CHAPITRE IV - SIMPLIFIER
Section 1 - Alléger les obligations des entreprises

Article 55 bis A (art. 18 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire et art. L. 141-23, L. 123-25, L. 141-26, L. 141-27, L. 141-28, L. 141-30, L. 141-31, L. 141-32, L. 23-10-1, L. 23-10-3, L. 23-10-4, L. 23-10-5, L. 23-10-6, L. 23-10-7, L. 23-10-9, L. 23-10-10, L. 23-10-11, L. 23-10-12 du code de commerce) - Allègement de l'obligation d'information préalable des salariés en cas de cession de leur entreprise et de la sanction prévue en cas de manquement

Objet : cet article vise à simplifier l'obligation d'information préalable des salariés en cas de cession de leur entreprise et, en cas de manquement, à remplacer la sanction de nullité de la cession par une amende civile.

I - L'obligation d'information préalable des salariés en cas de cession de leur entreprise

Issue de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, l'obligation d'information préalable des salariés en cas de cession de leur entreprise par son propriétaire - qu'il s'agisse de la cession d'un fonds de commerce ou de la majorité des parts d'une société, étant précisé que sont seules concernées les petites et moyennes entreprises (PME, soit les entreprises de moins de 250 salariés et moins de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires ou moins de 43 millions d'euros de total de bilan) - a pour objectif de favoriser la reprise de leur entreprise par les salariés, en permettant à ces derniers de présenter une offre de reprise s'ils le souhaitent.

Si cet objectif est louable, compte tenu du problème de transmission des entreprises en France et de disparition d'entreprises et d'emplois faute de repreneur et d'anticipation de la transmission, les modalités retenues par le législateur en 2014 se révèlent, selon votre rapporteur, contre-productives, en raison du caractère obligatoire et systématique de l'information préalable des salariés et de la sanction de nullité relative de la cession en cas de défaut d'information. Aussi ce dispositif a-t-il, en dépit de ses intentions, suscité une très forte réprobation de la part des représentants des entreprises, qui s'est exprimée en particulier lors de la publication du décret n° 2014-1254 du 28 octobre 2014 prévu pour sa mise en oeuvre puis de son entrée en vigueur le 1 er novembre 2014.

En effet, l'information préalable des salariés est obligatoire dans tous les cas de cession, y compris lorsqu'un repreneur est pressenti. Dans cette hypothèse, l'information des salariés peut porter atteinte à la confidentialité des négociations voire perturber le processus de transmission, par exemple en cas d'inquiétude ou de mécontentement des salariés, d'information des élus locaux ou de la presse locale, a fortiori si l'entreprise est importante pour le bassin d'emploi, ou encore en cas de pluralité de repreneurs intéressés. La confidentialité est indispensable pour réussir une cession d'entreprise. Dès lors, pour nombre de dirigeants souhaitant céder leur entreprise, l'obligation d'informer préalablement leurs salariés est apparue comme un frein à la transmission, à rebours de l'objectif poursuivi, suscitant leur inquiétude.

Cette inquiétude est d'autant plus forte que tout manquement à cette obligation d'information préalable est sanctionné par une nullité relative de la cession par le juge, à la demande de tout salarié. Un tel risque juridique altère gravement le processus de transmission, y compris en termes de pérennité de l'entreprise concernée, d'autant qu'un retour à la situation ex ante apparaît peu pertinent puisque le chef d'entreprise souhaitait céder.

Fort de ces constatations, le Sénat avait supprimé cette obligation, à l'initiative de notre collègue Jean-Jacques Hyest, à l'occasion de l'examen en première lecture de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises, avant d'y renoncer en commission mixte paritaire, faute de parvenir à ce stade à un compromis avec nos collègues députés comme avec le Gouvernement pour bâtir une réforme du dispositif. Par la suite, cependant, considérant effectivement que ce dispositif posait un sérieux problème, le Gouvernement confia en janvier 2015 une mission d'évaluation à notre collègue députée Fanny Dombre Coste, laquelle remit son rapport le 18 mars dernier 23 ( * ) .

Ce rapport a préconisé, en particulier, de remplacer la sanction de nullité par une « amende proportionnelle au prix de vente », afin de sécuriser les cessions, d'assouplir les modalités d'information des salariés pour satisfaire l'obligation d'information et de restreindre cette obligation aux seules ventes et pas à l'ensemble des cas de cession.

Le Gouvernement annonça alors publiquement qu'il déposerait un amendement, reprenant ces préconisations, au Sénat à l'occasion de l'examen en séance en première lecture du présent projet de loi, ce qu'il ne fit pas.

En conséquence, alors que votre rapporteur avait proposé, au stade de l'établissement du texte de la commission, d'écarter les amendements déposés sur ce sujet, dans l'attente du dépôt de l'amendement annoncé par le Gouvernement, il considéra qu'il fallait adopter un amendement en séance, de façon à ce que le sujet puisse être traité dans la suite de la navette, sans se heurter à la règle dite de l'entonnoir.

II - Le texte adopté par le Sénat en première lecture

Adopté en première lecture par le Sénat, en séance, à l'initiative de notre collègue Bruno Retailleau, l'article 55 bis A du projet de loi, sans supprimer le dispositif d'information préalable des salariés, le réformait profondément afin d'en supprimer les effets pervers évoqués plus haut.

Ainsi, tel qu'adopté par le Sénat, cet article restreint l'obligation aux seuls cas de cessation d'activité de l'entreprise, laquelle peut s'expliquer par construction par l'absence de repreneur, et supprime par cohérence toute sanction en cas de défaut d'information.

Si votre rapporteur considère que cette restriction était telle qu'elle avait pour effet de largement vider de sa substance le dispositif issu de la loi du 31 juillet 2014 précitée, il estime néanmoins qu'elle a présenté le mérite d'inciter le Gouvernement à faire aboutir sa réflexion et in fine à concrétiser les engagements qu'il n'avait pas tenus devant le Sénat.

III - Le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture

À la faveur de l'introduction en première lecture de l'article 55 bis A par le Sénat, le Gouvernement a ainsi pu présenter à l'Assemblée nationale, en nouvelle lecture, un amendement réformant le dispositif d'information préalable des salariés, reprenant les préconisations de notre collègue députée Fanny Dombre Coste.

Tel que modifié par l'Assemblée nationale, cet article veut inciter les chefs d'entreprise à renforcer l'information de leurs salariés sur l'évolution générale de leur entreprise et sur son éventuelle cession, dans le cadre du dispositif déjà prévu à l'article 18 de la loi du 31 juillet 2014 précitée.

Surtout, il limite l'obligation d'information préalable des salariés au seul cas de la vente de l'entreprise et plus à tous les cas de cession, de façon à écarter, en particulier, les cessions à titre gratuit. Selon l'exposé des motifs de l'amendement du Gouvernement, « c'est seulement en cas de vente que le salarié est vraiment en mesure de proposer une offre concurrente équivalente ». Le cédant demeure évidemment libre de céder à qui il souhaite.

En outre, les modalités de l'information obligatoire des salariés sont simplifiées, en prévoyant qu'en cas de lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la date de réception de l'information est la date de première présentation de la lettre, étant précisé que cette date fait partir le délai au terme duquel la vente peut avoir lieu.

Enfin, la sanction de nullité est remplacée par une amende civile, qui ne pourrait être prononcée qu'à la demande du ministère public, dans le cas d'une action en responsabilité du cédant engagée pour défaut d'information des salariés à l'initiative de ces derniers, sans préjudice d'une éventuelle indemnisation des salariés concernés pour leur perte de chance. Une telle indemnisation supposera de démontrer que des salariés avaient la volonté de présenter une offre, mais étaient également en mesure de le faire, notamment d'un point de vue financier. L'amende serait plafonnée à 2 % du montant de la vente.

Quelques modifications rédactionnelles sont également réalisées.

Cette réforme du dispositif d'information préalable des salariés en cas de vente de leur entreprise entrerait en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard six mois après la publication de la présente loi.

IV - La position de votre commission

Dans la continuité de la position adoptée par le Sénat en première lecture, favorable à l'allègement tant de l'obligation d'information préalable des salariés que de la sanction afférente, à défaut de suppression pure et simple du dispositif, votre commission approuve le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale, sans préjudice d'un débat en séance publique et d'éventuelles améliorations rédactionnelles susceptibles d'être proposées par son rapporteur.

S'il maintient l'objectif de la loi du 31 juillet 2014 précitée, ce texte l'assortit de modalités plus pragmatiques et plus conformes aux réalités de la vie des affaires. Dans l'hypothèse d'une vente de l'entreprise n'ayant pas donné lieu à une information des salariés en amont, le cédant serait tenu au paiement d'une amende civile en cas d'action en responsabilité devant le juge, sans que la vente puisse être remise en cause. La sécurité juridique serait ainsi pleinement préservée, dans l'intérêt même de l'entreprise comme de ses salariés.

De la sorte, les salariés ne seront incités à engager une action que dans l'hypothèse où ils auraient souhaité présenter une offre, mais en auraient été empêchés du fait de l'absence d'information préalable, limitant ainsi le risque contentieux.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.

Article 55 ter (art. L. 526-1 à L. 526-3 du code de commerce) - Insaisissabilité de droit de la résidence principale de l'entrepreneur individuel à l'égard de ses créanciers professionnels

Objet : cet article vise à instituer une insaisissabilité de droit de la résidence principale de tout entrepreneur individuel, à l'égard de ses seuls créanciers professionnels, en substitution du dispositif actuel d'insaisissabilité volontaire sur déclaration notariée.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a approuvé l'essentiel des modifications issues des travaux du Sénat en première lecture, en adoptant deux amendements de nature rédactionnelle. Par un troisième amendement, elle est toutefois revenue sur un point, en apportant une modification que le Sénat avait formellement écartée en première lecture en commission comme en séance.

Il s'agit de l'obligation, pour l'entrepreneur individuel souhaitant affecter à son activité professionnelle une partie de sa résidence principale, d'établir ou non un état descriptif de division. Le Sénat juge cette formalité nécessaire, là où l'Assemblée nationale la juge inutile. À l'initiative de son rapporteur, votre commission, attentive à une juste protection des droits des créanciers, a adopté un amendement ( COM-285 ) en vue de rétablir cette obligation.

En effet, un état descriptif permettrait aux créanciers professionnels de connaître la consistance de leur gage, la partie de la résidence principale, insaisissable de droit, affectée à l'usage professionnel étant saisissable par les créanciers professionnels.

Or, votre rapporteur rappelle que le Conseil constitutionnel est très attentif aux droits des créanciers, comme l'illustre sa décision n° 2010-607 DC du 10 juin 2010 sur la loi relative à l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée, dans un cas de figure très semblable à celui prévu au présent article.

Cet amendement vise ainsi à assurer la régularité constitutionnelle du nouveau dispositif d'insaisissabilité de droit de la résidence principale de l'entrepreneur individuel instauré par le projet de loi.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 56 bis (art. 1244-4 [nouveau] et 2238 du code civil, art. L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution) - Procédure simplifiée de recouvrement de créance, par délivrance de titre exécutoire

Objet : le présent article crée une procédure simplifiée de recouvrement de créances, conduite par un huissier de justice.

I - Le texte adopté par le Sénat en première lecture

Votre commission spéciale avait reconnu, en première lecture, l'intérêt de faciliter le règlement des créances. Toutefois, alertée notamment par l'association nationale des juges d'instance elle s'était inquiétée que soient confondus sur la tête du même professionnel de justice le pouvoir de procéder à l'exécution forcée de la créance et celui de délivrer le titre exécutoire requis pour procéder à cette exécution forcée.

Par conséquent, elle avait rétabli la nécessité d'une homologation judiciaire et supprimé le pouvoir donner à l'huissier de délivrer lui-même le titre exécutoire.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

À l'initiative de ses rapporteurs, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a rétabli son texte de première lecture, en ajoutant seulement qu'un décret en Conseil d'État prévoira les règles de prévention de conflits d'intérêts lors de la délivrance par l'huissier du titre exécutoire.

La commission spéciale a par ailleurs renommé cette procédure, « procédure simplifiée », plutôt que « procédure amiable ».

III - La position de votre commission

Votre rapporteur note que la disposition ajoutée par l'Assemblée nationale traduit bien la crainte que la confusion de pouvoirs réalisée sur la tête de l'huissier conduise à des situations de conflits d'intérêts.

Il estime que la meilleure façon de les prévenir est d'éviter que la même personne, rétribuée uniquement par le créancier et servant ses seuls intérêts, autorise l'exécution forcée de la créance et la mette en oeuvre.

À cet égard, il souligne qu'une telle procédure est susceptible de priver le débiteur d'un accès efficace au juge : la réalité ou la validité de la créance ne seront pas contrôlées par l'huissier comme elles pourraient l'être par le juge, notamment pour les contentieux d'ordre public comme ceux de la consommation. Par ailleurs, une fois le titre exécutoire délivré, les recours contre la créance seront inefficaces.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission a une nouvelle fois supprimé la faculté conférée à l'huissier de délivrer lui-même le titre exécutoire en adoptant l' amendement (COM-286 ).

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 57 - Habilitation en vue de transposer la directive du 26 février 2014 sur l'attribution des contrats de concession et d'unifier et simplifier les règles applicables aux contrats de concession

Objet : cet article sollicite une habilitation, sur le fondement de l'article 38 de la Constitution, pour autoriser le Gouvernement, d'une part, à transposer la directive 2014/23/UE du 26 février 2014 sur l'attribution des contrats de concession et, d'autre part, à unifier, simplifier et mettre en cohérence les règles applicables aux différents contrats de concession.

En première lecture, votre commission avait accepté le principe d'une transposition par ordonnance de la directive 2014/23/UE du 26 février 2014 sur l'attribution des contrats de concession et, en complément, la mise en cohérence par ordonnance également des règles applicables aux contrats de concession. Dans la perspective d'un futur code unique de la commande publique, cette démarche complète la transposition des directives de 2014 sur les marchés publics et la mise en cohérence des règles relatives aux marchés publics, par ordonnance également, prévues par l'article 42 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises.

Cependant, pour tenir compte des inquiétudes fortes qui se sont exprimées de la part des élus locaux et des gestionnaires de services publics locaux quant au risque de remise en cause des règles instituées par la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite « loi Sapin », pour les contrats de concession n'entrant pas dans le champ de la directive précitée, votre commission a tenu à préciser la rédaction de l'habilitation sur ce point.

Or, en dépit des engagements du Gouvernement lors des débats en séance publique, l'Assemblée nationale est purement et simplement revenue à la rédaction initiale de l'habilitation, n'apaisant pas les inquiétudes, alors que l'objectif d'une rédaction plus précise était de dissiper toute ambiguïté sur les conditions de transposition et d'éviter toute sur-transposition pour les contrats qui ne relèvent pas du champ de la directive.

Dans ces conditions, à l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement (COM-287) en vue de rétablir la rédaction de l'habilitation telle que modifiée par le Sénat en première lecture.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 58 (art. L. 121-16-1, L. 121-21, L. 132-2, L. 141-1, L. 141-1-2, L. 213-2, L. 213-3, L. 218-3, L. 218-4, L. 218-5-1, L. 218-5-5, L. 218-5-7 [nouveau] et L. 221-6 du code de la consommation, art. L. 465-2 du code de commerce, art. 17-2 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, et art. 17 de la loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française) - Plafonnement des frais mis à la charge des entreprises en cas de publicité de la sanction ou de l'injonction les concernant - Report, à la livraison du produit, de la possibilité de rétractation - Suppression de l'amende sanctionnant l'absence d'information sur les prix pratiqués par les professionnels de l'immobilier

Objet : le présent article vise, à plafonner les frais de publicité mis à la charge des entreprises faisant l'objet d'une sanction ou d'une injonction administrative ; à reporter, pour les contrats à distance, la possibilité pour le consommateur de se rétracter, à la livraison du produit ; à supprimer une sanction pénale applicable aux professionnels de l'immobilier ; et, enfin, à modifier diverses dispositions mineures en droit de la consommation.

I - Le texte adopté par le Sénat en première lecture

À l'origine, cet article rassemblait des dispositions disparates sur le droit de la consommation. À l'initiative de votre commission spéciale, le Sénat en avait supprimé trois :

- le plafonnement des frais de publicité à la charge du professionnel sanctionné par une amende administrative ;

- le report à la date de livraison du bien, de la possibilité d'exercer son droit de rétractation dans le cadre d'une vente à distance ;

- la suppression de l'amende pénale sanctionnant le défaut d'information de l'agent immobilier sur ses honoraires.

En séance publique, le Sénat avait adopté, sur l'avis favorable de la commission spéciale, un amendement de notre collègue Philippe Dallier excluant les contrats immobiliers du code de la consommation pour les faire relever du code de la construction et de l'habitation et fixant le délai de rétractation en la matière à quatorze jours.

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale n'a pas remis en cause la suppression du plafonnement des frais de publicité. En revanche, elle a rétabli, à l'initiative du Gouvernement, les deux autres dispositions supprimées par votre commission spéciale.

Elle a par ailleurs adopté deux autres amendements du Gouvernement.

Le premier fixe le délai de rétractation en matière de contrat immobilier à dix jours plutôt que quatorze afin de faire correspondre, compte tenu de leurs points de départ différents, la durée pendant laquelle cette rétractation peut s'exercer en droit de la consommation et en droit immobilier. Le même amendement procède à une coordination pour reconnaître aux agents de la DGCCRF les mêmes pouvoirs de contrôle sur ces contrats immobiliers rattachés au code de la construction et de l'habitation, que ceux qu'ils ont aujourd'hui à leur égard du fait de leur rattachement actuel au code de la consommation. Il étend aussi ces mêmes pouvoirs au contrôle de la rémunération des syndics de copropriété.

Le second amendement du Gouvernement adopté par les députés ajoute huit paragraphes au présent article, traitant chacun de divers sujets relatifs à la consommation : possibilité pour les agents de la DGCCRF de prélever et d'analyser des échantillons de produits, coordination sur le montant de certaines amendes rapporté au chiffre d'affaire annuel du contrevenant, obligation d'affichage en matière d'exploitation agricole, diverses dispositions sur les produits dangereux, l'usage de la langue française ou la présentation de produits non conformes à la réglementation dans les foires et salons.

III - La position de votre commission

Votre commission a tout d'abord rétabli les deux dispositions supprimées par l'Assemblée nationale en adoptant deux amendements (COM-288 et 289 ). S'agissant du report à la livraison du bien, de la possibilité d'exercer son droit de rétractation, votre rapporteur souligne la régression des droits du consommateur qu'engage un tel report. En effet, alors qu'aujourd'hui le consommateur peut se rétracter dès son achat jusqu'à quatorze jours après la livraison du bien, demain il ne pourrait plus le faire qu'à partir de la livraison jusqu'à quatorze jours après. Ceci signifie concrètement qu'il devra assumer les frais de réexpédition du colis pour faire valoir son droit.

Si les modifications apportées au dispositif proposé par notre collègue Philippe Dallier sont pertinentes, en revanche, votre commission a rejeté par l' amendement (COM-290 ) celles correspondant à la seconde modification introduite à l'initiative du Gouvernement En effet, cet inventaire disparate de diverses dispositions relatives à la consommation ne présente pas de lien direct avec une disposition du texte restant en discussion. Il n'est donc pas recevable au regard de la règle de l'entonnoir en nouvelle lecture.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 58 bis A (art. L. 225-94-1 du code de commerce) - Restriction des règles de cumul des mandats pour les dirigeants mandataires sociaux dans les grandes sociétés cotées

Objet : cet article vise à limiter à trois, au lieu de cinq, le nombre total de mandats sociaux qu'un directeur général, membre du directoire ou directeur général unique peut détenir dans les grandes sociétés cotées, lui permettant de détenir, outre son mandat de dirigeant, deux mandats d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance.

En première lecture, le Sénat avait approuvé l'objectif de cet article, qui consiste simplement à intégrer dans la loi les règles de cumul des mandats sociaux applicables aux dirigeants des sociétés cotées, telles qu'elles figurent déjà dans le code de gouvernement d'entreprise AFEP-MEDEF. Il en avait toutefois ajusté certains aspects, pour prendre en compte les mandats détenus au titre d'une participation dans d'autres sociétés ainsi que ceux détenus par une société dont l'objet est de prendre des participations, et en avait simplifié la rédaction, en supprimant en particulier le seuil de nombre de salariés pour le déclenchement de ces règles plus restrictives, seuil qui ne figure pas dans le code AFEP-MEDEF.

Sous réserve de la prise en compte uniquement des sociétés ayant pour objet de prendre des participations, l'Assemblée nationale a rétabli, en nouvelle lecture, à l'initiative du Gouvernement, le texte qu'elle avait adopté en première lecture.

Dans ces conditions, dans la continuité de sa position initiale, votre commission a adopté un amendement (COM-291) , sur la proposition de son rapporteur, visant à rétablir les améliorations adoptées en première lecture, sans remettre en cause l'objectif de cet article.

En effet, retenir un seuil de nombre de salariés pour l'application de cette règle plus restrictive conduirait, paradoxalement, à rester en retrait des règles fixées par le code AFEP-MEDEF, lequel prévoit la même limitation pour toutes les sociétés cotées, quelle que soit leur taille.

Retenir un seuil de nombre de salariés pour l'application de cette règle serait, en outre, une source de complexité et d'effets de seuil, alors que le seul critère de la cotation peut justifier de façon objective une règle plus restrictive, dans l'intérêt de la protection des épargnants, y compris pour des sociétés cotées de taille plus modeste. Votre rapporteur s'interroge sur la pertinence d'une disposition qui soumettrait les dirigeants d'une société de 4 900 salariés à une règle de cumul plus souple que ceux d'une société de 5 100 salariés.

Les règles prévues par le présent article ne concernent, en effet, que les sociétés cotées et non toutes les sociétés, de sorte que le développement externe des petites et moyennes entreprises (PME) et des entreprises de taille intermédiaire (ETI) ne s'en trouverait guère affectée. Celles de ces entreprises qui choisissent d'être cotées, pour pouvoir bénéficier de l'épargne publique et de l'apport de capitaux extérieurs, acceptent les nombreuses obligations qui en sont la contrepartie, dont la limitation du cumul des mandats, dans l'intérêt de la protection des épargnants. En tout état de cause, les mandats détenus dans des sociétés contrôlées, incluant en particulier les filiales 24 ( * ) , sont exonérés de ces règles restrictives de cumul et votre commission y a ajouté les mandats détenus au titre de participations 25 ( * ) .

S'agissant de l'assimilation des participations au régime des sociétés contrôlées au titre du cumul des mandats, votre commission ne l'a toutefois pas étendue aux mandataires non dirigeants, alors que le Sénat l'avait votée en première lecture.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 58 bis (art. L. 223-18, L. 912-1 et L. 952-2 du code de commerce) - Simplification des règles de transfert du siège d'une société à responsabilité limitée à l'initiative de son gérant

Objet : cet article vise à permettre que le transfert du siège d'une société à responsabilité limitée sur l'ensemble du territoire français puisse être décidé par le gérant puis ratifié ultérieurement par l'assemblée des associés.

En première lecture, le Sénat avait supprimé cet article, qui remettait en cause un accord intervenu il y a quelques mois en commission mixte paritaire, s'agissant de la simplification des règles de transfert du siège d'une société à responsabilité limitée (SARL), dans le cadre de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises.

Cette disposition avait été écartée au vu des risques d'effets pervers qu'elle ne manquerait pas de susciter, puisqu'elle consisterait à permettre au gérant d'une SARL de décider unilatéralement du transfert de son siège en tout point du territoire, cette décision devant être ultérieurement ratifiée par les associés puisqu'il s'agit d'une modification des statuts de la société. Une telle faculté ne saurait entrer dans les compétences de gestion d'un gérant, à la différence d'un transfert de siège dans le même département, et pourrait conduire à des abus en cas de conflit entre le gérant et les associés et donc à de nouveaux contentieux.

Au surplus, le Gouvernement n'avait pas souhaité revenir en séance, au Sénat, en première lecture, sur la suppression de cette disposition.

Toutefois, en nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a rétabli cette disposition sans modification, à l'initiative du Gouvernement.

Aussi, conformément à la position adoptée par le Sénat en première lecture, votre commission a adopté un amendement (COM-292) visant à supprimer l'article 58 bis du projet de loi.

Votre commission spéciale a supprimé cet article.

Article 58 quater (art. L. 232-25 du code de commerce) - Dispense de publication des comptes pour les petites entreprises et pour les sociétés coopératives agricoles

Objet : cet article vise à permettre aux sociétés entrant dans la catégorie des petites entreprises d'opter pour l'absence de publication de leur compte de résultat, sauf à l'égard des prêteurs et investisseurs, ainsi qu'à permettre aux sociétés coopératives agricoles d'opter, selon leur taille, pour l'absence de publication de leurs comptes ou de leur compte de résultat.

En première lecture, par cohérence avec le droit en vigueur et dans le respect du droit européen, le Sénat avait admis la possibilité, pour les petites entreprises, d'opter pour la confidentialité de leur compte de résultat, les micro-entreprises pouvant déjà opter pour la confidentialité de tous leurs comptes. Il avait complété l'article 58 quater du projet de loi par un dispositif analogue concernant les sociétés coopératives agricoles. En revanche, il avait supprimé la possibilité pour les prêteurs et investisseurs et leurs prestataires, dont les catégories seraient définies par arrêté, d'accéder aux comptes des entreprises ayant opté pour la confidentialité.

En effet, par l'ordonnance n° 2014-86 du 30 janvier 2014 allégeant les obligations comptables des micro-entreprises et petites entreprises, le Gouvernement a offert aux micro-entreprises la possibilité de demander que l'intégralité de leurs comptes annuels ne soit pas publiés au registre du commerce et des sociétés. Il serait donc contradictoire, un an et demi plus tard, de revenir sur cette faculté réclamée de longue date et de la vider en partie de sa substance, en permettant aux organismes financiers d'accéder librement aux comptes confidentiels. Seules les autorités administratives et judiciaires et la Banque de France doivent pouvoir accéder aux comptes non publiés. En tout état de cause, une entreprise souhaitant bénéficier d'un soutien financier devra à l'évidence fournir au prêteur ou à l'investisseur ses documents comptables.

Ainsi, la simple cohérence du législateur doit l'inviter à s'en tenir à la logique du texte adopté par le Sénat sur ce point, sauf à supprimer cette faculté d'opter pour la confidentialité des comptes, qui semble d'ailleurs peu utilisée aujourd'hui, ce que votre rapporteur ne désapprouverait pas. En tout état de cause, votre rapporteur invite le Gouvernement à la cohérence, en veillant à la stabilité des règles applicables aux entreprises.

En nouvelle lecture, outre l'adoption de précisions rédactionnelles et la confirmation du dispositif concernant les sociétés coopératives agricoles, l'Assemblée nationale a néanmoins rétabli l'accès aux comptes confidentiels des prêteurs et investisseurs. Aussi, conformément à la position adoptée par le Sénat en première lecture, votre commission a adopté un amendement (COM-294) , à l'initiative de son rapporteur, visant à supprimer cet accès.

Par ailleurs, sur proposition de son rapporteur, votre commission a également adopté un amendement (COM-293) de précision et de cohérence rédactionnelle au sein de l'article L. 232-25 du code de commerce, s'agissant de la faculté pour les micro-entreprises et les petites entreprises d'opter pour la confidentialité, à l'exception notamment de celles appartenant à un groupe de sociétés.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.


* 23 Ce rapport est consultable à l'adresse suivante :

http://www.economie.gouv.fr/remise-rapport-evaluation-dip.

* 24 Une société est la filiale d'une autre lorsque cette dernière détient plus de la moitié de son capital.

* 25 Une participation correspond à une détention de 10 à 50 % du capital.

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