I. LES TRAVAUX DU SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE ET LES CONCLUSIONS DE L'ÉTUDE FINANCIÈRE RÉALISÉE SUR SA DEMANDE

En première lecture, les principales modifications apportées au projet de loi par le Sénat ont porté sur la composition du corps départemental, les délais de mise en oeuvre de la réforme, la composition et la présidence du conseil d'administration du SDIS, ainsi que sur les dispositions d'ordre financier.

Le Sénat s'est en outre interrogé, d'une manière générale, sur les coûts de la réforme envisagée pour les collectivités locales.


La composition du corps départemental de sapeurs-pompiers

Sur la proposition de votre commission des Lois, le Sénat a prévu l'intégration au corps départemental, hormis des sapeurs-pompiers professionnels, de l'ensemble des sapeurs-pompiers volontaires occupant des fonctions d'encadrement (officiers, chefs de corps ou chefs de centre) ; en revanche, suivant une initiative de M. Paul Girod ayant reçu l'approbation de la commission, il a subordonné l'intégration au corps départemental des sapeurs-pompiers volontaires à la demande de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale dont ils relèvent, quelle que soit la catégorie du centre concerné (centre de première intervention, centre de secours ou centre de secours principal) (article 5).

Le Sénat a donc apporté aux articles 9 et 10, relatifs à la gestion des personnels, ainsi qu'à l' article 13, relatif aux transferts de sapeurs-pompiers volontaires, les modifications rendues nécessaires par la nouvelle composition du corps départemental qu'il a ainsi retenue à l' article 5 ; il a en outre rétabli l' article 14, sur la proposition de votre commission des Lois, afin de préciser les conditions dans lesquelles un corps communal ou intercommunal pourrait être rattaché au SDIS.

Par ailleurs, à l'initiative de M. Alain Vasselle, le Sénat a soumis l'affectation des sapeurs-pompiers professionnels officiers dans un centre d'incendie et de secours relevant d'une commune ou d'un établissement public de coopération intercommunale à l'avis conforme du maire ou du président de l'établissement public concerné (article 8).


Les délais de mise en oeuvre de la réforme

Compte tenu de la très grande diversité des situations locales actuelles, il est apparu nécessaire au Sénat de prévoir des délais de mise en oeuvre de la réforme suffisamment longs pour permettre à l'ensemble des collectivités locales de s'adapter progressivement et de négocier les modalités de transferts de personnels et de biens au SDIS.

A l'initiative de votre commission des Lois, le Sénat a donc prévu, aux articles 12, 13, 16 et 21, relatifs aux transferts des personnels et des biens au SDIS, un allongement des délais, en laissant aux collectivités concernées cinq ans après la promulgation de la loi pour conclure les conventions nécessaires aux transferts, alors que le projet de loi prévoyait que ces transferts devraient intervenir avant le 30 juin 1999.

Il a également porté à cinq ans, à compter de la promulgation de la loi, le délai prévu à l' article 45 pour l'équipement de chaque SDIS d'un centre opérationnel départemental d'incendie et de secours (CODIS) et d'un ou plusieurs centres de traitement de l'alerte (CTA).


La composition et la présidence du conseil d'administration du SDIS

S'agissant de la composition du conseil d'administration du SDIS (article 26), le Sénat a cherché à préciser, sur la proposition conjointe de la commission des Lois et du Gouvernement, les conditions dans lesquelles seraient répartis les sièges attribués aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à raison de leurs contributions financières, afin d'assurer aux communautés urbaines, et le cas échéant, aux grandes villes, une représentation prenant en compte l'importance de leurs contributions financières.

La composition du conseil d'administration retenue à l'issue de la première lecture du Sénat était donc la suivante :

- 10 sièges répartis par moitié entre, d'une part, le département et d'autre part, les communes et EPCI ;

- et 10 sièges répartis entre, d'une part, le département et d'autre part, les communes et EPCI, et ensuite entre ces deux dernières catégories de collectivités, proportionnellement à leurs contributions financières au budget du SDIS ; les sièges attribués aux communes et aux EPCI étant répartis au sein de chacune de ces catégories au prorata des contributions de chaque commune ou EPCI (élection par les maires et les présidents d'EPCI au scrutin de liste majoritaire à un tour).

D'autre part, le Sénat a entendu confier la présidence du conseil d'administration du SDIS au président du conseil général auquel il a confère la qualité de membre de droit, sur la proposition de votre commission des Lois qui a considéré que celui-ci serait le mieux à même d'assurer la représentation de l'ensemble des composantes territoriales du département (article 29).

Il a par ailleurs souhaité préciser, à l' article 27, que le préfet ne pourrait se faire représenter aux séances du conseil d'administration que par un membre du corps préfectoral ou par son directeur de cabinet.


Les dispositions à caractère financier

Sur la proposition de la commission des Finances, saisie pour avis, le Sénat a clarifié la portée des dispositions financières du projet de loi.

Ainsi, il a précisé que les modalités de calcul des contributions au financement du SDIS des différentes collectivités compétentes en matière de gestion des services d'incendie et de secours (communes, établissements publics de coopération intercommunale et département) seraient fixées par une délibération du conseil d'administration prise à la majorité des deux tiers des membres présents ou, à défaut, si aucune délibération ne pouvait être prise dans ces conditions, suivant des règles automatiques de répartition prenant en compte un certain nombre de critères à préciser par décret (article 37).

Il a en outre prévu que le niveau minimal des dépenses consacrées aux services d'incendie et de secours par les collectivités concernées, au cours de la période transitoire précédant l'entrée en vigueur des conventions de transferts, serait fixé par convention avec le SDIS et, qu'à défaut d'accord, il ne pourrait être inférieur à la moyenne des dépenses réalisées au cours des cinq dernières années en ce qui concerne les dépenses de fonctionnement et au cours des dix dernières années en ce qui concerne les dépenses d'équipement (article 38).

Par ailleurs, sur la proposition de M. Jacques Larché, président de la commission des Lois et de M. Jean-Pierre Tizon, le Sénat a inséré un article additionnel après l'article 2 afin de prévoir que les frais engagés par les services d'incendie et de secours pour porter secours aux victimes d'accidents seraient pris en charge par la sécurité sociale dans les mêmes conditions que les frais d'intervention des unités participant au service d'aide médicale urgente (SAMU).


Les autres dispositions

En ce qui concerne les autres dispositions du projet de loi, on peut relever, parmi les modifications apportées par le Sénat, les points suivants.

- Le Sénat a clarifié, à l'initiative de votre commission des Lois, les missions des services d'incendie et de secours en matière de secours d'urgence aux personnes, de manière à faire apparaître explicitement que les compétences des sapeurs-pompiers dans ce domaine sont des compétences partagées avec les autres services et professionnels concernés (article 2).

- Également sur la proposition de la commission des Lois, le Sénat a soumis l'adoption de l'ensemble du schéma départemental d'analyse et de ouverture des risques à l'avis conforme du conseil d'administration du SDIS (article 7).

- Le Sénat a maintenu la suppression, résultant des travaux de l'Assemblée nationale, des articles 23 à 25 qui prévoyaient initialement un régime dérogatoire en faveur des communautés urbaines.

- A l'initiative de la commission des Lois, il a précisé le rôle consultatif de la commission administrative et technique sur les questions d'ordre opérationnel ou technique, sans préjudice des compétences des instances paritaires existantes (article 33).

- Toujours à l'initiative de la commission des Lois, il a élargi l'objet des établissements publics interdépartementaux à la lutte contre les incendies de forêt et les a autorisés le cas échéant à louer, et non seulement à acquérir, des matériels (article 44).

- Enfin, sur une proposition de M. Albert Pen, il a précisé les conditions d'application de la réforme à la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon (article 51).


• Les interrogations portant sur le coût de la réforme envisagée pour les collectivités locales

Ce bref rappel des travaux du Sénat serait toutefois incomplet s'il ne faisait état des interrogations formulées par de nombreux sénateurs quant aux coûts supplémentaires que cette réforme serait susceptible d'entraîner pour les collectivités locales.

En particulier, M. Jacques Larché, président de la commission des Lois, ainsi que M. Paul Girod, alors rapporteur pour avis au nom de la commission des Finances, avaient fait part de leurs inquiétudes à ce sujet.

Afin de répondre à ces interrogations, le ministre de l'Intérieur a installé au cours de l'été 1995 un groupe de travail chargé de mesurer les effets de la réforme de l'organisation des services d'incendie et de secours sur les finances des collectivités locales, au sein duquel ont été associés les rapporteurs de l'Assemblée nationale et du Sénat, des représentants des principales associations d'élus (Assemblée des Présidents de Conseils Généraux, Association des Maires de France, Association des Maires des Grandes Villes), ainsi que des représentants du ministère de l'Intérieur et du ministère de la Réforme de l'État et de la Décentralisation.

Une étude relative au financement des services d'incendie et de secours a été réalisée sous l'égide de ce groupe de travail et diffusée a l'ensemble des parlementaires à la fin de l'automne dernier.

Cette étude ne constitue pas une évaluation des incidences financières du projet de loi, mais seulement une photographie des coûts actuels dans un échantillon de 11 départements.

Elle présente en outre un bilan de l'évolution des dépenses entre 1989 et 1993 dans deux départements particuliers : la Seine-et-Marne et l'Orne, le premier de ces départements servant de référence d'une organisation dite « départementalisée ».

Votre rapporteur vous renvoie à l'avis présenté au nom de la commission des Finances par notre excellent collègue Guy Cabanel pour une analyse détaillée des résultats de cette étude, se bornant ici à en rappeler les trois conclusions essentielles :

- une grande difficulté à estimer les coûts réels des services d'incendie et de secours, certaines dépenses communales n'étant pas individualisées (ainsi, les chiffres obtenus seraient sous-estimés de 10 à 15 % par rapport aux coûts réels) ;

- des écarts de coûts très importants d'un département à l'autre, qui semblent provenir davantage de la nature des risques et du niveau de Protection choisi que du mode d'organisation des services ;

- une absence de relation directe entre le mode d'organisation des services et l'origine de leur financement (ainsi, dans une organisation dite « départementalisée » le financement par le conseil général peut être inférieur à celui assuré par les communes, alors que dans un mode d'organisation dit « communal » la participation du conseil général peut être comparable à celle des communes).

Nonobstant l'intérêt de ces conclusions, l'étude ne répond pas véritablement à la question qui avait été posée par le Sénat car, selon les termes retenus dans son préambule, il est apparu « illusoire de vouloir mesurer au niveau national les éventuels effets financiers de la loi puisque la réponse apportée par les services d'incendie et de secours aux besoins des populations dépend de l'appréciation locale des risques et des moyens consentis pour les couvrir. Par suite, la réponse ne peut être qu'appréhendée au cas par cas en fonction des réalités propres à chaque département... ».

Force est donc de constater que les coûts induits par la réforme ne sont toujours pas connus avec précision.

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