en congé de présence parentale dont la durée maximum est de 310 jours ouvrés au cours d'une période de 36 mois.

Elle vous propose d'adopter l'article 9 ainsi modifié .

Article 10 (art. 3-1 nouveau de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 3-2 nouveau de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, art. 9-2 nouveau de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 art. L. 1252-1 et art. L. 1251-60 à L. 1251-63 nouveaux du code du travail) Recours à l'intérim

Cet article propose de légaliser le recours aux salariés intérimaires par les organismes publics pour pourvoir rapidement des emplois temporairement inoccupés ou pour faire face à un besoin ponctuel.

En se tournant vers les entreprises d'intérim, les auteurs du projet de loi, au-delà de la souplesse et de la rapidité du service offert par ce secteur, veulent éviter la reconstitution d'un vivier de précaires au sein de la fonction publique.

Toujours est-il que le gouvernement propose d'introduire cette souplesse, dans chacune des trois fonctions publiques (nouveaux articles 3-1 de la loi du 11 janvier 1984, 3-2 de la loi du 26 janvier 1984 et 9-2 de la loi du 9 janvier 1986), sous la réserve fondamentale, pour la territoriale, de respecter les missions des centres de gestion : l'embauche d'un intérimaire ne pourrait survenir qu'à titre subsidiaire lorsque le centre de gestion ne pourrait pas satisfaire le besoin de recrutement de la collectivité. Rappelons, en effet, qu'aux termes de l'article 25 de la loi n° 84-53, les centres de gestion, établissements publics locaux gérés par des élus de l'ensemble des collectivités locales affiliées, organisent les concours et gèrent les agents : notamment, ils pourvoient au remplacement d'agents momentanément indisponibles, sur la demande des collectivités.

Ce système semble fonctionner à la satisfaction des collectivités qui y recourent et il convient de le préserver. Il faut, cependant, réserver le cas des collectivités non affiliées à un centre de gestion, particulièrement les grandes villes et leurs difficultés éventuelles de remplacement de personnel absent pour lesquelles l'intérim pourrait être une solution.

L'article 10 ouvre, donc, aux administrations publiques le dispositif juridique régissant les employeurs privés, sous réserve de quelques adaptations nécessitées par la spécificité des emplois publics (nouveaux articles L. 1251-60 à L. 1251-63 du code du travail).

Tout d'abord, l'emploi d'un intérimaire ne peut survenir que dans quatre cas. Les deux premiers sont ceux visés par l'article 9 du projet de loi ( cf. supra ) et prévus par chacun des trois statuts (État, territoriale et hospitalière) :

1- le remplacement momentané d'un agent indisponible ou autorisé à exercer ses fonctions à temps partiel ;

Précisons que l'intérimaire pourrait remplacer le titulaire comme le non titulaire absent pour les mêmes causes, et pour toute la durée de son indisponibilité.

2- la vacance temporaire d'un emploi qui ne peut pas être immédiatement pourvu, pour une période d'un an maximum ;

3- l'accroissement temporaire d'activité ;

4- le besoin occasionnel ou saisonnier pour lequel le statut de la fonction publique d'État permet déjà le recours aux contractuels (article 6 de la loi du 11 janvier 1984, complété par le décret n°86-83 du 17 janvier 1986) comme celui de la fonction publique territoriale (article 3 de la loi du 26 janvier 1984) en fixant, toutefois, des durées maxima : pour l'État, six mois pour le besoin saisonnier et dix mois pour le besoin occasionnel, renouvellements compris, au cours d'une période de douze mois consécutifs ; pour la territoriale, ces limites sont respectivement de six mois pendant une même période de douze mois et de trois mois renouvelables une seule fois à titre exceptionnel ; la fonction publique hospitalière, pour sa part, permet l'embauche de contractuels durant un an maximum pour exercer des fonctions occasionnelles (article 9-1 de la loi du 9 janvier 1986).

En raison des spécificités de l'administration publique, les intérimaires recrutés seraient soumis aux obligations s'imposant à tout agent public et bénéficieraient, en contrepartie, de la protection offerte par la collectivité publique à ses fonctionnaires à l'occasion de leurs fonctions (cette protection garantit, tout à la fois, l'indépendance des agents et le bon fonctionnement du service. L'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 qui l'organise en prévoit expressément le bénéfice aux agents publics non titulaires).

Tenant compte de la position des personnels intérimaires, le projet de loi leur interdit l'exercice de fonctions qui pourraient les exposer à la prise illégale d'intérêt.

Par l'introduction d'un nouvel article L. 1251-62 dans le code du travail, le projet de loi prévoit que l'emploi d'un intérimaire après la fin de sa mission, en l'absence de contrat ou sans nouveau contrat de mise à disposition, fait naître un contrat à durée déterminée d'une durée de trois ans dont est déduite l'ancienneté du salarié à compter du premier jour de sa mission. Cette disposition, protectrice du salarié, est inspirée des règles applicables à l'employeur privé qui, dans ce cas, se voit lié à l'intérimaire par un contrat à durée indéterminée en application de l'article L. 1251-39 du code du travail.

Dernière dérogation à ce code : les litiges qui naîtraient d'une mission d'intérim seraient naturellement de la compétence du juge administratif.

Le recours à l'intérim étant assimilé à une prestation de service, la personne publique qui déciderait d'y recourir devrait respecter les règles de publicité et de mise en concurrence prévues par le code des marchés publics.

D'après les renseignements recueillis par votre rapporteur, cette pratique est aujourd'hui utilisée dans la fonction publique hospitalière pour remplacer des infirmiers absents afin d'assurer la continuité du service public dans un secteur particulièrement sensible.

De même, certaines collectivités locales y ont déjà eu recours.

Le juge administratif admet le recrutement d'un travailleur temporaire pour assurer la continuité du service public : rappelant que l'autorité administrative « dispose de la possibilité d'embaucher un personnel d'appoint pour une durée limitée ... », il l'autorise, cependant, à faire appel à des intérimaires « par dérogation au principe selon lequel l'exécution du service public administratif est confié à des agents publics » à la stricte condition que « des circonstances exceptionnelles, telles qu'une extrême urgence, rendent impossible ce mode de recrutement ou tout autre mode de recrutement d'agent ayant un lien distinct avec l'administration » (CE 18 janvier 1980 - syndicat CFDT des postes et communications du Haut-Rhin ; cf. également TA Grenoble - 24 juin 1988 - Commune de Charvieu-Chavagneux).

Mais, même si la souplesse offerte par l'intérim est avérée, il n'en reste pas moins discutable de confier aux salariés de travail temporaire qui, par nature, assurent des missions fugaces chez des employeurs successifs de toutes natures, des fonctions de puissance publique. L'article 10 du projet prévoit, certes, de les soumettre aux obligations des agents publics (art. L. 1251-61 nouveau du code du travail) et donc, notamment, au respect du secret professionnel, mais le sens du service public s'acquiert par une longue pratique et par l'application d'un statut spécifique.

Par ailleurs, la variété des cas permettant de recourir à l'intérim et la durée des emplois temporaires en résultant, accentuera nécessairement la précarité au sein de l'emploi public par la simplicité de cette procédure.

Enfin, votre rapporteur estime que, le projet de loi renforçant la possibilité d'employer des contractuels , l'administration disposera à l'avenir des moyens suffisants pour pallier l'absence d'un de ses agents.

Pour toutes ces raisons, votre commission vous propose d'adopter un amendement de suppression de l'article 10.

Article 11 (art. 14-2 nouveau de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983) Reprise des contrats de non titulaires en cas de transfert d'activités entre personnes morales de droit public

Cet article prévoit qu'en cas de reprise de l'activité d'une personne morale de droit public par une autre personne publique dans le cadre d'un service public administratif, celle-ci « reprend » également les agents non titulaires dont les emplois sont ainsi transférés, en leur proposant un contrat de droit public. Cette convention doit reproduire les clauses substantielles de l'acte originel sauf dispositions législatives ou réglementaires ou conditions générales de rémunération et d'emplois contraires : rémunération, lieu de travail, poste occupé... Le projet précise que la durée des services accomplis au sein de la personne publique d'origine sont assimilés à des services accomplis au sein de la personne publique d'accueil 42 ( * ) . Selon le texte proposé, si le contractuel refuse les modifications proposées, il est licencié.

Cet article transpose entre personnes publiques les dispositions de l'article 20 de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transpositions du droit communautaire à la fonction publique, concernant la situation des salariés en cas de reprise par une personne publique de l'activité de l'entité économique les employant.

Cette proposition semble également s'inscrire dans la réorganisation en cours de l'administration d'État puisqu'elle facilitera le reclassement des contractuels en cas de transferts d'activité.

Votre commission l'approuve dans la mesure où elle s'avère protectrice de la situation des agents non-titulaires,

Elle vous soumet cependant deux amendements , l'un rédactionnel , l'autre de précision , et vous propose d'adopter l'article 11 ainsi modifié .

Article 12 (art. 19 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 36 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 29 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 Ouverture des concours internes des trois fonctions publiques aux ressortissants communautaires

Cet article propose d'ouvrir les concours internes des trois fonctions publiques (État, territoriale et hospitalière) aux ressortissants communautaires.

Les candidats devraient justifier d'une durée de services accomplis dans une administration, un organisme ou un établissement d'un pays de la Communauté européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen 43 ( * ) aux missions comparables et qui auraient, le cas échéant, reçu dans l'un de ces États une formation équivalente à celle requise par les statuts particuliers pour l'accès aux corps et cadres d'emplois considérés : cette dernière réserve doit permettre l'application du principe de la reconnaissance de l'équivalence des diplômes qui conditionnent l'accès et l'exercice de professions réglementées, comme la profession d'infirmière ou encore celle de directeur d'hôpital (l'accès à ce dernier emploi est réservé aux personnes ayant réussi l'examen de fin de formation de l'Ecole nationale de la santé publique) ; elle est conforme à la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes qui impose de vérifier si le titre exigé peut être qualifié de diplôme au sens de la directive 89/48/CEE du Conseil du 21 décembre 1988, et dans l'affirmative, d'apprécier l'équivalence des deux diplômes en cause ( cf arrêt du 9 septembre 1983, Mme  Burbaud).

Après celle des concours externes, une nouvelle voie d'accès à la fonction publique française, plus professionnalisée, est ainsi offerte aux ressortissants européens.

D'après les renseignements recueillis par votre rapporteur, l'application de la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de l'Union européenne est difficilement comparable en raison de l'hétérogénéité des modèles rencontrés selon les pays, -fonction publique de carrière comme en France ou fonction publique d'emploi, majoritaire parmi les membres de l'Union européenne. Cette diversité conduit les États membres à adopter « le principe (...) d'une banalisation des recrutements des ressortissants communautaires par rapport aux conditions d'accès offertes aux nationaux ».

Précisons enfin que, d'une part, la comparaison des missions des administrations, organismes et établissements français et européens et, d'autre part, l'examen des équivalences seront assurées par la commission d'équivalence pour le classement des ressortissants de la Communauté européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen. Institué par le décret n° 2002-1294 du 24 octobre 2002, cet organisme intervient déjà en matière de concours externes et de détachements.

Votre commission souscrit à cette plus large ouverture qui conforte la construction européenne et vous propose, en conséquence, d'adopter l'article 12 sans modification.

Article 13 (art. 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983) Suppression de toute limite d'âge pour le recrutement par concours

Cet article propose de supprimer les conditions d'âge encore exigées pour le recrutement par concours lorsque l'intégration dans les corps, cadres d'emplois ou emplois succède à une période de scolarité au moins égale à deux ans.

Sur la base de la loi d'habilitation n° 2005-846 du 26 juillet 2005, l'article premier de l'ordonnance n° 2005-901 du 2 août 2005 a introduit le principe général de l'absence de limite d'âge pour l'accès à la fonction publique sous trois réserves dont celle, en matière de recrutement par concours, que le projet de loi propose de supprimer : pour les auteurs de l'ordonnance, ce maintien d'une limite d'âge visait à « préserver un équilibre entre l'investissement représenté par le coût de cette formation et la durée des services susceptibles d'être effectués par l'agent ». Cette disposition concerne notamment les concours de l'Ecole nationale d'administration (ENA).

L'article 13 du projet de loi concrétise une décision adoptée par le Conseil de modernisation des politiques publiques lors de sa réunion du 12 décembre 2007 : la disparition des limites d'âge vise à améliorer l'ouverture de la fonction publique à la « diversité des profils ».

Souscrivant à cet objectif, votre commission vous propose d'adopter l'article 13 sans modification.

* 42 Cette assimilation vaut pour l'ouverture des droits à congés et à formation auprès de la personne publique d'accueil et pour la reconduction éventuelle d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.

* 43 Islande, Liechtenstein, Norvège.

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