II. UNE TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE À LA SINCÉRITÉ CONTESTABLE

À n'en pas douter, le présent projet de loi de finances ne porte pas le véritable budget de l'année 2017 . Ce dernier ne sera arrêté qu'à l'été prochain, à l'issue des élections présidentielle et législatives - quelle que soit la nouvelle majorité gouvernementale - dès lors que le budget proposé n'est nullement soutenable et appellera, à tout le moins, des ajustements significatifs en cours d'exercice afin de respecter les objectifs budgétaires fixés. À bien des égards, le projet de loi de finances soumis au Parlement constitue un texte élaboré dans une perspective électorale : il s'agit là d'un budget de campagne .

En effet, dans le projet de loi de finances pour l'année à venir, le Gouvernement cherche tout à la fois à donner des gages de son sérieux budgétaire , en s'appliquant à respecter l'objectif d'un retour du déficit public en deçà de 3 % du PIB, et à trouver des marges de manoeuvre en vue de « relâcher » les efforts en matière de dépenses ; à cet effet, celui-ci n'hésite pas, encore une fois, à renoncer à la parole donnée pour ce qui est des baisses de la fiscalité des entreprises devant intervenir en 2017 et à procéder à un report de celles-ci sur les prochaines années.

En dépit de ces « tours de passe-passe » budgétaires, le retour du déficit public sous le seuil de 3 % du PIB en 2017 n'est aucunement assuré , exposant la France à un risque de sanction en application du Pacte de stabilité et de croissance (PSC). En premier lieu, comme cela a déjà été mis en évidence, le projet de budget repose sur des hypothèses économiques qui s'illustrent par leur optimisme . En second lieu, les prévisions retenues en matière de dépenses présentent, elles aussi, une grande fragilité . Dans ces conditions, le présent rapport s'attache à estimer, autant que possible, la situation budgétaire qui serait observée, en 2017, en application du projet de loi de finances.

Tableau n° 10 : Principales données de la trajectoire pluriannuelle
des finances publiques

(en % du PIB)

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Solde effectif

- 3,5

- 3,3

- 2,7

- 2,0

- 1,2

- 0,6

Solde structurel

- 1,9

- 1,6

- 1,1

- 0,6

- 0,1

0,1

Ajustement structurel

0,4

0,3

0,5

0,5

0,5

0,2

Ratio de dépense publique*

55,5

55,0

54,6

53,8

52,8

51,8

Ratio de prélèvements obligatoires*

44,7

44,5

44,5

44,3

44,2

43,8

Dette publique

96,2

96,1

96,0

95,1

92,9

90,1

Source : commission des finances du Sénat (à partir du rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2017)

A. LA POURSUITE SANS FIN DU RETOUR DU DÉFICIT PUBLIC EN DEÇÀ DE 3 % DU PIB...

Le Gouvernement annonce, au titre de l'exercice 2017, un retour du déficit public en-dessous de 3 % du PIB . Néanmoins, il convient de rappeler que l'atteinte de cet objectif, poursuivie tout au long du quinquennat, a été maintes fois reportée par le Gouvernement.

En effet, au lendemain des élections présidentielle et législatives de 2012, dans le cadre de la programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, l'exécutif annonçait un retour du déficit public sous le seuil de 3 % du PIB dès 2013 , un engagement de la décrue du poids de la dette publique dans la richesse nationale l'année suivante, ainsi que l'équilibre structurel des comptes publics à compter de 2016. Toutefois, incapable de respecter ses engagements, certes desservi par une conjoncture moins favorable qu'anticipé, le Gouvernement a été contraint de demander aux autorités de l'Union européenne un premier report du délai de correction du déficit excessif en 2013, puis un second en 2015 .

Dès lors qu'il ne saurait être question d'un troisième report du délai de correction, le Gouvernement affiche comme objectif central pour l'exercice 2017 le retour du déficit public en deçà de 3 % du PIB . Seulement, il n'y parvient - sur le papier - qu'en raison du renoncement aux baisses de la fiscalité initialement annoncées pour 2017 et au report des charges y afférent sur les années ultérieures. Par ailleurs, la trajectoire proposée par le Gouvernement ne répond pas aux autres exigences découlant du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) en matière de réduction du solde structurel. Aussi la France serait-elle immanquablement exposée à un risque de sanction si le déficit public effectif n'était pas ramené en-dessous de 3 % du PIB en 2017 - risque significatif compte tenu de l'optimisme dont fait preuve le Gouvernement dans la définition des hypothèses retenues en matière économique et d'évolution des dépenses publiques.

Tableau n° 11 : Les trajectoires successives des finances publiques

(en % du PIB)

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Solde public

LPFP 2012-2017

- 1,3

- 0,6

- 0,3

LPFP 2014-2019

- 4,1

- 3,6

- 2,7

- 1,7

- 0,7

PStab. 2016-2019

- 3,5

- 3,3

- 2,7

- 1,9

- 1,2

PLF 2017

- 3,5

- 3,3

- 2,7

- 2,0

- 1,2

- 0,6

Solde structurel

LPFP 2012-2017

- 0,8

- 0,5

- 0,3

LPFP 2014-2019

- 2,1

- 1,8

- 1,3

- 0,8

- 0,2

PStab. 2016-2019

- 1,6

- 1,3

- 0,8

- 0,3

0,0

PLF 2017

- 1,9

- 1,6

- 1,1

- 0,6

- 0,1

0,1

Dette publique

LPFP 2012-2017

88,5

85,8

82,6

LPFP 2014-2019

97,1

97,7

97,0

95,1

92,4

PStab. 2016-2019

95,7

96,2

96,5

95,4

93,3

PLF 2017

96,2

96,1

96,0

95,1

92,9

90,1

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents cités)

1. Un respect incertain des engagements européens de la France en termes de déficit public effectif...

Comme cela a été indiqué, le Gouvernement a été contraint de demander aux autorités européennes un nouveau report du délai de correction du déficit excessif en 2015 , accordé par une recommandation du Conseil de l'Union européenne du 10 mars 2015.

En vertu du droit de l'Union européenne, un report du délai de correction du déficit excessif peut être accordé, d'une part, si l'État membre concerné a engagé une action suivie d'effets afin de corriger son déficit excessif et, d'autre part, si des évènements négatifs et inattendus ayant des conséquences défavorables majeures pour les finances publiques se produisent après l'adoption de la première recommandation. Concernant la France, il a été considéré, en premier lieu, que « les éléments de preuve disponibles ne permett[aient] pas de conclure à l'absence d'action suivie d'effets ». En second lieu, si les prévisions économiques pour 2013 publiées par la Commission européenne en mai 2013 se sont révélées inférieures au réalisé, tel n'est pas le cas pour ce qui est de l'exercice 2014. En effet, la Commission prévoyait une croissance de 1,1 % et une inflation de 1,7 % en 2014 ; cependant, les données publiées en février 2015 ont fait apparaître, pour 2014, une progression du PIB de 0,4 % et une inflation de 0,6 %.

Tableau n° 12 : Comparaison entre les prévisions macroéconomiques de la Commission européenne et le réalisé

(évolution en %)

Prévisions de mai 2013 (1)

Prévisions de février 2015 (2)

2013

2014

2013

2014

PIB

- 0,1

1,1

0,3

0,4

Prix à la consommation

1,2

1,7

1,0

0,6

(1) Commission européenne, « European Economic Forecast. Spring 2013 », European Economy 2/2013 , mai 2013.

(2) Commission européenne, « European Economic Forecast. Winter 2015 », European Economy 1/2015 , fév. 2015.

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents cités)

Si les deux conditions prévues par le droit de l'Union européenne pour l'octroi d'un report du délai de correction du déficit excessif paraissaient globalement respectées, il semble que la France a, avant tout, bénéficié des principes figurant dans la communication de la Commission du 13 janvier 2015 , intitulée « Utiliser au mieux la flexibilité offerte par les règles existantes du pacte de stabilité et de croissance » 52 ( * ) ; la recommandation du Conseil du 10 mars 2015 relève, à ce titre, que « les informations fournies et les engagements pris par les autorités françaises en ce qui concerne les réformes structurelles vont dans la bonne direction pour être considérés comme un facteur pertinent permettant à la France de bénéficier d'une prolongation de plus d'un an du délai pour la correction du déficit excessif ».

La recommandation du Conseil de l'Union européenne du 10 mars 2015 a accompagné le report du délai de correction d'objectifs de déficit effectif et d'amélioration du solde structurel pour les années 2015 à 2017 . Ainsi, selon la recommandation, le déficit effectif devrait être de 4 % en 2015, de 3,4 % en 2016 et de 2,8 % en 2017. L'amélioration annuelle sous-jacente du solde structurel serait, quant à elle, de 0,5 % du PIB en 2015, de 0,8 % du PIB en 2016 et de 0,9 % du PIB en 2017.

Tableau n° 13 : La recommandation du Conseil de l'Union européenne
du 10 mars 2015

(en % du PIB)

2015

2016

2017

Objectifs de solde public effectif

4,0

3,4

2,8

Objectifs d'amélioration du solde structurel

0,5

0,8

0,9

Source : commission des finances du Sénat (d'après la recommandation du Conseil de l'Union européenne du 10 mars 2015 visant à ce qu'il soit mis fin à la situation de déficit public excessif en France)

En somme, si le Gouvernement, dans le cadre du présent projet de loi de finances, indique vouloir ramener le déficit public effectif en deçà de 3 % du PIB, il apparaît que les objectifs de réduction du solde structurel ne sont, quant à eux, pas respectés - ainsi que cela est mis en évidence infra .

Selon toute vraisemblance, comme pour l'exercice 2016, la stratégie budgétaire gouvernementale consiste à faire reposer le respect du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) sur l'amélioration du déficit effectif . En effet, les autorités européennes ne sont amenées à examiner les ajustements structurels réalisés que si les cibles de déficit nominal n'ont pas été respectées. Toutefois, une telle stratégie présente un réel danger ; à supposer que le déficit public ne soit pas ramené sous le seuil des 3 % du PIB en 2017, notre pays ne serait pas en mesure de présenter les ajustements structurels demandés par le Conseil de l'Union européenne et s'exposerait à des sanctions.

Tableau n° 14 : La trajectoire de solde public effectif

(en % du PIB)

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Solde public

LPFP 2012-2017

- 1,3

- 0,6

- 0,3

LPFP 2014-2019

- 4,1

- 3,6

- 2,7

- 1,7

- 0,7

PStab. 2016-2019

- 3,5

- 3,3

- 2,7

- 1,9

- 1,2

PLF 2017

- 3,5

- 3,3

- 2,7

- 2,0

- 1,2

- 0,6

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents cités)

Par suite, l'héritage de la législature qui s'achève devrait être très lourd . Alors que le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a considéré « comme incertain le retour en 2017 du déficit nominal sous le seuil de 3 points du PIB » 53 ( * ) - que cela soit en raison des risques liés aux prévisions de recettes du fait des hypothèses économiques favorables ou du « caractère irréaliste » 54 ( * ) de certaines économies annoncées -, la majorité gouvernementale qui résultera des élections de 2017 devra, d'une part, adopter les mesures qui s'imposent pour redresser les comptes publics et, d'autre part, faire face à un risque de sanction en application du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) , dans un contexte marqué par une lassitude certaine de nos partenaires européens face à l'incapacité de notre pays à respecter ses engagements budgétaires.

À cet égard, il convient de rappeler qu'en 2015, la France comptait parmi les quatre derniers États de la zone euro à afficher un déficit public supérieur à 3 % du PIB , aux côtés de la Grèce, de l'Espagne et du Portugal. À en croire les dernières prévisions de la Commission européenne, il devrait en aller de même en 2016 voire, possiblement, en 2017, cette dernière anticipant un déficit public effectif de respectivement 3,3 % et 2,9 % pour ces deux années en France - mais de 3,1 % du PIB en 2018.

Graphique n° 15 : Le solde public dans la zone euro en 2014 et 2015

(en % du PIB)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données d'Eurostat)

2. ...et un non-respect certain des objectifs de solde structurel

Si certains peuvent encore accorder le bénéfice du doute au Gouvernement pour ce qui est du retour du déficit public en deçà de 3 % du PIB en 2017, il n'existe aucune incertitude quant au fait qu'en vertu du présent projet de loi de finances, les objectifs de réduction du déficit structurel découlant des engagements européens de la France ne seront pas atteints en 2017 .

Ainsi que cela a été indiqué précédemment, la recommandation du Conseil européen du 10 mars 2015 prévoyait une amélioration du solde structurel de 0,8 point de PIB en 2016 et de 0,9 point de PIB en 2017. Or, pour ces deux années, le Gouvernement anticipe un ajustement structurel de respectivement 0,3 et 0,5 point de PIB .

Au titre de l'exercice 2017, le scénario gouvernemental prévoit donc le niveau minimal de l'ajustement structurel requis par le Pacte de stabilité et de croissance pour les États soumis à la procédure de déficit excessif. Pour autant, comme l'a relevé à plusieurs reprises votre rapporteur général, en particulier dans un récent rapport d'information 55 ( * ) , le Gouvernement a fait le choix en avril 2015 - en contradiction avec la lettre et l'esprit de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques 56 ( * ) - de réviser à la hausse ses hypothèses de croissance potentielle lui, permettant, ainsi que l'explicite le rapport précité, d'« amplifier » les ajustements structurels affichés .

Tableau n° 16 : Consensus de la croissance potentielle
de la commission des finances du Sénat (octobre 2016)

(évolution, en %)

Prévisionnistes

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

Moyenne

2015-2021

Axa AM

1,2

1,4

1,4

1,5

1,5

1,5

1,6

1,4

BIPE

1,4

1,4

1,4

1,4

1,4

1,4

1,4

1,4

BNP Paribas

0,8

1,0

1,1

1,1

1,2

1,2

1,2

1,1

Citi

1,0

1,1

1,2

1,3

1,4

1,5

1,6

1,3

Coe-Rexecode

1,0

1,0

1,0

1,0

1,0

1,0

-

1,0

Crédit Agricole

1,0

1,0

1,1

1,3

1,3

1,5

1,5

1,2

Euler Hermes

1,5

1,5

1,5

1,5

1,5

1,5

1,5

1,5

Exane

1,1

1,1

1,1

1,1

1,1

1,1

1,1

1,1

HSBC

-

1,0

1,2

1,2

1,2

1,3

1,3

1,2

Natixis

0,9

0,8

0,8

0,7

0,5

0,5

0,4

0,7

OFCE

1,3

1,3

1,3

1,3

1,3

1,3

1,3

1,3

Oxford Economics

1,3

1,4

1,4

1,3

1,3

1,3

1,3

1,3

PAIR Conseil

1,0

1,1

1,2

1,3

1,4

1,5

1,5

1,3

1,1

1,2

1,4

1,5

1,6

1,7

1,7

1,5

CONSENSUS (moy.)

1,1

1,2

1,2

1,3

1,3

1,3

1,3

1,2

Minimum

0,8

0,8

0,8

0,7

0,5

0,5

0,4

0,7

Maximum

1,5

1,5

1,5

1,5

1,6

1,7

1,7

1,5

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données transmises par les instituts cités)

À cet égard, il convient de relever que les hypothèses de croissance potentielle retenues par le Gouvernement sont nettement supérieures à celles du consensus de la croissance potentielle établi par la commission des finances (voir tableau ci-avant).

Alors que le Gouvernement estime la croissance potentielle à 1,4 % en moyenne au cours de la période 2015-2017, le consensus s'établit aux alentours de 1,2 % . Si cet écart peut paraître limité, votre rapporteur général a pu montrer que retenir la trajectoire de croissance potentielle suggérée par le consensus impliquait, pour un ajustement structurel « facial » inchangé, la mise en oeuvre une politique budgétaire significativement plus exigeante 57 ( * )
- ce que, de toute évidence, le Gouvernement se refusait à faire.

Quoi qu'il en soit, la révision à la hausse, par le Gouvernement, des hypothèses de croissance potentielle vient considérablement « gêner » le contrôle qui peut être exercé sur le respect des objectifs budgétaires , en particulier de la trajectoire arrêtée dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 58 ( * ) , construite sur la base d'hypothèses différentes.

Graphique n° 17 : Comparaison des trajectoires de solde et d'ajustement structurels de la LPFP 2014-2019 et du projet de loi de finances pour 2017

(en points de PIB)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents cités)

Ainsi, selon l'article liminaire du projet de loi de finances, le solde structurel s'élèverait à - 1,6 % du PIB en 2016 et à - 1,1 % du PIB en 2017. Seulement, comme l'indique le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), « calculé avec les hypothèses de croissance de la LPFP 2014-2019, le déficit structurel est estimé à - 1,7 point de PIB en 2016 et - 1,3 point de PIB en 2017. Les objectifs figurant dans la LPFP étaient respectivement de - 1,8 point et - 1,3 point » 59 ( * ) . Si le présent projet de loi de finances respecte la trajectoire de solde structurel de la loi de programmation, le HCFP rappelle qu'il « avait estimé en septembre 2014 que le projet de loi de programmation n'était pas cohérent avec les engagements européens de la France, dans la mesure où il ne prévoyait que des ajustements structurels faibles pour les premières années » 60 ( * ) .

C'est la raison pour laquelle le Haut Conseil a souhaité également se référer aux programmes de stabilité, qui « traduisent mieux les engagements européens de la France » et « constituent une meilleure référence que la loi de programmation de 2014 » 61 ( * ) .

Graphique n° 18 : Comparaison des trajectoires de solde et d'ajustement structurels du programme de stabilité et du projet de loi de finances pour 2017

(en points de PIB)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des documents cités)

Or, il apparaît que le solde structurel serait plus élevé en 2017 que l'objectif du programme de stabilité d'avril 2016 - dont il faut reconnaître qu'il constitue, dorénavant, une base de référence plus pertinente que la dernière loi de programmation des finances publiques, d'autant qu'il repose sur les mêmes hypothèses de croissance potentielle que le présent projet de loi de finances.

En 2017, selon les prévisions gouvernementales, le solde structurel serait supérieur de 0,3 point de PIB à la cible arrêtée dans le cadre du dernier programme de stabilité . Certes, cet écart résulte de la révision de l'estimation de la croissance du PIB pour 2014 et 2015 par l'Insee, comme l'a montré votre rapporteur général lors de l'examen du projet de loi de règlement pour 2015 62 ( * ) ; pour autant, le Haut Conseil des finances publiques a noté « qu'il n'[avait] pas donné lieu à l'ajustement permettant de remettre le déficit structurel sur la trajectoire du programme de stabilité » 63 ( * ) . Même, l'ajustement structurel au cours de l'année 2016 s'élèverait à 0,3 point de PIB contre une cible de 0,4 point de PIB définie en avril dernier.

Surtout, force est de constater que le Gouvernement a modifié, et ce de manière substantielle la composition de l'ajustement structurel attendu en 2016 et 2017 .

Tableau n° 19 : Facteurs d'évolution du solde structurel
des administrations publiques en 2016 et 2017

(en points de PIB)

Pstab. avril 2016

PLF pour 2017

2016

2017

2016

2017

Ajustement structurel, dont :

0,4

0,5

0,3

0,5

Effort structurel

0,5

0,3

0,4

0,4

Mesures nouvelles en prélèvements obligatoires

- 0,2

- 0,3

- 0,2

0,0

Effort en dépenses

0,7

0,6

0,5

0,4

Composante non discrétionnaire

- 0,2

0,0

- 0,1

0,0

Clef en crédits d'impôt

0,0

0,1

0,0

0,1

Source : commission des finances du Sénat (à partir du projet de loi de finances pour 2017 et du programme de stabilité pour les années 2016 à 2019)

Comme le fait apparaître le tableau ci-avant, l'objectif d'effort en dépenses pour l'année 2016 a été réduit de 0,2 point de PIB entre le programme de stabilité et le projet de loi de finances , préfigurant, sans doute, le relâchement des efforts en dépenses annoncé pour l'exercice suivant. En effet, concernant 2017, l'effort en dépenses prévu est diminué de 0,2 point de PIB également ; toutefois, pour maintenir inchangé le niveau de l'ajustement structurel affiché - et pour être en mesure de ramener le déficit effectif en deçà de 3 % du PIB -, les nouvelles mesures en prélèvements obligatoires sont révisées de - 0,3 point de PIB à 0 . Concrètement, cela signifie que les baisses d'impôt annoncées pour 2017 sont annulées dans leurs effets ; ainsi que le met en évidence votre rapporteur général infra dans le présent rapport, le Gouvernement a, opportunément, modifié la nature des mesures fiscales en faveur des entreprises prévues en 2017 de manière à ce que ces dernières ne présentent des incidences budgétaires qu'au cours des exercices ultérieurs.

Par ailleurs, l'impact sur le solde public de la comptabilisation des crédits d'impôt serait favorable - la « clef en crédits d'impôt » contribuant à hauteur de 0,1 point à l'ajustement structurel. Le Gouvernement explique ce phénomène par le fait que les décaissements des crédits d'impôt se rapprocheraient de leur coût en termes de créances fiscales : « cela est notamment lié au fait que 2017 constitue la première année de restitution automatique des créances au titre de la masse salariale 2013 non imputée dans les trois années précédentes » 64 ( * ) . Enfin, la « composante non discrétionnaire » aurait une incidence nulle sur le solde public ; en effet, les mesures ponctuelles et temporaires représenteraient un coût de 1,4 milliard d'euros en 2017 , contre 2,4 milliards d'euros en 2016, en lien avec les moindres recettes inhérentes aux contentieux fiscaux « OPCVM » (0,8 milliard d'euros), « De Ruyter » (0,1 milliard d'euros), et « Stéria » (0,3 milliard d'euros), auxquels viennent s'ajouter les intérêts des contentieux (0,2 milliard d'euros).


* 52 Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, à la Banque centrale européenne, au Comité économique et social européen, au Comité des régions et à la Banque européenne d'investissement du 13 janvier 2015, « Utiliser au mieux la flexibilité offerte par les règles du pacte de stabilité et croissance », COM(2015) 12 final.

* 53 Avis du Haut Conseil des finances publiques n° HCFP-2016-3 du 24 septembre 2016, op. cit. , p. 14.

* 54 Id.

* 55 Rapport d'information (n° 764, 2015-2016) d'Albéric de Montgolfier sur les estimations de la croissance potentielle de la France en vue des prochaines programmations pluriannuelles des finances publiques, 6 juillet 2016.

* 56 Loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

* 57 Rapport d'information (n° 764, 2015-2016), op. cit. , p. 30-33.

* 58 Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

* 59 Avis du Haut Conseil des finances publiques n° HCFP-2016-3 du 24 septembre 2016, op. cit. , p. 8.

* 60 Ibid. , p. 9.

* 61 Id.

* 62 Rapport (n° 759, 2015-2016) d'Albéric de Montgolfier sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2015 fait au nom de la commission des finances du Sénat, 6 juillet 2016.

* 63 Avis du Haut Conseil des finances publiques n° HCFP-2016-3 du 24 septembre 2016, op. cit. , p. 9.

* 64 Rapport économique, social et financier (RESF), op. cit. , p. 66.

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