CHAPITRE V
MESURES DE SIMPLIFICATION
DU FONCTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS

Article 66
Mutualisation des fonctions support
de certains établissements publics de l'État

Cet article tend à déroger au principe de spécialité des établissements publics en permettant à ceux qui relèvent de l'État de mutualiser leurs fonctions support lorsqu'ils exercent les mêmes missions sur des territoires différents.

La commission des lois est favorable à cette disposition et a adopté l'article sans modification.

L'article 66 reprend l'objectif de l'article 30 de la loi dite « ASAP » 230 ( * ) censuré comme cavalier législatif par le Conseil constitutionnel 231 ( * ) . Il tend à autoriser les établissements publics de l'État qui exerce les mêmes missions sur des territoires différents à « mutualiser la gestion de fonctions et moyens nécessaires à la réalisation de ces missions » , c'est-à-dire des fonctions dites « support ».

La nécessité d'une telle autorisation législative est justifiée par la crainte que le principe de spécialité des établissements publics ne soit interprété comme faisant obstacle à la conclusion de conventions qui ne concourraient pas directement à l'objet attribué à l'établissement en cause. Cette interprétation est d'ailleurs retenue par le Conseil d'État 232 ( * ) .

L'article 66 tend à introduire trois modalités distinctes de mutualisation .

La première est la constitution d'un groupement d'intérêt public (GIP) selon les règles de droit commun. Un GIP est « une personne morale de droit public dotée de l'autonomie administrative et financière. Il est constitué par convention approuvée par l'Etat soit entre plusieurs personnes morales de droit public, soit entre l'une ou plusieurs d'entre elles et une ou plusieurs personnes morales de droit privé » 233 ( * ) . Ces groupements ont précisément pour objet l'exercice commun d'activités d'intérêt général à but non lucratif par la mise en commun des moyens nécessaires à leur exercice 234 ( * ) .

Le deuxième moyen prévu par l'article 66 est la conclusion d'une convention de coopération fixant « les modalités et les conditions financières de cette mutualisation », avec la possibilité de désigner un établissement support chargé, à titre gratuit, de la gestion commune des moyens et fonctions mutualisés et ayant la qualité d'ordonnateur pour le compte des établissements concernés.

À défaut de la constitution d'un GIP ou de la conclusion d'une convention, l'article 66 prévoit la possibilité d' une mutualisation par décret pris après avis du conseil d'administration des établissements concernés.

La commission des lois est favorable à ce dispositif qui induira des économies de moyens aux établissements publics de l'État concernés. Elle observe que les conventions de mutualisation ne semblent pas contrevenir au droit européen de la commande publique puisqu'elles entrent dans les hypothèses d'exclusion prévues au 4° de l'article 12 de la directive 2014/24/UE 235 ( * ) relatif à la coopération entre pouvoirs adjudicateurs.

En outre, le recours à un décret en l'absence d'accord peut sembler « autoritaire » mais il s'appliquera aux seuls établissements publics de l'État où l'État exerce, par définition, un pouvoir de contrôle . En outre, la consultation des conseils d'administration des établissements publics concernés permettra que s'expriment l'ensemble de leurs membres, y compris ceux qui ne siègent pas en qualité de représentants du Gouvernement ou de l'administration centrale .

La commission a adopté l'article 66 sans modification .

Article 67
Réforme des statuts de l'établissement public industriel
et commercial La Monnaie de Paris

L'article 67 du projet de loi réforme les statuts de l'établissement public industriel et commercial (EPIC) La Monnaie de Paris afin de permettre la diversification de ses activités.

La commission a adopté cet article en clarifiant sa rédaction.

1. La définition actuelle des missions de La Monnaie de Paris ne lui permet pas de mettre en oeuvre une stratégie de diversification de ses activités

1.1. Un établissement régi par le principe de spécialité...

La Monnaie de Paris est un établissement public à caractère industriel et commercia l (EPIC), dont les missions, définies à l'article L. 121-3 du code monétaire et financier, sont au nombre de six :

1°) le monopole de la frappe de la monnaie courante ;

2°) la frappe et la commercialisation des monnaies de collection française ayant cours légal et pouvoir libératoire ;

3°) la lutte contre le faux monnayage ;

4°) la fabrication et la commercialisation des instruments de marque, des poinçons de garantie des matières précieuses, des monnaies métalliques courantes étrangères, des monnaies de collection étrangères ainsi que les décorations ;

5°) la mise en valeur de ses collections historiques et du patrimoine immobilier dont il a la gestion ;

6°) la préservation, le développement et la transmission de son savoir-faire artistique et technique.

En tant qu'établissement public, La Monnaie de Paris est soumise au principe de spécialité , qui limite son champ d'intervention à ces missions.

1.2. ...et confronté à la nécessité de diversifier ses activités

La diminution de l'usage de la monnaie fiduciaire et la baisse conséquente de la commande de l'État (- 50 % en 10 ans) rend nécessaire une diversification de l'activité de La Monnaie de Paris . Le contrat pluriannuel entre l'État et La Monnaie de Paris conclu pour la période 2018-2022 a ainsi affirmé l'objectif de « rendre l'établissement plus agile et pérenniser le modèle économique de l'établissement, en le tournant vers des activités concurrentielles durablement profitables ».

En particulier, La Monnaie de Paris entend mener des opérations immobilières de nature mixte (activités, services, bureaux) sur le foncier valorisable entourant le site de l'usine de Pessac dont l'établissement est propriétaire.

Le champ d'activités de la Monnaie de Paris ne pouvant être élargi que par un texte de niveau législatif, conformément au principe de spécialité, il convient par conséquent de prévoir explicitement dans ses statuts les missions lui permettant :

- d' exercer des activités de valorisation immobilière qui ne concerneraient pas des biens directement liés à l'exercice de ses missions régaliennes ;

- de diversifier ses activités commerciales .

2. La réforme des statuts de La Monnaie de Paris proposée par l'article 67 du projet de loi apparaît opportune

2.1. L'article 67 réforme les statuts de l'établissement

L'article 67 du projet de loi modifie l'article L. 121-3 du code monétaire et financier afin de permettre à La Monnaie de Paris :

- de valoriser le patrimoine immobilier dont l'établissement est propriétaire ;

- de fabriquer et commercialiser tous produits en lien avec ses activités 236 ( * ) .

L'article prévoit également d'autoriser l'établissement à exercer l'ensemble de ses missions et toutes activités connexes s'y rattachant directement ou indirectement, par elle-même ou par le biais de filiales et prises de participations .

2.2. La commission voit dans la mesure un facteur de modernisation industrielle et de dynamisme territorial

Les rapporteurs estiment opportune cette réforme des statuts de La Monnaie de Paris pour lui permettre de diversifier ses activités.

Ainsi que le précise l'étude d'impact, une étude d'opportunité conduite entre avril et novembre 2019 a conclu à la pertinence pour La Monnaie de Paris de la diversification dans l'immobilier. Situé dans un bassin économique dynamique, où la demande de locaux destinés aux petites et moyennes entreprises ainsi qu'aux petites et moyennes industries est en forte croissance, le site de Pessac bénéficie en effet d'une implantation stratégique .

Aussi le dispositif apparaît-il comme un facteur de modernisation industrielle, de création de richesse et de dynamisme territorial.

La commission a, par l'adoption de l' amendement COM-1100 de ses rapporteurs, clarifié la rédaction de l'article 67.

La commission a adopté l'article 67 ainsi modifié .

Article 67 bis (nouveau)
Instauration du comité social d'administration
de l'Agence nationale de cohésion des territoires

Introduit par la commission à l'initiative de ses rapporteurs, l'article 67 bis vise à créer un comité social d'administration de l'Agence nationale de cohésion des territoires, en lieu et place des trois instances de concertation actuelles.

1. Les instances de concertation actuelles de l'Agence nationale de cohésion des territoires

1.1. Les instances de concertation de l'Agence nationale de cohésion des territoires

L'Agence nationale de cohésion des territoires est née le 1 er janvier 2020 de la fusion 237 ( * ) du Commissariat général à l'égalité des territoires, de l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, et de l'Agence du numérique, en application de la loi n°2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires. Son personnel est constitué d'agents publics ainsi que de salariés de droit privé.

Elle comprend actuellement trois instances de concertation , prévues par l'article L. 1233-5 du code général des collectivités territoriales :

- un comité technique, compétent pour les agents publics ;

- un comité social et économique , compétent pour les salariés régis par le code du travail ;

- un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail .

1.2. Les conséquences de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique en matière d'instances de concertation

Le titre I er de la loi n°2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a pour objet la promotion d'un dialogue social plus efficace. Son article 4 prévoit à cette fin que « dans toutes les administrations de l'État et dans tous les établissements publics de l'État ne présentant pas un caractère industriel ou commercial, il est institué un ou plusieurs comités sociaux d'administration ».

Établissement public sans caractère industriel ou commercial, l'Agence nationale de cohésion des territoires est donc concernée par cette mesure.

Aussi l'article 67 bis du projet de loi, introduit par la commission par l'adoption de l' amendement COM-1101 des rapporteurs, vise-t-il à lui appliquer les dispositions prévues par l'article 4 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

2. L'article 67 bis du projet de loi institue le comité social d'administration de l'Agence nationale de cohésion des territoires

Une mise en cohérence des instances de concertation de l'Agence nationale de cohésion des territoires avec les dispositions de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation publique est nécessaire.

Une telle mesure s'inscrit dans le cadre de la simplification du fonctionnement des établissements publics qui est l'objet du chapitre V du titre VII du projet de loi.

C'est pourquoi la commission, à l'initiative de ses rapporteurs, a introduit l'article 67 bis qui vise à appliquer à l'Agence nationale de cohésion des territoires l'article 4 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique ( amendement COM-1101 des rapporteurs).

L'article détaillerait tout d'abord la composition du personnel de l'Agence nationale de la cohésion des territoires, en précisant que les « agents publics » mentionnés par l'article L. 1233-5 du code général des collectivités sont des fonctionnaires de l'État et des agents non titulaires de droit public .

L'article instituerait ensuite un comité social d'administration , composé du directeur général de l'Agence nationale de cohésion des territoires 238 ( * ) , qui le préside, et des représentants du personnel . Le comité social d'administration reprendrait les attributions du comité technique et du comité social et économique actuels , mentionnées au II de l'article 15 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État et au chapitre II du titre I er du livre III de la deuxième partie du code du travail. Ainsi, le comité social d'administration serait compétent pour toutes les questions relatives à l'organisation et au fonctionnement des services, aux effectifs, aux emplois et aux compétences .

L'élection des représentants du personnel en deux collèges serait maintenue : l'un pour les agents de droit public (fonctionnaires et contractuels), l'autre pour les salariés de droit privé.

Deux commissions seraient créées au sein du comité social d'administration :

- une commission chargée de la santé, de la sécurité et des conditions de travail , sur le modèle de l'actuel comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ;

- une commission des droits des salariés , qui remplirait notamment les missions attribuées par le code du travail à la commission de la formation, à la commission d'information et d'aide au logement, et à la commission de l'égalité professionnelle 239 ( * ) .

La commission a adopté l'article 67 bis ainsi rédigé .


* 230 Loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique.

* 231 Décision n° 2020-807 DC du 3 décembre 2020, article 30.

* 232 Page 39 de l'avis du Conseil d'État.

* 233 Article 98 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit.

* 234 Ibidem.

* 235 Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE.

* 236 Il lui est actuellement possible de fabriquer et commercialiser uniquement des médailles, jetons, fontes, bijoux et autres objets d'art.

* 237 Prévue par la loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires.

* 238 Ou de son représentant.

* 239 Articles L. 2315-49 à L. 2315-56 du code du travail.

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