N° 177

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 décembre 2009

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de l' Inde sur le transfèrement des personnes condamnées ,

Par M. Jean BESSON,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Josselin de Rohan , président ; MM. Jacques Blanc, Didier Boulaud, Jean-Louis Carrère, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Jean François-Poncet, Robert Hue, Joseph Kergueris , vice-présidents ; Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet , secrétaires ; MM. Jean-Etienne Antoinette, Robert Badinter, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Jean-Pierre Bel, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Didier Borotra, Michel Boutant, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Mme Michelle Demessine, M. André Dulait, Mmes Bernadette Dupont, Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Paul Fournier, Mme Gisèle Gautier, M. Jacques Gautier, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Hubert Haenel, Robert Laufoaulu, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Rachel Mazuir, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean Milhau, Charles Pasqua, Xavier Pintat, Bernard Piras, Christian Poncelet, Yves Pozzo di Borgo, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Reiner, Roger Romani, Mme Catherine Tasca.

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

1550 , 1791 et T.A. 315

Sénat :

569 (2008-2009) et 178 (2009-2010)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi, adopté le 20 juillet dernier par l'Assemblée nationale, a pour objet d'autoriser l'approbation de la convention sur le transfèrement des personnes condamnées signée à New Delhi le 25 janvier 2008 entre l'Inde et la France.

Le transfèrement des personnes condamnées vise à permettre à un détenu étranger, à sa demande, de purger sa peine dans son Etat d'origine, sous réserve de l'accord de cet Etat et de l'Etat dans lequel la condamnation a été prononcée.

La convention du Conseil de l'Europe du 21 mars 1983 sur le transfèrement des personnes condamnées constitue l'instrument international de référence en la matière puisque 64 Etats, dont 46 Etats membres du Conseil de l'Europe et 18 Etats non européens, l'ont ratifiée. La France est également liée à une vingtaine d'Etats par une convention bilatérale de même type que celle conclue en 2008 avec l'Inde, très proche, dans ses dispositions, de la convention du Conseil de l'Europe.

Votre rapporteur évoquera le cadre international du transfèrement des personnes condamnées avant de présenter le dispositif de la convention franco-indienne du 25 janvier 2008.

I. LE CADRE INTERNATIONAL DU TRANSFÈREMENT DES PERSONNES CONDAMNÉES

Le rapport du directeur des Français à l'étranger et de l'administration consulaire, présenté le 9 septembre 2009 à la XI ème session de l'Assemblée des Français de l'étranger, nous apprend qu' au 31 décembre 2008, 1 963 ressortissants français, dont 160 femmes, étaient détenus à l'étranger . Ce chiffre est toutefois inférieur à la réalité, bon nombre de nos compatriotes incarcérés en Europe ne souhaitant pas que les autorités consulaires soient informées de leur situation.

Les 1 963 Français détenus à l'étranger au 31 décembre 2008

Union européenne et Europe occidentale : 1 173

Afrique du Nord : 371

Amérique centrale et du Sud : 115

Amérique du Nord : 88

Afrique francophone : 78

Asie-Océanie : 74

Proche et Moyen-Orient : 30

Europe continentale et Asie : 23

Afrique non francophone : 11

Nombre de détenus signalés aux autorités consulaires - Source : rapport du directeur des Français à l'étranger et de l'administration consulaire - 9 septembre 2009

Les affaires de drogue (consommation ou trafic) représentent 54 % des cas, les affaires restantes concernant des délits de droit commun pour 43 % et des délits sexuels pour 2 %.

Les ressortissants français détenus à l'étranger qui en font la demande peuvent bénéficier de la protection consulaire assurée par nos ambassades et consulats. Dès que la détention est connue, cette protection consiste à vérifier que nos compatriotes détenus ne sont pas maltraités, que leurs droits de la défense sont bien respectés (assistance d'un avocat dont les honoraires sont à la charge de la famille ou d'un avocat commis d'office par la justice locale), qu'ils peuvent communiquer avec leur famille, que ces dernières peuvent leur faire parvenir des aides financières afin d'améliorer leur ordinaire et que leurs éventuels problèmes médicaux sont pris en compte par les autorités pénitentiaires.

Les autorités françaises ne peuvent cependant pas intervenir dans le cours de la justice locale, ni se prononcer sur le fond d'une affaire de justice, ni assurer la défense de nos compatriotes devant les tribunaux, cette tâche incombant à leur avocat.

Le transfèrement consiste à permettre à un étranger condamné à une peine d'emprisonnement de purger sa peine dans son pays d'origine. La procédure requiert une demande préalable du condamné et l' accord des deux Etats , celui dont la juridiction a prononcé la condamnation et celui dont le condamné est ressortissant.

Le transfèrement répond à des considérations humanitaires , dans la mesure où les difficultés de communication, les barrières linguistiques et l'absence de contact avec la famille peuvent avoir des effets néfastes sur le comportement des détenus étrangers. Il vise aussi à favoriser la réinsertion sociale du détenu dans la perspective de sa libération.

Le transfèrement des étrangers condamnés peut s'envisager entre États au cas par cas sur une base de réciprocité.

Toutefois, la conclusion d'accords internationaux permet d'en faciliter et d'en encadrer la pratique.

L'instrument international de référence en la matière est la convention du Conseil de l'Europe du 21 mars 1983 sur le transfèrement des personnes condamnées .

Cette convention consacre le principe selon lequel un transfèrement est subordonné au consentement de l'État dans lequel la condamnation a été prononcée (État de condamnation), de l'État dont le condamné est ressortissant (État d'exécution), ainsi que du condamné lui-même. Elle définit également les procédures d'exécution de la condamnation après le transfèrement. La peine ou la mesure appliquée ne doit, ni par sa nature, ni par sa durée, être plus sévère que celle qui a été prononcée dans l'État de condamnation.

L'originalité de la convention du Conseil de l'Europe est d'être ouverte non seulement aux États-membres, mais également à tout État non membre.

Elle a été ratifiée jusqu'à ce jour par 46 des 47 États membres du Conseil de l'Europe , Monaco étant le seul Etat membre à ne pas l'avoir signée 1 ( * ) .

Elle a également été ratifiée par 18 Etats non membres du Conseil de l'Europe : Australie, Bahamas, Bolivie, Canada, Chili, Corée, Costa Rica, Equateur, Etats-Unis, Honduras, Israël, Japon, Maurice, Mexique, Panama, Tonga, Trinité et Tobago, Venezuela.

La France est donc liée à 63 États par la convention du Conseil de l'Europe sur le transfèrement des personnes condamnées , deux d'entre eux ayant par ailleurs conclu avec elle une convention bilatérale (Canada et États-Unis).

Elle est d'autre part liée à une vingtaine d'autres Etats par des conventions strictement bilatérales , notamment le Maroc, la Thaïlande, Djibouti, le Paraguay, Cuba, Hong Kong et les pays africains avec lesquels nos conventions générales de coopération ou d'assistance judiciaire comportent en outre des dispositions relatives au transfèrement des personnes condamnées.

Parmi les dernières conventions bilatérales signées figurent celles avec l'Inde (23 janvier 2008) et la République dominicaine (13 novembre 2009). Un avenant à la convention de transfèrement des prisonniers avec le Maroc a également été signé le 22 octobre 2007.

La négociation d'une convention de transfèrement est en cours avec le Brésil. La France souhaite également disposer d'un tel instrument avec la Colombie et l'Indonésie.

* 1 Monaco a indiqué mener une réflexion sur le transfèrement des personnes condamnées, la principale difficulté suscitée par son éventuelle adhésion étant que la convention du Conseil de l'Europe permet à l'Etat vers lequel le détenu est transféré de prononcer des mesures de grâce ou de commutation de peine, alors que la Convention franco-monégasque de voisinage du 18 mai 1963 prévoit que toute mesure de faveur bénéficiant aux condamnés de Monaco doit être décidée par la Principauté.

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