EXAMEN EN COMMISSION

EXAMEN EN COMMISSION

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Réunie le mardi 8 février 2017, sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission procède à l'examen en nouvelle lecture du rapport sur la proposition de loi relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse.

M. Alain Milon , président . - Nous examinons, en nouvelle lecture, le rapport de Mme Stéphanie Riocreux sur la proposition de loi relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse.

Mme Stéphanie Riocreux , rapporteure . - Comme vous le savez, la commission mixte paritaire (CMP) réunie à l'Assemblée nationale le 24 janvier dernier n'a pas abouti. Je regrette qu'elle ne nous ait pas permis de rechercher le compromis, l'équilibre qui aurait valorisé les travaux de nos deux assemblées pour répondre au problème grave que rencontrent nos concitoyens, avec l'évolution du délit d'entrave à l'IVG via le numérique et les nouvelles technologies.

La navette parlementaire a donc repris son cours et les députés ont à nouveau examiné la proposition de loi en commission le 25 janvier dernier puis en séance le lendemain. Nous en sommes désormais saisis en nouvelle lecture.

Le texte qu'a adopté l'Assemblée nationale a pris en compte plusieurs des apports du Sénat. Il vise désormais l'ensemble des personnes cherchant à s'informer sur l'IVG, et pas uniquement les femmes venant s'informer dans les centres habilités. L'absence de cette mention nous était apparue comme une véritable limite par rapport à l'objectif - garantir que l'accès à l'information, reconnu par la loi comme un droit, soit respecté et ne soit d'aucune manière entravé. Les députés ont par ailleurs procédé aux coordinations que nous avions envisagées pour l'application du texte en outre-mer.

Le texte de l'Assemblée nationale vise explicitement l'entrave « par voie électronique ou en ligne » mais il rétablit des éléments de caractérisation du délit que nous avions jugés juridiquement inopportuns, voire contreproductifs lorsqu'ils précisent « notamment par la diffusion ou la transmission d'allégations ou d'indications de nature à induire intentionnellement en erreur, dans un but dissuasif, sur les caractéristiques ou les conséquences médicales d'une interruption volontaire de grossesse. » Le texte adopté par le Sénat en première lecture avait résolu ces difficultés tout en préservant l'équilibre du droit actuel. Il permettait en effet d'atteindre l'objectif de la proposition de loi en ne changeant qu'a minima le droit en vigueur. C'est pourquoi nous l'avions adopté en commission des affaires sociales.

Lors de la séance publique, les sénateurs dans une large majorité nous avait suivis, pour adopter un texte dont la qualité juridique ne faisait plus débat. Nous avions apporté une réponse proportionnée à une véritable question de société afin de garantir l'effectivité d'un droit qu'aucun parmi nous ne conteste, celui de recourir à une IVG. La cohérence me semble donc d'adopter à nouveau le texte du Sénat. C'est l'objet de l'amendement COM-1 que je vous soumettrai.

Mme Catherine Génisson . - C'est un excellent rapport ! Le groupe socialiste votera l'amendement de notre rapporteure qui reprend fidèlement ce que nous avions voté en commission et en séance en première lecture.

Mme Françoise Gatel . - Je remercie la rapporteure pour ses efforts pour parvenir à un accord en CMP, même s'il est vite apparu qu'il n'y avait pas de volonté d'aboutir...Ce texte met en évidence l'insuffisance de la politique de prévention et d'information du Gouvernement. Je suis surprise qu'il s'étonne que certains sites internet soient plus efficaces que le sien ! Il conviendrait plutôt d'améliorer le site internet officiel ! Ce texte, qui crée un délit pénal, contredit les principes de liberté d'expression et de proportionnalité des délits et des peines reconnus par notre Constitution et le droit européen. Je ne soutiens pas certains des sites visés qui ont une pratique équivoque. Comme centriste, je m'inscris dans la ligne de la loi Veil. Toutefois, avec ce texte, le législateur crée un délit pénal pour condamner l'expression d'une opinion qu'il juge inadmissible. C'est un précédent dangereux qui ouvre la voie à un risque de dérives ! Je persiste à croire qu'une sanction civile serait plus adaptée.

Mme Catherine Deroche . - Nous voici revenus à la case départ. Pas plus que les centristes, le groupe LR n'entend revenir sur la loi Veil ni sur le droit à l'IVG. L'enjeu est ici la liberté d'expression. Ni le texte de l'Assemblée nationale, ni celui proposé par la rapporteure, quoique meilleur, ne sont satisfaisants, comme l'avait montré M. Mercier, rapporteur de la commission des lois. Nous ne les voterons pas.

M. Gérard Roche . - Nous avions eu un débat difficile en séance. Il se pose dans les mêmes termes aujourd'hui. Nous avions soutenu l'amendement de compromis de Mme Gatel, qui créait une sanction civile. Il a été rejeté. Mme Jouanno avait déposé un amendement puis l'a retiré. Finalement beaucoup d'entre nous avions voté la proposition de la rapporteure. Nous nous retrouvons au point de départ. Ce sujet est important sur le plan éthique et mérite le débat. Je pense donc que nous serons opposés à une question préalable.

Mme Stéphanie Riocreux , rapporteure . - Pour répondre à Mme Gatel, je renvoie au rapport de première lecture qui expose les actions de prévention menées par le Gouvernement et soulignées par le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes. Il faut bien sûr poursuivre dans cette voie. La rédaction adoptée par le Sénat en première lecture répond aux exigences constitutionnelles et au droit européen car elle préserve l'équilibre actuel du droit et ne change pas la sanction pénale qui existe déjà dans le code.

EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE

Mme Stéphanie Riocreux , rapporteure . - L'amendement COM-1 rétablit le texte que le Sénat avait adopté en première lecture tout en prévoyant les coordinations nécessaires pour son application en outre-mer.

Mme Catherine Deroche . - Le groupe Les Républicains votera contre car aucun des deux textes ne nous paraît satisfaisant.

Mme Catherine Génisson . - Il est à regretter que nous soyons en période électorale ! Votre position est contraire à celle que vous avez prise en première lecture.

M. Jean-Pierre Godefroy . - Je me rallie à la position de la rapporteure même si, au regard de la position du groupe Les Républicains, j'aurais plutôt envie de voter le texte de l'Assemblée nationale...

Mme Laurence Cohen . - Le groupe communiste suivra la rapporteure qui a cherché à rassembler. Le texte de l'Assemblée nationale est plus conforme à nos positions, mais le Sénat s'était mis d'accord : nous voterons donc cet amendement qui reprend la rédaction précédemment approuvée. Nous ne pouvons que regretter l'absence d'unanimité.

L'amendement COM-1  n'est pas adopté.

Mme Stéphanie Riocreux , rapporteure . - Je respecte ce vote même si je ne le comprends pas. L'amendement est conforme à ce que nous avions voté en commission puis en séance en première lecture.

M. Alain Milon , président . - On pouvait alors espérer que l'Assemblée nationale écouterait les remarques du Sénat mais elle s'y est refusée en CMP. Inutile de persévérer dans un combat perdu d'avance !

L'article unique de la proposition de loi n'est pas adopté.

M. Alain Milon , président . - Nous examinerons donc en séance publique, le 14 février, le texte de l'Assemblée nationale.

EXAMEN DE L'AMENDEMENT

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article unique

Mme RIOCREUX

1

Rétablissement du texte adopté par le Sénat en première lecture et coordinations pour son application outre-mer

Rejeté

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