Rapport n° 683 (2018-2019) de Mme Agnès CANAYER , fait au nom de la commission des lois, déposé le 18 juillet 2019

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N° 683

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 juillet 2019

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi , MODIFIÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , visant à adapter l' organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires ,

Par Mme Agnès CANAYER,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Bas , président ; MM. François-Noël Buffet, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Di Folco, MM. Jacques Bigot, André Reichardt, Mme Sophie Joissains, M. Arnaud de Belenet, Mme Nathalie Delattre, MM. Pierre-Yves Collombat, Alain Marc , vice-présidents ; M. Christophe-André Frassa, Mme Laurence Harribey, M. Loïc Hervé, Mme Marie Mercier , secrétaires ; Mme Esther Benbassa, MM. François Bonhomme, Philippe Bonnecarrère, Mmes Agnès Canayer, Maryse Carrère, Josiane Costes, MM. Mathieu Darnaud, Marc-Philippe Daubresse, Mme Jacky Deromedi, MM. Yves Détraigne, Jérôme Durain, Mme Jacqueline Eustache-Brinio, MM. Jean-Luc Fichet, Pierre Frogier, Mmes Françoise Gatel, Marie-Pierre de la Gontrie, M. François Grosdidier, Mme Muriel Jourda, MM. Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Jean-Yves Leconte, Henri Leroy, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Jean Louis Masson, Thani Mohamed Soilihi, Alain Richard, Vincent Segouin, Simon Sutour, Mmes Lana Tetuanui, Claudine Thomas, Catherine Troendlé, M. Dany Wattebled .

Voir les numéros :

Première lecture : 503 (2017-2018), 179 , 180 et T.A. 35 (2018-2019)

Deuxième lecture : 665 et 684 (2018-2019)

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

Première lecture : 1491 , 2102 , 1736 , 2100 et T.A. 316

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le jeudi 18 juillet 2019 , sous la présidence de
M. Philippe Bas , la commission des lois a examiné le rapport de Mme Agnès Canayer et établi son texte sur la proposition de loi n° 503 (2017-2018), modifiée par l'Assemblée nationale en première lecture, visant à adapter l' organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires , présentée par Mme Françoise Gatel et plusieurs de ses collègues.

Les modifications apportées au texte par l'Assemblée nationale se sont révélées limitées, ne remettant pas en cause ses principaux objectifs.

Malgré quelques réserves ponctuelles, votre commission a estimé que le texte soumis à son examen constituait un excellent compromis . Elle n'a donc pas souhaité le modifier, car certaines dispositions doivent entrer en vigueur sans plus tarder pour s'appliquer lors des prochaines élections municipales, qui se tiendront en mars 2020.

Dans ces conditions, la commission a adopté la proposition de loi sans modification .

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Madame, Monsieur,

C'est un motif de grande satisfaction que de voir une proposition de loi d'initiative sénatoriale, remarquablement novatrice et utile à nos territoires , parvenir après un peu plus d'un an au terme de son examen parlementaire.

La proposition de loi visant à adapter l'organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires , déposée par notre collègue Françoise Gatel le 24 mai 2018, a été adoptée par le Sénat, dans une rédaction enrichie mais conforme à son esprit initial, le 11 décembre dernier.

Alors que le développement des communes nouvelles apparaît comme une voie prometteuse pour redynamiser l'administration communale , cet échelon de proximité indispensable à la qualité du service public comme à la vitalité de la démocratie locale, ce texte a d'abord pour objet de faciliter leur fonctionnement au cours de leurs premières années d'existence, en aménageant une progression plus graduelle vers le droit commun applicable aux communes. C'est ainsi que l' article 1 er tend à relever l'effectif du conseil municipal d'une commune nouvelle après son premier renouvellement, pour éviter une chute trop brusque du nombre de ses conseillers municipaux. L' article 3 vise à déroger au principe de complétude du conseil municipal pour la première élection du maire et des adjoints, et à garantir que le renouvellement anticipé du conseil municipal d'une commune nouvelle n'a pas pour effet d'accélérer le retour à sa composition de droit commun. Dans le même esprit, l' article 6 a pour objet de lisser dans le temps certains effets de seuil auxquels sont exposées les communes nouvelles en raison de la population qu'elles regroupent.

Le régime des communes nouvelles défini par le législateur en 2010 a défini un juste équilibre entre la création d'une collectivité territoriale nouvelle à part entière et la préservation de l'identité des communes historiques , grâce à l'institution facultative de « communes déléguées » . Ce modèle ayant fait ses preuves, l' article 9 de la proposition de loi, introduit par le Sénat en première lecture par l'adoption d'un amendement de notre collègue Martine Berthet, prévoit que, dans les communes nouvelles créées depuis 2010 et ayant englobé une ou plusieurs communes nouvelles créées sous le régime de la loi « Marcellin » de 1971 1 ( * ) , des communes déléguées puissent être recréées, dans un délai d'un an, sur le territoire des anciennes communes « associées ». Pour plus de souplesse, les articles 7 et 10 , introduits à l'initiative de notre collègue Hervé Maurey, ont pour objet d'autoriser le conseil municipal d'une commune nouvelle à supprimer une partie seulement des communes déléguées ou des annexes de la mairie qui leur sont affectées. L' article 11 , issu d'un amendement de notre collègue Olivier Paccaud, prévoit pour sa part que le conseil municipal d'une commune nouvelle puisse, par dérogation, se réunir non pas à la maison commune, mais dans une annexe de la mairie, notamment au « siège » d'une commune déléguée.

Enfin, et c'est là l'une des principales innovations du texte, il est prévu à l' article 4 qu'une commune nouvelle issue de la fusion de toutes les communes membres d'un ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre soit dispensée de l'obligation de se rattacher à un autre EPCI à fiscalité propre, pour constituer ce qu'il est désormais convenu d'appeler une « commune-communauté » . C'est une mesure de bon sens, car une telle commune nouvelle a par définition la taille suffisante pour exercer elle-même les compétences ordinairement transférées au niveau intercommunal ; par hypothèse, son périmètre est également censé être adapté à la carte des bassins de vie et des unités urbaines, cohérent avec les autres échelons de l'action publique et suffisamment large pour garantir la solidarité financière entre des territoires d'inégale richesse 2 ( * ) .

Lors de son examen en première lecture par l'Assemblée nationale , en commission le 3 juillet dernier, puis en séance publique le 10 juillet, la proposition de loi n'a connu que des évolutions limitées, qui ne remettent pas en cause ses principaux objectifs . Elles seront examinées en détail dans la suite de ce rapport.

Malgré quelques réserves ponctuelles, votre commission a estimé que le texte soumis à son examen constituait un excellent compromis . Elle n'a donc pas souhaité le modifier, car certaines dispositions doivent entrer en vigueur sans plus tarder pour s'appliquer lors des prochaines élections municipales, qui se tiendront en mars 2020 .

*

* *

Au bénéfice de ces observations, votre commission a adopté la proposition de loi sans modification .

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er
(art. L. 2113-8 du code général des collectivités territoriales,
art. L. 290-2 du code électoral)
Relèvement de l'effectif transitoire du conseil municipal
des communes nouvelles

L'article 1 er de la proposition de loi tend à augmenter l'effectif du conseil municipal entre le premier et le deuxième renouvellement suivant la création d'une commune nouvelle, afin que le retour au droit commun soit progressif et les effets de seuil diminués.

Lors de sa création, une commune nouvelle dispose de deux possibilités quant à la composition de son conseil municipal . Celui-ci peut être composé :

- soit de l'ensemble des membres en exercice des conseils municipaux des anciennes communes (1° du I de l'article L. 2113-7 du code général des collectivités territoriales) ;

- soit d'un nombre de sièges répartis entre les communes fusionnées en application de la représentation proportionnelle au plus fort reste des populations municipales. Cette répartition s'effectue en prenant pour base de calcul un effectif de 69 sièges (2° du I du même article).

Lors du premier renouvellement suivant la création de la commune nouvelle, l'article L. 2113-8 du code général des collectivités territoriales prévoit que le conseil municipal comporte un nombre de membres égal à celui prévu pour une commune appartenant à la strate démographique immédiatement supérieure.

L'article 1 er tend à adapter l'effectif du conseil municipal entre le premier et le deuxième renouvellement suivant la création d'une commune nouvelle . Dans sa rédaction adoptée par le Sénat, il en définissait le minimum, égal au tiers de l'effectif du conseil municipal préalablement en exercice. Le Sénat, par l'adoption d'un amendement de votre rapporteur en commission, avait également effectué les coordinations nécessaires pour ne pas répercuter l'augmentation de l'effectif du conseil municipal au cours de cette période sur le nombre de délégués de ces communes pour les élections sénatoriales.

Nos collègues députés ont porté ce minimum au tiers de l'addition des conseillers municipaux élus lors du précédent renouvellement général des conseils municipaux dans chacune des communes regroupées avant la création de la commune nouvelle.

La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale conduit en premier lieu à ce que les démissions qui ont pu avoir lieu entre le renouvellement général des conseils municipaux et la création de la commune nouvelle ne soient pas prises en compte dans la détermination de l'effectif du conseil municipal de la commune nouvelle lors du premier renouvellement suivant sa création. Elle conduit en second lieu à ce que les communes nouvelles ayant choisi de ne pas additionner les conseillers municipaux des anciennes communes pour composer leur conseil municipal lors de leur création puissent voir l'effectif de leur conseil municipal rester stable, voire augmenter à l'occasion du premier renouvellement.

Pour autant, les communes ayant fait le choix de ne pas additionner le nombre des conseillers municipaux des anciennes communes sont peu nombreuses et les seules sur lesquelles la rédaction de l'Assemblée nationale aurait un impact conséquent sont celles ayant regroupé un grand nombre d'anciennes communes. Cette augmentation pourrait donc permettre une meilleure représentation des anciennes communes.

Votre commission a par conséquent adopté l'article 1 er sans modification .

Article 2 (Suppression maintenue)
(art. L. 2113-8-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)
Délégation au collège formé par le maire et les adjoints
de certaines attributions du conseil municipal

L'article 2 de la proposition de loi visait à faire face aux difficultés de fonctionnement rencontrées par les communes nouvelles durant la première étape de la phase transitoire, au cours de laquelle les conseils municipaux peuvent être pléthoriques 3 ( * ) .

Tel qu'adopté par le Sénat 4 ( * ) , cet article prévoyait de permettre au conseil municipal de déléguer les attributions qu'il peut déjà déléguer au maire à une instance collégiale composée du maire et de ses adjoints. Cette possibilité n'aurait été ouverte qu'entre la création de la commune nouvelle et le premier renouvellement du conseil municipal.

En ciblant les attributions que le conseil municipal peut déjà déléguer au maire, la rédaction adoptée par le Sénat évitait le risque d'inconstitutionnalité lié à la délégation de compétences importantes à une instance non représentative des différentes tendances politiques du conseil.

Votre rapporteur avait en outre estimé judicieux que les compétences concernées, au lieu d'être déléguées au seul maire, puissent être déléguées à une instance collégiale, afin de répondre au besoin d'association du plus grand nombre dans la phase suivant immédiatement la création de la commune nouvelle .

Nos collègues députés, par l'adoption de deux amendements identiques de la rapporteure et de Christine Pires Beaune (Socialistes et apparentés), ont supprimé cet article au motif que la création d'une telle instance aurait pour inconvénient d'écarter un grand nombre de conseillers municipaux des décisions de la commune nouvelle, au moment qui suit sa création.

Cet argument parait contestable à votre rapporteur, puisque les attributions pouvant être déléguées à ce collège n'étaient autres que celles qui peuvent déjà l'être au maire.

Par souci de compromis, votre commission a toutefois maintenu la suppression de l'article 2.

Article 2 bis
(art. L. 2113-12-1 du code général des collectivités territoriales)
Convocation de la conférence municipale par les maires délégués

Introduit par nos collègues députés en première lecture, par l'adoption de deux amendements identiques de la rapporteure et de Remy Rebeyrotte (La République en marche), l'article 2 bis vise à permettre aux maires délégués d'une commune nouvelle de convoquer la conférence municipale qu'ils constituent, le cas échéant, avec le maire, et qui serait par ailleurs renommée « conférence des maires et des maires délégués ».

L'article L. 2113-12-1 du code général des collectivités territoriales, tel que créé par l'article 4 de la loi n° 2015-292 du 16 mars 2015 relative à l'amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes , dite « loi Pelissard », offre la faculté au conseil municipal d'instituer une conférence municipale présidée par le maire et comprenant les maires délégués. Peut être débattue en son sein toute question de coordination de l'action publique sur le territoire de la commune nouvelle.

Aujourd'hui, la conférence municipale se réunit au moins une fois par an, sur convocation de son président. L'article voté par l'Assemblée nationale permettrait à l'ensemble des maires délégués de demander conjointement la réunion de cet organe.

Comme le soulignait notre ancien collègue Michel Mercier, rapporteur de la loi Pelissard , « même si elle peut être créée sans texte dans le cadre de la libre organisation de la commune, cette instance est un gage supplémentaire pour faciliter le fonctionnement de la commune nouvelle et la construction d'une nouvelle vie locale respectueuse de toutes ses composantes 5 ( * ) ».

Le changement de dénomination de cette instance permettra d'en comprendre plus facilement la nature.

Par ailleurs, autoriser l'ensemble des maires délégués à demander la réunion de la conférence, pour examiner un ordre du jour déterminé, apporterait en outre un instrument supplémentaire pour résoudre les difficultés de coordination qui peuvent apparaitre dans la vie d'une commune nouvelle.

Votre commission a adopté l'article 2 bis sans modification .

Article 3
(art. L. 2113-8 et L. 2113-8-1 A [nouveau]
du code général des collectivités territoriales)
Dérogation au principe de complétude du conseil municipal
pour la première élection du maire et des adjoints d'une commune nouvelle - Garantie contre les effets du renouvellement anticipé
du conseil municipal sur l'effectif de celui-ci

L'article 3 de la proposition de loi prévoit que, si des vacances de sièges surviennent au conseil municipal entre la création d'une commune nouvelle et l'élection du maire et de ses adjoints, le conseil municipal peut néanmoins procéder à cette élection, par dérogation au principe qui impose que le conseil soit alors complet.

Il prévoit aussi que, même en cas de renouvellement anticipé du conseil municipal, son effectif n'est ramené au droit commun que lors du deuxième renouvellement général des conseils municipaux suivant la création de la commune nouvelle.

Nos collègues députés, en première lecture, n'ont apporté à cet article qu'une modification rédactionnelle , par l'adoption en commission d'un amendement de la rapporteure.

Votre commission a adopté l'article 3 sans modification .

Article 4
(art. L. 2113-9, L. 2113-9-1 A [nouveau], L. 2333-55, L. 5210-1-1, L. 5210-1-2, L. 5731-1 et L. 5741-1 du code général des collectivités territoriales,
art. 44 sexdecies et 302 bis ZG du code général des impôts)
« Commune-communauté »

L'article 4 de la proposition loi a pour objet de dispenser une commune nouvelle issue de la fusion de toutes les communes membres d'un ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre de l'obligation de se rattacher à un autre EPCI à fiscalité propre . Une telle commune nouvelle disposerait de l'ensemble des prérogatives directement attribuées par la loi à un tel établissement, et elle serait soumise aux mêmes obligations.

Dans sa rédaction adoptée par le Sénat, cet article se bornait à supprimer l'obligation pour une telle commune nouvelle de se rattacher à un autre EPCI à fiscalité propre avant le prochain renouvellement général des conseils municipaux, et au plus tard dans un délai de deux ans, telle que prévue par le droit en vigueur. Il ajoutait ce cas de figure à la liste des dérogations au principe de couverture intégrale du territoire par des EPCI à fiscalité propre, au V de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales, et procédait à diverses coordinations.

Par l'adoption en commission d'un amendement de la rapporteure, nos collègues députés, en première lecture, ont prévu un régime légèrement différent. Désormais, les conseils municipaux des communes membres d'un ou plusieurs EPCI à fiscalité propre souhaitant fusionner devraient, avant la création de la commune nouvelle, demander à ce que celle-ci ne soit pas rattachée à un nouvel EPCI à fiscalité propre . La création de la commune nouvelle ne pourrait alors être décidée par le préfet de département (par une décision discrétionnaire, comme c'est toujours le cas en la matière) que si la demande de non-rattachement a été formulée par les deux tiers au moins des communes intéressées.

Dans les autres cas, la commune nouvelle serait rattachée à un EPCI à fiscalité propre selon une procédure spéciale prévue par nos collègues députés :

- dans l'hypothèse où la moitié des conseils municipaux, représentant au moins la moitié de la population totale, auraient délibéré en faveur du rattachement à un même EPCI à fiscalité propre, le préfet de département pourrait mettre en oeuvre ce rattachement lors de la création de la commune nouvelle, après accord de l'organe délibérant de l'EPCI à fiscalité propre concerné et avis des conseils municipaux de ses communes membres ;

- à défaut de délibération remplissant ces conditions, si le préfet était en désaccord avec le souhait exprimé par les communes constitutives de la future commune nouvelle, ou en cas de désaccord exprimé par l'organe délibérant de l'EPCI à fiscalité propre auquel elles auraient majoritairement souhaité que la commune nouvelle fût rattachée, le préfet définirait par arrêté un projet de rattachement de la commune nouvelle à un EPCI à fiscalité propre, qui serait soumis pour avis à l'organe délibérant de l'EPCI concerné, aux conseils municipaux de ses communes membres et des communes appelées à fusionner 6 ( * ) . Le projet de rattachement serait ensuite soumis à la commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI), accompagné de ces avis 7 ( * ) .

Lors de la création de la commune nouvelle (par décision discrétionnaire du préfet), celle-ci serait alors rattachée :

- à l'EPCI à fiscalité propre désigné dans le projet du préfet ;

- ou, si la CDCI se prononçait en ce sens à une majorité des deux tiers, à un autre EPCI à fiscalité propre - cette majorité des deux tiers étant celle habituellement exigée pour que la CDCI passe outre aux projets préfectoraux 8 ( * ) .

Le sort d'une commune nouvelle issue de la fusion
de toutes les communes membres d'un ou plusieurs EPCI à fiscalité propre

(1) Le droit en vigueur

(2) La proposition du Sénat

(3) La proposition de l'Assemblée nationale

Selon le régime défini par nos collègues députés, le choix entre le rattachement à un nouvel EPCI à fiscalité propre ou la constitution d'une « commune-communauté » devrait donc être formulé dès avant la création de la commune nouvelle. Le préfet pourrait décider de ne pas créer une commune nouvelle dont les communes constitutives auraient choisi de former une « commune-communauté ». Le cas échéant, le nouvel EPCI à fiscalité propre de rattachement devrait également être choisi d'emblée, et la commune nouvelle adhérerait immédiatement à cet établissement, sans attendre le délai maximal de vingt-quatre mois prévu par le droit en vigueur.

Cet équilibre a paru satisfaisant à votre rapporteur. Il est normal qu'un choix aussi déterminant pour l'avenir de la commune nouvelle soit fait dès l'origine, et que chacun puisse se prononcer sur la création de la commune nouvelle en connaissance de cause .

Un autre amendement de la rapporteure, adopté en commission par l'Assemblée nationale, a modifié la rédaction des règles applicables à la substitution des « communes-communautés » aux EPCI à fiscalité propre dont elles seraient issues au sein des syndicats mixtes, ainsi qu'à la participation de telles « communes-communautés » à des syndicats mixtes normalement réservés aux EPCI à fiscalité propre, à savoir les pôles métropolitains et les pôles d'équilibre territorial et rural (PETR). Votre rapporteur constate que cette nouvelle rédaction ne change rien au fond.

L'entrée en vigueur de l'article 4 a été reportée au 1 er avril 2020, ce qui est cohérent avec le fait qu'aucune commune nouvelle ne peut être créée dans l'année qui précède le renouvellement général des conseils municipaux 9 ( * ) .

Enfin, nos collègues députés ont adopté en séance publique deux amendements de la rapporteure modifiant une référence et procédant à une coordination.

Votre commission a adopté l'article 4 sans modification .

Article 4 bis
(art. L. 2113-2 du code général des collectivités territoriales)
Institution d'un rapport financier joint à la délibération des conseils municipaux portant création d'une commune nouvelle

Introduit par le Sénat en première lecture, par l'adoption en séance publique d'un amendement de notre collègue Jean-Pierre Grand, l'article 4 bis de la proposition de loi prévoit qu'un rapport financier soit joint à la délibération des conseils municipaux portant création d'une commune nouvelle . Ce rapport serait affiché à la mairie et mis en ligne sur le site internet de la commune, lorsque ce dernier existe.

Le rapport financier présenterait les taux d'imposition, la structure et l'évolution des dépenses, de la dette et des effectifs des agents municipaux de l'ensemble des communes potentiellement concernées par la création de la commune nouvelle. Il servirait à éclairer la délibération du conseil municipal.

Comme l'avait indiqué votre rapporteur en séance plénière, « renforcer encore la transparence et l'information de la population et du conseil municipal peut aller dans le bon sens ».

En première lecture, nos collègues députés ont adopté, en commission, un amendement rédactionnel et, en séance publique, un amendement de coordination, tous deux présentés par la rapporteure.

Votre commission a adopté l'article 4 bis sans modification .

Article 4 ter
(art. L. 2113-3 du code général des collectivités territoriales)
Affichage et mise en ligne d'un rapport financier avant les consultations relatives à la création d'une commune nouvelle

Introduit par le Sénat en première lecture, par l'adoption en séance plénière d'un amendement de notre collègue Jean-Pierre Grand, l'article 4 ter de la proposition de loi vise, de la même manière que l'article précédent, à améliorer l'information des citoyens lors de la création d'une commune nouvelle .

Lorsqu'une demande de création de communes nouvelles formée dans les conditions de majorité nécessaires 10 ( * ) ne fait pas l'objet de délibérations concordantes de la part des conseils municipaux de l'ensemble des communes concernées, l'article L. 2113-3 du code général des collectivités territoriales prévoit une consultation des personnes inscrites sur les listes électorales municipales. Celles-ci sont appelées à se prononcer sur l'opportunité de la création de la commune nouvelle.

L'article 4 ter prévoit que, au cours du mois précédant les consultations de la population des communes concernées, un rapport financier soit affiché à la mairie et mis en ligne sur les sites internet des communes, lorsqu'ils existent .

Ce rapport permettrait d'éclairer les électeurs consultés sur le projet de création de la commune nouvelle.

Nos collègues députés n'ont apporté qu'une modification rédactionnelle en première lecture, par l'adoption en commission d'un amendement de la rapporteure.

Votre commission a adopté l'article 4 ter sans modification .

Article 5 bis
(art. L. 2113-12-2 du code général des collectivités territoriales)
Cumul des fonctions de maire et de maire délégué

Introduit par l'Assemblée nationale en première lecture, par l'adoption de deux amendements identiques de nos collègues députés Jérôme Nury (Les Républicains) et Patrice Verchère (Les Républicains), l'article 5 bis de la proposition de loi vise à permettre au maire de la commune nouvelle d'être également maire d'une des communes déléguées.

Aujourd'hui, ces fonctions sont incompatibles, sauf pendant la période qui s'écoule entre la création de la commune nouvelle et le premier renouvellement de son conseil municipal 11 ( * ) . Pendant cette phase transitoire, les maires délégués sont les maires des anciennes communes en fonction au moment de la création de la commune nouvelle. Après le premier renouvellement du conseil municipal de la commune nouvelle, le maire et les maires délégués sont élus par le conseil municipal de la commune nouvelle, ces deux fonctions ne pouvant alors être cumulées.

Votre commission a exprimé quelques réserves à l'égard de cet article, car il importe que le maire de la commune nouvelle soit et donne l'apparence d'être au service de l'ensemble de la commune, sans consacrer plus d'attention à une portion du territoire qu'à une autre.

Toutefois, par souci de compromis, votre commission a adopté l'article 5 bis sans modification .

Article 6
(art. L. 2113-8-3 [nouveau] du code général des collectivités territoriales,
art. L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation)
Lissage d'effets de seuil subis par les communes nouvelles

Introduit par le Sénat en première lecture, par l'adoption en commission d'un amendement de votre rapporteur, l'article 6 de la proposition de loi a pour objet de lisser dans le temps certains des effets de seuil auxquels sont exposées les communes nouvelles en raison de la population qu'elles regroupent .

Dans sa rédaction initiale, cet article prévoyait que, pendant une période de trois ans suivant la création d'une commune nouvelle, celle-ci ne serait soumise à certaines obligations légales que si une ou plusieurs des communes fusionnées y étaient elles-mêmes soumises et sur le seul territoire desdites communes. Il s'agissait :

- de l'obligation de se doter d'une certaine proportion de logements locatifs sociaux , applicable aux communes dont la population est au moins égale à 1 500 habitants en Île-de-France et à 3 500 habitants dans les autres régions, comprises dans une agglomération ou un EPCI à fiscalité propre de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants ;

- de l'obligation de créer des places d'hébergement , qui s'impose aux communes membres d'un EPCI à fiscalité propre dont la population est supérieure à 50 000 habitants ainsi qu'aux communes de 3 500 habitants ou plus, comprises dans une agglomération de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants ;

- de l'inscription obligatoire des communes de plus de 5 000 habitants au schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage , qui fixe la liste des communes où doivent être aménagés des aires permanentes d'accueil de gens du voyage, des terrains familiaux locatifs et des aires de grand passage ;

- de l'ouverture obligatoire d'un centre médico-social scolaire dans les mêmes communes de plus de 5 000 habitants ;

- de l'aménagement obligatoire d'un site cinéraire dans les communes de 2 000 habitants et plus ;

- de la création obligatoire d'un conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance dans les communes de plus de 10 000 habitants ;

- de l'établissement obligatoire d'un bilan des émissions de gaz à effet de serre dans les communes de plus de 50 000 habitants.

En première lecture, par l'adoption en commission d'un amendement de la rapporteure, l'Assemblée nationale a fortement limité la portée de cet article , puisqu'il n'y est plus fait référence qu'aux obligations liées à l'ouverture d'un centre médico-social scolaire, à l'aménagement d'un site cinéraire et l'établissement d'un bilan des émissions de gaz à effet de serre.

Votre rapporteur regrette ce choix , car il lui semble légitime que les communes nouvelles qui, du jour au lendemain, franchissent du fait de la fusion un ou plusieurs seuils de population disposent d'un court délai de trois ans pour se mettre en ordre de marche et assumer pleinement les charges liées à leur statut de communes de droit commun.

Néanmoins, par souci de compromis, votre commission a adopté l'article 6 sans modification .

Article 7
(art. L. 2113-11-1 [nouveau] et L. 2113-15
du code général des collectivités territoriales)
Suppression d'une partie des annexes de la mairie

Introduit en commission à l'initiative de notre collègue Hervé Maurey, l'article 7 de la proposition de loi tend à permettre la suppression d'une partie seulement des annexes de la mairie dans les communes nouvelles.

Le Sénat a adopté en séance plénière un amendement du même auteur et de plusieurs de nos collègues prévoyant la consultation de la commune déléguée dont l'annexe de la mairie serait mise à disposition d'une autre commune déléguée. Votre rapporteur avait alors considéré que, sans revenir sur le fait que, s'agissant d'un bâtiment de la commune nouvelle, la décision de mutualisation appartient au conseil municipal, l'avis simple du maire délégué et, lorsqu'il existe, du conseil de la commune déléguée dont l'annexe de la mairie serait mutualisée contribuerait à la bonne administration de la commune nouvelle.

L'Assemblée nationale a adopté deux amendements de sa rapporteure en commission, l'un rédactionnel et l'autre reportant l'entrée en vigueur de cet article au 1 er avril 2020, au lendemain des élections municipales.

Votre commission a adopté l'article 7 sans modification .

Article 8 (Suppression maintenue)
(art. L. 2113-5 du code général des collectivités territoriales)
Conditions de majorité au sein de la commission départementale
de la coopération intercommunale lorsqu'elle se prononce sur le rattachement d'une commune nouvelle à un EPCI à fiscalité propre

Introduit par le Sénat en première lecture, par l'adoption en séance publique d'un amendement de notre ancien collègue Jacques Mézard, l'article 8 de la proposition de loi a pour objet de renforcer les pouvoirs de la commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI) , lorsqu'il s'agit de déterminer à quel EPCI à fiscalité propre une commune nouvelle doit être rattachée, en abaissant la majorité requise en son sein pour passer outre l'opposition du préfet de département au souhait exprimé par les communes .

Selon le droit en vigueur, lorsqu'une commune nouvelle doit être créée par fusion de communes membres d'EPCI à fiscalité propre distincts, les conseils municipaux peuvent délibérer en faveur du rattachement de la commune nouvelle à l'un de ces établissements. En cas de désaccord avec le souhait exprimé par les communes, ou si la majorité requise (à savoir la moitié des conseils municipaux des communes appelées à fusionner) n'a pas été atteinte, le préfet de département saisit la CDCI d'une proposition de rattachement. Les organes délibérants des EPCI à fiscalité propre concernés sont également consultés et peuvent saisir la CDCI.

Lorsque la CDCI a été saisie par le préfet, la commune nouvelle ne devient membre de l'EPCI à fiscalité propre choisi par les conseils municipaux que si la commission se prononce en ce sens à la majorité des deux tiers.

Le Sénat a estimé, en première lecture, qu'il n'était pas justifié d'exiger une aussi forte majorité au sein de la CDCI pour donner raison aux conseils municipaux contre l'avis du préfet. C'est pourquoi il a adopté l'article 8 de la proposition de loi afin de ramener cette majorité à la moitié des membres de la CDCI.

Cet article a été supprimé par l'Assemblée nationale en première lecture, par l'adoption en commission d'un amendement de la rapporteure, au motif que la majorité des deux tiers est la majorité de droit commun au sein de la CDCI.

Cet argument ne paraît guère décisif, car les procédures de décision en matière de création, de modification du périmètre, de fusion ou de transformation d'EPCI à fiscalité propre sont aujourd'hui très disparates, la CDCI n'étant même pas systématiquement saisie 12 ( * ) . Rien n'empêcherait de modifier ici les conditions de majorité en son sein.

Toutefois, par souci de compromis, votre commission a maintenu la suppression de l'article 8.

Article 10
(art. L. 2113-10 du code général des collectivités territoriales)
Suppression d'une partie des communes déléguées

Introduit par le Sénat en première lecture, par l'adoption en séance publique d'un amendement de notre collègue Hervé Maurey, l'article 10 de la proposition de loi a pour objet d'autoriser la suppression d'une partie seulement des communes déléguées dans les communes nouvelles.

Aujourd'hui, le conseil municipal de la commune nouvelle ne peut que décider de supprimer la totalité des communes délégués, ou de les conserver toutes.

Votre rapporteur avait considéré que la faculté offerte par ce nouvel article permettrait aux conseils municipaux d' adapter au mieux leur organisation aux spécificités de leur territoire .

Nos collègues députés, en première lecture, ont jugé nécessaire de préciser - par l'adoption en commission d'un amendement de la rapporteure - qu'en cas de suppression d'une commune déléguée, « la commune nouvelle établit les actes de l'état civil relatant des événements survenus dans les limites territoriales de la commune déléguée supprimée », et que « l'officier d'état civil » de cette dernière enregistre les pactes civils de solidarité des partenaires ayant fixé leur résidence commune sur le territoire concerné.

Votre rapporteur estime cette précision superflue. En effet :

- qu'il existe ou non des communes déléguées, le maire et les adjoints de la commune nouvelle ont qualité d'officiers d'état civil sur l'ensemble du territoire communal. Les seules spécificités liées à l'existence d'une commune déléguée tiennent au fait que le maire délégué (qui est, de droit, adjoint au maire) et ses adjoints éventuels exercent les fonctions d'officier d'état civil sur le territoire de celle-ci, et qu'une annexe de la mairie est créée où sont établis les actes de l'état civil concernant les habitants de la commune déléguée et conservés les registres afférents jusqu'à leur clôture 13 ( * ) ;

- en cas de suppression d'une commune déléguée et, par conséquent, des fonctions de maire délégué et d'adjoint au maire délégué, il va de soi que le maire de la commune nouvelle et ses autres adjoints continueront d'exercer leurs fonctions d'officier d'état civil sur l'ensemble du territoire communal, y compris sur celui de l'ancienne commune déléguée, et que les actes concernant les habitants de cette dernière seront établis conformément aux règles de droit commun fixées par le code civil et le décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 relatif à l'état civil (c'est-à-dire, en principe, à la maison commune, les registres y étant conservés).

En outre, la rédaction adoptée n'est pas exempte de critiques : l'établissement des actes de l'état civil, en particulier, n'est pas une compétence de la commune, mais du maire et des adjoints en tant qu'officiers de l'état civil, exercée au nom de l'État.

Toutefois, il n'a pas paru indispensable à votre commission de modifier cette rédaction qui ne devrait pas soulever de difficultés d'application.

Enfin, en cohérence avec d'autres amendements à la proposition de loi, l'Assemblée nationale a reporté l'entrée en vigueur de cet article au 1 er avril 2020 par l'adoption d'un amendement de sa rapporteure en commission.

Malgré ces réserves, et pour ne pas retarder l'entrée en vigueur de la proposition de loi, votre commission a adopté l'article 10 sans modification .

Article 11
(art. L. 2121-7 du code général des collectivités territoriales)
Réunion du conseil municipal d'une commune nouvelle
dans les annexes de la mairie

Introduit par le Sénat en première lecture, par l'adoption en séance plénière d'un amendement de notre collègue Olivier Paccaud, l'article 11 de la proposition de loi vise à permettre la réunion du conseil municipal d'une commune nouvelle dans les annexes de la mairie des communes déléguées . Cela permettrait la réunion du conseil municipal dans les anciennes mairies des communes historiques.

Aujourd'hui, les conseils départementaux et régionaux, de même que les organes délibérants des EPCI à fiscalité propre, peuvent se réunir ailleurs qu'au siège de la collectivité ou de l'établissement.

En revanche, la législation actuelle impose au conseil municipal de se réunir à la mairie de la commune. La loi du 20 décembre 2007 relative à la simplification du droit a confirmé sur ce point une jurisprudence contestée du Conseil d'État 14 ( * ) . L'article L. 2121-7 du code général des collectivités territoriale indique désormais que : « le conseil municipal se réunit et délibère à la mairie de la commune ».

Dans les communes nouvelles, il apparaît toutefois légitime que le conseil municipal témoigne de son souci de maintenir un lien de proximité avec les habitants en se « délocalisant ». Comme l'avait indiqué votre rapporteur au cours de l'examen en séance publique de l'amendement en question, « la délocalisation des conseils municipaux permettra de renforcer le sentiment d'adhésion des anciennes communes à la commune nouvelle ».

L'Assemblée nationale a précisé, d'une part, qu' au moins deux des réunions du conseil municipal devaient se tenir, chaque année, à la mairie de la commune nouvelle et, d'autre part, que le public devait être avisé de la décision de délocaliser la réunion du conseil municipal par tout moyen de publicité au choix du maire, au minimum 15 jours avant la tenue de ces réunions.

Votre commission a adopté l'article 11 sans modification .

Article 12 (Suppression maintenue)
Rattachement du territoire de la commune de Saint-Palais-du-Né
au département de la Charente-Maritime

Introduit par le Sénat en première lecture, par l'adoption en séance publique d'un amendement de nos collègues Daniel Laurent et Bernard Lalande, l'article 12 de la proposition de loi a pour objet de rattacher le territoire de la commune de Saint-Palais-du-Né, aujourd'hui située en Charente, au département de la Charente-Maritime, afin d'ouvrir la voie à sa fusion avec la commune d'Archiac , située dans ce dernier département.

Aux termes de l'article L. 2113-4 du code général des collectivités territoriales, une commune nouvelle ne peut être créée par la fusion de communes contiguës situées dans des départements ou des régions différents qu'après modification des limites territoriales des départements ou des régions concernés.

L'autorité compétente pour procéder à cette modification diffère selon que les conseils départementaux et régionaux concernés ont ou non exprimé leur opposition au projet, par délibération motivée :

- en l'absence d'opposition, la décision relève du Premier ministre, par décret en Conseil d'État, par dérogation à la règle selon laquelle la définition des limites territoriales des départements et des régions relève du domaine de la loi 15 ( * ) ;

- en cas d'opposition, la décision appartient au législateur.

En l'espèce, les conseils municipaux des communes d'Archiac (Charente-Maritime) et Saint-Palais-du-Né (Charente) ont délibéré le 9 janvier 2018 en faveur de leur regroupement pour créer la commune nouvelle d'Archiac-sur-le-Né, dont le siège serait situé sur le territoire de l'actuelle commune d'Archiac. Par délibération du 6 mars 2018, le conseil municipal de Saint-Palais-du-Né a demandé, par conséquent, à ce que le territoire de la commune soit préalablement rattaché au département de la Charente-Maritime.

Or la commission permanente du conseil départemental de la Charente, par délibération du 4 mai 2018, s'est opposée à la modification des limites territoriales du département, au motif qu'elle « porterait manifestement atteinte à l'intégrité [du] territoire départemental » et « serait susceptible d'encourager une concurrence entre les territoires ». On peut douter que ces motifs très généraux suffisent à justifier l'opposition d'un conseil départemental dans un tel cas ; il reviendra au juge, s'il est saisi, de l'apprécier.

Face à ce blocage, qui contrevient à la volonté partagée des élus des deux communes concernées, le Sénat a considéré qu'il revenait au législateur d'exercer sa compétence et de trancher . Tel était l'objet de l'article 12.

L'Assemblée nationale en a décidé autrement et a adopté en première lecture, en commission, un amendement de suppression de la rapporteure, au motif que « cette décision ne semble pas faire l'objet d'un consensus localement ».

Votre rapporteur regrette ce choix , qui laisse les communes concernées sans solution.

Néanmoins, par souci de compromis, votre commission a maintenu la suppression de l'article 12.

Article 13
Rapport au Parlement sur les conséquences de la création
de communes nouvelles regroupant toutes les communes membres
d'un ou plusieurs EPCI à fiscalité propre

Introduit par l'Assemblée nationale en première lecture, par l'adoption d'un amendement de notre collègue député Arnaud Viala (Les Républicains), l'article 13 de la proposition de loi prévoit que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai de quatre ans suivant la promulgation de la loi, un rapport sur les conséquences de la création de communes nouvelles regroupant toutes les communes membres d'un ou plusieurs EPCI à fiscalité propre. La rédaction proposée concerne aussi bien les futures « communes-communautés » que les communes nouvelles présentant la même configuration mais qui choisiraient de se rattacher à un autre EPCI à fiscalité propre.

Votre rapporteur rappelle que les dispositions législatives prévoyant la remise de rapports gouvernementaux au Parlement n'ont aucune portée normative, puisque le principe constitutionnel de séparation des pouvoirs interdit au Parlement d'adresser des injonctions au Gouvernement. Ce rapport, dont la remise est prévue au cours de la prochaine législature, ne verra donc certainement jamais le jour.

Il appartient d'ailleurs aux assemblées parlementaires elles-mêmes de mener les travaux d'information ou d'enquête qui leur paraissent opportuns.

Toutefois, par souci de compromis, votre commission a adopté l'article 13 sans modification .

*

* *

Votre commission a adopté la proposition de loi sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

___________

JEUDI 18 JUILLET 2019

M. Philippe Bas, président . - Nous examinons maintenant, en deuxième lecture, une proposition de loi relative aux communes nouvelles qui a bénéficié d'une forme de privilège : déposée au Sénat sur l'initiative de Françoise Gatel, puis adoptée par notre assemblée, elle a été inscrite à l'ordre du jour des travaux de l'Assemblée nationale, qui l'a adoptée.

Mme Agnès Canayer, rapporteur . - La proposition de loi visant à adapter l'organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires a en effet été adoptée par le Sénat le 11 décembre 2018, puis par l'Assemblée nationale le 10 juillet dernier dans une version renforcée. Elle nous revient donc en deuxième lecture et il me semble souhaitable que le Sénat l'adopte sans modification, afin qu'elle entre en vigueur au plus tôt. Je rappelle que ce texte a été préparé en collaboration avec les associations représentatives d'élus, puis travaillé avec le Gouvernement et l'Assemblée nationale.

Cette proposition de loi contient deux dispositions centrales.

Son article 1 er concerne la diminution du nombre de conseillers municipaux des communes nouvelles lors du premier renouvellement après leur création. Cette mesure est très attendue par les élus concernés et justifie à elle seule un vote conforme du Sénat. En effet, les élections municipales approchent et la loi doit être stabilisée. Cet article définit le nombre de conseillers municipaux entre le premier et le deuxième renouvellement suivant la création de la commune nouvelle. Il prévoyait, dans sa rédaction adoptée par le Sénat, que ce nombre ne puisse être inférieur au tiers de l'addition des conseillers municipaux élus lors du précédent renouvellement. L'Assemblée nationale a peaufiné ce dispositif, en prévoyant que le calcul était réalisé à partir de l'effectif théorique du conseil municipal de la commune nouvelle et que le nombre de conseillers ne pouvait être supérieur à soixante-neuf.

La seconde disposition importante de ce texte est celle souvent dénommée « commune-communauté ». Elle permet à une commune nouvelle issue de la fusion de toutes les communes membres d'un ou de plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI) de ne pas se rattacher à un nouvel EPCI.

Grâce à la ténacité de l'auteur de cette - lumineuse - idée, Françoise Gatel, l'Assemblée nationale en a accepté le principe ; elle a toutefois modifié la rédaction de l'article 4 du texte, mais sans en changer le sens. Les conseillers municipaux de la commune nouvelle devront décider à la majorité des deux tiers, au moment de la création de cette commune nouvelle, s'ils veulent ou non se rattacher à un EPCI. S'ils décident un tel rattachement, la procédure - complexe - garantit la liberté d'administration des collectivités territoriales. Il me semble que le système de « commune-communauté » n'est pas dénaturé par ces modifications et que nous restons dans l'esprit du texte initial.

L'Assemblée nationale a modifié à la marge les autres dispositions du texte. À l'article 2, elle a remplacé la délégation de compétences à une instance composée du maire et de ses adjoints par l'élargissement des possibilités dont dispose déjà la conférence municipale regroupant le maire et les maires délégués. C'est désormais l'article 2 bis .

L'Assemblée nationale a également validé plusieurs dispositions introduites par le Sénat. Cela concerne les règles de complétude fixées à l'article 3, la nécessité d'un rapport financier préalable à la constitution de la commune nouvelle et de son affichage en mairie prévue aux articles 4 bis et 4 ter - mesure adoptée à l'initiative de Jean-Pierre Grand -, les mesures de souplesse pour supprimer certaines communes déléguées seulement ou les annexes de la mairie qui leur sont affectées - ces mesures ont été adoptées à l'initiative de Hervé Maurey - ou encore la possibilité de délocaliser les réunions du conseil municipal, mesure adoptée à l'initiative d'Olivier Paccaud.

Deux propositions ont été profondément modifiées. D'une part, le principe du lissage des seuils est maintenu, mais son champ est réduit. D'autre part, l'Assemblée nationale a voulu revenir à la règle de droit commun en ce qui concerne les conditions de majorité de la commission départementale de la coopération intercommunale, lorsqu'elle se prononce sur le rattachement d'une commune nouvelle à un EPCI ; à l'initiative de notre ancien collègue Jacques Mézard, le Sénat avait ramené la majorité nécessaire pour s'opposer à une décision du préfet de deux tiers à la moitié.

L'Assemblée nationale a supprimé l'article 12 de la proposition de loi, qui visait à rattacher la commune de Saint-Palais-du-Né au département de la Charente-Maritime. Cet article posait la question des communes nouvelles interdépartementales. Le Gouvernement s'est cependant engagé à travailler sur cette question qui concerne plusieurs communes nouvelles dans l'optique du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.

Enfin, à l'initiative des députés Les Républicains Jérôme Nury, Patrice Verchère et Arnaud Viala, l'Assemblée nationale a ajouté deux dispositions. La première est de bon sens : elle permet aux maires des communes nouvelles de rester maire délégué de leur commune au-delà du premier renouvellement. La seconde est une demande de rapport sur l'évolution du dispositif de « commune-communauté » ; le Sénat n'est guère enclin à accepter ce type d'article, mais il ne modifie pas la substance du texte.

Dans ces conditions, je vous invite à adopter cette proposition de loi sans la modifier, car elle est très attendue par les maires.

M. Philippe Bas, président . - Je vous remercie de ce rapport, dont je partage les termes.

Mme Françoise Gatel . - Je salue la qualité du travail du rapporteur - et son talent de pédagogue ! -, ainsi que l'implication du président de notre commission. Il est vrai qu'au départ l'idée d'une « commune-communauté » inscrite dans l'article 4 du texte apparaissait aux yeux de certains comme un ovni audacieux, voire un fruit défendu... En tout cas, cette mesure n'est pas destinée à contrecarrer les intercommunalités. Les territoires ont besoin de liberté et de capacité d'initiative pour construire en toute responsabilité les organisations les plus efficientes.

M. Éric Kerrouche . - Je remercie également le rapporteur pour cette synthèse. Notre groupe conserve à l'égard de ce texte les mêmes prévenances qu'en première lecture.

La solution prévue dans l'article 1 er concernant le nombre de conseillers municipaux des communes nouvelles, quelle que soit la version du texte, ne nous semble pas optimale, car elle créera nécessairement des perdants et des gagnants - certains estiment que, dans la moitié des cas, les communes nouvelles y perdront. Or je crois que nous devons accompagner les communes nouvelles vers le droit commun. L'article 1 er créera des distorsions dans la composition des conseils municipaux et une déconnexion entre le nombre de conseillers et celui des habitants.

En ce qui concerne la « commune-communauté », la proposition de loi instaure finalement une dérogation permanente pour un nombre limité de situations - seulement 6 % des communes nouvelles ont plus de 5 000 habitants. Il est vrai que la perspective d'adhérer à un EPCI « XXL » peut freiner la création d'une commune nouvelle, mais rien n'empêchera la création de « communes-communautés » défensives, comme on a pu le voir pour les intercommunalités. Pour autant, cette mesure va créer des inégalités entre les communes et les communes nouvelles. Nous aurions préféré que soit étudiée la mise en place de dérogations particulières plutôt qu'une disposition générale de ce type.

On le voit, ces deux dispositions posent des problèmes et leurs conséquences n'ont pas été estimées, ce que je regrette.

M. Mathieu Darnaud . - Ce texte pose au fond une question fondamentale : faisons-nous confiance aux élus des territoires qui possèdent toute l'expertise nécessaire ? Devons-nous fixer une architecture rigide ou donner de la plasticité, en autorisant des dérogations ? Je reprendrai l'exemple de la commune dont nous avons déjà parlé, Tinchebray-Bocage dans l'Orne : l'outil des communes nouvelles est adapté à certaines situations. Oui, il y aura peu de « communes-communauté », mais cela n'enlève rien à la pertinence de ce statut pour certaines situations.

Certaines dérogations au droit commun peuvent permettre de s'adapter au territoire et de répondre à des situations spécifiques. Les communes nouvelles et l'intercommunalité répondent finalement à la même finalité : mutualiser et mettre en place des projets. Faisons confiance au bon sens des territoires pour améliorer le service public local !

M. Philippe Bas, président . - En permettant à des communes nouvelles d'exercer les compétences de la communauté de communes qui a finalement été le premier pas vers cette commune nouvelle, personne ne cherche à créer un modèle universel. C'est simplement un outil supplémentaire mis à la disposition des élus et des territoires. Il est vrai que cette mesure ne concernera pas un nombre extraordinaire de cas, car elle vise en fait les petites communautés de communes, celles qui sont encore à taille humaine...

M. Vincent Segouin . - L'Orne a une grande expérience des communes nouvelles et l'expérience de Tinchebray-Bocage marche très bien. Au départ, les communes nouvelles avaient pour objectif de réduire les charges et le nombre de communes. Or cet objectif disparaît, puisque se créent des mairies déléguées... Ne serait-il pas plus simple de permettre à ces communes de divorcer plutôt de créer de nouvelles règles spécifiques ?

Une autre question se pose. Récemment, une commune nouvelle a procédé à une élection partielle en raison de la démission du maire. Le conseil municipal est alors passé de 69 membres à 23. Certains maires délégués sont devenus minoritaires dans leur commune déléguée, mais ont conservé leur responsabilité, ce qui a entraîné une grande incompréhension dans la population. Dans leur propre commune déléguée, ces maires délégués sont finalement les représentants d'une minorité. Vous le voyez, la création de mairies déléguées peut engendrer de nouveaux problèmes. Ne serait-il donc pas plus simple de revenir à la situation communale antérieure ?

Mme Marie Mercier . - L'intercommunalité est un outil au service des communes pour faire mieux ensemble ; ce n'est pas une « supracommunalité » !

Ensuite, je constate que les maires ne comprennent pas bien le dispositif de l'intercommunalité. Souvent, ils ont l'impression de passer leur temps en réunions à seulement lever la main. Ils ont besoin de reconnaissance pour le travail de proximité qu'ils fournissent.

M. André Reichardt . - Je voterai ce texte, mais je rejoins les propos de Vincent Segouin. J'ai l'impression que nous tentons de régler des problèmes créés au moment de la création des communes nouvelles. Nous savons bien que ces communes nouvelles ont été créées pour des raisons totalement différentes les unes des autres, parfois exclusivement pour des considérations financières... Et elles se rendent compte a posteriori que d'autres problèmes apparaissent, comme la réduction du nombre de conseillers municipaux ou la nomination de maires délégués. D'ailleurs, je regrette que Pierre-Yves Collombat ne soit pas présent... Il nous aurait dit qu'à vouloir faire simple, on fait finalement très compliqué ! Tout cela revient à dire que la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, la loi NOTRe, mériterait vraiment d'être revue. Nous savions pourtant que ces imperfections allaient apparaître.

M. Philippe Bas, président . - Il existe une grande différence entre les communes nouvelles et les intercommunalités : les premières sont créées par les élus, les secondes par les préfets. Or les élus agissent en toute connaissance de cause. Ils savent que la commune nouvelle n'est pas une association de communes, mais une commune unique qui dispose d'une fiscalité homogénéisée. Le premier objectif des communes nouvelles est non pas nécessairement de faire des économies, mais de mieux répartir les contributions financières entre les bourgs-centres et les communes avoisinantes, ce qui constitue une mesure de justice dans l'organisation de services publics ouverts à tous.

L'avantage de la proposition de loi que nous examinons est aussi de revenir à la notion de proximité : le statut de commune nouvelle peut être adapté pour certaines petites communautés de communes en zone rurale. L'expérience acquise au fil des années en matière de communes nouvelles ne vient pas invalider le dispositif qui est proposé ici. Je souscris d'ailleurs aux propos d'André Reichardt : les aspects financiers ne sont pas une bonne motivation pour créer une commune nouvelle. D'ailleurs, peu de communes nouvelles se sont constituées sur ce seul motif et, quand cela a été le cas, l' affectio societatis a beaucoup de mal à se créer au sein de la nouvelle commune.

En tout cas, c'est aussi le pendant de la liberté ! Oui, les élus peuvent commettre des erreurs, mais on ne peut pas se plaindre que des erreurs surviennent et, dans le même temps, critiquer le rôle du préfet et du Gouvernement dans la recomposition de la carte intercommunale ou dans celle des cantons.

M. Éric Kerrouche . - Je veux simplement préciser que la loi NOTRe, qui sert souvent de bouc émissaire, n'a pas créé le statut de commune nouvelle. C'est la loi Pélissard qui l'a fait !

M. André Reichardt . - Je parlais de l'augmentation des seuils minimums de population pour les structures intercommunales !

M. Éric Kerrouche . - Les propos de Vincent Segouin et d'André Reichardt montrent bien que des difficultés peuvent apparaître au sein des communes nouvelles. De la même manière, la création des « communes-communautés » ne manquera pas d'entraîner également des problèmes. Il ne s'agit pas d'une question de confiance, mais du fait que des erreurs peuvent être commises - il y en a d'ailleurs eu dans la construction intercommunale, en particulier lorsque les EPCI se sont constitués pour des raisons défensives.

Je le redis, nous ne sommes pas nécessairement opposés à cette proposition, mais nous estimons qu'elle peut créer de nouveaux problèmes. D'ailleurs, même si je ne suis pas non plus très favorable aux rapports demandés au Gouvernement, l'introduction par l'Assemblée nationale d'un tel rapport pour évaluer le dispositif des « communes-communautés » d'ici quelques années est en l'espèce intéressante.

Mme Françoise Gatel . - On peut porter deux regards différents sur la manière dont on fait la loi et dont on organise le territoire, tout en se préoccupant de l'efficience de l'action publique : on donne aux élus locaux soit une liberté surveillée, avec un bracelet électronique - le législateur prend la responsabilité de fixer des critères -, soit toute liberté, en leur offrant une batterie d'outils, et il leur appartient alors d'exercer leurs responsabilités en choisissant tel ou tel outil.

Une loi, aussi parfaite soit-elle, est mise en oeuvre par des êtres humains, qui ont des convictions, dans des territoires, qui ont une histoire, une géographie. Il ne s'agit pas d'un exercice purement théorique. Il se peut donc qu'il y ait à certains moments non pas des effets pervers, mais négatifs. Je ne crois pas à l'instrumentalisation d'une disposition à caractère défensif : des élus revendiqueraient une « commune-communauté » pour se défendre et éviter de s'ouvrir vers l'extérieur. Quand bien même deux ou trois élus seraient tentés de le faire, quelle est la différence, cher collègue Éric Kerrouche, entre l'insuffisance d'un élu local et l'insuffisance d'un préfet ?

Je ne pense pas que la loi NOTRe, avec ses seuils, soit parfaite, ni que la recomposition des intercommunalités à laquelle les préfets ont procédé ne souffre aucune contestation.

Faisons-nous confiance aux élus locaux ou pas ? La « commune-communauté » n'est pas une invention d'une grande modernité. Les îles du Ponant ont le statut à la fois de commune et d'intercommunalité. Ce cadre correspond à leur réalité ; cela n'avait pas de sens de vouloir les faire entrer, au nom de principes, dans une intercommunalité. En revanche, il importe d'évaluer ce dispositif, et c'est tout le rôle du législateur.

M. Mathieu Darnaud . - Si la loi Pélissard a instauré la commune nouvelle, il n'en demeure pas que la « commune-communauté » répond, en termes de seuils, aux exigences fixées par la loi NOTRe. On ne s'éloigne donc pas trop de l'architecture intercommunale, voire communale.

Certaines communes nouvelles se sont constituées sur un modèle très défensif ; j'en veux pour preuve, par exemple, la commune nouvelle du Mont-Lozère-et-Goulet, en Lozère. Mais il ne faut pas avoir peur de l'expérimentation ; on pourra alors modifier certains périmètres. Pour les communes nouvelles, on en est encore aux balbutiements ; le législateur doit adapter les situations. Le législateur doit être animé par la volonté de redonner confiance en les élus, en les laissant prendre des initiatives, en vue d'éviter, à terme, les postures défensives ou de retrait face aux évolutions législatives.

Mme Agnès Canayer, rapporteur . - J'adhère à l'ensemble des propos de l'auteur de cette proposition, la meilleure des avocates de la « commune-communauté ». Il s'agit non pas d'un moyen de résistance, mais d'un moyen de s'adapter aux particularités des territoires. Le regroupement doit avoir du sens. Il faut laisser les territoires respirer et redonner confiance en les élus.

Je le rappelle, cette proposition de loi vise à donner plus de souplesse, plus de graduations et plus de moyens pour conforter les communes nouvelles existantes.

Pour clore le débat sur l'origine de la loi, c'est la loi de 2010 de réforme des collectivités territoriales, sous l'ère de Nicolas Sarkozy, qui est à l'origine de la création des communes nouvelles.

M. Éric Kerrouche . - Elle a été revue en 2015.

Mme Agnès Canayer, rapporteur . - Oui, mais c'est la loi de 2010 qui en est à l'origine.

Concernant l'organisation du nombre de conseillers municipaux, le dispositif prévu à l'article 1 er fera forcément des mécontents. Il n'y a pas de solution optimale. Il y a autant de possibilités qu'il y a de communes nouvelles en France, mais l'objectif est de contenter le maximum de communes. On le sait, la situation sera complexe dans certaines communes. D'ailleurs, l'amendement de Mme Delattre, que nous allons examiner dans quelques instants, vise à remédier à ces difficultés.

Pour répondre à Vincent Segouin, l'objet de ce texte est précisément d'être plus souple pour s'adapter aux situations. Des communes nouvelles pourront se séparer de communes déléguées, contrairement à ce qui est autorisé aujourd'hui. La souplesse permettra de donner du temps pour procéder à ces mutualisations.

Concernant la question des maires délégués, le conseil municipal de la commune nouvelle décide de la représentation.

M. Vincent Segouin . - Je me suis mal exprimé. Concernant la commune nouvelle, figurent sur la liste majoritaire des représentants qui étaient minoritaires dans chacune des petites communes.

M. Philippe Bas, président . - Lors de l'élection précédente ?

M. Vincent Segouin . - Ils se retrouvent minoritaires dans leur ancienne commune. Les habitants s'interrogent, car ils sont représentés par des personnes qui représentent la minorité.

M. Philippe Bas, président . - La réponse est simple : l'ancienne commune n'existe plus. Soit on fait une commune nouvelle et on admet cette éventualité, soit on n'en fait pas. Une commune nouvelle est une vraie commune. D'ailleurs, lorsque des communes sont des coquilles vides, la commune nouvelle permet de revitaliser la vie communale. Je comprends que les électeurs ne connaissent pas cette réalité-là, mais une bonne information permettrait d'y remédier.

M. Vincent Segouin . - S'il s'agit d'une seule commune, pourquoi y a-t-il des maires délégués ?

M. Philippe Bas, président . - Dans les villes, un certain nombre d'adjoints représentent les quartiers. Le pacte de gouvernance territoriale détermine s'il y aura des maires délégués. Dans certains cas, il arrivera que le maire délégué d'une ancienne commune réside dans une autre ancienne commune de la commune nouvelle.

Mme Françoise Gatel . - Eh oui !

M. Philippe Bas, président . - Mais, dans le cadre de sa délégation, il sera chargé de s'occuper de l'ancien clocher.

Ce dispositif peut effectivement remettre radicalement en cause des siècles d'habitudes et peut être mal compris, mais c'est le système que le législateur a voulu instaurer et que l'Association des maires de France, présidée alors par Jacques Pélissard, a voulu mettre en place. J'y insiste, il faut l'expliquer aux habitants, la commune nouvelle est une vraie commune, avec des maires délégués - c'est une garantie que nous avons apportée.

M. Vincent Segouin . - C'est là le problème : s'il s'agit d'une vraie commune, pourquoi créer des maires délégués ? Des maires adjoints peuvent représenter les anciennes communes.

M. Philippe Bas, président . - C'est purement facultatif.

M. Vincent Segouin . - On entretient le paradoxe : on dit aux habitants qu'ils font partie d'une vraie commune et, en même temps, ils ont un maire délégué.

M. Philippe Bas, président . - C'est une compensation apportée à la commune qui disparaît, mais il est possible de ne pas prévoir de maires délégués dans le cadre du pacte de gouvernance territoriale.

Mme Agnès Canayer, rapporteur . - Pour prendre un exemple concret, la ville du Havre, qui est issue de fusions successives, a des communes déléguées, avec des maires délégués de la commune, et des adjoints de quartier. Tous ces quartiers et ces communes déléguées forment la ville du Havre et travaillent ensemble.

M. Alain Richard . - Constituer une commune nouvelle est une vraie décision à caractère historique ; il faut donc en avoir délibéré sérieusement. Or la quasi-totalité des communes nouvelles a été décidée entre élus, sans faire appel aux électeurs. Dans le cadre des élections municipales de 2020, nombreux seront ceux qui auront des projets de commune nouvelle et joueront les violettes auprès des électeurs. De façon anecdotique, dans certaines communes, il y aura des listes pour contester la commune nouvelle.

En outre, ce processus, qui suppose une véritable volonté et une représentativité des habitants, est partiellement faussé par les incitations financières. Ceux-là mêmes qui étaient d'accord avec moi pour dire que les incitations financières ne devaient pas être le motif réel de la constitution d'une commune nouvelle votent pour les maintenir, voire les augmenter.

Mme Agnès Canayer, rapporteur . - Ce qui compte avant tout, c'est l' affectio societatis et la commune nouvelle doit reposer sur une adhésion la plus large possible. Des dispositions ont été prévues dans ce texte pour favoriser l'information des administrés. Il est ensuite de la responsabilité des élus d'expliquer le projet, et il faut leur faire confiance.

En outre, la « commune-communauté » favorisera précisément la proximité. Vous le savez comme moi, sur le terrain, les maires se disent tous perdus dans l'intercommunalité.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1 er

Mme Agnès Canayer, rapporteur . - L'amendement COM-1 instaurerait un droit d'option dans les communes nouvelles pour définir l'effectif du conseil municipal. D'une part, cet amendement arrive un peu tardivement, et nous souhaitons que ce texte soit adopté conforme. D'autre part, le droit d'option risque de créer plus d'insécurité et ne semble pas constitutionnel. Aussi, je propose de rejeter cet amendement.

M. Philippe Bas, président . - Je comprends vos arguments, mais ce n'était pas une mauvaise idée. Certaines communes nouvelles ne trouvent en effet pas assez de candidats au conseil municipal. L'effectif que nous avons décidé pourrait n'être que facultatif. Mais j'entends que cette disposition risque d'être inconstitutionnelle et l'argument du vote conforme l'emporte. Il est dommage que le débat n'ait pas eu lieu en temps utile, y compris pour approfondir la question de l'inconstitutionnalité de cette disposition. Il est vrai que la loi prévoit toujours le nombre des élus de la collectivité.

L'amendement COM-1 n'est pas adopté.

La proposition de loi est adoptée sans modification.

Le sort de l'amendement examiné par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 1 er
Relèvement de l'effectif transitoire du conseil municipal des communes nouvelles

Mme Nathalie DELATTRE

1

Droit d'option pour la détermination de l'effectif du conseil municipal des communes nouvelles lors du premier renouvellement

Rejeté


* 1 Loi n° 71-588 du 16 juillet 1971 sur les fusions et regroupements de communes .

* 2 Tels sont, en effet, les principaux critères légaux ayant présidé à la refonte de la carte intercommunale au 1 er janvier 2017, en application du III de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales.

* 3 Pour rappel, la rédaction initiale de l'article 2, supprimée par votre commission des lois, aurait autorisé la création d'une commission permanente dans les communes nouvelles regroupant toutes les communes membres d'un ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre au cours de la période précédant le premier renouvellement qui suit la création de la commune nouvelle. Cette commission aurait eu compétence pour statuer sur toutes les affaires de la commune, hormis les plus importantes.

* 4 Amendement 17 rectifié, adopté en séance publique à l'initiative de notre collègue Loïc Hervé.

* 5 Rapport n° 144 (2014-2015) de M. Michel Mercier, sur la proposition de loi relative à l'amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes , fait au nom de la commission des lois, déposé le 3 décembre 2014. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : https://www.senat.fr/rap/l14-144/l14-144.html .

* 6 La rédaction de l'article 4, tel qu'adopté par nos collègues députés, ne doit pas tromper sur ce point : si le projet de rattachement doit être notifié au président de l'EPCI et aux maires, ce seraient bien les assemblées délibérantes qui, conformément aux règles habituelles en la matière, seraient appelées à formuler un avis.

* 7 Si le projet concernait des communes situées dans des départements différents, les CDCI concernées se réuniraient en formation interdépartementale.

* 8 Voir ci-après, le commentaire de l'article 8.

* 9 Article 7 de la loi n° 90-1103 du 11 décembre 1990 organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux .

* 10 Ces conditions sont prévues à l'article L. 2113-2 du code général des collectivités territoriales.

* 11 Article L. 2113-12-2 du même code.

* 12 Voir le tableau récapitulatif établi par notre collègue Mathieu Darnaud dans son rapport n° 546 (2017-2018), fait au nom de la commission des lois, sur la proposition de loi relative à l'équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale, p. 41-42. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l17-546/l17-5461.pdf .

* 13 Voir, à ce sujet, l'instruction du 28 décembre 2015 de la garde des sceaux, ministre de la justice.

* 14 Voir la décision du Conseil d'État du 19 décembre 1930, Rossi .

* 15 Articles L. 3112-1 et L. 4122-1 du code général des collectivités territoriales.

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