AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi, déposée par M. Didier Guillaume et les membres du groupe socialiste le 1 er octobre 2013, a été adoptée en première lecture par le Sénat le 12 décembre 2013. Ce texte a un objet simple : apporter une solution pragmatique aux obstacles pratiques que rencontrent les personnes en situation de handicap pour exercer un acte de la vie quotidienne qui en conditionne beaucoup d'autres : accéder à une place de stationnement.

Ce faisant, il propose de franchir une étape, certes mesurée, mais certaine, vers l'objectif d'accessibilité universelle, tel qu'il a été consacré par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

Dans sa version initiale, la proposition de loi prévoyait d'autoriser les titulaires de la carte de stationnement pour personnes handicapées à stationner gratuitement et sans limite de durée sur les places qui leur sont réservées.

En première lecture, le Sénat a étendu, pour ces personnes, les principes de gratuité et de non limitation dans le temps à l'ensemble des places, qu'elles soient ou non réservées. Dans le même temps, des garanties ont été apportées afin d'éviter les pratiques de stationnement abusives, de sécuriser l'application de la gratuité dans les parcs de stationnement gérés dans le cadre de délégations de service public et d'assouplir les conditions d'application de la loi dans les parcs disposant de bornes d'entrée et de sortie accessibles par les personnes handicapées depuis leur véhicule.

La proposition de loi a été adoptée par l'Assemblée nationale le 25 novembre 2014. Celle-ci ayant jugé nécessaire de lui apporter trois modifications rédactionnelles, le Sénat est amené à se prononcer en deuxième lecture sur un texte quasiment identique à celui qu'il a adopté il y a un peu plus d'un an.

Au regard de ces éléments de contexte, et compte tenu du très large consensus dont la proposition de loi a fait l'objet en première lecture, votre rapporteure estime qu'elle doit pouvoir être adoptée définitivement par le Sénat dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. UNE INITIATIVE SÉNATORIALE DESTINÉE À FRANCHIR UNE ÉTAPE SUPPLÉMENTAIRE VERS L'ACCESSIBILITÉ UNIVERSELLE

A. LE DROIT EXISTANT EN MATIÈRE DE STATIONNEMENT DES PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP

1. Les conditions de délivrance de la carte de stationnement pour personnes handicapées

Les personnes en situation de handicap peuvent se voir délivrer trois types de cartes : la carte d'invalidité, la carte de priorité et la carte de stationnement. C'est sur cette dernière que porte la présente proposition de loi.

Les conditions d'éligibilité à la carte de stationnement pour personnes handicapées sont définies à l'article L. 241-3-2 du code de l'action sociale et des familles. Celui-ci dispose que la carte de stationnement peut être délivrée à « toute personne [...] atteinte d'un handicap qui réduit de manière importante et durable sa capacité et son autonomie de déplacement à pied ou qui impose qu'elle soit accompagnée par une tierce personne dans ses déplacements » .

La carte peut être utilisée à la fois par son titulaire et par la tierce personne chargée de l'accompagner. En outre, les organismes utilisant un véhicule destiné au transport collectif des personnes en situation de handicap peuvent également disposer de la carte de stationnement.

La demande de carte de stationnement, qui doit être accompagnée d'un certificat médical établi à cette fin, doit être adressée à la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) ou, lorsque la personne relève du code des pensions militaires d'invalidité et de victimes de la guerre, à une antenne départementale de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG).

La carte est délivrée par le préfet, après avis du médecin chargé d'instruire la demande, dans un délai de deux mois suivant celle-ci . La loi ne définit pas de taux d'incapacité ouvrant ou non le droit au bénéfice de la carte de stationnement - contrairement à ce qui s'applique pour la carte d'invalidité. La délivrance de la carte est laissée à la libre appréciation du médecin membre de l'équipe pluridisciplinaire de la MDPH au regard des difficultés que rencontre la personne pour effectuer ses déplacements.

La carte peut être attribuée à titre définitif ou pour une durée d'au moins une année . Lorsqu'aucune réponse n'est intervenue de la part du préfet dans le délai de deux mois suivant la demande, la carte est délivrée d'office pour une durée de deux ans. Elle peut cependant être retirée à son titulaire s'il est établi par la suite que celui-ci ne remplit pas les conditions pour en bénéficier.

Toujours aux termes de l'article L. 241-3-2 du code de l'action sociale et des familles, le titulaire d'une carte de stationnement pour personnes handicapées peut utiliser les places réservées et aménagées à cet effet dans les lieux de stationnement ouverts au public . De façon plus générale, il peut bénéficier des mesures mises en oeuvre par les autorités compétentes en matière de circulation et de stationnement . Ces mesures peuvent être notamment d'ordre tarifaire.

Article L. 241-3-2 du code de l'action sociale et des familles

« Toute personne, y compris les personnes relevant du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et du code de la sécurité sociale, atteinte d'un handicap qui réduit de manière importante et durable sa capacité et son autonomie de déplacement à pied ou qui impose qu'elle soit accompagnée par une tierce personne dans ses déplacements, peut recevoir une carte de stationnement pour personnes handicapées. Cette carte est délivrée par le préfet conformément à l'avis du médecin chargé de l'instruction de la demande dans un délai de deux mois suivant la demande. A défaut de réponse du représentant de l'Etat dans le département dans ce délai, la carte est délivrée au demandeur.

Les organismes utilisant un véhicule destiné au transport collectif des personnes handicapées peuvent recevoir une carte de stationnement pour personnes handicapées.

La carte de stationnement pour personnes handicapées permet à son titulaire ou à la tierce personne l'accompagnant d'utiliser, dans les lieux de stationnement ouverts au public, les places réservées et aménagées à cet effet. Elle permet, dans les mêmes conditions, de bénéficier des autres dispositions qui peuvent être prises en faveur des personnes handicapées par les autorités compétentes en matière de circulation et de stationnement.

Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article. »

2. Les règles applicables aux collectivités territoriales en matière de stationnement réservé

L'article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales dispose que le maire est compétent pour « réserver sur la voie publique ou dans tout autre lieu de stationnement ouvert au public des emplacements de stationnement aménagés aux véhicules utilisés par les personnes titulaires de la carte de stationnement » .

Sont concernés : les voies publiques (voies communales, intercommunales, départementales ou nationales) ; les voies privées ouvertes à la circulation publique ; les voies et parkings des centres commerciaux ; les voies et parkings desservant des établissements recevant du public (ERP) ; les parkings des bâtiments d'habitation lorsqu'ils débouchent sur une voie publique.

Un arrêté du 1 er août 2006 1 ( * ) et un décret du 21 décembre 2006 2 ( * ) fixent les règles d'accessibilité applicables aux ERP, à la voirie et aux espaces publics.

Les places réservées aux personnes en situation de handicap doivent ainsi remplir un certain nombre d' exigences techniques destinées à les rendre plus aisément accessibles : une largeur de 3,3 mètres minimum ; une pente inférieure à 2 % ; un sol non meuble et non glissant ; un agencement permettant de rejoindre sans difficultés le trottoir ou le cheminement pour piétons ; un trottoir abaissé selon les mêmes normes que celles prévues pour les passages piétons.

Au moins 2 % des emplacements de stationnement matérialisés sur la voie publique ainsi que des places des parcs de stationnement des ERP doivent être réservés aux personnes en situation de handicap.

La loi du 11 février 2005 rend obligatoire l'élaboration par chaque commune ou, lorsque la compétence a été transférée, par chaque établissement public de coopération intercommunale (EPCI), d'un plan de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics (PAVE). C'est ce document qui doit permettre d'assurer une répartition homogène de l'ensemble des emplacements réservés aux personnes en situation de handicap sur le territoire de la commune. Lorsqu'existe un plan de déplacements urbains (PDU), le PAVE fait partie intégrante de celui-ci.

Les mesures d'ordre tarifaire pouvant être destinées aux personnes en situation de handicap relèvent de la libre appréciation du conseil municipal ou, le cas échéant, de l'organe délibérant de l'EPCI ou de celui du syndicat mixte chargé d'organiser les transports urbains. L'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales leur permet en particulier de « prévoir une tarification spécifique pour certaines catégories d'usagers » .

Article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales

« Sans préjudice de l'application de l'article L. 2512-14 [règles applicables à Paris], le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou du syndicat mixte compétents pour l'organisation des transports urbains, lorsqu'il y est autorisé par ses statuts, peut établir sur des voies qu'il détermine une redevance de stationnement, compatible avec les dispositions du plan de déplacements urbains s'il existe. Dans le cas où le domaine public concerné relève d'une autre collectivité, l'avis conforme de cette dernière est requis hors agglomération.

La délibération établit les tarifs applicables à chaque zone de stationnement payant.

Le tarif peut être modulé en fonction de la durée du stationnement. Il peut prévoir également une tranche gratuite pour une durée déterminée. L'acte instituant la redevance peut prévoir une tarification spécifique pour certaines catégories d'usagers et notamment les résidents. »


* 1 Arrêté du 1 août 2006 fixant les dispositions prises pour l'application des articles R. 111-19 à R. 111-19-3 et R. 111-19-6 du code de la construction et de l'habitation relatives à l'accessibilité aux personnes handicapées des établissements recevant du public et des installations ouvertes au public lors de leur construction ou de leur création.

* 2 Décret n° 2006-1658 du 21 décembre 2006 relatif aux prescriptions techniques pour l'accessibilité de la voirie et des espaces publics.

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