C. LA MISE EN PLACE D'OUTILS EN FAVEUR DU DÉVELOPPEMENT DU NUMÉRIQUE SCOLAIRE

1. La création d'un service public de l'enseignement numérique et de l'enseignement à distance

Le présent projet de loi crée, dans son article 10, un service public de l'enseignement numérique et de l'enseignement à distance. La mise en place de ce nouveau service vise à répondre aux critiques récurrentes quant à l'absence d'un pilotage national et, parallèlement, d'un accompagnement local efficace s'agissant des actions destinées au développement de l'enseignement numérique.

Parmi les lacunes du système scolaire français en matière d'usages numériques pointées par les experts et dont votre rapporteure s'est faite l'écho dans son analyse, le manque de ressources appropriées, ou tout au moins la mauvaise connaissance qu'ont les enseignants des outils à leur disposition est l'une des causes essentielles du retard observé. En conséquence, cet axe a été jugé prioritaire par le Gouvernement, qui en a fait la mission principale du service public de l'enseignement numérique et de l'enseignement à distance.

Il est prévu, outre les missions relatives à l'enseignement à distance qui demeurent confiées au Centre national de l'enseignement à distance (CNED), que le nouveau service public ainsi créé mette à la disposition des écoles et des établissements d'enseignement des services numériques, ainsi que des ressources pédagogiques destinées des enseignants pour leurs activités pédagogiques, leur formation et leurs relations avec les familles.

L'annexe au présent projet de loi précise à cet égard que « l'incitation au développement de ressources numériques se fera notamment en faveur de contenus et de services numériques dit libres » sans toutefois porter atteinte aux intérêts économiques des éditeurs de manuels, qu' « un réseau social professionnel offrira aux enseignants une plateforme d'échange et de mutualisation » et que « les ressources numériques éducatives des grands établissements éducatifs, culturels et scientifiques seront mises à disposition gratuitement des enseignants à des fins pédagogiques ».

L'Assemblée nationale a souhaité préciser, en le renommant « service public du numérique éducatif et de l'enseignement à distance » , que ce nouveau service public s'inscrit dans le cadre du service public de l'enseignement et contribue à ses missions. Elle en a également affiné les missions relatives à la mise à disposition de services et de ressources numériques, insistant sur le fait que ces outils doivent être pluriels, de façon à offrir un choix véritable aux enseignants et permettre ainsi la mise en oeuvre de méthodes d'enseignement diversifiées. Elle a également donné au service public du numérique éducatif et de l'enseignement à distance un rôle moteur pour le développement de nouveaux projets numériques dans les établissements.

2. L'assouplissement de l'exception pédagogique

Il n'est cependant pas concevable d'espérer un essor des usages numériques dans les classes si, outre les ressources gratuites ou payantes mises à la disposition des enseignants, ceux-ci n'ont pas la possibilité de concevoir eux-mêmes leurs propres supports pédagogiques en utilisant facilement des illustrations dans leur version numérique.

Dès lors, il devient indispensable d'assouplir l'exception pédagogique au droit d'auteur, particulièrement restrictive dans la législation française en matière de propriété intellectuelle et artistique. Les limites drastiques qui sont aujourd'hui imposées à son utilisation par les dispositions en vigueur, et notamment les termes des accords signés entre le ministère de l'éducation nationale, celui de la recherche et de l'enseignement supérieur et les différentes sociétés de gestion collective des droits concernées, rendent fort décourageantes, pour un enseignant soucieux d'agir dans la légalité, l'utilisation numérique d'illustrations protégées en principe par le droit de l'auteur.

L'article 55 du présent projet de loi vise à remédier à ce constat en assouplissant quelque peu l'exception pédagogique. Il en étend ainsi le champ, et là réside la principale avancée du dispositif, aux oeuvres réalisées pour une édition numérique de l'écrit, les ORENE, évitant ainsi à l'enseignant une transcription informatique ou un scanner du document désiré avant toute utilisation. Il prévoit également d'inclure à l'exception pédagogique les extraits d'oeuvres numériques utilisées pour illustrer des sujets d'examen ou de concours organisés dans la prolongation des enseignements, afin de permettre leur diffusion au-delà de la seule épreuve.

3. Le renforcement de l'information relative aux usages numériques et de l'éducation aux médias

Le Gouvernement a enfin considéré, au travers des articles 26 et 35 du projet de loi, que le développement des usages numériques en milieu scolaire ne pouvait faire l'économie d'une réflexion sur le rôle de celle-ci en matière de formation et d'information des élèves sur les règles et les dangers de l'Internet, mais aussi sur la façon dont elle forme les futurs citoyens à comprendre en monde au travers de ce qui en est présenté par des médias aujourd'hui largement en ligne.

Aux termes de l'annexe au présent projet de loi, il est ainsi jugé « impératif de former les élèves à la maîtrise, avec un esprit critique, de ces outils qu'ils utilisent chaque jour dans leurs études et leurs loisirs et de permettre aux futurs citoyens de trouver leur place dans une société dont l'environnement technologique est amené à évoluer de plus en plus rapidement. »

À cet effet, et reprenant en cela l'une des recommandations d'un rapport sénatorial d'information sur la protection de la vie privée à l'heure du numérique 18 ( * ) incitant à « renforcer la place accordée aux questions de protection de la vie privée et des données personnelles dans les programmes scolaires » , l'article 26 crée, à l'école, au collège et au lycée, une formation à l'utilisation des outils et des ressources numériques en lieu et place des enseignements, datés dans leur forme actuelle, de technologie et d'informatique.

Cette formation consistera en particulier à sensibiliser les élèves aux droits - le respect de la propriété intellectuelle - et devoirs - la protection de la vie privée - liés à l'usage d'Internet et des réseaux.

Autre pilier du rôle de l'école dans une société connectée, l'éducation aux médias numériques est incluse dans les apprentissages du collège aux côtés de l'initiation économique et sociale et de l'initiation technologique (article 35).

Cet enseignement obligatoire, transversal et pluridisciplinaire doit permettre à chaque élève, à l'issue de sa scolarité au collège, de comprendre et d'être capable d'analyser les informations diffusées par les médias, en fonction notamment du support, de la langue utilisées, des illustrations choisies.

Au travers de cet apprentissage progressif, c'est au final l'esprit critique de l'adolescent par rapport aux médias quels qu'ils soient et des sources multiples d'information qu'il s'agit d'entraîner. C'est d'ailleurs ce qu'a souhaité clarifier l'Assemblée nationale en préférant, lors de l'examen de l'article 35, les termes « d'éducation obligatoire aux médias et à l'information » à ceux d'« éducation aux médias numériques ».


* 18 La vie privée à l'heure des mémoires numériques, pour une confiance renforcée entre citoyens et société de l'information - M. Yves Détraigne et Mme Anne-Marie Escoffier - Rapport d'information n° 441 (2008-2009).

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