Rapport n° 295 (2008-2009) de M. Philippe MARINI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 mars 2009

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N° 295

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 19 mars 2009

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur la proposition de loi de M. Thierry FOUCAUD, Mme Marie-France BEAUFILS, M. Bernard VERA, Mme Éliane ASSASSI, MM. François AUTAIN, Michel BILLOUT, Mme Nicole BORVO COHEN-SEAT, M. Jean-Claude DANGLOT, Mmes Annie DAVID, Michelle DEMESSINE, Évelyne DIDIER, M. Guy FISCHER, Mmes Brigitte GONTHIER-MAURIN, Gélita HOARAU, MM. Robert HUE, Gérard LE CAM, Mmes Josiane MATHON-POINAT, Isabelle PASQUET, MM. Jack RALITE, Ivan RENAR, Mmes Mireille SCHURCH, Odette TERRADE et M. Jean-François VOGUET tendant à abroger le bouclier fiscal et à moraliser certaines pratiques des dirigeants de grandes entreprises en matière de revenus ,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,
Rapporteur général

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. JeanJacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc, Alain Lambert , vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, Jean-Pierre Fourcade, Christian Gaudin, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Gérard Longuet, Roland du Luart, Philippe Marini, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, Henri de Raincourt, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

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Sénat :

29 (2008-2009)

EXPOSÉ GÉNÉRAL

La proposition de loi tendant à abroger le bouclier fiscal et à moraliser certaines pratiques des dirigeants de grandes entreprises en matière de revenus sera discutée en séance publique le 26 mars 2009, dans le cadre de la séance mensuelle réservées aux initiatives des groupes politiques d'opposition et des groupes minoritaires des assemblées, selon les nouvelles dispositions de l'article 48 alinéa 5 de la Constitution.

Cette proposition de loi se présente comme une réaction face à la crise financière et économique actuelle et à l'exacerbation des revendications dites de « justice sociale ». Souvent perçues comme « dorées », les rémunérations des dirigeants et des mandataires sociaux restent un sujet sensible à l'égard de l'opinion publique. Le Président de la République, M. Nicolas Sarkozy, a lui-même, à l'occasion de son discours à Toulon le 25 septembre 2008, estimé que les modes de rémunération des dirigeants et des opérateurs devaient être encadrés car « il y a eu trop d'abus, il y a eu trop de scandales ».

Par cette proposition de loi, les membres du Groupe communiste, républicain et citoyen et les sénateurs du Parti de gauche, auteurs du texte, mettent l'accent sur une question aussi importante que délicate dans la conjoncture actuelle . Toutefois, les solutions préconisées apparaissent, à votre rapporteur général, comme radicalement inadéquates compte tenu de toutes les initiatives récemment prises en la matière .

I. LA SUPPRESSION PURE ET SIMPLE DU BOUCLIER FISCAL N'EST PAS OPPORTUNE

La suppression pure et simple du bouclier fiscal (article 1 er ), afin de permettre une contribution plus importante des revenus les plus élevés à l'effort national, remettrait en cause l'avancée de ce dispositif s'agissant de la prévention du caractère confiscatoire de l'impôt . Les chiffres de l'administration fiscale récemment rendus publics confirment, en effet, l'utilité du bouclier fiscal : dans le détail, ils font apparaître qu'environ deux-tiers des 14.000 foyers fiscaux bénéficiaires du bouclier sont des foyers aux revenus très modestes mais possédant leur résidence principale et pour qui le poids de la taxe foncière peut être difficilement supportable.

Néanmoins, votre rapporteur général reconnaît que l'application actuelle du dispositif peut, dans certaines circonstances, comporter des effets pervers. Cette situation ne doit pas pour autant conduire à adopter des mesures susceptibles de porter atteinte au respect de droits fondamentaux de certains contribuables.

C'est pourquoi, lors de la discussion de la loi de finances pour 2009, votre rapporteur général a cosigné, avec le président Jean Arthuis, et notre collègue Jean-Pierre Fourcade, un amendement qui alliait suppression du bouclier fiscal, abrogation de l'impôt sur la fortune et création d'une nouvelle tranche d'impôt sur le revenu. L'éventuel réexamen du bouclier fiscal ne pourrait donc intervenir que dans le cadre d'une réforme plus ambitieuse de notre fiscalité , qu'il semble difficile d'entreprendre en période de crise.

II. LA « MORALISATION » DES POLITIQUES DE RÉMUNÉRATION DES DIRIGEANTS ET MANDATAIRES SOCIAUX RELÈVE D'UNE ÉVOLUTION EN COURS DU « GOUVERNEMENT D'ENTREPRISE »

La « moralisation » des politiques de rémunération des dirigeants et mandataires sociaux, si elle témoigne d'une volonté louable, ne doit pas conduire à mettre en place des dispositifs confiscatoires, ou contre-productifs en termes économiques ou d'attractivité. Le plafonnement de facto à 250.000 euros net de cotisations des indemnités de départ des dirigeants (article 2), et l'imposition totale des revenus issus des stock-options ou des actions gratuites (article 3) sont sujets à ces critiques.

A. LE CADRE LÉGISLATIF DES RÉMUNÉRATIONS DES DIRIGEANTS ET DES MANDATAIRES SOCIAUX A ÉTÉ SENSIBLEMENT MODIFIÉ

S'agissant de la rémunération des dirigeants et mandataires sociaux, votre rapporteur général souligne que le législateur est intervenu à de nombreuses reprises ces dernières années, y compris ces derniers mois, afin d'encadrer les pratiques , en améliorant notamment le contrôle des actionnaires et en garantissant la transparence, et de promouvoir une certaine justice sociale. Ainsi peut-on rappeler les modifications suivantes :

- la loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008 relative aux revenus du travail a subordonné l'attribution de stock-options aux mandataires sociaux à la distribution de stock-options ou d'actions gratuites à l'ensemble des salariés de l'entreprise ou à la mise en oeuvre d'un dispositif d'intéressement ou de participation volontaire ou dérogatoire ;

- la loi n° 2008-1425 de finances pour 2009 a modifié le régime fiscal « des parachutes dorés » et plafonné le montant des indemnités de départ déductible du bénéfice imposable à six fois le plafond annuel de la sécurité sociale, soit environ 200.000 euros . Au-delà de ce seuil, la rémunération prélevée par l'entreprise sur ses bénéfices est assujettie à l'impôt sur les sociétés ;

- la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (« loi TEPA ») a interdit les éléments de rémunération , indemnités et avantages dont le bénéfice n'est pas subordonné au respect de conditions liées aux performances du bénéficiaire , appréciées au regard des performances de la société dont il préside le conseil d'administration ou exerce la direction générale ou la direction générale déléguée ;

- la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social, a encadré les modalités de rémunération des dirigeants mandataires sociaux sur deux points. D'une part, elle a prévu que le rapport de gestion des sociétés cotées doit présenter les principes et les règles arrêtées par le conseil d'administration ou le conseil de surveillance pour déterminer les rémunérations et avantages de toute nature accordés aux mandataires sociaux . D'autre part, elle impose aux sociétés de définir des obligations de conservation sur tout ou partie des titres attribués aux dirigeants, et ce jusqu'à la cessation de leurs fonctions. A défaut de définir ces obligations, les sociétés et le dirigeant perdent le bénéfice de l'exonération de charges sociales ;

- la loi n° 2005-842 pour la confiance et la modernisation de l'économie du 27 juillet 2005 a notablement renforcé les obligations de transparence des sociétés cotées en soumettant au régime des conventions réglementées les éléments de rémunération versés à raison de la cessation des fonctions des dirigeants ou postérieurement à cette cessation (président, directeurs généraux et directeurs généraux délégués), soit les retraites dites « chapeau », indemnités de départ et rémunérations différées communément dénommées « parachutes dorés ». L'application de ce régime implique une autorisation préalable du conseil d'administration ou de surveillance, l'information des commissaires aux comptes qui en attestent l'exactitude et la sincérité, et la soumission des conventions autorisées à l'approbation de l'assemblée générale des actionnaires.

Par ailleurs, votre rapporteur général rappelle qu'en cas de perception de rémunérations excessives ou interdites, le dirigeant bénéficiaire expose non seulement sa responsabilité civile mais également sa responsabilité pénale sur le chef d'abus de biens sociaux si les éléments constitutifs de l'infraction sont réunis.

B. LA RESPONSABILISATION DE L'ENSEMBLE DES ACTEURS DU GOUVERNEMENT D'ENTREPRISE EST PRIMORDIALE

Selon votre rapporteur général, la « moralisation » des pratiques de rémunération des dirigeants et mandataires sociaux devrait relever, aujourd'hui, avant tout de la responsabilisation et de l'autodiscipline des dirigeants et mandataires sociaux ainsi que de l'ensemble des acteurs du gouvernement d'entreprise .

Parallèlement au renforcement du cadre législatif, il existe depuis plusieurs années la volonté des sociétés de s'imposer à elles-mêmes des règles de conduite en matière de gouvernement d'entreprise. Cette démarche a notamment abouti à un code de bonne conduite pour les sociétés cotées, établi par le Medef et l'AFEP. De nouvelles recommandations sur la rémunération des dirigeants et mandataires sociaux dans les sociétés cotées ont par ailleurs été proposées en octobre 2008.

Les recommandations AFEP-MEDEF sur la rémunération des dirigeants mandataires sociaux dans les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé (octobre 2008)

Si ces nouvelles recommandations concernent avant tout les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, elles ont également vocation à s'appliquer aux sociétés non cotées ou dont les titres sont admis aux négociations sur un marché organisé tel Alternext.

Ces recommandations mettent en avant les mêmes principes généraux à suivre dans la détermination de la rémunération des dirigeants mandataires sociaux que ceux établis en janvier 2007 : l'exhaustivité dans la rémunération ; l'équilibre entre ses différents éléments ; la prise en compte du contexte du métier de l'entreprise et du marché européen ou mondial de référence ; la cohérence de la rémunération du dirigeant mandataire social avec celle des autres dirigeants et des salariés ; la lisibilité des règles ; le juste équilibre entre l'intérêt général de l'entreprise, les pratiques du marché et les performances des dirigeants.

Elles précisent et complètent le code de gouvernement d'entreprise et les recommandations de janvier 2007 sur cinq points.

1) Cumul d'un contrat de travail et d'un mandat social

S'agissant, dans les sociétés à conseil d'administration, du président, du président directeur général, du directeur général, dans les sociétés à directoire et à conseil de surveillance, du président du directoire ou du directeur général unique, et dans les sociétés en commandite par actions, des gérants, il est recommandé, lorsqu'un dirigeant devient mandataire social de l'entreprise, de mettre fin au contrat de travail qui le lie à la société, soit par rupture conventionnelle, soit par démission .

Cette recommandation s'applique aux mandats confiés après la publication de cette recommandation et lors du renouvellement de mandats confiés antérieurement à cette publication, sur appréciation du conseil d'administration ou du conseil de surveillance.

2) Indemnités de départ (« parachutes dorés »)

Les conditions de performance fixées par les conseils pour l'octroi d'indemnités de départ doivent être exigeantes et n'autoriser l'indemnisation d'un dirigeant qu'en cas de départ contraint et lié à un changement de contrôle ou de stratégie.

Le versement d'indemnités de départ à un dirigeant mandataire social doit être exclu s'il quitte à son initiative la société pour exercer de nouvelles fonctions, ou change de fonctions à l'intérieur d'un groupe, ou encore s'il a la possibilité de faire valoir à brève échéance ses droits à la retraite.

L'indemnité de départ ne doit pas pouvoir excéder, le cas échéant, deux ans de rémunération (fixe et variable).

Ces règles et ce plafond s'appliquent à l'ensemble des indemnités et incluent notamment les éventuelles indemnités versées en application d'une clause de non concurrence.

Tout gonflement artificiel de la rémunération dans la période préalable au départ est proscrit.

3)  Régimes de retraite supplémentaires (« retraites chapeau »)

Les retraites supplémentaires à prestations définies sont soumises à la condition que le bénéficiaire soit mandataire social ou salarié de l'entreprise lorsqu'il fait valoir ses droits à la retraite en application des règles en vigueur.

La valeur de cet avantage doit être prise en compte dans la fixation globale de la rémunération.

Le groupe de bénéficiaires potentiels doit être sensiblement plus large que les seuls mandataires sociaux.

Les bénéficiaires doivent satisfaire des conditions raisonnables d'ancienneté dans l'entreprise, fixées par le conseil d'administration ou le directoire.

Les droits potentiels ne doivent représenter, chaque année, qu'un pourcentage limité de la rémunération fixe du bénéficiaire.

La période de référence prise en compte pour le calcul des prestations doit être de plusieurs années. Tout gonflement artificiel de la rémunération sur cette période est proscrit.

Les systèmes donnant droit immédiatement ou au terme d'un petit nombre d'années à un pourcentage élevé de la rémunération totale de fin de carrière sont à exclure.

4)  Options d'achat ou de souscription d'actions (« stock options ») et attribution d'actions de performance

Sauf structures particulières -telles les start-up-, l'attribution d'options de souscription ou d'achat d'actions doit correspondre à une politique d'association au capital et non à un complément de rémunération instantanée. Si l'attribution d'options ne bénéficie pas à l'ensemble des salariés, il est nécessaire de prévoir un autre dispositif d'association de ceux-ci aux performances de l'entreprise.

Les attributions d'actions aux dirigeants mandataires sociaux doivent être soumises à des conditions de performance. Les attributions gratuites d'actions sans conditions de performance doivent être réservées aux salariés.

S'agissant de l'attribution de telles options ou actions :

- celles-ci ne doivent pas représenter un pourcentage disproportionné de l'ensemble des rémunérations, options et actions attribuées à chaque dirigeant mandataire social. A cette fin, les conseils doivent systématiquement examiner l'attribution de nouvelles options et actions au regard de tous les éléments de la rémunération du dirigeant mandataire social concerné ;

- pour éviter une trop forte concentration de l'attribution sur les dirigeants mandataires, un pourcentage maximum d'options et d'actions pouvant être attribuées aux dirigeants mandataires sociaux par rapport à l'enveloppe globale votée par les actionnaires doit être défini par les conseils, en fonction de la situation de chaque société (taille de la société, secteur d'activité, champ d'attribution plus ou moins large, nombre de dirigeants...) ;

- afin de limiter les effets d'aubaine : les attributions doivent intervenir aux mêmes périodes calendaires et chaque année ; le nombre d'options et d'actions attribuées ne doit pas s'écarter des pratiques antérieures de l'entreprise, sauf changement de périmètre significatif justifiant une évolution du dispositif ;

- les actions de performance attribuées aux dirigeants mandataires sociaux doivent être conditionnées à l'achat d'une quantité définie d'actions lors de la disponibilité des actions attribuées ;

- s'agissant du prix défini pour l'option, la décote doit être supprimée pour l'ensemble des attributaires et les instruments de couverture des options sont interdits.

Pour l'exercice des options ou des acquisitions :

- l'exercice par les dirigeants mandataires sociaux de la totalité des options et l'acquisition des actions doit être lié à des conditions de performance à satisfaire sur une période de plusieurs années consécutives, ces conditions devant être sérieuses, exigeantes et combiner conditions de performance internes à l'entreprise et externes, c'est-à-dire liées à la performance d'autres entreprises, d'un secteur de référence...

- les périodes précédant la publication des comptes, pendant lesquelles l'exercice des options d'actions n'est pas possible, doit être fixé par le conseil d'administration ou de surveillance qui doit également déterminer la procédure que doivent suivre les dirigeants mandataires sociaux avant d'exercer des options d'actions, pour s'assurer qu'ils ne disposent pas d'informations susceptibles d'empêcher cet exercice.

Pour la conservation des actions acquises :

- le conseil doit imposer aux dirigeants mandataires sociaux de conserver un nombre important et croissant des titres acquis en retenant soit une référence à la rémunération annuelle à fixer pour chaque mandataire, soit un pourcentage de la plus-value nette après cessions nécessaires à la levée et aux impôts et prélèvements sociaux et frais relatifs à la transaction, soit une combinaison des deux, soit un nombre fixe d'actions.

- quelle que soit la norme retenue, elle doit être compatible avec d'éventuels critères de performance et être périodiquement révisée à la lumière de la situation du mandataire, et au moins à chaque renouvellement du mandat social.

5)  Transparence des éléments de rémunération

L'ensemble des éléments constitutifs de la rémunération doivent être rendus publics sur une base individuelle pour les dirigeants. A cet effet, il est recommandé de :

- suivre la présentation standardisée définie par l'AFEP et le MEDEF de tous les éléments de rémunération des dirigeants (incluant la valorisation des options attribuées selon la méthode retenue pour les comptes consolidés) ;

- rendre publics tous les éléments de rémunération des dirigeants, potentiels ou acquis, immédiatement après la réunion du conseil les ayant arrêtés.

Source : Rapport Sénat n° 62 (2008-2009) de M. Jean-Jacques Hyest.

Votre rapporteur général se félicite de ces nouvelles recommandations, en espérant qu'elles puissent faire l'objet d'une pleine appropriation par les sociétés . D'ailleurs, il souligne que ces recommandations rejoignent, sur le fond, les propositions du groupe de travail commun à l'Assemblée nationale et au Sénat sur la crise financière internationale 1 ( * ) .

Il estime que la définition des rémunérations des dirigeants et mandataires sociaux relève avant tout de la responsabilité des conseils d'administration ou de surveillance sous le contrôle des actionnaires . La transparence du processus est la meilleure garantie contre d'éventuels abus.

A cet égard, il rappelle que les rôles de l'actionnaire et des assemblées générales ont été sensiblement revalorisés au cours de ces dernières années. Ce mouvement de balancier en faveur de l'actionnariat ne signifie pas seulement l'attribution de nouveaux pouvoirs. Cela implique également que l'actionnaire remplisse mieux ses devoirs et fasse preuve de responsabilité dans l'utilisation de ses prérogatives . Il ne faut pas perdre de vue qu'investir en actions est une opération potentiellement rentable mais risquée. Cela suppose donc que les actionnaires se réapproprient leurs droits politiques et assument leur première responsabilité qui est d'exercer leur droit de vote. Or, par exemple, les indemnités de départ soumises au vote des actionnaires sont adoptées avec un taux moyen de 92,3 % 2 ( * ) malgré des conditions de performance peu exigeantes . Dans cet esprit, votre rapporteur général n'estime pas opportun de modifier la procédure des conventions réglementées (article 6 de la proposition de loi), l'assemblée générale des actionnaires ayant déjà la possibilité d'opérer un contrôle sur ces conventions.

Votre rapporteur général est donc défavorable, à ce stade, à une action normative de la part du législateur . Néanmoins, il souligne que les attitudes vertueuses nécessitent d'être encouragées, soutenues, voire initiées par les pouvoirs publics . Ainsi, Mme Christine Lagarde, ministre de l'industrie, de l'économie et de l'emploi, et M. Brice Hortefeux, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, ont demandé le 17 mars 2009 au MEDEF et à l'AFEP de leur soumettre des propositions concernant la rémunération des dirigeants d'entreprises procédant à des plans sociaux ou recourant au chômage partiel. Il convient de rappeler que le président de la République, M. Nicolas Sarkozy, avait souhaité que les dirigeants mandataires sociaux dont l'entreprise met en oeuvre un plan social d'ampleur ou recourt massivement au chômage partiel, renoncent à la part variable de leur rémunération.

De plus, dès lors que des entreprises bénéficient d'un soutien public, l'Etat est en droit d'attendre des dirigeants des groupes aidés une attitude exemplaire en termes de rémunérations . Ainsi, il semblerait opportun que les conventions liant l'Etat aux banques bénéficiant de financements de la Société de financement de l'économie française (SFEF) ou d'apports de capitaux de la Société de prise de participations de l'Etat (SPPE) assurent une application effective des recommandations du MEDEF et de l'AFEP, en visant notamment la politique de distribution des stock-options.

* * *

Sous le bénéfice de ces observations, la commission n'est donc pas favorable à l'adoption de la présente proposition de loi.

EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE 1er- Suppression du bouclier fiscal

Commentaire : le présent article a pour objet d'abroger les articles 1 er et 1649- 0 A du code général des impôts, qui définissent le « bouclier fiscal ».

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE PRINCIPE DU BOUCLIER FISCAL

Le principe du bouclier fiscal a été introduit par l'article 74 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006. Il a été renforcé par l'article 11 de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (TEPA).

Ainsi, aux termes du premier alinéa de l'article 1 er du code général des impôts issu de ces deux lois, « les impôts directs payés par un contribuable ne peuvent être supérieurs à 50 % de ses revenus ».

Le positionnement de ces dispositions au sein du code général des impôts donne un caractère solennel à ce principe, dont les conditions d'application sont définies à l'article 1649-0 A du même code.

B. LE FONCTIONNEMENT DU BOUCLIER FISCAL

1. Un droit à restitution ou à « autoliquidation » de l'impôt trop versé

L'article 1649-0 A du code général des impôts définit, pour les contribuables domiciliés fiscalement en France, un droit à restitution de la fraction des impositions excédant le seuil de 50 % précité. La restitution du « trop d'impôt » peut être demandée par le contribuable au 1 er janvier de l'année suivant le paiement des impositions dont il est redevable, et avant le 31 décembre de l'année suivant celle du paiement des impositions.

De plus, selon les dispositions introduites par l'article 38 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009, adopté à l'initiative de votre rapporteur général, le contribuable redevable de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), de la taxe foncière ou de la taxe d'habitation peut calculer lui-même le montant de son impôt en tenant compte de la créance qu'il détient sur l'Etat à raison des excédents d'impositions antérieurement acquittés (« autoliquidation du bouclier fiscal »).

2. Le calcul du plafonnement

a) Les impositions prises en compte au numérateur

Sous réserve qu'elles ne soient pas déductibles d'un revenu catégoriel de l'impôt sur le revenu et qu'elles aient été payées en France, les impositions prises en compte sont les impositions directes suivantes :

- l'impôt sur le revenu (IR) ;

- l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ;

- les contributions sociales sur les revenus du patrimoine (CSG et CRDS sur les revenus du patrimoine, prélèvement social et contribution additionnelle) ;

- les contributions sociales sur les revenus d'activité et de remplacement et les produits de placement (CSG et CRDS sur les revenus d'activité et de remplacement, CSG, CRDS, prélèvement social et contribution additionnelle sur les revenus de placement) ;

- la taxe foncière sur les propriétés bâties et la taxe foncière sur les propriétés non bâties afférents à l'habitation principale du contribuable et perçues au profit des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ;

- la taxe d'habitation afférente à l'habitation principale du contribuable et perçue au profit des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Les impôts locaux pris en compte ne concernent pas les impôts perçus au titre des résidences secondaires . Par ailleurs, sont prises en compte les taxes additionnelles aux taxes foncières et d'habitation perçues au profit des établissements et organismes habilités à percevoir ces taxes, à l'exclusion de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères.

b) Les revenus pris en compte au dénominateur

Les revenus à prendre en compte sont ceux réalisés par le contribuable au titre de l'année qui précède celle du paiement des impositions.

Ils sont constitués de trois catégories de revenus :

- les revenus soumis à l'impôt sur le revenu nets de frais professionnels ;

- les produits soumis à un prélèvement libératoire ;

- les revenus exonérés d'impôt réalisés au cours de la même année en France ou hors de France .

Par ailleurs, peuvent être imputés, en diminution de ces revenus :

- les déficits catégoriels imputables sur le revenu global ;

- les pensions alimentaires ;

- les cotisations ou primes versées au titre de l'épargne retraite facultative qui sont déductibles du revenu global.

Enfin, parmi les revenus d'épargne soumis à l'impôt sur le revenu dont le prélèvement n'intervient qu'au terme du dénouement d'un contrat (comptes d'épargne-logement, plans d'épargne populaire et bons de capitalisation, et placements de même nature, autres que ceux en unités de comptes, c'est-à-dire en euros), le 6 de l'article 1649-0 A du code général des impôts prévoit que ces revenus sont pris en compte dans le calcul du plafonnement « à la date de leur inscription en compte ».

c) Les revenus non pris en compte au dénominateur

En revanche, le 4 de l'article 1649-0 A du code général des impôts exclut les plus-values immobilières exonérées en application des II et III de l'article 150 U du code général des impôts des revenus à prendre en compte au dénominateur du plafonnement. Il s'agit :

- des plus-values sur la résidence principale et ses dépendances, sur l'habitation des Français domiciliés hors de France, sur les biens faisant l'objet d'une expropriation pour cause d'utilité publique et sur les biens faisant l'objet d'une opération de remembrement ;

- des plus-values constatées sur un montant de cession inférieur à 15.000 euros ;

- des plus-values réalisées par des titulaires d'une pension vieillesse non assujettis à l'ISF et disposant de revenus leur permettant d'être exonérés ou de bénéficier d'un dégrèvement de taxe foncière sur les propriétés bâties ou de taxe d'habitation ;

- des plus-values sur les biens cédés par les particuliers au profit d'un organisme HLM, d'une société d'économie mixte gérant des logements sociaux, d'un organisme sans but lucratif ou d'une union d'économie sociale exerçant une activité dans le cadre de la mise en oeuvre du droit au logement ou de lutte contre l'exclusion.

De même, un certain nombre de prestations sociales sont exclues du dénominateur du plafonnement . Il s'agit :

- des prestations familiales énumérées à l'article L. 511-1 du code de la sécurité sociale (prestation d'accueil du jeune enfant, allocations familiales, complément familial, allocation de logement, allocation d'éducation de l'enfant handicapé, allocation de soutien familial, allocation de rentrée scolaire, allocation de parent isolé et allocation de présence parentale) ;

- de l'allocation aux adultes handicapés et de l'allocation personnalisée d'autonomie ;

- de l'allocation de logement et de l'aide personnalisée au logement.

- des revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance et qui ne sont pas soumis en application de l'article 15-II du code général des impôts à l'impôt sur le revenu ;

- des plus-values qui ne bénéficient pas d'une exonération mais ne sont pas imposables à l'impôt sur le revenu.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose d'abroger les articles 1 er et 1649-0 A du code général des impôts, ce qui revient à supprimer le bouclier fiscal .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LE BOUCLIER FISCAL : UNE MESURE DESTINÉE À ÉVITER QUE LA FISCALITÉ PRÉSENTE UN CARACTÈRE CONFISCATOIRE

Votre rapporteur général tient tout d'abord à rappeler que le bouclier fiscal a été instauré dans le cadre de loi de finances pour 2006, puis renforcé par la loi TEPA, pour ôter à la fiscalité française le caractère confiscatoire qu'elle pouvait avoir pour certains contribuables .

A ce sujet, il convient de souligner qu'aux termes de l'article XIII de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, « pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ». Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005 relative à la loi de finances pour 2006, a précisé que l'exigence définie par l'article XIII précité « ne serait pas respectée si l'impôt revêtait un caractère confiscatoire ou faisait peser sur une catégorie de contribuables une charge excessive au regard de leurs facultés contributives » et que, dès lors, l'article 74 de la LFI pour 2006 instaurant le bouclier fiscal « loin de méconnaître l'égalité devant l'impôt, tend à éviter une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ». De même, la Cour de cassation, dans un arrêt du 13 novembre 2003, avait accepté de prendre en considération le caractère éventuellement confiscatoire de l'impôt (en l'occurrence, de l'ISF), examinant ce point sous deux angles : celui de l'aliénation forcée de patrimoine et celui de l'absorption intégrale des revenus.

Or, les chiffres de l'administration fiscale rendant compte des remboursements intervenus au 12 février 2009 ont montré l'utilité du bouclier fiscal pour deux catégories de contribuables , représentant un total de 14.000 foyers fiscaux :

- d'une part, des foyers aux revenus très modestes mais possédant leur résidence principale et pour qui le poids de la taxe foncière peut être difficilement supportable. Cette situation concernait environ les deux-tiers des bénéficiaires du dispositif ;

- d'autre part, des contribuables assujettis à l'ISF subissant le « plafonnement du plafonnement » de cet impôt et qui devaient consacrer une très grande fraction de leurs revenus pour l'acquitter.

Le bouclier fiscal a donc été créé par le législateur afin de répondre à des questions relevant du respect des droits fondamentaux de certains contribuables, aux profils divers et qui n'ont pas disparu à l'heure du débat sur la présente proposition de loi.

B. UN MÉCANISME DONT L'APPLICATION PEUT COMPORTER DES EFFETS PERVERS

Pour autant, votre rapporteur général reconnaît que l'application de l'actuel dispositif de « bouclier fiscal » pourrait présenter des effets pervers dans certaines situations, par exemple en cas de nécessité d'augmenter des impôts.

Cette question a ponctuellement surgi à l'occasion de la discussion de la loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion 3 ( * ) . En effet, le financement du dispositif s'est fait notamment au moyen de l'instauration d'une contribution additionnelle à la CSG et à la CRDS assise sur le patrimoine, dont le taux a été fixé à 1,1 %. Or, l'inclusion de cette nouvelle contribution au sein du bouclier fiscal a suscité un débat 4 ( * ) .

Ce sujet pourrait également se poser de manière plus générale si, à l'issue de l'actuelle crise économique et financière, la gestion de l'augmentation de la dette publique impliquait un alourdissement de la fiscalité. Il paraîtrait alors difficilement acceptable de ne pas faire participer les plus favorisés de nos compatriotes à l'effort national du fait de l'existence du bouclier fiscal.

C. UN ÉVENTUEL RÉEXAMEN NE POURRAIT S'INTÉGRER QUE DANS LE CADRE D'UNE RÉFORME FISCALE PLUS COMPLÈTE

Néanmoins, pour les raisons exposées supra , votre rapporteur général estime que l'éventuel réexamen du bouclier fiscal ne devrait intervenir que dans le cadre d'une réforme plus ambitieuse de notre fiscalité , qui allierait simplicité et justice sociale. Les termes d'un tel débat ont été esquissés lors de l'examen de deux amendements du président Jean Arthuis, dont l'un cosigné par votre rapporteur général et notre collègue Jean-Pierre Fourcade 5 ( * ) : il s'agissait alors d'associer la suppression du bouclier fiscal à l'abrogation de l'ISF, le manque à gagner pour l'Etat devant être compensé par la création d'une tranche supplémentaire d'IR.

Votre rapporteur général mène actuellement des travaux avec l'administration fiscale afin de déterminer les pistes les plus prometteuses susceptibles de guider une telle réforme, sur la base de ces principes.

La mesure proposée par le présent article est donc à la fois incomplète et prématurée . C'est pourquoi votre rapporteur général ne préconise pas son adoption.

Décision de la commission : conformément à sa position d'ensemble, votre commission vous propose de ne pas adopter cet article.

ARTICLE 2 - Encadrement des indemnités de départ des dirigeants

Commentaire : le présent article a pour objet, d'une part, de plafonner de facto les indemnités de départ des dirigeants en imposant totalement la part supérieure à 250.000 euros, et d'autre part, de surtaxer les sociétés qui octroieraient une indemnité de départ supérieure à ce plafond.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE REGIME D'IMPOSITION DES INDEMNITÉS DE DÉPART

L'article 13 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, complété par l'article 16 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, a modifié l'article 80 duodecies du code général des impôts et accru les contraintes pesant sur la fiscalité personnelle et les cotisations sociales afférentes aux indemnités de licenciement comme à celles de révocation des dirigeants.

L'article 80 duodecies pose le principe général selon lequel toute indemnité versée à l'occasion de la rupture d'un contrat de travail constitue une rémunération imposable . Par extension aux mandataires non salariés, constitue également une rémunération imposable toute indemnité versée, à l'occasion de la cessation de leurs fonctions, aux mandataires sociaux et dirigeants.

Ce principe est toutefois assorti de dérogations et de plafonds d'exonération , tenant en particulier compte de ce que les indemnités de licenciement sont traditionnellement considérées comme ayant la nature de dommages et intérêts destinés à compenser un préjudice, et ne sont donc en principe pas considérées comme des salaires imposables comme tels.

Ainsi les indemnités consécutives à un licenciement irrégulier (non-respect de la procédure ou absence de cause réelle et sérieuse), comme les indemnités de licenciement ou de départ volontaire versées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi, sont totalement exonérées.

Hors plan social, est exonérée d'impôt sur le revenu et de cotisations de sécurité sociale la fraction des indemnités de licenciement qui n'excède pas le plus élevé des trois montants suivants :

- le montant prévu par la convention collective de branche, par l'accord professionnel et interprofessionnel ou, à défaut, par la loi ;

- ou la moitié du montant des indemnités de licenciement ;

- ou deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail.

B. LE PLAFONNEMENT DE LA DÉDUCTIBILITÉ DES INDEMNITÉS DE DÉPART DU BÉNÉFICE DES ENTREPRISES

Adopté à l'initiative de l'Assemblée nationale, l'article 21 de la loi de finances pour 2009 plafonne le montant des indemnités de départ déductible du bénéfice imposable des sociétés à six fois le plafond annuel de la sécurité sociale.

Il s'agit de limiter, pour les sociétés, l'avantage fiscal associé aux rémunérations de type « parachute doré » en alignant le dispositif sur le régime fiscal des licenciements.

Alors que les rémunérations différées peuvent être aujourd'hui totalement déduites de l'impôt sur les sociétés, celles-ci sont désormais, en application de ce dispositif défiscalisées uniquement pour la part inférieure à environ 200.000 euros, soit six fois le plafond annuel de la sécurité sociale . Au-delà, la rémunération prélevée par l'entreprise sur ses bénéfices est assujettie à l'impôt sur les sociétés.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article a un double objet :

- d'une part, il organise de facto le plafonnement des indemnités de départ des dirigeants d'entreprise à 250.000 euros, en proposant d'imposer totalement la part de l'indemnité supérieure à cette somme après prélèvement des cotisations sociales. La nature de cette taxe n'est pas précisée ;

- d'autre part, il propose de soumettre les sociétés, qui octroieraient une indemnité supérieure au plafond, à une taxe supplémentaire de 15 % sur leur bénéfice imposable .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général est défavorable au dispositif présenté par cet article.

D'une part, la mesure de plafonnement des indemnités de départ des dirigeants n'est pas pertinente. Au-delà du caractère confiscatoire du dispositif, votre rapporteur général estime qu' il n'est pas opportun de fixer un plafond unique en numéraire, qui ne tient compte ni de la taille de l'entreprise, ni de son activité ou de ses résultats, ni des risques pris.

D'autre part, votre rapporteur général estime que le plafonnement de la déductibilité des indemnités de départ du bénéfice, voté lors de la loi de finances pour 2009, devrait contribuer à responsabiliser davantage les conseils d'administration ou de surveillance dans la détermination des montants des indemnités de départ.

En outre, cette disposition fait suite à deux importantes modifications concernant l'exercice et la transparence des pratiques de rémunération des sociétés :

- l'article 8 de la loi n° 2005-842 du 27 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie a notablement renforcé les obligations de transparence des sociétés cotées en soumettant au régime des conventions réglementées les éléments de rémunération versés à raison de la cessation des fonctions des dirigeants ou postérieurement à cette cessation (président, directeurs généraux et directeurs généraux délégués), soit les retraites dites « chapeau », indemnités de départ et rémunérations différées communément dénommées « parachutes dorés ». L'application de ce régime implique une autorisation préalable du conseil d'administration ou de surveillance, l'information des commissaires aux comptes qui en attestent l'exactitude et la sincérité, et la soumission des conventions autorisées à l'approbation de l'assemblée générale des actionnaires ;

- l'article 17 de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (« loi TEPA ») a ensuite introduit un dispositif d'encadrement de ces rémunérations différées .

Aux termes du nouvel article L. 225-42-1 du code de commerce, sont ainsi interdits « les éléments de rémunération, indemnités et avantages dont le bénéfice n'est pas subordonné au respect de conditions liées aux performances du bénéficiaire , appréciées au regard de celles de la société dont il préside le conseil d'administration ou exerce la direction générale ou la direction générale déléguée ». Un dispositif analogue figure au nouvel article L. 225-90-1 pour les sociétés « dualistes » à directoire et conseil de surveillance.

Ce dispositif franchit donc une nouvelle étape en subordonnant la validité de ces rémunérations à des conditions de performance des dirigeants bénéficiaires, fixées a priori et qu'il revient, ensuite, au conseil d'administration ou de surveillance d'apprécier avant le versement. Les actionnaires disposent aussi d'un contrôle accru puisque l'assemblée générale se prononce par une résolution spécifique pour chaque bénéficiaire (notamment pour éviter les pratiques de « vote bloqué ») sur les rémunérations différées des mandataires sociaux.

Décision de la commission : conformément à sa position d'ensemble, votre commission vous propose de ne pas adopter cet article.

ARTICLE 3 - Imposition totale des « stock options » et des actions gratuites

Commentaire : le présent article a pour objet de taxer à 100 % toute rémunération liée à l'évolution de cours boursiers.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE REGIME D'IMPOSITION DES STOCK-OPTIONS

Le mécanisme des stocks options consiste pour une entreprise, constituée sous forme de société par actions (S.A. ou société en commandite par actions), à donner à ses salariés ou mandataires sociaux le droit d'acquérir à une date future des actions de cette société au prix fixé le jour de l'attribution.

La fiscalité des stock-options est complexe du fait de la succession de plusieurs régimes fiscaux, de la distinction de trois « types » de revenus :

- un « rabais » , correspondant à la différence entre le cours de référence et le cours du marché au moment de l'attribution des stock-options. Cet avantage est taxé à l'impôt sur le revenu (IR) au même titre que les salaires au-delà de 5 % de la valeur réelle de l'action au jour de l'attribution des options. S'y ajoutent la CSG, la CRDS et les cotisations de sécurité sociale ;

- une plus-value de cession , constatée au moment de la vente de ses actions, si celle-ci est postérieure à la levée des options. Celle-ci est imposée à l'impôt sur le revenu au taux de 18 % au titre de la plus-value sur valeurs mobilières, les prélèvements sociaux trouvant également à s'appliquer.

Entre les deux, le bénéficiaire enregistre une plus-value d'acquisition , au moment où il exerce son option, correspondant à la différence entre le prix d'acquisition et le cours réel de l'action. S'agissant de cet avantage, trois régimes fiscaux différents sont applicables selon que les options ont été attribuées :

- avant le 1 er janvier 1990 , le respect par le salarié de la durée d'indisponibilité de 5 ans à compter de l'attribution de l'option confère une exonération fiscale, seule la différence entre le prix de cession et la valeur des titres à la date de la levée de l'option étant susceptible de dégager une plus-value imposable au taux proportionnel de 18 % auquel il convient d'ajouter les prélèvement sociaux (12,1 % à compter du 1 er janvier 2009) ;

- depuis le 1 er janvier 1990 , l'avantage est toujours imposable soit au taux de 18 % si les options ont été attribuées avant le 20 septembre 1995, ou 30 % pour les options attribuées après cette date ;

- enfin, depuis le 27 avril 2000 , le délai d'indisponibilité est ramené de 5 à 4 ans et l'avantage est taxé à 30 % jusqu'à 152.500 euros d'avantage, et à 40 % pour la fraction supérieure. En cas de portage supplémentaire de 2 ans, ces taux sont respectivement ramenés à 18 % et 30 %.

Dans tous les cas, le contribuable peut opter pour la réintégration de l'avantage dans le régime d'imposition des traitements et salaires relevant du barème.

B. LE REGIME D'IMPOSITION DES ACTIONS GRATUITES

L'attribution d'actions gratuites, ou AGA, est une possibilité offerte à une société, cotée ou non cotée en bourse, de proposer à des salariés d'acquérir gratuitement ses actions.

Depuis le 1 er janvier 2005, le régime d'imposition d'actions gratuites aux salariés ou aux mandataires sociaux est largement calqué sur le régime des « stock-options ».

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose de « supprimer » les stock-options et les actions gratuites en imposant à 100 % toute rémunération ou partie de rémunération liée à l'évolution des cours boursiers. La nature de la taxe n'est pas précisée.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'attribution de stock-options et les actions gratuites sont un moyen pour l'entreprise de rémunérer ses dirigeants.

Si des dérives peuvent être constatées, l'imposition totale de ces éléments de rémunération ne constitue pas une réponse pertinente .

D'une part, d'un point de vue juridique, cette mesure serait anticonstitutionnelle dans la mesure où elle conduit à mettre en place une fiscalité totalement confiscatoire , contraire à l'article XIII de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789. Cet article dispose que « pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens , en raison de leurs facultés ».

D'autre part, d'un point de vue économique, il n'est pas opportun de supprimer , via une taxation intégrale, le bénéfice de stock options ou d'actions gratuites. En effet, selon la théorie économique dite « théorie de l'agence », ce type de rémunération est nécessaire afin que les dirigeants ou les mandataires sociaux adoptent des politiques conformes aux intérêts des actionnaires qui les ont mandatés.

Enfin, d'un point de vue politique, la correction des dérives constatées passe avant tout, selon votre rapporteur général, par une plus grande responsabilisation des conseils d'administration, ou de surveillance, dans l'attribution de ces éléments de rémunération, ainsi qu'une plus grande vigilance de la part des actionnaires lors des assemblées générales.

Les stock-options sont suffisamment réglementées. La loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social a récemment encore renforcé les conditions d'exercice des options d'achat d'actions et de ventes des actions gratuites attribuées aux mandataires sociaux ou aux membres du directoire des entreprises cotées en bourse.

Dans ce domaine, il convient donc en priorité de concilier les exigences de la morale qui nécessitent la transparence (prévention du délit d'initiés et obligation de publication d'informations nominatives), et celles de l'efficacité économique qui supposent que le régime des stocks-options reste suffisamment attractif.

Décision de la commission : conformément à sa position d'ensemble, votre commission vous propose de ne pas adopter cet article.

ARTICLE 4 - Actualisation du plafonnement de l'indemnité de départ des dirigeants

Commentaire : le présent article a pour objet de préciser que le plafonnement de l'indemnité de départ des dirigeants prévue à l'article 2 de la proposition de loi est indexé sur l'indice des prix à la consommation.

Le présent article propose d'indexer le plafonnement de l'indemnité de départ des dirigeants prévu à l'article 2 de la proposition de loi sur l'indice des prix à la consommation.

Votre rapporteur général rappelle qu'il est défavorable aux propositions de fond formulées par la présente proposition de loi, et par conséquent défavorable au présent article.

Décision de la commission : conformément à sa position d'ensemble, votre commission vous propose de ne pas adopter cet article.

ARTICLE 5 - Application rétroactive de la proposition de loi

Commentaire : le présent article tend à appliquer les dispositions de la présente proposition de loi aux revenus de l'année 2008 et des années suivantes.

Le présent article propose d'appliquer les différentes mesures prévues par la proposition de loi à compter des revenus perçus en 2008.

Votre rapporteur général rappelle qu'il est défavorable aux propositions de fonds formulées par la présente proposition de loi, et par conséquent défavorable au présent article.

Décision de la commission : conformément à sa position d'ensemble, votre commission vous propose de ne pas adopter cet article.

ARTICLE 6 - Autorisation préalable des conventions dites « réglementées »

Commentaire : le présent article a pour objet de modifier le régime des conventions dites « réglementées » en donnant de nouvelles attributions à l'assemblée générale des actionnaires.

I. LE DROIT EXISTANT

Pour éviter les abus, sans pour autant interdire toute convention entre la société et ses dirigeants, la loi a défini trois types de conventions :

- les conventions qui sont interdites ;

- les conventions qui sont libres d'être contractées ;

- les conventions qui doivent être préalablement autorisées par le conseil d'administration. Le champ de ces conventions dites « réglementées » a été particulièrement étendu par l'article 105 de la loi n° 2001-420 relative aux nouvelles régulations économiques. Aux termes de l'article L. 225-38 du code de commerce, sont désormais soumises à une autorisation préalable, les conventions passées entre :

- la société et un administrateur ou un directeur général ;

- mais aussi entre la société et son directeur général, ou un de ses actionnaires détenant plus de 10 % des droits de vote, ou une société la contrôlant au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce.

La procédure relative aux conventions réglementées comporte cinq étapes : information du conseil d'administration, autorisation donnée par le conseil , information des commissaires aux comptes des conventions autorisées, dans le délai d'un mois à compter de la conclusion desdites conventions, rapport spécial des commissaires aux comptes et, enfin, consultation de l'assemblée générale, après audition du rapport spécial des commissaires aux comptes .

Si cette procédure n'a pas été respectée, la convention n'est pas nécessairement nulle. La nullité n'est en effet prononcée que si la convention n'a pas été préalablement autorisée, et si elle a eu des conséquences dommageables pour la société (article L. 225-42 du code de commerce). Si l'autorisation préalable du conseil a été obtenue, les vices ultérieurs de la procédure n'entraînent pas la nullité de la convention. La seule sanction est alors la responsabilité personnelle de l'administrateur, qui doit réparer le préjudice subi par la société. Si l'assemblée n'approuve pas la convention, il en est de même .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose de modifier trois articles du code de commerce.

La première modification concerne l'article L. 225-38 du code du commerce relatif aux conventions passées entre la société et son directeur général, ou ses directeurs généraux délégués, ou ses administrateurs, ou certains de ses actionnaires. Il prévoit de substituer l'autorisation préalable de l'assemblée générale des actionnaires à celle du conseil d'administration ;

- par coordination avec la première proposition, les deux autres modifications proposent d'amender les articles L. 225-39 et L. 225-42 du code de commerce afin de prévoir respectivement que :

- les conventions citées ci-dessus ne sont plus transmises au président du conseil d'administration mais à l'assemblée générale des actionnaires ;

- les conventions sont annulées en l'absence d'une autorisation préalable de l'assemblée générale des actionnaires, et non plus du conseil d'administration.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général est défavorable à cet article.

En effet, il ne convient pas de remettre en cause un système équilibré dans son principe. Comme il a été rappelé ci-dessus, la procédure de convention réglementée repose sur une autorisation préalable du conseil d'administration et la consultation de l'assemblée générale des actionnaires, après audition du rapport spécial des commissaires aux comptes consacré aux conventions réglementées. Si l'assemblée générale des actionnaires n'approuve pas les conventions, elle peut mettre en cause la responsabilité personnelle du ou des administrateurs.

Ce dispositif apparaît adéquat pour autant que chacun exerce avec responsabilité les missions qui lui sont confiées. La « bonne » gouvernance d'entreprise repose en effet sur le développement d'un système efficace de pouvoirs et de contre-pouvoirs, où la confiance faite aux acteurs est primordiale. A cet égard, il convient de garder à l'esprit le principe du mandat et le fait que les actionnaires ne sauraient être investis d'une mission trop étendue de surveillance.

Décision de la commission : conformément à sa position d'ensemble, votre commission vous propose de ne pas adopter cet article.

ARTICLE 7 - Extension de la négociation obligatoire aux rémunérations versées aux dirigeants salariés

Commentaire : le présent article a pour objet de modifier le code du travail afin de préciser que les éléments de rémunération versés aux dirigeants salariés de l'entreprise sont discutés dans le cadre de la négociation obligatoire.

I. LE DROIT EXISTANT

Aux termes des articles L. 2245-5 à L. 2242-14 du code du travail, la négociation obligatoire en entreprise porte sur les thématiques suivantes :

- égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;

- salaires et durée de travail ;

- régime de prévoyance maladie ;

- intéressement, participation et épargne salariale ;

- travailleurs handicapés.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article modifie l'article L. 2242-1 du code du travail afin de préciser que la négociation obligatoire en entreprise porte également sur les éléments de rémunération versés aux dirigeants salariés de l'entreprise, notamment sur les options de souscriptions ou d'achat d'actions.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur général est défavorable à cet article.

Sur un plan formel, la proposition de modifier l'article L. 2242-1 du code du travail n'est pas satisfaisante, puisque cet article organise les modalités de la négociation obligatoire et ne définit pas les matières soumises à cette négociation.

Sur le fond, votre rapporteur général estime que la proposition de cet article conduirait à changer le modèle économique actuel, ce qui ne lui parait pas opportun.

Par ailleurs, il rappelle que la loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008 relative aux revenus de travail a modifié l'article L. 225-186-1 du code de commerce afin de subordonner l'attribution de stock-options, ou d'actions gratuites, aux mandataires sociaux, à la distribution de stock-options ou d'actions gratuites à l'ensemble des salariés de l'entreprise ou à la mise en oeuvre d'un dispositif d'intéressement ou de participation volontaire ou dérogatoire.

Cette subordination permettra aux salariés d'être pleinement informés des distributions de stock-options, et par ailleurs d'en bénéficier.

Décision de la commission : conformément à sa position d'ensemble, votre commission vous propose de ne pas adopter cet article.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le jeudi 19 mars 2009, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général, et de l'amendement déposé sur la proposition de loi n° 29 (2008-2009) tendant à abroger le bouclier fiscal et à moraliser certaines pratiques des dirigeants de grandes entreprises en matière de revenus.

M. Jean Arthuis, président, a tout d'abord souligné que la discussion de cette proposition de loi en séance publique s'inscrit dans le cadre des nouvelles dispositions constitutionnelles, réservant notamment une séance mensuelle aux initiatives des groupes politiques d'opposition et des groupes minoritaires des assemblées (article 48, alinéa 5 de la Constitution).

M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est tout d'abord félicité que la discussion de cette proposition de loi soit l'occasion de clarifier le débat public sur des problématiques essentielles. L'ensemble des sept articles de la proposition de loi a été examiné avec attention.

La proposition de loi vise, d'une part, à supprimer le bouclier fiscal et, d'autre part, à restreindre les conditions d'octroi de certains modes de rémunération des dirigeants et mandataires sociaux. Or, le réexamen éventuel du bouclier fiscal ne devrait s'inscrire que dans le cadre d'une réforme fiscale plus globale. La discussion du projet de loi de finances pour 2009 l'a bien illustré, et plus particulièrement le débat relatif à l'amendement cosigné par MM. Jean Arthuis, Philippe Marini et Jean-Pierre Fourcade, qui proposait de lier la suppression du bouclier fiscal à l'abrogation de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et à la création d'une tranche supplémentaire d'impôt sur le revenu. Ce « triptyque » a trouvé un certain écho, mais la non-adoption de l'un des trois éléments déséquilibrerait l'équation sur laquelle il repose. D'autre part, dans une conjoncture de crise économique, une évolution de l'architecture fiscale d'une telle ampleur n'est pas envisageable.

Sous le bénéfice de ces observations, il a indiqué à la commission qu'il n'était pas favorable à l'adoption de cette proposition de loi.

Au regard de la situation économique et sociale de la France , M. Thierry Foucaud, premier signataire de la proposition , a considéré qu' « à une situation exceptionnelle » devrait correspondre « une mesure fiscale exceptionnelle ». Le bouclier fiscal fait l'objet d'appréciations divergentes y compris au sein de la majorité politique, et les renvois aux comparaisons internationales en matière de prélèvements obligatoires ne permettent pas, compte tenu de l'hétérogénéité des méthodes de calcul, de justifier objectivement ce dispositif.

Il a ensuite présenté les articles de la proposition de loi. La suppression du bouclier fiscal prévue à l'article 1 er répond aussi bien à l'indignation de certains citoyens qu'à l'inefficacité du dispositif qui, in fine, concerne peu de ménages et ne semble pas contribuer au retour des expatriés « fiscaux ». Les articles 2 à 5 modifient le traitement fiscal des rémunérations des dirigeants et mandataires sociaux afin de sanctionner l'absence de lien entre compétences et rémunération. Les articles 6 et 7 concernent les dirigeants salariés et les modalités de fixation de leurs rémunérations.

Mme Nicole Bricq a souligné que la proposition de loi permet d'aborder des débats essentiels, en remarquant toutefois qu'il se révèle difficile de discuter du bouclier fiscal que la majorité a érigé en « tabou ». Ce sujet pose à la fois un problème de solidarité et un problème de finances en temps de crise. En outre, les chiffres actuellement disponibles ne montrent pas de lien consubstantiel entre le bouclier, l'ISF et l'attractivité du territoire.

S'agissant de la rémunération des dirigeants, elle a indiqué que les auditions organisées par la commission des lois du Sénat, le 11 mars 2009, ont mis en avant le manque d'efficacité des codes de bonne conduite, tout comme du dispositif voté dans le cadre de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (TEPA) subordonnant le bénéfice des rémunérations différées au respect de conditions liées aux performances du bénéficiaire. Le rapport d'étape du groupe de travail commun à l'Assemblée nationale et au Sénat sur la crise financière a mis l'accent sur le rôle, dans la crise actuelle, des « pratiques à risque », notamment de certaines modalités de rémunération, et sur la nécessité d'y remédier. Enfin, le marché de recrutement des dirigeants reste national et l'argument de la nécessaire attractivité du régime de rémunération des dirigeants et mandataires sociaux n'est donc pas recevable.

M. Serge Dassault a indiqué être favorable à l'équation présentée par la commission concernant la suppression du bouclier fiscal, pour autant que la création d'une tranche supplémentaire d'impôt n'ait pas pour objectif de compenser intégralement la perte de recettes liée à l'abrogation de l'impôt sur la fortune. S'agissant de la rémunération des dirigeants, la priorité doit être avant tout le fonctionnement de l'économie et, par conséquent, la prévention des départs des personnes détentrices de capitaux et de compétences.

M. Jean-Pierre Fourcade a souligné le caractère instable de la fiscalité française, et la nécessité de pouvoir évaluer, au terme de quelques années, les dispositifs créés. Il a en outre jugé confiscatoire la mesure proposée à l'article 2 du projet de loi visant notamment à mettre en place une taxation totale des indemnités de départ au-delà de 250000 euros net de cotisations sociales.

M. Yann Gaillard s'est interrogé sur la situation des foyers fiscaux qui payent l'impôt sur la fortune alors même qu'ils n'ont pas de revenus ou disposent de revenus modestes. Il a insisté sur l'exigence d'avoir un débat complet sur les sujets abordés par la proposition de loi.

M. François Marc a souligné la nécessité de donner des signes de mobilisation collective pour répondre à la crise actuelle.

M. Jean Arthuis, président , a observé que la commission des finances défend le principe selon lequel toute disposition fiscale devrait être adoptée à l'occasion de la discussion d'une loi de finances. A titre personnel, il a considéré qu'il est difficile de défendre le bouclier fiscal lorsqu'il apparaît nécessaire d'augmenter l'effort national de contribution. De plus, le revenu servant de référence pour le calcul du bouclier fiscal est très contestable car il intègre des déductions provenant de nombreuses « niches ».

M. Thierry Foucaud a souhaité rappeler le rôle des salariés dans la formation de la valeur ajoutée dégagée par les entreprises. Il a également remarqué que l'instabilité fiscale française est une constante.

La commission a ensuite procédé à l'examen des articles et de l'amendement déposé sur cette proposition de loi.

Sous le bénéfice de la discussion générale, la commission n'a pas adopté l' article 1 er (suppression du bouclier fiscal).

Mme Nicole Bricq a présenté un amendement tendant à insérer un article additionnel avant l'article 2 afin de créer une cinquième tranche d'impôt sur le revenu pour les revenus dépassant 380000 euros. Le taux d'imposition s'élèverait à 50 %. L'objectif de cet amendement est de mettre fin aux excès les plus flagrants des rémunérations des dirigeants d'entreprises, en créant une sorte de « surimposition de solidarité » compte tenu de la période de crise économique et sociale que traverse la France.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a indiqué qu'il était défavorable à cette proposition car celle-ci n'est pas accompagnée par une abrogation de l'ISF. Il a répété que la crise actuelle ne permettait pas, en tout état de cause, d'engager une révision substantielle de la stratégie fiscale de la France.

La commission a rejeté cet amendement

Après une intervention de Mme Nicole Bricq indiquant que les Pays-Bas avaient choisi de lier le montant d'impôt sur les sociétés payé au montant des sommes versées aux dirigeants et mandataires sociaux au titre de certaines de leurs rémunérations, la commission n'a pas adopté l' article 2 (encadrement des indemnités de départ des dirigeants).

Ensuite, la commission n'a pas adopté les articles 3 (imposition totale des options d'achat d'actions ou « stock options » et des actions gratuites), 4 (actualisation du plafonnement de l'indemnité de départ des dirigeants), 5 (application rétroactive de la proposition de loi), 6 (autorisation préalable des conventions dites « réglementées ») et 7 (extension de la négociation obligatoire aux rémunérations versées aux dirigeants salariés) de la proposition de loi.

A l'issue de ce débat, la commission ne s'est pas déclarée favorable à l'adoption de la proposition de loi.

AMENDEMENT NON ADOPTÉ PAR LA COMMISSION

Article additionnel avant l'article 2

Amendement présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du Groupe socialiste, apparentés et rattachés

Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1 du I de l'article 197 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le dernier alinéa est complété par les mots : « et inférieure ou égale à 380 000 euros ; »

2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« - 50 % pour la fraction supérieure à 380 000 euros. »

* 1 Cf rapport d'étape du groupe de travail du 13 novembre 2008 : http://www.senat.fr/groupe_travail_situation_financiere/rapport_etape/rapport_etape.html

* 2 10 ème rapport de Proxinvest sur la rémunération des dirigeants relatif à l'exercice 2007.

* 3 Rapport n° 25 (2008-2009) de Mme Bernadette Dupont fait au nom de la commission des affaires sociales, et avis n° 32 (2008-2009) de M. Eric Doligé, fait au nom de votre commission des finances.

* 4 Compte-rendu des débats du Sénat, séance du 23 octobre 2008.

* 5 Compte-rendu des débats du Sénat, séance du 8 décembre 2008.

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