EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 9 février 2022, sous la présidence de M. Cédric Perrin, vice-président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de Mme Sylvie Goy-Chavent sur les projets de loi n° 415 (2021-2022) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Maurice relatif à la coopération en matière de défense et au statut des forces, et n° 416 (2021-2022) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'État du Qatar relatif au statut de leurs forces.

M. Cédric Perrin, président . - Nous commençons ce matin par l'examen du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Maurice relatif à la coopération en matière de défense et au statut des forces, et du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'État du Qatar relatif au statut de leurs forces, sur le rapport de notre collègue Sylvie Goy-Chavent.

Mme Sylvie Goy-Chavent, rapporteur. - Nous examinons conjointement deux accords relatifs au statut des forces, conclus avec le Qatar d'une part, Maurice d'autre part.

Le Qatar est un allié stratégique de la France, dans un contexte de fortes tensions au Proche et Moyen-Orient. Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme au Levant, le pays accueille 24 personnels de notre armée de l'air et de l'espace engagés dans l'opération Chammal et déployés sur la base militaire américaine d'Al-Udeid. Par ailleurs, au Sahel, le Qatar a fourni un appui capacitaire à la force conjointe du G5 Sahel en livrant une cinquantaine de véhicules blindés au Mali et au Burkina Faso.

Le partenariat franco-qatarien s'exprime aussi dans le domaine industriel de défense. D'après le dernier rapport au Parlement sur le sujet, le Qatar était le troisième client de la France pour la période 2016-2020, avec 18 % des commandes d'armes françaises. Ces dernières années, le pays a notamment signé deux contrats pour l'acquisition de 36 Rafale au total qui, pour l'essentiel, ont déjà été livrés.

Compte tenu de ces grands contrats d'armement, notre coopération militaire prend également la forme d'activités de formation dispensées aux forces armées qatariennes. Ainsi, ces dernières années, quelque 230 Qatariens ont été formés sur le Rafale sur la base aérienne de Mont-de-Marsan, et une quarantaine de personnes ont suivi des études dans les écoles militaires françaises.

Enfin, lors de la crise afghane d'août dernier, le Qatar a appuyé la France dans l'opération Apagan d'évacuation de ressortissants français et afghans - ces derniers étaient pour la plupart d'anciens auxiliaires de l'armée française, menacés en raison de leur engagement aux côtés de notre pays.

S'agissant de Maurice, l'accord s'inscrit dans la stratégie française en Indopacifique. Cet État insulaire, voisin de deux départements ultramarins, La Réunion et Mayotte, est confronté aux mêmes problématiques que la France dans le sud de l'océan Indien, à savoir la sécurité maritime et la transition écologique. Ces défis communs ont renforcé notre coopération qui, somme toute, reste relativement modeste.

Cet État présente la particularité de ne pas disposer d'armée ; sa sécurité repose sur les forces de sécurité mauriciennes, en particulier sa « force spéciale mobile », qui entretiennent des liens solides avec les Forces armées dans la zone sud de l'océan Indien (FAZSOI), composées de 1 700 militaires français.

Les FAZSOI garantissent la protection du territoire national et animent la coopération régionale depuis La Réunion et Mayotte. Elles constituent le principal point d'appui dans la zone indopacifique pour lutter contre les menaces régionales - piraterie, immigration illégale -, assurer la surveillance de nos zones économiques exclusives et conserver une capacité régionale d'intervention rapide.

J'en viens à présent au contenu des accords.

Leur objet est de renforcer le cadre juridique de nos coopérations militaires avec le Qatar et Maurice, en définissant les principes de leur mise en oeuvre. L'absence de tels accords constitue aujourd'hui un réel frein à l'approfondissement de nos relations bilatérales en ce domaine. À titre d'exemple, le plan annuel de coopération franco-qatarien comprend une centaine d'actions, mais moins de la moitié a pu être mise en oeuvre, faute d'instrument juridique couvrant l'intégralité des champs de la coopération. De même, les escales des FAZSOI sur l'île Maurice ne sont pas systématiquement autorisées pour des raisons analogues.

Les dispositions de ces accords s'appliqueront tant aux personnels militaires qu'aux personnels civils, notamment aux agents de la direction générale de l'armement (DGA) appelés à se déplacer dans le cadre des contrats d'armement.

Les deux textes soumis à notre examen sont de facture classique. Ils régissent notamment les conditions d'entrée et de séjour sur le territoire de l'autre partie, le port de l'uniforme et des insignes militaires, ainsi que la détention, le port et l'utilisation des armes de dotation par les militaires de chaque partie. En outre, les parties reconnaissent, sur leur territoire, la validité des permis de conduire pour les véhicules et engins militaires de l'autre partie.

Enfin, il est important de souligner que ces deux accords sont conformes à nos exigences constitutionnelles et conventionnelles ; il s'agissait d'une condition sine qua non pour conclure l'accord avec le Qatar, qui continue d'appliquer la peine capitale. En effet, en 2020, un ressortissant népalais a été exécuté à la suite de sa condamnation à mort pour meurtre, ce qui a mis fin au moratoire observé dans le pays depuis 2003.

L'article 11 de l'accord franco-qatarien protège ainsi les membres du personnel des deux États contre la peine capitale ainsi que les traitements inhumains et dégradants. Ces peines ne seront ni requises ni prononcées ; dans l'hypothèse où elles seraient malgré tout prononcées, elles ne seraient alors pas exécutées. Ces stipulations protègent à la fois les personnels français et les personnes à leur charge, mais également les personnels qatariens soumis à la juridiction française et pouvant faire l'objet d'une mesure d'extradition ou d'expulsion.

Pour conclure, ces accords répondent aux intérêts de la France en ce qu'ils renforcent le cadre juridique de nos partenariats, noués dans des régions stratégiques pour notre défense et notre sécurité.

En conséquence, je préconise l'adoption de ces deux projets de loi, adoptés par l'Assemblée nationale le 27 janvier dernier. Leur examen en séance publique au Sénat est prévu selon la procédure d'examen simplifié, ce à quoi la conférence des présidents, de même que votre rapporteur, a souscrit.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté, à l'unanimité, le rapport et les projets de loi précités.

Conformément aux orientations du rapport d'information n° 204 (2014-2015) qu'elle a adopté le 18 décembre 2014, la commission a autorisé la publication du présent rapport synthétique.

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