TRAVAUX EN COMMISSION

Réunie le mardi 2 décembre 2014, la commission a examiné le rapport et le texte de la commission sur la proposition de résolution européenne n° 80 (2014-2015) présentée par MM. Michel Delebarre et Claude Kern, au nom de la commission des affaires européennes, en application de l'article 73 quater du Règlement, sur la proposition de directive Paquet « déchets ».

Mme Annick Billon , rapporteure . - J'ai l'honneur de vous présenter mon premier rapport sur une proposition de résolution européenne (PPRE), déposée par nos collègues Michel Delebarre et Claude Kern, relative au paquet déchets, présenté par la Commission européenne le 2 juillet dernier.

Cette révision globale des politiques des déchets au niveau européen s'inscrit dans un paquet économie circulaire. Selon la Commission, le passage à l'économie circulaire créera 2 millions d'emplois d'ici à 2030. Le paquet déchets est censé, pour sa part, permettre aux entreprises d'économiser 55 milliards d'euros, tout en créant 526 000 emplois. Il faut toutefois rester prudents : les bénéfices attendus par la Commission du projet de directive ne semblent pas reposer sur une véritable étude d'impact approfondie.

Le projet de directive modifie la législation européenne existante en matière de déchets, et en particulier la directive cadre de 2008 qui a fixé la hiérarchie des modes de traitement : la prévention, puis le réemploi, le recyclage, la valorisation, et enfin l'élimination. La directive de 2008 a également fixé un objectif de réemploi et de recyclage de 50 % des déchets ménagers d'ici à 2020.

Le nouveau texte déposé par la Commission vise les déchets municipaux, définis comme comprenant les ordures ménagères, les encombrants des ménages, les déchets de jardin et ceux issus de l'entretien des espaces verts publics, enfin, les déchets des artisans et des commerçants assimilés aux ordures ménagères. Cela correspond globalement à la définition des déchets ménagers dans notre droit interne.

De nouveaux objectifs ambitieux sont fixés par la Commission : 70 % de réemploi et de recyclage à l'horizon 2030 ; l'interdiction de la mise en décharge des déchets recyclables (plastiques, métaux, verre, papier et carton, déchets biodégradables) à partir de 2025 ; l'interdiction de toute mise en décharge des déchets autres que résiduels à l'horizon 2030. A ces objectifs contraignants, la Commission ajoute, à titre indicatif, une cible de réduction de 30 % du gaspillage alimentaire à l'horizon 2025.

La proposition de directive fixe aussi un objectif d'harmonisation des définitions et des méthodes de calcul des statistiques déchets en Europe. Elle prévoit également un système d'alerte précoce de la Commission, visant à détecter les insuffisances des États membres et à y remédier avant les échéances fixées par le texte : concrètement la Commission pourrait présenter à l'État concerné des recommandations, qu'il devra intégrer dans un plan de mise en conformité.

Sur le sujet des filières de responsabilité élargie des producteurs, qui transfèrent aux industriels la responsabilité financière voire opérationnelle de gestion de leurs déchets, la proposition de directive prévoit la mise en place d'exigences minimales. Dernière mesure importante : les États membres devront prévoir une collecte séparée des biodéchets d'ici à 2025.

La commission des affaires européennes a adopté une proposition de résolution déposée par Michel Delebarre et Claude Kern, qui dresse un bilan plutôt positif bien que contrasté.

Cette proposition de résolution européenne salue l'ambition des objectifs fixés par la directive, et l'intégration du texte dans une logique d'économie circulaire. Pour autant, Michel Delebarre et Claude Kern estiment que les objectifs fixés en matière de recyclage et de mise en décharge risquent d'être un peu trop ambitieux au regard des performances constatées actuellement au sein de l'Union. A cet égard, l'harmonisation des statistiques déchets en Europe est un sujet crucial. Ainsi l'Allemagne et l'Autriche ont éliminé statistiquement la mise en décharge des déchets municipaux. Toutefois, si l'on regarde de plus près, on constate que ce n'est qu'au prix d'un artifice de calcul : les déchets faisant l'objet d'un prétraitement en centre de tri sortent de la catégorie déchets municipaux et sont considérés comme déchets industriels. Certains sont ensuite bien mis en décharge, mais n'apparaissent plus dans les comptes des déchets municipaux. L'objectif zéro déchet en décharge n'est donc pas réellement atteint. S'appuyer sur l'exemple allemand pour promouvoir l'interdiction de mise en décharge des déchets municipaux à l'horizon 2030 n'est donc pas judicieux. De la même manière, pour les États entrés dans l'Union européenne en 2004 et 2007, et qui placent encore plus de 70 % de leurs déchets en décharge, les objectifs de la Commission sont largement inadaptés.

La proposition de résolution de nos collègues insiste sur la nécessité de fixer des objectifs différenciés selon les États membres, pour mieux tenir compte des réalités à l'entrée en vigueur de la directive, avec une réévaluation des objectifs dans cinq ans.

Elle déplore l'obligation de mise en place d'une collecte séparée des biodéchets, c'est-à-dire des déchets organiques et des déchets verts, qui représentent environ un tiers des déchets contenus dans une poubelle. La collecte séparée implique de nouveaux coûts extrêmement élevés : la proposition de résolution estime que la collecte et la valorisation des biodéchets coûteraient 400 euros par tonne pour les collectivités.

MM. Delebarre et Kern s'interrogent également sur l'adéquation de la filière industrielle de tri et de recyclage européenne aux objectifs fixés. Les filières semblent à l'heure actuelle sous-dimensionnées. En France, les 250 centres de recyclage des matières plastiques se limitent au traitement des flaconnages. Ils ne peuvent généralement pas prendre en charge les barquettes et les films plastiques. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) a souligné la nécessité de leur modernisation, qui soulève la question du financement...

Concernant l'objectif zéro déchet en décharge en 2030, la résolution rappelle qu'un tiers de la poubelle moyenne n'est pas recyclable. Ses auteurs estiment que la directive n'insiste pas assez sur la valorisation énergétique.

Enfin, la proposition de résolution regrette que le recyclage ne soit envisagé qu'en fin de vie des produits, au moment de la mise en décharge. Aucun objectif contraignant n'est imposé aux producteurs ou aux importateurs de biens. Il serait intéressant de les inciter à concevoir ou à vendre des produits éco-responsables. Les auteurs de la résolution proposent, d'une part, une obligation d'incorporation de 50 % de matières recyclées dans les biens mis sur le marché, d'autre part, la mise en place d'une taxe frappant tous les produits non recyclables vendus sur le marché européen.

Nous devons nous féliciter que le projet de directive fixe de nouveaux objectifs ambitieux à horizon 2030. Ces objectifs sont d'ailleurs en ligne avec ceux envisagés par la France dans le cadre du projet de loi relatif à la transition énergétique pour une croissance verte.

Pour autant, l'harmonisation des méthodes de calcul des performances de recyclage est un enjeu crucial, et je partage la position de nos collègues de la commission des affaires européennes. En ce qui concerne l'objectif de 50 % de valorisation matière d'ici à 2020, il existe douze méthodes de calcul prévues par la directive cadre de 2008... Pour la France, en fonction de la méthode de calcul retenue, le recyclage atteint entre 35 et 62 %. Le classement des performances européennes est largement faussé. Les chiffres ciblés par la Commission, notamment l'objectif de 70 % de recyclage à l'horizon 2030, sont probablement disproportionnés. C'est pourquoi je souscris pleinement à l'idée d'une approche différenciée selon les États, avec par exemple un objectif chiffré commun mais des échéances ajustées selon les situations initiales.

En outre, le chiffre de 70 % est probablement un peu trop élevé pour la France. D'après les évaluations fournies par le ministère de l'écologie, il vaudrait mieux viser 60 à 65 % de recyclage d'ici à 2030. Comme seulement deux tiers de la poubelle d'ordures ménagères moyenne sont recyclables, cela signifie en réalité viser une valorisation de presque 100 % du gisement.

Autre point à noter, cette proposition de directive européenne ne prend pas suffisamment en compte les compétences des collectivités territoriales. C'est une tendance assez globale en matière de politique des déchets...Autant il semble essentiel de fixer aux collectivités une obligation de résultat, avec des objectifs ambitieux en termes de valorisation, pour engager la transition vers une économie circulaire, autant il est inacceptable de leur fixer une obligation de moyens, en leur imposant tel ou tel mode de valorisation plutôt qu'un autre. Les choix des collectivités sont fonction des installations déjà existantes sur leur territoire et de leurs spécificités démographiques et urbanistiques. Une planification verticale, ne tenant pas compte du terrain, et effectuée sans aucun calcul des performances économiques comparatives des différentes solutions de traitement, ne pourra jamais être adaptée à la diversité des réalités.

À ce titre, l'obligation de collecte séparée des biodéchets à compter de 2025 a particulièrement retenu mon attention. Il est intéressant de fixer des objectifs en termes d'amélioration de la valorisation organique. Le maintien de flux de déchets organiques en décharges conduit à une production de méthane qui, s'il n'est pas capté, contribue fortement aux émissions de gaz à effet de serre. Mais imposer la généralisation de la collecte séparée n'est pas judicieux et n'est pas adapté à certains territoires. En milieu urbain avec habitat collectif, cela conduirait à collecter un gisement extrêmement faible, d'une mauvaise qualité et pour un coût élevé. En milieu rural, la collecte séparée peut se justifier. Mais là encore, d'autres solutions existent également. Certaines collectivités, comme c'est le cas en Vendée, encouragent le compostage individuel. Le compostage collectif en point d'apport volontaire est également une piste intéressante.

Une généralisation à tout le pays de la collecte séparée aurait un coût non négligeable. Selon l'association Amorce, le surcoût d'une collecte séparée pour les collectivités locales serait de l'ordre de 800 millions d'euros, soit environ 13 euros par habitant. Le coût de la gestion des déchets ménagers pour les collectivités étant d'environ 8 milliards d'euros par an, cela représenterait une augmentation de 10 % du coût de la gestion des déchets ménagers.

De plus, généraliser la collecte séparée des biodéchets signifie condamner les installations de tri mécano-biologique (les TMB) qui permettent le prétraitement des ordures ménagères en séparant les déchets organiques du reste des ordures. Ils sont généralement associés à une filière de valorisation biologique par compostage ou méthanisation. Il y a 60 TMB en France. Ces structures - il en existe dans mon département - restent pertinentes dans de nombreux cas. La qualité du produit sortant du TMB est garantie par le respect d'une norme, norme qui est la même que celle pour le compost issu d'une collecte séparée. Soyons vigilants sur cette obligation de collecte séparée ! Ma position rejoint là aussi celle de nos collègues des affaires européennes.

Nous pouvons enfin nous féliciter que la directive définisse les grands principes s'appliquant aux filières REP : la transparence financière, l'autocontrôle, l'obligation de dialogue, au sein des filières et avec les autorités, et la fixation de sanctions pour les producteurs de déchets qui ne remplissent pas leurs obligations.

Je vous proposerai deux amendements. Le premier invite la Commission européenne à donner une définition harmonisée de la notion de « déchet recyclable ». La directive prévoit une interdiction de la mise en décharge des déchets recyclables à l'échéance de 2025, mais il n'y a pas de définition partagée à ce jour. Il est important d'éviter une application à géométrie variable. Nous pourrions considérer comme déchets recyclables les déchets collectés en vue d'être valorisés, notamment au travers des filières REP. Mon second amendement porte sur la référence à une taxe frappant tous les produits non recyclables vendus sur le marché européen et à l'obligation d'incorporation de 50 % de matières recyclées dans les biens mis sur le marché. Il est important de responsabiliser davantage les acteurs économiques et d'encourager l'écoconception des produits. Pour autant, il est préférable pour cela de recourir à des dispositifs incitatifs, plutôt que d'alourdir la fiscalité pour les ménages ou les normes pour les entreprises.

Je vous propose, en conclusion, d'adopter la proposition de résolution de Michel Delebarre et Claude Kern, qui traduit à la fois l'approbation de l'ambition et des objectifs fixés par la Commission européenne, mais aussi une certaine inquiétude quant à la prise en compte des collectivités.

M. Claude Kern , auteur de la PPRE . - Je remercie Mme Billon pour son étude attentive de notre proposition de résolution. Nous partageons les mêmes interrogations, notamment sur le caractère trop ambitieux des objectifs. L'adéquation de la filière industrielle de tri et de recyclage n'est pas assurée car nos 250 centres de recyclage ne prennent pas en charge les barquettes ni les films plastiques. Il est difficile de généraliser les consignes de tri. La collecte séparée aurait un coût supplémentaire très élevé pour les collectivités territoriales. En outre, les TMB commencent à se développer. Ne négligeons pas cette filière. Si nous devons favoriser la valorisation matière des poubelles, n'oublions pas la valorisation énergétique car un tiers de déchets n'est pas recyclable. Nous renforcerions aussi notre indépendance énergétique. Les amendements de la rapporteure nous satisfont.

M. Gérard Miquel . - Je salue le travail de notre rapporteure. Je me réjouis que les objectifs européens soient ambitieux. Dans les prochaines décennies nous ne considérerons plus les déchets comme aujourd'hui mais comme une ressource secondaire. Nous devons valoriser tant les déchets recyclables, que les produits fermentescibles, susceptibles d'être utilisés pour produire du méthane ou du compost, ou ceux destinés à être transformés en combustible. Cependant une période transitoire est nécessaire pour faire évoluer nos installations. Les TMB fonctionnent : il est inutile d'en construire d'autres. Les incinérateurs devront être revus pour pouvoir prendre en charge des produits à fort pouvoir calorifique (PCI). La mise en décharge disparaîtra à terme. Les mesures proposées vont dans le bon sens. Toutefois, il ne faut pas oublier qu'une forte disparité prévaut entre les pays, et même, en France, entre les différents territoires. Beaucoup de travail reste à faire pour accroître encore le recyclage. Je suis favorable aux amendements déposés. Je ne suis pas favorable toutefois à la suppression de la taxe sur les produits non recyclables. Il serait bon que ceux qui produisent ces déchets qui encombrent nos poubelles cotisent. Leur incinération ou leur transport en décharge est coûteux, de l'ordre de 120 à 150 euros la tonne. Dans de nombreux départements on a distribué des composteurs individuels. Il faut aussi mettre en place la collecte sélective auprès des professionnels, comme les cantines, les restaurateurs, les hôpitaux, etc. Les quantités de produits fermentescibles à collecter sont importantes. C'est pourquoi nous avons besoin de plus de temps pour adapter notre système de collecte et nos outils industriels, mais il faut garder des objectifs ambitieux...

M. Hervé Maurey , président . - Encore faut-il avoir les moyens de les tenir, sinon, comme dans d'autres domaines, ils resteront lettre morte.

M. Gérard Miquel . - Certains les ont atteints ! Tout est affaire de volonté politique.

Mme Évelyne Didier . - Je salue le travail des auteurs de la résolution et de notre rapporteure. La hiérarchie des objectifs est importante. La démarche doit concerner tous les territoires ; il s'agit d'une question de salubrité publique et d'un service de première nécessité.

Il conviendrait de créer une catégorie intermédiaire en distinguant la valorisation énergétique de la valorisation matière, et en la plaçant juste avant la mise en décharge et l'incinération. L'objectif premier doit être en effet de favoriser l'éco-conception pour diminuer le volume des déchets produits et brûlés. La politique des déchets ne doit pas se réduire à une politique énergétique.

Je partage le point de vue de Gérard Miquel : les objectifs doivent être ambitieux. Il était indispensable de souligner les difficultés liées aux statistiques. Nous passions pour de mauvais élèves alors que ce n'est pas le cas ! J'ai apprécié la distinction entre collecte à la source et collecte séparée. L'idée qui consiste à couvrir les territoires rentables est dangereuse. Je souscris au caractère non lucratif des REP. La lutte contre le gaspillage est indispensable. Une Europe à géométrie variable, pourquoi pas ! Mais il faudra fixer un point de convergence.

Nous regrettons l'absence de référence au principe de proximité ; j'ai d'ailleurs déposé un amendement à l'alinéa 5 pour introduire la notion.

Il n'est pas normal que les producteurs qui ne font pas l'effort de développer des produits non recyclables ne soient pas taxés. Toutefois, une taxe généralisée sur les produits non recyclables s'apparente à une hausse de la TVA, impôt injuste envers les plus modestes. Nous y sommes hostiles.

Enfin je m'étonne des propos de certains membres de la commission des affaires européennes qui considéraient que nous devions nous borner à entériner cette proposition de résolution européenne sans l'amender...

M. Hervé Maurey , président . - Je partage votre étonnement !

Mme Évelyne Didier . - Mes propos ne visaient pas Monsieur Kern.

M. Charles Revet . - Je salue à mon tour le travail de notre rapporteure. Il faut fixer des objectifs ambitieux : il devrait être possible de tout recycler ou réutiliser. Il y a quelques jours, nous avons inauguré une unité de compost et de méthanisation en Seine-Maritime où nous disposons déjà d'une unité de production de plastique d'origine végétale, en attendant l'installation prochaine d'une nouvelle unité à Lillebonne. J'invite d'ailleurs notre commission à se rendre sur place pour étudier son fonctionnement.

Pendant longtemps, la présence de matière plastique dans les déchets a bloqué le développement du compostage. En Seine-Maritime, grand département producteur de lin, il suffisait de la présence d'un simple fil en plastique pour que les ballots de filasse soient rejetés par les transformateurs. Les plastiques d'origine végétale, eux, sont dégradables en quelques mois...

Mme Chantal Jouanno . - À condition qu'ils soient mis en compost !

M. Charles Revet . - Que dit la proposition de résolution européenne à ce sujet ?

Mme Chantal Jouanno . - Je salue le travail des auteurs de la résolution et de notre rapporteure.

Il est nécessaire d'harmoniser les méthodes de calcul, non seulement au sein de l'Union, mais aussi en France. En fonction des sources, les données varient du tout au tout. J'ai été présidente de l'Ademe : les chiffres n'étaient jamais les mêmes d'une source à l'autre ! Il y a avait de quoi s'arracher les cheveux...

Il faut aussi tenir compte du coût de la collecte séparée. L'imposer ou non devrait relever du libre choix des différents pays ou des collectivités territoriales. Je partage aussi votre point de vue sur la valorisation des déchets d'origine industrielle ; le chantier est énorme. Je partage vos objectifs en matière de financement et l'objectif d'incorporation des matières recyclées. L'idée d'une taxe ne me déplait pas.

En revanche, l'exposé des motifs me laisse sceptique. Les études d'impact ont été validées par le comité de la Commission et elles sont souvent plus sérieuses que celles de notre gouvernement... Il ne faut pas, en outre, fonder notre opposition uniquement sur le cas de l'Allemagne ; d'autres pays sont performants. Il serait préférable de reconnaître que nous avons des difficultés à atteindre l'objectif de zéro déchets en décharge plutôt que de donner l'impression, par une rédaction maladroite, de le contester. Est-il également opportun de rétablir la valorisation énergétique dans la proposition de résolution européenne ? Je suis réservée. Il est également regrettable que l'essentiel de nos produits issus de la valorisation organique partent à l'étranger. L'enjeu est de constituer des stocks stratégiques de proximité, sinon nous souffrirons rapidement d'un manque de ressources. Or la directive est muette sur ce point.

- Présidence de M. Charles Revet, vice-président. -

Mme Annick Billon , rapporteure . - J'ai effective ment écarté l'idée d'une taxe sur les produits non recyclables ; il faudrait en outre réunir l'unanimité des pays membres de l'UE, ce qui semble utopique.

Nous sommes tous favorables à des objectifs ambitieux. Toutefois, pour savoir s'ils sont réalistes, il faut se pencher sur la question des statistiques. Certains pays ont des statistiques très flatteuses, mais elles sont faussées.

Je suis d'accord avec M. Miquel, il n'est pas nécessaire de construire davantage de TMB. Cela ne signifie pas pour autant qu'il faille les condamner, il s'agit parfois de la seule solution pour traiter les déchets à proximité. Il est rassurant que le produit sortant des TMB doive respecter les mêmes normes que celles valables pour le compost issu d'une collecte séparée. Je ne suis pas non plus favorable à de nouveaux incinérateurs. Nous souhaitons tous la fin des décharges à terme.

Madame Didier, votre souhait de revoir la place de la valorisation énergétique dans la hiérarchie est déjà exaucé car les objectifs fixés par la directive sont d'abord de diminuer la production de déchets, puis de les recycler et de les valoriser, et enfin de les éliminer.

Enfin, comme vous, Madame Jouanno, je souhaite une harmonisation des chiffres, en Europe comme en France.

M. Claude Kern , auteur de la PPRE . - Nous avions exclu les produits alimentaires du champ de la taxe pour éviter de trop peser sur les ménages modestes. Il est juste qu'un produit importé respecte les mêmes normes que les produits européens. Les plastiques d'origine végétale étaient conçus pour se dégrader en quelques mois, mais les premières constatations ne sont pas probantes.

Il faudrait harmoniser aussi la définition des déchets. Ainsi, les sous-produits de filtrage et lavage des fumées (REFIOMS) sont considérés en Allemagne comme un produit, utilisé comme ciment, avec de très bons résultats, alors qu'en France ils sont considérés comme un déchet et nous les enfouissons.

Nous souscrivons évidemment à l'objectif de zéro déchets recyclables en décharges. La directive visait les déchets municipaux ; or les déchets ménagers comportent une part importante de déchets non recyclables.

En ce qui concerne la valorisation énergétique, nous avons ciblé les installations qui ont des rendements supérieurs à 60 % pour leur fixer un objectif de 70 % en 2030.

M. Pierre Médevielle . - Les REFIOMS ont une forte teneur en métaux lourds. Leur utilisation parait problématique...

M. Claude Kern , auteur de la PPRE . - En effet ! Il existe un contrôle. Quand le taux de métaux lourds est trop élevé, ils sont refusés.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Mme Évelyne Didier . - L'amendement n° 1 inscrit formellement le principe de proximité dans la proposition de résolution européenne. Il est important d'assurer une gestion des déchets aussi proche que possible de leur point de production afin de favoriser le développement d'une économie circulaire territorialisée.

Mme Annick Billon , rapporteure . - Avis favorable. L'encouragement au développement d'une économie circulaire est conforme aux objectifs définis par la loi de juillet 1992 relative à l'élimination des déchets, qui entendait favoriser la gestion de proximité des déchets, pour diminuer leur transport et créer des emplois non délocalisables.

L'amendement n° 1 est adopté.

Mme Évelyne Didier . - L'amendement n° 2 supprime l'alinéa 14 qui va à l'encontre de la hiérarchie vertueuse définie par les textes européens pour la gestion des déchets. Placer la valorisation énergétique au même plan que la valorisation matière est difficilement compatible avec la finalité de la politique des déchets qui est leur réduction.

Mme Annick Billon , rapporteure . - Avis défavorable. Les auteurs de la PPRE n'ont pas entendu faire de la de valorisation énergétique un objectif en soi de la politique des déchets. Ils souhaitent simplement l'encourager.

L'amendement n° 2 n'est pas adopté.

Mme Annick Billon , rapporteure . - L'amendement n° 4 insère un alinéa après l'alinéa 22 pour inviter la Commission européenne à définir la notion de déchet recyclable, afin de garantir une application harmonisée de l'interdiction de mise en décharge à horizon 2025. Pourraient, par exemple, être considérés comme des déchets recyclables les déchets collectés en vue d'être valorisés, notamment au travers des filières REP.

L'amendement n° 4 est adopté.

Mme Annick Billon , rapporteure . - L'amendement n° 5 supprime la fin de l'alinéa 28. L'obligation d'incorporation de 50 % de matières recyclées serait particulièrement difficile à contrôler. Pour certains produits qui se recyclent très bien, comme l'acier, il faudrait créer un système très lourd de traçabilité, tandis que, pour d'autres produits, cette obligation serait quasiment impossible à remplir. De plus, si une taxe européenne sur les produits non recyclables a le mérite de frapper également les produits importés, sa mise en oeuvre nécessiterait l'unanimité des États membres, piste inenvisageable à ce jour. En outre, cette taxe s'apparenterait, en pratique, à une taxe sur la consommation ou à une hausse de TVA. Privilégions les dispositifs incitatifs pour responsabiliser davantage les acteurs économiques.

Mme Évelyne Didier . - L'amendement n° 3 est identique.

M. Jean-Jacques Filleul . - Ces amendements suppriment l'objectif d'incorporation de 50 % de matière recyclée dans les biens mis sur le marché et la taxe sur les produits non recyclables. Les objectifs fixés sont sans doute ambitieux. Nous aurions aimé avoir un éclairage du gouvernement...

Mme Évelyne Didier . - Il est peu probable que le débat ait lieu en séance.

M. Jean-Jacques Filleul . - Nous nous abstenons.

Mme Chantal Jouanno . - Je m'abstiens : il m'est impossible d'arbitrer entre deux membres de mon groupe...

Les amendements identiques n° 5 et n° 3 sont adoptés .

La commission adopte la proposition de résolution ainsi modifiée .

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