EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 22 janvier 2020 , sous la présidence de M. Christian Cambon, président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de M. Gilbert Bouchet sur le projet de loi n° 733 (2018-2019) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Tchad relatif aux services aériens et de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Angola relatif aux services aériens.

M. Gilbert Bouchet, rapporteur. - Nous examinons aujourd'hui un projet de loi autorisant l'approbation de deux accords bilatéraux aériens, signés respectivement avec le Tchad et l'Angola en 2018.

Le transport aérien entre la France et le Tchad est régi par un accord signé à Ndjamena en 1963, aujourd'hui obsolète en raison de l'évolution du droit international et européen. Ce nouvel accord est destiné à le remplacer. En revanche, le transport aérien entre la France et l'Angola n'est régi par aucun accord juridiquement contraignant.

Ces deux accords sont très proches et reprennent pour l'essentiel le modèle de l'accord aérien défini par l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI). La France, le Tchad et l'Angola sont tous trois parties à la convention relative à l'aviation civile internationale du 7 décembre 1944, dite « convention de Chicago », qui a institué l'OACI, dont la mission principale consiste à établir le cadre réglementaire mondial de la sécurité de l'aviation civile internationale.

Ces deux accords consacrent tout d'abord la possibilité d'exploiter, respectivement avec chacun des pays concernés, les quatre premières « libertés de l'air » définies par l'OACI : liberté de survol sans atterrir, liberté d'escale non commercial et liberté d'embarquer ou de débarquer des passagers, du fret, du courrier en provenance ou à destination de l'État qui a désigné le transporteur aérien, dans le cadre de l'exploitation d'un service agréé sur une route et des points d'escale spécifiés. Classiquement, le droit de cabotage, lui, est exclu, c'est-à-dire le droit, pour un transporteur aérien d'une partie, de transporter des passagers ou du fret d'un point à un autre sur le territoire d'une autre partie.

La négociation de ce type d'accord par les États membres de l'Union européenne avec des pays tiers est désormais encadrée par un règlement de 2004, qui fait suite aux arrêts de la Cour de justice des communautés européennes de 2002, dits « de Ciel Ouvert » consacrant les principes de libre-concurrence et de libre-établissement. En application de la procédure de notification instaurée par ce règlement, la Commission européenne a jugé les deux accords examinés conformes au droit européen. Le respect du droit européen est notamment assuré par l'inclusion de clauses types qui permettent à un État membre de désigner tout transporteur européen, dès lors qu'il est établi sur le territoire de cet État membre, et aux compagnies désignées de recourir à un prestataire de leur choix pour les services d'assistance en escale.

Ces accords contiennent d'autres clauses également classiques comme le principe d'égalité de traitement entre compagnies, la liberté pour une compagnie d'établir des agences commerciales sur le territoire de l'autre partie, la liberté de procéder à des transferts internationaux de recettes et la liberté de fixation des tarifs par les transporteurs. Ils incluent également des dispositions plus récentes du droit international et du droit européen relatives à la sécurité des vols : chaque partie peut demander des consultations au sujet des normes de sécurités adoptées par l'autre partie, une autorisation peut être suspendue ou révoquée en cas de non-respect des normes minimales et tout aéronef peut être soumis à une « inspection au sol » de la part de l'autre partie. L'obligation mutuelle de garantir la sûreté de l'aviation civile contre les actes d'intervention illicite, conformément aux droits et obligations résultant du droit international est également mentionnée.

Selon la pratique courante française, des exemptions de droits de nature fiscale et douanière sur différents biens et services sont également prévues sur la base de la réciprocité. Ces exemptions n'impliquent aucun changement de législation car elles sont toutes déjà prévues par le Code général des impôts.

L'accord avec le Tchad présente trois spécificités que l'on ne retrouve pas dans l'accord avec l'Angola qui, quant à lui, ne présente aucune clause particulière. D'abord il précise que les revenus d'exploitation ne sont imposables que dans la partie où se trouve le siège social afin d'éviter à Air France la double imposition sur le résultat d'exploitation de sa liaison entre Paris et N'Djaména, ce qui était un des principaux objectifs de la France. Ensuite, la définition de points intermédiaires dans le tableau des routes est, à la demande du Tchad, reportée à une date ultérieure, ce qui est sans conséquence, à ce stade, sur les opérations du pavillon français. Enfin, l'accord comporte un volet environnemental - facultatif dans ce type d'accord - rappelant la nécessité de favoriser un développement durable de l'aviation civile.

Le Tchad est un pays affecté de fragilités structurelles et un partenaire important de la France dans la lutte contre le terrorisme. Depuis l'été 2014, l'état-major de l'opération Barkhane est installé à N'Djaména et la France apporte un appui à la restructuration de l'armée tchadienne. La France est aussi l'un des premiers partenaires économiques du Tchad avec environ 80 millions d'euros d'exportations françaises en 2018. Par ailleurs, la France apporte également à ce pays une aide budgétaire dans le cadre du programme du Fonds monétaire international, une aide via le Fonds d'urgence humanitaire et les engagements de l'Agence française de développement au Tchad se sont élevés à 77 millions d'euros en 2018 et 88 millions en 2019.

Actuellement, Air France est l'unique opérateur entre la France et le Tchad avec, depuis le printemps 2018, 4 vols directs par semaine entre Paris CDG et N'Djaména. Depuis 2014, le trafic direct est en baisse de 24 % avec 38 000 passagers transportés en 2018, tandis que le trafic indirect via un pays tiers a atteint les 8 000 passagers cette même année. La majorité des passagers transitent par le Maroc (Royal Air Maroc), la Turquie (Turkish Air Lines) et l'Ethiopie (Ethiopian Air Lines). Le recul d'Air France s'explique par le développement du terrorisme - une grande partie du Tchad est en zone rouge - ainsi que par la concurrence des compagnies que je viens de citer. Côté tchadien, le Gouvernement a relancé, en octobre 2018, une compagnie nationale, Tchadia Air Lines, dans le cadre d'un partenariat avec Ethiopian Air Lines, qui n'exploite que des avions régionaux pour des liaisons domestiques ou vers des pays voisins. À ce stade, le lancement de vols vers la France paraît peu probable, même si les compagnies aériennes enregistrées au Tchad ne figurent pas sur la fameuse liste noire des transporteurs interdits dans l'Union européenne.

Quant à l'Angola, il a le quatrième PIB d'Afrique subsaharienne et un fort potentiel économique. Il occupe une place importante dans le monde lusophone et qui joue un rôle croissant au sein des instances régionales et internationales, notamment sur le continent africain. La présence française modeste y est ancienne et la coopération commerciale dynamique avec la présence de 70 entreprises françaises. L'Angola est notre 7ème partenaire dans la zone Afrique et Océan Indien et nous sommes l'un des quinze premiers partenaires de l'Angola en 2018. Les échanges commerciaux bilatéraux, largement dominés par les hydrocarbures, restent cependant modestes - 776 000 euros en 2018 -.

Comme au Tchad, Air France est actuellement l'unique opérateur entre la France et l'Angola. Il exploite la desserte directe entre Paris CDG et Luanda avec 3 vols par semaine actuellement. Depuis 2014, le trafic direct est en hausse de 12 % avec 58 000 passagers transportés en 2018. Le trafic indirect via un pays tiers s'élève à 15 000 passagers en 2017, le flux a toutefois diminué de 38 % depuis 2013. La majorité des passagers transitent par un pays européen : le Portugal (TAP Air Portugal), les Pays-Bas (KLM), la Belgique (Brussel Airlines) et l'Allemagne (Lufthansa). La crise pétrolière mondiale a entraîné une baisse de la demande et le retrait du marché de British Airways (juin 2018) et d'Iberia (juin 2016). Le principal opérateur angolais, la compagnie TAAG, exploite un réseau domestique et international. Sur le continent européen, seul le Portugal est desservi pour l'instant. Par ailleurs, il faut signaler que toutes les compagnies aériennes de l'Angola figurent sur la liste noire de l'Union Européenne.

En conclusion, je recommande l'adoption de ces deux accords. Les procédures de ratification sont toujours en cours au Tchad comme en Angola.

L'examen en séance publique est prévu le jeudi 30 janvier 2020 selon la procédure simplifiée, ce à quoi je souscris.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté le rapport et le projet de loi précité, M. Alain Cazabonne et le groupe CRCE s'abstenant.

Conformément aux orientations du rapport d'information n° 204 (2014-2015) qu'elle a adopté le 18 décembre 2014, la commission a autorisé la publication du présent rapport synthétique.

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