Rapport n° 50 (2008-2009) de M. Daniel SOULAGE , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 22 octobre 2008

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N° 50

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 octobre 2008

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires économiques (1) sur la proposition de loi présentée par MM. Yvon COLLIN et Jean-Michel BAYLET tendant à généraliser l' assurance récolte obligatoire ,

Par M. Daniel SOULAGE,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Paul Emorine , président ; MM. Gérard César, Gérard Cornu, Pierre Hérisson, Daniel Raoul, Mme Odette Herviaux, MM. Marcel Deneux, Daniel Marsin, Gérard Le Cam , vice-présidents ; M. Dominique Braye, Mme Élisabeth Lamure, MM. Bruno Sido, Thierry Repentin, Paul Raoult, Daniel Soulage, Bruno Retailleau , secrétaires ; MM. Pierre André, Serge Andreoni, Gérard Bailly, Michel Bécot, Joël Billard, Claude Biwer, Jean Bizet, Yannick Botrel, Martial Bourquin, Jean-Pierre Caffet, Yves Chastan, Alain Chatillon, Roland Courteau, Jean-Claude Danglot, Philippe Darniche, Marc Daunis, Denis Detcheverry, Mme Évelyne Didier, MM. Philippe Dominati, Michel Doublet, Daniel Dubois, Alain Fauconnier, François Fortassin, Alain Fouché, Adrien Giraud, Francis Grignon, Didier Guillaume, Michel Houel, Alain Houpert, Mme Christiane Hummel, M. Benoît Huré, Mme Bariza Khiari, MM. Daniel Laurent, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Claude Lise, Roger Madec, Michel Magras, Hervé Maurey, Jean-Claude Merceron, Jean-Jacques Mirassou, Jacques Muller, Robert Navarro, Louis Nègre, Mme Jacqueline Panis, MM. Jean-Marc Pastor, Georges Patient, François Patriat, Philippe Paul, Jackie Pierre, Rémy Pointereau, Ladislas Poniatowski, Marcel Rainaud, Charles Revet, Roland Ries, Mmes Mireille Schurch, Esther Sittler, Odette Terrade, MM. Michel Teston, Robert Tropeano, Raymond Vall.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

214 (2007-2008)

Mesdames, Messieurs,

Petit à petit, malgré les intempéries, l'assurance récolte fait son nid. Encore quasiment inconnus en France il y a quelques années -si ce n'est pour le risque grêle-, les produits assurantiels proposés au monde agricole se sont multipliés depuis que la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006 a mis en place un dispositif de soutien actif et fixé des objectifs ambitieux en ce domaine.

Le mécanisme de l'assurance est, en effet, particulièrement adapté à un secteur marqué par une grande volatilité des volumes de production et des cours. Les aléas climatiques, sanitaires et économiques, dont la survenance a eu tendance à se multiplier au cours des dernières années, constituent l'une des données structurelles avec lesquelles chaque exploitant doit aujourd'hui composer. Les exemples américains et espagnols, souvent cités en la matière, illustrent l'intérêt de recourir à un tel instrument de couverture des risques.

Dans le même temps, le système principal de protection du monde agricole, basé depuis plusieurs décennies sur la solidarité nationale à travers le Fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA), ne permet plus de répondre efficacement aux besoins. La transition vers un dispositif assurantiel responsabilisant davantage les producteurs et leur apportant de meilleures garanties paraît donc opportune.

C'est le mouvement qu'a initié le gouvernement depuis 2005, et que notre commission des affaires économiques a toujours soutenu. Nous avions ainsi fait inscrire dans le dernier texte d'orientation agricole le principe d'une extension progressive de l'assurance récolte à l'ensemble des cultures, seule à même d'augmenter l'assiette des cotisants et d'ainsi réduire les primes assurantielles exigées par les assureurs.

Faut-il aujourd'hui aller plus loin et rendre obligatoire la souscription d'une assurance récolte auprès de chaque exploitant ? C'est l'objet de la proposition de loi n° 214 déposée par MM. Yvon Collin et Jean-Michel Baylet tendant à généraliser l'assurance récolte obligatoire.

Les auditions menées auprès des principaux acteurs ont fait émerger avec netteté qu'un tel projet est, en l'état actuel des choses, inenvisageable et, à tout le moins, prématuré. Cependant, l'objectif vers lequel doivent tendre les pouvoirs publics comme les producteurs et les professionnels du secteur de l'assurance doit demeurer l'extension aussi rapide et large que possible de la couverture assurantielle des exploitants agricoles.

Une telle évolution, si elle ne requiert pas en l'état de rendre obligatoire le recours à l'assurance, appelle cependant un soutien massif à son développement, à l'échelle tant nationale qu'européenne. C'est en effet davantage en incitant les producteurs à se garantir qu'en les y contraignant que les produits d'assurance contre les aléas agricoles prendront véritablement leur essor et constitueront les instruments privilégiés d'une gestion des risques responsable et efficace.

I. L'ASSURANCE RÉCOLTE, UN MÉCANISME INNOVANT ET APPRÉCIÉ

A. DES EXPÉRIENCES ENCOURAGEANTES À L'ÉTRANGER

1. Le système américain

a) Une couverture très large

Aux États-Unis, les programmes d'assurance couvrent la quasi-totalité des grandes cultures et fruits et légumes, et s'étendent aux productions animales. Ainsi, pour la campagne 2007-2008, environ 80 % des surfaces en blé et en soja (40-45 % en valeur de la production), et 90 % de celles en maïs grain (55 % en valeur) étaient couvertes.

S'ils sont facultatifs, ils sont souscrits par la plupart des exploitants qui y voient le moyen de stabiliser leurs revenus, mais également d'obtenir plus facilement un prêt auprès d'un établissement bancaire ou de sécuriser des contrats de livraison passés avec des négociants ou des transformateurs.

b) Le choix entre plusieurs niveaux d'assurance, récolte comme chiffre d'affaires

L'agriculteur américain a le choix entre l'assurance récolte, qui garantit les pertes de rendement liées aux aléas climatiques, aux maladies des plantes et aux attaques de ravageurs, et l'assurance chiffre d'affaires, qui le protège d'une réduction des recettes de l'exploitation due à une baisse de rendement ou à une diminution du prix projeté sur le marché à terme entre le moment des semis et celui de la récolte.

S'agissant de l' assurance récolte proprement dite, deux niveaux sont à distinguer :

- le premier, appelé « assurance catastrophe », indemnise uniquement en cas de « coup dur », c'est-à-dire de pertes supérieures à 50 % du rendement historique de l'exploitation, sur la base de 55 % du prix d'indemnisation maximum fixé annuellement par le ministère américain de l'agriculture (USDA). L'exploitant ne paie pas de prime d'assurance, celle-ci étant entièrement prise en charge par l'USDA, mais uniquement des frais administratifs.

- le second niveau, auquel préfèrent souscrire la plupart des agriculteurs, dit « buy up », garantit jusqu'à 85 % du rendement historique de l'exploitation. Le montant des primes varie alors selon ledit rendement et le taux de garantie choisi. La moyenne de ces primes est de 1,2 % de la valeur de la production hors aide directe pour le blé, et de 0,8 % pour le maïs et le soja.

L' assurance chiffre d'affaires , existant depuis le milieu des années 90, garantit une recette égale au rendement garanti -plafonné à 85 % au plus du rendement historique de l'exploitation- multiplié par le prix projeté sur le marché à terme de référence au moment des semis. La moyenne des primes d'assurances chiffre d'affaires, logiquement plus élevée que celles de l'assurance catastrophe, est de 3,6 % de la valeur de la production hors aide directe pour le blé, de 3,3 % pour le maïs et de 2,6 % pour le soja.

Si ce second type d'assurance constitue, pour les exploitants, une alternative à l'intervention sur les marchés à terme, elle n'offre pas de protection systématique contre le risque prix. Comme la garantie s'applique en effet, non au prix, mais à la recette de la culture, une chute des cours peut ne pas déclencher d'indemnité si elle est compensée par une hausse du rendement.

c) Un soutien massif des pouvoirs publics

Les polices d'assurance sont commercialisées par des compagnies privées, mais avec un soutien massif de l'USDA, qui les subventionne à 60 % environ -soit un taux bien supérieur à celui pratiqué en France-, rembourse aux assureurs une partie de leurs frais de gestion et réassure les polices les plus risquées.

Le coût budgétaire global des programmes d'assurance pour l'État fédéral est de l'ordre de 3 à 4 milliards de dollars par an, voire plus en cas d'aléa climatique majeur comme les inondations dont a été victime le Midwest au mois de juin 2008. Il s'agit d'un montant substantiel, à peine inférieur à celui des aides découplées versées aux producteurs américains de grandes cultures.

d) Un rôle pourtant accessoire par rapport à d'autres instruments de garantie des risques

Malgré leur importance, les programmes d'assurance ne constituent qu'une partie du système d'aide aux producteurs de grandes cultures, en complément des aides directes et des prix minima . Les tentatives visant à en faire le pivot du dispositif de soutien n'ont pas abouti.

L'assurance chiffre d'affaires a pour objectif, il est vrai, de lisser les variations de recettes entre les semis et la récolte, et non de stabiliser le revenu des producteurs entre les campagnes ni de pallier une baisse des prix de marché en dessous des coûts de production.

L'assurance récolte ne s'est, quant à elle, pas substituée aux aides ad hoc contre les calamités naturelles. Le dernier farm bill , entré en vigueur avec la récolte de cette année, a même créé un programme visant à compléter, par des paiements directs, les indemnités d'assurance reçues par les producteurs au motif qu'elles ne compenseraient qu'une partie des pertes de récolte.

2. Le système espagnol

a) Un dispositif ancien

Une loi de 1978 sur les assurances agricoles combinées couvrant les grandes cultures, l'élevage et les productions sylvicoles constitue, depuis trente ans, le principal outil de gestion des risques en Espagne.

L'ensemble des productions végétales et animales peut aujourd'hui être couvert. Le seuil de dommages ouvrant droit à indemnisation varie entre 10 et 30 % en fonction de la production, de la région et du risque. La quasi-totalité des risques est désormais assurable : ceux liés aux conditions climatiques, mais aussi ceux liés aux maladies animales, aux accidents, aux abattages d'urgence, aux attaques d'animaux sauvages, aux inondations, aux incendies ou encore aux problèmes de mise bas.

516.000 polices d'assurance étaient souscrites pendant la campagne 2007-2008, soit 63 % des exploitants, sylviculteurs et aquaculteurs concernés, pour un montant total de 600 millions d'euros.

Près de 50 % de la production en valeur est assurée en productions végétales, 24 % en productions animales et 20 % pour les productions piscicoles. S'agissant plus particulièrement des premières, 80 % de la production en valeur est assurée pour les céréales d'hiver et 70-75 % des arbres fruitiers, mais seulement 10 % de celle des oliviers.

b) Un appui public de grande ampleur

L'administration espagnole soutient très fortement le système assurantiel en contrôlant son cadre d'assurance et en finançant une partie des primes. Le gouvernement décide chaque année du budget consacré au cofinancement des primes d'assurance, des types de productions aidées et des critères de variation du taux de subvention.

En 2008, l'État a ainsi consacré 280 millions d'euros au financement du système, une somme bien supérieure à celle mobilisée dans notre pays. Cette enveloppe permet de subventionner 50 % en moyenne du coût total des polices d'assurance.

C'est un organisme public, l'Enesa, qui élabore le plan annuel d'assurances agricoles et, en concertation avec les professionnels et les assureurs, les conditions de souscription, le niveau des subventions et les modalités des polices. Par ailleurs, il établit les conditions techniques de culture et paie les subventions.

En 2008, le plan a étendu la couverture à la fièvre aphteuse et a compris de nouvelles lignes d'assurance comme les dommages aux cultures par la faune sauvage ou une assurance spécifique pour l'élevage porcin.

c) Des assureurs privés qui « jouent le jeu »

Le système espagnol d'assurance récolte doit aussi son efficacité aux assureurs, qui ont accepté une perte d'indépendance et leur engagement dans un dispositif de coassurance privé.

D'une part, Agroseguro est une société anonyme à laquelle a été confiée la gestion des 38 compagnies d'assurance participant au système. Elle élabore les prescriptions du modèle unique de contrat et verse à chaque compagnie une commission en fonction du nombre de polices signées.

D'autre part, Agroseguro est réassuré auprès d'un consortium d'assurances reconnu par les pouvoirs publics, mais agissant en tout point comme un opérateur privé.

d) Vers des outils assurantiels de gestion des crises de marché

L'Espagne souhaite aujourd'hui développer encore ce dispositif, en proposant des outils de gestion des crises de marché.

Trois possibilités sont actuellement à l'étude :

- des assurances prix, qui couvriraient la différence entre un prix de référence moyen fixé dans le contrat et le prix de marché,

- des assurances revenu, qui prendraient en charge la différence entre les coûts de culture et les revenus effectifs,

- des assurances destruction de production, qui permettraient une régulation des prix du marché par un contrôle de l'offre.

B. UN SOUTIEN CONSTANT DES POUVOIRS PUBLICS FRANÇAIS

1. La loi d'orientation agricole de 2006 : un soutien affirmé au développement de l'assurance récolte

La loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole avait prescrit le dépôt d'un rapport sur l'assurance récolte . Le Premier ministre M. Jean-Pierre Raffarin ayant chargé le député M. Christian Ménard de le rédiger, celui-ci a rendu son travail début 2004. Constatant que les exploitations agricoles tendent à devenir de plus en plus sensibles à des aléas climatiques dont l'intensité et la fréquence n'ont cessé d'augmenter ces dernières années, le rapport propose une nouvelle orientation vers une garantie protégeant une large palette de productions végétales et animales contre les principaux accidents climatiques (grêle, sécheresse, gel, pluie) et permettant de mutualiser les risques. Cette véritable assurance « multiproduits et multirisques » serait à même, selon le rapport, de se substituer à terme à un dispositif d'indemnisation par le fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA) jugé à la fois peu efficace, inégalitaire et financièrement contraint. En effet, le soutien aux exploitants agricoles ayant subi des pertes d'origine climatique reposait depuis plus de 40 ans sur les indemnisations publiques de ce fonds, seuls les dommages dus à la grêle étant alors largement assurés.

S'inspirant des conclusions de ce rapport, la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d'orientation agricole crée, dans ses articles 62 et 63 , un cadre institutionnel et règlementaire permettant le développement de mécanismes d'assurance récolte tout en conservant un système d'indemnisation public.

Afin d'assurer le développement de l'assurance contre les risques agricoles, lequel constitue -avec l'indemnisation des dommages non assurables d'importance exceptionnelle- l'un des deux objectifs du FNGCA, il est prévu, d'une part, une prise en charge partielle par le fonds des primes et cotisations d'assurance et, d'autre part, un dispositif relatif aux prêts.

S'agissant de la prise en charge des primes ou cotisations d'assurance , il est prévu que le fonds s'en charge pendant une période minimale de sept ans. Cette prise en charge est forfaitaire, dégressive et variable suivant l'importance du risque et la nature des cultures.

Des décrets pris en application de la LOA viennent depuis fixer, chaque année, les conditions de prise en charge par le FNGCA d'une partie des primes d'assurance et les modalités de versement de la somme 1 ( * ) .

S'agissant de l' encouragement aux prêts , il est prévu une prise en charge partielle par les fonds des intérêts des prêts pouvant être consentis aux victimes de calamités agricoles. Seules y sont éligibles les exploitations faisaient l'objet, au moment du sinistre, d'un contrat d'assurance couvrant l'un au moins des risques suivants : incendie de récoltes ou de bâtiments d'exploitation, grêle, mortalité du bétail, bris de machines.

Par ailleurs, la LOA prévoit une série d'autres mesures incitatives . A ce titre, elle :

- adapte le cadre législatif pour que cette innovation puisse être généralisée à toutes les productions agricoles ;

- instaure le Comité national de l'assurance en agriculture (CNAA) qui garantit un partenariat efficace entre les professionnels agricoles, l'État et les assureurs, notamment en reprenant les attributions de la Commission nationale des calamités agricoles, en particulier la gestion du FNGCA ;

- adapte la procédure des calamités agricoles afin d'en accélérer les délais dans les cas d'indemnisation des calamités agricoles pour les risques non encore assurables ;

- appelle des dispositifs adaptés à la spécificité et à la fragilité accrue au regard des aléas de toute nature de certains territoires (montagne, départements d'Outre-mer ...) ;

- étend le dispositif d'aide au développement de l'assurance aux départements d'Outre-mer.

2. Le travail de la commission : prévoir l'extension progressive de l'assurance récolte

En 1997 , MM. Jean-Paul Emorine et Marcel Deneux, alors tous deux membres de la commission des affaires économiques, avaient réalisé un rapport sur l'avenir de la PAC . Lors de son instruction, ils s'étaient rendus aux États-Unis et en Espagne, et en avaient rapporté l'expérience de mécanismes d'assurance récolte soutenus par les pouvoirs publics, alors quasi inconnus en France.

Ces documents, qui ont nourri la réflexion, ont permis la mise au point, presque dix ans plus tard, du dispositif incitatif inséré par le Gouvernement dans la loi d'orientation agricole de 2006 .

C'est dans cette loi que M. Gérard César, alors rapporteur du texte, a déposé et fait adopter -avec le soutien marqué de M. Jean-Paul Emorine, alors président de la commission des affaires économiques- un amendement prévoyant, à compter de l'entrée en vigueur de la loi, le principe d'une extension progressive de l'assurance récolte à l'ensemble des productions agricoles, dans des conditions fixées par décret.

Il est alors ressorti des débats que si le mécanisme incitatif prévu par le gouvernement dans la loi d'orientation devait favoriser le développement de l'assurance récolte, il restait en l'état insuffisant. En effet, il est apparu que seul un dispositif assis sur une assiette de cotisants aussi large que possible présenterait une réelle portée. Or, c'était justement le rôle d'une loi d'orientation que de fixer un objectif à atteindre sur le long terme. Il a été précisé au cours des débats que cette prescription demeurait en revanche indicative , et n'avait pas valeur d'obligation pour les agriculteurs, ceux-ci pouvant décider de souscrire ou non un contrat d'assurance.

Voté avec l'assentiment du gouvernement et devenu article 68 de ladite loi, cette disposition fait l'objet de décrets d'application chaque année, soit :

- le décret n° 2006-370 du 27 mars 2006 fixant pour 2006 les modalités d'application de l'article L. 361-8 du livre III du code rural en vue de favoriser le développement de l'assurance contre certains risques agricoles,

- le décret n° 2007-134 du 30 janvier 2007 fixant pour l'année 2007 lesdites modalités,

- le décret n° 2008-270 du 18 mars 2008 fixant pour l'année 2008 les mêmes modalités.

La même année, votre commission des affaires économiques est intervenue, durant l'examen du projet de loi de finances , pour sécuriser le financement du dispositif public de soutien au développement de l'assurance récolte, en faisant adopter un amendement cosigné par MM. Jean-Paul Emorine et Gérard César, ainsi que par M. Joël Bourdin, rapporteur spécial du budget de l'agriculture 2 ( * ) .

C. UN DISPOSITIF ACTUELLEMENT « AU MILIEU DU GUÉ »

La protection des récoltes contre les aléas repose sur plusieurs mécanismes dont la combinaison permet d'indemniser les agriculteurs contre la totalité ou une partie des dommages.

À un système d'assurance volontaire s'ajoute l'indemnisation par un fonds et des mécanismes de protection plus individuels.

1. Un système fondé sur une assurance volontaire

L'exploitant agricole dispose de plusieurs solutions fournies par des sociétés d'assurance privées. En fonction des productions protégées et des risques couverts, on peut répartir les contrats les plus couramment proposés en cinq catégories :

Production

Risques couramment couverts

Cultures fruitières

Grêle et vent

Grêle, gel et vent

Cultures maraîchères

Grêle et vent

Viticulture

Grêle, gel et vent

Grandes cultures

Grêle, gel, inondation et vent

Tous types de production

Assurance récolte : sécheresse, grêle, gel, inondation ou excès d'eau et vent

Tous ces contrats reposent sur la base du volontariat . L'agriculteur n'est contraint en aucune manière. S'il décide de s'assurer, il est libre de choisir l'assureur et le contrat qui lui conviennent.

L'assureur, quant à lui, détermine librement les clauses qu'il souhaite proposer dans le contrat, dans une limite fixée par le code des assurances : les contrats d'assurance garantissant ces dommages doivent inclure la protection contre les effets du vent 3 ( * ) .

Parmi ces contrats, le régime de l'« assurance récolte » proprement dite se distingue par la subvention publique dont il bénéficie. Cette subvention justifie un encadrement législatif et réglementaire des contrats.

a) Le principe d'une subvention limitée à une part de la prime d'assurance

Le code rural définit dans son article L. 361-8 le principe de l'assurance récolte et de la subvention dont elle bénéficie.

Cette subvention est prise en charge par le fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA), dont elle constitue la principale mission depuis la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006 : « Un fonds national de garantie des calamités agricoles est institué afin de financer les aides au développement de l'assurance contre les dommages causés aux exploitations agricoles. » 4 ( * )

Elle représente une part des primes ou cotisations d'assurance afférentes à des risques agricoles énumérés par décret. Elle peut dépendre de l'importance du risque et de la nature des cultures.

La prise en charge a une durée limitée dans le temps, mais au moins égale à sept ans. Le taux de prise en charge ne peut dépasser 50 % du montant de la prime au cours de la première année et 10 % lors de la dernière année de prise en charge.

Les collectivités locales peuvent apporter une aide complémentaire à celle de l'État, mais le total de la prise en charge de la prime par les autorités publiques ne peut dépasser la moitié de celle-ci, limite fixée au niveau communautaire.

Le principe de la subvention (code rural, article L. 361-8)

« En vue de favoriser le développement de l'assurance contre les risques agricoles énumérés par décret, le fonds prend en charge, pendant une période minimale de sept ans, une part des primes ou cotisations d'assurance afférentes à ces risques.

Cette prise en charge est forfaitaire, dégressive et variable suivant l'importance du risque et la nature des cultures.

Le décret prévu au premier alinéa détermine également les taux de cette prise en charge, sans toutefois que la participation du fonds puisse excéder 50 p. 100 de la prime au cours de la première année et 10 p. 100 de la prime au cours de la dernière année.

Pour l'application de ces dispositions, une section particulière du fonds est créée en recettes et en dépenses. Cette section est alimentée en recettes par une dotation provenant du budget de l'État. Une fraction de l'excédent annuel des ressources mentionnées à l'article L. 361-5 sur les dépenses d'indemnisation peut lui être affectée.

L'aide financière complémentaire, éventuellement consentie par les collectivités locales ou toute autre personne morale de droit privé ou de droit public ou toute personne physique, ne pourra venir en déduction de celle accordée par l'État. »

b) Deux types de contrats : par culture ou à l'exploitation

Le décret d'application prévoit que les contrats dont la prime est subventionnable par l'État peuvent relever de deux catégories :


• les contrats dits « par culture » prévoient une indemnisation pour une nature de récolte donnée lorsque la production constatée est inférieure à la production garantie.


• les contrats dits « à l'exploitation » assurent au moins 80 % de la superficie en cultures de vente de l'exploitation et au moins deux natures de récolte différentes.

c) Une indemnisation prenant en compte une franchise réglementée

Le contrat d'assurance doit comporter une franchise , dont le montant minimal est fixé par décret en application de l'article L. 361-8 du code rural. Le décret actuellement en vigueur est le décret n° 2008-270 du 18 mars 2008 5 ( * ) .

La prime subventionnable ne peut porter que sur un montant garanti faisant l'objet d'une franchise de 25 % pour les contrats par culture et de 20% pour les contrats à l'exploitation.

Autrement dit, si un contrat d'assurance comporte plusieurs garanties séparées, seules celles qui font l'objet de cette franchise peuvent voir leur prime subventionnée.

d) Taux de prise en charge et types de cultures concernées

Le décret du 18 mars 2008 précise le taux de prise en charge des primes d'assurance par le FNGCA. Ce taux est actuellement égal à 35 % de la prime ou cotisation nette d'impôt .

Le taux de prise en charge est porté à 40 % pour les jeunes agriculteurs . Rappelons que la qualification de « jeunes agriculteurs » est appliquée aux exploitants qui bénéficient, pour leur première installation, d'une dotation d'installation en capital ou de prêts à moyen terme spéciaux. Les conditions d'octroi de ces aides sont liées notamment à l'âge de l'exploitant, qui doit être inférieur à quarante ans, à la taille de son exploitation et à sa capacité professionnelle 6 ( * ) .

Ces taux sont susceptibles d'évoluer d'année en année, ce qui réduit la visibilité du marché pour les assureurs qui prennent en compte son niveau lorsqu'ils élaborent leurs contrats.

Le tableau suivant donne un aperçu de l'évolution du taux de prise en charge de la prime d'assurance décidée par un décret pris chaque année ou tous les deux ans sur le fondement de l'article L. 361-8 du code rural :

Années concernées

Risque couvert et taux de la subvention du FNGCA

1997 à 2001 7 ( * )

1° fruits (grêle): 7,5 %
2° légumes (grêle) : 7,5 %

2002 à 2004 8 ( * )

1° fruits (grêle) : 7,5 %
2° légumes (grêle) : 7,5 %
3° fruits (grêle et gel) : 25 %
4° vigne (grêle et gel) : 10 %
5° céréales et oléo-protéagineux (plusieurs risques climatiques, dont au moins à la fois la grêle, le gel et l'inondation, ainsi que l'excès d'eau à partir de 2003) : 10 %

2005 9 ( * )

1° à 5° : mêmes taux

Assurance récolte : une, deux ou plusieurs natures de récoltes contre plusieurs risques climatiques, dont au moins à la fois la sécheresse, la grêle, le gel et l'inondation ou l'excès d'eau : 35 %

2006 à 2008 10 ( * )

Assurance récolte : 35 %.

Depuis 2006, la subvention est recentrée sur l'assurance récolte (contrats garantissant une, deux ou plusieurs natures de récoltes contre plusieurs risques climatiques, dont au moins à la fois la sécheresse, la grêle, le gel et l'inondation ou l'excès d'eau), avec un taux de 35 %. Les autres contrats ne bénéficient plus d'une subvention à la prime.

2009 (indications fournies par le gouvernement)

Le taux de soutien serait à nouveau différencié selon le type de culture :
- arboriculture, viticulture : 40 %
- grandes cultures : 25 %

Rappelons que, en application de l'article L. 122-7 du code des assurances, le risque « vent » est automatiquement inclus dans l'ensemble de ces contrats.

À ces taux il convient d'ajouter une amélioration de taux pour les jeunes agriculteurs et, le cas échéant, une aide complémentaire des collectivités locales dans la limite de 50 % de la prime.

2. Un fonds pour les risques non assurables

Outre le rôle que nous venons de voir dans la subvention aux primes d'assurance récolte, le fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA) finance l'indemnisation des dommages matériels causés aux exploitations agricoles par les calamités agricoles .

Les calamités agricoles concernées sont définies par l'article L. 361-2 du code rural comme des dommages:

- non assurables ;

- d'importance exceptionnelle ;

- dus à des variations anormales d'intensité d'un agent naturel.

Le FNGCA  est alimenté par les agriculteurs (par le biais d'une contribution additionnelle aux primes d'assurance de leurs contrats d'assurance couvrant les dommages aux matériels et bâtiments et les risques de responsabilité civile) et par une dotation budgétaire de l'État .

Le taux de la contribution versée par les agriculteurs et destinée au fonds est de 11%. Ce taux devrait demeurer stable en 2009 alors même que les grandes cultures, selon les projets du Gouvernement, ne devraient plus être indemnisées par le fonds en raison de la présence de produits assurantiels adaptés pour cette filière.

Le fonds intervient après reconnaissance d'une calamité agricole par le ministre chargé de l'agriculture. Le niveau des pertes doit représenter 27 % de la valeur de la récolte et 14 % de la production brute totale de l'exploitation. Le fonds indemnise en moyenne 30% des dommages.

L'accès au fonds est subordonné pour l'exploitant à la souscription d'un contrat d'assurance contre l'un au moins des risques reconnus par arrêté interministériel comme « normalement assurables dans le cadre de la région ». Ainsi, l'exploitant propriétaire pourra bénéficier des indemnisations du fonds s'il possède un contrat d'assurance incendie sur les bâtiments 11 ( * ) .

Le fonds a versé les paiements suivants ces dernières années 12 ( * ) :

millions d'€

2003

2004

2005

2006

moyenne

Indemnités versées

422

407

90

236

289

Subvention de l'État

259

197

8

121

144

Contributions professionnelles

93

92

90

90

91

Un fonds de garantie des calamités agricoles existe également pour les départements d'outre-mer.

3. Des mécanismes complémentaires pour améliorer la couverture

Outre l'assurance et le FNGCA, l'agriculteur dispose d'autres outils pour se prémunir contre des aléas. Certains produits financiers leur permettent par exemple de se prémunir contre les variations de cours en prenant des positions sur les marchés à terme de produits agricoles.

La déduction pour aléas (DPA), mise en place en 2002 et étendue par la loi d'orientation agricole, est une épargne de précaution , mobilisable par l'exploitant afin de faire face aux aléas climatiques, économiques, sanitaires ou familiaux. Les sommes épargnées viennent en déduction du bénéfice imposable. L'imposition de ces sommes intervient au bout de sept ans 13 ( * ) .

La DPA présente plusieurs avantages :

- elle ne se limite pas aux risques climatiques , mais offre également une indemnisation en cas de chocs divers tels qu'une variation brutale des prix, une crise sanitaire ou un événement familial qui affectent les revenus de l'exploitation

- en se combinant avec l'assurance récolte, elle prend en charge la franchise non couverte par celle-ci et permet donc une indemnisation totale.

La déduction pour aléas suppose toutefois que l'exploitation a dégagé des bénéfices au cours des années passées et ne peut donc pas convenir pour toutes les exploitations. Elle est adaptée pour les risques « normaux » mais pas pour les « coups durs » exceptionnels.

De plus, le plafond de la DPA est commun avec celui de la déduction pour investissements (DPI). Or les exploitants privilégient fréquemment la DPI et ne peuvent alors avoir recours à la DPA.

4. La nécessité de préserver une « CMU » de l'exploitation agricole

Le système du fonds national de garantie des calamités agricoles offre un filet de sécurité pour tous , indépendamment des initiatives prises à titre individuel (DPA, assurance).

Le rapport du sénateur Dominique Mortemousque soulignait que, pour les responsables des organisations agricoles, il convient de « ne pas lâcher la proie pour l'ombre » : le régime du FNGCA, pour complexe qu'il soit et imparfait notamment dans ses délais, a pu faire ses preuves, ce qui n'est pas encore le cas d'un système assurantiel pur.

Le fonds doit continuer à exister pour indemniser les pertes de fonds ou certaines cultures non assurables. Au-delà de cette utilisation, il constitue un mécanisme utile qu'il peut être utile de réactiver à l'avenir.

Votre rapporteur considère qu'il est impératif de prendre en compte la situation de toutes les exploitations, notamment celles qui, pour des raisons liées à leur petite taille ou à leurs choix d'exploitation, ne sont pas couvertes par des contrats d'assurance. Pour ces exploitations le système actuel joue un rôle précieux de « CMU » de l'agriculture, accessible à tous .

Une extinction pure et simple du fonds pourrait les mettre dans une situation très difficile en cas de sinistre dû à des aléas climatiques. L'agriculture est une activité entrepreneuriale, mais elle joue également dans notre pays un indispensable rôle social et environnemental. Il convient donc de prendre garde aux conséquences pour les exploitants qui résulteraient d'un basculement complet et non maîtrisé dans le système du marché des assurances.

II. UN INSTRUMENT DE GESTION DES RISQUES RESTANT A CONFORTER

A. UN DÉVELOPPEMENT INÉGAL DE L'ASSURANCE RÉCOLTE SELON LES FILIÈRES

Après un départ rapide en 2005, l'assurance récolte s'est développée de manière variable selon les filières et, dans l'ensemble, relativement limitée.

En 2005 14 ( * ) , 57 900 contrats ont été souscrits. Ils couvraient 3 milliards d'euros de capitaux assurés et représentaient 82 millions de primes, dont 50 millions subventionnées et 17,4 millions d'aide.

Les grandes cultures représentaient l'essentiel des contrats. Les autres cultures (fruits, légumes, vigne) étaient assurées à moins de 1%.

En 2006, l'assurance récolte concernait 66 300 contrats (en hausse de 14,5%), pour 3,6 milliards d'euros de capitaux assurés et 97 millions d'euros de primes, dont 60 millions subventionnées et 21 millions d'aide.

Deux ans après la création de l'assurance récolte, 20% des exploitations professionnelles étaient concernées . Elles représentaient 15 ( * ) :

- 26,1 % pour les grandes cultures ;

- 10,2 % pour la vigne ;

- 1,7 % pour les cultures fruitières.

Les contrats par culture représentaient la quasi-totalité des contrats souscrits (65 925 contre 369, sur un total de 66 294).

En 2007, la superficie couverte avait poursuivi sa progression, sauf pour les cultures fruitières :

- 27 % pour les grandes cultures ;

- 12,3 % pour la vigne ;

- 0,93 % pour les cultures fruitières ;

- 7,8 % pour le maraîchage.

Les autorisations de paiement et les crédits de paiement ouverts pour le dispositif d'assurance récolte sont de 32 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2009.

B. UNE COMPATIBILITÉ NÉCESSAIRE AVEC LES RÈGLES INTERNATIONALES ET EUROPÉENNES

1. Le classement en « boîte verte » à l'OMC

Aux termes des accords de Marrakech de 1994 , les subventions sont généralement classées en catégories, désignées par des boîtes de couleur selon leur compatibilité aux règles du commerce international. En matière agricole, ces boîtes sont de trois couleurs :

- la « boîte verte » contient les aides autorisées. Il s'agit d'aides directes découplées non liées à la production, ni au marché, entraînant des effets « distorsifs » sur les échanges nuls ou minimes. Elles ne sont soumises à aucun plafond,

- la « boîte bleue » contient les aides simplement tolérées. Il s'agit d'aides en partie découplées et attribuées aux producteurs dans le cadre de programmes de limitation de la production. Elles seront prochainement plafonnées,

- la « boîte orange » contient les aides à éviter ou à réduire. Il s'agit des soutiens directement liés au volume de production ou aux prix, entraînant des distorsions dans les échanges. Elles sont soumises à un plafond budgétaire et à un engagement de réduction.

Au titre des mêmes accords de Marrakech, les assurances récolte et revenu sont classées dans la catégorie des soutiens internes, dans la mesure où elles font l'objet d'une intervention publique, et relèvent des boîtes verte, bleue ou orange selon leur effet de distorsion estimé sur la production et les échanges. Si plusieurs membres de l'OMC notifient des dispositifs assurantiels dans les boîtes orange et verte, les États-Unis et l'Europe n'en ont pour l'instant pas notifié.

Ces assurances doivent respecter, en outre, des critères spécifiques tels que la subordination à un niveau minimal de perte de revenu ou de récolte de 30 % de la moyenne des trois dernières années, et le non dépassement d'un plafond maximal d'indemnisation fixé à 70 % de la perte.

Le dernier projet d'accord agricole dans le cadre du cycle de Doha , présenté le 10 juillet 2008, prévoyait notamment des règles assouplies en cas d'indemnisation suite à des destructions d'animaux ou de récolte pour des raisons sanitaires ou phytosanitaires, ainsi qu'une clarification rédactionnelle visant à mieux distinguer les programmes d'assurance récolte des versements réalisés en cas de catastrophe naturelle.

En l'état actuel des négociations, le dispositif de soutien communautaire à l'assurance récolte respecte totalement le cadre règlementaire fixé par l'OMC.

2. Les perspectives européennes dans le cadre du « bilan de santé » de la PAC

Sur demande française, l'assurance récolte a été inscrite au « bilan de santé » de la PAC, qui doit être voté d'ici la fin de l'année. La Commission européenne propose ainsi d'utiliser le cadre général du régime des soutiens spécifiques pour favoriser le développement de l'assurance récolte, mais aussi d'un fonds de mutualisation en cas de maladies animales ou végétales.

Le débat s'annonce cependant très vif, l'Allemagne contestant le financement, l'Espagne s'opposant aux fonds mutualisés et le Danemark préférant une organisation des filières agricoles sans soutien public.

a) La possibilité d'aider les dispositifs assurantiels dans le cadre de « soutien spécifique » (article 68)

Dans ses propositions sur le « bilan de santé » de la PAC, rendues publiques le 20 mai 2008, la Commission européenne traite de façon spécifique des questions de gestion des risques.

L'actuel article 69 du règlement (CE) n° 1782/2003 sur les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs permet aux États membres de réattribuer jusqu'à 10 % des aides qu'ils perçoivent au titre du premier pilier pour financer des mesures liées à la protection ou à l'amélioration de l'environnement, ainsi qu'à l'amélioration de la qualité et de la commercialisation des produits agricoles.

La Commission propose de réviser cet article en vue de donner des marges de manoeuvre plus larges aux États membres. A ce titre, un soutien à certaines mesures de gestion des risques -programmes d'assurance récolte en cas de catastrophe naturelle et fonds de mutualisation sanitaire- serait prévu, à certaines conditions. La Commission souligne ainsi que « compte tenu de l'importance croissante d'une gestion efficace des risques, il importe de donner aux États membres la possibilité de prendre en charge une partie des primes d'assurance récolte payées par les agriculteurs ou de compenser financièrement certaines pertes économiques liées à des maladies animales ou végétales ».

Le nouveau cadre juridique européen des systèmes d'assurance et d'indemnisation serait désormais réparti en trois nouveaux articles : l'article 68, qui en fixe le cadre général, l'article 69, qui traite spécifiquement des assurances récoltes, et l'article 70, relatif au fonds de mutualisation en cas de maladies animales et végétales.

L' article 68 , fixant donc les règles générales du régime des soutiens spécifiques, permet aux États de décider, pour le 1er août 2009 au plus tard, d'utiliser, à compter de 2010, jusqu'à 10 % de leurs plafonds nationaux au titre du premier pilier, en vue d'octroyer un soutien aux agriculteurs :

- . sous la forme de contributions au paiement des primes d'assurance récolte, conformément aux conditions prévues à l'article 69,

- . sous la forme de contributions à des fonds de mutualisation en cas de maladies animales ou végétales, conformément aux conditions prévues à l'article 70.

b) Les dispositions propres à l'assurance récolte (article 69)

L'article 69, consacré spécifiquement à l'assurance récolte, autorise les États membres à octroyer une contribution financière au paiement des primes d'assurance récolte couvrant les dommages causés par les phénomènes climatiques défavorables.

En relèvent les phénomènes climatiques assimilables à une catastrophe naturelle, comme le gel, la grêle, le verglas, la pluie ou la sécheresse, et détruisant plus de 30 % de la production annuelle moyenne d'un agriculteur donné au cours des trois années précédentes (ou des cinq, en retirant la plus faible et la plus forte).

La contribution financière octroyée par agriculteur est fixée à 60 % de la prime d'assurance due, les États membres pouvant décider de porter cette contribution à 70 % en fonction des conditions climatiques ou de la situation du secteur concerné.

L'indemnisation de l'assurance récolte n'est octroyée que lorsque le phénomène climatique défavorable a été reconnu comme tel par l'autorité compétente de l'État membre concerné.

Ce soutien fait l'objet d'un cofinancement. La participation communautaire y est limitée à 40 % des 60 ou 70 % de prise en charge par l'État membre.

L'assurance récolte ainsi proposée par la Commission est calibrée pour être déclarée en boîte verte à l'OMC, ce qui n'est pas le cas du système actuel français d'assurance récolte. Cependant, une assurance chiffre d'affaires pouvant être considérée comme liée aux prix par l'OMC, l'idée en a été écartée fermement par la commissaire européenne à l'agriculture.

c) Les dispositions relatives au fonds de mutualisation en cas de maladies animales et végétales (article 70)

Cet article 70 permet aux États membres de financer des fonds de mutualisation assurant le paiement aux agriculteurs d'indemnités destinées à couvrir les pertes économiques découlant de l'apparition d'un foyer de maladie animale ou végétale.

Ces dernières correspondent à l'ensemble des coûts supplémentaires supportés par un agriculteur du fait de la réduction de l'approvisionnement du marché concerné ou de toute perte de production significative. Toutefois, ne seraient pas prises en charge les crises sanitaires les plus graves, remettant en cause l'équilibre même du marché, lesquelles relèveraient de la responsabilité des institutions européennes et feraient l'objet d'un régime juridique spécifique.

Si le capital social du fonds doit être constitué par les contributions des agriculteurs affiliés, l'État peut donc contribuer au financement :

- des coûts administratifs liés à l'établissement du fonds,

- du remboursement du capital et des intérêts afférents à des emprunts commerciaux contractés par le fonds aux fins du paiement des indemnités aux agriculteurs,

- des montants prélevés sur le capital social du fonds pour payer les indemnités octroyées aux agriculteurs.

Cette contribution publique ne peut excéder 60 % -voire 70 %, dans certains secteurs si leur situation l'exige- des sommes prises en charge. Le taux de cofinancement communautaire en est fixé à 40 %.

C. UN ENGAGEMENT DE L'ÉTAT DEVANT ÊTRE RESPECTÉ

Votre rapporteur déplore que le sous-engagement financier de l'État en matière d'assurance récolte , malgré les perspectives ambitieuses fixées lors de sa mise en place en 2005, s'est doublé d'une sous-dotation du FNGCA , pourtant censé assurer un minimum d'indemnisation aux agriculteurs dans l'attente d'une véritable extension du dispositif assurantiel.

1. Une absence chronique de dotation du FNGCA en loi de finances initiale

D'une façon récurrente, la dotation de l'État au FNGCA ne fait pas l'objet d'une inscription de crédits en loi de finances initiale.

Comme le rapporteur spécial au budget « agriculture » de la commission des finances, M. Joël Bourdin, a eu l'occasion de le faire remarquer à plusieurs reprises, cette absence constitue une sous-budgétisation patente, dans la mesure où l'article L. 361-5 du code rural dispose que les ressources du FNGCA sont composées d'une « subvention inscrite au budget de l'État et dont le montant sera au moins égal au produit des contributions » acquittées par les exploitants agricoles 16 ( * ) .

Ces contributions représentant, pour l'année 2008, un montant d'environ 87 millions d'euros, c'est autant de crédits publics qui auraient dû figurer à l'action 2 « gestion des aléas de production » du programme n° 227 « valorisation des produits, orientation et régulation des marchés » de la mission « agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » de la loi de finances initiale.

Cette pratique est quasi systématique : le FNGCA n'a fait l'objet d'aucune inscription de crédits en loi de finances initiale en 2003, 2004, 2006 et 2007, années au cours desquelles la subvention de l'État s'est pourtant in fine élevée, respectivement, à 249 millions d'euros, 197 millions d'euros, 114 millions d'euros et 62 millions d'euros. Les montants nécessaires ont donc été systématiquement dégagés en gestion, au prix d'exercices de « haute couture budgétaire » et au détriment d'autres actions qui se sont vues ponctionnées d'autant.

2. Un soutien en deçà des enjeux du développement de l'assurance récolte

Dès la loi de finances pour 2006 , et comme cela a été déjà évoqué, la commission des affaires économiques avait dû intervenir pour que soient réaffectés, par transfert entre programmes, 2,5 millions d'euros au financement de l'assurance récolte 17 ( * ) . Il était en effet apparu que l'enveloppe consacrée par le gouvernement au soutien du dispositif n'était pas à la hauteur du mécanisme de soutien à l'assurance récolte, pourtant intégré par le gouvernement dans la loi d'orientation agricole adoptée de façon quasi concomitante. Les 20 millions d'euros de crédits initiaux avaient donc été portés à 22,5 millions d'euros .

Dans la loi de finances pour 2007 , le dispositif d'incitation au développement de l'assurance récolte voyait sa dotation portée à 30 millions d'euros .

Dans la loi de finances pour 2008 , environ 32 millions d'euros de crédits ont été consacrés à l'assurance récolte. Ces montants correspondaient à la prise en charge par l'État, à hauteur de 35 % (40 % pour les jeunes agriculteurs), des primes ou cotisations des assurances couvrant les récoltes contre les risques climatiques.

Si le montant global des crédits affectés à l'assurance récolte dans la loi de finances pour 2009 reste inchangé, à 32 millions d'euros , le soutien de l'État à l'assurance récolte varie selon les productions.

Les secteurs de l'arboriculture et de la viticulture font l'objet d'un soutien majoré de 5 points. Le taux de soutien à l'assurance récolte y est ainsi porté à hauteur de 40 % du montant de la prime dans le cas général (+ 5 points pour les jeunes agriculteurs).

En revanche, il est prévu de réduire de 35 à 25 % (+ 5 points pour les jeunes agriculteurs) le taux de subventionnement des grandes cultures, alors même qu'elles vont sortir du champ du FNGCA.

Les autres conditions sont maintenues : franchises subventionnables fixées à 25 % minimum pour les contrats à la culture et 20 % minimum pour les contrats à l'exploitation.

Le programme triennal de dépenses publiques pour l'assurance récolte 18 ( * )

Année couverte

2007

2008

2009

2010

Financement national 19 ( * )

Loi de finances pour 2008

Projet de loi de finances pour 2009

Prévision de dépenses pour 2010

Prévision de dépenses pour 2011

31,834

32,0

38,1

43,4

Financement communautaire attendu

-

-

-

56,0

Total

31,834

32,0

38,1

99,5

Source : ministère de l'agriculture et de la pêche

Lors du comité national de l'assurance en agriculture du 16 septembre 2008, les organisations professionnelles agricoles ont regretté avec insistance la diminution du taux de soutien aux assurances et se sont interrogées sur l'avenir de l'arboriculture et de la viticulture.

Pour la campagne 2009, l'enveloppe budgétaire consacrée à l'assurance récolte sera précisée dans la loi de finances pour 2010 , au vu du développement de l'assurance et du prix des polices 20 ( * ) . Il est actuellement envisagé, à titre prévisionnel, une somme de 59 millions d'euros constituée à la fois par dotation budgétaire et par redéploiement du FNGCA. En effet, la sortie des grandes cultures du FNGCA représentera une économie de 27 millions en 2009, ce qui viendra augmenter les 32 millions de dotation initiale pour atteindre cette somme de 59 millions.

Le Gouvernement indique attendre, pour 2010, un soutien financier d'origine communautaire . Il pourrait en effet ressortir du « bilan de santé » de la PAC, actuellement en examen, des mesures d'aide au développement de l'assurance récolte. Dans le projet actuel, le soutien public, qui pourrait s'élever à 60 -voire 70 %- du coût de la police d'assurance, serait pris en charge aux deux tiers par l'Union européenne et pour le reste par l'État membre.

En attendant ces hypothétiques contributions complémentaires au financement des primes, les volumes affectés par les pouvoirs publics au développement de l'assurance récolte ne sont pas suffisants au regard des objectifs fixés en la matière . Selon certains des responsables auditionnés par votre rapporteur, les objectifs de taux de pénétration fixés dans les indicateurs du ministère en charge de l'agriculture sont inatteignables en l'état actuel des crédits y étant consacrés.

Or, tous les pays ayant voulu faire de l'assurance récolte l'instrument central de gestion des risques ont mis en place de véritables mesures incitatives financées sur fonds public pour « amorcer » le système et lui faire atteindre un effet de masse. C'est loin d'être le cas aujourd'hui dans notre pays, où les pouvoirs publics ne semblent pas décidés à « donner le coup de rein » nécessaire au décollage de l'assurance récolte.

Comme l'a souligné le Crédit agricole, pose aujourd'hui surtout problème « l'incertitude fondamentale sur le taux de soutien public, qui peut être réduit pour entrer dans une enveloppe budgétaire donnée. Cet élément est contraire à toute politique de développement rapide ». Et ainsi que le mentionnait notre collègue Dominique Mortemousque dans son rapport sur le sujet, « la bonne progression de l'assurance récolte demande un engagement constant et résolu de l'État », et ce notamment « par le budget qu'il y consacre ».

D. LA PERTINENCE D'UNE APPROCHE GLOBALE DES ALÉAS

Face au désengagement des pouvoirs publics -à l'échelle nationale comme européenne- et à l'augmentation tendancielle des risques en agriculture, les mécanismes assurantiels, relevant d'une initiative et d'une responsabilité personnelle des exploitants, ont vocation à prendre une place de plus en plus importante et devenir des instruments privilégiés de gestion des risques.

Dès lors, leur approche, qui a déjà considérablement évolué depuis les premières polices consacrées uniquement au risque « grêle », doit continuer de s'étoffer et devenir aussi globale que possible, pour donner naissance à des produits complets et adaptés aux besoins. Il y aurait lieu également de substituer la dénomination d'« assurance aléas » à celle, aujourd'hui couramment utilisée, d'« assurance récolte ».

Ainsi, l'on peut s'interroger sur la pertinence d'une couverture assurantielle des risques sanitaires , dont la survenance s'est considérablement accrue ces dernières années du fait de la globalisation des échanges. Si la création d'une section y étant consacrée au sein du FNGCA est prévue, ainsi que celle d'un fonds à l'échelle européenne, l'idée de se prémunir contre ce type de risque en souscrivant une police d'assurance n'est pas à écarter, du moins pour une part complémentaire à celle qui serait couverte par ces dispositifs.

Ensuite, la mise en place d'une assurance chiffre d'affaires peut d'ores et déjà être évoquée. Un tel produit va au-delà de l'assurance récolte puisqu'il vise à garantir un revenu annuel net par hectare et par culture aux entreprises agricoles. Il présente un intérêt certain puisque les soutiens par les prix et les aides susceptibles d'être accordées lorsque les prix tombent en dessous d'un seuil ne sont plus autorisés depuis l'accord agricole de l'Uruguay round et les pressions en faveur du « découplage » des aides directes.

Plusieurs produits de ce type ont ainsi été commercialisés avec succès au Canada et aux États-Unis. En France, des compagnies d'assurance ont indiqué y travailler actuellement. Si la priorité reste le développement du système de l'assurance récolte, il ne faut donc pas écarter l'idée d'un instrument propre à garantir le revenu des exploitants, qui pourrait venir constituer -comme c'est le cas aux États-Unis- un « troisième niveau » de protection contre les risques, après un premier niveau constitué par un « matelas de sécurité » et un second correspondant à l'assurance récolte classique.

A cet égard, l'échéance de 2013 pourrait être intéressante pour dresser un premier bilan du développement de l'assurance récolte et s'interroger plus profondément sur l'opportunité de la relayer par un mécanisme d'assurance plus globalisé. Il faudra alors, il est vrai, vaincre les réticences de la commissaire européenne à l'agriculture, qui s'est prononcée contre un tel système lors des discussions préparatoires au « bilan de santé » de la PAC.

III. LE CONTENU DE LA PROPOSITION DE LOI ET LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. UN DÉVELOPPEMENT NÉCESSAIRE DE L'ASSURANCE RÉCOLTE

1. L'extension de principe de l'assurance récolte prônée par la proposition de loi

Les auteurs de la proposition de loi font valoir, dans leur exposé des motifs, que la dernière loi d'orientation agricole « a renforcé l'assurance récolte en jetant les bases de sa généralisation progressive à l'ensemble des productions agricoles ».

Ils soulignent cependant aussitôt que seulement 10 % environ des exploitants sont aujourd'hui couverts, et ce presque exclusivement en grandes cultures. Les arboriculteurs et les viticulteurs, font-ils remarquer, sont peu protégés, alors que leurs productions sont plus fragiles.

Une extension de l'assurance récolte permettrait, selon les auteurs de la proposition de loi, « d'élargir l'assiette de cotisants » et, mécaniquement, de réduire le niveau des primes et de rendre l'assurance accessible à un plus grand nombre d'exploitants.

Aussi l'article 1 er du texte prévoit-il que l'assurance récolte est « étendue à l'ensemble des productions agricoles dans des conditions fixées par décret ».

2. La nécessité aujourd'hui d'atteindre une masse critique

Votre commission des affaires économiques souscrit entièrement à l'objectif d'extension de l'assurance récolte posé par la proposition de loi.

Cet objectif, cela a été dit, a déjà été inscrit dans le droit positif lors du vote de la dernière loi d'orientation agricole . Ne serait-ce qu'à cet égard, les auteurs de la proposition de loi ont donc déjà en partie satisfaction.

Reste que si le principe d'une extension progressive de l'assurance récolte est aujourd'hui acquis, et a même force de loi, l'examen de la couverture assurantielle du monde agricole montre qu'il est loin d'être acquis en pratique . Ainsi qu'il a été mentionné, seul un dixième environ des exploitants a aujourd'hui recours à ce procédé.

Il est donc impératif que ce mécanisme soit aujourd'hui réellement étendu , et ce pour plusieurs raisons :

- la « sortie » progressive du FNGCA d'un nombre croissant de productions laissera, à terme, les exploitants sans autre choix que de se couvrir par des polices d'assurance s'ils souhaitent se protéger d'aléas que la solidarité nationale ne prendra plus en charge ;

- l'assurance récolte, pourvu qu'elle respecte certaines conditions, est compatible avec les règles du commerce international et peut être, à ce titre, rangée dans la « boîte verte » de l'OMC ;

- elle fait l'objet d'une reconnaissance et d'un réel soutien des instances communautaires, qui sont en passe d'ouvrir plus largement le mécanisme de l'ancien article 69 afin, notamment, de la promouvoir par un soutien public européen ;

- comme le font observer les auteurs de la proposition de loi, le recours massif à ce mécanisme tendra à augmenter l'assiette des cotisations, donc à faire baisser le niveau moyen des primes et ainsi à le rendre plus accessible et plus protecteur pour le monde agricole ;

- le renforcement de l'intensité et de la fréquence des risques de toute sorte -naturels, mais aussi sanitaires ou économiques- dû à la modification progressive du climat et à l'accroissement des échanges mondiaux rend indispensable, dans le secteur agricole, l'existence d'un instrument à même de les gérer et répondant à une logique d'entreprise.

B. UN CARACTÈRE OBLIGATOIRE ENCORE PRÉMATURÉ

1. L'objectif de la proposition de loi : rendre l'assurance obligatoire

La proposition de loi qui est présentée à l'examen de notre commission prévoit de rendre l'assurance récolte obligatoire.

MM. les sénateurs Collin et Baylet estiment que « le régime dit des « calamités agricoles » souffre de nombreuses limites. En effet, la faiblesse des indemnités, la lenteur et la complexité des procédures rendent ce dispositif insuffisant . » Ils constatent que seuls 10% des exploitations ont conclu des contrats d'assurance récolte, principalement pour les grandes cultures, et notent que les arboriculteurs et les viticulteurs sont peu protégés, en dépit de la fragilité de leurs exploitations.

Donner à l'assurance récolte un caractère obligatoire permettrait d'élargir l'assiette de cotisants, selon un principe de solidarité face aux aléas climatiques.

2. Une mesure dont la mise en oeuvre soulèverait de nombreuses difficultés

Si l'assurance obligatoire paraît être un moyen efficace d'assurer la mutualisation la plus large du risque, elle se heurte à plusieurs objections théoriques et pratiques . Il est certes fréquent en France d'obliger des particuliers ou des professionnels à s'assurer, mais cette obligation concerne habituellement des situations où la responsabilité à l'égard d'un tiers est en jeu. Ce n'est pas le cas de l'assurance récolte, puisque la seule victime du sinistre, en absence d'assurance, est l'exploitant lui-même. L'assurance ne devrait-elle pas demeurer un choix d'entrepreneur, tout en étant encouragée par les politiques publiques ?

Une obligation d'assurance pose également des problèmes pratiques, liés à l'état du marché des assurances : celui-ci n'offre pas aujourd'hui des produits adaptés aux conditions d'exploitation de l'ensemble des agriculteurs.

a) Les assurances obligatoires, une exception française

L'idée d'une assurance obligatoire a longtemps été exclue du débat national : le choix de se protéger, semblait-il, devait rester individuel et toute contrainte en ce domaine aboutirait à déresponsabiliser les individus. C'est en 1910, avec la loi instituant les retraites ouvrières et paysannes, que l'autorité publique a obligé pour la première fois une partie de la population à souscrire à un système d'assurance.

Par la suite, les assurances obligatoires se sont largement développées, au point qu'on en a dénombré plus de 90 21 ( * ) . Or seule la France, parmi les pays de l'OCDE, a pris soin de rendre obligatoire la souscription d'une assurance dans un nombre de situations aussi variées.

Il ne s'agit pas simplement d'une tendance nationale à multiplier les règlementations. C'est aussi un objectif d'efficacité et de justice : la mutualisation des risques doit s'appuyer sur l'assiette la plus large possible de cotisants. L'obligation de s'assurer est alors un moyen d'arriver à une meilleure indemnisation.

Toutefois, on ne doit pas oublier qu'elle constitue une contrainte pour les individus et, à ce titre, qu'elle doit être justifiée par une raison particulière, par exemple la garantie des dommages causés par l'assuré à des tiers.

b) L'obligation de s'assurer est liée le plus souvent à une responsabilité à l'égard des tiers

À de rares exceptions près, les assurances obligatoires sont celles qui concernent la responsabilité de l'assuré à l'égard des tiers .

Un automobiliste lors d'un accident, un constructeur après la livraison d'un immeuble, mais aussi le locataire d'un appartement, l'écolier, l'organisateur de voyages, le professionnel qui exerce une activité juridique et bien d'autres personnes encore sont obligés de s'assurer contre les dommages qu'ils risquent de causer.

Ont ainsi été instituées l'assurance de responsabilité civile automobile, l'assurance contre les risques locatifs qui couvre les dommages causés par le locataire au propriétaire, l'assurance scolaire ou l'ensemble des assurances qui conditionnent l'accès à une profession.

Ces obligations ont un fondement : il s'agit d'être certain que la victime bénéficiera d'une indemnisation effective, même lorsque le montant de celle-ci dépasse largement les capacités financières du responsable. La mutualisation exercée par l'assureur offre la certitude que les dommages pourront être réparés sur le plan civil.

Il existe également des assurances obligatoires lorsqu'il s'agit de couvrir un risque d'une nature particulière (assurance des exploitants et travailleurs agricoles non-salariés contre les accidents du travail et les maladies professionnelles 22 ( * ) ) ou de faciliter les remboursements (assurance «dommages-ouvrage » qui garantit, avant d'avoir déterminé les responsabilités éventuelles, les malfaçons pouvant se révéler après la construction d'un bâtiment 23 ( * ) ).

c) L'assurance devrait rester une décision prise librement par l'exploitant

L'assurance récolte n'est pas une assurance responsabilité, puisqu'elle couvre les dommages causés à l'assuré et non à des tiers . Ce n'est donc pas un impératif de protection des tiers qui pourrait justifier le caractère obligatoire de cette assurance.

On peut donc se demander, même si on partage le souhait de donner une efficacité maximale à l'assurance récolte, si la contrainte à l'égard des agriculteurs n'est pas un moyen disproportionné pour parvenir à cet objectif.

L'assurance récolte est un choix que prend un professionnel en fonction de critères objectifs, liés au montant de la prime et au risque effectif de survenance du sinistre. L'État peut intervenir en participant au paiement de la prime, mais il revient à la responsabilité individuelle de s'assurer ou non lorsqu'un tiers n'est pas en cause.

d) Des conséquences financières très importantes pour l'État

Le budget actuellement prévu pour le FNGCA, égal à 32 millions d'euros par an, serait très insuffisant si l'assurance devenait obligatoire pour l'ensemble des exploitations agricoles. L'impact sur les finances publiques serait d'autant plus élevé que la participation de l'État, qui est proportionnelle aux primes d'assurances, serait plus importante en valeur absolue pour les exploitants qui renoncent actuellement à l'assurance en raison de l'importance des primes.

À titre d'exemple, l'Espagne dépense cette année 280 millions d'euros au titre de l'assurance récolte, alors que 50% des exploitations seulement sont assurées.

e) La nécessité d'une réassurance publique

Le président-directeur général de la Caisse centrale de réassurance (CCR) a indiqué à votre rapporteur que le besoin de réassurance, en cas de mauvaise année, pourrait se chiffrer à plusieurs milliards d'euros. Or la capacité de réassurance privée est actuellement de 300 à 700 millions d'euros, sans prendre en compte les effets de la crise financière actuelle qui pourrait affecter les actifs des compagnies d'assurance.

Une assurance récolte obligatoire impliquerait donc la mise en place d'un engagement de l'État pour la réassurance du secteur , comme l'avait demandé votre rapporteur lors de l'examen du projet de loi d'orientation agricole le 7 novembre 2005. La CCR pourrait proposer, avec la garantie de l'État, une offre de réassurance complémentaire à celle des sociétés privées du secteur. L'intervention de la CCR est soumise à une autorisation législative.

Notons ici encore que l'État offre une garantie de réassurance en Espagne et aux États-Unis. Il s'agit d'une condition indispensable à un engagement massif des assureurs et à la généralisation de l'assurance récolte à une majorité d'exploitations.

f) L'assurance récolte, un marché qui n'est pas encore arrivé à maturité

Il est également indispensable, avant de rendre une assurance obligatoire, de vérifier que le marché y est préparé . Une telle réforme ne peut produire d'effets que si des contrats sont effectivement proposés, à des conditions raisonnables, à tous les producteurs, quelles que soit leur taille, leur région et leur filière d'activité.

Or on a vu que la situation est fortement différenciée selon les cultures. Si les grands céréaliers ont à leur disposition des possibilités de couverture dont ils font largement usage, ce n'est pas le cas des producteurs de cultures fourragères : les risques particuliers, notamment de sécheresse, liés à cette activité n'ont pas permis jusqu'à présent de distribuer sur une grande échelle des produits assurantiels adaptés. Par ailleurs, certains exploitants ne s'assurent pas contre la grêle parce que celle-ci survient si rarement que le montant des primes est disproportionné par rapport aux risques. Enfin, les contrats ne sont pas toujours adaptés aux risques, comme l'ont constaté de nombreux arboriculteurs de la Drôme qui n'ont pu recevoir une indemnisation de leur assureur après les gelées survenues au mois de mars dernier.

La solution consistant à proposer un contrat d'assurance unique, quelle que soit la culture ou la région, paraît peu réaliste en raison de la très grande hétérogénéité des risques. Par un phénomène d'anti-sélection, certains assureurs attireraient, par des primes faibles, les exploitants qui présentent le risque le plus bas, tandis que les autres n'auraient accès qu'à des contrats proposant des conditions beaucoup moins favorables.

Il conviendrait aussi de vérifier, région par région, que les diverses catégories d'exploitations ne sont pas « captives » d'une offre unique : chacun devrait avoir accès à plusieurs offres d'assurance afin de ne pas être obligé d'accepter les conditions d'un seul opérateur. Tant que l'assurance n'est pas obligatoire, l'exploitant a toujours le choix de ne pas s'assurer si le contrat qui lui est proposé ne convient pas à ses besoins.

Une solution envisageable serait d' ajouter à l'obligation de s'assurer pour les exploitants une « obligation d'assurer » pour les assureurs. Une telle obligation existe par exemple pour l'assurance automobile ou l'assurance construction : un organisme particulier, le Bureau central de tarification, intervient alors pour contraindre un assureur à proposer, dans certaines conditions, un contrat à une personne qui en fait la demande. Cette procédure n'est toutefois utilisée que pour un nombre limité d'assurances et, si elle peut résoudre des cas spécifiques où un assureur refuserait de contracter avec certaines catégories de population, il n'est pas certain qu'elle permette à elle seule de créer un marché de l'assurance récolte pour toutes les cultures.

Votre rapporteur est convaincu qu' une généralisation de l'assurance récolte ne pourra se faire qu'en prenant en compte les spécificités de chaque culture .

g) La question de la sanction

Il n'y a pas en droit, d'obligation sans sanction . Une obligation de s'assurer n'aura d'efficacité que si des sanctions sont prévues et appliquées pour ceux qui s'y soustrairaient.

Par exemple, dans le cas d'une assurance responsabilité liée à l'exercice d'une profession ou d'une activité, l'administration conditionne la délivrance d'un certificat ou d'une licence à la présentation d'une attestation d'assurance. La sanction consiste en l'impossibilité d'exercer cette profession ou cette activité. Dans le cas du locataire, le défaut d'assurer peut justifier la résiliation du bail par le propriétaire.

Si la loi rend obligatoire l'assurance récolte, un régime de sanctions administratives ou civiles devrait donc être prévu. L'agriculteur non assuré devrait-il être soumis à une amende ? Peut-on envisager de l'empêcher d'exercer sa profession pour cette raison ? Une telle interdiction pourrait-elle être limitée aux cultures pour lesquelles il n'est pas assuré ?

En tout état de cause, un régime de sanction suppose la mise au point des procédures de contrôle et par conséquent une intervention de l'administration. Un automobiliste prouve qu'il est assuré en affichant sur son pare-brise une vignette verte. Comment contrôler que tous les exploitants agricoles sont assurés ?

* *

*

Au bénéfice de ces observations, votre commission vous propose de rejeter la proposition de loi tendant à généraliser l'assurance récolte obligatoire .

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er - Extension et obligation de souscription à l'assurance récolte

Objet : cet article tend à rendre obligatoire l'assurance récolte et à l'étendre à l'ensemble des productions agricoles.

I - Le dispositif proposé

Cet article prévoit :

- que l'assurance récolte, instituée par le décret n° 2005-234 du 14 mars 2005 fixant pour 2005 les modalités d'application de l'article L. 361-8 du livre III du code rural en vue de favoriser le développement de l'assurance contre certains risques agricoles, devient obligatoire ;

- qu'elle est étendue à l'ensemble des productions agricoles.

Elle renvoie à un décret les conditions d'application de ces dispositions.

II - La position de votre commission

Votre commission soutient depuis longtemps l'assurance récolte, sous l'impulsion notamment de son président, et partage l'objectif d'asseoir le système d'assurance sur une assiette de cotisants la plus large possible.

Elle constate toutefois que le marché de l'assurance n'est pas prêt à fournir des contrats de couverture de risques climatiques pour toutes les filières, dans toutes les régions et pour tous les types d'exploitations.

Elle note également que les assurances obligatoires correspondent habituellement à des situations où il s'agit de garantir le versement d'une indemnisation à un tiers, ce qui n'est pas le cas de l'assurance récolte qui devrait relever d'un choix libre d'entrepreneur, compte tenu de la nécessaire aide publique

Enfin les conséquences financières pour l'État d'une telle mesure seraient sans commune mesure avec les sommes actuellement consacrées au développement de l'assurance récolte, ce qui ne paraît pas envisageable dans la période de contrainte budgétaire que nous connaissons.

Pour ces raisons, votre commission vous propose de rejeter cet article .

Article 2 - Financement de la mesure

Objet : cet article compense les conséquences financières pour l'État de la proposition de loi

I - Le dispositif proposé

L'État participe au financement de l'assurance récolte par une subvention de la prime d'assurance. La généralisation du système entraînerait nécessairement des charges supplémentaires pour l'État. Or, l'article 40 de la Constitution prévoit que « les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique ».

En conséquence, cet article propose la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II - La position de votre commission

En cohérence avec sa position sur l'article 1 er de la présente proposition de loi , votre commission vous propose de rejeter également son article 2.

*

* *

Aux termes de l'article 42, alinéa 6-c du règlement du Sénat , « lorsque la commission ne présente aucune conclusion ou si les conclusions négatives de la commission sont rejetées, le Sénat est appelé à discuter le texte initial de la proposition ».

En application de cet article, la commission des affaires économiques propose au Sénat de se prononcer en faveur des conclusions négatives qu'elle a adoptées sur la présente proposition de loi .

ANNEXE N° 1 - LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR24 ( * )

- MM. Robert DROUET, vice-président délégué du conseil d'administration et président de Groupama centre-Manche, Christian BONNETIER, directeur adjoint, et Stéphane GIN, directeur « risques professionnels agricoles » à Groupama.

- MM. Frédéric GUDIN du PAVILLON, responsable « assurances entreprises », Stéphane GIN, président du comité agricole, et Mme Annabelle JACQUEMIN-GUILLAUME, attachée parlementaire de la Fédération française des sociétés d'assurance.

- Mme Dominique BRINBAUM, conseillère spéciale chargée de la stratégie et de la prospective, Melle Mathilde MASSIAS, adjointe au chef de bureau du crédit et de l'assurance à la direction générale des politiques agricole, agroalimentaire et des territoires, et M. Erwan de RANCOURT, conseiller chargé des relations parlementaires auprès du ministre de l'agriculture et de la pêche.

- M. Jean-Louis CHANDELIER, directeur du département « entreprises », Mme Catherine LION, directrice adjointe, et Mme Nadine NORMAND, attachée parlementaire auprès de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA).

- M. Thierry MASQUELIER, président-directeur général de la Caisse centrale de réassurance.

- M. Yvon COLLIN, sénateur du Tarn-et-Garonne, auteur de la proposition de loi.

ANNEXE N° 2 - CONCLUSIONS DU RAPPORT DE M. DOMINIQUE MORTEMOUSQUE, PARLEMENTAIRE EN MISSION AUPRÈS DU MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PÊCHE, SUR L'ASSURANCE RÉCOLTE (FÉVRIER 2007)

Le rapport dresse un premier bilan de la phase de lancement de l'assurance récolte, initiée en 2005 sur la base du rapport MENARD, qui préconisait le recours à un produit multirisque climatique à la culture ou à l'exploitation, plutôt que de multiplier les produits couvrant tel risque sur telle culture, notamment pour des raisons de lisibilité.

Si cette phase qui se termine en 2007 est significative, puisque près de 20% des exploitations professionnelles sont assurées après seulement 2 ans, elle ne prépare en rien les étapes suivantes, puisque l'essentiel des contrats concerne les grandes cultures, qui sont aussi les cultures les moins exposées aux risques climatiques. Pour la suite, on se trouve donc confronté à une impasse budgétaire, soit parce que, pour avancer sur les autres productions, il faut une aide à l'assurance plus forte, soit parce que, faute d'avancer, la coexistence avec le régime des calamités agricoles est inutilement coûteuse et contre-productive.

Pour sortir de ce dilemme, après consultation des administrations nationale et européenne, des assureurs et des instances professionnelles agricoles, trois grandes orientations paraissent devoir être retenues.

1) La gestion des risques et des crises sera un élément majeur des prochains rendez-vous communautaires, notamment en 2008 celui du bilan de santé de la PAC sur l'après 2013, et les propositions françaises en vue d'un cofinancement ne seront crédibles que si l'assurance récolte continue vigoureusement sa progression sur la base d'une feuille de route claire et consensuelle.

2) Les lourds investissements que l'entreprise agricole doit consentir pour une adaptation plus étroite au marché de l'après 2013 nécessitent une couverture plus forte contre les aléas, donc mieux individualisée tant par une amélioration de la déduction fiscale pour aléa (DPA) que par l'assurance récolte, plutôt que par la procédure forfaitaire du régime des calamités agricoles, qui correspondait aux besoins de premiers secours d'une agriculture en cours de modernisation.

3) Les aléas économiques, climatiques et sanitaires ne sont pas indépendants et l'organisation de producteur (ou son équivalent) est la base logistique appropriée pour bien raisonner l'adaptation au marché, les investissements et les pratiques de prévention ainsi que les prises de risques individuelles raisonnables. Dans le cadre de la prochaine OCM fruits et légumes, les organisations de producteurs pourraient ainsi faire la part des risques qu'ils décident de couvrir par mutualisation de ceux qui relèvent plus utilement d'une assurance de groupe, dont les tarifs sont plus avantageux.

Pour choisir un objectif raisonnable de diffusion de l'assurance récolte, trois scénarios sont étudiés, suivant qu'elle reste cantonnée aux grandes cultures, qu'elle s'étende aussi aux cultures spécialisées (vigne, fruits et légumes) ou que l'ensemble des productions, fourrages compris, de la ferme France soient couvertes.

Les simulations qui en découlent s'appuient sur l'exemple de l'Espagne, qui, parmi les pays les plus avancés dans l'assurance récolte, offre le mérite d'être membre de l'Union européenne, si bien que son dispositif est bien compris en complément des diverses organisations communes de marché. De sa longue expérience de près de 30 ans dans ce domaine, on peut tirer trois leçons :

1) il est illusoire de penser atteindre des taux de pénétration importants, puisque l'Espagne plafonne à 50 %, quand bien même toute aide exceptionnelle est conditionnée à la souscription d'une assurance récolte ;

2) le développement du marché n'est pas instantané, du fait notamment des pesanteurs psychologiques et du potentiel d'expertise à développer, si bien que les différentes cibles, correspondant aux scénarios, pourraient bien demander 5 à 10 ans pour être atteintes ;

3) la bonne progression de l'assurance récolte demande un engagement constant et résolu de l'État, tant par le budget qu'il y consacre, que par l'offre de réassurance publique, nécessaire pour couvrir les aléas climatiques de grande ampleur, s'apparentant aux catastrophes naturelles.

Le résultat des simulations tend à montrer que la conversion complète à l'assurance récolte entrerait à terme dans le volume des ressources du FNGCA, mais que la phase de transition nécessiterait des financements supplémentaires.

Néanmoins, ceux-ci peuvent être limités et rendre la mobilisation de ressources nouvelles accessible dans la mesure où, pour chaque catégorie de cultures, la sortie du régime des calamités agricoles se fait rapidement. Un calcul de simulation évalue ces besoins supplémentaires à près de 50 millions d'euros par an pour autant que la sortie du régime des calamités s'effectue pour chaque catégorie de cultures 2 ans après que le taux de diffusion de l'assurance y a atteint un niveau significatif, de l'ordre de 15 %.

Source : Une nouvelle étape pour la diffusion de l'assurance récolte , rapport au Premier ministre de Dominique Mortemousque, sénateur de la Dordogne, février 2007.

* 1 Voir infra.

* 2 Voir infra.

* 3 Code des assurances, art. L. 122-7 : «Les contrats d'assurance garantissant les dommages d'incendie ou tous autres dommages à des biens situés en France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit à la garantie de l'assuré contre les effets du vent dû aux tempêtes, ouragans et cyclones, sur les biens faisant l'objet de tels contrats, sauf en ce qui concerne les effets du vent dû à un événement cyclonique pour lequel les vents maximaux de surface enregistrés ou estimés sur la zone sinistrée ont atteint ou dépassé 145 km/h en moyenne sur dix minutes ou 215 km/h en rafales, qui relèvent des dispositions des articles L. 125-1 et suivants du présent code.»

* 4 Code rural, article L. 361-1

* 5 Décret n° 2008-270 du 18 mars 2008 fixant pour l'année 2008 les modalités d'application de l'article L. 361-8 du code rural en vue de favoriser le développement de l'assurance contre certains risques agricoles

* 6 Code rural, article D. 343-3 et suivants.

* 7 Décrets du 8 septembre 1997, 12 mai 1999 et 10 mai 2001

* 8 Décrets du 23 avril 2002, 9 juillet 2003 et 19 juillet 2004

* 9 Décret du 14 mars 2005

* 10 Décrets du 27 mars 2006, 30 janvier 2007 et 18 mars 2008

* 11 Voir le code rural, art. L. 361-6, et l'arrêté du 28 mars 1975 relatif aux conditions d'assurance exigées des agriculteurs pour bénéficier d'une indemnisation du Fonds national de garantie contre les calamités agricoles.

* 12 Données fournies par le rapport du sénateur Dominique Mortemousque (février 2007).

* 13 Le régime de la DPA est défini à l'article L. 72 D bis du code général des impôts.

* 14 Données fournies par le rapport du sénateur Dominique Mortemousque.

* 15 Données fournies par le projet annuel de performances « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » annexé au projet de loi de finances pour 2009.

* 16 Il s'agit d'une contribution additionnelle aux primes ou cotisations afférentes aux conventions d'assurance couvrant, à titre exclusif ou principal, d'une part les dommages aux bâtiments et au cheptel mort affectés aux exploitations agricoles, et d'autre part les risques de responsabilité civile et de dommages relatifs aux véhicules utilitaires affectés aux exploitations agricoles et d'une contribution additionnelle particulière applicable aux exploitations conchylicoles.

* 17 Voir supra.

* 18 En millions d'euros, les autorisations d'engagement étant égales aux crédits de paiement.

* 19 Prise en compte du décalage d'un an dans les paiements de la subvention nationale

* 20 En effet, les crédits d'une année N sont versés aux assureurs pour les contrats souscrits au titre des récoltes de l'année N-1, conformément au cahier des charges défini par le ministère de l'agriculture et les assureurs.

* 21 Voir Le droit des assurances obligatoires , André Favre Rochex et Guy Courtieu, L.G.D.J, avril 2000.

* 22 Code rural, art. L. 752-1.

* 23 Code des assurances, art. L. 242-1, résultant de la « loi Spinetta » du 4 janvier 1978.

* 24 Votre rapporteur a par ailleurs reçu des contributions écrites de la part de l'Assemblée permanente des chambres d'agricultures (APCA) et du Crédit agricole.

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