TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE LA MINISTRE

Réunie le mercredi 16 octobre 2013 sous la présidence de Mme Annie David, présidente, la commission procède à l'audition de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé sur le projet de loi n° 1376 (AN-XIV e ) garantissant l'avenir et la justice du système de retraites dont Mme Christiane Demontès, est la rapporteure.

Mme Annie David , présidente . - Nous vous auditionnons dans un premier temps, Madame la ministre, sur le projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, adopté hier à l'Assemblée nationale. Vous nous présenterez ensuite, dans la seconde partie de notre réunion, le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé . - Les grandes orientations de ce texte sont connues. L'Assemblée nationale vient de l'adopter tandis que la presse s'en est fait l'écho.

Il répond à un triple défi. Financier tout d'abord. Le déficit prévu en 2020 s'établit à 20 milliards tous régimes confondus, dont 7,5 milliards pour le régime général.

Démographique ensuite. Le système des retraites est confronté à l'arrivée à l'âge de la retraite d'une classe d'âge nombreuse, issue du baby-boom. Mais la vitalité démographique que connaît notre pays, à la différence de ses voisins européens, constitue aussi une opportunité grâce à laquelle il sera possible de stabiliser la situation après 2035.

Enfin ce texte vise à répondre à certaines injustices, à l'égard des femmes, dont les pensions sont inférieures à celles des hommes, comme à l'égard de ceux qui ont commencé à travailler jeunes ou de ceux qui ont travaillé dans des conditions pénibles.

Nous avons fait le choix d'une réforme de progrès qui garantit le financement et l'avenir des régimes de retraite. Autrement, nous ouvririons la porte à des mécanismes d'assurances privées. L'effort à réaliser est important mais réaliste. Nous procéderons en deux temps afin de ne pas bouleverser les calculs des personnes qui partiront à la retraite ces prochaines années car ces décisions se prennent plusieurs années en amont. Jusqu'en 2020, il ne s'agira que de mesures de consolidation. Après cette date, la durée de cotisation pour une retraite à taux plein augmentera progressivement, à raison d'un trimestre tous les trois ans entre 2020 et 2035 pour atteindre quarante-trois ans.

D'ici-là, le texte prévoit une hausse des cotisations salariés et employeurs, le report du 1 er avril au 1 er octobre de la revalorisation des pensions en fonction de l'évolution des prix, la fiscalisation des majorations de pensions pour les retraités ayant élevé trois enfants ou plus.

Nous avons souhaité mettre à contribution l'ensemble des catégories sociales car le système des retraites constitue un élément central du pacte républicain. C'est pourquoi les retraités sont mis à contribution au titre de la solidarité intergénérationnelle. De même tous les régimes contribueront, de base comme complémentaires, publics comme privés. Cette réforme de progrès ouvre de nouveaux droits pour répondre aux injustices.

Le compte de pénibilité constitue un élément central. Si l'espérance de vie augmente, tous n'en profitent pas autant. Un compte de prévention sera créé à partir du 1 er janvier 2015. A l'issue de la négociation avec les partenaires sociaux, dix critères de pénibilité ont été définis et inscrits dans la loi. Les personnes exposées à ces facteurs bénéficieront de points qu'ils pourront convertir en périodes de formation, en périodes de temps partiel rémunéré à temps plein, ou en possibilité de partir en retraite anticipée.

La réforme des retraites ne saurait, à elle seule, corriger les inégalités accumulées par les femmes pendant leur carrière. Mais nous avons eu le souci de ne pas les amplifier. Ainsi l'ensemble des interruptions pour congé maternité seront intégrées dans le calcul des droits. De même, le temps partiel subi, qui concerne à 80 % les femmes, sera mieux pris en compte. Il suffira de 150 heures travaillées pour valider un trimestre, contre 200 heures aujourd'hui.

Le projet de loi corrige aussi une injustice à l'égard des jeunes dont l'entrée dans la vie active est difficile. Les périodes d'apprentissage seront prises en compte - 400 000 jeunes sont actuellement en apprentissage. Le rachat d'années d'études supérieures sera encouragé. Enfin un trimestre de stage pourra être compté dans le calcul des droits à pension. S'agissant des petites pensions, le minimum vieillesse sera relevé, tandis que l'ensemble des périodes travaillées sera pris en compte afin d'atténuer les injustices dues aux carrières heurtées. D'autres mesures, également, concernent les agriculteurs.

Enfin ce texte crée un mécanisme de pilotage : un comité de suivi sera chargé de faire des recommandations publiques en cas de dérapage au regard des objectifs de la réforme, financiers ou sociaux. Le Gouvernement restera décisionnaire.

Dans un esprit de clarification, chacun pourra accéder à un compte personnalisé en ligne l'informant sur ses droits à la retraite. Il simplifiera la liquidation des pensions et leur paiement.

Ce projet de loi a été adopté hier à l'Assemblée nationale. Il sera examiné en séance publique au Sénat le 28 octobre. Il s'agit d'un débat important pour notre pays et l'avenir de nos retraites.

Mme Christiane Demontès, rapporteure . - L'Assemblée nationale a voté un article 33 bis qui modifie profondément le droit de l'affiliation aux régimes complémentaires des salariés (Arrco) et des cadres (Agirc) du privé comme du public (Ircantec). Désormais l'affiliation ne dépendra plus du statut de l'établissement mais de la nature du contrat de travail. En particulier, les contractuels de droit privé qui travaillent dans des établissements publics seront affiliés à l'Agirc ou l'Arrco et non plus à l'Ircantec, qui restera le régime des contractuels de droit public. Quel sera le régime des salariés de droit privé en contrat à durée déterminée dans un établissement public qui verront leur contrat renouvelé ?

Les aidants qui auront accompagné successivement un enfant puis un adulte handicapés pourront-ils bénéficier d'un cumul de majorations d'assurance ?

Les petites retraites ne seront pas concernées par le report de la date de revalorisation des pensions. Mais à quel niveau sera fixé le seuil ? Au minimum vieillesse ? Au seuil de pauvreté ?

Enfin en matière d'information des retraités, le travail réalisé par le GIP Info-retraite, appuyé sur la Cnav et l'Agirc et l'Arrco, est largement reconnu. La création d'un nouveau GIP marque une étape supplémentaire. Comment s'effectuera la transition ?

Mme Laurence Rossignol, rapporteure au nom de la délégation aux droits des femmes . - Le projet de loi prévoit qu'un rapport sera remis dans les six mois suivant la promulgation de la loi sur la majoration de 10 % pour les familles ayant élevé trois enfants ou plus. La réforme des droits familiaux se voit ainsi repoussée à 2020. Pourtant ce système est défaillant et choquant. En effet, la majoration de retraite de 10 % bénéficie davantage aux hommes car elle est proportionnelle à la pension. Or, non seulement les salaires des hommes sont plus élevés, mais souvent la femme, qui a dû interrompre sa carrière pour s'occuper des enfants, ne bénéficie pas d'une retraite à taux plein. A budget constant, ne peut-on envisager que, si la mère n'a pas pu effectuer une carrière complète, elle puisse cumuler les deux majorations ?

Depuis 2010, en cas de naissance d'un enfant, la mère bénéficie d'une majoration d'assurance de quatre trimestres, tandis qu'une majoration de quatre trimestres est ouverte aux parents qui doivent décider de son partage avant que l'enfant n'ait quatre ans. Les parents sont-ils bien informés de leurs droits ? De même, les femmes qui signent un contrat à temps partiel sont-elles suffisamment informées par leurs employeurs des conséquences sur leurs retraites ?

Dans le décret qui dresse la liste des critères de pénibilité, après consultation des partenaires sociaux, certains critères de pénibilité spécifiques aux femmes ne sont pas pris en compte. Les syndicats ne sont pas toujours sensibles à cette problématique. Si le travail de nuit, le travail posté ou le travail répétitif sont reconnus comme pénibles, le travail à temps partiel, qui s'accompagne d'une forte amplitude horaire et accroît fortement les temps de trajet, ne figure pas dans la liste. Il faut reconnaître la spécificité du temps de travail subi et contribuer à rendre visible l'invisible, les inégalités dont les femmes sont l'objet.

Mme Marisol Touraine, ministre . - L'article 33 bis résulte d'un amendement du Gouvernement. Il redéfinit les règles d'affiliation aux régimes complémentaires car le précédent dispositif était fragile d'un point de vue juridique. Nous avions saisi le Conseil d'Etat qui, dans son avis, a considéré que l'affiliation devait dépendre du régime juridique prévu par le contrat de travail et non de la nature de l'employeur. Ce même principe a d'ailleurs prévalu pour l'application du compte de prévention de la pénibilité. L'article 33 bis organise une période de transition. Les affiliés actuels ne seront pas concernés. Pendant la période de transition, les salariés continueront à cotiser à leur régime actuel. Ensuite les salariés feront l'objet d'une réaffectation automatique dans le régime correspondant à leur statut.

Je confirme que les aidants pourront cumuler la majoration éventuelle d'assurance pour charge d'enfant handicapé et celle liée à l'accompagnement d'un adulte handicapé, créée par la loi.

Pour les petites pensions, le débat a été difficile. Nous avons choisi le minimum vieillesse, soit 787 euros par mois. Il était problématique de retenir un seuil de revenu plus élevé car le seuil retenu devait être identifiable juridiquement. Fixer un seuil en fonction de l'assujettissement ou non à la CSG risquait d'être déclaré inconstitutionnel car la CSG prend en compte les revenus du couple, alors que la pension de retraite est calculée en fonction de droits accumulés pendant la vie professionnelle. En outre, des retraités qui perçoivent une pension d'un même montant au titre du régime général ne sont pas nécessairement dans la même situation, certains pouvant percevoir, en outre, une retraite complémentaire, ou plusieurs pensions versées par un autre régime.

Un nouveau GIP sera créé en juillet 2014 qui absorbera le GIP Info-retraite. D'ici-là, une mission de préfiguration sera mise en place pour réaliser le basculement vers le nouveau dispositif qui reprendra les missions du GIP Info-retraite dans un cadre élargi.

Madame Rossignol, 70 % des sommes versées au titre des majorations de retraite sont perçues par des hommes car elles sont proportionnelles à la pension, qui dépend du salaire. Or le salaire des hommes est supérieur en moyenne à celui des femmes. Le rapport Moreau préconisait une réorientation des aides vers les seules femmes. Une autre solution consisterait en un mécanisme forfaitaire. Aucune solution ne semble satisfaisante. Un rapport nous sera rendu dans les six mois suivant la promulgation de la loi afin de définir une réforme applicable en 2020, au moment où la durée de cotisation commencera à augmenter : il ne faut pas fausser les calculs de ceux qui ont prévu de partir en retraite. Il faut aussi être prudent : tout dispositif spécifique aux femmes doit respecter le droit européen qui n'autorise pas les différences de traitement entre les sexes. Enfin, si l'on souhaite accorder les majorations dès le premier enfant et leur donner un caractère forfaitaire, leur montant sera relativement minime.

L'Assemblée nationale a prévu la remise d'un rapport qui étudiera l'actualisation des critères de pénibilité et se concentrera sur la pénibilité des métiers féminins.

Aucun parent n'a encore été lésé par un éventuel manque d'information éventuel sur le partage des quatre trimestres de majoration d'assurance entre les conjoints. Comme la réforme date de 2010 et que les parents doivent décider avant le quatrième anniversaire de leur enfant, la mesure ne sera effective qu'en 2014. Il appartiendra aux différents régimes d'informer les parents.

M. Ronan Kerdraon . - Cette réforme est nécessaire, la réforme de 2010 ayant échoué. Je salue le courage du Gouvernement engagé dans la voie d'une réforme soutenable et durable. Avec MM. Martial Bourquin et Alain Néri, nous avions rencontré le cabinet du Premier ministre au sujet de l'allocation équivalent retraite. Le Premier ministre a annoncé en janvier son rétablissement partiel sous forme d'une allocation transitoire. Or certains bénéficiaires potentiels nés en 1952 ou 1953 ne peuvent y avoir accès ; que comptez-vous faire en leur faveur ?

Comment les stages des étudiants seront-ils pris en compte ?

Enfin, je regrette qu'il ne soit pas possible de relever le seuil en deçà duquel les pensions seront exemptées du décalage de revalorisation.

M. Dominique Watrin . - Mon propos sera d'une tout autre tonalité ! Sans doute mon postulat de départ est-il différent : si l'hypothèse de base est que deux tiers des gains d'espérance de vie doivent être consacrés au travail et un tiers aux retraites, alors il est logique d'augmenter les cotisations et de repousser, de fait, l'âge effectif de départ à la retraite à taux plein à soixante-six ans. Mais nombreux seront ceux évincés du marché du travail avant et dont la retraite sera encore amoindrie en raison des décotes. De plus, rien ne prouve que l'espérance de vie continuera à augmenter : avec la crise, l'espérance de vie en bonne santé a commencé à régresser. Quel projet de vie souhaitons-nous pour les plus de soixante ans ? Tel est le débat. La retraite peut être l'occasion d'un nouveau départ, d'exercer des activités utiles à la communauté ; les retraités ne représentent pas seulement une charge pour la société.

Les régimes sont en déficit. Mais en mettant l'accent sur le ratio entre actifs et retraités, vous oubliez les gains de productivité. Réglons plutôt la question de l'emploi : 100 000 emplois créés, c'est 1,3 milliard de cotisations en plus. Il faut aussi améliorer la répartition des richesses.

Les quelque avancées de ce texte ne modifient pas les lignes directrices du projet, ni l'effet des mesures de consolidation. Enfin, il faut aussi entendre la déception des jeunes. Le dispositif de rachat des années d'études n'est pas satisfaisant.

Mme Gisèle Printz . - La grossesse est-elle prise en compte dans l'appréciation de pénibilité ?

Mme Claire-Lise Campion . - Ce texte comprend des mesures très positives à l'attention des aidants pour les aider à compenser les périodes d'inactivité. L'article 23 remplace ainsi les deux critères permettant aux travailleurs handicapés de bénéficier d'une retraite anticipée - le taux d'incapacité de 80 % et la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) -, par un critère unique, un taux d'incapacité à 50 %. De plus, la suppression de la RQTH est retardée au 31 décembre 2015 pour ne pas léser ceux qui ont entamé des démarches pour partir en retraite.

Qu'en est-il de ceux qui ont oublié de demander l'attribution d'un taux d'incapacité en temps utile et ne peuvent plus ensuite fournir la preuve d'un taux d'incapacité de 50 % ? D'autres modalités de preuve de ce taux d'incapacité sont-elles envisageables ?

Les personnes souffrant d'un handicap lourd apparu tardivement ou d'un handicap évolutif avec l'âge sont pénalisées, car elles ne satisfont pas aux règles concernant la durée de cotisation pour bénéficier de la retraite anticipée des travailleurs handicapés. Leur situation doit être prise en compte. Ainsi une personne frappée de cécité à quarante ans ne peut ni faire valoir ses droits acquis auparavant, ni être en mesure de prouver son taux d'incapacité à 50 % pendant la durée requise.

Mme Marisol Touraine, ministre . - M. Kerdraon m'a interrogé sur le cas de personnes qui ne perçoivent pas l'allocation transitoire de solidarité (ATS). L'Assemblée nationale a prévu qu'un rapport serait remis trois mois après la promulgation de la loi pour identifier le nombre de personnes concernées et les raisons pour lesquelles l'ATS n'est pas versée. Nous proposerons alors des solutions.

Oui, monsieur Watrin, nos approches sont différentes : l'intégralité du temps de vie gagné ne peut pas être intégralement dédiée à la retraite. Compte tenu de l'allongement de l'espérance de vie, un jeune de vingt-cinq ans qui accomplira quarante-trois annuités vivra deux ans de plus à la retraite que celui qui partira à la retraite en 2014. Malgré l'accroissement de la durée de cotisation, l'allongement de l'espérance de vie est tel qu'il pourra bénéficier plus longtemps de sa retraite que ses grands-parents. Si dans dix ou vingt ans, l'allongement de l'espérance de vie ralentit ou s'interrompt, nos successeurs aviseront mais aujourd'hui, il est considérable : il se monte à un an tous les dix ans pour les plus de soixante ans et, à la naissance, à deux ans et demi tous les dix ans. Pour l'espérance de vie en bonne santé, il existe diverses études, et Serge Volkoff, démographe reconnu, estime qu'elle se stabilise. Tout dépend en réalité des métiers, des situations et de l'âge.

Nous prenons en compte les gains de productivité, monsieur Watrin, contrairement à ce que vous dites, mais ils ne permettent pas de compenser la dégradation du ratio démographique. Il est vrai qu'avec un taux de chômage moins élevé, il y aurait moins de chemin à parcourir...

Ce n'est pas en répétant à l'Assemblée et au Sénat que j'ai confirmé la retraite à soixante-six ans que cela deviendra vrai ! Je n'ai jamais dit cela. La règle, c'est quarante-trois annuités de cotisations, une durée modulée en fonction des parcours professionnels. Parmi les jeunes qui arrivent sur le marché du travail, les uns feront quarante-trois ans, mais d'autres, en raison de la pénibilité de leur travail, pourront partir jusqu'à deux ans plus tôt. De plus, la prise en compte du temps partiel fera gagner en moyenne cinq trimestres de validation à 15 % des assurés.

Non, la grossesse n'est pas une pénibilité, madame Printz. Cette période particulière de la vie, qui peut entraîner des aménagements de la vie professionnelle, ne fait pas partie des dix critères extérieurs de la pénibilité.

Mme Campion m'a interrogée sur le handicap. Une partie du rapport sur le travail et le handicap concernera la survenance d'un handicap en cours de carrière professionnelle. Un décret précisera les conditions du taux d'incapacité à 50 %.

Les périodes de stage ne seront pas banalisées, monsieur Kerdraon : il ne s'agit pas d'un travail normal. Aussi, avons-nous écarté l'idée d'une cotisation sur les 436 euros de l'indemnité de stage. Il n'y aura pas non plus de validation gratuite, monsieur Watrin, puisque des jeunes, au même âge, travaillent et cotisent. Nous proposons que les jeunes ayant effectué des stages puissent valider jusqu'à deux trimestres en versant 12,5 euros par mois sur deux ans ou 25 euros pendant un an. Les étudiants, quant à eux, pourront racheter jusqu'à quatre trimestres d'études. Au total, les deux mécanismes, qui sont différents, seront plafonnés à quatre trimestres. Avec l'aide de 1 000 euros, il en coûtera 650 euros à un jeune qui perçoit une rémunération de 1 250 euros pour racheter un trimestre.

Mme Laurence Rossignol . - Je voudrais revenir sur les 10 % de majoration en faveur des pères.

Mme Marisol Touraine, ministre . - Des parents !

Mme Laurence Rossignol .  - Des parents... y compris les pères. Prenons un couple dont le mari perçoit 1 600 euros de pension et la mère 932 euros, soit les moyennes actuelles. Le total des majorations sera de 253 euros, dont 160 euros pour le père et 93 euros pour la mère. Il serait plus juste que ces 253 euros soient versés à la mère, à condition, bien sûr, qu'elle ne touche pas une pension à taux plein. Cela ne changerait rien à l'équilibre des régimes de retraite, ni d'ailleurs à la situation des couples qui font budget commun. En revanche, cela profiterait à la femme si le couple est séparé.

Mme Marisol Touraine, ministre . - Il y a des couples qui se séparent.

Mme Laurence Rossignol, rapporteure pour avis .  - J'ai bien entendu vos arguments, madame la ministre, mais pourquoi attendre 2020 pour réparer cette injustice ?

Mme Marisol Touraine, ministre . - Nous ne pouvons dire aux hommes et aux femmes qui vont partir à la retraite dans les prochaines années que les règles du jeu ont changé et qu'ils vont toucher moins. Ensuite, comme je l'ai indiqué, il n'est pas possible d'établir des critères différents pour les hommes et les femmes, sauf à les relier à la maternité, ce qui n'est pas le cas en l'occurrence. Vous proposez que la majoration aille intégralement à la femme si elle n'a pas fait de carrière complète. Mais si elle en a fait une et pas son mari, ce dernier touchera-t-il l'intégralité de la majoration ? Qu'en sera-t-il si ni l'homme ni la femme n'ont fait de carrière complète ? Que faire aussi du cas des femmes qui tout en ayant accompli une carrière complète, auront choisi un métier moins prenant ou travaillé à temps partiel pour mieux s'occuper de leurs enfants ?

Le critère de carrière complète ne semble pas répondre à vos préoccupations. A quelles conditions juridiques réserver les avantages familiaux aux femmes ? En outre, voulons-nous favoriser les familles de trois enfants et plus, ou les familles dès le premier enfant ? La solution réside sans doute dans une aide forfaitaire par enfant, mais quel en serait le montant si l'on raisonne à enveloppe constante ?

Mme Catherine Procaccia . - Nous avons déjà eu ce débat : il est juridiquement impossible de ne verser la majoration pour enfants qu'aux femmes. La solution qui avait été trouvée à l'époque consistait à attribuer aux femmes quatre trimestres pour cause de maternité, les parents se répartissant les quatre autres trimestres. Nous avions prévu une information spécifique des parents en 2014.

Mme Gisèle Printz . - En cas de divorce, la majoration de 10 % est-elle versée à la femme qui a la garde des enfants ?

Mme Marisol Touraine, ministre . - Normalement, il n'y a plus de garde d'enfants lorsque la femme fait valoir ses droits à la retraite. Si un couple a trois enfants, la majoration est versée à la mère et au père. Quand le couple est séparé et que l'un reste avec deux enfants et en a un troisième, alors, lui seul aura droit à la majoration. Il n'y a pas de choix - celui-ci n'existe que pour la majoration de la durée d'assurances.

Mme Annie David, présidente . - Je vous remercie, madame la ministre.

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