3. Les régulations nationales entre déclinaison des prescriptions internationales et recherche d'autonomie
a) Le risque de désynchronisation entre Europe et Etats-Unis

Après des atermoiements liés aux divergences entre le Congrès et le Gouvernement, les Etats-Unis semblent avoir « repris la main » en adoptant leur plus vaste réforme financière depuis 75 ans . La loi Dodd-Frank (« Wall Street Reform and Consumer Protection Act ») promulguée le 21 juillet 2010 a pu impressionner par son volume et son exhaustivité. Les Etats-Unis ont donc, du moins en apparence, repris une avance importante sur l'Europe, qui, compte tenu de son système institutionnel, ne peut progresser au même rythme.

Le tableau ci-après illustre, dans chaque domaine de la régulation bancaire et financière, les avancées enregistrées aux Etats-Unis, en Europe et en France.

L'étape déterminante franchie aux Etats-Unis n'est pas sans se heurter à certaines limites : de nombreuses mesures doivent encore être précisées par les régulateurs (les modalités d'enregistrement des hedge funds et des fonds de capital-investissement, le périmètre d'encadrement des produits dérivés, la règlementation des agences de notation, l'application des nouvelles normes de fonds propres...), qui disposent pour cela d'une assez grande latitude d'interprétation et d'application. En outre, la simplification de l'architecture de supervision est manifestement inachevée puisque seuls l' Office of the Comptroller of the Currency (OCC) et l' Office of Thrift Supervision (OTS) ont été fusionnés. La réforme ne sera donc pas pleinement applicable avant au moins deux ans.

En outre, la « performance normative » de l'Union européenne a progressé ces derniers mois - notamment avec la mise en oeuvre des tests de résistance et la quasi-adoption du « paquet supervision financière » - et pourrait s'accélérer d'ici mi-2011. Il n'en demeure pas moins que les différences de rythme et de contenu de part et d'autre de l'Atlantique marquent le retour d'un risque d' « arbitrage réglementaire » , c'est-à-dire d'optimisation par les acteurs des divergences de règlementation. En outre, les places financières d'Asie, telles Singapour et Hong-Kong, demeurent assez largement en marge du mouvement de régulation et espèrent en tirer profit.

La Commission européenne et les Etats membres doivent donc, à tout le moins, intensifier leur dialogue avec les autorités politiques et de régulation américaines . En effet, l'harmonisation transatlantique est nécessaire sur les réformes les plus structurantes, telles que « Bâle III » et la révision des normes comptables, quitte à en retarder l'application.

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