C. UN ENGAGEMENT DE L'ÉTAT DEVANT ÊTRE RESPECTÉ

Votre rapporteur déplore que le sous-engagement financier de l'État en matière d'assurance récolte , malgré les perspectives ambitieuses fixées lors de sa mise en place en 2005, s'est doublé d'une sous-dotation du FNGCA , pourtant censé assurer un minimum d'indemnisation aux agriculteurs dans l'attente d'une véritable extension du dispositif assurantiel.

1. Une absence chronique de dotation du FNGCA en loi de finances initiale

D'une façon récurrente, la dotation de l'État au FNGCA ne fait pas l'objet d'une inscription de crédits en loi de finances initiale.

Comme le rapporteur spécial au budget « agriculture » de la commission des finances, M. Joël Bourdin, a eu l'occasion de le faire remarquer à plusieurs reprises, cette absence constitue une sous-budgétisation patente, dans la mesure où l'article L. 361-5 du code rural dispose que les ressources du FNGCA sont composées d'une « subvention inscrite au budget de l'État et dont le montant sera au moins égal au produit des contributions » acquittées par les exploitants agricoles 16 ( * ) .

Ces contributions représentant, pour l'année 2008, un montant d'environ 87 millions d'euros, c'est autant de crédits publics qui auraient dû figurer à l'action 2 « gestion des aléas de production » du programme n° 227 « valorisation des produits, orientation et régulation des marchés » de la mission « agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » de la loi de finances initiale.

Cette pratique est quasi systématique : le FNGCA n'a fait l'objet d'aucune inscription de crédits en loi de finances initiale en 2003, 2004, 2006 et 2007, années au cours desquelles la subvention de l'État s'est pourtant in fine élevée, respectivement, à 249 millions d'euros, 197 millions d'euros, 114 millions d'euros et 62 millions d'euros. Les montants nécessaires ont donc été systématiquement dégagés en gestion, au prix d'exercices de « haute couture budgétaire » et au détriment d'autres actions qui se sont vues ponctionnées d'autant.

2. Un soutien en deçà des enjeux du développement de l'assurance récolte

Dès la loi de finances pour 2006 , et comme cela a été déjà évoqué, la commission des affaires économiques avait dû intervenir pour que soient réaffectés, par transfert entre programmes, 2,5 millions d'euros au financement de l'assurance récolte 17 ( * ) . Il était en effet apparu que l'enveloppe consacrée par le gouvernement au soutien du dispositif n'était pas à la hauteur du mécanisme de soutien à l'assurance récolte, pourtant intégré par le gouvernement dans la loi d'orientation agricole adoptée de façon quasi concomitante. Les 20 millions d'euros de crédits initiaux avaient donc été portés à 22,5 millions d'euros .

Dans la loi de finances pour 2007 , le dispositif d'incitation au développement de l'assurance récolte voyait sa dotation portée à 30 millions d'euros .

Dans la loi de finances pour 2008 , environ 32 millions d'euros de crédits ont été consacrés à l'assurance récolte. Ces montants correspondaient à la prise en charge par l'État, à hauteur de 35 % (40 % pour les jeunes agriculteurs), des primes ou cotisations des assurances couvrant les récoltes contre les risques climatiques.

Si le montant global des crédits affectés à l'assurance récolte dans la loi de finances pour 2009 reste inchangé, à 32 millions d'euros , le soutien de l'État à l'assurance récolte varie selon les productions.

Les secteurs de l'arboriculture et de la viticulture font l'objet d'un soutien majoré de 5 points. Le taux de soutien à l'assurance récolte y est ainsi porté à hauteur de 40 % du montant de la prime dans le cas général (+ 5 points pour les jeunes agriculteurs).

En revanche, il est prévu de réduire de 35 à 25 % (+ 5 points pour les jeunes agriculteurs) le taux de subventionnement des grandes cultures, alors même qu'elles vont sortir du champ du FNGCA.

Les autres conditions sont maintenues : franchises subventionnables fixées à 25 % minimum pour les contrats à la culture et 20 % minimum pour les contrats à l'exploitation.

Le programme triennal de dépenses publiques pour l'assurance récolte 18 ( * )

Année couverte

2007

2008

2009

2010

Financement national 19 ( * )

Loi de finances pour 2008

Projet de loi de finances pour 2009

Prévision de dépenses pour 2010

Prévision de dépenses pour 2011

31,834

32,0

38,1

43,4

Financement communautaire attendu

-

-

-

56,0

Total

31,834

32,0

38,1

99,5

Source : ministère de l'agriculture et de la pêche

Lors du comité national de l'assurance en agriculture du 16 septembre 2008, les organisations professionnelles agricoles ont regretté avec insistance la diminution du taux de soutien aux assurances et se sont interrogées sur l'avenir de l'arboriculture et de la viticulture.

Pour la campagne 2009, l'enveloppe budgétaire consacrée à l'assurance récolte sera précisée dans la loi de finances pour 2010 , au vu du développement de l'assurance et du prix des polices 20 ( * ) . Il est actuellement envisagé, à titre prévisionnel, une somme de 59 millions d'euros constituée à la fois par dotation budgétaire et par redéploiement du FNGCA. En effet, la sortie des grandes cultures du FNGCA représentera une économie de 27 millions en 2009, ce qui viendra augmenter les 32 millions de dotation initiale pour atteindre cette somme de 59 millions.

Le Gouvernement indique attendre, pour 2010, un soutien financier d'origine communautaire . Il pourrait en effet ressortir du « bilan de santé » de la PAC, actuellement en examen, des mesures d'aide au développement de l'assurance récolte. Dans le projet actuel, le soutien public, qui pourrait s'élever à 60 -voire 70 %- du coût de la police d'assurance, serait pris en charge aux deux tiers par l'Union européenne et pour le reste par l'État membre.

En attendant ces hypothétiques contributions complémentaires au financement des primes, les volumes affectés par les pouvoirs publics au développement de l'assurance récolte ne sont pas suffisants au regard des objectifs fixés en la matière . Selon certains des responsables auditionnés par votre rapporteur, les objectifs de taux de pénétration fixés dans les indicateurs du ministère en charge de l'agriculture sont inatteignables en l'état actuel des crédits y étant consacrés.

Or, tous les pays ayant voulu faire de l'assurance récolte l'instrument central de gestion des risques ont mis en place de véritables mesures incitatives financées sur fonds public pour « amorcer » le système et lui faire atteindre un effet de masse. C'est loin d'être le cas aujourd'hui dans notre pays, où les pouvoirs publics ne semblent pas décidés à « donner le coup de rein » nécessaire au décollage de l'assurance récolte.

Comme l'a souligné le Crédit agricole, pose aujourd'hui surtout problème « l'incertitude fondamentale sur le taux de soutien public, qui peut être réduit pour entrer dans une enveloppe budgétaire donnée. Cet élément est contraire à toute politique de développement rapide ». Et ainsi que le mentionnait notre collègue Dominique Mortemousque dans son rapport sur le sujet, « la bonne progression de l'assurance récolte demande un engagement constant et résolu de l'État », et ce notamment « par le budget qu'il y consacre ».

* 16 Il s'agit d'une contribution additionnelle aux primes ou cotisations afférentes aux conventions d'assurance couvrant, à titre exclusif ou principal, d'une part les dommages aux bâtiments et au cheptel mort affectés aux exploitations agricoles, et d'autre part les risques de responsabilité civile et de dommages relatifs aux véhicules utilitaires affectés aux exploitations agricoles et d'une contribution additionnelle particulière applicable aux exploitations conchylicoles.

* 17 Voir supra.

* 18 En millions d'euros, les autorisations d'engagement étant égales aux crédits de paiement.

* 19 Prise en compte du décalage d'un an dans les paiements de la subvention nationale

* 20 En effet, les crédits d'une année N sont versés aux assureurs pour les contrats souscrits au titre des récoltes de l'année N-1, conformément au cahier des charges défini par le ministère de l'agriculture et les assureurs.

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