4. De nouvelles thématiques à traiter
a) La stabilité du système monétaire international

Ainsi qu'il a été évoqué plus haut, la sortie de crise crée de nouvelles incertitudes, notamment sur l'ampleur de la reprise et sur le « boomerang » que constituent les déficits publics de crise. Elle mobilise également les agendas international et européen sur de nouvelles thématiques, éventuellement distinctes de la régulation financière et qui seront vraisemblablement traitées par le G 20 sous présidence française, après le sommet de Séoul en novembre 2010.

En premier lieu, l'important écart de croissance entre les pays émergents, au premier rang desquels la Chine, et industrialisés, de même que l'impact du taux de change sur l'économie réelle 19 ( * ) et la récente crise de l'euro ont contribué à amplifier le débat sur une réforme du système monétaire international . Les appréciations divergent sur le maintien à long terme d'un système mono-devise, fondé sur le dollar, ou multipolaire, qui verrait le poids de l'euro et du yuan se renforcer. L'aspiration à une plus grande stabilité des taux de change, très répandue mais qui se heurte à maintes expériences non soutenables de parités fixes et à la nécessité d'assurer la crédibilité des banques centrales, ne trouve pas de consensus. Faut-il par exemple maintenir des taux intégralement « flottants », les encadrer dans des corridors « ajustables », voire revenir à un système proche de l'étalon-or ?

b) La gouvernance de la zone euro

En deuxième lieu, ainsi que cela a été débattu lors de l'examen de la deuxième loi de finances rectificative pour 2010 20 ( * ) , la crise de la dette de certains Etats européens et le soutien apporté par les Etats de la zone euro ont ravivé le problème de la gouvernance économique et politique de celle-ci . Si l'esprit du Traité a pu être contourné avec la création du Fonds européen de stabilité financière et les interventions de la BCE, l'organisation de la discipline budgétaire et la nécessité d'une meilleure coordination des politiques économiques n'ont pas réellement trouvé de solution.

c) La spéculation sur les matières premières

Enfin, dans un récent courrier conjoint adressé le 31 août aux commissaires européens en charge de l'agriculture, de l'énergie et du marché intérieur, plusieurs ministres du Gouvernement (Christine Lagarde, Jean-Louis Borloo et Bruno Le Maire) ont appelé la Commission européenne à prendre une initiative législative sur la régulation des marchés de produits dérivés sur les matières premières et assimilés .

Ce secteur illustre en effet la dualité des produits dérivés : initialement conçus comme des instruments de couverture contre certains aléas, ils peuvent aussi faciliter la spéculation et perturber la formation des prix des matières premières sous-jacentes. La forte volatilité des prix des céréales constatée en 2007 et 2008 a ainsi fait naître la crainte d'une contagion de la sphère financière à la sphère physique : selon un mécanisme « à rebours » similaire à celui suspecté sur les dérivés de crédit sur certaines obligations souveraines, les prix des matières premières seraient également influencés par les mouvements observés sur les marchés dérivés.

En outre, la règlementation européenne est incomplète : le régime de prévention et de sanction des abus de marché est mal adapté pour prévenir les manipulations croisées entre marchés physiques et financiers, et de nombreux acteurs échappent aux obligations prudentielles ou à celles imposées par la directive sur les marchés d'instruments financiers (« directive MIF »), compte tenu de la distinction entre instruments financiers (sans livraison physique) et contrats commerciaux à terme (avec livraison).

Des adaptations sont donc nécessaires , que ce soit dans le cadre de la révision des directives MIF et « Abus de marché », de la proposition de la Commission sur l'encadrement des dérivés de gré à gré, ou d'un nouveau texte normatif. Le commissaire européen Michel Barnier a cependant assuré avoir pris pleinement conscience de ces enjeux 21 ( * ) .


* 19 Compte tenu en particulier de la sous-évaluation du yuan.

* 20 Loi n° 2010-463 du 7 mai 2010 de finances rectificative pour 2010.

* 21 Il a ainsi déclaré, dans une interview à La Tribune le 10 septembre 2010, que « le texte sur les produits dérivés s'appliquera évidemment aux matières premières, mais (...) qu'il faut aller plus loin. Il faut réduire la spéculation sur les matières premières, en particulier agricoles qui est (...) scandaleuse. On doit pousser la réflexion plus avant en rétablissant le lien entre marché physique et marché financier et en repensant le défi de l'alimentation au niveau mondial ».

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