III. L'EPUISEMENT DU CYCLE DES REFORMES PARAMETRIQUES : VERS UNE REFORME SYSTEMIQUE DU SYSTEME DE RETRAITE FRANÇAIS

A. LE PACTE SOCIAL MENACE PAR LA PERTE DE SUBSTANCE DU PRINCIPE D'EQUITE ENTRE ASSURES SOCIAUX

1. L'équité intergénérationnelle : un principe menacé

La notion d'équité entre les générations est au coeur du fonctionnement du système de retraite par répartition. Celui-ci repose, en effet, sur un contrat social : chaque génération a droit au fait que ses enfants lui assurent une retraite correspondant à celle qu'elle a assurée elle-même à ses parents. Ce contrat est passé entre les générations 1 (les parents) et 2 (les enfants), tout en engageant la génération 3, celle des petits enfants.

Le vieillissement continu de la population (en 2050, un habitant sur trois sera âgé de soixante ans ou plus, contre un sur cinq en 2005) entraîne une dégradation du rapport entre cotisants et retraités : une fraction de plus en plus petite de la population (les actifs) prend en charge financièrement les besoins d'une fraction de plus en plus grande (les retraités). Ainsi, un transfert de revenu inéquitable entre les différentes générations est en train s'établir. A terme, c'est le pacte social qui semble menacé du fait de cette évolution.

Dans son premier rapport, le conseil d'orientation des finances publiques dresse lui aussi un constat inquiétant 18 ( * ) . Il souligne que les jeunes générations héritent non seulement d'une dette supérieure à celle de leurs aînés, mais qu'elles devront en outre financer les dépenses supplémentaires liées au vieillissement de la population. En effet, la génération née dans les années 1970 a hérité d'une dette de trente-cinq points de Pib lors de son entrée dans la vie active ; la génération née en 1990 héritera d'une dette de plus de 60 % du Pib, la suivante d'une dette de cent points de Pib, et celle encore d'après d'une dette de deux cents points de Pib, soit six fois supérieure à celle de ses arrière-grands-parents.

Dans ces conditions, redonner confiance aux jeunes actifs dans le système de retraite suppose de garantir la pérennité financière de l'assurance vieillesse et de leur assurer un juste niveau de pension.

Pour ce faire, le caractère contributif du système de retraite français, fortement remis en cause aujourd'hui, nécessite d'être reconstruit.

2. La nécessité de rééquilibrer les efforts entre les différentes catégories d'assurés sociaux

Aux inégalités entre les générations s'ajoutent les inégalités entre les assurés sociaux. Malgré la difficulté de l'exercice consistant à comparer les différents régimes de retraite, il est incontestable que l'effort contributif n'est pas équitablement au sein de la population. En effet, les assurés relevant des régimes de la fonction publique et des régimes spéciaux ont pendant des années :

- fourni un effort de cotisation moindre que dans le secteur privé ;

- bénéficié du versement de cotisations fictives et de subventions à ces régimes ;

- bénéficié de prestations et de conditions de départ en retraite plus avantageuses que dans les régimes de droit commun obligatoire (Cnav) ou complémentaires (Agirc, Arrco).

La réforme de 2003, pour les régimes de la fonction publique, et celle de 2007, pour les régimes spéciaux, ont permis de rééquilibrer l'effort demandé aux assurés de ces régimes, en harmonisant leurs règles avec celles du régime général. Cependant, l'effort contributif est encore loin d'être équitablement réparti car un certain nombre de dispositions introduites par les ces réformes sont partielles et graduelles. C'est le constat que dresse la Mecss 19 ( * ) » :

« Depuis les années 1980, le poids effectif de la sauvegarde de l'assurance vieillesse a essentiellement porté sur les jeunes générations, ainsi que sur les actifs du secteur privé. [...] Inversement, les ressortissants des trois fonctions publiques n'ont été inclus dans le champ de ce processus de réformes successives que depuis 2003 et bon nombre des nouvelles dispositions du code des pensions civiles et miliaires n'entrent en application que très progressivement. Fort logiquement, les fonctionnaires civils et militaires pourraient représenter à l'horizon 2020 entre 60 % et 70 % des besoins de financement de l'ensemble de la branche vieillesse. C'est donc bien là qu'il faut faire porter l'effort, ainsi que sur la réforme des régimes spéciaux ».

Rétablir le principe selon lequel le niveau de retraite dépend étroitement de l'effort contributif de chacun semble donc indispensable pour redonner confiance aux assurés dans leur système de retraite et garantir sa viabilité financière.

* 18 Premier rapport du conseil d'orientation des finances publiques, février 2007.

* 19 Rapport d'information de la Mecss n°403 (2006-2007) - «Finances sociales : après la rechute, la guérison ?» - Alain Vasselle.

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