Article 48 (Articles L. 414-9 et L. 414-10 [nouveaux] du code de l'environnement) - Renforcement des plans nationaux d'action pour la protection des espèces menacées et des conservatoires botaniques nationaux

Commentaire : cet article vise à donner une assise législative aux plans nationaux d'action pour la protection des espèces menacées et aux conservatoires botaniques nationaux.

A - Les plans nationaux d'action pour la protection des espèces menacées

I. Le droit en vigueur

Les espèces de faune et de flore menacées sur le territoire national sont protégées par des règlementations internationales (conventions de Bonn, Berne, Eurobats ...), communautaires (directive n° 79/409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages et directive n° 92/43 du 21 mai 1992 précitée) et nationales.

Avec 641 espèces mondialement menacées présentes sur son territoire, la France se situe parmi les dix pays hébergeant le plus grand nombre d'espèces animales et végétales menacées. Or, des projections réalisées par la Commission européenne montrent que la continuation de leur détérioration au rythme actuel (0,2 % par an) aura un coût égal à 1 % du PIB mondial entre 2000 et 2010.

Les dispositions communautaires prévoient un objectif de résultat en termes de conservation des espèces requerrant, pour certaines d'entre elles, la mise en oeuvre d'actions complémentaires aux interdictions d'activité (de destruction, commerce et capture, en particulier) prévues par la réglementation précitée. Il peut s'agir d'études des espèces, de génie écologique, d'information du public, de description des modalités de prise en compte des espèces dans les activités sectorielles ...

Ces actions sont inscrites dans des plans d'action réalisés par l'Etat -plus précisément le ministère en charge de la protection de la nature- en métropole et dans des départements et régions d'outre-mer, et par les collectivités dans les collectivités d'outre-mer. Suite au « Grenelle de l'environnement », il a été décidé de mettre en oeuvre de tels plans d'action dans les cinq ans pour 131 espèces en danger critique d'extinction au niveau mondial et qui se trouvent présentes sur le territoire national : 43 le seront à l'initiative de l'Etat et 88 à l'initiative des collectivités d'outre-mer.

Or, ces plans d'action, bien qu'ils prennent une place de plus en plus importante dans le dispositif général de protection de la biodiversité, ne font l'objet d'aucune disposition législative. Cette absence est susceptible de freiner leur reconnaissance, leur prise en compte et leur intégration au sein du dispositif de protection relatif aux espèces protégées mis en place en application des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement.

II. Le dispositif du projet de loi

La première partie de l'article 48 du projet de loi tend à créer, après la section 2 (Orientations régionales de gestion et de conservation de la faune sauvage et de ses habitats) du chapitre IV (Conservation des habitats naturels, de la faune et de la flore sauvages) du titre I er (Protection de la faune et de la flore) du livre IV (Faune et flore) du code de l'environnement une section 3 intitulée « Plans d'action nationaux » comportant un unique article L. 414-9 leur conférant valeur législative.

Son premier alinéa prévoit le principe même de leur élaboration et , après consultation du public, de leur mise en oeuvre . Ces plans concerneront les espèces animales non domestiques visées aux articles L. 411-1 et L. 411-2, ainsi que des espèces d'insectes pollinisateurs.

Le fait de rehausser ces plans au niveau de la loi , sans donner un caractère obligatoire aux actions qu'ils contiennent et à la participation des acteurs y étant impliqués, devrait permettre de mieux légitimer l'action de l'Etat et d'obtenir une perception accrue des enjeux et une coopération plus poussée des partenaires politiques et économiques, ainsi que du grand public. Les bénéfices environnementaux découlant de la protection des espèces protégées par ces plans contribueront à améliorer le bien-être humain par le maintien desdites espèces et de leur écosystèmes, tandis que des retombées économiques sont attendues indirectement avec par exemple le développement de formes de tourisme y étant associées.

Le deuxième alinéa indique, de façon très générale, que ces plans tiennent compte des impératifs économiques, sociaux, culturels et de défense .

Le troisième alinéa prévoit l' information du public sur les actions inscrites dans les plans, durant toute leur durée et dans les secteurs géographiques concernés.

Le quatrième alinéa renvoie à un décret les modalités d'application de l'article.

III. La position de votre commission

Votre commission est entièrement favorable à la première partie de cet article, qui vise à procurer une valeur législative aux plans nationaux d'action pour la protection des espèces menacées. Leur montée en puissance et leur impact attendus en faveur de la préservation des espèces justifient de leur donner une place dans la partie législative du code de l'environnement aux côtés d'autres outils de protection de la biodiversité.

Sur proposition de M. Jean-Claude Merceron et les membres du groupe Union centriste, votre commission a simplement précisé que les plans nationaux d'action pour la conservation ou le rétablissement de certaines espèces animales doivent être élaborés et mis en oeuvre sur la base des données des instituts scientifiques compétents.

B - Les conservatoires botaniques nationaux

I. Le droit en vigueur

Les conservatoires botaniques nationaux (CBN) sont des établissements agréés par le ministère en charge de l'écologie, en application des articles D. 416-2 à D. 416-8 du code de l'environnement, sur une partie du territoire national pour la préservation de la flore sauvage.

De statut juridique divers (services d'établissements publics, syndicats mixtes ou associations) et comprenant en tout 270 salariés, ils font l'objet d'une subvention de l'Etat, avec lequel ils sont liés par des conventions pluriannuelles d'objectifs. S'y ajoutent des financements provenant des collectivités dont ils dépendent. On en compte aujourd'hui dix, soit neuf sur le territoire métropolitain et un pour l'île de la Réunion, Mayotte et les îles éparses. Les projets de création de nouveaux conservatoires devraient porter leur nombre à quatorze.

Les CBN ont pour rôle la mise en oeuvre des politiques publiques en faveur de la connaissance et de la conservation de la flore sauvage. Ils se sont progressivement investis dans la connaissance des habitats naturels et semi-naturels, suite notamment au développement du réseau Natura 2000. Ils permettent de fournir des inventaires floristiques à l'Observatoire de la biodiversité et de mettre à jour l'inventaire des zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique terrestres.

Malgré leur importance dans le suivi et la conservation de la biodiversité, les CNB ne sont pas inscrits dans la loi. Ce défaut d'officialisation législative freine leur reconnaissance et leur soutien par les différents partenaires concernés.

II. Le dispositif du projet de loi

La deuxième partie de l'article 48 du projet de loi vise donc à créer au sein du code de l'environnement, après la section 3 insérée par la première partie de l'article, une section 4 intitulée « Conservatoires botaniques nationaux » comportant un unique article L. 414-10.

Le premier alinéa indique le caractère public ou privé des CBN et leur agrément par l'Etat. Comme actuellement, celui-ci interviendra selon des critères biogéographiques.

Le deuxième alinéa précise leur mission , soit la mise en oeuvre des politiques de connaissance et de conservation de la nature menées par l'Etat, les collectivités territoriales et leurs groupements sur une partie du territoire dans les domaines de la protection de la flore sauvage et des habitats naturels et semi-naturels.

Le troisième alinéa prévoit le régime d'accès par le public aux informations qu'ils détiennent. Celles-ci seront délivrées par le CBN :

- sur demande de la personne intéressée ;

- à condition que la délivrance de l'information respecte les prescriptions du code de l'environnement et ne s'oppose pas, notamment, aux dispositions propres à assurer la protection des habitats et des espèces ;

- contre une contrepartie financière éventuellement.

Un décret en Conseil d'Etat est prévu pour préciser les modalités d'application de l'article. Il devrait notamment clarifier les relations entre l'Etat et les CBN, en vue d'un renforcement des conventions passées entre le ministère en charge de l'économie, les CBN et leur fédération.

III. La position de votre commission

Votre commission souscrit pleinement au II de cet article, qui tend à donner valeur législative aux dispositions concernant les CBN. Cette « remontée » de leur degré de normativité permettra de bien définir et clarifier leur organisation et leurs missions auprès de partenaires tels que les collectivités territoriales.

A l'initiative de Mme Muguette Dini et les membres du groupe Union centriste, votre commission a adopté un amendement créant, au sein du code de l'environnement, une section et un article consacrés aux conservatoires régionaux d'espaces naturels et précisant leurs missions, leur procédure d'agrément et leur représentation à travers une fédération.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

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