Rapport n° 127 (1995-1996) de M. François BLAIZOT , fait au nom de la commission des lois, déposé le 14 décembre 1995

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N° 127

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 13 décembre 1995.

Enregistré à la Présidence du Sénat le 13 décembre 1995.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration général (1) sur le projet de loi d'habitation, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, relatif au statut général des fonctionnaires de la collectivité territoriale, des communes et des établissements publics de Mayotte ,

Par M. François BLAIZOT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larche, président ; René Georges Launay, Germain Authie, Pierre Fauchon, François Giacometti, vice-présidents ; Robert Pages, Michel Rufin. Jacques Mahéas, Jean-Jacques Est, secrétaires ; Guy Allouche, Jean-Paul Oudry, Robert Badinter, Pierre Biarrots, François Blaisois, André Bol, Christian Bonnet, Mme Nicole Bor, MM. Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Claude Cornac, Raymond Cournère, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cutter, Luc De joie, Jean-Paul Delerue. Christian Demuynck, Michel Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Charles Jolibois, Lucien Lanier, Paul Masson, Daniel Millaud, Georges Othily, Jean-Claude Peyronnet, Claude Pradille, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre Schosteck, Jean-Pierre Tizon, Alex Tùrk, Maurice Ulrich.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (10ème législ.) : 2294. 2361. et T.A. 422

Sénat : 100 (1995-1996).

Fonctionnaires et agents publics .

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Sous réserve d'un amendement tendant à préciser la finalité de l'habilitation, la commission des lois vous propose d'adopter le projet de loi d'habilitation relatif au statut général des fonctionnaires de la collectivité territoriale, des communes et des établissements publics de Mayotte.

Mesdames, Messieurs,

Comme souvent à pareille époque de l'année, le Parlement examine plusieurs textes relatifs à l'adaptation de la législation applicable outre-mer.

Tantôt, il se prononce directement, au travers du projet de loi portant diverses dispositions actuellement en navette, tantôt le gouvernement lui demande de l'habiliter à agir par ordonnances, comme pour le présent texte et celui relatif à la matière pénale.

Comparé aux deux plus récentes lois d'habilitation concernant Mayotte, le projet de loi d'habilitation relatif au statut général des fonctionnaires de la collectivité territoriale, des communes et des établissements publics de Mayotte, apparaît plus limité.

Il ne comprend en effet qu'un seul objet : établir, d'ici au 15 septembre 1996, un statut législatif de la fonction publique territoriale.

C'est peu, au regard des vastes champs ouverts à la législation par ordonnance par les précédentes lois d'habilitation.

C'est beaucoup, compte tenu de la prolifération anarchique actuelle des situations des agents publics employés par les collectivités locales de Mayotte.

Celle-ci est telle que, dans le respect des principes généraux applicables à la fonction publique, des adaptations nombreuses seront nécessaires pour l'élaboration de ce statut.

C'est la volonté de ne pas retarder davantage une remise en ordre très nécessaire qui doit conduire le législateur à admettre cette habilitation. En effet, au-delà du statut, la période transitoire d'intégration des agents durera sans doute de longs mois.

Or, Mayotte, collectivité territoriale depuis 1976, à laquelle est promise avant la fin du siècle la consultation sur son devenir différée depuis plus de dix ans, n'est soumise au droit commun que sur mention expresse. Il importe donc, dans le domaine de la fonction publique territoriale aussi, de prendre les mesures nécessaires pour y adapter les modalités d'application des règles fondamentales de la fonction publique.

Sous réserve d'un amendement de précision de la finalité de l'habilitation, la commission des lois vous propose donc d'adopter ce projet de loi.

I. LA SITUATION PRÉSENTE DE LA FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE DE MAYOTTE JUSTIFIE UNE RÉFORME

Depuis que la loi n° 76-1212 du 24 décembre 1976 relative à l'organisation de Mayotte a fait de Mayotte une collectivité territoriale de la République, le régime de la fonction publique territoriale a été régi par arrêté préfectoral.

Les lois du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ne lui sont pas applicables.

Néanmoins, l'article 14 de la loi n° 84-594 du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale, modifié par l'article 46 de la loi n° 87-529 du 13 juillet 1987, prévoit que « la collectivité territoriale de Mayotte bénéficie, dans des conditions fixées par décret, des services de la délégation régionale de la Réunion » du centre national de la fonction publique territoriale.

Bien que le décret n'ait semble-t-il jamais été pris, cette disposition s'applique dans la pratique : des formateurs du centre de la Réunion viennent en effet à Mayotte dispenser, à l'occasion, des formations.

Bien que le coût de ces sessions soit élevé, ce rattachement paraît de bonne gestion car, en l'état actuel de la législation, il n'aurait pas été possible d'installer à Mayotte même des formateurs à plein temps compétents pour l'ensemble des domaines.

A. LA SITUATION ACTUELLE EST ANARCHIQUE

1. Des statuts nombreux et incohérents pour la collectivité territoriale

Au premier arrêté du 20 juillet 1977 portant statut général des fonctionnaires et cadres de la collectivité territoriale de Mayotte se sont ajoutés de si nombreux textes disparates que la mission envoyée à Mayotte en 1992 pour examiner la situation de la fonction publique de la collectivité territoriale a conclu à l'absence de véritable statut général, à l'anarchie des systèmes de rémunération et a constaté le recours croissant aux contractuels.

Plus grave, elle a jugé ces statuts particuliers inadaptés ce qui enlève toute justification éventuelle à leur prolifération.

• les fonctionnaires titulaires sont répartis par l'arrêté du 3 février 1984 en trois catégories I, II et III théoriquement équivalentes aux catégories A, B et C de la métropole mais, en raison de leur niveau de recrutement, elles sont décalées d'un degré puisque la catégorie I est accessible aux titulaires du baccalauréat et la catégorie II aux titulaires du BEPC.

• les A.P.N.F. (auxiliaires et agents permanents non fonctionnaires) relèvent du règlement général des agents publics permanents non fonctionnaires des services de la collectivité pris par l'arrêté du 20 juillet 1977 et de l'arrêté du 3 février 1984. Ils occupent des emplois correspondant à la catégorie C et à l'ancienne catégorie D de la fonction publique.

• les contractuels sont en augmentation constante alors qu'ils ne devraient occuper depuis 1986 que des emplois de cadres techniques et administratifs de haut niveau.

Leurs postes correspondent le plus souvent à des emplois permanents et leur recrutement s'effectue par concours sur titre ou dossier avec condition de diplôme.


les agents horaires sont des non titulaires, recrutés les premiers après l'établissement du statut de Mayotte.

Ils sont engagés sans exigence de qualification et rémunérés à l'heure. Leur statut se rapproche de celui des auxiliaires, catégorie qu'ils peuvent intégrer lorsqu'ils sont âgés de plus de 45 ans et comptent plus de 5 ans d'ancienneté de services.

Ils sont particulièrement présents dans les services de l'agriculture, de la préfecture et les services sociaux.


les agents « décisionnaires » ou P.N.T. (personnels non titulaires) sont régis par un règlement intérieur de 1987. Presque exclusivement présents à la direction de l'équipement de Mayotte, la mission de 1992 les décrit comme ni véritablement fonctionnaires de la collectivité, ni fonctionnaires de l'État. Rémunérés par l'État puisque la direction de l'équipement est restée de sa compétence, ils sont, de fait, employés par la collectivité territoriale et cotisent à la caisse de prévoyance sociale du secteur privé et non à la caisse de retraite des fonctionnaires.

Ce premier survol théorique des statuts permettait à la mission de constater que « la fonction publique mahoraise est incomplète en haut de la grille (absence de véritable équivalent de la catégorie A) et inutilement différenciée en bas » .

L'examen du régime des traitements et des indemnités complète ce tableau : il n'existe aucune cohérence entre les différentes catégories, ni même parfois à l'intérieur d'une même catégorie.

Cette situation a conduit le conseil général à estimer dans sa délibération du 3 février 1992 que « la situation d'agent contractuel est devenue encore plus attractive que celle de fonctionnaire de la collectivité territoriale de Mayotte car leurs différences se sont estompées » , y compris du point de vue de la sécurité de l'emploi.

A telle enseigne que la mission a pu constater « que plusieurs fonctionnaires mahorais avaient demandé et obtenu de devenir contractuels, jugeant, à raison, la situation plus avantageuse » !

Au 25 septembre 1995, les agents de la collectivité territoriale se répartissaient ainsi :

Répartition des agents publics de la collectivité territoriale de Mayotte

En conséquence, sur les 4 293 agents de la collectivité 1 839, soit 42,8 %, sont des fonctionnaires et 2 454, soit 57,2 %, des contractuels.

De tels chiffres ne sont pas atypiques outre-mer puisque, lors de l'examen du budget M. Jean-Jacques de Perreti, ministre délégué de l'outremer, a eu l'occasion de rappeler que dans les départements d'outre-mer 68  % des agents des collectivités territoriales sont des contractuels. Mais les motifs de ce déséquilibre y sont en partie inverses : le coût du rapprochement du régime indemnitaire de la fonction publique territoriale des départements d'outre-mer avec celui des fonctionnaires de l'État conduit les collectivités territoriales à recourir à des contractuels, moins coûteux, tandis qu'à Mayotte l'anarchie des statuts est apparemment favorable aux contractuels.

2. Une situation comparable pour les 17 communes

Les agents des communes ont été assimilés par arrêté préfectoral au personnel de la collectivité territoriale et sont également partagés en catégories complexes relevant de statuts non moins incohérents.

Ils se répartissent, à la même date, de la manière suivante :

Répartition du personnel communal

La proportion des personnels sous statut contractuel y est donc encore plus forte puisque seulement 7,3 % sont des fonctionnaires représentant un peu plus de 10 % de la masse salariale totale.

S'ajoutent en outre 146 temporaires saisonniers et 140 contrats emploi solidarité.

B. LA NÉCESSITÉ DE LA RÉFORME

Le description précédente fait apparaître comme de bon sens les propositions de la mission de 1992 qui devraient présider à la réforme de ces régimes.

1. La clarification des régimes juridiques

Une adaptation est nécessaire pour tenir compte de la situation mahoraise. En tout état de cause, la simplicité nécessaire à la pratique, comme le respect des principes constitutionnels et de la hiérarchie des normes imposent une intervention législative pour fixer le cadre du futur statut.

Il s'agit en tout premier lieu de marquer le caractère de droit public des emplois concernés, puis de prévoir des règles de recrutement, d'avancement, de rémunération et de discipline cohérentes et transparentes.

2. Les nécessaires dispositions transitoires

La remise en ordre suppose de structurer des cadres, des filières et des grilles et d'y intégrer les agents actuellement employés en préservant, le cas échéant, leur niveau de rémunération actuel. Il sera toutefois nécessaire de veiller, compte tenu des faibles effectifs concernés, à maintenir des catégories homogènes suffisamment fournies pour que les règles d'avancement au choix conservent un sens. En tout état de cause, plusieurs années seront nécessaires pour la mise en oeuvre de la réforme.

II LE CHOIX D'UN STATUT PRIS PAR ORDONNANCE

A. UNE PRA TIQUE COURANTE S'AGISSANT DE MA YOTTE

1. Les précédents

Depuis 1976, date à laquelle Mayotte a été érigée en collectivité territoriale, quatre lois d'habilitation ont contribué à l'extension et à l'adaptation à Mayotte de lois nouvelles, dont l'article 10 de la loi du 24 décembre 1976 précise qu'elles ne lui sont applicables que sur mention expresse.

La première habilitation figure aux articles 6 et 7 de la même loi qui concernent respectivement le régime administratif et financier, à déterminer avant le 1er octobre 1977, et « toutes mesures tendant à étendre et à adapter les textes intervenus dans le domaine législatif et qui ne sont pas applicables à Mayotte » , jusqu'au 1er juillet 1979, délai ramené au 30 avril 1977 en matière d'administration communale et de code électoral.

Cinq ordonnances furent prises en application de ces textes. Elles concernaient les élections, le fonctionnement du conseil général et des communes ainsi que l'organisation judiciaire.

La deuxième habilitation résulte de l'article 3 de la loi du 22 décembre 1979 relative à Mayotte qui autorise le gouvernement « à étendre par ordonnances avant le 30 septembre 1982, les textes intervenus dans le domaine législatif en y apportant, en tant que de besoin, les adaptations nécessitées par la situation particulière de Mayotte » .

Pour la première fois la consultation du conseil général sur les ordonnances est prévue.

Trois ordonnances relatives au régime fiscal et douanier, à la création d'une chambre professionnelle et aux règles budgétaires et comptables ont ainsi été prises le 1er avril 1981.

La loi d'habilitation du 23 décembre 1989 prévoit dans son article unique un ambitieux champ d'application.

Elle autorise le gouvernement « à prendre par ordonnances, avant le 15 septembre 1991, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation du droit applicable (à) Mayotte et à l'extension à cette collectivité de la législation métropolitaine avec les adaptations rendues nécessaires par sa situation particulière » dans huit domaines : régime budgétaire et comptable, mesures fiscales et douanières, droit pénal et procédure pénale, urbanisme, droit rural et des marchés publics, droit social et du travail, circulation et assurance automobile, environnement.

Les conditions dans lesquelles l'avis du conseil général est donné sont précisées : délai d'un mois au-delà duquel l'avis est réputé donné.

Sept ordonnances furent ainsi prises entre le 25 juin 1990 et le 5 septembre 1991. Elles portaient sur la santé publique, le code de l'urbanisme, la protection de la nature (code rural), le code pénal et la procédure pénale, le code du travail, les dispositions budgétaires et comptables et le code de la famille et de l'aide sociale.

Elles furent ratifiées par la loi n° 91-1379 du 28 décembre 1991.

Le même jour paraissait la quatrième habilitation ouverte jusqu'au 15 octobre 1992. Elle utilisait, mot pour mot, la même formule et reprenait un champ d'application similaire : n'y figuraient plus le régime budgétaire et comptable, l'urbanisme et le pénal ; étaient ajoutées l'organisation judiciaire, l'aide juridictionnelle et les victimes d'infractions.

Seize ordonnances parurent ainsi entre le 4 mars et le 12 octobre 1992. Ratifiées par la loi du 31 décembre 1992, elles concernent : les marchés publics, le code des assurances, le code de la route, la suite du code rural (animaux et végétaux), les victimes d'accidents de la circulation, la lutte contre la pollution, le cadastre, la santé publique, l'environnement, la lutte contre l'alcoolisme, le domaine public, le code forestier, l'organisation judiciaire, le code des douanes, l'aide juridictionnelle, les victimes d'infraction.

2. Le bilan

Ce rapport succinct permet de constater une réelle montée en puissance de la volonté et de la capacité du gouvernement d'étendre et d'adapter la législation applicable à la collectivité territoriale de Mayotte.

Autant les habilitations très vagues des premières années furent peu fructueuses, autant l'habilitation quasi-continue et ciblée entre 1989 et 1992 a permis à de nombreux domaines d'être traités.

Or, certaines de ces ordonnances comprennent des dizaines d'articles et n'auraient pu être examinées dans les mêmes délais par le Parlement. En revanche, parallèlement, celui-ci adoptait par la voie législative normale certaines dispositions applicables à Mayotte, soit au travers de textes généraux prévoyant expressément l'extension, soit par des textes portant dispositions diverses relatives à l'outre-mer, soit par des lois spécifiques, notamment en matière d'élections.

Toutefois, certains domaines sont restés en friche, ou plus exactement ont fait l'objet d'une réglementation par arrêté comme la fonction publique territoriale, en marge de l'évolution structurée qui était menée en métropole et dans les départements d'outre-mer à l'occasion de la décentralisation.

D'autres ont pris du retard, comme la loi pénale, en partie par incapacité de mettre matériellement en oeuvre des réformes nécessitant un accroissement des capacités humaines et matérielles de la justice.

B. L'HABILITATION EST-ELLE JUSTIFIÉE POUR LA FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE ?

1. Un domaine législatif par excellence

Bien que la fonction publique territoriale de Mayotte ait été régie depuis 1976 par des textes d'origine variée, l'article 34 de la Constitution de 1958 ne laisse guère de doute sur le caractère législatif du domaine : en effet si l'article 34 ne cite que les fonctionnaires de l'État en ce qui concerne les règles fixées par la loi, il prévoit bien que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités locales, de leurs compétences et de leurs ressources. En outre, l'article 72 énonce que les collectivités territoriales « s'administrent librement (...) dans les conditions prévues par la loi » .

En conséquence, à l'issue des lois de décentralisation, les règles applicables à la fonction publique territoriale ont été fixées, en ce qui concerne les principes généraux, par la loi du 13 juillet 1983 et, pour les dispositions spécifiques, par la loi du 26 janvier 1984 (devenues respectivement les titres I et III du statut général de la fonction publique).

Ces textes ont été modifiés plusieurs fois sans que soit prévue par un texte de nature législative, une adaptation à Mayotte.

En tout état de cause, quelle que soit la procédure suivie pour adopter un statut général de la fonction publique territoriale de Mayotte, le texte devra respecter les principes constitutionnels d'égale admission aux emplois publics (ce qui n'implique pas nécessairement un concours) et d'égalité de traitement dans le déroulement des carrières duquel découle la nécessité de mettre en place des mécanismes statutaires transparents pour les rémunérations, l'avancement et la discipline.

Des adaptations assez nombreuses devront néanmoins être prévues : par exemple, pour les rémunérations, des grilles spécifiques tenant compte du niveau local du salaire minimum (2 500 F) et, dans un premier temps, l'absence de passage organisé avec la fonction publique de l'État et les autres fonctions publiques territoriales. Un centre de gestion des fonctionnaires pourrait être institué. Ce statut devra en outre tenir compte du cadre législatif mahorais en matière de prestations sociales et de certaines données particulières comme l'espérance de vie (62 ans aujourd'hui) pour fixer la durée des carrières.

2. Le projet de loi d'habilitation

L'article premier du projet de loi autorise le gouvernement « à prendre par ordonnance, avant le 15 septembre 1996, les mesures législatives relatives à la détermination du statut général des fonctionnaires de la collectivité territoriale, des communes et des établissements publics de Mayotte » .

Il prévoit l'avis du conseil général sur le projet d'ordonnance dans les mêmes conditions qu'en 1989 et 1991 : dans un délai d'un mois au-delà duquel il est réputé donné.

L'article 2 fixe au 2 novembre 1996 la date de dépôt du projet de loi de ratification, accompagné dudit avis.

N.B . - Le texte initial prévoyait « des avis » du conseil général, l'Assemblée nationale a adopté un amendement précisant, puisqu'il n'y aura qu'une ordonnance, qu'il n'y aurait qu'un avis.

Si les dates prévues par l'ordonnance répondent aux exigences fixées par l'article 38 de la Constitution ( ( * )1) (délai limité et inclusion de la date de dépôt du projet de ratification), en revanche la commission des lois s'est interrogée sur la formulation retenue pour le champ de l'habilitation.

En effet, le Conseil constitutionnel (décision n° 86-207 DC des 25-26 juin 1986 sur les privatisations) considère que le premier alinéa de l'article 38 « doit être entendu comme faisant obligation au gouvernement d'indiquer avec précision au Parlement quelle est la finalité des mesures qu'il se propose de prendre et leurs domaines d'intervention » .

Or, si le domaine est précisé (« détermination du statut général des fonctionnaires... »), la finalité manque quelque peu, notamment au regard des formulations retenues par les lois d'habilitation de 1989 et 1991 qui parlaient des « mesures nécessaires à l'actualisation » et de « l'extension dans cette collectivité de la législation métropolitaine avec les adaptations rendues nécessaires par sa situation particulière » .

La commission des Lois vous proposera donc, dans un unique amendement à l'article premier, d'en préciser la finalité qui sera de tenir compte des adaptations nécessitées par la situation particulière de Mayotte et d'indiquer qu'il s'agira d'établir un statut général des fonctionnaires de Mayotte, formulation qui laisse mieux place à de futures évolutions.

Sur le fond, la commission reconnaît l'urgence de ne pas laisser perdurer la situation anarchique de la fonction publique territoriale de Mayotte et souhaite que l'habilitation permette l'élaboration rapide d'un statut reposant sur le respect des principes et des modalités habituels de la fonction publique.

Sous la réserve de cet amendement et sous le bénéfice de ces observations, la commission des lois vous propose d'adopter le projet de loi.

* (1) Art. 38 de la Constitution Le gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi.

Les ordonnances sont prises en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat. Elles entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d'habilitation. A l'expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article, les ordonnances ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif

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