Rapport général n° 111 (2010-2011) de M. Jean-Marc TODESCHINI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 novembre 2010


N° 111

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 novembre 2010

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2011 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 5

ANCIENS COMBATTANTS, MÉMOIRE ET LIENS AVEC LA NATION

Rapporteur spécial : M. Jean-Marc TODESCHINI

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc , Serge Dassault, vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Yvon Collin, Philippe Dallier, Jean-Pierre Demerliat, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, André Ferrand, François Fortassin, Jean-Pierre Fourcade, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, MM. Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 2824, 2857, 2859 à 2865 et T.A. 555

Sénat : 110 (2010-2011)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Le budget de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » s'inscrit en baisse de 3,3 % avec 3,32 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Il respecte les objectifs de la programmation pluriannuelle mais fait cependant appel de façon croissante au soutien des programmes d'autres missions , essentiellement la mission « Défense » à hauteur de plus de 38 millions d'euros cette année .

2. Cette contraction budgétaire est essentiellement liée à la diminution des effectifs de la population pensionnée qui suit une pente régulière depuis plusieurs années. Le nombre de bénéficiaires de la pension militaire d'invalidité (PMI) chute en 2011 de 16 000 unités tout comme les bénéficiaires de la retraite du combattant de 60 000 unités . Mais cette baisse s'explique également par la poursuite de la réforme de deux services. Il s'agit de la suppression, en 2011, de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale (DSPRS) et de la poursuite de la réforme et de la rationalisation de la direction du service national (DSN) . Cette évolution se traduit par la suppression nette hors transferts de 373 emplois temps plein travaillés (ETPT).

3. Dans ce contexte de réforme, votre rapporteur spécial considère que le rôle de l'ONAC est conforté et souhaite que cet opérateur puisse poursuivre la reprise des activités qui lui sont confiées, dans les bonnes conditions déjà constatées à l'occasion du contrôle qu'il a effectué en début d'année conjointement avec le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, Janine Rozier. Cependant, il souhaite indiquer qu' indépendamment de la réforme, une difficulté sur la délivrance de la carte du combattant, qui est essentielle à l'octroi de nombreuses prestations, est apparue en 2010 . En effet, des retards de traitement sont à regretter en raison d'une nouvelle application informatique KAPTA, qui a connu des difficultés, et du stock accumulé de demandes qui s'explique par la disparition des commissions départementales d'attribution de la carte au profit de deux commissions nationales. Votre rapporteur spécial presse le Gouvernement d'oeuvrer à la résorption de cette difficulté qui tend à dépasser le simple cadre conjoncturel.

4. Dans un contexte budgétaire contraint , il note le maintien du niveau de prestation et souligne que les réductions des dépenses fiscales n'affectent pas cette mission qui se voit préservée en raison de la spécificité d'un public envers lequel la nation continue de manifester sa reconnaissance.

5. Votre rapporteur spécial reste attentif aux crédits consacrés aux travaux de rénovation de sépultures de guerre . Ces crédits sont renforcés cette année à hauteur de 1,5 million d'euros pour permettre d'arriver au rendez-vous de la commémoration du centenaire de la Grande Guerre dans les meilleures conditions. Votre rapporteur spécial, tout en souhaitant la pleine réalisation de cet engagement, considère cependant que l'objectif de 2014 reste une cible optimiste .

6. Enfin, attentif aux propositions de la commission chargée d'examiner les conclusions du rapport du préfet Jean-Yves Audouin, il examinera avec intérêt le prochain décret unique concernant les orphelins de guerre qui a vocation à corriger les imperfections du dispositif actuel .

A la date limite du 10 octobre, prévue par l'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), le secrétaire d'Etat à la défense et aux anciens combattants et ses services avaient répondu à l'ensemble des 66 questions concernant les programmes 167 et 169 formulées par votre rapporteur spécial, soit un taux de réponse de 100 % .

Les questions adressées concernant le programme 158 sous la responsabilité du secrétaire général du Gouvernement sont revenues à la même date avec un taux de réponse de 54 % .

AVANT PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » poursuit en 2011 plusieurs axes des réformes engagées les années passées dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP). Il s'agit principalement de la suppression , en 2011, de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale (DSPRS) et de la poursuite de la rationalisation de la direction du service national (DSN).

Un important débat trouve son terme avec le projet de loi de finances pour 2011, celui de la décristallisation des pensions militaires de retraite . Il tire les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2010, prise en application de la nouvelle procédure de QPC (question prioritaire de constitutionnalité).

Votre rapporteur spécial rappelle que les « prestations du feu », que sont les pensions militaires d'invalidité et la retraite du combattant financées par le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », font l'objet d'une décristallisation totale depuis la loi de finances pour 2007 .

Ainsi, l'article 100 du présent projet de loi de finances qui vise à achever la décristallisation des pensions militaires de retraite , même s'il ne relève pas de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » 1 ( * ) , ne pouvait être passé sous silence par votre rapporteur spécial qui veut souligner qu'il répare une injustice à l'égard du monde combattant tout en relevant son caractère non rétroactif.

2011 : ANNÉE DE CONTINUITÉ D'UNE TENDANCE GLOBALE BAISSIÈRE

A. UN BUDGET EN DIMINUTION DE 3,3% QUI S'INSCRIT DANS LES OBJECTIFS DE LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE

1. Une contraction régulière des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » qui s'accentue

Dans un contexte général marqué par les contraintes portant sur les finances publiques et grâce à la poursuite des réformes affectant deux de ses programmes, la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » participe à la contraction de la dépense publique. Après une baisse des crédits de paiements (CP) de 1,1 % en 2010, le projet de loi de finances pour 2011 (PLF 2011) a été construit sur une diminution légèrement inférieure à 3,3 % du budget de la mission, tant en autorisations d'engagements (AE) qu'en crédits de paiements (CP) .

Évolution des crédits de la mission
« Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation »

(en millions d'euros)

Montants ouverts en loi de finances initiale pour 2008

Montants ouverts en loi de finances initiale pour 2009

Montants ouverts en loi de finances initiale pour 2010

Montants demandés
pour 2011

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 167 - Liens entre la nation et son armée

166,0

165,0

183,5

163,2

150,1

155,4

127,4

134,3

Programme 169 - Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

3 362,2

3 361,5

3 201,7

3 201,7

3 178,3

3 178,3

3 069,6

3 069,6

Programme 158 - Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde guerre mondiale

141,8

146,5

106,0

105,4

96,5

97,0

115,7

115,1

Total

3 670,0

3 673,0

3 491,2

3 470,3

3 424,9

3 430,7

3 312,7

3 319,0

Source : commission des finances, à partir des projets annuels de performances annexés aux projets de loi de finances pour 2009, 2010 et 2011

Cette réduction globale des crédits, qui passent de 3,43 milliards d'euros à 3,31 milliards en AE et de 3,43 milliards à 3,32 milliards en CP, s'explique par plusieurs facteurs :

- la réorganisation de la direction du service national (DSN), décidée dans le cadre de la réforme globale du ministère de la défense, engagée depuis 2010, se traduit par une baisse des crédits liés aux dépenses de personnel du programme 167 « Liens entre la nation et son armée » ;

- l'année 2011 marque l'achèvement de la réforme engagée dès le 12 décembre 2007 visant la simplification et la modernisation de l'organisation des services aux anciens combattants. Cette réforme se traduit dans le budget du prochain exercice par une baisse très sensible des crédits liés aux dépenses de personnels du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ». Parallèlement les dotations allouées à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG ou ONAC) se voient renforcées pour conforter le rôle pivot confié à cet opérateur au service des anciens combattants ;

- la décroissance tendancielle des ayants droit trouve également sa manifestation budgétaire dans la baisse des crédits de titre 6, dépenses d'intervention du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ». Les moyens liés aux pensions militaires d'invalidité et à la retraite du combattant, ainsi que les allocations rattachées, avec près de 85 millions d'euros (AE et CP) de baisse entre 2010 et 2011 constituent cependant la principale marge d'évolution en chiffres absolus ;

- à l'inverse des autres programmes de la mission, le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde guerre mondiale », se caractérise par une augmentation de ses crédits de 19,9 % en AE et 18,6 % en CP . Cette hausse est essentiellement liée à la révision des prévisions concernant les différents dispositifs d'indemnisation.

2. Une baisse globale qui ne doit pas cacher une disparité entre les programmes

Le programme 167 « Liens entre la nation et son armée » rassemble les moyens mis en oeuvre pour sensibiliser un vaste public : les jeunes Français, notamment à travers l'organisation de la journée défense et citoyenneté (JDC) qui remplace, depuis la loi n° 2010-241 du 10 mars 2010 relative au service civique, la journée d'appel de préparation à la défense (JAPD). Derrière ce changement de dénomination, la JDC élargit aux questions de sécurité intérieure le spectre des sujets abordés.

Le programme regroupe également les actions en faveur de la politique de mémoire (commémorations, célébrations et investissements concernant le patrimoine commémoratif). La maquette budgétaire de cette année renforce la cohérence du programme en procédant au transfert de l'action 4 du programme 169 relative à l'entretien des lieux de mémoire au sein de l'action 2 « Politique de mémoire » du programme 167.

Le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » , dont l'intitulé évolue en raison du transfert mentionné ci-dessus, retrace l'ensemble des prestations relevant du droit à réparation, de la reconnaissance et de la solidarité au profit des bénéficiaires du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre (CPMIVG), principalement les anciens combattants et leurs ayants cause.

Le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde guerre mondiale » met en oeuvre la réparation prévue par les trois dispositifs institués depuis 1999.

La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » est donc une mission interministérielle qui regroupe trois programmes dont le poids et l'évolution budgétaire ne suivent pas une pente identique . Alors que la loi de finances pour 2010 avait vu l'ensemble des crédits des programmes baisser, le projet de loi de finances pour 2011 offre des perspectives différenciées pour le nouvel exercice.

Évolution des crédits des trois programmes de la mission

(en millions d'euros)

AE ouvertes
en LFI
pour 2010

AE demandées pour 2011

Evolution

CP ouverts
en LFI
pour 2010

CP demandés pour 2011

Evolution

Programme 167 - Liens entre la nation et son armée

150,1

127,4

- 15,1 %

155,4

134,3

- 13,6 %

Programme 169 -
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

3 178,3

3 069,6

- 3,4 %

3 178,3

3 069,3

- 3,4 %

Programme 158 - Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde guerre mondiale

96,5

115,7

+ 19,9 %

97,0

115,1

+ 18,7 %

Total de la mission

3 424,9

3 312,7

- 3,3 %

3 430,7

3 319,0

- 3,3 %

Source : commission des finances sur la base du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2011

La diminution d'ensemble constatée au niveau de la mission résulte de la part prépondérante prise par le programme 169 dans l'ensemble de la mission. En effet celui-ci représente près de 92,7 % des AE et 92,5 % des CP . Il en découle que ses variations peuvent masquer les évolutions des autres programmes. Le projet de loi de finances pour 2011 illustre ce phénomène.

En effet, la mission avec une contraction des dotations de 3,3 % en AE et CP entre les crédits ouverts pour 2010 et les crédits demandés pour 2011 est le miroir de la diminution des moyens du programme 169 (-3,4 % en AE et CP) mais ne reflète pas l'évolution des deux autres programmes qui connaissent, selon les cas, une forte évolution à la hausse ou à la baisse .

- dans le cas du programme 167, celui-ci subit une contraction de crédits de 15,1 % en AE et 13,6 % en CP qui s'explique essentiellement par les effets de la rationalisation entreprise de la DSN, direction qui gère l'essentiel de l'organisation de la JDC. L'action 1 « Journée défense et citoyenneté » qui porte les crédits de la JDC, connaît une baisse entre 2010 et 2011 de 17,5 % en AE et 15,5 % en CP . Cette diminution n'est qu'en partie masquée par le transfert dont bénéficie l'action 2 « Politique de mémoire » en provenance du programme 169 ;

- pour ce qui concerne le programme 158, il bénéficie en revanche d'une augmentation de ses crédits de 19,9 % en AE et 18,7 % en CP qui s'explique par une prévision à la hausse des indemnisations en raison de l'aboutissement de nouveaux dossiers de victimes.

Plus généralement, on constate sur la longue durée que les programmes 167 et 158 évoluent au fil des ans de façon erratique alors que le programme 169 suit une pente régulière . C'est en raison du poids de ce dernier programme que la mission dans son ensemble suit cette même pente, ce qui est un élément favorisant l'effort de programmation pluriannuelle.

3. Une baisse qui respecte les engagements pluriannuels de la loi de programmation budgétaire
a) Un respect des lois de programmation pluriannuelle...

La loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012, a engagé une diminution progressive, sur trois ans, des plafonds alloués à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » prenant, en particulier, en considération l'évolution de la démographie de cette mission.

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, actuellement en cours d'examen par le Parlement, confirme cette tendance baissière.

Plafonds des dépenses pour les années 2009-2013

(en milliards d'euros)

Autorisations d'engagement (AE)

Crédits de paiement (CP)

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2009

2010

2011

2012

2013

Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation »

3,49

3,44

3,34

3,17

3,07

3,47

3,45

3,34

3,17

3,07

Source : article 6 de la loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les données 2009 à 2011, et projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, pour les données 2012 et 2013.

b) ... qui ne doit pas masquer une analyse plus poussée des coûts de la mission

Votre rapporteur spécial note que le respect des plafonds de dépenses dans le cadre des programmations pluriannuelles se confirme chaque année et ne peut qu' encourager cet effort de prévisibilité . Cependant, l'étude des données analytiques concernant la mission confirme que les programmes de cette mission bénéficient de l'appui d'autres programmes, à hauteur de 38,4 millions d'euros pour le projet de loi de finances pour 2011 , provenant pour l'essentiel de la mission « Défense » et de façon plus marginale de la mission « Direction de l'action du gouvernement ».

Cette tendance s'accentue l'année prochaine, alors que les transferts ne représentaient que 30,9 millions en 2010 (+24,3 % en 2011 par rapport à 2010) . Ce constat conduit votre rapporteur spécial à souligner l'intérêt du maintien d'une présentation analytique de la prise en charge des coûts.

A titre d'illustration, le total des soutiens alloués au programme 167 passe de 24 millions d'euros en 2010 à 32,6 millions inscrits dans le PLF 2011 alors même que les crédits directs inscrits sur le programme diminuent de 13,6 % soit 21,2 millions d'euros en CP .

Une attention doit donc être portée, au delà des changements de maquette budgétaire, à ce que la diminution des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » ne soit pas la simple contrepartie du renforcement des soutiens qui lui sont apportés par ailleurs, afin de conserver un regard lucide sur l'évolution des dépenses.

B. UNE DÉPENSE FISCALE STABILISÉE À LA BAISSE ET ÉPARGNÉE

La dépense fiscale de cette mission se stabilise selon les prévisions pour 2011 à hauteur de 430 millions d'euros , soit le même chiffrage qu'en 2010. Ces dépenses sont portées exclusivement sur le programme 169 et se concentrent sur trois principales mesures :

- l' exonération d'impôt sur le revenu de la retraite du combattant, des pensions militaires d'invalidité, des retraites mutuelles servies aux anciens combattants et victimes de guerre ainsi que l'allocation de reconnaissance servie aux anciens membres des formations supplétives de l'armée française en Algérie et à leurs veuves pour un montant de 200 millions d'euros . Elle a été créée en 1934 ;

- la demi-part supplémentaire pour les contribuables (et leurs veufs/veuves) de plus de 75 ans titulaires de la carte du combattant pour 195 millions d'euros . Cet avantage date de la fin de la Seconde guerre mondiale ;

- la déduction des versements effectués en vue de la retraite mutualiste du combattant pour 35 millions d'euros . Elle a été créée en 1941.

Votre rapporteur spécial souligne l'ancienneté de ces différentes mesures. Leur légitimité est étroitement liée à la reconnaissance que la Nation témoigne à ses anciens combattants et leur coût non négligeable, 12,9 % des crédits de la mission hors dépenses fiscales, doit se lire en fonction de la pente naturelle à la baisse, de la population des pensionnés .

Votre rapporteur spécial rappelle que dans le cadre de la réforme des « niches fiscales » décidée par le Gouvernement, les mesures en faveur du monde combattant ne sont à aucun moment concernées .

C. UNE DIMINUTION DES PLAFONDS D'EMPLOIS QUI SE POURSUIT

Les effets des réformes engagées se traduisent spécifiquement par une contraction sensible des dotations de titre 2 (dépenses de personnel) . Ainsi, alors que la baisse du budget de la mission est de 3,3 %, l'évolution des dépenses de titre 2 est sans proportion avec cette diminution modérée.

Les dépenses de personnel passent en effet, pour l'ensemble de la mission, en 2010, de 152,7 millions d'euros à 116 millions en 2011. Cette évolution représente une chute de 24 % des dépenses liées aux personnels directement pris en charge par la mission.

Cette observation budgétaire trouve une traduction dans la différence de plafonds d'emplois ouverts entre l'année 2010 et l'année 2011. Ainsi, pour un plafond ouvert de 3 035 emplois équivalent temps plein travaillé (ETPT) en 2010, le PLF 2011 laisse apparaître une réduction de 663 ETPT pour un total autorisé pour l'exercice 2011 de 2 372 ETPT .

Cette diminution globale de près de 22 % des ETPT en un an doit être considérée comme une contraction nette des personnels impliqués au service des différentes actions du programme. Elle doit cependant être relativisée puisque plusieurs transferts de personnels sont opérés vers la mission « Défense » et vers les opérateurs que sont l'ONAC et la Caisse nationale milita ire de sécurité sociale (CNMSS) pour un total de 290 ETPT.

II. TROIS PROGRAMMES MARQUÉS PAR LA POURSUITE DES RÉFORMES ET DES AJUSTEMENTS

A. UN PROGRAMME N° 167 « LIENS ENTRE LA NATION ET SON ARMÉE » MARQUÉ PAR UN SOUCI RENFORCÉ DE COHÉRENCE

Répartition des crédits entre les actions du programme n° 167

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

LFI 2010 retraitée 2 ( * )

PLF 2011

Évolution

LFI 2010 retraitée

PLF 2011

Évolution

Action 1 « Journée défense et citoyenneté »

140,4

115,9

- 17,5 %

145,3

122,8

- 15,5 %

Action 2 « Politique de mémoire »

9,7

11,5

+ 18,5 %

10,1

11,5

+ 13,8 %

Total

150,1

127,4

- 15,1 %

155,4

134,3

- 13,6 %

Source : commission des finances sur la base du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2011

L'évolution des crédits du programme 167 en 2011 répond à deux préoccupations principales:

- d'une part, la poursuite de la réforme de la DSN qui se traduit par une réduction des effectifs, avec la suppression de 211 emplois équivalent temps plein travaillé (ETPT), ramenant le plafond d'emplois de la direction à 2 081 ETPT ;

- d'autre part, le renforcement de la cohérence de la mission avec le transfert au sein de l'action 2, des dotations de l'action 4 du programme 169 « Entretien des lieux de mémoire ». Ce mouvement se traduit en particulier par l'apport de 32 ETPT correspondant aux personnels recrutés locaux employés pour l'entretien des nécropoles et cimetières militaires à l'étranger.

1. Une réforme de la DSN qui se poursuit

Engagée dans une importante démarche de rationalisation de son fonctionnement, la DSN resserre son organisation. Au 1 er juillet 2011, elle sera constituée, en métropole, de cinq établissements du service national (ESN) auxquels seront rattachés des centres de production. L'année 2011 verra la création des trois ESN restant : nord-est, nord-ouest et sud-ouest.

L'action 1 «  Journée défense et citoyenneté » constitue la principale action de ce programme. Son budget passe de 145,3 millions d'euros en 2010 à 122,8 millions d'euros en 2011 en CP . Sur les 22,5 millions de réduction budgétaire envisagée, votre rapporteur spécial constate que la part principale provient de la diminution du plafond d'emplois .

Le titre 2 est, en effet, à lui seul à l'origine de 18,7 millions d'économies . Selon les évolutions du schéma d'emploi, 5,2 millions d'euros sont directement liés au plafond d'emplois 2011 . Les gains sont également la conséquence de la diminution de 201 ETPT en 2010 et des répercussions des diminutions successives d'emplois sur le versement de la dotation au compte d'affectation spéciale « Pensions », qui chute de 10,9 millions soit une baisse de 27 %. Le reliquat de 2,6 millions d'euros s'explique par les différents transferts vers d'autres programmes.

En ce qui concerne le fonctionnement de la Journée défense et citoyenneté (JDC) , on remarque qu' en apparence son coût tend à baisser puisqu'après une prévision - hors titre 2 - de 20,7 millions d'euros en AE et 25,6 millions en CP pour 780 000 jeunes en 2010 , le projet annuel de performances (PAP) annexé au projet de loi de finances pour 2011 anticipe pour la JDC une enveloppe de 14,8 millions (-9,8 %) en AE et 21,8 millions (- 14,8 %) en CP pour 2011 pour une population prévisionnelle, elle-même en baisse, de 766 000 jeunes .

Cependant, en regardant le détail de la répartition des coûts de la JDC, on constate qu'une ligne « fonctionnement courant » disparaît entre 2010 et 2011. Celui-ci fait l'objet d'un transfert vers le programme 178 « Préparation et emploi des forces » de la mission « Défense ». D'un montant de 5,2 millions d'euros en 2010, son chiffrage pour 2011 est évalué à 6,1 millions en AE et en CP . Il convient donc de relativiser la diminution apparente constatée.

Tous coûts confondus, le fonctionnement de la JDC, hors dépenses de personnels, ne diminue pas puisqu'il passerait, hors changement de maquette budgétaire, de 25,6 millions d'euros à 27,9 millions en 2011 . Cette augmentation s'explique en partie, pour 0,6 million, par l'augmentation du poste alimentation et pour 0,4 millions par le marché public du module secourisme dont la troisième annuité est plus élevée que les deux précédentes.

Au final la réforme de la DSN permet aux gestionnaires de ce programme d'afficher des ambitions à la hausse pour la réduction du coût moyen par participant de la JDC 3 ( * ) . Cette réduction s'appuie essentiellement sur la rationalisation des services de la DSN .

L'objectif de performance constitué par le coût de la JDC présentait une cible 2010 de 190 € par participant ; les cibles sont respectivement de 180 € pour 2011 et 170 € pour 2013. Tout en saluant cet effort d'efficacité, votre rapporteur spécial rappelle qu'il avait, lors la loi de règlement des comptes pour 2009, « constaté une concordance entre la baisse du coût de revient et la baisse du niveau de satisfaction » 4 ( * ) . Cette corrélation a été relativisée par les gestionnaires du programme qui ont mis en avant, pour expliquer le faible niveau de satisfaction manifesté par les participants à la JDC, l'existence d'un test de satisfaction électronique défaillant qui a depuis été amélioré. Cependant, votre rapporteur spécial demeurera attentif à ce qu'une logique de bonne gestion nécessaire ne se fasse pas au mépris de l'objectif premier assigné à la JDC .

2. Le regroupement cohérent de la mémoire en une même action

La deuxième action du programme « Politique de mémoire » est nettement moins importante budgétairement. Elle connaît une augmentation de 18,5 % en AE et 13,6 % en CP en raison essentiellement d'un transfert du programme 169 qui renforce sa cohérence, ce dont se félicite votre rapporteur spécial.

Votre rapporteur spécial souhaite insister sur deux éléments :

- ce transfert permet une simplification du schéma d'organisation . En effet, la politique de mémoire dans son ensemble est mise en oeuvre par la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA) du ministère de la défense. A l'échelon local cette politique est relayée par l'ONAC ;

- un effort de plus de 4,6 millions est engagé dans ce budget pour poursuivre l'objectif de rénovation globale des nécropoles militaires pour le centenaire de la Première guerre mondiale. Ceci représente un effort supplémentaire de 1,5 million d'euros par rapport à l'année 2010 . Votre rapporteur spécial, tout en notant la détermination du Secrétariat d'Etat, s'interroge cependant sur la faisabilité d'une rénovation complète pour le rendez-vous de 2014.

B. LE PROGRAMME N° 169 « RECONNAISSANCE ET RÉPARATION EN FAVEUR DU MONDE COMBATTANT » : ENTRE RÉFORME ET CONTRAINTES

Le principal programme de la mission qui regroupe plus des 9/10 e des dotations connaît en 2011 quelques changements tout en préservant le nécessaire maintien de la qualité des prestations offertes aux pensionnés.

La grande masse des crédits, 97,1 %, est constituée de dépenses d'intervention . Cette spécificité explique que l'essentiel de l'évolution du programme est fonction de l'évolution des droits des bénéficiaires, obéissant elle-même à des critères démographiques.

Évolution des crédits du programme 169

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

LFI 2010

retraitée 5 ( * )

PLF 2011

Évolution

LFI 2010

retraitée

PLF 2011

Évolution

Action 1 - « Administration de la dette viagère »

2 587,0

2 502,0

-3,3 %

2 587,0

2 502,0

-3,3 %

Action 2 - « Gestion des droits liés aux pensions militaires d'invalidité »

213,7

198,7

- 7 %

213,7

198,7

- 7 %

Action 3 - « Solidarité »

334,6

345,9

+ 3,4 %

334,6

345,9

+ 3,4 %

Action 5 - « Soutien »

33,0

13,0

- 60,6 %

33,0

13,0

- 60,6 %

Action 6 - « Réparation des conséquences sanitaires des essais nucléaires français »

10,0

10,0

0 %

10,0

10,0

0 %

Total

3 178 ,3

3 069,6

- 3,4 %

3 178,3

3 069,6

- 3,4 %

Source : commission des finances sur la base du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2011

1. Un objectif : les engagements contractés à l'égard des populations combattantes
a) Des chiffres qui reflètent la prise en compte d'une régression démographique de la population des anciens combattants

L'un des principaux traits de ce budget est la constance de la diminution des budgets alloués aux deux premières actions « Administration de la dette viagère » et « Gestion des droits liés aux pensions militaires d'invalidité ». Cette diminution tient compte de la réalité de l'évolution de la population des ressortissants .

En cinq ans les effectifs pensionnés ont ainsi diminué régulièrement, passant, de 2006 à la prévision pour 2011, de 380 034 à 304 772 pour les bénéficiaires de la pension militaire d'invalidité et des victimes de guerre (PMI) et de 1 499 211 à 1 278 201 pour le nombre de bénéficiaires de la retraite du combattant . Entre 2010 et 2011, le nombre de bénéficiaires de la PMI baisse de 16 000 et celui des bénéficiaires de la retraite du combattant de 60 000.

La consommation des crédits suit cette tendance mais à un moindre rythme , car elle prend en compte diverses majorations, entre autres, celle de la valeur du point d'indice PMI.

Les principales catégories de bénéficiaires sont inéluctablement appelées à voir leurs effectifs décroître, alors que les nouvelles entrées ne compensent pas les sorties.

Concernant la principale action de ce programme, l'action 1 « Administration de la dette viagère », votre rapporteur spécial souligne que, dans un contexte budgétaire difficile, l'effort constant d'amélioration du ratio entre le budget des prestations et le nombre de pensionnés n'a pas cessé de croître ces dernières années . Ainsi, ce ratio est-il passé de 5 319 euros en 2006 à 5 468 euros pour la LFI 2011 en ce qui concerne la PMI. Dans le même temps le ratio de la retraite du combattant passait de 447 euros à 606 euros.

Votre rapporteur spécial rappelle que lors des trois derniers exercices budgétaires les rythmes de diminution des crédits ont toujours été inférieurs à ceux des effectifs concernés . Ceci s'explique principalement par la modification des règles de calcul de la PMI et de la retraite du combattant par la loi de finances de 2005. Le point d'indice est, depuis, révisé proportionnellement à l'évolution de l'indice d'ensemble des traitements bruts de la fonction publique de l'État. Ainsi, en 2011 l'application de ce « rapport constant » aura un coût de 4,47 millions d'euros pour les PMI et de 2,06 millions pour la retraite du combattant .

L'action 2 « Gestion des droits liés aux pensions militaires d'invalidité », qui représente 6,5 % des crédits du programme et concentre les crédits destinés aux soins médicaux gratuits et à l'appareillage, connaît une diminution de 15,05 millions d'euros de ses crédits en AE et CP soit une baisse de 7,1 % entre 2010 et 2011 .

Votre rapporteur spécial rappelle que, certes une partie de cette baisse des crédits est liée à la diminution de la population concernée , mais qu'une fraction essentielle de la diminution de 9,73 millions d'euros de la sous-action « soins médicaux gratuits et appareillage » est due, à hauteur de 6,1 millions, à la non reconduction d'une avance pour transfert d'activité faite en 2010 à la Caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS).

Votre rapporteur spécial tient par ailleurs à souligner que les droits des anciens combattants sont étroitement liés à l'obtention de la carte du combattant . Un certain nombre de dysfonctionnements sont apparus durant l'année 2010, sans lien direct avec la réforme engagée de la DSPRS, qui pénalisent les prétendants à l'obtention de la carte. En effet, une procédure nouvelle, d'informatisation du traitement des cartes a été mise en place avec le logiciel KAPTA. Celui-ci a connu quelques difficultés, qui sont en passe d'être surmontées selon les autorités responsables. Cependant, ces difficultés ont été renforcées par la suppression des commissions départementales de la carte du combattant, remplacées par deux commissions nationales regroupant la délivrance des différents titres. Ce passage s'est accompagné de la constitution d'un stock de demandes ayant accumulé un retard de traitement.

Tout ceci a participé à un engorgement qui a été relevé par votre rapporteur spécial. Il tient donc à attirer l'attention du Gouvernement sur la nécessité de concentrer des moyens forts pour mettre un terme à cette situation pénalisante qui suscite une incompréhension croissante au sein du monde combattant.

b) Le difficile respect des engagements pris dans un contexte budgétaire contraint

C'est dans ce contexte budgétairement contraint que s'exprime la forte revendication du monde combattant de voir respecté l'engagement du Président de la République de porter l'indice applicable à la retraite du combattant à 48 points en 2012 .

Le projet de loi de finances ne fait qu' étendre en année pleine en 2011 la revalorisation de deux points, à 43 points , votée dans le cadre de la loi de finances pour 2010. Cette mesure génère à elle seule un coût évalué à 27,91 millions d'euros l'an prochain .

Lors des débats à l'Assemblée nationale, plusieurs amendements tendant à augmenter l'indice ont été déposés conduisant le Gouvernement à présenter lui-même un amendement . Cet amendement gouvernemental, auquel la commission des finances de l'Assemblée nationale a donné un avis favorable, permettrait de porter l'indice à 44 points et de s'approcher ainsi un peu plus rapidement de la cible des 48 points.

Selon les données fournies à votre rapporteur spécial, ce nouvel effort serait d'un peu plus de 4,6 millions d'euros pour 2011 pour une mesure applicable au 1 er juillet . Selon les éléments de calcul fournis par le ministère, la valeur d'un point nouveau en 2011 est de 18,4 millions . Le versement de la retraite se fait de façon semestrielle à la date anniversaire du pensionné et six mois plus tard. De ce fait le besoin de financement, avancé par le Gouvernement, serait, en 2011, d'un quart de point.

Cette mesure, qui représente 0,6 % des crédits de paiement de la retraite du combattant, semble raisonnablement finançable pour l'exercice 2011. Il est toutefois à noter que ce nouvel engagement se répercutera de façon démultipliée sur les exercices 2012 et 2013 et donc sur la programmation pluriannuelle.

2. 2011 : de la dernière étape de la réforme de la DSPRS à la consécration de l'ONAC
a) Une année qui marque la disparition de la DSPRS

L'année 2011 sera une étape décisive dans la mise en oeuvre de la réforme de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion professionnelle (DSPRS). Elle marque, en effet, la dernière année d'une réforme engagée en 2007. Votre rapporteur spécial ne reviendra pas sur les modalités de cette réforme qu'il a déjà eu l'occasion d'aborder avec sa collègue, Janine Rozier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, dans un récent rapport d'information 6 ( * ) .

Il souhaite cependant rappeler que quinze directions déconcentrées et services vont disparaître tout au long de l'année prochaine avant que l'administration centrale de la DSPRS ne disparaisse à son tour le 31 décembre 2011. En termes budgétaires, cette réorganisation se traduit pour l'essentiel par la forte baisse, de 60,6 % des crédits de l'action 5 « Soutien » qui, entre 2010 et 2011, perd plus de 20 millions d'euros essentiellement en dépenses de personnel (soit 17,9 millions).

Ainsi, le projet annuel de performance du PLF 2011 laisse-t-il apparaître une réduction de 510 ETPT pour cette action. Il convient de préciser que sur ce chiffre, 162 ETPT nets ont été supprimés, le différentiel correspondant à des transferts au sein de la mission et hors mission, ainsi qu'au bénéfice des opérateurs que sont l'ONAC et la CNMSS.

L'économie réelle pour le budget de l'État doit donc être relativisée, le gain net lié à la réforme de la DSPRS en 2011 étant légèrement supérieur à 5,9 millions d'euros auxquels il convient d'ajouter 5,1 millions au titre du versement au compte d'affectation spéciale « Pensions ». Le reste de la diminution des crédits correspond à des transferts d'effectifs et de crédits.

b) La consécration de l'ONAC dans son rôle pivot

La volonté des animateurs de la réforme de la DSPRS a toujours été de garantir une réforme à droit constant et à niveau de prestations comparable , ce qui explique en partie les économies limitées engendrées en 2011 par la disparition des services de la DSPRS. Dans le cadre de cette réforme un acteur est renforcé et consacré : l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC).

L'ONAC voit en premier lieu la dotation d'action sociale de 19,6 millions d'euros, qui lui est versée pour remplir sa mission de solidarité, reconduite à l'identique de celle de 2010. Cette dotation comporte en particulier l'enveloppe de 5 millions, également reconduite, bénéficiant aux conjoints survivants particulièrement des veuves d'anciens combattants.

L'ONAC voit surtout la traduction budgétaire de ses nouvelles missions à travers l'augmentation de sa subvention pour charges de service public majorée de plus de 4,7 millions d'euros . Il s'agit pour l'essentiel d'une augmentation de 4,21 millions de la subvention liée à la mise en oeuvre de la deuxième étape du transfert d'activités de la DSPRS (dont 3,17 millions au titre des rémunérations et charges sociales des 64 ETPT des services d'Afrique du Nord).

Au titre des charges de service public, le budget alloué à l'ONAC passe de 53,1 millions d'euros à 57,8 millions tant en AE qu'en CP.

Votre rapporteur spécial rappelle par ailleurs que par référé n° 52449 du 25 juillet 2008, la Cour des comptes a invité l'ONAC et sa tutelle à encadrer le développement des missions de l'établissement public, à faire évoluer ses modes de gouvernance pour les rendre plus opérationnels et à renforcer les contrôles internes de l'activité et de la performance au sein de l'office. Il conviendra de veiller à ce que toutes ces orientations, qui ont été prises en compte dans le contrat d'objectifs et de moyens 2009-2013 approuvé par le conseil d'administration de l'ONAC signé en janvier 2009, soient mises en oeuvre .

3. La réparation des conséquences sanitaires des essais nucléaires français

Le projet de loi de finances pour 2011 prend en considération toutes les conséquences du vote de la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français. Les victimes civiles et militaires des essais peuvent déposer des dossiers de demande d'indemnisation instruits par un comité d'indemnisation dont le poids budgétaire est assuré par la mission « Défense ».

Afin de faire face à l'afflux de demandes, dont l'évaluation est encore à ce stade difficile comme l'avait indiqué la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées lors de la discussion du projet de loi, il a été décidé de reconduire le montant de la provision votée en 2010, soit 10 millions d'euros . Votre rapporteur spécial tout en reconnaissant la nécessaire mise en place de provisions, souhaite que cette logique laisse rapidement place à une vision analytique plus avancée.

4. Des dossiers qui restent en attente de réponses

Parmi les dossiers aux conséquences budgétaires non négligeables, l'un a acquis une importance toute particulière ces dernières années à la suite de l'adoption de la loi n° 1999-882 du 18 octobre 1999 visant à substituer à l'expression « opérations effectuées en Afrique du Nord » les expressions « guerre d'Algérie » ou « combats en Tunisie et au Maroc » dans plusieurs dispositions du Code des Pensions Civiles et Militaires de Retraite : il s'agit de l'octroi du bénéfice de la « campagne double » aux anciens combattants d'Afrique du Nord , seule la campagne simple étant jusqu'alors accordée pour les opérations qui se sont déroulées entre 1952 et 1962.

Pour mémoire, le Conseil d'État, saisi par le ministre délégué aux anciens combattants de questions relatives aux contraintes juridiques auxquelles seraient soumises des dispositions tendant à attribuer le bénéfice de la « campagne double » pour les services accomplis en Afrique du Nord, avait rendu un avis le 30 novembre 2006.

Cet avis précisait que le bénéfice de la bonification dite de « campagne double », prévue au A de l'article R. 14 du Code des Pensions Civiles et Militaires de Retraite, doit, être attribué à ceux des ressortissants de ce code qui ont participé à des opérations de guerre , c'est-à-dire qui ont été exposés à des situations de combat.

Le Conseil d'État jugeait qu'il appartenait au ministre chargé des anciens combattants et au ministre du budget de définir les circonstances de temps et de lieu permettant d'identifier les situations de combat ouvrant droit au bénéfice de cette bonification.

Le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants s'était alors engagé pour que soit préparé et publié un décret ouvrant le droit à la « campagne double » selon les critères retenus par le Conseil d'État. C'est ainsi qu'a été pris le décret n° 2010-890 du 29 juillet 2010 portant attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d'Afrique du Nord .

L'article 3 du décret limite la possibilité de révision des retraites liquidées aux seules retraites liquidées à partir du 19 octobre 1999 soit le lendemain de l'entrée en vigueur de la loi du 18 octobre 1999 précitée. Lors de son audition à l'Assemblée nationale 7 ( * ) , le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants, tout en rappelant que le pouvoir règlementaire avait été au maximum de ce que la loi permettait, a fait savoir qu'il était favorable à ce qu'un point soit fait en 2011 sur les modalités d'application du décret et les éventuelles difficultés soulevées par celui-ci .

Le coût induit du décret devrait être globalement, sur les dix années à venir, de près de 0,6 million d'euros pour les pensionnés de l'État.

C. UN PROGRAMME N° 158 « INDEMNISATION DES VICTIMES DES PERSÉCUTIONS ANTISÉMITES ET DES ACTES DE BARBARIE PENDANT LA SECONDE GUERRE MONDIALE » EN MAL DE PRÉVISIBILITÉ

Le programme 158 se compose de deux actions : l'action 1 « Indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation » , qui prend en charge l'indemnisation prévue par les décrets n° 99-778 du 10 septembre 1999 et n° 2000-657 du 13 juillet 2000, et l'action 2 « Indemnisation des victimes d'actes de barbarie durant la Seconde guerre mondiale » , qui traduit les engagements financiers découlant du décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004. Les dépenses de ce programme sont constituées, pour l'essentiel, des indemnisations versées sous forme de rente ou sous forme de capital aux victimes définies par les trois décrets précités.

Répartition des crédits entre les actions du programme n° 158

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

LFI 2010

PLF 2011

Évolution

LFI 2010

PLF 2011

Évolution

Action 1 -« Indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation»

51,8

64,3

+ 24,1 %

52,3

63,6

+ 21,6 %

Action 2 -« Indemnisation des victimes d'actes de barbarie durant la Seconde guerre mondiale »

44,7

51,4

+ 15 %

44,7

51,5

+ 15,2 %

Total

96,5

115,7

+ 19,9 %

97,0

115,1

+18,7 %

Source : commission des finances sur la base du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2011

Ce programme bénéficie d' une augmentation de ses crédits de 18,7 % en CP entre 2010 et 2011 .

En ce qui concerne la première action « Indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation », elle voit ses crédits croitre de 11,37 millions d'euros en CP (+21,6 % à 63,6 millions d'euros) . La revalorisation de la rente viagère annuelle de 2,5 % sur laquelle s'est engagé le Gouvernement, et qui porte cette rente à 5 910,12 euros sur l'année pour l'ensemble des orphelins de victimes n'explique qu'une légère partie de cette augmentation.

En effet, c'est la croissance du nombre des dossiers de spoliations traités attendus, 1 100 en 2011 contre 800 en 2010, qui justifie la plus grande partie de cette progression, avec une enveloppe supplémentaire de 8,92 millions d'euros .

L'action 2 « Indemnisation des victimes d'actes de barbarie durant la Seconde guerre mondiale », pour sa part voit ses crédits augmenter de plus 6,73 millions d'euros en CP . Toutes les catégories de bénéficiaires des indemnisations augmentent sensiblement selon les prévisions pour 2011, quel que soit le mode d'indemnisation choisi, en rente ou en capital.

Votre rapporteur spécial exprime à nouveau son souhait d'une prévisibilité renforcée en matière d'évolution des crédits de ce programme , tout en reconnaissant la difficulté de l'exercice.

Il rappelle également qu'il a déjà souligné une certaine incohérence dans la budgétisation des dépenses de personnels, exclusivement affectées à l'action 1 , à hauteur de 2 millions d'euros en très légère diminution en 2011, alors même que les personnels sont répartis sur les deux actions.

Ce souci de cohérence est l'occasion pour lui de rappeler la forte attente qui existe et devrait être satisfaite, à la suite des engagements réaffirmés par le Gouvernement en ce qui concerne la parution d'un décret unique avant la fin de cette année portant sur la situation des différents orphelins de guerres. Ce décret doit permettre de mettre en oeuvre l'une des conclusions majeures des travaux du préfet Audouin et ainsi d'actualiser ce dossier sensible pour beaucoup de familles .

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

ARTICLE 68 ter (nouveau) (Art. L.50 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre) - Majoration de la pension du conjoint survivant des très grands invalides de guerre

Commentaire : le présent article, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative de Gouvernement, majore de 360 points d'indice la pension du conjoint survivant perçue lorsque le bénéficiaire de la pension était un très grand invalide de guerre.

I. LE DROIT EXISTANT

L'article L. 50 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre précise les modalités de détermination de la pension allouée au conjoint survivant non remarié d'un pensionné qui percevait la pension militaire d'invalidité.

Celles-ci varient en fonction du taux d'invalidité de l'ouvrant-droit et de son grade .

La pension de réversion est accordée lorsque le taux d'invalidité de l'ouvrant-droit est supérieur à 60 %. Les modalités de calcul et d'attribution dans le cas du conjoint survivant du soldat ancien combattant sont les suivantes :

1) dans le cas des pensions de conjoints survivants des militaires et marins dont la mort a été causée par des blessures, ou suites de blessures, reçues au cours d'événements de guerre ou par des accidents ou suites d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service, et des conjoints survivants des militaires et marins dont la mort a été causée par des maladies contractées ou aggravées par suite de fatigues, dangers ou accidents survenus par le fait ou à l'occasion du service, ainsi que les conjoints survivants de militaires et marins morts en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 85 % ou en possession de droits à cette pension, la pension de réversion est dite de taux normal soit 500 points auxquels s'ajoute une majoration forfaitaire de 15 points depuis 2004 ;

2) dans le cas des pensions de conjoints survivants de militaires et marins morts en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 60 % ou en possession de droits à cette pension, la pension de réversion est dite de taux de réversion soit 333 points qui correspondent aux deux tiers de la réversion de taux normal. La majoration forfaitaire de 15 points s'applique également.

II. LE DISPOSITIF INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a été adopté, à l'Assemblée nationale, par un amendement du Gouvernement qui a reçu un avis favorable de la commission des finances.

Il faisait suite à l'adoption de trois amendements de crédits identiques de la commission des finances, de la commission de la défense, saisie pour avis, et de notre collègue Patrick Beaudouin et de plusieurs de ses collègues députés, qui ont augmenté les crédits du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » de 250 000 euros afin d'accorder un supplément de pension de 360 points aux conjoints survivants des invalides dont le taux de pension est au moins égal à 12 000 points , c'est-à-dire les très grands invalides de guerres atteints de pathologies très lourdes. Selon les données des auteurs de ces amendements cette mesure concernerait une quarantaine de cas tout au plus.

Cette dépense supplémentaire est financée par un transfert équivalent de 250 000 euros prélevés sur les crédits de l'action 1 « Journée défense et citoyenneté » du programme 167 « Liens entre la nation et son armée », vers l'action 1 « Administration de la dette viagère » du programme 169. Le point d'indice PMI au 1 er juillet 2010 s'élève à 13,79 euros.

Selon les auteurs de ces amendements, les conjoints survivants de très grands invalides se trouvent souvent démunis lors du décès de l'ouvrant-droit. « Il existe une disproportion considérable entre la pension que percevait l'invalide et celle qui est versée au conjoint survivant. »

Cet article vise à traduire cette décision budgétaire dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre en modifiant son article L. 50 . Il prévoit en outre que cette mesure ne vient pas en contradiction avec l'octroi du bénéfice du « supplément exceptionnel », équivalent à quatre tiers de la pension de réversion de taux normal, déjà existant pour les conjoints âgés d'au moins 50 ans ou atteints d'une invalidité les empêchant de travailler prévu à l'article L. 51 du même code lorsque leurs revenus imposables ne dépassent pas, par part fiscale, la somme en dessous de laquelle aucune cotisation n'est perçue en ce qui concerne les bénéficiaires de revenus du travail salarié.

La mesure serait applicable pour les pensions en paiement au 1 er janvier 2011, à compter de la demande des intéressés.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre commission ne voit pas d'objection à ce que cette mesure, qui vise une plus grande équité, soit suivie par le Sénat. Elle représente une mesure d'équité dont le nombre de bénéficiaires est a priori réduit.

Il conviendrait toutefois que le Gouvernement veille à ce que cette mesure produise son plein effet et que sa mise en oeuvre ne conduise pas à l'exclusion de conjoints survivants de très grands invalides pour un seul motif lié au grade . Une attention particulière devrait ainsi être apportée à l'application de cette mesure par les services du ministère de la Défense et des anciens combattants.

Par ailleurs, votre rapporteur spécial ne peut qu'appeler de ses voeux la rapide remise du rapport demandé dans le cadre de la loi de finances pour 2010 à l'initiative de notre collègue Janine Rozier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, qui doit être transmis au plus tard le 31 décembre de cette année, sur la situation de la prise en charge des conjoints survivants et qui doit proposer d'éventuels dispositifs d'amélioration du cadre existant. En effet, l'accumulation de mesures ponctuelles peut, à terme, nuire à la lisibilité et l'équité d'un système global de réversion.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

I. MODIFICATION DES CRÉDITS

A. À TITRE RECONDUCTIBLE

L'Assemblée nationale a , en première délibération, adopté trois amendements de crédits identiques de la commission des finances, de la commission de la défense, saisie pour avis, et de notre collègue Patrick Beaudouin et de plusieurs de ses collègues députés, qui ont augmenté les crédits du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » de 250 000 euros afin d'accorder un supplément de pension de 360 points aux conjoints survivants des invalides dont le taux de pension est au moins égal à 12 000 points . Ce transfert se fait par un abondement en provenance du programme 167.

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté une minoration de crédits de 112 578 euros en autorisations d'engagement et de 128 468 euros en crédits de paiement destinée à gager les ouvertures de crédits opérées lors de cette seconde délibération. La minoration est répartie de la façon suivante :

- 20 725 euros en autorisations d'engagement et 28 747 euros en crédits de paiement sur le programme « Liens entre la nation et son armée » ;

- 91 853 euros en autorisations d'engagement et 99 721 euros en crédits de paiement sur le programme « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale ».

B. À TITRE NON RECONDUCTIBLE

L'Assemblée nationale a majoré , en seconde délibération, les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » de 540 300 euros . Ces crédits seront imputés au titre 6, catégorie 64 des programmes 167 et 169 de la façon suivante :

- sur le programme « Liens entre la nation et son armée », à hauteur de 247 500 euros sur l'action 02 « Politique de mémoire » ;

- sur le programme « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », à hauteur de 292 800 euros sur l'action 03 « Solidarité ».

II. ARTICLE RATTACHÉ ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a, en première délibération, adopté un article additionnel de conséquence qui traduit l'adoption des trois articles de crédits visant à modifier la situation des conjoints survivants des très grands invalides pensionnés au delà de 12 000 points.

Cet article additionnel est commenté plus haut dans la rubrique « Examen des articles rattachés »

III. POINT DE SITUATION AU SORTIR DE LA DISCUSSION À L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le rapporteur spécial tient à rappeler que quatre amendements, dont deux identiques, votés en première délibération à l'Assemblée nationale, n'ont pas été adoptés à la suite de la seconde délibération demandée à l'initiative du Gouvernement.

Il s'agit en particulier de deux amendements identiques revalorisant de deux points au 1 er juillet 2011 la retraite du combattant par un abondement de 36,88 millions d'euros . Ces amendements transféraient du programme 167 vers le programme 169 des crédits représentant 30 % des crédits de paiement de la Journée défense et citoyenneté.

Le Gouvernement, lors de la seconde délibération aboutissant au rejet de cette proposition s'était engagé à proposer un dispositif permettant d'augmenter d'un point au 1 er juillet 2011 la retraite du combattant . Cette annonce faite par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État lors de la seconde délibération ne s'est pas traduite dans le texte adopté en raison, a priori , d'une erreur matérielle.

Votre rapporteur spécial tient à souligner qu'il sera extrêmement vigilant à ce que , lors de la discussion intervenant au Sénat, le Gouvernement propose un dispositif permettant le respect de cet engagement envers ceux qui se sont battus pour la défense de nos valeurs .

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 27 octobre 2010, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial, sur la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».

M. Jean-Marc Todeschini , rapporteur spécial. - L'année 2010 a vu l'aboutissement d'une vieille revendication avec la décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2010 qui impose une décristallisation totale, mais non rétroactive, des pensions militaires de retraite. Il faut rappeler que cette décristallisation est effective depuis 2007 pour les « prestations du feu », que sont la retraite du combattant et les pensions militaires d'invalidité.

La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » poursuit, en 2011, les réformes engagées depuis plusieurs années. La première, lancée dans le cadre de la RGPP, concerne la suppression de la Direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale, la DSPRS, qui sera totalement réalisée au 31 décembre de l'année prochaine, date de la disparition de l'administration centrale de la direction à Paris. La seconde vise à la rationalisation de la Direction du service national, la DSN. Cette direction fournit l'essentiel de l'appui à la Journée défense et citoyenneté (JDC) qui remplace l'ancienne Journée d'appel de préparation à la défense (JAPD), suite au vote de la loi du 10 mars 2010 sur le service civique.

La mission poursuit sa pente décroissante, avec une contraction de ses moyens de 3,3 % en 2011, contre 1,1 % en 2010, soit un budget de 3,32 milliards en crédits de paiement. Cette baisse s'explique pour l'essentiel par l'ajustement réalisé sur les prestations servies aux anciens combattants, qui suivent la baisse de la population des ayants-droit. Le nombre de bénéficiaires de la pension militaire d'invalidité (PMI) chute ainsi en 2011 de 16 000 unités, tout comme celui des bénéficiaires de la retraite du combattant, en diminution de 60 000 unités.

Les réformes engagées ont principalement des effets sur le plafond d'emploi, qui poursuit une baisse proportionnellement supérieure à celle des crédits de la mission. Les dépenses de personnel passent en effet de 152,7 à 116 millions d'euros en 2011, soit une contraction de 24 %. Le PLF 2011 laisse apparaître une réduction de 663 ETPT pour un total autorisé de 2 372 ETPT. La suppression nette, hors transferts, est de 373 emplois.

Regardons plus en détail les principaux traits de chacun des programmes. Les crédits du programme 167 « Liens entre la nation et son armée » baissent de 13,6 % en crédits de paiement, ce qui s'explique essentiellement par la poursuite de la réforme de la DSN, laquelle se traduit par la suppression de 211 emplois, ramenant le plafond d'emplois de la direction à 2 081 ETPT.

Je note, par ailleurs, plus de cohérence dans ce programme avec le transfert, au sein de l'action 2 « Politique de mémoire », des dotations de l'action 4 du programme 169 « Entretien des lieux de mémoire ». Ce mouvement se traduit budgétairement par une augmentation des crédits de l'action de 1,4 million d'euros. Cet effort supplémentaire, par rapport à l'année 2010, porte sur la rénovation globale des nécropoles militaires dans la perspective du centenaire de la Première guerre mondiale. Votre rapporteur restera attentif au respect de cet objectif.

Le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » est marqué par la baisse de la population des anciens combattants. Cette évolution se répercute sur sa principale action, « administration de la dette viagère », dont les crédits baissent de 85 millions d'euros. On remarque également logiquement qu'alors que le soutien à la DSPRS chute de 60 %, les crédits alloués à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC), appelé à jouer son rôle de guichet unique, augmentent.

Une difficulté relative à la délivrance de la carte du combattant, essentielle pour l'octroi de nombreuses prestations, est apparue en 2010. En effet, de regrettables retards de traitement sont apparus en raison d'une nouvelle application informatique dont la mise en oeuvre a été défectueuse, et du stock accumulé de demandes, lequel s'explique par la disparition des commissions départementales d'attribution de la carte au profit de deux commissions nationales.

La commission des finances de l'Assemblée nationale a adopté un amendement, proposé par le Gouvernement, visant au respect de l'engagement de celui-ci de porter l'indice applicable à la retraite du combattant à 48 points en 2012 alors qu'il se situe actuellement à 43 points après une revalorisation de deux points l'an passé. Cet amendement permettrait de porter l'indice à 44 points l'an prochain. Ce nouvel effort serait d'un peu plus de 4,6 millions pour 2011 pour une mesure applicable au 1 er juillet, soit le coût d'un quart de point. Dans l'hypothèse de son adoption par l'Assemblée nationale, notre commission aura à se prononcer sur cette mesure qui prendra la forme d'un article additionnel. En l'état actuel des données transmises, nous pourrions proposer un avis favorable à cette mesure.

Le dernier programme de cette mission, le programme 158, porte sur l'indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde guerre mondiale. Sa dotation augmente fortement, de plus de 18 millions d'euros -soit une progression de près de 19 % en crédits de paiement - en raison de l'aboutissement de dossiers d'indemnisation dont la prévisibilité reste toujours difficile. Suite aux travaux du préfet Audouin, un décret unique sur la situation des orphelins de guerre devrait sortir avant la fin de ce mois, qui viendra corriger l'actuel dispositif constitué des deux décrets de 2000 et 2004.

Sous le bénéfice de ces observations, et en restant attentif au sort qui sera fait à l'amendement gouvernemental à l'Assemblée nationale, votre rapporteur spécial vous propose d'adopter les crédits de la mission sans modification.

M. Jean Arthuis , président. - Merci de ces précisions et de cet avis en faveur d'une adoption sans modification, clair et sans état d'âme.

M. Jean-Marc Todeschini , rapporteur spécial. - L'attribution de la carte du combattant est cependant une grosse difficulté. Entre la fin de 2009 et mai 2010 il n'y avait pas eu de réunion de la Commission d'attribution de cette carte...On a bloqué le système en le centralisant.

Mme Janine Rozier , rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. - Il y a deux catégories de veuves d'anciens combattants : celles qui ont perdu leur mari à la guerre et ont élevé seules leurs enfants ; et celles qui, devenues veuves à 70 ans par exemple, touchent également une pension. Ces deux catégories n'ont rien à voir l'une avec l'autre alors qu'on les traite de la même façon. On me dit que le rapport que j'avais demandé sur le sujet sera prêt avant le 31 décembre.

M. Jean Arthuis , président. - On a modifié la règlementation fiscale. Auparavant, le conjoint survivant d'un couple ayant élevé un ou plusieurs enfants bénéficiait d'une demi-part supplémentaire pour la détermination de son impôt sur le revenu. On a modifié cette règle et, désormais, c'est uniquement le veuf ou la veuve ayant élevé, seul, un ou plusieurs enfants pendant au moins cinq ans, qui conserve cet avantage. Je pense qu'on avait en fait généralisé la législation applicable aux veuves de guerre, mais dans des conditions contestables et relativement coûteuses. Attendons le rapport.

Mme Janine Rozier , rapporteur pour avis. - Suite à l'arrêt du Conseil d'État, le bénéfice de la campagne double est étendu aux anciens combattants d'Afrique du Nord. J'y suis opposée pour des raisons d'équité. Un militaire qui a combattu un an sur un champ de bataille bénéficiera s'il est fonctionnaire, de trois ans ! Qu'en est-il des salariés du privé ? Ce n'est pas juste.

M. Jean Arthuis , président. - C'est tout le problème de l'égalité des Français devant la retraite.

M. Jean-Marc Todeschini , rapporteur spécial. - La décision du Conseil d'État s'imposait aux ministères chargés du budget et des anciens combattants. Le décret sorti en juillet a pris pour point de départ de son application le 19 octobre 1999, date à laquelle la loi a officialisé l'expression « guerre d'Algérie ». On a ainsi limité l'application et ouvert la boîte de Pandore pour vingt ans et je ne suis pas loin d'être d'accord avec vous. Mais le problème de l'inégalité de traitement est que certaines catégories de la fonction publique - les gendarmes par exemple - bénéficient déjà de cette disposition. Le ministre s'était fermement engagé en faveur de cette campagne double, mais le décret est tel que tout le monde n'en bénéficiera pas ce qui suscitera une contestation.

M. Jean Arthuis , président. - Le Conseil d'État a veillé à ce que le principe d'égalité soit respecté ?

Mme Janine Rozier , rapporteur pour avis. - La vraie égalité serait d'en accorder le bénéfice également aux personnes du secteur privé.

M. Jean-Marc Todeschini , rapporteur spécial. - Cette disposition s'applique au secteur public. La véritable égalité, telle qu'elle est revendiquée, aurait imposé de ne pas retenir la date du 19 octobre 1999 pour ne pas limiter l'application du décret à un nombre qui sera, en réalité, restreint, de personnes.

M. Philippe Dallier . - Je fais une suggestion. La mission « Ville et logement » comporte un programme « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » qui comprend lui-même une action en faveur des rapatriés et des harkis Ne devrait-on pas, dans un souci de cohérence, la transférer au sein de votre mission ?

M. Jean Arthuis , président. - Si on veut privilégier le volet insertion, peut-être vaut-il mieux ne pas faire la confusion entre les harkis et le statut d'ancien combattant.

M. Philippe Dallier . - En quoi relèvent-ils du logement ? On semble ne pas savoir où rattacher cette action et ce sujet est de fait peu traité dans ma mission.

M. Jean-Marc Todeschini , rapporteur spécial. - Les problèmes des rapatriés et des harkis ont longtemps été différents de ceux du monde combattant sur plusieurs sujets. Les revendications ne sont pas du tout les mêmes. Ce n'est pas le Secrétaire d'État, Hubert Falco, qui dira le contraire.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2010, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, et décidé de proposer l'adoption sans modification de l'article 68 ter .


* 1 L'examen de cet article est effectué par Bertrand Auban, rapporteur spécial, dans le cadre de l'analyse du compte d'affectation spéciale « Pensions ».

* 2 Les données prennent en compte le périmètre modifié de la maquette budgétaire pour 2011.

* 3 Il s'agit du coût JDC (coût de la direction du service national - DSN - hors coût de recensement, coût d'archivage et coût des armées). Il comprend la totalité des paiements directement imputables à la JDC de titres 3, 5 et 6, la totalité de l'évaluation du coût d'une journée de rémunération et cotisations sociales (titre 2) et de l'indemnité de JDC des intervenants des armées, mais également des charges indirectes de la DSN.

* 4 Rapport n° 587 (2009-2010) - Tome II - Règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2009.

* 5 Les données prennent en compte le périmètre modifié de la maquette budgétaire pour 2011.

* 6 Rapport d'information n° 488 (2009-2010), « Réforme de l'administration des anciens combattants : une campagne bien menée ».

* 7 Audition d'Hubert Falco, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants, en commission élargie le lundi 11 octobre 2010.

Page mise à jour le

Partager cette page