Rapport général n° 77 (1995-1996) de M. Joël BOURDIN , fait au nom de la commission des finances, déposé le 27 novembre 1995

Disponible au format Acrobat (1 Moctet)

N°77

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1993.

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 1996, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Alain LAMBERT,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Deuxième partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 45

PRESTATIONS SOCIALES AGRICOLES

Rapporteur spécial : M. Joël BOURDIN

(1) Cette commission est composée de MM. Christian Poncelet, président ; Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, vice-présidents ; Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Emmanuel Hamel, René Régnault, François Trucy, secrétaires ; Alain Lambert, rapporteur général ; MM. Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Philippe Marini, Marc Massion, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Alain Richard, Maurice Schumann, Michel Sergent, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (10 ème législ.) : 2222, 2270 à 2275 et T.A. 413.

Sénat : 76 (1995-1996).

Lois de finances.

INTRODUCTION

Les règles applicables au financement du BAPSA ont profondément évolué depuis plusieurs années, tant en raison de la mise en oeuvre de la réforme de l'assiette que des multiples améliorations apportées au régime de protection sociale des agriculteurs.

La perspective d'une réforme d'ensemble du financement des régimes sociaux ne manquera pas de susciter par ailleurs des interrogations sur l'avenir de ce budget annexe des prestations sociales agricoles, auquel votre commission des finances demeure très attachée.

Le projet de budget annexe des prestations sociales agricoles pour 1996 enregistre une progression modérée par rapport à 1995. Son montant global passera de 87 à 89 milliards soit une hausse de 2,24 % en francs courants par rapport à la loi de finances initiale et une quasi-stabilité en francs constants. Il sera marqué par l'achèvement de la réforme des cotisations sociales agricoles et par un "désengagement " de l'État à l'égard du régime des exploitants agricoles, car la subvention d'équilibre aura diminué, en deux ans, de 18,6 à 6,4 milliards de francs.

Le BAPSA 1996 traduit notamment les effets de la loi de modernisation de l'agriculture qui a prévu la levée progressive de l'interdiction de cumul entre droits propres et pensions de réversion durant la période 1995-1996 ainsi qu'une majoration forfaitaire pour les pensions liquidées avant le 1 er janvier 1995. De 2.000 francs en 1995, cette majoration est portée à 4.000 francs à partir de 1996, puis 6.000 francs en 1997.

En ce qui concerne le financement professionnel, on observe une progression assez forte, de 5,9 % des cotisations professionnelles. Mais cette hausse doit être rapprochée des prévisions révisées de l'année 1995 qui tiennent compte de la très bonne tenue d'ensemble du revenu agricole en 1995.

Au total, la part du financement professionnel, depuis le début de la réforme, est passée de 20 % à moins 16 % du total des recettes du BAPSA. Cet indicateur doit être toutefois relativisé car il ne tient pas compte de toutes les contributions acquittées par les exploitants agricoles.

L'analyse de ce projet de BAPSA pour 1996 est toutefois rendue plus complexe par l'initiative du gouvernement tendant à "gommer " tant en recettes qu'en dépenses les bonifications pour enfants à charge.

CHAPITRE PREMIER UN PROJET DE BAPSA JUSTIFIANT QUELQUES RAPPELS

I. L'ANALYSE DU BAPSA EN TENDANCE EST RENDUE COMPLEXE EN RAISON DU BOULEVERSEMENT DES RÈGLES D'ASSIETTE ET DES MODALITÉS DE FINANCEMENT OBSERVÉES DEPUIS 1990

A. LA MISE EN OEUVRE DE LA RÉFORME DE 1990

1. Le basculement de l'assiette cadastrale (RC) sur l'assiette revenus professionnels (RP)

Cette réforme sera achevée en 1996, soit avec 3 ans d'avance sur le cheminement initialement prévu.

2. La suppression des taxes sur les produits

En contrepartie de ce basculement, l'article 25 du projet de loi de finances 96 abroge les taxes BAPSA sur les betteraves, céréales et oléagineux.

D'un produit de 1,7 milliard de francs en 1990, elles n'auront plus qu'un rendement de 53 millions de francs en 1996 (reliquat des campagnes de commercialisation).

B. L'AMÉLIORATION DES RÈGLES D'ASSIETTE

De nombreuses mesures favorables ont été prises depuis 1993 :

1. Prise en compte des déficits pour leur valeur réelle dans la moyenne triennale, financée sur la masse des cotisations.

2. Possibilité d'opter pour l'année n et calcul de la moyenne triennale sur les années n-3, n-2, n-1. Ces mesures techniques sont surtout avantageuses les "mauvaises " années, notamment au plan fiscal en raison de la progressivité de l'impôt sur le revenu.

3. Possibilité de réduire l'assiette d'un montant supposé représenter la rémunération du foncier. L'abattement se calcule comme suit :

A = RC - 4 % (RP - RC) x RCp / RCf + RCp

RCp : revenu cadastral des terres en propriété

RCf : revenu cadastral des terres en fermage

C. LA MISE EN PLACE DU FSV (FONDS DE SOLIDARITÉ VIEILLESSE)

Conformément à sa vocation, le FSV devrait assumer les bonifications de pension pour enfants à charge des exploitants agricoles.

Pour 1996, le projet de BAPSA anticipait, en fait, le versement du FSV et inscrivait une recette à hauteur de 1,943 milliard de francs ainsi qu'une dépense correspondante. Le vote de l'amendement du Gouvernement (Art. 17 bis) minore de 1,943 million de francs la ligne 70-59 (versement du FSV) et le montant initial du chapitre 46-96 (Art. 30) "prestations vieillesse versées aux non salariés du régime agricole ". Les limites de l'ingénierie budgétaire semblent atteintes, ainsi que nous l'exposerons au chapitre II.

D. LA CONTRIBUTION ORGANIC ET LA COTISATION TVA

Le projet de loi de finances 1995 a vu le retour à une cotisation TVA de 0,7 point et la suppression du prélèvement sur les réserves de CSSS de l'ORGANIC qui avait atteint en cumulé 11,2 milliards de francs sur les années 92 et 93.

Pour ces années 92 et 93, la cotisation TVA avait été abaissée de 0,6 à 0,4 %.

II. LA MISE EN PERSPECTIVE DE LA PROTECTION SOCIALE EN AGRICULTURE

Trois rapports récents ont permis' de mettre en perspective les évolutions de la protection sociale en agriculture.

A. LE PRINCIPE DE PARITÉ

Pour tenter de mettre un terme aux controverses sur la parité de l'effort contributif des exploitants agricole, un rapport a été commandé à Mme Yannick MOREAU , Conseiller d'État, par le Ministre de l'Agriculture (1 ( * )) . Ce rapport, nuancé, conclut à l'existence d'une sous-parité : pour 1995, le taux des cotisations devrait être de 42,04 % alors que le taux appelé a été de 38,76 %. Deux dépenses financées par la masse des cotisations sont traditionnellement contestées par les organisations agricoles (le déficit pour l'assiette triennale et l'exo-jeunes). Elles représentent respectivement 0,64 point et 0,37 point de cotisation. La sous-parité demeurerait, quoi qu'atténuée, après prise en compte de ces dépenses.

Ce rapport met, en outre, en évidence des règles de calcul de l'assiette globalement favorables aux exploitants agricoles, qui s'ajoutent aux disparités de taux. Il conclut enfin : "Nous attirons particulièrement l'attention sur les questions d'assiette pour lesquelles les mesures prises pour les exploitants agricoles pourraient, si l'on n'y prête pas garde, poser un jour problème notamment vis à vis des non-non ou du régime général ; il est également important que la direction générale des impôts veille à ce que les sous-évaluations manifestes du forfait soient corrigées même si les exploitants ne sont pas imposables. "

La complexité extrême du dossier justifierait que de nombreuses critiques soient apportées au travail néanmoins remarquable du

Conseiller d'État MOREAU. Ce rapport d'étape, qui en appelle d'autres, présente le mérite de proposer une méthodologie opérationnelle qui devra être affinée.

B. LE FINANCEMENT DES CAISSES DE M.S.A.

Pour répondre à une observation de votre Commission des finances, une mission d'inspection a été diligentée en 1995 pour faire le point sur les difficultés rencontrées par les 85 caisses. Ces caisses de M.S.A. perçoivent des "cotisations complémentaires " et financent des dépenses de gestion et d'action sanitaire et sociale (2 ( * )) .

L'insuffisance de leurs ressources a conduit le Gouvernement à augmenter les taux de ces cotisations de 0,63 % à 1,09 % en PFA et de 1,43 % à 2,02% en AMEXA (exploitants et salariés). Les caisses connaissent également des problèmes de compensation interne dus pour partie au changement d'assiette qui ne leur permet plus de jouer sur le revenu cadastral. Des mesures transitoires ont été prises par le Gouvernement pour réduire ces problèmes de compensation. C'est dans cette perspective que le rapport d'inspection doit être restitué. Il propose notamment :

- un accompagnement des mesures de rationalisation déjà engagées en matière de moyens administratifs et financiers ;

- un renforcement progressif de la péréquation grâce à des mécanismes complexes tant en ce qui concerne les dépenses de gestion que les dépenses d'action sanitaire et sociale ;

- des propositions d'aménagement de l'action sanitaire et sociale dans le cadre départemental.

C. LES RÈGLES DE COMPENSATION ET DE TRANSFERT AU PROFIT DU BAPSA

Dans un premier rapport annuel au Parlement sur la Sécurité Sociale, la Cour des Comptes "épingle " la MSA pour ce qui ne semble pas être autre chose qu'une broutille (dates de versement de certaines prestations retardées, générant des gains de trésorerie) en voie de régularisation par ailleurs. Le second rapport devrait contenir une analyse détaillée du fonctionnement de la MSA.

En revanche, la Cour met en évidence les spécificités du régime agricole de protection sociale (3 ( * ))

1. La structure spécifique des ressources

Part dans les ressources du régime en %

2. L'importance des transferts globaux (milliards de francs) pour 1993

3. L'opacité des règles de transferts

La Cour souligne :

"En outre, la croissance des transferts entre régimes a abouti à une situation caractérisée par la complexité et l'obscurité. On ne dénombre pas moins de douze mécanismes de compensation et de sept dispositifs de transferts, qui obéissant à des règles souvent disparates, font l'objet de modifications fréquentes, et dont la base juridique est parfois incertaine.

S'agissant des compensations démographiques, les inconvénients dus à ces insuffisances sont aggravés par l'absence de procédures efficaces de contrôle et de sanction, la commission de compensation créée par un arrêté du 6 avril 1974 ne jouant en la matière qu'un rôle limité et mal défini. Le système est l'objet de contestations croissantes de la part de régimes qui subissent la charge de transferts parfois inspirés plus par des considérations de financement à court terme que par le souci de solidarité démographique.

Les transferts financiers entre régimes sociaux, et plus particulièrement les compensations, sont l'un des moyens d'expression de la solidarité nationale devant les risques de la vieillesse et de la maladie. Ils doivent obéir à des règles du jeu claires et stables dont l'application doit être confiée à une instance disposant des pouvoirs appropriés. "

4. Retards dans la publication des arrêtés de transferts

Pour le BAPSA, ces retards sont fréquents et importants. Ainsi, les régularisations pour 1992 ont été arrêtées le 15/02/95 (+456 millions de francs) et, au lieu d'être imputées sur l'exercice 1993, elles l'ont été sur 1994... Les statisticiens, amateurs de séries longues, apprécieront.

III. LE PROJET DE BAPSA POUR 1996

Le BAPSA 1996 n'augmenterait que de 2,12 % par rapport au BAPSA 1995 révisé, ainsi qu'il ressort du tableau ci-après. Cette faible hausse vient après celle de 1995 qui serait de 2,4 % (1995 révisé par rapport à 1994 exécuté). Elle s'explique largement par le déclin de la démographie agricole. Hors revalorisation des retraites (droits propres et droits dérivées), l'augmentation serait presque nulle.

ÉVOLUTION DES PRÉVISIONS DE DÉPENSES DU BAPSA ENTRE 1995 ET 1996

A. LA MAÎTRISE DES DÉPENSES

Avant prise en compte de l'amendement du Gouvernement qui conduit à minorer ces dépenses de 1.943 milliards de francs, celles-ci s'établiraient à 89 milliards de francs hors restitutions de TVA.

1. La vieillesse

En 1996, les dépenses de prestations vieillesse augmenteraient de 2,37% par rapport au budget voté de 1995 et de 2,19% par rapport aux nouvelles prévisions de dépenses pour l'année 1995.

Les retraites proprement dites (forfaitaires et contributives) verraient leurs dépenses progresser de 3,13 % par rapport à 1995 révisé, tandis que la poursuite du recul (- 7,64 %) des versements d'allocations supplémentaires FSV traduirait l'amélioration des premières.

Deux mesures prises en 1995 expliquent pour partie cette hausse :

- le "coup de pouce " général aux retraites du 1er juillet 1995 entraîne en 1996, au titre des mesures acquises, des dépenses supplémentaires de l'ordre de 200 millions de francs sur les retraites contributives et d'autant sur les allocations supplémentaires du FSV ;

- la seconde étape de l'amélioration des pensions de réversion

décidée en loi de modernisation de l'agriculture permet notamment aux veuves et veufs actuels de bénéficier, en 1996, d'une nouvelle majoration de leur pension de 2.000 francs, soit une augmentation de 4.000 francs sur 2 ans (coût net : 1,033 milliard de francs).

2. La maladie

Les dépenses d'assurance maladie, maternité et invalidité ont été évaluées à 34,85 milliards, sans naturellement qu'il ait été tenu compte des nouvelles mesures pouvant être décidées pour maîtriser les dépenses de santé. Elles progresseraient de 1,23 % par rapport à celles figurant dans le BAPSA (LFI/LMA) de 1995 et d'un pourcentage un peu plus important par rapport aux dépenses effectives de 1995 qui se situent en deçà des prévisions (3,19%).

3. Les dépenses de prestations familiales

Les dépenses de prestations familiales (4,6 milliards) diminuent légèrement (- 126 millions de francs) malgré la revalorisation de la base mensuelle des allocations familiales et l'application du plan famille, ceci en raison de l'évolution démographique de la population agricole.

L'habitude semble désormais prise d'annoncer chaque année une majoration "exceptionnelle " et non reconductible de l'allocation de rentrée scolaire. Cette majoration n'est donc pas anticipée dans les crédits initiaux (185 millions de francs en 1995).

Par ailleurs, la stabilité apparente résulte de facteurs contradictoires :

- le déclin des effectifs de bénéficiaires (en allocations familiales, -5,5 % prévus en 1995 comme en 1996) ;

- la revalorisation prévue, pour 1996, de la base mensuelle des allocations familiales (BMAF) et de l'allocation aux adultes handicapés (respectivement de 2,1 % et 3,8 %) ;

-l'application de la "loi famille " du 25 juillet 1994, avec un coût supplémentaire estimé pour 1996 à 130 millions de francs (la loi famille a notamment prévu l'élargissement de l'allocation parentale d'éducation aux familles de deux enfants et, à titre partiel, aux parents travaillant à temps partiel, le relèvement progressif de l'âge limite des enfants donnant droit aux allocations familiales et la création d'une "allocation d'adoption ").

4. Les dépenses d'intérêts

Les crédits prévus pour couvrir les intérêts des emprunts de trésorerie du BAPSA passent de 150 millions de francs en loi de finances initiale pour 1995 (300 millions de francs en estimation révisée) à 200 millions de francs, les excédents de gestion constatés à hauteur de plus d'un milliard de francs fin 1993 et fin 1994, en augmentant d'autant le fonds de roulement du budget annexe, diminuant ses besoins de financement à court terme. Cependant, le rythme des rattachements au budget annexe des ressources importantes (subventions de l'État, acomptes de compensation et du FSV) et des décaissements, peut modifier le besoin de financement.

B. LA STRUCTURE DES RECETTES

1. Le financement professionnel

Le produit des cotisations techniques attendu en 1996 s'élève à 14.150 millions de francs, en progression de 5,9 % sur le montant inscrit en loi de finances initiale pour 1995, mais en recul de 0,3 % sur les prévisions révisées pour cette année, dans le cadre du décret annuel de financement, qui a augmenté le rendement prévisionnel 1995 pour tenir compte de la bonne tenue du revenu agricole et de la suppression de la remise forfaitaire de 42 francs sur les cotisations vieillesse, et ce malgré la perte d'assiette due à la déductibilité du revenu implicite des terres en faire-valoir direct ouverte par la loi de modernisation.

Grâce à la disparition des taxes sur les produits agricoles, le montant global du financement du BAPSA à la charge de la profession agricole, défini comme la somme des cotisations sociales et de ces taxes, baisserait de 2 % en 1996 par rapport à 1995 (décret de financement), baisse voisine de celle de l'assiette des cotisations, l'effort supplémentaire demandé à travers l'annualisation de la suppression de la remise forfaitaire de 42 francs sur les cotisations vieillesse (+217 millions de francs) étant compensé par la diminution des taxes (- 247 millions de francs).

2. Les concours inter-régimes

- Pour la compensation démographique, l'augmentation prévue en 1996 résulte de la dégradation de l'équilibre démographique du régime agricole. Les données 95 et 96 ne sont toutefois guère comparables en raison du système d'acomptes et de régularisations retenu. De plus, il conviendrait de tirer les conséquences de la nouvelle présentation du FSV (cf. ci-dessus).

- Pour la compensation Caisse Nationale d'Allocations Familiales (CNAF), la diminution significative prévue de ce versement traduit donc mécaniquement, la stabilité (en comparaison projet de loi de finances pour 1996/loi de finances initiale pour 1995) des cotisations de prestations familiales de exploitants et la poursuite du déclin des prestations versées.

- Pour le FSV, l'évaluation donnée par le projet de loi de finances des versements du Fonds de solidarité vieillesse au BAPSA en 1996 s'élève à6.123 millions de francs. Cette somme couvre principalement, ainsi que le montre le tableau ci-après, les dépenses du budget annexe au titre de l'allocation différentielle permettant d'atteindre le minimum vieillesse en cas d'insuffisance des avantages contributifs et les bonifications des retraites pour enfants. L'amélioration des retraites contributives, accélérée par les mesures en faveur des aides familiaux et des veuves, entraîne une diminution rapide du montant correspondant au service de l'allocation différentielle, qui ne représenterait plus que 4,1 milliards de francs en 1996.

Versements du FSV au BAPSA

3. Les concours budgétaires et assimilés

L'État contribue, en 1996 comme en 1995, au BAPSA de trois manières :

- en lui remboursant les allocations supplémentaires aux invalides à travers le fonds spécial d'invalidité (FSI) ;

- par le remboursement des allocations aux adultes handicapés (AAH) versées par les caisses de Mutualité sociale agricole ;

- par la subvention de solde censée assurer l'équilibre du budget annexe.

Concours budgétaires et assimiles au BAPSA

L'évolution modérée prévue pour la fraction de TVA, dont le taux reste fixé à 0,7 % de l'assiette, s'explique par le fait que le rendement prévu pour 1995 a été révisé à la baisse de 447 millions de francs. Le montant indiqué pour 1996 est en augmentation de 4,7 % sur le montant révisé pour 1995, ce qui rend compte de la croissance économique attendue en 1996.

La diminution globale des concours de l'État au BAPSA en 1996 proviendrait essentiellement de celle de la subvention d'équilibre : - 29 % à 6,4 milliards de francs.

IV. OBSERVATIONS DE LA COMMISSION DES FINANCES

1. Malgré les revalorisations très appréciables intervenues depuis 1993 (droits propres et droits privés), le montant moyen des retraites agricoles demeure modeste : 28.000 francs (voisin du RMI, mais inférieur de 10.000 francs au minimum vieillesse). Selon le ministre, "il convient d'aller plus loin " dans la voie de la revalorisation, mais il a rappelé qu'une "majoration de 10% des pensions entraînerait une charge annuelle supplémentaire pour le BAPSA de 4,4 milliards de francs ".

2. Les variations incessantes des relations entre le FSV et le BAPSA rendent délicate l'interprétation du BAPSA 1996. Si le transfert au FSV des bonifications pour enfants est effectué, il en résulterait mathématiquement une baisse de 0,9 milliard de francs de recettes de compensation. Toutefois, la variation spontanée -en fonction du revenu agricole, de la conjoncture économique- du rendement des grandes ressources du budget annexe (cotisations, fraction de TVA, compensation), suffit souvent à déplacer de plusieurs centaines de millions de francs l'équilibre du BAPSA.

3. Suite à une observation de votre commission des finances, des instructions ont été données par la direction générale des impôts et le service de la législation fiscale aux services fiscaux départementaux pour que les aides compensatoires de la politique agricole commune soient prises en compte dans le calcul des bénéfices forfaitaires.

En effet, selon les dernières données disponibles, la sous-évaluation de l'assiette des exploitants au forfait est estimée, selon les branches, à un montant compris entre 6 milliards (maladie) et 7,5 milliards (cotisations prestations familiales). Compte tenu du mode de calcul des charges sociales, la perte de cotisations serait en 1994, de l'ordre de 2,5 milliards de francs.

4. Il convient à nouveau de signaler que la présentation du BAPSA ne tient compte ni des cotisations complémentaires (pourtant intégrées dans le calcul de la parité) ni de la C.S.G. versée par les exploitants agricoles.

5. L'exacerbation du débat sur la parité, les difficultés rencontrées par les caisses de M.S.A., la crise générale du système de protection sociale qui pourrait se traduire par une certaine remise en cause des transferts de compensation, impliquent à l'évidence la conduite d'une analyse prospective sur l'avenir du BAPSA.

CHAPITRE II UN PROJET DE BAPSA SUSCITANT QUELQUES INTERROGATIONS

Le projet de loi de finances pour 1996 contient trois dispositions concernant directement ou indirectement le BAPSA : la rémunération des personnels mis à disposition du ministère de l'Agriculture par les Caisses de MSA, la modification de l'imputation comptable des versements du FSV, ainsi que la fusion de la réduction dégressive de charges sociales et de l'exonération de cotisations d'allocations familiales sur les salaires.

I. LA NÉCESSITÉ D'ADAPTER L'ARTICLE 69 DU PROJET DE LOI DE FINANCES AUX SPÉCIFICITÉS DU RÉGIME SOCIAL AGRICOLE

Cet article unifie, à titre expérimental, rabattement-famille et la ristourne dégressive des cotisations sociales patronales à compter du 1er juillet 1996 et jusqu'au 31 décembre 1997, dans un souci de simplification des dispositions d'allégement du coût du travail pour les entreprises. En contrepartie, il suspend, en 1996 et 1997, le processus de fiscalisation progressive des cotisations d'allocations familiales inscrit dans la loi quinquennale du 20 décembre 1993.

Toutefois cette fusion risque d'entraîner une augmentation des cotisations patronales dues par les exploitants agricoles employeurs de salariés permanents ou occasionnels.

En effet, jusqu'en 1993, les employeurs agricoles versaient les cotisations d'allocations familiales sur la base du revenu cadastral. Dans le cadre de la réforme des cotisations sociales agricoles, ces cotisations sont, depuis 1994, calculées sur la base des salaires effectivement versés. Cependant, pour éviter une transition trop brutale, il avait été admis que les taux appliqués aux salaires seraient fixés à des niveaux tels que le rendement de la cotisation ne soit pas globalement supérieur au rendement attendu lors de la dernière année du processus d'exonération sur les bas salaires, prévu à l'article L 241-6-1 du code de la sécurité sociale, par la loi quinquennale pour l'emploi.

Pour maintenir cette situation, il conviendrait donc d'étendre les dispositions de l'article L. 241-6-2 du C.S.S. prévues au IV de l'article 69 aux salariés agricoles visés aux 1° et 2° de l'article 1144 du code rural.

Par ailleurs, pour l'emploi de travailleurs occasionnels, les employeurs agricoles versent des cotisations d'assurances sociales et d'accidents du travail calculées en application de taux réduits. Cette modalité est prévue à l'avant-dernier alinéa de l'article 1031 du code rural ayant fait l'objet de l'article 62 de la loi de modernisation de l'agriculture du 1er février 1995.

Il semble donc, en conséquence, nécessaire d'exclure les employeurs de travailleurs agricoles occasionnels des bénéficiaires de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale.

En contrepartie, au VII de l'article 69, il semble également nécessaire de prévoir une exonération totale des cotisations d'allocations familiales pour les salaires inférieurs ou égaux à 169 fois le SMIC majoré de 20 %. Pour les salaires supérieurs à cette limite, le taux des cotisations d'allocations familiales serait fixé par décret, conformément aux dispositions de l'article 1062 du code rural.

II. LE STATUT DES PERSONNELS MIS À DISPOSITIONS DU MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE PAR LES CAISSE DE MSA

Depuis la création du régime social agricole, les services du ministère de l'agriculture compétents en matière de protection sociale sont chargés d'assurer le secrétariat des comités départementaux des prestations sociales agricoles (CDPSA), qui interviennent dans la répartition des cotisations entre les agriculteurs. Ce secrétariat était particulièrement important lorsque ces cotisations étaient assises sur le revenu cadastral. Pour accomplir cette tâche, ces services disposent du concours d'agents mis à leur disposition par les caisses de MSA, agents régis par la convention collective des personnels MSA et rémunérés par les caisses.

Au fil des années, et en particulier avec l'application de la réforme des cotisations sociales des agriculteurs, le secrétariat de ces comités départementaux des prestations sociales agricoles a été allégé. Ces agents, au-delà de cette mission, assument donc de plus en plus des tâches d'ordre général pour assurer le fonctionnement de ces services du ministère spécialisés en matière sociale.

Il en résulte à ce titre, pour les caisses de MSA, une charge qu'elles ne doivent plus normalement supporter et que la disposition proposée par l'article 17 permettrait de compenser.

Pour résoudre le problème posé par ces mises à disposition, il était théoriquement envisageable d'intégrer ces personnels dans les services du ministère. Outre les obstacles d'ordre juridique, une telle formule était impossible en raison des modifications qu'un tel changement de statut aurait entraînées dans la situation (rémunération, avantages sociaux) et les perspectives de carrière des agents concernés.

Il est également impossible, sauf exceptions individuelles, de "renvoyer " ces agents dans les caisses. La plupart d'entre eux n'y ont, en fait, jamais travaillé. Et surtout, compte tenu notamment de la diminution des effectifs d'agriculteurs et de salariés agricoles, les caisses doivent s'attacher, comme l'a souligné un rapport récent des inspections générales des finances, des affaires sociales, de l'agriculture, à réduire leurs effectifs.

Ces raisons ont conduit à la solution proposée à l'article 17 du projet de loi de finances de faire compenser par le budget les frais supportés par la MSA, au titre de ses agents. Cette solution est vivement souhaitée à la fois par les caisses de MSA, dont les charges se trouveront ainsi allégées, par les services concernés qui ont besoin du concours de ces personnels, et par les agents eux-mêmes qui se trouvent ainsi rassurés sur leur avenir. Votre rapporteur spécial ne peut que se féliciter de la solution ainsi apportée à un problème délicat.

Au plan technique, le mécanisme est le suivant :

- le BAPSA rembourse 21,6 millions de francs à la MSA ;

- le BAPSA diminue à due concurrence son remboursement au budget général de l'État au titre des dépenses de fonctionnement exposées pour son compte par les fonctionnaires de l'État (plafonnées aux 2/3 à l'article 1003-4 du code rural) ;

- le coût net de la mesure est donc à la charge de l'État.

III. LES RELATIONS MOUVANTES ENTRE LE BAPSA ET LE FSV

Lorsque le Fonds de solidarité vieillesse a été institué en 1993 pour prendre en charge les avantages non contributifs accordés en matière de retraite, il a été prévu que les bonifications pour enfants seraient à ce titre financées par le Fonds dans la plupart des régimes, sauf le régime des exploitants agricoles et celui des fonctionnaires de l'État.

Cette exception n'étant guère justifiée, il a été décidé d'y mettre fin. S'agissant du régime agricole, la loi de finances rectificative pour 1994 a ainsi transféré la charge desdites majorations au FSV pour la seule année 1994, ce qui a permis au régime agricole de bénéficier cette année-là d'un supplément de ressources de 1,8 milliard de francs. La loi de finances pour 1995 comportait une disposition pérennisant le transfert (appliqué aussi aux bonifications des fonctionnaires de l'État), mais le Conseil constitutionnel l'a annulée (décision n° 94-351 DC du 29 décembre 1994). Pour cette raison, les versements du FSV au BAPSA ne devraient représenter en 1995 que 4.648 millions de francs, contre 6.573 millions de francs inscrits en loi de finances initiale.

Le gouvernement s'est efforcé de contourner l'obstacle du Conseil constitutionnel. En effet, le "branchement " du FSV sur le BAPSA permet indirectement de diminuer d'autant la subvention d'équilibre versée par le BAPSA au budget général.

Pour mettre en oeuvre ce branchement, le gouvernement a procédé en deux étapes :

- il a d'abord inscrit dans le projet de loi de finances 1996 le résultat financier attendu de ce branchement ;

- il a ensuite fait voter un amendement par l'Assemblée nationale (pour respecter la pudeur du Conseil d'État ?) donnant a posteriori une base juridique à ce branchement.

Comme l'a souligné le rapporteur général du budget : "Cette dissociation n'est pas d'une rare élégance ". Le rapporteur spécial pour le BAPSA de l'Assemblée nationale a fort justement fait remarquer que "quant à la prise en charge prévue, pour 1.943 millions de francs, des bonifications de pensions de retraite accordées pour enfants à charge par le FSV, elle pose un vrai problème : elle est actuellement dépourvue de toute base juridique, même si cette difficulté semble devoir être résolue au cours du débat budgétaire ".

S'agissant de la décision du Conseil constitutionnel, la censure semble porter sur le non-respect du principe d'universalité budgétaire qui dispose que l'ensemble des recettes finance l'ensemble des dépenses. En l'occurrence, le système voté en 1994 revenait à attribuer au BAPSA une ressource déterminée directement par le niveau d'une dépense.

Pour prévenir cette critique du juge constitutionnel, le gouvernement a proposé un mécanisme complexe tendant à supprimer du BAPSA, en charges et en recettes, le produit des bonifications pour enfants à charge (en recettes, la ligne 70-59 du BAPSA est donc minorée de 1.943 millions de francs).

Comme le signale toutefois le rapporteur spécial de l'Assemblée nationale, M. Yves Rispat : "l'adoption définitive de cette disposition aurait la conséquence suivante : étant transférées au FSV, les bonifications pour enfants ne seraient plus prises en compte dans la prestation de référence servant au calcul de la compensation démographique vieillesse et le montant inscrit pour celle-ci dans le projet de loi de finances pour 1996 devrait être minoré d'environ 900 millions de francs ". Cette interprétation semble confirmée par le rapport d'octobre 1995 de la Commission des Comptes de la sécurité sociale, même s'il apparaît difficile de trancher simplement un débat technique d'une telle complexité.

Votre rapporteur spécial, sans se prononcer sur la constitutionnalité du nouveau dispositif, ne manquera pas d'interroger le gouvernement sur l'objection formulée par M. Rispat. Il constate en outre qu'en 1994, 1995 et 1996 le "branchement " FSV aura fait l'objet de trois traitements comptables différents, sauf si le prochain projet de loi de finances revenait sur la présentation 1995.

MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'adoption de l'article 17 bis, relatif à la prise en charge par le FSV des bonifications de pensions de retraite pour enfants, a exercé les conséquences suivantes sur les recettes du budget annexe des prestations sociales agricoles :

ligne 70.59 "Versement du Fonds de solidarité vieillesse " : - 1,943 milliard de francs.

Remarque : En dépenses l'article 30 du chapitre 46-36 devra être réduit à due concurrence.

* 1 On rappellera que M. Roland du Luart écrivait dans son rapport sur la loi de finances pour 1995 : "Le débat sur la parité a été relancé. Ce débat n'a pas véritablement lieu d'être, même si certains problèmes économiques sont graves. La sous-estimation de l'assiette revenus professionnels 'mécanisme du forfait notamment), le calcul des cotisations sur le revenu net, la non réévaluation de certains coefficients de conversion, le niveau des cotisations minimales et les conditions favorables de retraite pour lès bas revenus sont en effet à prendre en compte. "

* 2 La Cour des Comptes rappelle que : "Une des spécificités de la MSA résidait, en effet jusqu'en 1994, dans la coexistence de cotisations techniques et de cotisations dites complémentaires. La part technique alimentait le financement des prestations ; la part complémentaire avait pour objet de financer la gestion administrative, le contrôle médical et l'action sanitaire et sociale et, d'assurer l'équilibre. Ainsi, alors que les cotisations techniques étaient fixées par décret au niveau national, les cotisations complémentaires l'étaient au niveau départemental par délibération du conseil d'administration de la caisse, puis approuvées par la tutelle et faisaient l'objet d'un arrêté préfectoral. Sans doute une telle procédure assurait-elle aux caisses une marge importante de liberté. Elle avait toutefois pour inconvénient de rendre impossible tout pilotage central, et difficile tout processus de convergence entre caisses. De surcroît, elle faisait courir le risque d'un dérapage incontrôlé des dépenses et pouvait conduire à une disparité des charges entre cotisants. C'est pour cette raison que la MSA a mis en place, à partir de 1993, un fonds de compensation entre caisses afin de corriger ces inégalités : ce fonds, qui représente environ 60% du montant total des cotisations complémentaires, devait permettre d'assurer une péréquation minimale entre départements en direction des caisses à faible base contributive. Si cette évolution a indéniablement apporté un élément de solidarité supplémentaire entre les caisses, elle n'en demeurait pas moins peu satisfaisante, notamment en raison de la réforme en cours des cotisations des exploitants. La MSA a proposé, lors de son assemblée générale, en novembre 1994, un nouveau règlement de financement et un rapport commun des inspections générales des finances, des affaires sociales et de l'agriculture datée de mai 1995 a recommandé de nouvelles réformes. Ce n'est que lorsque celles-ci seront mises en place qu'il sera possible d'envisager un véritable processus de dotation différenciée. "

* 3 1 Les tableaux ci-après ne retracent que certains régimes.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page