CHAPITRE IV - DISPOSITIONS RELATIVES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Article 13 (art. L. 254-4-1, L. 262-50-2 et L. 272-48-2 [nouveaux] du code des juridictions financières ; art. L. 212-1 et L. 212-3 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie) - Dispositions en matière de transparence financière applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie

Le présent article vise à insérer plusieurs dispositions tendant à accroître l'information des collectivités territoriales et des citoyens en matière financière. Ces dispositions sont identiques à celles de l'article 30 du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, actuellement en discussion au Parlement. Elles ont vocation à traduire certaines préconisations de la Cour des comptes qui, dans son rapport de juillet 2011 sur la gestion de la dette publique locale, relevait des « carences » dans l'information des assemblées délibérantes en matière financière.

1. L'obligation de présenter les actions correctrices entreprises à la suite d'un rapport d'une chambre territoriale des comptes et la transmission des rapports de ces dernières aux maires des communes membres d'un EPCI

• Le I du présent article vise à insérer dans le code des juridictions financières trois nouveaux articles L. 254-4, L. 262-50-2 et L. 272-45-2 qui s'appliqueraient respectivement à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française , prévoyant l'obligation pour les maires et les présidents d'établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre de présenter à leur assemblée délibérante les actions correctrices entreprises à la suite d'un rapport de la chambre territoriale des comptes. Ce rapport rendrait compte des suites données aux observations définitives. Sa présentation interviendrait dans le délai d'un an après celle du rapport d'observations définitives par l'exécutif à son assemblée délibérante.

Cette disposition vise à décliner au plan local la disposition prévue à l'article L. 143-10-1 du code des juridictions financières applicable. Cet article dispose que le rapport public annuel de la Cour des comptes comporte une présentation des suites données aux observations définitives des juridictions financières, établie sur la base de comptes rendus que les destinataires de ces observations ont l'obligation de fournir à la Cour.

Les chambres territoriales des comptes compétentes seraient destinataires de ces rapports de suivi et en réaliseraient une synthèse annuelle qui serait ensuite transmise à la Cour des comptes.

• Le I du présent article prévoit également la transmission immédiate du rapport d'observations définitives de la chambre territoriale des comptes portant sur un EPCI à fiscalité propre aux maires de ses communes membres.

Aujourd'hui, en application de l'article L. 243-5 du code des juridictions financières, le rapport d'observations définitives d'une chambre régionale ou territoriale des comptes est inscrit à l'ordre du jour et communiqué à la seule assemblée délibérante, « dès sa plus proche réunion », à l'issue d'un examen de gestion d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public.

En application de ces nouvelles dispositions, ledit rapport serait transmis et présenté au conseil municipal le plus proche de chaque commune membre de l'EPCI, immédiatement après la présentation du rapport d'observations définitives lors d'une réunion du conseil municipal. Il donnerait lieu à un débat lors de cette présentation afin de permettre une appropriation de ces rapports par les élus.

2. Un renforcement des exigences d'informations financières à destination des conseils municipaux et des citoyens de la Nouvelle-Calédonie

Le II du présent article vise à modifier les articles L. 212-1 et L. 212-3 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie afin d'accroître le rôle des conseils municipaux et des citoyens de Nouvelle-Calédonie en leur fournissant des informations financières plus nombreuses, visibles et accessibles.

Ainsi, à l'article L. 212-1 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie, il est proposé, deux mois avant le débat sur les orientations budgétaires, la présentation, dans les communes d'au moins 3 500 habitants, d'un rapport comportant des éléments sur les orientations budgétaires, les engagements pluriannuels envisagés et la gestion de la dette de la commune. Cette présentation donnerait lieu à un débat qui ferait l'objet d'une délibération spécifique.

Cette présentation serait complétée, pour les communes de plus de 10 000 habitants - ce qui concernerait quatre communes - par l'organisation d'un débat sur la structure de la dette et l'évolution des dépenses et des effectifs. Le rapport sur les orientations budgétaires comporterait également l'évolution prévisionnelle et l'exécution des dépenses de personnel, des rémunérations, des avantages en nature et du temps de travail. Après l'organisation de ce débat, ce rapport serait transmis au représentant de l'État en Nouvelle-Calédonie ainsi qu'au président de l'EPCI dont la commune serait membre, avant d'être publié. Un décret fixerait les modalités de transmission et de publication de ce rapport.

À l'article L. 212-3 du code des juridictions financières, il est proposé de joindre au budget primitif et au compte administratif une présentation synthétique retraçant les principales informations financières de la collectivité. Cette présentation, les notes explicatives de synthèses annexées au budget primitif et au compte administratif ainsi que le rapport sur les orientations budgétaires prévu lors du débat sur les orientations budgétaires, seraient, le cas échéant, mis en ligne sur le site internet de la commune après l'adoption par le conseil municipal des délibérations auxquelles ils se rapporteraient.

Ainsi que l'avait rappelé M. René Vandierendonck et votre rapporteur dans leur rapport de première lecture du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République 62 ( * ) , « cette structuration des débats d'orientation budgétaire, qui entend accroître l'information des élus mais aussi des citoyens par la publication de synthèses en ligne, entraîne la fourniture d'informations supplémentaires, proportionnées selon les strates des collectivités territoriales, et prévoit désormais une délibération spécifique prenant acte de la tenue du débat sur les orientations budgétaires ». Ces dispositions visent à favoriser une meilleure appropriation des données financières par les élus locaux et les citoyens.

Votre commission s'interroge toutefois sur les raisons ayant conduit le Gouvernement à ne pas étendre, dans le cadre du projet de loi NOTRe, les présentes dispositions à Saint-Pierre-et-Miquelon, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie, choix sans doute plus simple que celui retenu ici. En outre, bien que les présentes dispositions participent au renforcement de la transparence des informations budgétaires, votre commission estime que l'assainissement de la situation financière des communes et de leurs groupements dans ces collectivités ultramarines nécessite une réflexion plus approfondie sur les solutions à mettre en oeuvre pour les faire bénéficier d'une situation saine et stable.

Tout en partageant les objectifs du présent article, votre commission a adopté quatre amendements rédactionnels ( COM-21, COM-22, COM-23 et COM-24 ) destinés à en clarifier et en améliorer la rédaction.

Elle a également supprimé le renvoi à l'article L. 121-10 du code des communes de Nouvelle-Calédonie relatif au fonctionnement du conseil municipal et non du compte administratif des communes, en adoptant l' amendement COM-25 de son rapporteur.

Votre commission a adopté l'article 13 ainsi modifié .

Article 14 (art. L. 122-2-1 [nouveau] du code des communes de la Nouvelle-Calédonie) - Création d'adjoints au maire chargés de quartiers dans les communes calédoniennes de plus de 80 000 habitants

L'article 14 vise à étendre en Nouvelle-Calédonie la possibilité ouverte aux conseils municipaux des villes de plus de 80 000 habitants de désigner des adjoints au maire chargés d'un ou plusieurs quartiers. Ces fonctions d'adjoint au maire peuvent être créées au-delà de l'effectif normal d'adjoints au maire, limité à un tiers de l'effectif légal du conseil municipal, dans la limite de 10 % de cet effectif. Sur le modèle de l'article L. 2122-2-1 du code général des collectivités territoriales, il insère un article L. 122-2 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie, qui ne concernerait que la ville de Nouméa.

Cette faculté, instituée par la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, n'a jamais été étendue ni dans les collectivités d'outre-mer - qui ne comptent, à ce jour, aucune ville de plus de 80 000 habitants -, ni en Nouvelle-Calédonie. Or, le chef-lieu du territoire calédonien dépasse ce seuil démographique. Lors du déplacement d'une délégation de votre commission en juillet-août 2014 en Nouvelle-Calédonie, Mme Sonia Lagarde, députée-maire de Nouméa, avait fait part à nos collègues M. Jean-Pierre Sueur et Mmes Sophie Joissains et Catherine Tasca de son regret de ne pouvoir bénéficier de cette possibilité ouverte par la loi aux autres communes françaises, invitant à une modification législative sur ce point. Cet article répond à cette demande exprimée localement, ce dont se félicite votre commission.

Votre commission a adopté l'article 14 sans modification .

Article 15 (art. L. 2573-3 du code général des collectivités territoriales) - Élection du maire délégué dans les communes associées en Polynésie française

L'article 15 modifie l'article L. 2573-3 du code général des collectivités territoriales qui prévoit l'application à la Polynésie française des dispositions relatives aux communes associées. La réforme des communes nouvelles introduite par la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales n'a pas été étendue dans les archipels polynésiens qui comptent encore nombre de communes associées. Votre rapporteur rappelle que les communes polynésiennes présentent de fortes particularités en raison de leur isolement et de l'éloignement géographique, y compris au sein d'une même commune, entre les îles. Pour prendre en compte la relative autonomie des îles d'une même commune, quatre-vingt-dix-huit communes associées se répartissent au sein de trente communes parmi les quarante-huit que compte la Polynésie française.

En précisant le I de l'article L. 2573-3, il est proposé de confirmer une mention introduite, à l'initiative de votre commission, à l'occasion de l'examen de la loi n° 2015-292 du 16 mars 2015 relative à l'amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes, et qui précise que les communes polynésiennes restent régies par les règles antérieures à la réforme de 2010 (1°).

Serait ajoutée une mesure d'adaptation précisant les conditions dans lesquelles le maire délégué peut être élu par le conseil municipal (2°). Actuellement, le conseil municipal le désigne « parmi les conseillers élus dans la section correspondante ou, à défaut, parmi les membres du conseil . » Il est proposé de réduire ce choix aux conseillers municipaux élus au titre de la liste arrivé en tête dans la section correspondante, et non au niveau de la commune. Ainsi, lorsqu'il y a discordance entre la majorité au niveau de la section électorale et de la commune, le maire délégué serait obligatoirement issue de la majorité de la section et non plus de la minorité de la section, même si elle correspond à la majorité municipale.

Cette discordance a été rendue possible par la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral. Lors de son dépôt par le Gouvernement, le projet de loi ne modifiait pas le régime d'élection des communes polynésiennes. Cependant, par un amendement de son rapporteur, l'Assemblée nationale avait souhaité, en première lecture, étendre la réforme à la Polynésie française, sans réellement mesurer les effets déstabilisateurs qu'elle portait en germe. Notre collègue Michel Delebarre, alors rapporteur du texte, avait pourtant rappelé la spécificité de la situation polynésienne : les communes sont de création récente puisque, à l'exception de trois d'entre elles, elles datent des années 1970. En outre, le mode de scrutin majoritaire dans toutes les communes associées garantissait alors l'uniformité politique de chaque section électorale. Le maire délégué reflétait donc nécessairement l'orientation politique de la commune associée, faute de représentation de l'opposition dans celle-ci. Le Sénat s'était donc opposé à cette application inadaptée de la réforme en Polynésie française.

Depuis l'entrée en vigueur de la réforme de 2013, le législateur est ainsi conduit à intervenir une nouvelle fois afin de corriger certains de ses effets. La première fois, par l'article 25 de la loi n° 2013-1029 du 15 novembre 2013 portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, le Parlement a mis fin à la coexistence, au sein d'une même commune, de plusieurs mode de scrutin au sein des communes associées.

La liberté de choix du maire délégué, y compris au sein de la minorité de conseillers élus dans le cadre de la section électorale, a provoqué des démissions collectives de conseillers d'une même section électorale. Lorsque le nombre de conseillers démissionnaires a excédé le tiers de l'effectif du conseil municipal, l'État a dû ainsi organiser des élections partielles, comme à Hitiaa O Te Ra et à Taiarapu Ouest. L'article 15 tente de répondre à cette difficulté en empêchant de renouveler cette hypothèse.

Votre commission a adopté l'article 15 sans modification .


* 62 Rapport n° 174 (2014-2015) de MM. Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck, fait au nom de la commission des lois, déposé le 10 décembre 2014.

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