Rapport n° 550 (2010-2011) de M. Philippe MARINI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 25 mai 2011

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N° 550

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 25 mai 2011

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1), comportant le texte de la commission, sur la proposition de résolution européenne de M. Jean BIZET, présentée au nom de la commission des affaires européennes en application de l'article 73 quater du Règlement, sur l' application du principe de subsidiarité en matière de TVA ,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc, Serge Dassault , vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Yvon Collin, Philippe Dallier, Jean-Pierre Demerliat, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Éric Doligé, Philippe Dominati, Hubert Falco, André Ferrand, François Fortassin, Jean-Pierre Fourcade, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Roland du Luart, Philippe Marini, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

481 (2010-2011)

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le 28 avril 2011, la commission des affaires européenne a déposé, à l'initiative de Jean Bizet, une proposition de résolution sur l'application du principe de subsidiarité en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) 1 ( * ) . Cette proposition de résolution s'inscrit dans le cadre de la consultation lancée par la Commission européenne sur le système de TVA, du 1 er décembre 2010 au 31 mai 2011. Elle vise à élargir la faculté pour les Etats membres de l'Union européenne (UE) de recourir à des taux réduits de TVA, dès lors que ce recours « ne crée pas de dysfonctionnement dans le marché intérieur et qu'il n'y a pas de risque de distorsion de concurrence ». Sous cette condition, le principe de subsidiarité trouverait à s'appliquer en matière de TVA et dans certains secteurs, tels que la filière équine.

Impôt général sur la consommation, la TVA occupe une place prépondérante dans notre dispositif fiscal. Son montant est à la fois proportionnel au prix des biens et services et indépendant du nombre de transactions intervenues dans le processus de production. La TVA est perçue, à l'importation et à chaque stade de la production, sur le prix de vente du produit, sous déduction de la taxe supportée sur les éléments du prix de revient, ce qui aboutit à imposer la valeur ajoutée par chacun des assujettis.

I. LA TVA : UN IMPÔT AU CENTRE DE LA POLITIQUE DE PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

A. UN IMPÔT DE RENDEMENT EFFICACE ET DONT LA PART DANS LE TOTAL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES S'ACCROÎT

Au regard des recettes fiscales, la TVA représente actuellement l'impôt le plus « productif ». Son produit est ainsi évalué à 177,2 milliards d'euros en 2011, soit 52 % du total des recettes fiscales au cours de cet exercice 2 ( * ) . De par son rendement, elle constitue donc l'un des impôts dont la contribution est la plus importante pour l'équilibre budgétaire.

L'étude comparée sur longue période de l'évolution des prélèvements obligatoires (PO) et de la TVA démontre par ailleurs, comme l'indique le graphique ci-dessous, l'importance relative de cette taxe dans l'ensemble des PO. La TVA représente 6,2 points de PIB en 2009 , cependant que sa part relative au sein des PO s'est accrue entre 1990 et 2009 en passant de 40,8 % à 53,9 %.

Part des prélèvements obligatoires (PO) levés par l'Etat et de la TVA
dans le produit intérieur brut (PIB)

(en points de PIB)

Source : d'après le rapport économique, social et financier (Tome II, Annexe statistique) annexé au projet de loi de finances pour 2011

B. UN IMPÔT D'AVENIR

Comme le note la Commission européenne dans son Livre vert 3 ( * ) , dans les années à venir « il est possible que le financement de l'Etat-providence doive reposer moins qu'aujourd'hui sur l'imposition du travail et des revenus du capital (épargne), ce qui plaide (...) en faveur d'un basculement vers la fiscalité indirecte ». En effet, dans une économie globalisée, il n'est plus possible de financer la protection sociale, c'est-à-dire la santé et la politique familiale, par des charges sur les salaires qui poussent à la délocalisation des activités et des emplois. Il convient au contraire de financer ces charges de solidarité non plus par des impôts sur la production mais par des taxes sur les produits et les services. Tel est l'enjeu de la « TVA sociale » décrit notamment par le Président de votre commission des finances, Jean Arthuis, dans son rapport d'information « TVA sociale : comment redonner de la compétitivité à l'économie française ? » 4 ( * ) .

Au-delà des cas bien connus du Danemark et de l' Allemagne , plusieurs autres pays européens engagent progressivement ce mouvement de basculement. Ainsi, le 4 janvier 2011, le Royaume-Uni a-t-il relevé son taux normal de TVA de 17,5 % à 20 %, dépassant dès lors les taux pratiqués en France (19,6 %) et en Allemagne (19 %). Lors de son récent déplacement en République tchèque , votre rapporteur général a également constaté l'intention du gouvernement de ce pays de financer par un relèvement du taux normal de la TVA et, surtout, la suppression de la plupart des taux réduits, un allègement des charges pesant sur les employeurs ainsi que sur les ménages.

Ainsi, alors que le taux de TVA pratiqué par la France se trouvait il y a quelques années dans le haut de la fourchette des taux pratiqués en Europe, il se situe désormais plutôt dans la moyenne . Comme l'illustre le tableau ci-dessous, quatorze Etats membres de l'UE présentaient un taux normal inférieur à celui de la France en 2000, date à laquelle notre pays a baissé son propre taux d'un point pour le ramener à 19,6 %. Désormais, seuls six Etats pratiquent un taux plus bas que le sien.

L'évolution du taux normal de TVA au sein de l'Union européenne (UE)

entre 2000 et 2011

(en %)

Belgique

Bulgarie

République tchèque

Danemark

Allemagne

Estonie

Grèce

2000

21

20

22

25

16

18

18

Mai 2011

21

20

20

25

19

20

23

Espagne

France

Irlande

Italie

Chypre

Lettonie

Lituanie

2000

16

19,6

21

20

10

18

18

Mai 2011

18

19,6

21

20

15

22

21

Luxembourg

Hongrie

Malte

Pays-Bas

Autriche

Pologne

Portugal

2000

15

25

15

17,5

20

22

17

Mai 2011

15

25

18

19

20

23

23

Roumanie

Slovénie

République slovaque

Finlande

Suède

Royaume Uni

2000

19

19

23

22

25

17,5

Mai 2011

24

20

20

23

25

20

Source : d'après Commission européenne

Dans les pays en difficulté bénéficiant du soutien du Fonds européen de stabilité financière (FESF) et mettant en oeuvre un plan d'ajustement élaboré conjointement par la Commission européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international, la TVA est un instrument central de la politique fiscale , selon des modalités différentes en fonction des caractéristiques des économies. Ainsi, le plan de rigueur irlandais prévoit à la fois une augmentation du taux normal de TVA - qui passera de 21 % à 22 % en 2013, puis à 23 % en 2014 - et une réduction du taux applicable à certains secteurs d'activité, tels que le tourisme. Au Portugal , en revanche, c'est une véritable « TVA sociale » qui est instituée, avec d'une part une hausse de trois points du taux normal (qui passe à 23 %) et, d'autre part, un allègement des charges sociales pesant sur les entreprises.

D'une certaine manière, on peut interpréter le Livre vert sur l'avenir de la TVA, publié le 1 er décembre 2010 par la Commission européenne, comme procédant d'un souci d'anticiper et de préparer le « basculement » des systèmes de prélèvements obligatoires en modernisant (pour rendre le système de TVA « plus simple, plus robuste et plus efficace ») le principal impôt d'avenir.

Le Livre vert souligne l'efficacité des taxes à la consommation, dès lors qu'elles constituent une base plus large et plus stable que les bénéfices et les revenus. Il relève en particulier que « cette base plus large permet l'application de taux plus bas, ce qui réduit les effets de distorsion de la fiscalité et se répercute favorablement sur la croissance et l'emploi ».

II. LES TAUX RÉDUITS DE TVA : DES NICHES FISCALES COÛTEUSES QU'IL EST NÉCESSAIRE D'ENCADRER

A. LES NICHES FISCALES LES PLUS COÛTEUSES PORTENT SUR LA TVA

Ainsi que l'indiquait votre rapporteur général lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2011, « 504 dépenses fiscales sont recensées en 2011 , dont 453 ayant un impact budgétaire au cours de l'exercice » 5 ( * ) .

Cette dépense fiscale est essentiellement concentrée sur l'impôt sur le revenu (51 % du coût) et la TVA (26 %) , ainsi que le met en évidence le tableau ci-après.


La dépense fiscale par impôt

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les annexes budgétaires

Par ailleurs, parmi les vingt-et-un dispositifs présentant chacun un coût supérieur ou égal au milliard d'euros, on retrouve cinq mesures ayant trait à la TVA ( Cf. tableau ci-après).

Les dépenses fiscales les plus coûteuses en 2011

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les annexes budgétaires

Selon les estimations communiquées à votre commission des finances par le Gouvernement, sur la base de l'année 2009 un point d'augmentation de la TVA rapporte 0,4 milliard d'euros pour le taux super-réduit, 2,3 milliards d'euros pour le taux réduit et 5,8 milliards d'euros pour le taux normal 6 ( * ) .

B. UN ENCADREMENT COMMUNAUTAIRE STRICT MAIS INSATISFAISANT

Le livre vert relève qu'un « système de TVA reposant sur une large base, de préférence avec un taux unique, constituerait à peu de chose près l'idéal d'une taxe à la consommation permettant de réduire au minimum les coûts de conformité. Toutefois, dans l'Union européenne, le taux normal ne couvre qu'environ deux tiers de la consommation totale, le tiers restant faisant l'objet de différentes exonérations ou de taux réduits. Dans les États membres de l'Union qui sont également membres de l'OCDE, les recettes effectives de la TVA représentent seulement 55% des recettes moyennes qui pourraient théoriquement être perçues si l'ensemble de la consommation finale était imposée au taux normal. D'autres pays de l'OCDE, comme le Japon, la Corée du Sud ou la Suisse, ont un système de TVA plus efficace, puisque ce chiffre s'y élève à environ 73% ».

Cet « idéal » ne pouvant être atteint, les dérogations au taux normal sont strictement encadrées par le droit communautaire. La directive TVA 2006/112/CE du 28 novembre 2006, modifiée par la directive 2009/47/CE du 5 mai 2009 sur les taux réduits, prévoit un taux normal fixé au minimum à 15 % et dont le maximum observé actuellement (25 %) résulte d'un engagement passé entre les Etats membres. Elle autorise, en outre, un ou deux taux réduits pouvant être appliquées aux biens et services énumérés dans une liste limitative (l'annexe III de la directive de 2006) et étant nécessairement supérieurs à 5 %. Par ailleurs, plusieurs exceptions visent à tenir compte de dispositions nationales antérieures à l'entrée en vigueur de la directive. Elles concernent une majorité d'Etats membres et renvoient à :

- des taux dits « parking » , pour les livraisons de biens et de services taxés à un taux réduit avant le 1 er janvier 1991 mais ne figurant pas à l'annexe III ;

- des taux super-réduits concernant des livraisons de biens et services taxés à un taux inférieur à 5 %, lorsque ce régime existait avant le 1 er janvier 1991 ;

- diverses dérogations permettant de prendre en compte certaines particularités géographiques (Corse, départements d'outre-mer, île d'Helgoland...).

A l'intérieur de cette architecture d'ensemble, il convient de relever que la directive du 5 mai 2009 a permis, sur une base permanente, l'utilisation facultative de taux réduits de TVA pour certains secteurs de main-d'oeuvre de services locaux, y compris les services de restauration (à la demande de la France), pour lesquels il n'existe pas de risque de concurrence déloyale entre les prestataires de services dans différents Etats membres.

L'annexe III recense dix huit catégories de biens et de prestations de services éligibles aux taux réduits. La révision de cette liste est possible, mais elle ne peut aboutir qu'au terme d'une procédure longue et complexe . En application de l'article 100 de la directive du 28 novembre 2006 précitée, le champ d'application du taux réduit de TVA doit être revu tous les deux ans. La Commission européenne remet alors un rapport, sur la base duquel le Conseil de l'Union européenne réexamine le champ d'application des taux réduits. Le Conseil peut, sur proposition de la Commission, et en statuant à l'unanimité, décider de modifier la liste des biens et services figurant à l'annexe III. L'histoire récente a toutefois montré une certaine réticence de la Commission à modifier l'annexe III de la directive de façon pérenne. Elle lui préfère fréquemment l'ouverture de dérogations ponctuelles, souvent sectorielles.

L'élément essentiel d'appréciation, dans le cadre d'une modification de la liste limitative de biens et de prestations de services éligibles aux taux réduits, consiste dans la notion de risque de distorsion de concurrence . La Commission européenne concentre en effet son étude sur le fonctionnement du marché intérieur et sur les effets éventuellement perturbateurs que pourrait avoir le passage à un taux réduit.

Au total, cette procédure comporte toutefois plusieurs motifs d'insatisfaction . D'une part, elle incite les gouvernements à avoir recours à un double langage en prenant des engagements au niveau national tout en sachant qu'il y aura blocage au niveau communautaire. D'autre part, elle crée de l'incertitude dans les secteurs économiques concernés compte tenu des délais très longs. Enfin, elle peut engendrer des « coûts cachés » puisque l'accord unanime des Etats membres ne peut généralement être obtenu sans concessions sur d'autres sujets.

Votre commission des finances a souhaité souligner dans la présente proposition de résolution ces motifs d'insatisfaction, qui lui apparaissent comme autant d'éléments essentiels et à prendre en compte dans le cadre d'une réflexion d'ensemble sur le recours aux taux réduits de TVA par les Etats membres .

C. APPLIQUER LE PRINCIPE DE SUBSIDIARITÉ POUR LA FIXATION DU TAUX DE TVA, UNE PISTE À EXPLORER ?

Dans l'exposé des motifs de la présente proposition de résolution, la commission des affaires européennes souligne que « dès lors que le recours aux taux réduits ne crée pas de dysfonctionnement dans le marché intérieur et qu'il n'y a pas de risque de distorsion de concurrence, il n'est pas nécessaire de tendre vers l'harmonisation des taux de TVA ».

Elle va même au-delà puisqu'elle envisage, en matière de TVA, de donner une plus large application à la notion de subsidiarité . Elle considère en effet que « si, en règle générale, l'harmonisation de la TVA concourt au bon fonctionnement du marché unique, en revanche, la taxation des biens et services, qui n'entraîne aucune distorsion significative du marché intérieur, devrait être du ressort de chaque Etat membre ».

Si une telle orientation était retenue, elle offrirait naturellement de nouvelles marges de manoeuvre aux Etats membres en matière de gestion de leurs taux de TVA en enrichissant leur palette d'outils dans le domaine de la politique économique et fiscale. Elle aurait en outre le mérite de mettre les Etats membres en situation de responsabilité en les empêchant de recourir à un double discours, selon qu'ils s'adressent à leurs acteurs économiques nationaux ou qu'ils s'expriment devant les instances communautaires.

Pour autant, l'application du principe de subsidiarité prôné par la commission des affaires européennes en matière de TVA aurait également pour conséquence quasi automatique de soumettre le Gouvernement et le Parlement à de fortes pressions de la part des groupes d'intérêt . Ceux-ci saisiront l'opportunité de faire valoir leurs points de vue auprès des décideurs nationaux, et cela avec d'autant plus de vigueur que les enjeux économiques et financiers attachés à l'obtention d'un taux réduit de TVA peuvent être particulièrement élevés.

Autrement dit, si elle était retenue, l'application du principe de subsidiarité en matière de TVA aurait pour effet de lever un verrou à la création de nouvelles niches en matière de TVA .

Si cette application du principe de subsidiarité dans le domaine de la TVA mérite donc d'être envisagée, les conséquences qui pourraient en découler doivent être évaluées à leur juste mesure. C'est la raison pour laquelle votre commission des finances a complété la rédaction de la présente proposition de résolution en demandant en Gouvernement d'« étudier les avantages et les inconvénients d'une application du principe de subsidiarité à la détermination des taux réduits de TVA ».

D. LA PERSPECTIVE DE LA CRÉATION D'UN TAUX INTERMÉDIAIRE ?

Ainsi qu'on l'a rappelé supra ( Cf . partie II-B), la directive TVA du 28 novembre 2006 ouvre la possibilité aux Etats membres de créer un ou deux taux réduits de TVA (nécessairement supérieurs à 5 %). La France n'ayant instauré, à ce jour, qu'un seul taux réduit (à 5,5 %), elle dispose donc de la faculté de s'appuyer sur un second taux, hypothèse couramment évoquée sous le vocable de « taux intermédiaire » .

La création d'un taux intermédiaire présenterait l'avantage de réduire l'écart important, de 14,1 points, qui existe aujourd'hui entre le taux normal et le taux réduit, et donc le coût budgétaire de certains taux dérogatoires.

A titre d'illustration, actuellement, les trois taux réduits les plus coûteux 7 ( * ) concernent :

- les travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien portant sur des logements achevés depuis plus de deux ans (5,05 milliards d'euros, ce qui en fait la principale niche) ;

- les ventes à consommer sur place, à l'exception des ventes de boissons alcooliques, instaurée par la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques (3,13 milliards d'euros) ;

- la fourniture de logements dans les hôtels (930 millions d'euros) 8 ( * ) .

La majoration à 8 % du taux applicable à ces trois secteurs procurerait un rendement d' 1,7 milliard d'euros . La majoration à 12 % de ce taux procurerait un rendement de l'ordre de 4,4 milliards d'euros.

Afin de permettre des comparaisons, le tableau ci-après rappelle les taux de TVA pour les différents Etats de l'UE.

Structure des taux de TVA dans les Etats membres de l'UE
(mai 2011)

Etats membres

Taux réduit

Taux normal

Taux majoré

Taux parking 9 ( * )

Belgique

6 - 12

21

-

12

Bulgarie

9

20

-

-

République tchèque

10

20

-

-

Danemark

-

25

-

-

Allemagne

7

19

-

-

Estonie

9

20

-

-

Grèce

6,5 - 13

23

-

-

Espagne

4 - 8

18

-

-

France

2,1 - 5,5

19,6

-

-

Irlande

4,8 - 13,5

21

-

13,5

Italie

4 -10

20

-

-

Chypre

5 - 8

15

-

-

Lettonie

12

22

-

-

Lituanie

5 - 9

21

-

-

Luxembourg

3 - 6

15

-

12

Hongrie

5 - 18

25

-

-

Malte

5

18

-

-

Pays-Bas

6

19

-

-

Autriche

10

20

-

12

Pologne

5 - 8

23

-

-

Portugal

6 - 13

23

-

12

Roumanie

5 - 9

24

-

-

Slovénie

8,5

20

-

-

République slovaque

10

20

-

-

Finlande

13 - 9

23

-

-

Suède

6 - 12

25

-

-

Royaume-Uni

5

20

-

-

Source : commission des finances

Votre commission des finances estime que la solution du taux intermédiaire pourrait trouver, par exemple, un terrain d'application dans le cas de la TVA sur la filière équine, dont le coût du taux réduit est évalué à 200 millions d'euros. De même, votre général a déjà eu l'occasion de proposer le recours à un tel taux pour la restauration et les travaux dans le bâtiment.

Elle a, par ailleurs, jugé nécessaire de modifier la rédaction de la présente proposition de résolution en faisant apparaître la référence à un taux intermédiaire pour la filière équine à une place plus pertinente dans le texte .

E. EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, LA POLITIQUE CONDUITE EN MATIÈRE DE TAUX RÉDUIT DE TVA DOIT ÊTRE COHÉRENTE : LES EXEMPLES DU LIVRE NUMÉRIQUE ET DE LA FILIÈRE ÉQUINE

En adoptant définitivement le 17 mai 2011 la proposition de loi de nos collègues Catherine Dumas et Jacques Legendre relative au prix du livre numérique , le Parlement français a manifesté son attachement à la cohérence de la politique conduite en faveur du livre et son souhait qu'elle ne soit pas remise en cause par les évolutions technologiques et le changement progressif du support sur lequel les livres sont lus. Cette adoption fait d'ailleurs suite aux débats relatifs à l'application d'un taux réduit de TVA pour le livre numérique lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2011 10 ( * ) . A cette occasion, le président Jean Arthuis avait d'ailleurs souligné que « le cas particulier du livre numérique est (...) l'occasion de souligner [ce] défi et [ces] enjeux » relatifs à la politique conduite en matière de taux réduit de TVA. Ainsi, l'article 25 de loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 prévoit-il l'application du taux réduit de TVA aux livres quel que soit le type de support physique, y compris ceux fournis par téléchargement (livre numérique), dès lors que le fait générateur de la vente intervient à compter du 1 er janvier 2012 11 ( * ) .

Bien qu'elle n'en tire pas les mêmes conclusions, la Commission européenne est consciente de l'incohérence de la situation actuelle . Ainsi, dans son Livre vert, elle regrette qu' « il subsiste des incohérences dans les taux de TVA appliqués à des biens ou services comparables ». Elle cite à ce titre le cas de certains Etats membres appliquant un taux réduit à certains biens culturels, mais devant appliquer le taux normal aux services en ligne concurrents de ces biens, comme les livres ou les journaux électroniques.

De même qu'il y a incohérence à appliquer jusqu'alors un taux réduit de TVA au livre papier mais un taux normal pour le livre numérique, la présente proposition de résolution appelle notre attention sur une difficulté de même nature, dans un domaine dans lequel le besoin de modifier le droit communautaire est encore plus urgent : la filière équine .

Cette filière est en effet considérée à juste titre, en France comme dans d'autres Etats de l'UE, comme faisant partie intégrante de la filière agricole. Dans notre pays, les activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation constituent des activités de nature agricole. En application des articles 278 bis , 278 ter et 257 du code général des impôts (CGI), elles sont donc soumises à la TVA selon les modalités du régime agricole et bénéficient du taux réduit de 5,5 % quels que soient le mode d'exploitation et la situation au regard de l'imposition des bénéfices :

- activités d'entraînement, de préparation (prédébourrage, dressage...) et de prise en pension de chevaux de course exercées, ensemble ou séparément, par les éleveurs, les propriétaires ou les entraîneurs ;

- activités d'enseignement de l'équitation, de prise en pension de chevaux, de location d'équidés quelle que soit leur finalité (sports équestres, promenades, randonnées, travail...), de dressage (débourrage notamment) et d'entraînement de chevaux exercées par les centres équestres, les éleveurs, les agriculteurs ou les cavaliers professionnels.

La doctrine fiscale précise que ce taux de 5,5 % est également applicable aux activités hippiques (DB 3 C 212). En outre, un taux de TVA de 2,1 % (article 281 sexies du CGI) est appliqué à la vente d'animaux vivants par des non assujettis à la TVA. Par la doctrine administrative (DB 3 I 1326), il est également appliqué à la vente d'« équidés de grande valeur ».

Cependant, la Commission européenne conteste cette application du taux réduit . Aussi a-t-elle a engagé un certain nombre de procédures en manquement contre des Etats, dont la France, et plusieurs arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) semblent lui donner raison. Ainsi, par son arrêt C-41/09 « Commission européenne/Royaume des Pays-Bas » du 3 mars 2011, la CJUE a estimé qu'« en appliquant un taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée à l'ensemble des livraisons, des importations et des acquisitions intracommunautaires de chevaux, le Royaume des Pays-Bas a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 12, lu en combinaison avec l'annexe H, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ». Cette position a encore été très récemment confirmée par les arrêts C-441/09 « Commission européenne/Autriche » et C-453/09 « Commission européenne/Allemagne », rendus tous deux le 12 mai 2011.

Pour autant, dans le souci de cohérence qui la guide en matière d'application du taux réduit de TVA, votre commission des finances s'associe au souhait de la commission des affaires européennes que le taux réduit de TVA, ou un éventuel taux intermédiaire, puisse continuer d'être appliqué à l'ensemble de la filière .

III. UNE OBLIGATION, PEUT-ÊTRE BIENTÔT CONSTITUTIONNELLE, DE COMPENSER TOUT ACCROISSEMENT DU COÛT DES NICHES FISCALES

La règle d'équilibre des finances publiques élaborée par le groupe de travail animé par Michel Camdessus - que la France a commencé de mettre en oeuvre avec la loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 et qui figure désormais dans le projet de loi constitutionnelle relatif à l'équilibre des finances publiques - consiste à fixer, dans une norme de rang supérieur aux lois de finances, les montants de dépenses et de mesures nouvelles sur les recettes devant être atteints pour chacune des années de la programmation. L'application de cette règle permet, dès lors que les objectifs de recettes et de dépenses sont calculés à partir d'hypothèses économiques réalistes, d'assurer le respect de la trajectoire de solde budgétaire sur laquelle le Gouvernement s'est engagé vis-à-vis de ses partenaires européens.

Le montant des mesures discrétionnaires à prendre en matière de recettes pour chaque année de la programmation est ainsi fixé à l'avance, à charge pour les lois financières annuelles de décliner ces engagements.

La trajectoire actuelle prévoit des mesures nouvelles d'un montant de 11 milliards d'euros en 2011 et de 3 milliards d'euros pour chacune des années suivantes.

Par conséquent, si de nouveaux taux réduits de TVA devaient être décidés par le Parlement, il lui appartiendrait d'accroître l'effort discrétionnaire annuel d'un montant équivalent à celui du coût des nouvelles niches en matière de TVA (à peine de voir, dans le nouveau dispositif constitutionnel s'il est définitivement adopté, la loi de finances censurée par le Conseil constitutionnel).

Votre commission des finances a souhaité que cet impératif budgétaire soit rappelé en conclusion de la présente proposition de résolution .

Au cours de sa réunion du mercredi 25 mai 2011, présidée par M. Jean Arthuis, président, la commission des finances a examiné le rapport de M. Philippe Marini sur la proposition de résolution européenne n° 481 (2010-2011) sur l'application du principe de subsidiarité en matière de TVA.

Elle a modifié et complété la rédaction de la proposition de résolution européenne, dont le texte figure ci-après.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE ADOPTÉE PAR LA COMMISSION

Le Sénat,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu le Livre vert de la Commission européenne intitulé « Vers un système de TVA plus simple, plus robuste et plus efficace » du 1 er décembre 2010, instaurant une consultation publique sur la réforme de la TVA,

- juge que cette initiative est nécessaire et qu'elle doit déboucher sur une plus grande simplicité et une plus grande souplesse du système de TVA en matière de taux réduits ;

- observe que, pour certaines activités, l'application de taux différents de TVA aux activités d'une filière économique n'entraîne pas une distorsion de concurrence significative entre les prestataires des différents États membres, rendant alors inutile une harmonisation des taux ;

- estime que c'est à bon droit que dans le cas particulier de la filière équine, la France ne partage pas l'analyse de la Commission européenne qui tend à priver la filière équine du bénéfice de l'application d'un taux réduit, au motif que tous les chevaux ne sont pas destinés de manière générale ou habituelle à la consommation ;

- considère au contraire que le taux réduit de TVA, ou à défaut un taux intermédiaire, doit continuer à s'appliquer à l'ensemble de la filière équine tant à la livraison des équidés qu'aux activités qui s'y rattachent ;

- rappelle que la réglementation européenne sur la sécurité alimentaire s'applique à tous les détenteurs de chevaux et que l'élevage de chevaux constitue une activité agricole, quelle que soit la destination de l'animal ;

- rappelle que les modalités de mise en oeuvre de la directive 2009/47/CE autorisant l'application facultative de taux réduits sur la valeur ajoutée pour certains services à forte intensité de main-d'oeuvre fournis au niveau local, et pour lesquels il n'existe pas de risque de concurrence déloyale entre les prestataires de services dans les différents États membres, ne donnent pas pleinement satisfaction ; en particulier, les procédures sont longues et lourdes alors que les contreparties éventuellement consenties pour permettre d'obtenir un accord unanime ne sont pas clairement présentées ;

- estime que, dès lors, le Gouvernement devrait étudier les avantages et les inconvénients d'une application du principe de subsidiarité à la détermination des taux réduits de TVA ;

- se félicite que les engagements pris par la France vis-à-vis de ses partenaires européens en matière de finances publiques, déclinés dans la loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, rendent nécessaires, en tout état de cause, la compensation du coût d'un éventuel nouveau taux réduit de TVA par l'adoption de mesures nouvelles supplémentaires de montant équivalent ; observe que la règle d'équilibre proposée par le projet de loi constitutionnelle relatif à l'équilibre des finances publiques propose de porter cette obligation au plus haut niveau de la hiérarchie des normes.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 25 mai 2011 sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a examiné le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur, sur la proposition de résolution européenne n° 481 (2010-2011), présentée au nom de la commission des affaires européennes par M. Jean Bizet, sur l'application du principe de subsidiarité en matière de TVA.

EXAMEN DU RAPPORT

M. Philippe Marini , rapporteur . - Le 28 avril 2011, la commission des affaires européenne a déposé, à l'initiative de notre collègue Jean Bizet, une proposition de résolution sur l'application du principe de subsidiarité en matière de TVA. Cette résolution s'inscrit dans le cadre de la consultation lancée par la Commission européenne sur le système de TVA. Elle vise à élargir la faculté pour les Etats membres de l'Union européenne de recourir à des taux réduits de TVA, dès lors que ce recours « ne crée pas de dysfonctionnement dans le marché intérieur et qu'il n'y a pas de risque de distorsion de concurrence ». Sous cette condition, le principe de subsidiarité trouverait à s'appliquer en matière de TVA et dans certains secteurs. Parmi ces secteurs, la filière équine est explicitement visée par la proposition de résolution.

Quel est le contexte de cette proposition de résolution ?

Tout d'abord, il convient de rappeler qu'au regard des recettes fiscales, la TVA représente actuellement l'impôt le plus « productif » dans notre pays. Son produit est évalué à 177,2 milliards d'euros en 2011, soit 52 % du total des recettes fiscales au cours de cet exercice.

Essentielle à l'équilibre budgétaire de par son rendement, la TVA représente également un impôt d'avenir. La Commission européenne le souligne dans son Livre vert de décembre 2010. Elle relève que, dans les années à venir, « il est possible que le financement de l'Etat-providence doive reposer moins qu'aujourd'hui sur l'imposition du travail et des revenus du capital (épargne), ce qui plaide (...) en faveur d'un basculement vers la fiscalité indirecte ». Cette analyse est bien connue de notre commission, qui s'est depuis déjà fort longtemps prononcée en faveur de la création d'une « TVA sociale »... Un nombre croissant de pays européens s'y rallient : le Danemark, l'Allemagne et, plus récemment, le Royaume-Uni ainsi que le Portugal, ou dans un futur proche la République tchèque. D'une certaine manière, on peut d'ailleurs interpréter le Livre vert de la Commission européenne sur l'avenir de la TVA comme procédant d'un souci d'anticiper et de préparer le « basculement » des systèmes de prélèvements obligatoires en modernisant le principal impôt d'avenir qu'est la TVA.

Dans cette perspective d'ensemble, les taux réduits de TVA constituent autant de niches fiscales, qui plus est très coûteuses. Faut-il rappeler que la dépense fiscale se concentre aujourd'hui dans notre pays à hauteur de 26 % sur la TVA ? Parmi les vingt-et-un dispositifs les plus coûteux (c'est-à-dire à plus d'un milliard d'euros) figurent cinq mesures ayant trait à la TVA. L'augmentation d'un point de TVA à taux réduit rapporterait 2,3 milliards d'euros.

Actuellement, les directives européennes encadrent strictement le recours aux taux réduits, mais de manière très insatisfaisante. Reposant sur le principe d'unanimité, la procédure de révision de la liste des biens et des services pouvant faire l'objet d'un taux réduit souffre à la fois d'une extrême longueur, d'une grande complexité et d'une certaine opacité. Elle incite en réalité les gouvernements à avoir recours à un double langage, en prenant des engagements au niveau national tout en sachant qu'il y aura blocage au niveau communautaire. D'autre part, elle crée de l'incertitude dans les secteurs économiques concernés compte tenu des délais très longs. Enfin, elle peut engendrer des « coûts cachés », puisque l'accord unanime des Etats membres ne peut généralement être obtenu sans concessions sur d'autres sujets.

Il paraît donc souhaitable de souligner dans la proposition de résolution ces motifs d'insatisfaction, qui sont autant d'éléments essentiels à prendre en compte dans le cadre d'une réflexion d'ensemble sur le recours aux taux réduits de TVA par les Etats membres.

Dans sa proposition de résolution, la commission des affaires européennes prône l'application du principe de subsidiarité dans le domaine de la TVA. Si ce principe mérite d'être exploré, les conséquences qui pourraient en découler doivent cependant être évaluées de manière approfondie : notamment les fortes pressions de la part des groupes d'intérêts qui ne manqueraient pas de formuler des demandes reconventionnelles (qu'on pense au chocolat, à la margarine...). C'est la raison pour laquelle il est nécessaire (et plus prudent...) de compléter la rédaction de la présente proposition de résolution en demandant au Gouvernement d'« étudier les avantages et les inconvénients d'une application du principe de subsidiarité à la détermination des taux réduits de TVA ».

L'autre enjeu soulevé par la proposition de résolution déposée par nos collègues de la commission des affaires européennes réside dans la question du taux intermédiaire. En France, la création d'un taux intermédiaire présenterait l'avantage de réduire l'écart important (14,1 points) qui existe aujourd'hui entre le taux normal et le taux réduit, et donc le coût budgétaire de certains taux dérogatoires.

Cette solution pourrait trouver, par exemple, un terrain d'application dans le cas de la TVA sur la filière équine, dont le coût du taux réduit est estimé à 200 millions d'euros. Sur ce point, je vous propose un amendement rédactionnel, pour faire apparaître la référence à un taux intermédiaire pour la filière équine à une place plus pertinente dans le texte.

En tout état de cause, la politique conduite en matière de taux réduit de TVA doit devenir plus cohérente. Nous avions déjà eu l'occasion de le dire lors des débats autour du prix du livre numérique, et cette proposition de résolution nous donne l'occasion de le répéter s'agissant de la filière équine. Actuellement, en France, cette filière est considérée, à juste titre, comme faisant partie intégrante de la filière agricole. Elle est donc soumise au taux réduit de TVA. Cependant, la Commission européenne conteste cette application du taux réduit et a engagé un certain nombre de procédures en manquement contre des Etats, dont la France. Plusieurs arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) semblent lui donner raison. Pour autant, dans un souci de cohérence fiscale, il paraît éminemment souhaitable de s'associer au souhait de la commission des affaires européennes que le taux réduit de TVA, ou un éventuel taux intermédiaire, puisse continuer d'être appliqué à l'ensemble de cette filière.

Enfin, il est impératif de rappeler dans la proposition de résolution la doctrine de notre commission en matière d'équilibre des finances publiques. De la règle d'équilibre que la France a commencé de mettre en oeuvre avec la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, il découle un principe simple de compensation : si de nouveaux taux réduits de TVA devaient être décidés, il conviendrait d'accroître l'effort discrétionnaire annuel d'un montant équivalent à celui du coût des nouvelles niches en matière de TVA. Cette règle de compensation et d'équilibre budgétaire pourrait d'ailleurs, dans les semaines à venir, devenir une obligation constitutionnelle.

Je propose donc à la commission d'adopter la proposition de résolution de la commission des affaires européennes, modifiée et complétée par deux amendements traduisant les observations que je viens de vous exposer.

M. Jean Arthuis , président . - Monsieur le Rapporteur général, je vous remercie d'avoir bien voulu rappeler la position de principe de notre commission en matière d'équilibre budgétaire et d'application des taux de TVA. Aujourd'hui, le monde du cheval est inquiet de se voir appliquer une TVA à 19,6 %. Cette filière se classe au quatrième rang des exportateurs dans le monde, mais il est vrai qu'en matière d'exportations, la TVA est sans incidence.

M. Jean-Claude Frécon . - Je veux m'exprimer en tant que membre du groupe d'études sur le cheval constitué au sein de notre assemblée et présidé par notre collègue Ambroise Dupont. Je suis par ailleurs élu dans un département où les éleveurs sont nombreux et où l'on trouve deux hippodromes. Lors de l'une de ses dernières réunions, le groupe « cheval » a pris position en faveur des recommandations figurant dans le projet de résolution déposé par la commission des affaires européennes. Une question se pose toutefois quant à la référence à un éventuel taux intermédiaire de TVA qui pourrait s'appliquer à la filière. A cet égard, je veux rappeler que cette filière comprend différentes composantes. Parmi celles-ci, les courses sont fréquemment mises en avant. Si les chevaux de course sont certes finalement destinés à l'abattage, il n'est cependant pas contestable qu'auparavant leur destination est toute autre. La CJUE a effectivement condamné très récemment les Pays-Bas, mais d'autres affaires sont en instance et le moment ne me paraît pas venu de baisser la garde.

M. Philippe Marini , rapporteur . - S'agissant d'un taux intermédiaire de TVA, je veux rappeler que cette référence figure déjà dans la résolution déposée par la commission des affaires européennes. L'amendement que je propose à la commission n'est donc nullement une innovation et présente simplement un caractère rédactionnel.

M. Jean Arthuis , président . - A titre personnel et devant une importante association d'éleveurs, j'ai déjà eu l'occasion, il y a quelques mois, de dire qu'il fallait se préparer au passage à un taux intermédiaire pour la filière équine. Il en va du rétablissement de l'équilibre de nos finances publiques.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

M. Philippe Marini , rapporteur . - La commission des affaires européennes fait à juste titre référence à l'éventuelle application d'un taux intermédiaire de TVA à la filière équine comme l'une des solutions au problème posé. Cependant, la mention du taux intermédiaire serait plus pertinente à l'alinéa relatif aux orientations préconisées, plutôt qu'à l'alinéa relatif à la description de l'analyse de la Commission européenne.

L'amendement n° 1 est adopté.

M. Philippe Marini , rapporteur . - La procédure prévue au niveau communautaire pour accorder aux Etats membres la faculté d'appliquer un taux réduit de TVA à certains biens ou à certaines prestations de services est à la fois longue et complexe. Elle engendre par ailleurs des « coûts cachés » puisque l'accord unanime des Etats membres ne peut être généralement obtenu sans concessions sur d'autres sujets.

Dès lors, la solution alternative proposée par la commission des affaires européennes (l'application du principe de subsidiarité) mérite d'être explorée. Il faut cependant être conscient que l'application de ce principe engendrerait un grand nombre de demandes sectorielles et serait donc potentiellement source de nouvelles niches fiscales.

Si de nouveaux taux réduits de TVA devaient être décidés, il appartiendrait au Gouvernement d'accroître l'effort discrétionnaire annuel d'un montant équivalent à celui du coût des nouvelles niches en matière de TVA.

Une telle compensation correspond d'ailleurs aux engagements pris par la France vis-à-vis de ses partenaires européens en matière de finances publiques, déclinés dans la loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014. Cette règle d'équilibre pourrait être portée au plus haut niveau de la hiérarchie des normes grâce à son inscription dans le projet de loi constitutionnelle relatif à l'équilibre des finances publiques.

L'amendement n° 2 rectifié est adopté.

La proposition de résolution européenne a alors été adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.


* 1 Proposition de résolution européenne n° 481 (2010-2011).

* 2 Evaluation à partir des données figurant dans le premier projet de loi de finances rectificative pour 2011.

* 3 « Livre vert sur l'avenir de la TVA - Vers un système de TVA plus simple, plus robuste et plus efficace » (1 er décembre 2010).

* 4 Rapport d'information n° 283 (2006-2007).

* 5 Rapport général n° 111 (2010-2011).

* 6 Toutefois, le Gouvernement précise qu' « il est vraisemblable qu'une telle mesure aurait un effet négatif important sur le pouvoir d'achat des ménages et ce faisant sur les quantités consommées. Ce calcul est par conséquent assez théorique ».

* 7 Hors le taux de 5,5 % pour les ventes portant sur certains appareillages, ascenseurs et équipements spéciaux pour les handicapés dont le coût s'élève à 1,05 milliard d'euros.

* 8 Evaluation des voies et moyens (Tome II, dépenses fiscales) annexée au projet de loi de finances pour 2011.

* 9 Le taux parking est un taux qui ne peut être inférieur à 12 % et peut être appliqué, à titre provisoire, par les Etats membres qui appliquaient avant le 1 er janvier 1991 un taux réduit à des produits qui ne figurent pas à l'annexe III de la directive 2006/112/CE, afin de leur permettre de s'acheminer plus aisément vers le taux normal.

* 10 Sénat, Compte rendu intégral des débats du 22 novembre 2010.

* 11 Adopté en commission mixte paritaire, cet article fait suite à l'adoption initiale au Sénat de trois amendements identiques de, respectivement, MM. Serge Lagauche et Jacques Legendre au nom de la commission de la culture, Mme Catherine Morin-Desailly et des membres du groupe Union centriste, et de M. Jean-Pierre Plancade et les membres du groupe Rassemblement Démocratique et Social Européen. Ces amendements prévoyaient une application du taux réduit de TVA au livre numérique dès 2011, et non pas à compter de 2012 comme le fait l'article 25 de la loi de finances pour 2011.

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