CHAPITRE III - RENFORCEMENT DE L'ACTION EXTÉRIEURE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET DE LEURS GROUPEMENTS

Article 9 bis (art. L. 1115-5 du code général des collectivités territoriales) - Conclusion d'accord de création d'un groupement eurorégional de coopération

Le présent article a été inséré par l'adoption d'un amendement de notre collègue Michel Delebarre, repris en séance publique par votre rapporteur.

Il tend à modifier les dispositions de l'article L. 1115-5 du code général des collectivités territoriales afin de prendre en compte l'institution des groupements eurorégionaux de coopération prévus par le protocole n° 3 à la convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales conclu à Utrecht le 16 novembre 2009.

On distingue deux types d'actions de coopération des collectivités territoriales : la coopération décentralisée, d'une part, et la coopération décentralisée « transfrontalière », qui permet la réalisation de projets de développement et d'aménagement de l'espace, d'autre part. Au niveau européen, cette forme de coopération est régie par la convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou des autorités territoriales de 1980, dite « convention de Madrid », qui a été complétée par trois protocoles additionnels :

- le protocole n° 1 signé à Strasbourg le 9 novembre 1995 qui reconnait aux collectivités territoriales le droit de créer, sous certaines conditions, des organismes de coopération transfrontalière ayant ou non la personnalité juridique ;

- le protocole n° 2 signé à Strasbourg le 5 mai 1998 qui étend ces dispositions à la coopération interterritoriale , autorisant la coopération entre collectivités territoriales qui ne sont pas géographiquement voisines par une frontière commune ;

- le protocole n° 3 signé à Utrecht le 16 novembre 2009, qui vise à faciliter le développement des dispositifs de coopération décentralisée transfrontalière en créant les groupements eurorégionaux de coopération (GEC).

Les groupements eurorégionaux de coopération (GEC)

Le GEC permet d'associer, dans une relation bilatérale, une entité relevant d'un pays tiers à l'Union européenne, membres du Conseil de l'Europe, avec un seul pays membre de l'Union.

Disposant de la personnalité juridique et d'une autonomie budgétaire, ils sont régis par le droit interne de l'État dans lequel ils ont leur siège. Toutefois, dans un certain nombre de situations, le droit d'autres États peut également s'appliquer.

Il appartient aux membres d'un GEC de choisir la forme juridique qui répond à leurs besoins, en fonction des possibilités offertes dans l'État du siège. Cette capacité juridique est choisie par les membres lors de l'établissement du GEC.

Un GEC est créé en premier lieu par et pour les collectivités ou autorités territoriales des États. Un État membre peut également être membre d'un GEC si l'une au moins de ses collectivités ou autorités territoriales en est aussi membre. Les autres personnes morales qui peuvent être membres comprennent les entités créées spécifiquement pour satisfaire un but d'intérêt général, autre qu'industriel et commercial, à condition que leur activité soit financée en majorité par l'État, une collectivité ou autorité territoriale, ou un tel établissement, ou que la gestion soit contrôlée par ces derniers.

Une « clause d'ouverture » est prévue afin de permettre aux collectivités ou autorités territoriales d'un État non partie au protocole de participer à l'établissement d'un GEC ou devenir membres de celui-ci : elle n'est possible que si les collectivités ou autorités territoriales relèvent d'un Etat non partie qui a toutefois une frontière commune avec un État partie qui est ou sera l'État de siège du GEC, et que ces deux États signent un accord à cet effet.

L'article L. 1115-4 du code général des collectivités territoriales permet à une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales françaises de participer à un GEC de droit étranger, puisqu'il dispose qu'elles peuvent « adhérer à un organisme public de droit étranger auquel participe au moins une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales (...) d'un État membre du Conseil de l'Europe ». Toutefois, l'article L. 1115-5 interdit aux collectivités et à leurs groupements de signer des conventions avec un État étranger « sauf si elle a vocation à permettre la création d'un groupement européen de coopération territoriale ». Dans ce cas, la dérogation accordée pour la signature d'un tel accord est subordonnée à l'autorisation du préfet de région.

La nouvelle rédaction de l'article L. 1115-5 du code général des collectivités territoriales adoptée par le Sénat complète cet article par un deuxième alinéa qui réaffirme l'interdiction faite aux collectivités de conclure des « accords », qui se substitue au terme de « convention », à l'exception de celui nécessaire à la création d'un groupement eurorégional de coopération. Le principe de la dérogation accordée par le préfet de région pour la signature d'un tel accord est conservé.

Le rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Olivier Dussopt, a estimé que la rédaction adoptée par le Sénat fragilisait la base légale en droit interne des GECT existants, « en prévoyant l'interdiction de la signature de tout accord avec un État étranger sans que les deux exceptions (groupement européen de coopération territoriale ou groupement eurorégional de coopération) soient concomitantes ». En effet, les organismes de coopération transfrontalière et territoriale existants n'ont pas l'obligation de transformer leurs structures en GEC : les organismes en place continuent d'exister. Par ailleurs, l'interdiction générale posée à l'article L. 1115-5 ayant fait l'objet de nombreuses dérogations, notamment au profit des départements d'outre-mer, il estime qu'il « conviendrait que ces possibilités ne soient pas remises en cause par l'affirmation postérieure d'un principe en contradiction avec ces dispositions ».

C'est pourquoi il a proposé une nouvelle rédaction de l'article L. 1115-5 en posant le principe selon lequel toute collectivité territoriale ou tout groupement peut conclure des conventions avec des États étrangers dans trois hypothèses :

- dans les cas prévus par la loi ;

- pour la mise en place d'un groupement européen de coopération territoriale (GECT) ;

- pour la mise en place d'un groupement eurorégional de coopération (GEC).

Un amendement de M. Etienne Blanc a étendu, avec l'avis défavorable du Gouvernement mais favorable de la Commission, les cas aux groupements locaux de coopération transfrontalière (GLCT). Il convient toutefois de relever que les groupements locaux de coopération transfrontalière ne semblent pas, a priori , nécessiter d'accord avec l'un des quatre États étrangers pouvant y recourir 6 ( * ) pour être mis en place.

Votre rapporteur considère que la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale permet de sécuriser le recours aux trois outils de la gouvernance en matière de coopération transfrontalière, reconnus par la France.

Votre commission a adopté l'article 9 bis sans modification .


* 6 République fédérale d'Allemagne, République française, Grand-duché de Luxembourg, Conseil fédéral suisse agissant au nom des cantons de Soleure, de Bâle-Ville, de Bâle-campagne, d'Argovie et du Jura

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