EXAMEN EN COMMISSION

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Réunie le mercredi 13 novembre 2013 sous la présidence de Mme Annie David, présidente , la commission procède à l'examen de la proposition de loi n° 669 (2011-2012) visant à élargir les conditions d'attribution de la carte du combattant aux anciens combattants de l'armée française totalisant au moins quatre mois de présence en Algérie avant le 1 er juillet 1964 ou en opérations extérieures, dont M. Marc Laménie est le rapporteur .

M. Marc Laménie, rapporteur . - Quarante-huit heures après le 11 novembre, date anniversaire de l'armistice de 1918 mais également jour d'hommage à tous les morts pour la France, le hasard du calendrier parlementaire nous fait examiner une proposition de loi dont l'objet est de conforter l'égalité entre toutes les générations du feu.

Déposée par notre collègue Marcel-Pierre Cléach, elle vise à corriger deux inégalités qui touchent certains anciens d'Algérie et les soldats qui ont participé à des opérations extérieures (Opex) s'agissant de l'attribution de la carte du combattant. Je vous rappelle que ces Opex constituent la principale forme d'intervention de l'armée française à l'extérieur de notre territoire, en application le plus souvent de nos engagements internationaux. Conformément à des résolutions du Conseil de sécurité de l'Onu, des décisions du Conseil de l'Union européenne ou dans le cadre de l'Otan, 8 500 femmes et hommes étaient déployés dans le monde au 1 er octobre dernier, principalement au Mali, au Liban et en Afghanistan.

La carte du combattant a été créée au lendemain de la Première Guerre mondiale pour consacrer le droit à réparation reconnu à ceux qui ont servi la Nation au combat.

Elle est créatrice de droits pour ses titulaires. Le plus important d'entre eux est le versement, à partir de l'âge de 65 ans, de la retraite du combattant, dont le montant annuel est à l'heure actuelle de 668,64 euros. Etroitement liée à la qualité d'ancien combattant, elle n'est pas réversible. Elle est attribuée, sous certaines conditions, dès 60 ans, notamment aux bénéficiaires de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) ou de l'allocation pour adulte handicapé (AAH) ainsi que dans les départements d'outre-mer.

Une demi-part fiscale est accordée à son détenteur à partir de 75 ans, et celui-ci peut également se constituer une rente mutualiste majorée par l'Etat.

La carte confère également aux anciens combattants la qualité de ressortissant de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre (Onac), et ouvre donc l'accès à ses prestations d'aide sociale. Enfin, reconnaissance symbolique, le cercueil de son titulaire peut être recouvert du drapeau tricolore.

Sur un plan administratif, les demandes d'attribution doivent être faites auprès des services départementaux de l'Onac, sur la base de l'état des services accomplis. Après instruction et vérification auprès des archives du ministère de la défense, le dossier est soumis à la commission nationale de la carte du combattant, composée majoritairement de représentants du monde combattant, puis la décision finale est prise par le directeur général de l'Onac.

Au total, on peut estimer à environ 1,3 million le nombre de titulaires de la carte du combattant dans notre pays, alors que 1,2 million de retraites du combattant seront versées en 2013. Le plus gros contingent est bien évidemment formé des anciens combattants de la guerre d'Algérie, puisque 1,3 million d'appelés et rappelés y ont servi aux côtés de plusieurs centaines de milliers d'engagés volontaires, de supplétifs et de membres des forces de l'ordre.

Si la législation actuelle proclame l'universalité de la reconnaissance de la République envers les anciens combattants et l'égalité la plus stricte entre eux, les critères d'attribution de la carte du combattant ne sont plus adaptés aux réalités des conflits actuels et ne sont donc pas fidèles à ces principes.

Les deux premières générations du feu, celles des conflits mondiaux, ont pour la plupart connu des formes d'affrontements classiques, une guerre de position ou de mouvement avec un front et un adversaire clairement identifiés. Il s'agit d'une situation différente de celle à laquelle ont été confrontées les troisième et quatrième générations du feu, en Algérie ou en Opex.

L'attribution de la carte du combattant leur a été progressivement étendue. Il a toutefois fallu attendre 1974 pour les soldats ayant participé aux « opérations effectuées en Afrique du Nord » entre 1952 et 1962, et 1993 pour les anciens des Opex. Il faut surtout se souvenir que ce n'est que par l'adoption de la loi du 18 octobre 1999 qu'a officiellement été reconnu aux opérations en Algérie le caractère de « guerre ».

Concernant l'Afrique du Nord, plusieurs conditions alternatives ont longtemps cohabité, principalement l'appartenance, pendant au moins trois mois, à une unité combattante, l'appartenance à une unité ayant connu neuf actions de feu ou de combat et la participation à cinq actions de feu ou de combat.

De plus, les blessés de guerre, les soldats ayant reçu une citation individuelle ainsi que ceux ayant été détenus en méconnaissance des conventions de Genève ont été considérés comme combattants.

Sur ces bases, les anciens combattants ont rencontré d'importantes difficultés pour faire valoir leurs droits et de nombreuses inégalités de traitement ont été relevées. En effet, la caractérisation des unités combattantes et des actions de feu ou de combat revient au service historique de la défense (SHD), qui s'appuie sur les journaux de marches et opérations (JMO) des unités concernées. Ces derniers, souvent lacunaires voire manquants, correspondent rarement à ce que les soldats ont vécu sur le terrain. Les éplucher exhaustivement et les exploiter correctement représente une tâche immense.

Pour y répondre, le législateur a défini, dans la loi de finances pour 2004, un nouveau critère reconnu comme équivalant à la participation aux actions de feu ou de combat : une durée de quatre mois de présence en Algérie, au Maroc ou en Tunisie jusqu'au 2 juillet 1962.

Cette simplification, demandée de longue date par les représentants du monde combattant, était évidemment indispensable. Elle ne permet toutefois pas de prendre en compte l'ensemble des soldats, appelés comme militaires de carrière, ayant servi en Algérie et ayant été exposés au danger.

En effet, 305 000 hommes se trouvaient encore en Algérie à la date de l'indépendance. Les accords d'Evian prévoyaient le maintien sur place, pour une durée de deux ans, d'un important contingent : encore 131 000 hommes en janvier 1963 et 50 000 un an plus tard, avant un retrait qui eut lieu en juillet 1964. Des troupes françaises étaient encore présentes en Algérie après cette date mais dans un autre cadre et n'entrent donc pas dans le champ de cette proposition de loi.

Durant cette période, plusieurs dizaines de soldats français sont décédés et ont été reconnus morts pour la France. Leurs compagnons d'armes ne peuvent pas aujourd'hui bénéficier de la carte du combattant. Ils peuvent uniquement prétendre au titre de reconnaissance de la Nation (TRN), qui n'ouvre pas les mêmes droits et n'a pas la même portée symbolique. C'est la raison pour laquelle l'article 1 er de la proposition de loi étend jusqu'au 2 juillet 1964 la borne temporelle prise en compte pour le calcul des 120 jours de présence rendant éligible à la carte du combattant.

Le Gouvernement propose, dans le projet de loi de finances pour 2014, une mesure intermédiaire : la carte « à cheval », soit l'attribution de la carte du combattant aux personnes dont le déploiement en Algérie a commencé avant le 2 juillet 1962 mais s'est achevé après cette date. A mes yeux, elle ne prend pas en compte l'intégralité des demandes légitimes du monde combattant sur ce point. De plus, elle sera satisfaite par cet article 1 er .

J'en viens maintenant aux Opex. Depuis la loi du 4 janvier 1993, les militaires y ayant participé ont vocation à recevoir la carte du combattant selon les mêmes critères de droit commun que pour la guerre d'Algérie. Mais celui tenant aux quatre mois de présence ne leur est pas applicable. Un arrêté, mis à jour régulièrement, définit donc les opérations ainsi que les périodes concernées.

Toutefois, le critère central, celui de la participation à des actions de feu ou de combat, est particulièrement inadapté aux activités des unités en Opex. Ne combattant pas un ennemi clairement identifié sur une ligne de front mais assurant la plupart du temps des missions de maintien de la paix ou de protection des populations, les soldats français servant à l'étranger ne peuvent souvent pas faire état d'un nombre suffisant d'actions de feu ou de combat pour recevoir la carte.

Il a fallu attendre un décret du 12 novembre 2010 pour qu'une définition de ces actions plus adaptée aux réalités des Opex soit établie : sont désormais prises en compte les actions de combat et les actions qui se sont déroulées « en situation de danger caractérisé ».

Un arrêté est venu fixer la liste des actions concernées, qui sont celles rencontrées en Opex : ce sont, par exemple, les opérations de rétablissement de l'ordre, de déminage, de contrôle d'une zone terrestre, aérienne ou maritime, ou encore d'évacuation sanitaire. En conséquence, le nombre de cartes du combattant attribuées au titre des Opex est en forte progression puisqu'il est passé de 3 650 en 2011 à 8 900 en 2012 et devrait s'établir, pour 2013, à plus de 11 000. Je tiens à saluer sur ce point l'action volontariste du Gouvernement, qui a d'ores et déjà qualifié d'unités combattantes toutes les unités de l'armée de terre qui ont été engagées en Afghanistan et au Mali.

Toutefois, en dehors de ces deux cas récents, les critères complexes de qualification des unités obligent le SHD à mener un travail de recherche très long, sur la base de sources parfois peu fiables. La procédure peut durer jusqu'à 10 ans. Le problème est le même que celui qui existait pour la guerre d'Algérie avant 2004. Il faut savoir que, pour remplir cette tâche, le SHD ne dispose que de cinq personnes.

C'est pourquoi l'article 2 de la proposition de loi consacre dans la loi, comme c'est le cas depuis 1974 pour les anciens combattants d'Algérie, la plus stricte égalité entre la quatrième génération du feu et celles qui l'ont précédée. Cette déclaration de principe est loin d'être inutile. Ensuite, il transpose le critère des quatre mois de service requis pour obtenir la carte du combattant aux soldats ayant servi en Opex.

Cette proposition de loi ne s'inscrit pas en rupture avec l'action des différents gouvernements qui se sont succédé ces dernières années. Des progrès considérables ont été réalisés depuis 10 ans en ce qui concerne l'effectivité du droit à réparation. Il faut poursuivre ce mouvement, en particulier en direction de celles et ceux qui ont participé aux Opex.

Cette génération du feu est bien distincte des précédentes, par sa sociologie comme par ses effectifs. Elle n'en est pas pour autant moins digne de la reconnaissance de la Nation que celles des combattants des guerres mondiales ou de la guerre d'Algérie. On peut d'ailleurs se féliciter de la volonté, exprimée ici par le ministre la semaine dernière, de poursuivre la construction du monument aux morts en Opex à Paris, place Vauban, engagée sous la précédente majorité.

De ce fait, et pour toutes les raisons que je viens de rappeler, je vous invite à adopter cette proposition de loi sans modification.

Mme Gisèle Printz . - La modification proposée par le rapporteur aurait pour conséquence de considérer que l'état de guerre en Algérie s'est poursuivi jusqu'au 1 er juillet 1964, alors même que ce pays était devenu indépendant. C'est contraire à la vérité historique. Au risque de dénaturer la valeur même de la carte du combattant, il est fondamental que celle-ci demeure corrélée aux actions de combat et aux périodes de guerre.

Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2014 étend l'accès à la carte du combattant aux personnes justifiant de quatre mois de présence en Algérie à cheval sur le 2 juillet 1962.

Pour les Opex, il est inexact d'affirmer que les critères d'attribution de la carte ne correspondent plus aux engagements actuels de nos forces militaires, ni que les conditions pour l'obtenir sont trop complexes et restrictives. Au contraire, les nouveaux critères ont contribué à augmenter considérablement le nombre de cartes du combattant qui ont été attribuées aux anciens des Opex. Le ministre a mis à l'étude la possibilité d'une simplification du dispositif : une réflexion sur ce point est en cours. Cette proposition de loi ne me semble donc pas opportune.

M. René-Paul Savary . - La reconnaissance proposée par cette proposition de loi vient tardivement, mais il n'est jamais trop tard, surtout que les anciens combattants vieillissent. Leur nombre diminuant, il convient d'étendre le droit à réparation tout en restant, à moyens constants, dans un cadre budgétaire supportable.

Le service historique de la défense semble sous-dimensionné. Pourquoi ne pas davantage faire appel aux jeunes pour ces recherches chronophages, à travers notamment les emplois d'avenir ?

Mme Colette Giudicelli . - Je tiens à tout d'abord à remercier notre rapporteur Marc Laménie ainsi que Marcel-Pierre Cléach, l'auteur de la proposition de loi.

Il importe que nous puissions mettre en oeuvre, malgré le contexte budgétaire contraint, une politique de mémoire ambitieuse ainsi que le droit à reconnaissance dont disposent ceux qui se sont battus pour notre pays, quelle que soit l'opération militaire concernée. C'est d'autant plus important pour ceux qui n'en ont pas eu le choix : je pense aux soldats qui ont séjourné en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1 er juillet 1964. Dans mon expérience personnelle, le cessez-le-feu était alors virtuel : des milliers de harkis furent assassinés alors qu'ils portaient l'uniforme de l'armée française.

Le dispositif législatif actuel ne permet pas un traitement égalitaire entre les différentes générations du feu, notamment à cause de l'obsolescence des critères qui régissent l'attribution de la carte du combattant. Il faut les actualiser.

La communauté de la défense et des anciens combattants doit pouvoir perpétuer sereinement les valeurs de la République et de notre pays : il ne faut donc pas que la politique de mémoire se résume à la cérémonie annuelle du 11 novembre. L'égalité de traitement entre tous les anciens combattants doit être absolue.

Prévue dans le projet de loi de finances pour 2014, la carte à cheval constitue un premier pas dans ce sens. Près de 8 000 personnes sont concernées. Sur ce point, il existe des impératifs supérieurs à ceux budgétaires. C'est pourquoi notre groupe soutiendra bien évidemment cette proposition de loi.

M. Dominique Watrin . - Cette proposition de loi va bien au-delà de la législation actuelle en postulant que cette dernière serait source d'inégalités entre les différentes générations du feu.

Il faut prendre en compte le contexte historico-politique et les conditions dans lesquelles se sont déroulées d'éventuelles opérations comportant un risque d'ordre militaire. Le cessez-le-feu entre l'armée française et l'armée de libération nationale (ALN) est intervenu le 19 mars 1962. Après cette date, conformément aux accords d'Evian, il n'y eut pas d'engagement de nos troupes contre celles de l'ALN. Il est vrai que de nombreuses représailles furent le fait de la population civile algérienne, que ce soit contre les harkis et leurs familles ou, comme à Oran le 5 juillet 1962, contre des Européens. A cette occasion, les partisans de l'Algérie française ont d'ailleurs reproché aux forces françaises de ne pas être intervenues. A la même époque commençait leur rapatriement, la priorité étant donnée aux unités comportant une majorité d'appelés.

Bien qu'en situation d'insécurité, il n'y eut pas d'opérations militaires après le 19 mars. C'est pourquoi le groupe CRC est favorable à la mesure proposée par le Gouvernement dans le projet de loi de finances pour 2014, c'est-à-dire la carte à cheval.

Le ministre a récemment convenu à l'Assemblée nationale que la procédure d'attribution de la carte du combattant aux anciens des Opex n'est « pas entièrement satisfaisante ». Un amendement qui a été voté dans le projet de loi de finances demande la remise d'un rapport au Parlement sur leur évolution. Il faut aller plus loin, et nous souhaiterions que le Gouvernement intègre dans ce texte les critères proposées pour les Opex par cette proposition de loi.

Mme Catherine Genisson . - Combien de personnes seraient concernées par l'extension de l'attribution de la carte du combattant jusqu'en juillet 1964 pour les anciens combattants d'Algérie ?

M. Claude Domeizel . - Avez-vous consulté les associations représentatives du monde combattant ?

En tant que président du groupe interparlementaire d'amitié France-Algérie, je peux vous dire que la moindre initiative prise par la France sur le sujet de la guerre d'Algérie est observée avec beaucoup d'attention de l'autre côté de la Méditerranée. La disposition de la loi du 23 février 2005 reconnaissant le « rôle positif » de la colonisation en est un exemple : les Algériens y font encore aujourd'hui référence. Ils sont sensibles à nos prises de position, et ont d'ailleurs accueilli positivement la reconnaissance tardive du caractère de « guerre » de ce conflit.

Nous devons être prudents. J'ai des réserves sur cette proposition de loi, je souhaiterais m'assurer auprès nos amis algériens qu'elle ne leur pose pas de difficultés. Considèrent-ils cette période, de 1962 à 1964, durant laquelle des troupes françaises étaient encore présentes en Algérie, comme une période de combat ? Ce qui peut nous apparaître comme des détails peut être très important pour eux.

M. Marc Laménie, rapporteur . - Pour répondre à Gisèle Printz, il ne me semble pas que cette proposition de loi dénaturera la valeur de la carte du combattant : les soldats présents en Algérie après 1962 se trouvaient dans une situation de danger réel. Concernant les Opex, le ministre s'est montré favorable à l'évolution des critères d'attribution. Pourquoi le refuser aujourd'hui ?

Comme l'a souligné René-Paul Savary, les moyens humains du SHD sont effectivement très limités, alors que d'importantes recherches dans les archives sont nécessaires pour qualifier les unités combattantes.

Le devoir de mémoire est un travail quotidien, dans lequel l'implication des bénévoles et des associations est capitale : la tâche est immense.

Environ 40 000 anciens combattants pourraient être concernés par l'extension de l'attribution de la carte du combattant jusqu'en juillet 1964. J'ai bien évidemment auditionné les principales associations d'anciens combattants : l'Ufac, l'UNC et, pour les Opex, la Fname. Contactée, la Fnaca nous a répondu par écrit mais n'a pas souhaité être reçue. Ma méthode de travail a tourné autour du dialogue et de la concertation : ces auditions ont été très instructives.

Pour terminer, je fais partie de ceux qui estiment qu'aucune proposition de loi n'est parfaite. Néanmoins, à mes yeux, celle que nous venons d'examiner répond à des attentes légitimes.

Mme Annie David, présidente . - Quel serait le coût des mesures prévues par ce texte ?

Mme Colette Giudicelli . - Je comprends que Claude Domeizel préside le groupe d'amitié France-Algérie, mais je suis étonnée que son vote puisse dépendre de la position de l'Algérie sur cette proposition de loi. Pensez-vous que d'éventuelles réticences viendraient du fait que pour le gouvernement algérien actuel les harkis sont toujours des traîtres à qui il est interdit de retourner dans leur pays d'origine bien qu'ils y aient encore de la famille ? Ce serait plus gênant.

M. Jean-Pierre Godefroy . - Il me semble que cette question avait été abordée l'an dernier lors de l'examen d'une proposition de loi dont notre collègue Alain Néri était rapporteur. La demande des organisations représentatives du monde combattant visait à obtenir la carte du combattant à cheval, pour ceux dont le séjour en Algérie inclut la date du 2 juillet 1962. Le Gouvernement donne satisfaction à cette revendication dans le projet de loi de finances pour 2014. Pourquoi dans ce cas vouloir aller jusqu'en 1964 ?

Je suis très sensible à la situation des soldats ayant servi en Opex. J'attends du Gouvernement qu'il précise ses intentions sur ce sujet.

Mme Muguette Dini . - Je suis très perplexe quant au contenu de cette proposition de loi. J'étais présente en Algérie le 1 er juillet 1962 et dans la période qui a suivi. D'après mon expérience personnelle, les militaires français n'étaient alors pas en danger, contrairement aux harkis. Je suis donc étonnée que certains cherchent à étendre l'attribution de la carte du combattant jusqu'en 1964, alors que la carte à cheval est une mesure que je soutiens, tout comme les dispositions concernant les Opex.

M. Georges Labazée . - Je suis aussi perplexe que Muguette Dini. La confusion s'accroit au fil de nos débats. Adopter cette proposition de loi créerait des difficultés supplémentaires : l'opinion publique comprendrait-elle qu'on rouvre le dossier de la guerre d'Algérie ? C'est une question périlleuse, alors que ce texte vient brouiller les différentes notions. Je n'y suis pas favorable.

M. Marc Laménie, rapporteur. - Je suis heureux que nous ayons eu une telle discussion, qui démontre notre attachement au devoir de mémoire. La diversité des témoignages des membres de la commission met en lumière la complexité du thème abordé par cette proposition de loi.

Le coût envisagé de l'extension de la carte du combattant jusqu'en 1964 serait de l'ordre de 40 millions d'euros. Toutefois, en raison de la diminution du nombre d'anciens combattants, les dépenses liées au droit à réparation dont ils bénéficient diminueront d'environ 100 millions d'euros en 2014. Il serait donc possible de financer cette mesure à budget constant.

Les demandes des associations du monde combattant ne sont pas uniformes. La Fnaca est satisfaite par la carte à cheval. D'autres en revanche, comme l'UNC, estiment que la date retenue pour l'attribution de la carte doit être prolongée jusqu'en 1964. C'est le choix fait dans cette proposition de loi.

Mme Gisèle Printz . - Pourquoi 1964 et pas 1963 ?

M. Marc Laménie, rapporteur . - Il s'agit de la date de retrait des dernières troupes françaises stationnées en Algérie en application des accords d'Evian.

Mme Gisèle Printz . - Mais les hostilités ont pris fin en 1962 !

Mme Colette Giudicelli . - Selon les informations dont je dispose, les archives du ministère de la défense font état de plus de 150 militaires morts en Algérie entre 1963 et 1964. Il est donc difficile de nier l'existence d'un risque militaire durant cette période.

A l'issue d'une suspension de séance demandée par les commissaires membres du groupe socialiste, le texte de la proposition de loi est mis aux voix.

La proposition de loi n'est pas adoptée.

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