Article 58 (art. L. 581-2 du code de la sécurité sociale) - Versement intégral de l'allocation de soutien familial en cas de paiement partiel d'une petite pension alimentaire

Objet : Cet article entend réformer les modalités de versement de l'allocation de soutien familial différentielle, accordée lorsqu'un parent se soustrait partiellement au paiement d'une pension alimentaire mise à sa charge par décision de justice.

I - Le dispositif proposé

Issue de l'ancienne allocation d'orphelin, l'allocation de soutien familial (ASF), créée par la loi n° 84-1171 du 22 décembre 1984, est versée par la branche famille.

L'ASF est une prestation familiale non soumise à condition de ressources qui peut être versée au père seul, à la mère seule ou à toute autre personne ayant recueilli un enfant et en ayant la charge effective et permanente. L'enfant doit avoir moins de vingt ans. L'ASF est en revanche soumise à une condition d'isolement (sauf dans les cas assez rares où l'enfant, privé de ses deux parents, a été recueilli). En 2011, le montant de l'ASF s'élève à 88,44 euros par mois pour l'enfant privé de l'aide de l'un de ses parents et à 117,92 euros par mois pour l'enfant privé de l'aide de ses deux parents.

Il existe, en réalité, deux catégories d'allocation de soutien familial : l'allocation de soutien familial non recouvrable, octroyée en tant qu'aide à l'entretien de l'enfant, et l'allocation de soutien familial recouvrable, versée à titre d'avance sur une pension alimentaire, en cas de défaillance complète ou partielle du parent débiteur. Seule cette dernière fait l'objet du présent article.

Le régime actuel d'attribution de l'ASF recouvrable , défini à l'article L. 581-2 du code de la sécurité sociale, prévoit deux cas de figure :

- l'ASF est intégralement versée en cas de soustraction totale du débiteur au versement de la pension alimentaire ;

- l'ASF est versée partiellement en complément du montant versé par le parent débiteur lorsque ce versement n'atteint pas le montant de la pension alimentaire mise à sa charge par le juge aux affaires familiales, et que la pension alimentaire est inférieure au montant de l'ASF (soit inférieur à 88,44 euros par mois).

Or, ce dispositif n'est pas adapté au cas des petites pensions alimentaires.

En effet, en cas de défaillance partielle du débiteur, c'est-à-dire lorsque son versement n'atteint pas le montant de la pension alimentaire fixé par le juge, un complément d'ASF (ou « ASF différentielle ») est versé dans la limite du montant de l'ASF si la pension lui est supérieure, mais dans la limite de la pension alimentaire si cette dernière est inférieure à l'ASF. En revanche, en cas d'absence totale de versement de la pension alimentaire, quel qu'en soit le montant, l'ASF est intégralement versée au parent créancier.

Le régime actuel d'attribution de l'ASF ne favorise donc pas les parents débiteurs qui font l'effort de payer partiellement la pension alimentaire. Il crée une inégalité de traitement entre les créanciers de petites pensions (dont le montant est inférieur à l'ASF) selon qu'elles sont payées ou pas : dans un cas, l'ASF différentielle joue jusqu'au montant de la pension, dans l'autre, l'ASF totale est versée. En pratique, les deux parents ont donc intérêt à ce que la pension alimentaire fixée à un niveau inférieur à l'ASF ne soit pas payée pour que le parent ayant la garde de l'enfant perçoive l'intégralité de l'ASF.

Par ailleurs, ce régime n'incite pas le juge aux affaires familiales à fixer des pensions alimentaires d'un montant inférieur à l'ASF, pour ne pas pénaliser le parent créancier. Or, ces petites pensions alimentaires sont symboliquement importantes pour maintenir ou restaurer les liens entre parent et enfant.

Ces effets pervers ont été soulignés tant par la Cour des comptes dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2010 que par le Haut Conseil à la famille dans son avis sur les ruptures et les discontinuités de la vie familiale de juillet 2010.

En conséquence, le présent article propose de réformer les règles d'attribution de l'ASF différentielle afin de corriger ces inégalités de traitement aux dépens des familles monoparentales bénéficiaires d'une pension alimentaire dont le montant est inférieur à celui de l'ASF . La situation demeure inchangée pour les créanciers d'une pension dont le montant est supérieur à celui de l'ASF.

La nouvelle rédaction de l'article L. 581-2 prévoit qu' en cas de défaillance partielle du débiteur, l'ASF différentielle sera versée dans la limite du montant complet de l'ASF , et non plus dans la limite du montant de la pension alimentaire.

Tableau comparatif des modalités de versement de l'ASF différentielle avant et après la réforme

Montant de l'ASF
(2011)

Pension alimentaire fixée par jugement

Aucune pension alimentaire n'est versée

Pension alimentaire versée partiellement 50 €

Pension alimentaire fixée par jugement

Aucune pension alimentaire n'est versée

Pension alimentaire versée partiellement 50 €

Situation actuelle

88,44 €

110 €

Droit à l'ASF
88,44 €

Droit à l'ASF
38,44 €

58 €

Droit à l'ASF
88,44 €

Droit à l'ASF
8

Situation future

88,44 €

110 €

Droit à l'ASF
88,44 €

Droit à l'ASF
38,44 €

58 €

Droit à l'ASF
88,44 €

Droit à l'ASF
38,44

Par ailleurs, le présent article simplifie les dispositions du même article L. 581-2 relatives aux capacités de recouvrement des organismes de sécurité sociale, à la suite du versement de l'ASF en cas de défaillance partielle ou totale du parent débiteur. Il est prévu que ces organismes seront subrogés dans les droits du parent créancier, soit à hauteur du montant de l'ASF, si la pension alimentaire lui est supérieure, soit à hauteur du montant de la pension alimentaire, si celle-ci est inférieure à l'ASF, le surplus de l'allocation demeurant, dans ce dernier cas, acquis au parent créancier.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale n'a procédé qu'à une modification rédactionnelle.

III - La position de la commission

La réforme du dispositif de l'allocation de soutien familial différentielle, demandée depuis plusieurs années par les acteurs du secteur ainsi que par certaines instances publiques, met utilement fin aux aberrations qui caractérisent son régime d'attribution actuel. Elle permettra, par ailleurs, d'apporter un petit coup de pouce supplémentaire aux familles monoparentales confrontées à un paiement partiel de la pension alimentaire.

Votre commission regrette néanmoins que le Gouvernement se soit contenté de ne traiter qu'un aspect très restreint du dispositif de l'ASF, alors que celui-ci nécessite des aménagements de plus grande ampleur, comme l'a montré la Cour des comptes dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2010. En particulier, l'appréciation par les Caf de la situation des parents se trouvant « hors d'état » de subvenir aux besoins de leur(s) enfant(s) pose de nombreuses difficultés, ce qui entraîne un report de la charge de travail des caisses vers les juges aux affaires familiales.

Malgré cette réserve, la commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

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