Rapport n° 576 (2013-2014) de M. Jeanny LORGEOUX , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 4 juin 2014

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N° 576

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014

Enregistré à la Présidence du Sénat le 4 juin 2014

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur la proposition de loi de Mme Leila AÏCHI relative à l' instauration d'une journée des morts pour la paix et la liberté d' informer ,

Par M. Jeanny LORGEOUX,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Louis Carrère , président ; MM. Christian Cambon, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Mme Josette Durrieu, MM. Jacques Gautier, Robert Hue, Jean-Claude Peyronnet, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Daniel Reiner , vice-présidents ; Mmes Leila Aïchi, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Gilbert Roger, André Trillard , secrétaires ; MM. Pierre André, Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Pierre Bernard-Reymond, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Pierre Charon, Marcel-Pierre Cléach, Mme Hélène Conway-Mouret, MM. Raymond Couderc, Jean-Pierre Demerliat, Mme Michelle Demessine, MM. André Dulait, Hubert Falco, Jean-Paul Fournier, Pierre Frogier, Jacques Gillot, Mme Éliane Giraud, M. Gaëtan Gorce, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Gournac, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Gérard Larcher, Robert Laufoaulu, Jeanny Lorgeoux, Rachel Mazuir, Christian Namy, Alain Néri, Jean-Marc Pastor, Philippe Paul, Bernard Piras, Christian Poncelet, Roland Povinelli, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Claude Requier, Richard Tuheiava .

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

231 (2013-2014)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

On estime à 700 le nombre de personnels humanitaires morts entre 1990 et 2000. Pour la seule année 2013, 71 journalistes ont été tués pour la liberté d'informer.

C'est la raison pour laquelle Mme Leila AICHI, sénatrice, a déposé une proposition de loi, soumise à votre commission, tendant à instaurer, en France, une journée des morts pour la paix et la liberté d'informer, le 21 septembre (journée internationale de la paix de l'ONU), au cours de laquelle il serait rendu hommage aux travailleurs humanitaires morts pour la paix et aux journalistes morts pour la liberté d'informer.

Il existe des précédents nombreux, de définition par la loi de journées commémoratives, qu'il s'agisse de la journée des droits de l'enfant (20 novembre, date anniversaire de la signature de la Convention internationale des droits de l'enfant), des commémorations des grands moments de notre histoire militaire nationale, ou encore de l'instauration, plus récente, de la journée de la commémoration de l'abolition de l'esclavage (10 mai), de la journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc (19 mars, loi du 6 décembre 2012) ou de la journée nationale de la Résistance (27 mai, loi du 19 juillet 2013).

Cette question n'est ni juridique, ni technique. C'est un acte politique , au sens noble du terme, qu'il nous est donc demandé de poser aujourd'hui. Il s'inscrit toutefois dans un contexte qu'on ne peut ignorer, et dont le diagnostic a été posé avec clarté dès 2008, celui d'une véritable inflation commémorative .

C'est compte tenu de ce contexte que votre commission s'est prononcée. Son choix de ne pas allonger la liste des lois instaurant des journées commémoratives ne signifie évidemment pas qu'elle méconnait l'immense effort, et le lourd prix payé, hélas, parfois, par les travailleurs humanitaires et les journalistes pour soulager leurs frères et servir la liberté. Elle s'est d'ailleurs prononcée pour proposer ce thème, au niveau de l'organisation des Nations unies, pour une prochaine journée de la paix (21 septembre).

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LA PROPOSITION DE LOI SOUMISE À VOTRE COMMISSION

1. Les origines : les journées mondiales de l'ONU, pour la paix (21 septembre), les travailleurs humanitaires (19 août), la radio (13 février), la liberté de la presse (3 mai) et les crimes commis contre les journalistes (2 novembre)
a) La journée internationale de la paix (21 septembre) instaurée dès 1981

La Journée internationale de la paix a été instaurée en 1981 par la résolution 36/67 de l'Assemblée générale des Nations unies . En 2001, l'Assemblée générale a unanimement adopté la résolution 55/282 , établissant le 21 septembre comme journée annuelle de non-violence et de cessez-le-feu.

D'après les termes mêmes de la résolution initiale de 1981, la date initialement retenue (3 ème mardi de septembre) correspondait au jour d'ouverture de la session ordinaire de l'Assemblée générale des Nations unies. La séance d'ouverture de l'Assemblée générale se tient en effet annuellement le troisième mardi de septembre.

La première Journée de la paix a été observée en septembre 1982.

La résolution de 2001 a définitivement fixé cette date au 21 septembre.

À cette occasion, les Nations unies invitent tous les pays et tous les peuples à arrêter les hostilités et à commémorer la paix, avec des mesures éducatives et de sensibilisation du public aux questions liées à la paix.

La célébration de la Journée internationale de la paix

Chaque année, un thème particulier est retenu pour célébrer cette journée :

2012 : Une paix durable pour un avenir durable

2011 : Paix et démocratie

2010 : La jeunesse pour la paix et le développement

2009 : Désarmement et non-prolifération

2008 : Droits de l'homme et maintien de la paix

b) La journée des travailleurs humanitaires (19 août), née à la suite de l'attentat contre le siège des Nations unies à Bagdad en Août 2003

À la suite du terrible attentat, le 19 août 2003, contre le siège des Nations unies à Bagdad, en Iraq, qui a causé la mort de 22 personnes, l'Assemblée générale des Nations unies a décidé d'instituer une « Journée mondiale de l'aide humanitaire » , occasion de rendre hommage non seulement aux victimes de l'attentat de Bagdad mais aussi à l'ensemble des travailleurs humanitaires qui sont morts depuis cette date, et, plus globalement, à tous ceux qui oeuvrent au quotidien et aident des millions de personnes dans le monde.

Cette journée est célébrée chaque année par le Secrétariat général de l'organisation des Nations unies 1 ( * ) .

« Le 19 août de chaque année, nous célébrons la Journée mondiale de l'aide humanitaire en hommage aux agents des organismes humanitaires qui ont perdu la vie dans l'exercice de leurs fonctions. Nous commémorons leur sacrifice et réaffirmons notre engagement en faveur de l'action que le personnel humanitaire mène chaque jour dans le monde entier pour sauver des vies, dans des situations souvent pénibles et dangereuses, là où d'autres ne peuvent pas ou ne veulent pas se rendre ». Ban Ki Moon, secrétaire général des Nations unies.

Chaque année, à l'occasion de cette journée, l'ONU lance un projet humanitaire. Ainsi, en 2013, il était possible de « sponsoriser » un mot afin de récolter des dons destinés à être utilisés dans le cadre de la lutte contre les catastrophes naturelles.

Cette journée honore ceux qui ont été tués ou blessés en portant secours à ceux qui sont dans le besoin, mais également ceux qui continuent d'apaiser la détresse et les souffrances de millions d'autres.

c) 127 journées reconnues par l'ONU, dont trois consacrées au monde des média : 13 février, 3 mai et 2 novembre

L'ONU reconnait au total 127 journées et semaines internationales qui sont autant d'occasions de faire progresser la sensibilisation sur certains sujets.

Journées et semaines internationales

(Source : http://www.un.org/fr/events/observances/days.shtml)

Janvier

Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l'Holocauste (27 janvier)

Février

Semaine mondiale de l'harmonie interconfessionnelle (1er - 7 février 2014, la première semaine de février)

Journée mondiale contre le cancer (4 février)

Journée internationale de tolérance zéro face aux mutilations sexuelles féminines (6 février)

Journée mondiale de la radio (13 février)

Journée mondiale de la justice sociale (20 février)

Journée internationale de la langue maternelle (21 février)

Mars

Journée « Zéro discrimination » (1er mars)

Journée mondiale de la vie sauvage (3 mars)

Journée des Nations Unies pour les droits de la femme et la paix internationale, ou Journée internationale de la femme (8 mars)

Journée de la langue française (20 mars)

Journée internationale du bonheur (20 mars)

Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale (21 mars)

Semaine de solidarité avec les peuples en lutte contre le racisme et la discrimination raciale (21 - 27 mars)

Journée mondiale de la poésie (21 mars)

Journée internationale du Novruz (21 mars)

Journée mondiale de la trisomie 21 (21 mars)

Journée internationale des forêts (21 mars)

Journée mondiale de l'eau (22 mars)

Journée météorologique mondiale (23 mars)

Journée internationale pour le droit à la vérité en ce qui concerne les violations flagrantes des droits de l'homme et pour la dignité des victimes (24 mars)

Journée mondiale de la tuberculose (24 mars)

Journée de solidarité avec les fonctionnaires détenus ou portés disparus (25 mars)

Journée internationale de commémoration des victimes de l'esclavage et de la traite transatlantique des esclaves (25 mars)

Avril

Journée mondiale de sensibilisation à l'autisme (2 avril)

Journée internationale pour la sensibilisation aux mines et l'assistance à la lutte antimines (4 avril)

Journée internationale du sport au service du développement et de la paix (6 avril)

Journée mondiale de la santé (7 avril)

Journée internationale de réflexion sur le génocide au Rwanda (7 avril)

Journée internationale du vol spatial habité (12 avril)

Journée de la langue chinoise (19 avril) CH

Journée internationale de la Terre nourricière (22 avril)

Journée mondiale du livre et du droit d'auteur (23 avril)

Journée de la langue anglaise (23 avril) EN

Journée mondiale contre le paludisme (25 avril)

Journée mondiale de la propriété intellectuelle (26 avril)

Journée mondiale pour la sécurité et la santé au travail (28 avril)

Journée du souvenir dédiée à toutes les victimes de la guerre chimique (29 avril)

Journée internationale du jazz (30 avril)

Mai

Journée mondiale de la liberté de la presse (3 mai)

Journées du souvenir et de la réconciliation en l'honneur des morts de la Seconde Guerre mondiale (8 - 9 mai)

Journée mondiale des oiseaux migrateurs (10 - 11 mai 2014, le deuxième week-end de mai)

Journée du Vesak (13 mai 2014, le jour de la pleine lune en mai)

Journée internationale des familles (15 mai)

Journée mondiale des télécommunications et de la société de l'information (17 mai)

Journée mondiale de la diversité culturelle pour le dialogue et le développement (21 mai)

Journée internationale de la diversité biologique (22 mai)

Journée internationale pour l'élimination de la fistule obstétricale (23 mai)

Journée de l'Afrique (25 mai)

Semaine de la solidarité avec les peuples des territoires non autonomes (25 - 31 mai)

Journée internationale des Casques bleus des Nations Unies (29 mai)

Journée mondiale sans tabac (31 mai)

Juin

Journée mondiale des parents (1er juin)

Journée internationale des enfants victimes innocentes de l'agression (4 juin)

Journée mondiale de l'environnement (5 juin)

Journée de la langue russe (6 juin)

Journée mondiale de l'océan (8 juin)

Journée mondiale contre le travail des enfants (12 juin)

Journée mondiale du donneur de sang (14 juin)

Journée mondiale de sensibilisation à la maltraitance des personnes âgées (15 juin)

Journée mondiale de la lutte contre la désertification et la sécheresse (17 juin)

Journée mondiale des réfugiés (20 juin)

Journée des Nations Unies pour la fonction publique (23 juin)

Journée internationale des veuves (23 juin)

Journée des gens de mer (25 juin)

Journée internationale pour le soutien aux victimes de la torture (26 juin)

Journée internationale contre l'abus et le trafic de drogues (26 juin)

Juillet

Journée internationale des coopératives (5 juillet, le 1er samedi de juillet)

Journée mondiale de la population (11 juillet)

Journée internationale Nelson Mandela (18 juillet)

Journée internationale de l'amitié (30 juillet)

Août

Semaine mondiale de l'allaitement maternel (1 - 7 août)

Journée internationale des peuples autochtones (9 août)

Journée internationale de la jeunesse (12 août)

Journée mondiale de l'aide humanitaire (19 août)

Journée internationale du souvenir de la traite négrière et de son abolition (23 août)

Journée internationale contre les essais nucléaires (29 août)

Journée internationale des victimes de disparition forcée (30 août)

Septembre

Journée internationale de la charité (5 septembre)

Journée internationale de l'alphabétisation (8 septembre)

Journée des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud (12 septembre)

Journée internationale de la démocratie (15 septembre)

Journée internationale de la protection de la couche d'ozone (16 septembre)

Journée internationale de la paix (21 septembre)

Journée maritime mondiale (25 septembre 2014, une journée de la dernière semaine de septembre)

Journée mondiale du tourisme (27 septembre)

Octobre

Journée internationale pour les personnes âgées (1er octobre)

Journée internationale de la non-violence (2 octobre)

Semaine mondiale de l'espace (4 - 10 octobre)

Journée mondiale des enseignants (5 octobre)

Journée mondiale de l'habitat (6 octobre 2014, le premier lundi d'octobre)

Journée internationale de la prévention des catastrophes (8 octobre 2014, deuxième mercredi d'octobre)

Journée mondiale de la poste (9 octobre)

Journée internationale de la fille (11 octobre)

Journée de la langue espagnole (12 octobre)

Journée internationale des femmes rurales (15 octobre)

Journée mondiale de l'alimentation (16 octobre)

Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté (17 octobre)

Journée des Nations Unies (24 octobre)

Journée mondiale d'information sur le développement (24 octobre)

Semaine du désarmement (20 - 26 octobre 2014, semaine qui inclut le 24 octobre)

Journée mondiale du patrimoine audiovisuel (27 octobre)

Novembre

Journée internationale de la fin de l'impunité pour les crimes commis contre des journalistes (2 novembre)

Journée internationale pour la prévention de l'exploitation de l'environnement en temps de guerre et de conflit armé (6 novembre)

Journée mondiale de la science au service de la paix et du développement (10 novembre)

Semaine internationale de la science et de la paix (11 - 17 novembre, le semaine au cours de laquelle tombe le 11 novembre)

Journée mondiale du souvenir des victimes des accidents de la route (16 novembre 2014, le troisième dimanche de novembre)

Journée mondiale de la tolérance (16 novembre)

Journée mondiale des toilettes (19 novembre)

Journée de l'industrialisation de l'Afrique (20 novembre)

Journée mondiale de l'enfance (20 novembre)

Journée de la philosophie (20 novembre, le troisième jeudi de novembre)

Journée mondiale de la télévision (21 novembre)

Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes (25 novembre)

Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien (29 novembre)

Décembre

Journée mondiale de lutte contre le sida (1er décembre)

Journée internationale pour l'abolition de l'esclavage (2 décembre)

Journée internationale des personnes handicapées (3 décembre)

Journée internationale des volontaires (5 décembre)

Journée mondiale des sols (5 décembre)

Journée de l'aviation civile internationale (7 décembre)

Journée internationale contre la corruption (9 décembre)

Journée des droits de l'homme (10 décembre)

Journée internationale de la montagne (11 décembre)

Journée de la langue arabe (18 décembre)

Journée internationale des migrants (18 décembre)

Journée internationale de la solidarité humaine (20 décembre)

Source : site de l'ONU

Dans cette liste on peut noter l'existence d'une journée mondiale de la radio le 13 février, d'une journée de la liberté de la presse le 3 mai , et d'une journée internationale de la fin de l'impunité pour les crimes commis contre des journalistes (le 2 novembre) qui auraient tout aussi bien pu être retenues par la présente proposition de loi, compte tenu de la thématique.

Il faut noter tout particulièrement que c'est à la suite de l'assassinat tragique de nos deux compatriotes de RFI dans le Nord Mali en novembre dernier, que la France a pris l'initiative de la création d'une nouvelle journée, contre l'impunité pour les crimes commis contre les journalistes, fixée au 2 novembre.

La date a été choisie en hommage à Ghislaine Dupont et à Claude Verlon, journalistes de RFI assassinés au Mali le 2 novembre 2013.

Le texte reconnait que le métier de journaliste a évolué et prend de multiples formes, notamment l'information sur internet.

Le texte demande aux Etats membres de faire tout leur possible pour prévenir la violence contre les journalistes et le personnel des médias, d'enquêter rapidement sur toutes les accusations de violence et de traduire en justice les responsables.

Il endosse également le « Plan d'action des Nations unies sur la sécurité des journalistes et la question de l'impunité », adopté en 2012.

La France a également pris l'initiative d'organiser le 13 décembre 2013 une réunion thématique du Conseil de sécurité des Nations unies , afin d'échanger sur les moyens d'accroître la sécurité des journalistes sur le terrain.

Cet événement, qui a réuni des Etats, des représentants des Nations unies, des journalistes et des membres de la société civile, a permis d'entendre des témoignages de professionnels de l'information ayant travaillé en situations dangereuses, de dresser un bilan de la mise en oeuvre des résolutions du Conseil de sécurité, et d'examiner les moyens dont dispose la communauté internationale pour renforcer la protection des journalistes dans le monde.

Votre commission ne peut que relever et saluer ces initiatives, qui ont été l'occasion de débattre, dans le cadre des Nations unies, de la situation des journalistes, des risques qu'ils courent et de la nécessité pour les Etats d'assurer leur protection.

2. Une visée plus large : associer humanitaires et journalistes dans une journée nationale
a) Un hommage associant humanitaires et journalistes

La proposition de loi soumise à l'examen de votre commission a une visée plus large que celle des travailleurs humanitaires, puisqu'elle propose d'englober, dans une même journée commémorative, l'hommage aux travailleurs humanitaires décédés et celui aux journalistes tués pour la liberté d'expression.

Aussi bien la date proposée est-elle celle du 21 septembre, plus « universelle » que celle du 19 août, puisque consacrée à la paix.

b) Créer une journée d'hommage au plan national

Il faut distinguer entre les journées « internationales » créées par des résolutions des Nations unies et celles qui sont explicitement consacrées par le droit national.

Par le passé il a en effet existé plusieurs précédents.

Sans même parler de la question des lois dites « mémorielles » 2 ( * ) , qui ont suscité d'importants débats, auxquels votre commission a pris toute sa part en leur temps, plusieurs dispositions législatives similaires à celle qui nous est proposée aujourd'hui ont été adoptées, sur des questions dont le législateur a estimé qu'elles méritaient, en raison de leur importance, un traitement particulier.

Ainsi en est-il par exemple de la loi n° 96-296 du 9 avril 1996 tendant à faire du 20 novembre une journée nationale des droits de l'enfant .

Plusieurs dispositions législatives et règlementaires ont également institué un calendrier commémoratif qui permet de faire vivre la mémoire des grandes guerres ou batailles de notre collectivité nationale, ou, encore récemment (2013), l'instauration d'une journée nationale de la résistance.

Le calendrier commémoratif national (extraits)

- le 19 mars : journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc (loi du 6 décembre 2012) ;

- le dernier dimanche d'avril : journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation (loi du 14 avril 1954) ;

- le 8 mai : commémoration de la victoire de 1945 (loi du 2 octobre 1981) ;

- le 10 mai : commémoration de l'abolition de l'esclavage et de la traite négrière (loi du 21 mai 2001) ;

- deuxième dimanche de mai : fête nationale de Jeanne d'Arc et du patriotisme ;

- 27 mai : journée nationale de la Résistance (loi du 19 juillet 2013)

- le 8 juin : journée nationale d'hommage aux « morts pour la France » en Indochine (décret du 26 mai 2005) ;

- le 18 juin : journée nationale commémorative de l'appel historique du général de Gaulle à refuser la défaite et à poursuivre le combat contre l'ennemi (décret du 10 mars 2006) ;

- le dimanche le plus proche du 16 juillet : journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l'État français et d'hommage aux « Justes » de France (loi du 10 juillet 2000) ;

- le 25 septembre : journée nationale d'hommage aux Harkis et autres membres des formations supplétives (décret du 31 mars 2003) ;

- le 11 novembre : commémoration de l'armistice de 1918 (loi du 24 octobre 1922) et de tous les morts pour la France (loi du 28 février 2012) ;

- le 5 décembre : journée nationale d'hommage aux « morts pour la France » de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie (décret du 26 septembre 2003 et loi du 23 février 2005).

Source : rapport du Sénat de M KERDRAON au nom de la commission des affaires sociales http://www.senat.fr/rap/l12-433/l12-433.html , complété par le secrétariat de la commission des affaires étrangères et de la défense

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

1. Un geste politique que votre commission ne peut naturellement que comprendre

Votre commission ne peut qu'être sensible à la question de l'hommage et de la mémoire. Les symboles ont leur force, ils valent autant pour honorer le passé que pour préparer l'avenir. Reprenant les termes mêmes du rapport KASPI (rapport de la commission de réflexion sur la modernisation des commémorations publiques de novembre 2008), on peut dire que depuis toujours, commémorations et cérémonies structurent la mémoire collective des sociétés autour de valeurs partagées, tout en contribuant au sentiment d'appartenance commune.

a) Les travailleurs humanitaires, en première ligne pour répondre à des besoins immenses dans un monde où les crises abondent

Il est évidemment inutile de dire ici quel immense service les travailleurs humanitaires rendent à l'humanité en général et en particulier aux populations touchées par des crises internationales, des catastrophes humanitaires, des conflits, frappées par la pauvreté, la malnutrition, les maladies.

Le monde actuel n'est pas avare de crises et de catastrophes. Chaque année de nouveaux besoins surgissent, tandis que bien peu de situations, hélas, s'améliorent vraiment.

Il y a actuellement plus de 27 millions de personnes déplacées et 10 millions de réfugiés dans le monde. Une personne sur six souffre de faim chronique.

Ce sont auprès des plus pauvres du monde en général, les individus les plus marginalisés et les plus vulnérables, que sont déployés les travailleurs humanitaires.

Les 4 principes fondateurs de l'aide humanitaire :

Humanité : Toute souffrance humaine doit être soulagée, en particulier chez les personnes les plus vulnérables. Il est primordial de respecter et de protéger la dignité de toutes les victimes.

Impartialité : L'aide humanitaire doit être dispensée à toutes les personnes qui en ont besoin, sans discrimination entre les populations touchées ou au sein de celles-ci.

Indépendance : Les objectifs humanitaires sont indépendants de tous autres objectifs, qu'ils soient de nature politique, économique, militaire ou autre. Le seul but de l'aide humanitaire est de soulager et prévenir les souffrances des populations touchées par des crises.

Neutralité : L'aide humanitaire ne doit favoriser aucune des parties au conflit, armé ou autre.

Cette Journée internationale du 21 septembre honore ceux qui ont été tués ou blessés en portant secours à ceux qui sont dans le besoin, mais également ceux qui continuent d'apaiser la détresse et les souffrances de millions d'autres. C'est un hommage rendu à la générosité et à l'esprit de fraternité qui anime les travailleurs humanitaires.

Cette journée a également pour objectif de sensibiliser l'opinion publique aux besoins humanitaires dans le monde et à l'importance de la coopération internationale pour y répondre.

Votre commission saisit cette occasion pour rendre hommage aux institutions, organisations et ONG qui oeuvrent chaque jour au service des hommes et femmes en situation de détresse.

Au sein du système des Nations unies , c'est le Secrétaire général adjoint chargé des affaires humanitaires (actuellement Mme Valérie AMOS) et OCHA (le bureau de la coordination des affaires humanitaires) qui sont chargés de la réponse humanitaire.

Bureau de coordination des affaires humanitaires (OCHA) :

Aide le Secrétaire général à coordonner l'aide humanitaire dans les cas de situations d'urgence exigeant une intervention à l'échelle du système, du fait de leur ampleur ou de leur complexité;

Agit en étroite collaboration avec les membres du Comité permanent interorganisations ainsi que les organisations intergouvernementales et non gouvernementales compétentes;

Assure la coordination entre les aspects humanitaires et politiques des situations d'urgence et ceux liés au maintien de la paix;

Fournit des services fonctionnels à l'Assemblée générale, au Conseil de sécurité et au Conseil économique et social pour ce qui a trait aux affaires humanitaires;

S'efforce de renforcer les moyens d'intervention dans le secteur humanitaire pour faire face aux catastrophes naturelles et favoriser ainsi un développement durable, en collaboration étroite avec les membres du Comité directeur de la Décennie internationale de la prévention des catastrophes naturelles et d'autres partenaires dans le cadre de la Décennie.

Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires :

Le Bureau est dirigé par le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, qui remplit également les fonctions de Coordonnateur des secours d'urgence. Le Secrétaire général : Est responsable, au nom du Secrétaire général, de la coordination des secours d'urgence, en veillant à ce que la communauté internationale engage à temps une action cohérente et concertée en cas de catastrophes ou de situations d'urgence;

Assure la coordination horizontale avec les départements qui s'occupent des questions politiques et du maintien de la paix et la coordination verticale avec les organismes humanitaires qui interviennent dans les situations d'urgence;

Conseille le Secrétaire général sur les questions ayant trait à la coordination de l'aide humanitaire; coordonne et préside les réunions du Comité permanent interorganisations et du Comité exécutif pour les affaires humanitaires;

Etablit des directives et instructions à l'intention des coordonnateurs des affaires humanitaires sur le terrain;

Défend les principes humanitaires et encourage l'adoption de lois et d'objectifs dans ce domaine, en concertation avec les Etats Membres pour ce qui touche au droit humanitaire;

S'efforce de mobiliser la communauté internationale en faveur des activités humanitaires du système des Nations unies et d'obtenir des ressources pour les programmes d'urgence;

Entreprend, au nom du Secrétaire général, des missions dans les pays où des situations d'urgence complexes sont apparues ou commencent à apparaître et ceux où se sont produites des catastrophes naturelles; et

Gère le Fonds central autorenouvelable de secours d'urgence.

Au sein de l'Union européenne , c'est la Direction générale de l'aide humanitaire (ECHO) qui porte la réponse humanitaire.

Les États membres et les institutions européennes fournissent plus de la moitié de l'aide humanitaire mondiale.

ECHO a été créé dès 1992 pour exprimer la solidarité européenne avec les populations dans le besoin partout dans le monde. Au cours de ses vingt années d'existence, il a alloué 14 milliards d'euros d'aide humanitaire aux victimes de conflits et de catastrophes dans 140 pays à travers le monde . Sur les cinq dernières années, le budget annuel d'ECHO était en moyenne d'un milliard d'euros . Pour la seule année 2011, ces fonds ont permis d'aider près de 150 millions de personnes parmi les plus vulnérables au monde, dans plus de 80 pays.

Depuis 2010, un commissaire européen (actuellement Mme Kristalina Georgieva) est en charge de la coopération internationale, de l'aide humanitaire et de la réponse aux crises.

Les ONG sont naturellement particulièrement présentes dans le secteur de l'aide humanitaire.

L'exposé des motifs de la proposition de loi estime que « près de 700 » travailleurs humanitaires « ont perdu la vie entre 1990 et 2000 ». Les employés d'organisations non gouvernementales, gouvernementales et internationales, qui agissent dans le domaine de la médecine, de la sécurité civile, de l'appui logistique, de la reconstruction et de la coopération, ou dans tout autre domaine lié à l'action humanitaire, « jouent donc un rôle essentiel qu'il convient de saluer. »

On ne peut naturellement que souscrire à cette analyse.

Plus globalement, on ne peut que rappeler que les droits humains et les droits de l'Homme ont toujours joué un rôle particulier dans la politique étrangère française. La France a inspiré la déclaration universelle de 1948 et continue de se battre aujourd'hui pour leur respect dans le monde tant par son rôle au sein du Conseil des droits de l'homme que par son action au Conseil de sécurité. Initiatrice dans les années 80 du droit d'ingérence humanitaire lancé par Bernard Kouchner et Mario Bettati, elle défend aujourd'hui le concept de " responsabilité de protéger ", repris dans le document final du sommet mondial de 2005. Elle soutient également la lutte contre l'impunité pour prévenir de nouvelles exactions, et a contribué à la création de la Cour pénale internationale dont elle a été l'un des premiers Etats à ratifier le statut.

L'approche française de la « responsabilité de protéger » (R2P)

La notion de " responsabilité de protéger "a été précisée dans le rapport de 2001 de la Commission internationale indépendante de l'intervention et de la souveraineté des Etats (CIISE) et endossée par l'Assemblée générale des Nations unies en 2005. Le document final du Sommet mondial consacre l'engagement des chefs d'Etats et de gouvernement à protéger leurs populations, mais aussi à prévenir les crimes les plus atroces (génocide, crimes de guerre, nettoyage ethnique et crimes contre l'humanité), en aidant les autres Etats à s'acquitter de cette responsabilité. La prévention est au coeur de la "responsabilité de protéger" et repose sur trois piliers énoncés dans les paragraphes 138 et 139 du document final.

Ces trois piliers sont : la responsabilité première de l'Etat de protéger sa population ; l'assistance internationale et le renforcement des capacités ; et une action résolue de la communauté internationale en temps voulu, quand l'Etat concerné ne peut ou ne veut pas assumer sa responsabilité.

La France défend une approche complète et équilibrée de la Responsabilité de protéger.

-- La R2P inclut une responsabilité en amont (premier pilier) et en aval (responsabilité de reconstruire), en sus de la responsabilité d'agir au moment où des crimes de masse peuvent être perpétrés.

-- Elle doit donner toute leur place aux mesures de règlement pacifique des différends, sans écarter l'éventualité d'un recours à des mesures coercitives, y compris le recours à la force, lorsque le maintien de la paix et de la sécurité internationales l'exige, ainsi que le prévoit la Charte des Nations unies.

-- Elle est entièrement tournée vers la prévention, y compris lorsqu'elle exige une action résolue et en temps voulu de la communauté internationale. Agir, c'est aussi prévenir.

Source : http://www.franceonu.org/la-france-a-l-onu/dossiers-thematiques/droits-de-l-homme-etat-de-droit/la-responsabilite-de-proteger/article/la-responsabilite-de-proteger

b) Les journalistes, un lourd tribut payé pour la liberté d'informer

L'information est plus qu'une liberté. C'est bien souvent le seul moyen d'alerter l'opinion publique et la communauté internationale, de permettre une mobilisation, d'ouvrir la voie à la prise de conscience et à l'action.

La liberté d'informer est au coeur de toute démocratie.

Journalistes, blogueurs, reporters de guerre ou personnels associés, nous aident chaque jour à mieux comprendre le monde et ses évolutions. Le premier réflexe des ennemis de la liberté, c'est de bâillonner la presse. Les premiers alliés de la démocratie, ce sont des médias indépendants. La liberté d'expression doit être respectée partout.

Reporters sans frontières (RSF) tient chaque année un baromètre très précis du lourd tribut que paient les journalistes dans l'exercice de leur métier et des graves atteintes perpétrées contre la liberté d'informer, dont sont tirés les chiffres ci-dessous.

Bilan de la liberté de la presse en 2013 : 3 ( * )

Journalistes tués : 71 (-20%)
Journalistes interpellés/arrêtés : 826 (-6%)
Journalistes agressés ou menacés : 2160 (+9%)
Journalistes enlevés : 87 (+129%)
Journalistes qui ont fui leur pays : 77 (+5%)
Collaborateurs des médias tués : 6
Net-citoyens et citoyens-journalistes tués : 39 (-17%)
Blogueurs et net-citoyens arrêtés : 127 (-12%)

Journalistes tués :
39 % en zone de conflit
8% de freelance
4% de femmes journalistes

Types de médias :
Presse écrite : 37%
Radio : 30%
TV : 30%
Web (portail d'information en ligne) : 3%

178 journalistes emprisonnés (au 15 décembre 2013)
37 journalistes otages ou disparus (au 18 décembre 2013)

Source : www.rsf.org

Bilan 2013 de reporters sans frontières (RSF)

D'après RSF, le bilan 2013 montre un niveau élevé de journalistes tués dans l'exercice de leurs fonctions (71) malgré une légère baisse (-20%) et d'une augmentation importante des enlèvements (+129%). Les exactions commises contre ceux qui exercent le journalisme demeurent à un niveau général élevé.

Les zones les plus touchées sont l'Asie (24 morts), le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord (23 morts). L'Afrique sub-saharienne connaît une baisse drastique du nombre de tués, qui passe de 21 en 2012 à 10 en 2013 et reflète une diminution des assassinats de journalistes en Somalie (7 en 2013 contre 18 en 2012). L'Amérique latine connaît une faible diminution du nombre de journalistes assassinés dans le cadre de leur exercice professionnel (12 morts en 2013 contre 15 en 2012).

La Syrie, la Somalie et le Pakistan confortent leur position parmi les cinq pays les plus meurtriers pour la profession . Ils sont rejoints cette année par l'Inde et les Philippines, qui supplantent le Mexique et le Brésil. Le Brésil compte pourtant cinq tués en 2013, soit le même chiffre que l'année précédente. Deux journalistes ont été tués au Mexique, mais trois autres ont disparu.

Parmi les journalistes tués cette année, quatre sur dix (39%) ont été victimes de conflits . Sont ainsi comptabilisés les journalistes tués en Syrie, en Somalie, au Mali, dans les provinces de Chhattisgarh (Inde), du Balouchistan (Pakistan) et du Daghestan (Russie). Les autres ont été victimes de la couverture d'attentats, ou assassinés par des groupes liés au crime organisé (mafia, narcotrafic, etc), des milices islamistes, par des forces de l'ordre ou sur ordre d'officiels corrompus. Les 71 journalistes tués en 2013 étaient en majorité issus de la presse écrite (37%), de la radio (30%), de la TV (30%) ou de plateformes d'information en ligne (3%). Ils étaient de sexe masculin (96%) pour l'immense majorité d'entre eux.

Le nombre de journalistes tués en 2013 dans le cadre de leurs activités d'information baisse de 20% par rapport à l'année 2012, qualifiée par Reporters sans frontières d'»hécatombe pour la presse» avec 88 tués. Le nombre de journalistes tués s'est élevé à 67 en 2011, 58 en 2010, 75 en 2009.

Cette diminution est relativisée par un accroissement des agressions et des menaces , qu'elles émanent de groupes infra-étatiques ou des forces de l'ordre. D'après RSF, les journalistes ont systématiquement été pris pour cibles par les forces de l'ordre en Turquie et dans une moindre mesure en Ukraine, en marge des mouvements de protestation du parc Gezi et de la place Maïdan. Le «Printemps brésilien» a donné lieu à des actes de répression d'une grande ampleur avec plus de 100 cas recensés, la plupart attribués au zèle répressif de la police militaire. La Colombie et le Mexique ont également connu d'importantes vagues de protestations propices à ce genre de brutalités. Les professionnels des médias ont été en première ligne des troubles politiques qui ont agité l'Egypte en 2013, des troubles interconfessionnels en Irak et de l'insécurité entretenue par les milices en Libye. En Guinée, les journalistes ont été régulièrement menacés par les deux bords, au cours des manifestations qui ont précédé les élections. Les attaques et menaces se sont également accrues au Pakistan, au Bangladesh et en Inde, parallèlement aux assassinats.

L'année 2013 a été marquée par une augmentation du nombre de journalistes kidnappés (87 contre 38 en 2012). L'immense majorité des cas répertoriés concerne le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord (71), suivis de l'Afrique sub-saharienne (11). Quarante-neuf journalistes ont été enlevés en Syrie en 2013 et 14 en Libye. Le rythme des enlèvements s'est accéléré en Syrie en 2013. Ils revêtent un caractère de plus en plus systématique et dissuadent dans de nombreux cas les reporters de se rendre sur le terrain. Si les journalistes étrangers sont de plus en plus ciblés par le régime et des groupes islamistes tels que l'Etat islamique d'Irak et du Levant (EIIL) et Jabhat Al-Nosra, leurs collègues syriens demeurent les plus exposés. Au moins 18 représentants de la presse étrangère et 22 acteurs syriens de l'information sont toujours otages ou portés disparus.

Au moins 178 journalistes sont emprisonnés à ce jour. La Chine, l'Erythrée, la Turquie, l'Iran et la Syrie demeurent, comme en 2012, les cinq principaux geôliers du monde pour les journalistes .

Source : www.rsf.org

L'assassinat récent de la journaliste Camille Lepage en République centrafricaine, qui fait écho à celui de deux journalistes de RFI au Mali, en novembre dernier, ne font que confirmer ce sombre tableau.

Sans parler de nos compatriotes journalistes retenus en otages dans des conditions particulièrement éprouvantes.

Naturellement, votre commission, qui, outre les affaires étrangères, est également en charge de la défense et des forces armées, n'ignore rien des délicates questions que soulève la présence des journalistes sur les zones de crise et plus précisément sur les théâtres d'opération militaires.

Indispensable, légitime, elle ne va pas sans poser de questions notamment aux forces armées chargées d'assurer leur protection. L'incompréhension n'est d'ailleurs pas rare entre ces deux mondes, celui de la presse et celui des armes, sur les zones de guerre. Qu'on se remémore, dans les premiers temps de l'opération Serval, les risques encourus par certains journalistes à Gao, protégés -littéralement évacués, diront certains-, par les forces françaises. On a froid dans le dos en pensant à ce qui aurait pu arriver si les groupes terroristes avaient eu le dessus sur le plan opérationnel.

Jusqu'où aller pour informer ? Comment concilier les impératifs de liberté de la presse et de respect de la sécurité des personnes ?

Ces questions essentielles et délicates, auxquelles il ne saurait être répondu de façon fruste et lapidaire, dépassent largement le cadre de la présente proposition de loi.

2. Les trois questions que pose toute journée d'hommage
a) Quelles « causes » et combien de « causes » mettre à l'honneur ?

C'est naturellement une question de choix politique que de savoir quelles « causes » on entend mettre à l'honneur. Il faut en effet naturellement avoir à l'esprit que la multiplication des différentes journées va nécessairement de pair avec une certaine banalisation de celles-ci.

Les commémorations publiques ou nationales sont aujourd'hui très nombreuses. Au nombre d'une douzaine, rien que dans le domaine des références historiques à notre passé, elles sont deux fois plus nombreuses qu'en 1999 4 ( * ) .

En dix ans, sont ainsi venues s'ajouter aux six déjà existantes (le 14 juillet, le 8 mai, le 11 novembre, la fête nationale de Jeanne d'Arc et du patriotisme, le deuxième dimanche de mai, la journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation, le dernier dimanche d'avril, et la cérémonie d'hommage à Jean Moulin, le 17 juin) :

- le 10 mai, journée commémorative de l'abolition de l'esclavage (loi du 10 mai 2001) ;

- le 8 juin, la journée nationale d'hommage aux « morts pour la France » en Indochine (décret du 26 mai 2005) ;

- le 18 juin, la journée nationale commémorative de l'appel du général de Gaulle (décret du 10 mars 2003) ;

- le dimanche le plus proche du 16 juillet, la journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l'État français et d'hommage aux « Justes » de France (loi du 10 juillet 2000) ;

- le 25 septembre, la journée nationale d'hommage aux harkis et aux membres des formations supplétives (décret du 31 mars 2003) ;

- le 5 décembre, la journée nationale d'hommage aux morts de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie (décret du 26 septembre 2003) ;

- le 27 mai 1943, date à laquelle s'est réuni pour la première fois le Conseil national de la résistance ;

- le 19 mars (1962, date du cessez-le-feu en Algérie) : journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc.

Le Parlement a été saisi plusieurs fois ces dernières années de la création de journées de commémoration. C'est d'ailleurs lors de l'examen par votre commission de la loi fixant au 11 novembre la commémoration de tous les morts pour la France que l'idée de consacrer une journée aux acteurs humanitaires et aux journalistes avait été évoquée pour la première fois par notre collègue Leila Aïchi.

À l'inverse, d'autres dates ne sont pas stricto sensu des dates officielles de commémorations publiques mais sont, malgré tout, célébrées avec fidélité : le 6 juin pour le débarquement en Normandie, le 15 août pour le débarquement en Provence, la libération de Paris le 25 août.

Au calendrier commémoratif lié à la défense nationale, il faut ajouter d'autres journées auxquelles il est donné, en France, un sens tout particulier. Ainsi en est-il du 27 janvier , journée internationale de la Shoah.

Le ministère de la Culture est chargé de dresser et publier chaque année la liste des grands anniversaires commémoratifs (cinquantenaires, centenaires, cent-cinquantenaires, etc.) en couvrant tous les domaines (politique, culturel, artistique, militaire, scientifique et technique...), qui peuvent susciter des commémorations particulières. Aux journées régulières viennent donc s'ajouter des journées de commémorations plus ponctuelles.

Nous nous garderons d'oublier les journées nationales destinées à rendre hommage ou à sensibiliser le public à divers phénomènes, tous plus légitimes les uns que les autres. On pense par exemple à l'impact croissant de la journée de la femme , ou à la journée de la lutte contre le sida , ou à celle de la protection de l'enfance , qui sont autant d'outils pour faire progresser tant la prise de conscience que la législation dans ces domaines qui sont de grandes questions de société.

Au-delà de ces dates reconnues par la loi et les règlements, on recense donc plusieurs autres journées soutenues par le Gouvernement chaque année, parmi lesquelles on peut citer, sans être pour autant exhaustif :

JOURNÉES ET COMMÉMORATIONS ORGANISÉES EN FRANCE PAR LES DIFFÉRENTS MINISTÈRES (RECENSEMENT DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES)

Fin janvier

Journée nationale des pôles de compétitivité (Ministère de l'économie)

22-févr

Journée européenne des victimes (Ministère de la Justice)

08-mars

Journée de la femme

19-mars

Journée nationale du Sommeil (Institut national de prévention et d'éducation pour la santé)

3 ème semaine de mars

Semaine internationale de la courtoisie sur la route (soutenue par la Délégation interministérielle à la sécurité routière)

2 ème dimanche de mars

Journée nationale de l'Audition

3 ème semaine de mars

Semaine de la langue française et de la francophonie (Ministères de l'Éducation nationale, de la Culture et des Affaires étrangères)

18-mars

Journée nationale de l'ingénieur (sous le haut patronage du Ministère du redressement productif)

27-mars

Journée de l'innovation (Ministère de l'Éducation nationale)

2 ème semaine d'avril

Semaine de l'industrie (Ministère du Redressement productif)

02-avr

Journée "Produisons autrement" (Ministère de l'agriculture)

07-avr

Journée pour l'égalité salariale (Ministère des droits des femmes)

10-avr

Journée nationale du réserviste (Ministère de la Défense)

3 ème semaine d'avril

Semaine de la vaccination

27-avr

Commémoration de l'abolition de l'esclavage à Mayotte (décret du 23 avril 2012, art. 1)

29-avr

Journée européenne de solidarité entre les générations (Ministères des Affaires sociales et de la Santé, Travail et dialogue social, Jeunesse et Sports)

05-mai

Missions mains propres, dans le cadre de la Journée internationale de l'hygiène des mains (Ministère chargé de la santé)

15-mai

Journée nationale de la réussite éducative (Ministère de l'éducation nationale)

17-mars

Journée internationale de lutte contre l'homophobie

19-mai

Journée nationale de lutte contre les hépatites virales (Institut national de prévention et d'éducation pour la santé)

21 au 25 mai

Fête de la nature (Ministère chargé du développement durable)

22-mai

Journée nationale de prévention et de dépistage des cancers de la peau (Ministère de la Santé)

22-mai

Commémoration de l'abolition de l'esclavage en Martinique (décret du 23 avril 2012, art. 1)

23-mai

Journée européenne de l'obésité (sous le haut patronage du ministère chargé de l'agroalimentaire)

27-mai

Commémoration de l'abolition de l'esclavage en Guadeloupe et à Saint-Martin (décret du 23 avril 2012, art. 1)

10-juin

Commémoration de l'abolition de l'esclavage en Guyane (décret du 23 avril 2012, art. 1)

11-juin

Journée nationale de destruction des contrefaçons (Ministère chargé du commerce extérieur)

14-juin

Journée des Donneurs de sang (Ministère de la Santé)

21-juin

Fête de la musique

22-juin

Journée nationale de réflexion sur le don d'organe et la greffe et de reconnaissance envers les donneurs (Loi du 7 juillet 2011, art. 10)

18-sept

Journée nationale du Sport scolaire (Ministère de l'Éducation nationale)

21-sept

Journée contre la maladie d'Alzheimer (Ministère des Affaires sociales et de la santé)

3 ème week-end du mois de septembre

Journées européennes du Patrimoine

24-sept

Journée nationale de la sécurité routière aux passages à niveau (Ministère des Transports)

Septembre-octobre

Fête de la science (ministère de l'éducation nationale)

Dernier week end de septembre

Fête de la gastronomie (ministère de l'économie)

06-oct

Journée nationale des aidants (Ministère de la Santé)

09-oct

Commémoration de l'abolition de l'esclavage à Saint-Barthélémy (décret du 23 avril 2012, art. 1)

15-oct

Journée mondiale de lutte contre la douleur (Ministère de la Santé)

16-oct

Journée nationale de lutte contre le gaspillage alimentaire (Ministère en charge de l'Alimentation)

17-oct

Journée internationale de refus de la misère (Ministère de l'Éducation nationale)

09-nov

Journée nationale inter-régime du bien vieillir (Ministères des Affaires sociales et de la Santé, Travail, Jeunesse et Sports)

18-nov

Journée européenne de sensibilisation au bon usage des antibiotiques (Ministère de la Santé)

20-nov

Journée nationale des droits de l'enfant (Loi du 9 avril 1996)

25-nov

Journée nationale de sensibilisation aux violences faites aux femmes (Loi du 9 juillet 2010, art. 24)

03-déc

Journée nationale des gens du voyage (Ministère du Logement et de l'égalité des territoires)

20-déc

Commémoration de l'abolition de l'esclavage à la Réunion (décret du 23 avril 2012, art. 1)

Cette inflation commémorative, quelque peu désordonnée, va à l'encontre des objectifs initialement prévus, car la multiplication de ces journées a pour corollaire quasiment mécanique qu'elles ne rassemblent plus autant.

On constate ainsi une certaine désaffection à l'encontre des commémorations, même s'agissant des grandes dates de notre histoire, à l'exception de trois d'entre elles, le 8 mai, le 14 juillet et le 11 novembre, qui trouvent encore un grand écho dans la mémoire collective 5 ( * ) .

C'est d'ailleurs ce raisonnement qui a conduit le législateur à fixer au 11 novembre, date de l'armistice de 1918, la date d'hommage à tous les morts pour la France .

Extraits du rapport KASPI de 2008 sur les commémorations nationales :

Les commémorations publiques ou nationales sont trop nombreuses. Elles atteignent aujourd'hui le nombre de 12, soit deux fois plus qu'en 1999. Leur nombre pourrait encore augmenter dans les années à venir. Ce qui entraîne une désaffection et une incompréhension de la part d'une très grande majorité de la population, un affaiblissement de la mémoire collective, des particularismes qui vont à l'encontre de l'unité nationale.

À l'évidence, au cas d'espèce, il semble peu réfutable que les travailleurs humanitaires et les journalistes font, sur les théâtres d'opération, un travail remarquable qu'ils paient parfois du prix de leur vie, auquel on ne peut que rendre hommage.

b) Quelle date choisir ?

C'est naturellement une question importante que celle de la date retenue pour l'hommage que l'on désire rendre.

Lors de récentes discussions législatives, certains ont mis en avant, dans la mesure où telle ou telle association a pu être à l'origine de la création à telle date de certaines journées, le risque d'un « communautarisme » mémoriel, qui n'atteindrait pas l'effet recherché d'une union, d'un rassemblement, de la Nation à leur occasion. Ce risque a été mis en avant par la commission KASPI : « Bon nombre de commémorations vont à l'encontre de leurs objectifs. Elles ne rassemblent plus. En conséquence des changements qui affectent la composition de la population, des groupes de pression se constituent, qui ne manquent pas de réclamer de la Nation la reconnaissance de leur existence, donc de leurs spécificités et de leurs souffrances... »

La date choisie ne va pas toujours de soi, tant les dates peuvent être, de par les événements qu'elles convoquent, lourdes de sens, comme en témoignent les débats sur le choix des dates pour la commémoration de l'abolition de l'esclavage (10 mai) ou celle des victimes de la guerre d'Algérie (19 mars).

En l'occurrence, l'auteur de la proposition de loi, notre collègue Leila Aïchi a choisi de retenir la date du 21 septembre, journée internationale de la paix, la plus « universelle ».

Mais notons aussi l'existence d'une journée mondiale de la radio le 13 février, d'une journée de la liberté de la presse le 3 mai et d'une journée pour les travailleurs humanitaires le 19 août, qui auraient tout aussi bien pu être retenues, compte tenu de la thématique . Sans parler de la journée du 2 novembre, créée, à l'initiative de la France, fin 2013 en référence à l'attentat tragique qui a coûté la vie à deux journalistes de RFI.

c) Quel effet pratique ?

Sachons le reconnaître, la proposition de loi soumise à l'examen de votre commission n'aura, au fond, qu'un faible effet normatif : il s'agit avant tout d'un geste symbolique, ou politique, d'une opération de sensibilisation et de mobilisation de l'opinion publique, tout autant qu'une reconnaissance solennelle de la contribution apportée à la paix par les humanitaires et les journalistes.

En effet, il n'est prévu, -et c'est heureux- ni que cette journée soit fériée et chômée, ni que soient organisées des manifestations particulières dans les établissements scolaires (à l'instar de ce qui a été fait pour la journée du Conseil national de la résistance, par exemple). En pratique, il s`agit d'une reconnaissance de nature politique.

3. La position de votre commission

Votre commission :

- rappelle l'importance pour la collectivité nationale du travail d'hommage et de commémoration, autant pour honorer le passé que pour préparer l'avenir ;

- rend un hommage appuyé aux quelques 70 humanitaires et 70 journalistes tués chaque année pour aider leurs semblables ou pour la liberté d'informer et se félicite que l'examen de l'actuelle proposition de loi soit l'occasion de se pencher sur leur rôle indispensable au service de la paix ;

- adhère toutefois aux analyses suivant lesquelles l'inflation commémorative récente a des effets négatifs, parmi lesquels la banalisation et la désaffection à l'égard d'hommages nationaux de plus en plus nombreux et de moins en moins rassembleurs ;

- pour cette raison, et compte tenu du caractère faiblement normatif de la proposition de loi -la journée de la paix continuera d'exister le 21 septembre avec ou sans loi-, préfère ne pas augmenter le nombre de jours légaux de commémorations et d'hommages ;

- souligne que la journée de la paix de l'ONU le 21 septembre pourra constituer, malgré tout, le cadre d'un hommage particulier rendu, même sans loi, aux travailleurs humanitaires et aux journalistes. Notre représentation permanente auprès des Nations unies pourrait d'ailleurs suggérer ce thème au secrétariat général des Nations unies pour une prochaine « journée de la paix ».

EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE

Sur le fond, votre commission a expliqué ci-dessus les raisons pour lesquelles elle estime que l'instauration légale d'une nouvelle journée commémorative ne lui semble pas judicieuse.

Sur la forme , la formulation retenue par l'article unique risquerait de prêter à confusion dans la mesure où il est écrit : "Le 21 septembre, Journée internationale de la paix décidée le 30 novembre 1981 en vertu de la résolution 36/67 de l'Assemblée générale des Nations unies ", alors que, comme nous l'avons vu ci-dessus, la résolution 36/67 de l'Assemblée générale de l'ONU du 30 novembre 1981 a effectivement décidé la création d'une "Journée internationale de la paix", mais l'a fixée au 3 ème mardi de septembre. C'est finalement la résolution 55/282 de l'AGNU du 7 septembre 2001 qui a décidé que cette Journée internationale de la paix serait célébrée chaque année le 21 septembre. Le texte comporte donc une légère ambiguïté, sans grande conséquence toutefois.

Réunie le 4 juin 2014, votre commission n'a pas adopté de texte sur la proposition de loi n° 231 (2013-2014) relative à l'instauration d'une journée des morts pour la paix et la liberté d'informer.

En conséquence, et en application du premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion portera en séance sur le texte de la proposition de loi déposée sur le Bureau du Sénat.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 4 juin 2014, sous la présidence de Jean-Louis Carrère, président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de M. Jeanny Lorgeoux et du texte proposé par la commission sur la proposition de loi n° 231 (2013-2014), présentée par Mme Leila Aïchi, relative à l'instauration d'une journée des morts pour la paix et la liberté d'informer.

À l'issue de la présentation du rapporteur, un débat s'est engagé.

M. Jean-Louis Carrère, président. - Un gentleman's agreement impose que les commissions ne touchent pas aux textes qui sont l'apanage des groupes politiques. Nous avons la possibilité d'adopter ou ne pas adopter le texte. L'amender ne serait pas conforme à la tradition sénatoriale.

Mme Leila Aïchi. - Cette proposition reprend le contenu d'un amendement déposé lors de l'examen de la loi sur le 11 novembre, et retiré pour préserver la cohérence du texte. Or il semblait important, malgré la profusion des commémorations, que l'hommage aux morts pour la paix fasse écho à l'hommage aux morts pour la nation. Pourquoi le choix du 21 septembre ? Parce que la journée de la paix se tient ce jour-là chaque année depuis 1981, à l'initiative de l'ONU. En vingt ans, de 1990 à 2011, l'armée française a perdu 620 soldats en opérations extérieures ; mais 700 travailleurs humanitaires sont morts en dix ans et 660 journalistes ont disparu entre 2008 et 2014, soit deux par semaine. L'adoption de cette loi aurait un écho important en cette année de centenaire de la Grande guerre, surtout émanant de la France.

M. Alain Néri. - Les journalistes et les travailleurs humanitaires paient un tribut extrêmement lourd. Cette proposition de loi ne doit pas être rejetée : cela signifierait que nous nous y opposons. C'est pourquoi la proposition de Jeanny Lorgeoux peut faire consensus. Est-ce une solution réglementaire ? Ce serait en tout cas une bonne sortie par le haut.

M. Jean-Louis Carrère, président. - Cela peut se faire.

M. Christian Cambon. - Les faits rapportés par Leila Aïchi nécessitent que l'on s'y attarde, mais sans lien avec la création d'une journée de commémoration supplémentaire. Comme les impôts, trop de publicité tue la publicité. Notons que l'association des journalistes de Défense est opposée à cette proposition. Nous ne pouvons pas mettre sur un pied d'égalité les journalistes et travailleurs humanitaires d'une part et les militaires chargés notamment de les protéger d'autre part. Si la proposition est maintenue en l'état, le groupe UMP s'y opposera.

M. Jean-Louis Carrère, président. - Voilà qui pourrait nous aider à faire preuve d'élégance : la commission n'adopte pas de texte, mais elle propose unanimement de faire cheminer cette demande auprès de la représentation permanente de l'ONU.

Mme Leila Aïchi. - Je ne vous cache pas mon étonnement. Le 24 janvier 2012, je n'ai accepté de retirer mon amendement que sur l'engagement du président de la commission d'accepter une proposition de loi allant dans le même sens.

M. Jean-Louis Carrère, président. - Allons ! Comment aurais-je pu prendre un tel engagement au nom de la commission ? Chacun de nous vote librement !

Mme Leila Aïchi. - C'est écrit dans le compte rendu de la séance publique. Sans engagement de votre part, pourquoi aurais-je retiré mon amendement ? Je m'interroge : cette attitude ne fait-elle pas écho à mon abstention sur le communiqué de presse de la semaine dernière ?

M. Jean-Louis Carrère, président. - Jamais je n'aurais pris la liberté de promettre une chose pareille : je connais les mécanismes parlementaires. Ai-je dit que nous étudierions une proposition de loi avec bienveillance ? Oui ! C'est pourquoi je propose une solution qui nous permette de faire cheminer votre idée, en la portant auprès des Nations unies.

M. Daniel Reiner. - Je n'ai pas souvenir de ce débat ; mais j'ai la certitude que le groupe socialiste n'aurait pas voté cet amendement. Soutenons la formule habile du président, approuvée par MM. Néri et Cambon, qui porte ce point à l'échelle qui lui convient : le niveau mondial, qui lui donnera un écho qu'il n'aurait pas seulement en France. Cette journée existe déjà : le 19 août, même si nous sommes tous en vacances. Nous aurons cette discussion en séance. J'anticipe le vote du groupe socialiste : il sera négatif.

M. Jacques Gautier. - S'il devait voter ici, le groupe UMP voterait contre, comme dans l'hémicycle. La proposition du rapporteur est une bonne porte de sortie. Madame Aïchi, vous ne pouvez pas raisonnablement comparer un chiffre mondial, celui des victimes journalistes ou humanitaires, et un chiffre purement national, celui des morts parmi les militaires français.

M. Pierre Bernard-Reymond. - Concrètement, que se passe-t-il en France le 21 septembre ? Que proposerez-vous à l'ONU : de consacrer à ce thème une journée de la paix ou de l'adopter définitivement ?

M. Robert del Picchia. - On devra bientôt se limiter à des demi-journées !

M. Jeanny Lorgeoux, rapporteur. - Nous proposerons dans un premier temps de consacrer la journée de la paix de l'année prochaine à ce thème. Si nous recevons un écho favorable à l'ONU, nous pourrons songer à une pérennisation.

Mme Nathalie Goulet. - Dans notre Haute Assemblée, proposer le retrait d'un amendement au profit du dépôt d'une proposition de loi est classique, voire banal. Il n'y a pas lieu d'en prendre ombrage. Je n'ai pas de mandat de l'UDI ; mais dans le meilleur des cas, elle s'abstiendrait. Il est préférable de nous rallier à la proposition du président et du rapporteur : sinon, il y a lieu de craindre une issue défavorable.

M. Jean-Louis Carrère, président. - Je propose que la commission n'adopte pas de texte - les groupes se prononceront en séance - mais demande à notre représentation permanente auprès des Nations unies de suggérer ce thème au Secrétaire général pour une prochaine journée. Les premiers contacts officieux auprès de la sous-direction des droits de l'homme sont encourageants - je ne dis pas pour autant que c'est acquis !

M. Gilbert Roger. - Je ne voterai pas ce texte.

La proposition de loi n'est pas adoptée.

ANNEXE : RÉSOLUTION ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE L'ONU LE 18 DÉCEMBRE 2013 SUR LA SÉCURITÉ DES JOURNALISTES ET LA QUESTION DE L'IMPUNITÉ


* 1 Source : http://www.un.org/fr/events/humanitarianday/background.shtml

* 2 Depuis la loi dite « Gayssot » de 2005

* 3 Source : rsf.org

* 4 Source : exposé des motifs du projet de loi relatif au 11 novembre, examiné par le Sénat fin 2011.

* 5 Comme l'a analysé le rapport KASPI en 2008

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