Examen des Articles

TITRE PREMIER - MESURES EN FAVEUR DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES

Article premier

Réduction des droits de mutation sur les cessions de fonds de commerce et conventions assimilées

Commentaire : le présent article traduit une mesure annoncée du "Plan-PME" de novembre 1995. Il propose en effet de réduire de 11,80 % à 9 % le taux de la dernière tranche du barème des droits de mutation à titre onéreux exigibles lors de la cession d'un fonds de commerce.

Une telle mesure s'insère donc dans un mouvement d'allégement des droits amorcé dès 1988 et qui tend à rapprocher le taux d'imposition effectif des cessions de fonds de commerce sur celui des cessions de parts de sociétés à responsabilité limitée.

Sur la forme, on notera que cette mesure s'appliquera aux actes et conventions conclus à compter du 1er décembre 1995, traduisant ainsi un engagement pris par le gouvernement.

I. LE RÉGIME EN VIGUEUR

Codifié à l'article 719 du code général des impôts, le régime applicable aux cessions de fonds de commerce concerne en fait un ensemble plus vaste. Ainsi, relèvent du même barème d'imposition les cessions d'offices ministériels, les cessions de droit à un bail et toutes les conventions à titre onéreux permettant à une personne d'exercer une profession, une fonction ou un emploi occupés par un précédent titulaire.

Depuis 1989, ces différentes mutations sont soumises aux droits enregistrement selon un barème progressif par tranche, dont les taux et les seuils ont toutefois été modifiés à de multiples reprises depuis cette date.

Assis sur la valeur stipulée dans l'acte, ou sur la valeur vénale si elle s'avère supérieure, l'impôt exigible comporte en pratique trois éléments :

- un droit perçu par l'Etat, qui en représente d'ailleurs la principale composante ;

- une taxe additionnelle départementale ;

- une taxe additionnelle communale.

En l'état actuel de la législation, le barème normalement applicable est donc le suivant :

En fait, ce régime de droit commun connaît toutefois des exceptions importantes.

ï Ainsi, et en application de l'article 721 du code général des impôts, le taux d'imposition résultant du barème peut être réduit à 2 % pour certaines opérations de décentralisation d'activités industrielles ou de recherche, ainsi que pour des opérations de reconversion d'entreprise.

ï De même, et en application des dispositions de l'article 44 de la loi d'orientation et d'aménagement du territoire du 4 février 1995, le taux de l'impôt d'État pour la tranche intermédiaire se trouve ramené à 0 % pour les acquisitions de fonds de commerce ou de clientèle réalisées :

- soit dans les communes situées dans les territoires ruraux de développement prioritaire et dont la population est inférieure à 5.000 habitants (1)9 ( * ) ;

- soit dans les zones de redynamisation urbaine.

Le bénéfice de cet allégement supplémentaire reste toutefois subordonné à la poursuite de l'exploitation durant une période minimale de cinq ans.

Sur ces bases, il ressort que près de 80 % des cessions de fonds de commerce ou de clientèle sont exonérés ou supportent un taux d'imposition inférieur à 5 %, et bénéficient donc d'un régime comparable à celui qui est appliqué en cas de cessions de parts de sociétés (1 % plafonné à 20.000 francs pour les parts de sociétés anonymes et 4,8 % pour les parts d'autres sociétés).

Toutefois, il est certain que pour les autres transactions, les droits de mutation à titre onéreux demeurent élevés, ce qui ne facilite pas la transmission des entreprises individuelles de taille moyenne et incite à leur transformation en société.

II. LA MESURE PROPOSÉE

Le présent article propose de ramener de 11,80 % à 9 % le taux du droit perçu par l'État sur la fraction de la valeur taxable des fonds de commerce et assimilés qui excède 700.000 francs.

En revanche, il laisse inchangé le taux des différentes taxes additionnelles locales qui s'appliquent également à cette tranche du barème.

Cette mesure s'inscrit donc dans le prolongement des dispositions adoptées au cours des années passées. En allégeant de façon significative le taux qui, aujourd'hui, demeure le plus dissuasif, elle limite l'effet de ressaut suscité par la tranche supérieure. Elle réduit la dispersion des taux d'imposition effectifs au regard de la valeur de fond, et permet ainsi de se rapprocher à nouveau de l'objectif à atteindre, c'est-à-dire un taux d'imposition, au titre des droits de mutation, de l'ordre de 5 % pour l'ensemble des transactions de ce type.

(en francs)

De même, cette disposition, dont le coût est évalué à 370 millions de francs permettra d'atténuer l'extrême rigueur du régime français d'imposition des cessions de fonds de commerce, au regard de la situation qui prévaut à l'étranger.

Dans ce contexte, il est prévu que le nouveau taux s'applique aux actes passés et aux conventions conclues à compter du 1er décembre 1995. Cette date d'entrée en vigueur rétroactive permet ainsi de régulariser une situation de fait. En effet, pour éviter tout effet d'attentisme après l'annonce de cette mesure lors du plan PME, les receveurs des impôts ont reçu instructions de soumettre les actes concernés aux nouveaux taux dès la fin de l'année dernière.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 2

Modification du régime de la provision pour "essaimage"

Commentaire : le présent article reprend également une disposition annoncée le 27 novembre dernier lors de la présentation du plan "PME pour la France". Il propose d'élargir de façon importante le champ de la provision spéciale que les entreprises peuvent constituer lorsqu'elles aident certains de leurs salariés à s'installer à leur propre compte.

Dans cette optique, il introduit quatre innovations dans la législation actuelle :

- d'une part, il autorise la constitution de provisions pour les aides apportées aux salariés par d'autres sociétés membres du même groupe ;

- d'autre part, il étend le bénéfice de ce régime aux aides consenties sous la forme d'une souscription au capital de l'entreprise créée ;

- parallèlement, il ouvre la possibilité d'appliquer ce dispositif aux entreprises créées à l'occasion de l'extension d'une activité préexistante ;

- enfin, il harmonise les différents plafonds de déduction de la provision sur le montant le plus élevé actuellement en vigueur.

Complétés par quelques mesures de coordination, ces assouplissements devraient ainsi donner toute sa dimension à ce qu'il est convenu d'appeler le régime de la provision pour "essaimage".

I. LE RÉGIME ACTUEL

Institué en 1978, le régime de la provision pour essaimage a pour but d'encourager les entreprises à aider les salariés dont elles se séparent lorsque ceux-ci désirent créer une entreprise nouvelle. Longtemps soumis à agrément, ce dispositif n'a cependant connu, dans le passé, qu'un succès extrêmement limité.

Récemment, son architecture générale a toutefois été profondément modifiée par l'article 9 de la loi quinquennale du 20 décembre 1993 relative à l'emploi. Cette réforme s'est notamment traduite par la suppression de l'agrément.

Enfin, l'article 27 de la loi de finances pour 1996 a prévu de doubler la limite de déductibilité de la provision lorsque l'entreprise nouvelle s'installe dans une zone de redynamisation urbaine.

Sur ces bases, le dispositif actuellement en vigueur est subordonné au respect de trois séries de conditions.

La personne aidée doit avoir été salariée de l'entreprise pendant un an. Toutefois, sont exclus les salariés ayant exercé une fonction de dirigeant au sein de l'entreprise qui consent le prêt et ceux dont le conjoint, un parent ou un allié exerce de telles fonctions.

ï L'aide se présente sous la forme d'un prêt à conditions privilégiées. Sa durée doit être au minimum de sept ans, tandis que son taux doit rester inférieur de 3 points à celui du rendement brut à l'émission des obligations des sociétés privées (TMO).

ï L'entreprise créée par le salarié satisfait à quatre conditions :

- elle exerce en France une activité industrielle, commerciale, artisanale ou libérale. En conséquence, le régime ne peut être appliqué si le salarié s'engage dans une activité agricole ou exerce une profession non commerciale autre que libérale ;

- cette activité est réellement nouvelle ou résulte de la reprise d'une entreprise industrielle en difficulté ayant fait l'objet d'une cession dans le cadre d'une procédure de règlement judiciaire. De fait, les aides accordées aux salariés reprenant une activité préexistante ou qui créent une entreprise en vue de prolonger une telle activité ne peut actuellement pas être prises en compte ;

- le capital de l'entreprise nouvelle ne doit pas être détenu pour plus de 50 %, directement ou indirectement, par d'autres sociétés. Il s'agit en effet de faciliter l'émergence d'entité indépendante et non de simples filiales de groupes ;

- l'entreprise réalise, durant les trois premiers exercices d'activité, un chiffre d'affaires qui restent inférieur à des seuils fixés par la loi.

Sur ces bases, l'avantage consenti à l'entreprise accordant l'aide prend la forme d'une provision spéciale, fiscalement déductible et d'un montant égal à la moitié du capital du prêt. Cette provision est toutefois plafonnée, mais la limite de déduction, qui s'apprécie par salarié, s'avère différente selon la forme juridique et la situation géographique de l'entreprise aidée.

Ainsi :

- lorsque cette dernière est une entreprise individuelle, le plafond de déduction de la provision est fixé à 75.000 francs dans la généralité des cas, et, depuis le début de 1996, à 150.000 francs dans l'hypothèse où elle est située dans une zone de redynamisation urbaine ;

- si l'entreprise aidée est une société, les deux seuils précédents sont respectivement portés à 150.000 francs et 300.000 francs.

Constituée lors de l'octroi du prêt, la provision spéciale doit ultérieurement être réintégrée par l'entreprise. Cette opération s'effectue en principe par tiers, au cours des cinquième, sixième et septième exercices suivant celui au titre duquel la provision a été constatée. Toutefois, le montant de la provision ne doit jamais excéder le capital restant dû, et une réintégration plus rapide peut donc s'avérer nécessaire en fonction du rythme des remboursements.

II. LES AMÉNAGEMENTS PROPOSÉS PAR LE PRÉSENT ARTICLE

En dépit de la réforme introduite par la loi du 20 décembre 1993, le régime de la provision pour essaimage n'est pas encore pleinement adapté aux réalités économiques. Aussi le présent article propose-t-il de l'aménager à nouveau, afin de lui donner toute sa portée.

A. QUATRE ADAPTATIONS SIGNIFICATIVES

1. L'extension du régime de la provision aux aides accordées par des sociétés membres du même groupe

En l'état actuel de la législation, seule l'entreprise qui emploie le salarié peut constituer une provision au titre de l'aide qu'elle lui apporte. Or, dans de nombreux cas, les entreprises ou groupes qui pratiquent ce type d'aide recourent en fait à une filiale spécialisée.

Il est donc proposé de tenir compte de cette situation, en autorisant la constitution d'une provision spéciale, au titre de l'aide qu'elles apportent au salarié par ;

- les sociétés détenant plus de 50 % du capital de l'entreprise qui employait le créateur.

- les sociétés dont le capital sont détenues à plus de 50 % par cette même entreprise ;

- les sociétés dont le capital sont détenues à plus de 50 % par une société détenant elle-même 50 % du capital de l'entreprise précitée.

Concrètement, cette extension permet donc de rendre éligible au dispositif les aides apportées par la société mère, une filiale, ou une société "soeur" de l'entreprise dans laquelle travaille le salarié. Le concours apporté à ce dernier pourra donc provenir d'un membre du groupe, sans que cela entraîne de différence de traitement fiscal. De surcroît, et dans l'hypothèse où l'aide proviendrait de plusieurs sociétés, chacune d'elles pourra alors constituer une provision sur la base de sa participation à l'effort d'ensemble.

Cette adaptation s'accompagne d'ailleurs d'un assouplissement de la condition relative à la durée de présence du salarié dans l'entreprise. Désormais, la période d'un an s'appréciera par référence aux emplois qu'il a exercés dans les différentes sociétés du groupe.

2. La prise en compte d'une nouvelle forme d'aide

La seconde innovation consiste à admettre, au titre des aides éligibles au dispositif, les souscriptions au capital de l'entreprise nouvelle.

Ainsi, la société qui, jusqu'alors employait le salarié, pourra manifester son soutien en réalisant un apport en fonds propres et donc en l'aidant à réunir le capital indispensable à l'exercice de sa nouvelle activité.

Plus efficace pour le salarié, cette forme d'aide est évidemment plus risquée pour la société qui la consent puisque, en tant qu'investisseur, elle se trouve plus étroitement associée aux aléas de l'entreprise créée.

Le nouveau dispositif intègre donc cet élément. Dans le cas où l'aide prend la forme d'une souscription au capital, et sous réserve du plafond de déduction, la provision spéciale sera égale à 75 % du montant de l'apport réalisé, au lieu de 50 % dans l'hypothèse d'un prêt.

3. L'intégration, dans le dispositif, des entreprises créées dans le cadre de l'extension d'une activité préexistante

Actuellement, le régime s'applique lorsque l'entreprise créée par le salarié exerce une activité réellement nouvelle ou reprend une entreprise en difficulté.

En proposant de l'étendre aux entreprises créées dans le cadre de l'extension d'une activité préexistante, le présent article desserre donc là encore de façon significative les contraintes actuelles et ouvre un nouveau champ, moins difficile d'accès que la création d'une entreprise exerçant une activité entièrement nouvelle.

La notion "d'extension d'une activité préexistante" reste certes peu aisée à cerner. Une instruction en date du 29 avril 1989 a toutefois précisé sa doctrine en la matière, qui repose sur la combinaison de deux éléments :

- d'une part, l'existence d'une communauté d'intérêt entre l'entreprise créée et l'entreprise préexistante, situation qui peut alors résulter de liens personnels ou de liens financiers ou commerciaux caractérisant une dépendance (cas des contrats de franchise par exemple) ;

- d'autre part, l'activité de l'entreprise nouvelle doit se trouver dans le prolongement de l'entreprise préexistante.

L'appréciation de la situation d'une entreprise nouvelle au regard de ces critères dépend donc largement des circonstances de fait.

Dans ce contexte, les conditions relatives à la composition du capital et au chiffre d'affaires de l'entreprise continuent à s'appliquer.

4. Une harmonisation des plafonds de déduction de la provision

Enfin, le présent article propose d'uniformiser les différents plafonds de déduction aujourd'hui en vigueur et de fixer le montant de ce seuil unique à 300.000 francs, soit au niveau le plus élevé de la législation actuelle.

Par construction, ce plafond s'applique à la provision constituée par une société au titre de l'aide qu'elle apporte à un salarié. De fait, si plusieurs sociétés du groupe interviennent en faveur d'un même créateur d'entreprise, cette limite jouera pour chacune d'entre elles.

B. DES MESURES DE COORDINATION OU DE SIMPLIFICATION

Elles sont au nombre de cinq, dont deux s'analysent comme des mesures de conséquences.

1. Les mesures de conséquences


• Une adaptation des conditions relatives aux fonctions exercées par le salarié
ou les membres de sa famille.

Actuellement, le régime de la provision spéciale ne peut s'appliquer si le salarié exerce une fonction de dirigeant dans l'entreprise qui l'employait, ou est le conjoint, le parent ou l'allié de personnes exerçant de telles fonctions.

L'extension du dispositif aux aides accordées par les autres sociétés membres du groupe conduit à adapter cette restriction.

Désormais, celle-ci trouvera à s'appliquer si le salarié exerçait des fonctions de direction dans l'une des quelconques sociétés du groupe entrant dans le nouveau champ d'application de la provision spéciale. Corrélativement, la condition portant sur le conjoint, les parents et alliés du salarié est adaptée de façon identique.


Une modulation de la provision pour dépréciation de titres susceptible d'être constituée à raison des souscriptions au capital de l'entreprise nouvelle.

En application des règles de droit commun, les entreprises peuvent constater, par voie dé provision, la dépréciation de leurs titres inscrits en portefeuille.

Combinée avec le régime de la provision spéciale, l'application stricte de ces principes au cas particulier des participations au capital d'une entreprise créée par un ancien salarié pourrait donc conduire à des phénomènes de double déduction.

Le présent article comporte donc une disposition tendant à éviter cet enchaînement. L'éventuelle provision pour dépréciation de titres afférente à cette participation ne sera déductible qu'à hauteur des sommes excédant le montant de la provision spéciale encore comptabilisé par l'entreprise.

La rédaction de cette disposition laisse toutefois subsister une ambiguïté, dans le cas où l'entreprise accorderait simultanément à son salarié une aide sous forme de prêt et une aide sous forme de prise de participation au capital de l'entreprise créée. Une interprétation stricte du texte actuel reviendrait alors à moduler les possibilités de déduction de la provision pour dépréciation de titres en fonction du montant total de la provision spéciale, et non de la fraction afférente à la seule participation au capital. Aussi, votre commission des finances vous proposera-t-elle un amendement rédactionnel sur ce point.

2. Les mesures de simplification


• A ce titre, il est tout d'abord proposé de remplacer, dans l'ensemble des dispositions concernant la provision pour essaimage la lotion d'entreprise "fondée" par celle d'entreprise "créée".

Parallèlement, le salarié n'est plus qualifié de "fondateur" de l'entreprise, mais de "créateur". Ces adaptations rédactionnelles permettent en fait de reprendre les termes habituellement utilisés dans le cadre des dispositions fiscales relatives aux entreprises nouvelles.

De même, le présent article procède à la suppression d'une condition d'application du dispositif qui s'avère en fait inutile.

En effet, actuellement, l'entreprise nouvelle doit être créée au plus tard un an après que l'aide ait été accordée. Or, cette précaution est superflue, l'aide étant par définition destinée à une entreprise déjà créée, ou en cours de création.


Enfin, il est proposé d'actualiser le mode de calcul du taux d'intérêt maximal du prêt privilégié attribué au salarié.

Aujourd'hui, le taux consenti doit être inférieur à un plafond, égal au taux de rendement brut à l'émission des obligations du secteur privé (TMO) diminuée de trois points.

Fondé sur le principe d'un abattement forfaitaire, ce mode de calcul s'avère rigide. En période de baisse des taux à long terme, il conduit en effet à accroître l'écart relatif entre la rémunération résultant des données du marché et le taux exigé pour bénéficier du régime de la provision pour essaimage. L'entreprise peut alors être dissuadée d'apporter son aide.

Pour surmonter cette difficulté, le présent article remplace l'abattement fixe par un abattement proportionnel. A l'avenir, le taux plafond correspondra aux deux tiers du TMO.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article additionnel après l'article 2

Option des sociétés civiles professionnelles pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés

Commentaire : sur proposition de M. Alain Lambert, rapporteur général, la commission des finances a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 2, et ayant pour objet d'autoriser les sociétés civiles professionnelles à se placer sous le régime fiscal des sociétés de capitaux.

Cette disposition reprend ainsi une mesure que le Sénat, sur proposition de votre commission des finances, avait souhaité introduire dans la loi de fiances rectificative pour 1992.


Instituées par la loi du 29 novembre 1966, les sociétés civiles professionnelles (SCP) ont pour but de permettre à des personnes physiques exerçant une profession libérale réglementée d'exercer en commun leur activité.

Comptes tenus de son objet, seuls peuvent être associées de la société des personnes physiques exerçant régulièrement l'activité réglementée concernée.

Les parts sociales représentatives du capital doivent être souscrites en totalité par ces associés, et ne sont pas négociables.

La SCP est dotée de la personnalité morale, mais les associés répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales à l'égard des tiers.

Enfin, chaque associé reste personnellement responsable des actes professionnels qu'il accomplit, mais la société demeure solidairement responsable avec lui des conséquences dommageables de ces actes.

De fait, les SCP sont très proches des sociétés de personnes classiques, leurs caractéristiques spécifiques ne faisant que traduire les particularités des professions auxquelles elles s'adressent.


Au plan fiscal les sociétés civiles professionnelles sont d'ailleurs largement assimilées aux sociétés de personnes.

Ainsi, elles sont fiscalement transparentes et leurs membres restent personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part des bénéfices sociaux qui leur reviennent.

Elles doivent respecter les obligations qui incombent normalement aux entreprises individuelles, mais peuvent également bénéficier des dispositions spécifiques prévues pour ce type d'entreprises ou pour les sociétés de personnes.


• En fait, cette transposition des règles fiscales ne connaît qu'une seule exception majeure : contrairement à ce qui est prévu pour les autres sociétés de personnes (10 ( * )) , les SCP ne sont pas autorisées à opter pour leur assujettissement à l'impôt sur les sociétés.

Or, force est de constater que cette dernière restriction n'a pas de réelle justification.

L'argument généralement invoqué depuis 1990 pour s'opposer à cette option est que les SCP ont désormais la faculté de se transformer en sociétés d'exercice libéral (SEL), pour se placer sous le régime des sociétés de capitaux.

Un tel argument a des limites évidentes et ne permet pas d'expliquer pourquoi toutes les autres sociétés de personnes peuvent opter pour l'impôt sur les sociétés sans être amenées à se transformer juridiquement en sociétés de capitaux.

Certes, la SEL apparaît elle aussi comme une structure réservée aux professions libérales, dont les règles de fonctionnement permettent de préserver la spécificité de l'activité, l'indépendance des professionnels et leur rapport personnel avec la clientèle.

Mais les SEL ne sont pas pour autant adaptées à toutes les situations. Pour s'en convaincre, il suffit de constater l'absence de succès de ce type de structure dans des professions auxquelles elle était censée s'adresser par priorité.

En fait, cette situation a une double origine :

- en dépit des aménagements prévus dans le cas de la SFL, la structure "société de capitaux" ne cadre pas nécessairement avec le mode d'exercice ou la tradition d'indépendance de certaines professions ;

- d'autre part, et contrairement à ce qui est prévu pour les SEL, les apports en industrie sont possibles dans les SCP. Ils représentent d'ailleurs des apports essentiels, dans la mesure où chaque associé n'entre dans la société que pour y exercer la profession. Bien que n'étant pas pris en compte pour la formation de capital, ils ouvrent droit à l'attribution de parts sociales.

Dans ce contexte, l'ouverture d'une possibilité d'option à l'impôt sur les sociétés pour les SCP constitue une solution permettant de concilier les différents impératifs.

Irrévocable, elle est strictement fiscale. Elle n'entraîne aucune transformation de la société, et n'a donc pas d'influence sur les règles juridiques applicables à l'entreprise, ni sur la situation des associés au regard des régimes sociaux.

En revanche, elle permettra à la SCP de se placer sous le régime fiscal des sociétés de capitaux, et assurera ainsi la fiscalisation au taux de l'impôt sur les sociétés, et non plus en barème de l'impôt sur le revenu, de la " fraction des bénéfices maintenus dans l'entreprise. Symétriquement, en cas d'option, les membres de la SCP perdront leur qualité fiscale d'associé de société de personnes, et ne seront plus autorisés à déduire les intérêts des emprunts souscrits pour acquérir leurs parts.

Or, la possibilité d'assurer plus aisément le financement et le développement de l'activité représente un enjeu majeur pour des intervenants, notamment dans les professions juridiques, qui sont directement confrontés à une concurrence anglo-saxonne particulièrement vive.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.

Article 3

Aménagement des régimes de la réduction d'impôt au titre de la souscription en numéraire au capital de sociétés non cotées et de la déduction des pertes du revenu global

Commentaire : le présent article vise à faciliter les investissements en fonds propres, par les personnes physiques, dans le capital des entreprises nouvelles. A cet effet, il ouvre une possibilité de passage entre le régime de la réduction d'impôt pour souscription au capital et celui de la déduction de pertes supportées à raison d'un tel investissement, tout en évitant un cumul d'avantages fiscaux pour une même opération.

I. DEUX RÉGIMES D'AIDES

Aujourd'hui, le dispositif fiscal d'aide à la mobilisation de l'épargne de proximité en faveur des petites et moyennes entreprises s'organise essentiellement autour de deux mesures.

A. LA RÉDUCTION D'IMPÔT POUR SOUSCRIPTION AU CAPITAL DE SOCIÉTÉS NON COTÉES

Figurant à l'article 199 terdecies OA du code général des impôts, ce régime est issu de la loi du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle, mais a été sensiblement complété depuis.

S'adressant aux personnes physiques, il institue en matière d'impôt sur le revenu une réduction d'impôt pour souscription au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés non cotées.

Les sociétés concernées doivent satisfaire à quatre conditions :

- être soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun ;

- exercer une activité industrielle commerciale, artisanale, agricole ou libérale ;

- en cas d'augmentation de capital, réaliser un chiffre d'affaires inférieur à 140 millions de francs ou présenter un bilan n'excédant pas 70 millions de francs ;

- disposer d'un capital majoritairement détenu par des personnes physiques.

S'agissant de l'investissement, les titres doivent être souscrits en numéraires, et les versements correspondants doivent intervenir avant le 31 décembre 1998.

Dans ce contexte, la réduction d'impôt est alors égale à 25 % des versements effectués au titre d'une année. Ceux-ci ne sont toutefois retenus que dans la limite d'un plafond, également annuel, et désormais fixé à 37.500 francs pour un célibataire ou 75.000 francs pour un couple.

L'avantage obtenu lors de la souscription est toutefois remis en cause si les titres sont cédés dans le délai de cinq ans.

B. LE RÉGIME DE LA DÉDUCTION DES PERTES

Également introduit par la loi du 11 février 1994, ce second dispositif répond à une logique profondément différente. Il tends en fait à sécuriser" l'investisseur initial en l'autorisant à déduire de son revenu imposable les pertes en capital qu'il supporte en cas d'échec de l'entreprise dans les cinq ans de sa création.

Compte tenu de son objectif, ce dispositif est évidemment réservé aux personnes physiques intervenant dans le cadre de la gestion privée de leur patrimoine et n'étant pas personnellement responsables des pertes de l'entreprise.

La société elle-même doit répondre à trois conditions :

- être créée à compter du 1er janvier 1994 pour exercer une activité réellement nouvelle, de nature industrielle, commerciale, artisanale, ou sous certaines conditions, libérale. Toutefois, sont également concernées les sociétés en difficulté faisant l'objet d'un plan de redressement organisant la continuation de l'activité,

- être soumise à l'impôt sur les sociétés,

- présenter un capital détenu pour au moins 50 % par des personnes physiques.

Enfin, la participation au capital doit résulter d'une souscription de titre réalisé :

- soit, pour les sociétés nouvelles, lors de sa création ou d'une augmentation de capital réalisé durant les cinq premières années de son existence,

- soit, pour les sociétés en difficulté, à l'occasion d'une augmentation de capital réalisée dans le cadre du plan de continuation de l'activité.

Dans ce cadre, le régime fiscal s'applique si l'entreprise se trouve en cessation de paiement dans les cinq ans suivant sa constitution et doit alors réduire son capital, ou cesser son activité.

L'investisseur peut alors imputer, sur son revenu global, le montant effectif de la perte en capital qu'il supporte, dans la limite annuelle de 100.000 francs pour un célibataire et de 200.000 francs pour un couple marié. La «prise en charge" fiscale est donc fonction de son taux marginal d'imposition.

II. L'INSTITUTION D'UNE POSSIBILITÉ DE PASSAGE ENTRE LES DEUX RÉGIMES

Bien que n'étant pas identique, les champs d'application de ces deux régimes se recoupent assez largement. Aussi, la législation actuelle prévoit-elle que les dispositifs sont rigoureusement exclusifs l'un de l'autre.

L'investisseur doit alors arbitrer, l'année de souscription des titres, entre deux possibilités :

- soit bénéficier de la réduction d'impôt, qui lui donne un avantage immédiat et certain, mais qui lui interdit de déduire ultérieurement ses pertes dans l'hypothèse où l'entreprise connaîtrait un échec,

- soit s'abstenir de demander l'avantage immédiat, et se réserver ainsi la possibilité de bénéficier, si nécessaire, du régime de déduction des pertes.

L'investisseur est alors conduit à un choix difficile entre un dispositif certain et un dispositif aléatoire.

Pour inciter les personnes physiques à investir en fonds propres dans les PME, le présent article propose donc aujourd'hui d'assouplir ces règles, tout en évitant le cumul des avantages fiscaux. Concrètement, il autorise le contribuable ayant opté pour la réduction d'impôt à revenir sur son choix initial si, compte tenu des circonstances, le régime de réduction des pertes s'avère en fait plus adapté à la situation. Mais ce changement de régime entraînera alors le rappel des réductions d'impôt précédemment obtenues pour la même participation.

Cet assouplissement, qui concerne les souscriptions effectuées à compter du 1er janvier 1996, permet ainsi de supprimer les hésitations et les regrets que le dispositif antérieur pouvait faire naître pour l'investisseur celui-ci seront désormais en mesure de bénéficier du régime le plus adapté à la situation.

On notera d'ailleurs que l'intérêt de l'option pour le régime de la déduction des pertes sera en fait très différent selon les contribuables. Il dépendra en effet de plusieurs facteurs : le montant des pertes, le taux marginal d'imposition et l'importance des réductions d'impôts précédemment obtenues

Dans ce contexte, l'Assemblée nationale a amélioré la rédaction initiale de l'article. Elle a en effet précisé que les réductions d'impôt précédemment obtenues devaient être rapportées au titre de l'année pour laquelle le contribuable peut effectivement déduire ses pertes. Il s'agit ainsi de s'assurer de la simultanéité des deux événements.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 4

Relèvement du plafond du régime d'imposition des micro-entreprises

Commentaire : le présent article propose de porter de 70.000 F à 100.000 F le plafond du chiffre d'affaires du régime spécial d'imposition et du régime de franchise de TVA applicable aux entreprises de faible taille. Cette mesure, qui s'inscrit elle aussi dans le cadre du plan "PME pour la France", a pour but d'alléger les obligations fiscales et comptables des petits entrepreneurs et des contribuables exerçant à côté de leur profession principale, une activité accessoire de faible importance.

I. LE RÉGIME ACTUEL DES MICRO-ENTREPRISES

Destiné à éviter dès que les contribuables en cause soient soumis à des obligations fiscales et comptables disproportionnées par rapport aux recettes retirées de l'exploitation, ce régime se structure autour de deux dispositifs complémentaires, mais liés.

A. LE RÉGIME DE FRANCHISE DE TVA

Codifié aux articles 293 B à 293 G du CGI, ce régime dispense du paiement de la TVA les entreprises dont le chiffre d'affaires n'excède pas un seuil fixé par la loi. Corrélativement, ces entreprises :

- sont alors privées de droit à déduction pour la taxe qui grève leurs acquisitions de biens ou de services

- et ne peuvent faire apparaître de TVA sur les factures ou documents qu'elles délivrent à leurs clients.

Dans son principe, le bénéfice de la franchise peut concerner toutes les formes d'entreprises, indépendamment de leur régime juridique ou de leur activité. Cette règle connaît toutefois quelques exceptions.

D'une manière générale ce régime s'applique, sauf option contraire, aux entreprises dont le chiffre d'affaires réalisé au cours de l'année civile précédente est inférieur à 70.000 F. Il continue en outre à s'appliquer l'année au titre de laquelle le chiffre d'affaires excède ce seuil, tout en restant inférieur à 100.000 francs.

Enfin, ces plafonds sont portés respectivement à 245.000 francs et 300.000 francs pour trois types d'activités :

- les opérations réalisées par les avocats, les avocats au Conseil d'État et à la Cour de Cassation et les avoués, dans le cadre de la réglementation relative à leur profession.

- Les opérations de livraison de leurs oeuvres par les auteurs d'oeuvres de l'esprit, à l'exception des architectes.

- L'exploitation, pour les artistes interprètes, de leurs droits patrimoniaux relevant de la propriété intellectuelle.

Une disposition spécifique permet alors d'appréhender les situations où ces contribuables bénéficiant du seuil majoré exerceraient parallèlement des activités accessoires susceptibles d'être également placées sous le régime des micro-entreprises. Pour éviter une stratification de seuil, l'article 293 G du Code Général des Impôts dispose que ces assujettis sont, en tout état de cause, exclus du régime de la franchise, lorsque le montant cumulé de leurs opérations relevant normalement de ce régime excède 315.000 francs l'année de référence et 400.000 francs l'année en cours.

Sur ces bases, le régime de la franchise concerne aujourd'hui 35.060 assujettis.

B. UN RÉGIME D'ÉVALUATION DU RÉSULTAT EXTRÊMEMENT SIMPLIFIÉ

Parallèlement, la loi de finances rectificative pour 1991 a institué un régime spécial d'évaluation du résultat imposable pour les entreprises dont le chiffre d'affaires de l'année en cours, apprécié sur douze mois, est inférieur à 70.000 F.

Son champ d'application s'avère toutefois plus restreint que celui de la franchise de TVA. En effet, il ne concerne que les entreprises individuelles, exerçant une activité relevant des bénéfices industriels ou commerciaux, ou des bénéfices non commerciaux.

En revanche, les deux régimes sont liés, le régime d'évaluation simplifié du résultat ne pouvant être retenu que par les entreprises placées sous le régime de franchise de TVA.

Applicable de plein droit au contribuable concerné, sauf option contraire de leur part, ce régime permet alors d'évaluer les charges de façon purement forfaitaire. Pour les professions relevant des BIC, elles sont fixées à 50 % du chiffre d'affaires. Pour les titulaires de BNC, ce taux est réduit à 25 %. Toutefois, et quelque soit l'activité exercée, l'abattement forfaitaire ne peut être inférieur à 2.000 francs.

Dans ce contexte, le contribuable est alors soumis à des obligations comptables réduites. Il doit simplement tenir un livre mentionnant l'origine et le montant de ces recettes.

Par symétrie avec la solution adoptée en matière de franchise de TVA, ce régime continue de s'appliquer pour l'année au cours de laquelle les recettes du contribuable excèdent 70.000 francs, sous réserve qu'elles restent inférieures à 100.000 francs.

II. UN RELÈVEMENT DE SEUIL RELATIVEMENT IMPORTANT

Le présent article relève de 70.000 F à 100.000 F. le plafond du chiffre d'affaires du régime spécifique d'évaluation du résultat. Parallèlement, le seuil en deçà duquel le régime peut provisoirement continuer à s'appliquer est fixé à 120.000 francs. Cette mesure prendra effet pour les revenus des années 1996 et suivants.

Compte tenu de la liaison qui existe entre les deux dispositifs, il est simultanément proposé de relever, dans les mêmes proportions, les limites d'application du régime de franchise de TVA. Toutefois, cet ajustement sera effectif à compter du 1er janvier 1997.

Cette déconnexion dans les dates d'entrée en vigueur est cohérente au regard des règles propres à chaque régime, et notamment, du décalage dans les périodes de référence retenues pour apprécier la situation de l'entreprise au regard de chacun d'entre eux.

Elle suscite néanmoins une difficulté pratique pour les entreprises dont le chiffre d'affaires réalisé en 1995 se situe entre 70.000 francs et 100.000 francs. Celles-ci ne pourront pas bénéficier immédiatement de l'effet de la mesure et devraient donc normalement être provisoirement exclues d'un régime de franchise de TVA qui conditionne l'accès au régime des micro-entreprises. L'administration prévoit toutefois d'apporter une solution par voie d'instruction.

Sur le fond, ce relèvement de seuil a pour objectif d'alléger les obligations déclaratives et comptables d'un plus grand nombre de petits contribuables.

Ce souci conduit certes à fixer un nouveau plafond plus favorable que celui prévu en la matière par le droit positif communautaire, et notamment le règlement du conseil en date du 29 mai 1989. En revanche, il s'inscrit tout à fait dans le cadre des limites envisagées dans la proposition de le la 22 ème directive communautaire qui n'a toutefois pas encore été adoptée.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 5

Modernisation du régime des fonds communs de placements à risques

Commentaire : le présent article modifie profondément le régime des fonds communs de placement à risques (FCPR) en créant deux types de fonds. Les premiers, autorisés à faire publiquement appel à l'épargne seraient dotés de règles particulières de protection des investisseurs. Les seconds, destinés aux investisseurs avertis, seraient dotés d'une plus grande latitude d'intervention.

Malgré son caractère technique et anodin, le présent article est très important. Il définit en effet une partie des bases de la relance du capital-investissement en France, que la loi de modernisation financière, puis les fonds de pension, viendront compléter.

L'enjeu économique du capital investissement est absolument fondamental : la plus grande partie des créations d'emplois en France proviendront des opérations auxquelles il pourra contribuer. A cet égard, cet article fait partie d'un dispositif d'ensemble de restauration de l'esprit d'entreprise, enjeu majeur du développement économique, et dont l'actuel ministre de l'économie et des finances est à l'origine.

Votre commission s'est montrée constamment soucieuse de la réussite de ces objectifs. Elle n'en considère pas moins qu'une certaine prudence est de mise, s'agissant d'investissements risqués : les échecs éventuels pourraient ternir le capital-investissement aux yeux d'une épargne publique qu'il faut attirer, et donc protéger.

I. LA SITUATION ACTUELLE DES FCPR

Les FCPR sont une catégorie particulière d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM). Instruments bien adaptés au capital-risque, leur développement marque actuellement le pas.

A. LE RÉGIME EN VIGUEUR

Les fonds communs de placement à risques ont été créés par la loi sur l'épargne du 3 janvier 1983 et réformés par la loi du 23 décembre 1988 sur les organismes de placement collectif en valeurs mobilières et portant création des fonds communs de créances. Il s'agit donc d'un sous-ensemble particulier parmi les FCP, qui forment avec les sociétés d'investissement à capital variable (SICAV), l'ensemble des OPCVM.

Compte tenu du créneau très spécifique qui est le leur, ils ne représentent qu'une partie très réduite des OPCVM : à la fin de 1994, les OPCVM représentaient 2.789 milliards de francs d'actifs gérés, dont 889 milliards de francs de FCP, dont 10 milliards de francs de FCPR.

Les FCPR revêtent les caractéristiques des FCP. Comme tous les OPCVM, il s'agit de fonds gérés sur base collective pour compte de tiers, par une société de gestion distincte du dépositaire du portefeuille. Comme tous les FCP, ce sont des copropriétés de valeurs mobilières, dénuées de la Personnalité morale.

En outre, les FCPR présentent trois caractéristiques propres : des contraintes d'investissement, un régime fiscal favorable, des règles de gestion et de commercialisation spécifiques comportant des obligations pour les Porteurs de parts.


• Les FCPR doivent composer leur portefeuille d'au moins 40 % de titres de capital ou titres participatifs non admis à la négociation sur un marché réglementé français ou étranger. Par marché réglementé, il faut comprendre la notion employée par la directive sur les services d'investissement, c'est-à-dire un marché sur lequel une autorité publique, ou déléguée par une telle autorité, réglemente les intermédiaires et les opérations, et qui est soumis à certaines obligations de transparence. C'est notamment pourquoi le compartiment hors-cote n'est pas visé par cette restriction. Au moment de la constitution du fonds, après une période de souscription ou après cession d'une partie des actifs, la société de gestion dispose d'un délai de deux ans pour se conformer à cette règle. En effet, après ce type d'événement, le fonds est nécessairement pourvu d'importantes liquidités qu'il faut éviter d'investir dans la précipitation.

L'objectif de cette contrainte n'est pas de faire échapper les FCPR aux garanties qui entourent les marchés réglementés, mais plutôt de les spécialiser dans les actions ou titres de capital des petites et moyennes entreprises (PME). En effet, même si cela n'a rien d'automatique, les titres des grandes entreprises sont souvent négociées en bourse alors que les petites, dotées d'un capital plus faible, ne pourraient voir leurs titres faire l'objet d'un marché suffisamment liquide (avec beaucoup de transactions) pour pouvoir être cotées. C'est donc ce ciblage sur les PME qui explique cette contrainte légale.

La Commission des opérations de bourse (COB) admet cependant que les sociétés cotées depuis moins de cinq ans puissent faire partie de l'actif du fonds. Cette mesure est indispensable : les FCPR ont le plus possible intérêt à ce que les actions qu'ils détiennent soient un jour cotées afin de pouvoir les revendre plus facilement et réaliser leurs plus-values.

Par ailleurs, les FCPR peuvent employer plus de 5 % de leur actif en titres d'un même émetteur, mais pas plus de 20 % s'agissant d'un OPCVM Depuis 1991, ils ne peuvent détenir plus de la moitié de leur actif non coté en valeurs non ressortissantes de l'Union européenne.


• Les FCPR bénéficient d'un régime fiscal favorable, qui constitue un encouragement à respecter leurs obligations d'allocation d'actifs.

D'une part, ils bénéficient de la transparence fiscale, à condition toutefois qu'aucune personne physique ne détienne plus de 10 % du fonds (afin d'éviter les montages destinés à bénéficier des avantages des FCPR) : ils ne sont pas eux-mêmes imposés.

D'autre part, les personnes qui les détiennent bénéficient d'une fiscalité avantageuse. Les personnes physiques sont exonérées sur les revenus et les plus-values pendant cinq ans à condition de détenir les parts pendant cinq ans et d'en réinvestir immédiatement les produits. Les personnes morales bénéficient d'un régime favorable d'imposition des plus-values : les plus-values latentes sont exonérées, les plus-values réalisées sont imposées au taux de 19 %, à condition que les parts aient été conservées au moins cinq ans, ou deux ans si l'actif du FCPR est constitué à 50 % au moins de titres de capital de sociétés non cotées de l'Union européenne.

Toutefois ces avantages sont subordonnés au strict respect des règles d'investissement en capital-risque par le fonds.


• Enfin, les FCPR obéissent à des contraintes particulières de gestion et de commercialisation.

Ils n'ont pas le droit de recourir à la publicité ni au démarchage, ce qui revient en pratique à leur interdire de faire appel public à l'épargne.

Leur règlement peut prévoir une obligation minimale de durée de détention des parts souscrites, qui ne peut excéder dix ans. Une obligation de cinq ans est couramment pratiquée. Ces fonds s'investissent dans des valeurs non liquides par nature, et il est nécessaire que leurs souscripteurs s'engagent à long terme. Toutefois, au terme du délai de l'obligation de détention, les porteurs de parts peuvent exiger la liquidation du fonds si leurs demandes de remboursement n'ont pas été satisfaites dans le délai d'un an.

Leur règlement peut également prévoir un intéressement particulier de la société de gestion. Les sociétés de gestion d'OPCVM sont habituellement rémunérées annuellement par une somme représentant une fraction de l'actif. Pour les FCPR, le règlement peut prévoir l'attribution à la société de gestion d'une fraction des actifs pouvant aller jusqu'à 20 % au moment de la liquidation du fonds. En pratique, la rémunération de la société de gestion est le plus souvent fondée sur la performance, par attribution d'une fraction des plus-values réalisées.

B. LA PLACE DES FCPR DANS LE CAPITAL-INVESTISSEMENT

Le capital-investissement est constitué de l'ensemble des financements en fonds propres des petites et moyennes entreprises, sélectionnées en général pour leur important potentiel. Ces interventions se font à quatre stades-clés de la vie de l'entreprise : la création et son environnement immédiat, le développement, la transmission (par donation ou héritage), le rachat par les salariés.

Le noyau dur du métier est constitué par le développement, qui reste le maillon faible du système financier français, fondé sur l'endettement. Cette Phase est déterminante pour la vie future de l'entreprise. Celle-ci a une activité satisfaisante et de bons résultats, mais ne peut faire face à la demande faute d'investissements de capacité pouvant augmenter significativement sa taille. Elle ne peut financer ces investissements par emprunt, faute de garanties et surtout parce que les charges en seraient trop lourdes. Si elle renonce à l'investissement, elle perdra sa clientèle et elle ne pourra plus satisfaire la demande. Elle a donc un besoin impérieux de fonds propres.

Le rôle des fonds de capital-investissement est de favoriser le passage de cette étape.

Montant des investissements en capital-risque en France

Ce rôle est fondamental pour l'économie. L'essentiel des créations d'emplois vient en effet des PME qui, dans un univers marqué par les réductions d'effectifs, sont les seules à augmenter leurs capacités de production. L'association française des investisseurs en capital (AFIC) a observé qu'aux Etats-Unis, les entreprises partenaires du capital-investissement ne sont que 4 % du total des entreprises mais créent 70 % des emplois.

L'encours en capital géré par les membres de l'AFIC représente environ 50 milliards de francs, au sein d'instruments divers : les sociétés de capital-risque (11 ( * )) les FCPR, mais aussi certaines sociétés de développement régional et des sociétés à statut de droit commun. Le CEPME et la SOFARIS en sont les partenaires.

Dans cet ensemble, les FCPR représentent un encours de 10 milliards de francs. Après avoir bien progressé dans les années 80, ils marquent aujourd'hui le pas. Ainsi, en 1995 comme en 1994, le nombre de FCPR dissous a excédé le nombre de FCPR créés : 10 contre 9 en 1994 ; 18 contre 7 en 1995. A la fin de l'année 1995, la COB ne recensait plus que 119 fonds contre 138 en 1992.

Source : Association des sociétés et fonds français d'investissement

Cette situation est regrettable, car les FCPR sont des instruments très commodes, prisés par les professionnels du capital-investissement. Ce sont des petites structures (leur portefeuille est en moyenne inférieur à 100 millions de francs), qui se constituent pour quelques opérations ponctuelles à l'issue desquelles les porteurs de parts ont vocation à se partager un bénéfice. En effet, le FCPR n'a pas pour objectif de rester un partenaire permanent de l'entreprise, mais de l'accompagner au cours d'une phase critique de sa vie, puis de céder sa participation, éventuellement par introduction en bourse, avec une plus-value souvent élevée.

Source : ASFFI

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Issue d'une réflexion menée conjointement par la COB et l'AFIC, le dispositif proposé reprend l'une des propositions du livre blanc de l'AFIC, publié en avril 1995, et qui était ainsi formulée : "Distinguer les statuts des FCPR ouverts au public de ceux réservés aux investisseurs professionnels. Elargir la nature des actifs détenus. Bloquer les sommes distribuables en compte courant. Exonérer les commissions de gestion de la TVA ".

Sans reprendre la totalité des propositions de l'AFIC, le présent article a en fait deux objets : légaliser un certain nombre de pratiques admises par la COB, distinguer deux types de fonds selon qu'ils font ou non appel public à l'épargne.

A. LA LÉGALISATION DE PRATIQUES ADMISES PAR LA COB

Le présent article prévoit ainsi d'autoriser cinq pratiques :

- l'acquisition de parts de SARL ;

- les avances en compte courant ;

- la possibilité d'émettre des parts assorties de droits différents ;

- la possibilité de procéder à des distributions partielles d'actifs à l'issue des périodes de souscription ;

- la libre-cessibilité des parts dès la souscription.


L'acquisition de parts de SARL était déjà admise par la COB et les services fiscaux, au sein du quota de titres non cotés. D'un point de vue purement juridique, cette pratique était sans base légale puisque les parts de SARL ne sont pas des valeurs mobilières au sens de la loi de 1988 sur les OPCVM. Mais du point de vue de la logique économique des FCPR, cette possibilité s'impose, car les PME prennent fréquemment la forme de SARL. A cet égard, lorsqu'une société n'est pas cotée, il n'y a guère de différence économique entre une action de société anonyme et une part de SARL.

Répartition des PME selon le statut juridique

Le tableau ci-dessus montre l'importance du statut de SARL parmi les entreprises les plus petites.

A juste titre, l'Assemblée nationale a souhaité expliciter que "acquisition de parts de SARL est une dérogation à la loi de 1988.


• La possibilité d'investir en compte courant était également tolérée. Le décret d'application actuellement en préparation devrait prévoir que cette possibilité est réservée aux sociétés dont le FCPR détient 5 % du capital, pour une durée d'au plus trois ans, et que ce type d'investissement ne peut être fait qu'à titre accessoire.

Là encore, il s'agit de se conformer à la souplesse nécessaire à » investissement dans les PME.

L'article 6 du présent projet prévoit une disposition de coordination dans la loi bancaire : l'avance en compte courant est actuellement réservée aux établissements de crédit.


La possibilité d'émettre des parts assorties de droits différents est justifiée par la pratique de l'intéressement de la société de gestion aux plus-values réalisées, dont la distribution est effectuée lors de la liquidation du fonds. Cette pratique, consistant à créer des parts de fondateurs assorties de droits préférentiels, était déjà courante, et bien que contraire au droit commun des OPCVM, elle n'a pas donné lieu à contentieux.

L'Assemblée nationale a précisé avec raison que le règlement du fonds doit faire état de façon détaillée de ces différents types de parts.

Le projet de décret prévoit que ces parts préférentielles ne peuvent être rachetées qu'après toutes les autres, ou après liquidation du fonds.


•Les distributions partielles d'actifs
entrent dans la logique de souplesse de gestion du FCPR. A l'issue d'une opération, lorsqu'une participation est cédée, certains FCPR rétrocèdent à leurs porteurs leur quote-part du capital et des plus-values. Cette méthode est très appréciée des porteurs de parts qui peuvent ainsi réellement bénéficier des résultats de fonds qui, souvent mirobolants sur le papier, ne sont pas toujours très rentables pour leurs souscripteurs.

Le présent article encadre cette pratique en prévoyant qu'elle ne peut avoir lieu qu'à l'issue de la souscription, de façon à ne pas léser les derniers souscripteurs.

L'Assemblée nationale a ménagé la possibilité de plusieurs périodes de souscription.


La libre-cessibilité des parts dès la souscription était déjà légale, puisque les parts de FCPR sont des valeurs mobilières, mais le présent article encadre le cas des parts non entièrement libérées.

Les parts de FCPR sont toujours cessibles. La période dite de blocage correspond à la période au cours de laquelle il n'est pas possible de se faire racheter les parts sur le fonds lui-même.

Lorsque les parts ne sont pas entièrement libérées (i.e. intégralement payées et acquises), le souscripteur et les cessionnaires successifs sont tenus solidairement de ce qui reste à libérer.

Le présent article prévoit par ailleurs un mécanisme de déblocage lorsqu'un souscripteur ne libère pas ses parts comme convenu. Les parts peuvent alors être cédées d'office, de façon à ce que le capital appelé puisse être finalement libéré.

B. LA DISTINCTION ENTRE DEUX TYPES DE FONDS

L'interdiction de faire du démarchage et de la publicité en faveur des FCPR était destinée à protéger les investisseurs contre les risques inhérents à ce type de produit d'épargne : très peu liquides, les FCPR peuvent afficher des performances extraordinaires une année, avant de sombrer à la suite d'une seule défaillance au sein de leur portefeuille de participations. Ils ne se conçoivent que comme placements à long terme, très minoritaires, au sein de patrimoines importants : ils ne s'adressent pas à la très grande majorité des épargnants, et concernent surtout les investisseurs institutionnels.

Cependant, cette interdiction concorde mal avec le régime fiscal incitatif qui est le leur. C'est pourquoi le gouvernement veut poursuivre à son terme la logique d'incitation.

Dès lors que le démarchage et la publicité sont autorisés, il est nécessaire de prendre des mesures de protection de l'épargne qui peuvent ne pas se concilier avec la nécessaire souplesse d'utilisation du FCPR. D'où l'idée de créer deux régimes distincts : l'un pour ceux qui font appel public à l'épargne, l'autre pour ceux qui restent fermés.

ï Les FCPR ouverts à la publicité devront obéir à des règles spécifiques de détention des actifs. Ils devront respecter des règles de division des risques. L'avant-projet de décret prévoit une double limitation : pas plus de 25 % de l'actif net du fonds en titres d'un même émetteur, pas plus de 35 % du capital ou des droits de vote de cet émetteur (12 ( * ))

ï Les FCPR fermés bénéficieront d'une plus grande latitude d'action. Ils pourront effectuer des opérations à terme (ferme ou conditionnel). Ils pourront se livrer à des opérations actuellement interdites aux OPCVM : garanties de passif, prises de majorités, pactes d'actionnaires... En bref, ils pourront effectuer toutes les opérations habituelles des investisseurs qui ont une part active dans la gestion des sociétés dans lesquelles ils prennent des participations.

Ces droits seront encadrés : les opérations devront être conformes à l'objet du fonds, ne pas exposer davantage que l'actif du fonds, et faire l'objet d'informations précises des porteurs de parts.

En réalité, ces activités étaient déjà fréquentes au sein des FCPR, qui, par la force des choses, sont des partenaires de sociétés plus actifs que les autres OPCVM.

Ces opérations peuvent exposer, dans certains cas, le FCPR à des risques supérieurs à sa mise de fonds initiale en capital. Elles devraient être interdites aux FCPR faisant appel public à l'épargne.

Un décret en Conseil d'Etat viendra préciser ces règles. A la demande de l'Assemblée nationale, il prévoira notamment la fraction de valeurs étrangères que ne pourra dépasser un fonds constitué avant 1990 (date de la mise en place du régime fiscal de faveur qui ne s'applique pas aux fonds investis en valeurs étrangères).

III. APPRÉCIATION DU DISPOSITIF

Votre commission, qui a réaffirmé à plusieurs reprises son attachement à voir se développer les investissements en fonds propres dans notre pays, ne peut que saluer ce dispositif qui devrait permettre d'une part, de relancer les FCPR en les popularisant, d'autre part de permettre aux fonds les plus professionnels et les plus risqués d'agir avec toute l'efficacité nécessaire. Une industrie performante du capital-investissement est une des clés structurelles d'un haut niveau d'emploi ainsi que le démontrent les Etats-Unis et le Royaume-Uni.

Par ailleurs, cette réforme s'insère dans un mouvement d'ensemble, dont font partie la loi de modernisation des activités financières et le projet de fonds de pension.

La loi de modernisation financière va jeter les bases d'une gestion pour compte de tiers véritablement indépendante permettant à la gestion d'OPCVM française, qui est une des plus développées du monde, de conserver son avantage compétitif. Cet élément est capital pour les fonds à risque. Compte tenu de leur rôle de prises de participation, les banques qui en sont dépositaires ou promoteurs peuvent toujours être tentées de les utiliser à des opérations servant leurs intérêts industriels, éventuellement au détriment de ceux des porteurs de parts.

Sous réserve des votes à venir, la loi de modernisation financière prévoit de confier la gestion des FCP à des sociétés de gestion de portefeuille issues de la loi de 1989 sur la sécurité et la transparence des marchés financiers. Si les propositions de votre commission sont adoptées, l'indépendance de ces sociétés vis-à-vis des dépositaires sera assurée, sous le contrôle de la COB.

La constitution de fonds de pension permettrait de donner à cette industrie l'aliment qui lui fait défaut. Aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, 40 % des opérations de capital-investissement sont le fait des caisses de retraites.

Cependant, ces perspectives radieuses pourraient être ternies par l'échec de certains FCPR qui auraient pris au piège des épargnants peu avertis. Le triste exemple de la souscription au capital de la société Eurotunnel est de nature à éloigner pour longtemps nos compatriotes du capital-investissement. Il ne faut pas le reproduire, en laissant des épargnants modestes s'engager dans des opérations dont ils ne mesurent pas les risques.

C'est pourquoi votre commission recommande la prudence vis-à-vis des fonds qui auront recours à l'épargne publique, alors qu'il est légitime d'octroyer la plus grande liberté aux fonds fermés.

Votre commission vous propose trois orientations dans cette optique.

S'agissant des FCPR qui ne feront pas appel public à l'épargne, il n'est pas logique d'imposer des conditions et des limites à la détention des différents actifs. Définir leur nature peut suffire. Il ne faut pas se priver de pouvoir utiliser le FCPR très souplement pour une prise de participation dans une société unique par exemple. Si le FCPR ne le permet pas, ces opérations se fonderont sur des statuts "off  shore ".

Votre rapporteur vous propose de modifier le premier alinéa de l'article 22 modifié de la loi de 1988 en ce sens.

Inversement, s'agissant des FCPR qui feront appel public à l'épargne, les plus grandes précautions s'imposent.

La possibilité de recours au démarchage paraît prématurée en l'état actuel de la législation de cette profession. A la demande du ministre de l'économie et des finances, votre commission a renoncé à présenter ses propositions à l'occasion du projet de loi de modernisation des activités financières, afin de laisser se développer une réflexion complémentaire sur ce sujet. Va-t-on laisser une activité peu sûre et mal encadrée se développer à propos des produits d'épargne les plus risqués du marché ? Ce serait la porte ouverte à tous les excès, d'autant plus dangereuse que des épargnants se laisseront facilement abuser par l'affichage des performances passées, souvent extraordinaires, des FCPR.

Votre rapporteur vous propose donc de reporter l'autorisation de démarchage au futur projet de loi qui interviendra sur ce sujet.

De la même façon, il paraît nécessaire de prévoir que les FCPR faisant appel public à l'épargne devront observer, outre des ratios de divisions des risques, des règles particulières d'information des épargnants et l'interdiction d'exposer aucune de leurs prises de participation à des risques d'un montant plus élevé que la mise de fonds initiale. Le décret d'application devrait comporter ces précautions.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 6

Non-application de l'interdiction relative aux opérations de crédit aux avances en compte courant d'associé consenties par un fonds commun de placement à risques

Commentaire : par coordination avec l'article 5, le présent article modifie la loi bancaire pour prévoir une dérogation au monopole des établissements de crédit en matière d'opérations de banque.

Ce dispositif aurait pu figurer dans un second paragraphe de l'article 5. Il introduit un 4° dans l'article 11 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit qui se coordonne avec le deuxième alinéa de l'article 22 modifié de la loi de 1988 sur les OPCVM. Ce dernier autorise les FCPR, conformément à une pratique répandue, à accorder des avances en compte courant aux sociétés dans lesquelles ils ont une participation.

Cette possibilité sera strictement encadrée par décret : l'avance sera réservée aux sociétés dont le fonds détient au moins 5 % du capital et ne devra pas excéder trois ans.

Les avances en compte courant sont des opérations de crédit. Dès lors qu'elles sont accordées de façon habituelle (ce qui sera le cas pour les FCPR), elles entrent dans le monopole des banques. C'est pourquoi il est nécessaire de prévoir une dérogation explicite en leur faveur.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 6

Émission d'obligations et de titres subordonnés remboursables par les sociétés d'assurance mutuelles

Commentaire : le présent article additionnel a pour objet de permettre aux sociétés d'assurance à forme mutuelle d'émettre des obligations et des titres subordonnés remboursables.

Les entreprises d'assurance peuvent prendre deux formes : la forme des entreprises commerciales ou la forme des sociétés d'assurance mutuelles. Ces dernières ont un objet non commercial. Cependant, leurs obligations en terme de solvabilité sont identiques à celles des autres entreprises d'assurance. Le présent article tend à égaliser leurs conditions de financement.

I. LE STATUT DES SOCIÉTÉS D'ASSURANCE MUTUELLES (SAM) LEUR IMPOSÉ DES CONTRAINTES PARTICULIÈRES DE FINANCEMENT

A. LES MODALITÉS DE FINANCEMENT DES SAM

Le statut des SAM est prévu à l'article L. 322-6-1 du code des assurances. Elles sont sociétés civiles. Elles doivent être toutefois distinguées des mutuelles régies par le Code de la Mutualité ayant pour objet la prévoyance et la protection sociale des personnes. Leur statut comprend six Particularités :

ï un objet non commercial ;

ï une cotisation fixe ou variable, susceptible de faire l'objet de ristourne ;

ï l'assurance des risques concerne les seuls sociétaires qui sont à la fois assurés et assureurs ;

ï une absence de capital social ;

ï un exercice démocratique du pouvoir qui n'est pas lié au montant des apports : un homme, une voix.

Contrairement aux sociétés anonymes, les sociétés d'assurance mutuelles sont des sociétés de personnes qui fonctionnent "sans capital actions" (décret loi de 1938), avec seulement un fonds d'établissement ayant la nature de fonds propres, car constitué à fonds perdus par les fondateurs et les sociétaires. Ceci les différencie des coopératives, qui peuvent émettre des titres représentatifs de leur capital social.

Les SAM sont financées soit par des cotisations versées par leurs adhérents visant à permettre le règlement des sinistres et la couverture des frais de gestion, soit exceptionnellement au moyen d'emprunts non négociables, destinés au financement des dépenses non récurrentes.

En outre, les SAM ne peuvent emprunter qu'auprès de leurs nouveaux sociétaires, et dans des cas limités, énumérés à l'article R 322-74 du code des assurances, le plus souvent après approbation des autorités de tutelle, à savoir : pour constituer leur fonds d'établissement et, le cas échéant, leur fonds social complémentaire et leur fonds de développement.

Le fonds d'établissement vise en effet à suppléer l'absence du capital social dans les SAM : il est constitué soit par apport des fondateurs, soit par l'émission d'emprunts le plus souvent souscrits par une autre structure mutualiste.

Sa constitution est obligatoire avant tout début d'activité : son montant minimum est au moins égal à la moitié du capital social exigé pour les sociétés anonymes.

Si les statuts le prévoient, les sociétés peuvent constituer un fonds social complémentaire, c'est-à-dire un emprunt auprès des sociétaires, destiné à leur procurer les éléments de solvabilité dont elles doivent disposer. C'est une mesure qui s'apparente à l'autofinancement puisque ce sont les sociétaires qui financent leur propre mutuelle. Une fois autorisé par l'Assemblée Générale, il devient obligatoire pour les sociétaires. Il fait l'objet d'une autorisation par l'autorité de contrôle.

Enfin, les sociétés ont la possibilité d'emprunter pour réunir les fonds nécessaires au développement de leurs opérations et au financement de leur production nouvelle.

Depuis la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988, les SAM ont le droit d'émettre des titres participatifs dans les formes prévues par le droit des sociétés. Ces titres participatifs ne peuvent être rémunérés en fonction d'un critère représentatif de l'activité de la société, contrairement aux TP de droit commun.

B. LEURS BESOINS

Ce mode de financement ne suffit pas aux SAM, qui ont un poids économique important et des exigences de solvabilité identiques à celles des autres entreprises d'assurance. Elles sont surtout présentes dans les branches de dommages, avec 15 millions de sociétaires, 38 milliards de francs de cotisations en 1995 et 58 milliards de francs de placements.

Pour satisfaire les exigences de marge de solvabilité prévues aux articles R 334-3 et suivants du code des assurances, une entreprise d'assurance dommages doit avoir constitué dans le même temps que la production nouvelle, des fonds propres supplémentaires. Ainsi, pour 100 F de prime nouvelle en assurance non vie, il faut 16 F de fonds propres supplémentaires, niveau qui ne peut être atteint par la seule incorporation en réserve de tout le bénéfice après impôts de l'exercice antérieur. Cela supposerait, en effet, que l'entreprise réalise un résultat technique avant impôts de plus de 24 %, ce qui est particulièrement difficile sur un marché aussi compétitif que celui des risques de particuliers.

L'entreprise à capital actions (société anonyme) a le choix de procéder, notamment par appel public à l'épargne, à des augmentations de capital ou à l'émission d'autres titres représentatifs de fonds propres, tels que les titres subordonnés.

En revanche, le fonds d'établissement, qui tient lieu de capital social Pour la mutuelle d'assurance (avec des exigences minimales à la constitution fixées par la loi), ne peut être augmenté, en cours de vie sociale, que lorsqu'un agrément administratif est sollicité pour de nouvelles branches d'activité.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Il s'agit d'autoriser les SAM à émettre des obligations et titres subordonnés remboursables, dans les formes prévues par le droit des sociétés, comme cela a été fait en 1988 avec les titres participatifs. Malgré le caractère relativement complexe du présent article, l'innovation proposée pour les articles L 322-2-2-1 et L. 322-26-2-2 ne porte que sur ce seul point, avec les adaptations nécessaires dans les références à la loi de 1966, notamment les dispositions spéciales applicables (responsabilité et sanction). Ces dispositions sont étendues aux SAM dès lors qu'elles obtiennent le droit d'émettre ces titres dans le public.

Comme dans le droit actuel pour ce qui concerne les titres participatifs, les sociétaires sont assimilés à des actionnaires pour ces émissions de titres, et les organes sociaux sont assimilés aux organes homologues des sociétés par actions.

Seules les sociétés ayant au moins deux ans d'existence peuvent émettre des titres.

Comme pour les titres participatifs, le présent article additionnel prévoit qu'il n'est pas possible de privilégier telle ou telle catégorie de personnes ou telle ou telle personne pour des émissions réservées qui accorderaient davantage de droits que les titres émis dans le public. Il est en outre prévu par précaution que l'assemblée générale ne peut déléguer le pouvoir d'émission au conseil d'administration.

L'inscription au registre du commerce et des sociétés est prévue afin que les obligations correspondantes soient appliquées.

Enfin, il est prévu que les SAM puissent faire publiquement appel à l'épargne sous le contrôle de la commission des opérations de bourse.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter le présent article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.

Article additionnel après l'article 6

Fiscalité des contrats d'échange de taux d'intérêt et de devises

Commentaire : le présent article a pour objet d'unifier la fiscalité des contrats d'échange de taux d'intérêt ou de devises, et de prévoir le cas de leur changement d'affectation.

I. LE DROIT EN VIGUEUR

La fiscalité, applicable aux établissements de crédit, des plus-values latentes des contrats à terme d'échange de taux ou de devises, est prévue par l'article 38 bis C du code général des impôts.

Les contrats à terme d'échange de taux d'intérêt ou de devises, plus connus sous le nom de "swaps", sont des opérations en deux temps :

- il s'agit d'échanger au comptant deux devises ou deux titres libellés dans des taux d'intérêt différents (taux fixe ou variable),

- dans le même temps, l'opération inverse est conclue, mais à terme. Elle se dénoue au terme fixé.

Le "swap" peut combiner un échange de devises et de taux dès lors que ce contrat porte sur des créances libellées en devises et en taux différents.

L'un des deux contractants peut opérer afin de se couvrir contre une baisse de la devise ou une hausse des taux d'intérêt. L'autre assume ce risque, ou cherche la couverture inverse.

L'article 38 bis C prévoit que les établissements de crédit sont imposés sur l'écart de valeur, constaté en fin d'exercice, de leurs contrats de swaps" ; à condition toutefois qu'ils aient été dès leur conclusion affectés à la couverture d'instruments financiers ou à la gestion spécialisée d'une activité de transaction.

Si les contrats concernés cessent de remplir les conditions prévues pour être soumis à la règle d'évaluation à la clôture de l'exercice, les flux de trésorerie relatifs à ces contrats sont rattachés aux résultats selon la règle des intérêts courus.

Enfin, les soultes constatées lors de la conclusion de contrats qui ne font pas l'objet d'une évaluation à leur valeur de marché sont rapportées aux résultats imposables de manière échelonnée selon une répartition actuarielle sur la durée de vie des contrats concernés.

Les mêmes règles s'appliquent sur le plan comptable.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article additionnel modifie ce mode d'imposition sur deux points :


• D'une part, il prévoit que les contrats en question peuvent changer d'affectation (paragraphes I, II et III 1er alinéa). Ils sont alors valorisés au moment de ce changement.

Sur le plan comptable, les contrats d'échange de taux d'intérêt ou de devises sont, dès leur conclusion, enregistrés dans des comptes de hors-bilan dans l'une des catégories suivantes en fonction de leur objet :

- contrats isolés (position ouverte) : les flux financiers sont comptabilisés selon la règle du coupon couru ;

- contrats affectés à la couverture d'un élément identifié : les flux financiers sont comptabilisés selon la règle du coupon couru sauf si le contrat est affecté à la couverture d'un élément valorisé à sa valeur de marché à la clôture de l'exercice ;

- contrats affectés à la couverture d'un risque global de taux d'intérêt : règles identiques à celles des contrats isolés ;

- contrats affectés à la gestion spécialisée d'un portefeuille de transaction : la règle de valorisation à la valeur de marché s'applique.

En cas de transfert en cours d'exercice de contrats inscrits dans l'une des catégories pour lesquelles la règle de valorisation s'applique vers l'une des catégories ou cette règle ne s'applique pas, la réglementation bancaire prévoit seulement que les contrats transférés le sont pour leur valeur de marché évaluée à la date du transfert, sans apporter cependant de précisions sur le traitement comptable de l'écart d'évaluation existant à cette date.

La même imprécision existe sur le plan fiscal.

Le présent article prévoit, dans cette situation, l'imposition de l'écart d'évaluation constaté à la date du transfert ainsi que l'étalement actuariel de la somme des écarts d'évaluation pris en compte depuis la conclusion du contrat concerné, sur la durée restant à courir depuis la date du transfert jusqu'à l'échéance de ce contrat.

En effet, la somme des écarts d'évaluation correspond au montant actualisé du différentiel existant entre les intérêts à recevoir et les intérêts à payer sur la durée restant à courir jusqu'à l'échéance. Dès lors, il paraît logique d'annuler l'écart d'évaluation au fur et à mesure de la prise en compte de ce différentiel dans les résultats imposables afin d'éviter, selon le cas, une double imposition ou une double déduction.

Afin de supprimer la distorsion actuelle, le présent article applique la règle de valorisation aux contrats ainsi transférés. Il prévoit ainsi que la règle de valorisation s'applique aux contrats qui répondent postérieurement à leur conclusion aux conditions prévues pour être soumis à cette règle. Corrélativement, la fraction de la soulte versée ou reçue lors de la conclusion du contrat qui n'a pas été encore rapportée aux résultats imposables serait comprise dans les résultats de l'exercice de transfert dès lors qu'elle est prise en compte dans la valorisation.


• D'autre part, le présent article unifie la fiscalité des "swaps" en étendant le régime de l'article 38 bis C à certains d'entre eux, présentant des caractéristiques particulières : les FRA, CAPS, FLOORS et COLLARS

FRA, CAPS, FLOORS et COLLARS

- le FRA est un contrat aux termes duquel deux parties -soit deux banques entre elles, soit une banque et une entreprise- se garantissent un taux applicable à une somme déterminée pendant une période déterminée dont le point de départ est postérieur au jour de conclusion du contrat FRA

L'une des parties se garantit contre la hausse des taux tandis que l'autre se garantit contre la baisse. Cette opération ne donne lieu à aucun mouvement de capitaux.

- un CAP est un contrat à terme qui permet à une entreprise de se garantir sur un montant déterminé contre une hausse des taux d'intérêt en contrepartie du paiement d'un prime fixe dès la signature du contrat.

- un FLOOR est un contrat à terme qui permet à une entreprise de se garantir sur un montant détérminé contre une baisse des taux d'intérêt qui réduirait sa rémunération en contrepartie du paiement d'un prime fixe dès la signature du contrat.

-le COLLAR est un contrat constitué par la combinaison d'un CAP et d'un FLOOR. L'acheteur d'un COLLAR assure un taux maximum d'emprunt mais renonce au bénéfice partiel ou total d'une baisse des taux en dessous du taux plancher.

Le comité de la réglementation bancaire prévoit déjà l'application de la règle d'évaluation à la valeur de marché aux accords de taux futurs (FRA) et autres contrats analogues, ainsi que, depuis peu, aux contrats de CAPS, FLOORS et COLLARS.

C'est pourquoi il convient de mettre en conformité la règle fiscale et la règle comptable, dès lors que cette adaptation est neutre sur le plan budgétaire.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter le présent article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.

Article additionnel après l'article 6

Suppression d'une dérogation aux ratios de division des risques des organismes de placement collectif en valeurs mobilières

Commentaire : le présent article additionnel a pour objet de supprimer la dérogation à la législation de la division des risques des OPCVM qui autorise ces derniers à détenir 25 % de leur actif en titres d'un même émetteur dès lors que celui-ci est le dépositaire ou le gérant de l'OPCVM.

La loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières et portant création des fonds communs de créances a prévu de soumettre les OPCVM à des obligations de division des risques. Cette disposition de prudence est destinée à protéger les investisseurs.

Ainsi, l'article 25 de la loi prévoit en particulier deux ratios de division :

- un OPCVM ne peut employer en titres d'un même émetteur plus de 5 % de ses actifs ;

- un OPCVM ne peut détenir plus de 10 % d'une même catégorie de valeurs mobilières d'un même émetteur.

Dans les deux cas, des dérogations peuvent être prévues, laissées à l'appréciation du pouvoir réglementaire par décret en Conseil d'État, S'agissant du premier ratio, ces dérogations sont justifiées par le fait que certains très gros émetteurs prennent nécessairement beaucoup de place dans les portefeuilles, sans pour autant présenter le moindre risque de signature.

C'est le cas en particulier de l'État, ou des grandes entreprises Publiques (EDF ou la SNCF par exemple).

Le décret n° 89-623 du 6 septembre 1989 a prévu ces cas. Le décret Prévoit ainsi notamment les dérogations suivantes :

- la possibilité d'employer en titres d'un même émetteur jusqu'à 10 %de l'article si la valeur de ces titres ne dépasse pas 40 % de l'actif ;

- la possibilité de relever ce ratio jusqu'à 35 % sur les émetteurs souverains ou garantis par de tels émetteurs (États membres de l'OCDE, Union européenne, etc.), dont éventuellement jusqu'à 30 % pour une seule émission à condition d'avoir au total souscrit à six émissions de cet émetteur ;

- pour les OPCVM investis dans d'autres OPCVM, la possibilité d'employer jusqu'à 10% de l'actif en actions ou parts d'un OPCVM unique, même si la valeur de ces titres dépasse 40 % de l'actif de cet OPCVM.

Ce décret a été modifié par un décret n° 91-605 du 27 juin 1991, qui a inséré des dispositions particulières en faveur des OPCVM "court terme monétaire", alors en plein essor et qui pouvaient avoir des difficultés à respecter les ratios.

Ce décret a ainsi prévu une nouvelle dérogation, au deuxième alinéa de son article 13-1, qui porte le ratio de titres d'un même émetteur à 25 % de l'actif de l'OPCVM, à condition que ces valeurs soient des titres de créances sur des établissements de crédit qui ont été notés par une agence de notation.

Cette disposition a été largement utilisée par les établissements de crédit dépositaires qui ont ainsi fait financer leur dette par les OPCVM dont ils assuraient la promotion, créant de ce fait un indiscutable conflit d'intérêt entre leurs clients investisseurs et eux-mêmes.

Cette disposition aurait pu ne pas avoir de conséquence concrète, si les affaires Tuffier (en 1991) et Pallas-Stern (en 1995) n'avaient démontré sa nocivité. Tuffier étant société de bourse n'aurait pu bénéficier de cette dérogation qui a été décidée après sa défaillance, mais celle-ci a montré qu'il était dangereux pour les épargnants que des OPCVM puissent investir en titres émis par leur promoteur. En aucun cas, ces épargnants n'étaient les créanciers directs de l'établissement. Ils n'auraient donc dû subir aucune conséquence.

La banque Pallas-Stern, établissement de crédit, avait fortement utilisé la dérogation prévue en 1991, et ce d'autant plus que ses difficultés financières rendait difficile son accès au crédit. L'utilisation des OPCVM pour y caser sa dette est donc tentante dans ce genre de situation. Ainsi, sur des SICAV ou FCP monétaires réputés sans risque en capital, des porteurs ont pu perdre jusqu'à 25 % de leur mise de fonds.

Il est impératif qu'il soit rapidement mis fin à cette situation, et c'est pourquoi votre commission vous propose l'interdiction de toute dérogation aux ratios de division des risques lorsque l'émetteur est l'un des promoteurs (gestionnaire ou dépositaire) de l'OPCVM, ou s'il entretient avec ce promoteur un lien de contrôle ascendant ou descendant.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter le présent article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.

Article 7

Effets financiers du franchissement de seuils en matière d'effectifs

Commentaire : le présent article a pour objet de proroger et d'unifier les dispositions destinées à atténuer les conséquences du franchissement du seuil de 10 salariés sur les participations et versements obligatoires des entreprises

I. LE DROIT ACTUEL

Les seuils de salariés prévus en droit fiscal et en droit du travail déterminent pour l'entreprise qui les franchit -même si elle reste de petite taille des obligations financières et sociales.

A. LES SEUILS DE SALARIÉS ET LEUR IMPORTANCE

1. Les effets de seuils

Actuellement, les deux seuils d'effectifs principaux sont celui de 10 salariés, qui déclenche plusieurs versements obligatoires, et celui de 50 salariés, qui impose à l'entreprise diverses obligations en matière de représentation du personnel.

Récapitulatif des seuils d'effet

Une étude réalisée en novembre 1994 pour le Sénat par le centre de recherches pour l'expansion de l'économie et le développement des entreprises concluait à l'existence d'un seuil significatif à 9-10 salariés : les plus petites entreprises pourraient parfois être dissuadées d'embaucher pour éviter d'être assujetties à divers prélèvements.

Actuellement, on estime à plusieurs milliers -sans pouvoir être plus Précis- le nombre d'entreprises qui franchissent le seuil de 10 salariés chaque année.

2. Le seuil de 10 salariés

Actuellement, le franchissement du seuil de 10 salariés implique trois obligations essentielles.

a) La participation au financement de la formation professionnelle continue

L'article 235 ter D du code général des impôts définit les obligations des employeurs occupant au minimum 10 salariés en matière de financement de la formation professionnelle continue : un pourcentage de 1,5 % des salaires payés pendant l'année en cours doit y être consacré.

L'article 235 ter K A définit les obligations des employeurs de moins de 10 salariés, qui doivent verser depuis le 1er janvier 1992 une cotisation de 0,15 % des salaires versés pendant l'année en cours.

b) La participation à l'effort de construction

L'article 313-1 du code de la construction et de l'habitation définit les obligations des employeurs de plus de 10 salariés en matière de lancement de la construction : ces employeurs doivent consacrer au moins 0,45 % du montant des salaires payés au cours de l'année écoulée au financement d'acquisition et d'aménagements de terrains destinés exclusivement à la construction de logements sociaux, de construction de logements, d'acquisition, d'aménagement ou de remise en état de logements anciens

c) Le versement transport

L'article L.2333-64 du code général des collectivités territoriales définit les obligations en matière de versement destiné au financement des transports en commun pour les employeurs de plus de neuf salariés situés en dehors de la région Île-de-France,

- dans une commune ou une communauté urbaine dont la population est supérieure à 20.000 habitants,

- ou dans le ressort d'un établissement public de coopération intercommunale compétent pour l'organisation des transports urbains, lorsque la population de l'ensemble des communes membres de l'établissement atteint le seuil indiqué.

Le taux de versement est fixé par délibération du conseil municipal ou de l'organe compétent de l'établissement public, à 0,55 %, 1 %, ou 1,75 % des salaires versés pendant l'année en cours selon l'importance de la population de la commune.

L'article L.2531-2 du code général des collectivités territoriales définit quant à lui les obligations en matière de financement des transports en commun des employeurs de plus de neuf salariés situés dans la région Île-de-France. Le taux de versement, exprimé en pourcentage des salaires versés pendant l'année en cours est fixé par décret dans les limites :

- de 2,5 % à Paris et dans le département des Hauts-de-Seine,

- de 1,6 % dans les départements de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne,

- de 1,3 % dans les départements de l'Essonne, des Yvelines, du Val-d'Oise et de la Seine-et-Marne.

3. Les effets du franchissement de seuil

Les effets du franchissement de seuil sur les obligations relatives à ces versements ont été aménagés à plusieurs reprises :

a). Les obligations de participation au financement de la formation professionnelle et de la construction

Les effets du franchissement de seuil sur les participations au financement de la formation professionnelle et de la construction ont fait l'objet de deux dispositifs successifs de lissage, institués par la loi de finances pour 1983 et par la première loi de finances rectificative pour 1986.

Actuellement :

L'article 235 ter E A du code général des impôts définit les effets du franchissement du seuil de 10 salariés sur la participation au financement de la formation professionnelle.

- les employeurs qui ont franchi le seuil avant le 1er janvier 1992 restent dispensés pendant 3 ans du paiement de la cotisation. Puis, le montant de la participation est réduit de 75 % la quatrième année, de 50 % la cinquième année, de 25 % la sixième année.

- les employeurs qui ont franchi le seuil après le 1er janvier 1992 sont soumis pendant trois ans à une cotisation minimale de 0,15 % des salaires puis à une cotisation de 1,5 % des salaires réduite de 75 % la quatrième année, de 50 % la cinquième année, de 25 % la sixième année.

L'article 313-1 du code de la construction et de l'habitation définit de la même manière les effets du franchissement du seuil de 10 salariés en matière de participation à l'effort de construction : les employeurs sont dispensés pendant trois ans du paiement de la cotisation relative à la participation, puis le montant de la participation est réduit de 75 % la quatrième année, de 50 % la cinquième année, de 25 % la sixième année.

b) Le versement transport

Le lissage du seuil de 10 salariés en ce qui concerne le versement transport reste régi par l'article 104 de la loi de finances pour 1983.

Le versement reste assis pendant cinq ans sur le montant des salaires versés pendant l'année écoulée, diminué d'un produit du salaire moyen versé par l'entreprise au cours de l'année. Ce produit est égal à neuf fois le salaire moyen la première année, sept fois la deuxième année, cinq fois la troisième année, trois fois la quatrième année, une fois la cinquième année.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

L'article 7 a pour objet de proroger les exonérations et d'unifier le dispositif de lissage en cas de franchissement du seuil de 10 salariés, dans le souci légitime d'encourager les embauches de salariés par les petites entreprises.

A. L'EXTENSION DU RÉGIME D'EXONÉRATION PROVISOIRE

1) L'article 7 étend le système du régime provisoire d'exonération totale de cotisation aux versements transport : les employeurs qui atteignent ou dépassent l'effectif de dix salariés seront ainsi dispensés pendant trois ans du paiement de ces versements.

2) L'article 7 étend également le système d'exonération dégressive aux versements transport : ceux-ci ne seront dus, à l'issue de la troisième année d'exonération, qu'avec une réduction de 75 %, de 50 %, de 25 %, respectivement chacune des trois années suivantes.

La perte de recettes en résultant devrait être de 40 millions de francs en 1997, 150 millions de francs en 1998.

B. LA PROROGATION DES EXONÉRATIONS TOTALES OU PARTIELLES

Par ailleurs, l'article 7 proroge, jusqu'au 31 décembre 1999 :

- la réduction de la participation à la formation professionnelle continue à 0,15 % des salaires, pour les employeurs de plus de 10 salariés assujettis à cette cotisation réduite en 1996,

- l'exonération de la participation à l'effort de construction, pour les employeurs qui en sont dispensés en 1996,

- l'exonération de trois ans des versements transport instituée par l'article 7, lorsque l'employeur est amené à en bénéficier dès 1996.

En ce qui concerne les participations à la formation et à la construction, et selon l'année du franchissement du seuil de 10 salariés (à partir de 1993), la portée de cette prorogation sera plus ou moins importante : maximale pour les entreprises ayant franchi le seuil de 10 salariés en 1993, de deux ans pour celles qui le franchiraient en 1996, d'an un pour celles qui le franchiraient en 1997. Pour les entreprises ayant déjà franchi le seuil de 10 salariés entre 1993 et 1995, l'intérêt de la mesure paraît donc être de les dissuader de revenir en deçà du seuil de 10 salariés.

Décision de la commission : par coordination avec la position prise à l'article 7 bis, pour ce qui concerne le versement transport, votre commission a réservé sa position sur le présent article.

Article 7 bis

Remboursement aux employeurs du versement transports

Commentaire : l'Assemblée nationale a adopté un amendement de M. Yves Fréville, portant article additionnel après l'article 7, dont l'objet est d'étendre le remboursement du versement transports aux employeurs qui effectuent, à titre onéreux, le transport collectif de tous ou de certains de leurs salariés résidant hors du périmètre des transports urbains.

I. LE RÉGIME DU VERSEMENT DESTINÉ AUX TRANSPORTS EN COMMUN

a) Les redevables et l'assiette

En dehors de la région d'Île-de-France (13 ( * )) , les personnes physiques ou morales, publiques ou privées, peuvent être assujetties à un versement destiné au financement des transports en commun, lorsqu'elles emploient plus de 9 salariés :

- dans une commune ou une communauté urbaine dont la population est supérieure à 20.000 habitants ;

- ou dans le ressort d'un district ou d'un syndicat de communes compétent dans le domaine de l'organisation du transport urbain, lorsque la population de l'ensemble des communes faisant partie de ces établissements publics atteint le seuil indiqué.

Sont exonérées du paiement du versement les fondations et les associations reconnues d'utilité publique, à but non lucratif, dont l'activité est de caractère social.

Jusqu'au 31 mars 1993, l'assiette du versement était constituée par les salaires versés aux salariés, dans la limite du plafond fixé par le régime général en matière de cotisations sociales.

Depuis le 1er avril 1993, l'assiette du versement transport est déplafonnée. En conséquence, elle est constituée par la totalité des salaires versés par les employeurs assujettis.

b) Le tarif

Le taux du versement est fixé ou modifié par délibération du conseil municipal ou de l'organe compétent de l'établissement public, dans la limite de 1 % des salaires.

Cette limite peut être portée à 1,75 % au maximum, si la commune ou l'établissement public a décidé de réaliser une infrastructure de transport collectif et obtenu une subvention de l'État pour l'investissement correspondant. Cette disposition est réservée aux collectivités dont la population et supérieure à 100.000 habitants.

Toutefois, pour les communes dont la population est comprise entre 20.000 et 100.000 habitants, et pour les établissements publics lorsque la population de l'ensemble des communes en faisant partie est comprise dans les mêmes limites, le taux des versement-transports ne peut dépasser 0,55 % des salaires.

c) Le recouvrement et le contentieux

Les employeurs sont tenus de procéder au versement auprès des organismes chargés du recouvrement des cotisations de Sécurité sociale. Ces organismes prélèvent sur les sommes recouvrées des frais de recouvrement dont le taux est fixé par un arrêté interministériel. La commune ou l'établissement public est crédité mensuellement du produit encaissé au titre des versement-transports par les organismes chargés du recouvrement, à l'exception de celui encaissé par les organismes de la mutualité sociale agricole pour lesquels le produit des versement-transports fait l'objet d'un reversement trimestriel.

Le contentieux relatif aux versement-transports obéit aux mêmes règles que le contentieux relatif aux cotisations des divers régimes de Sécurité sociale.

d) L'affectation du produit

Le versement est affecté au financement des dépenses d'investissement et de fonctionnement des transports publics urbains et des autres services de transports publics qui, sans être effectués entièrement à l'intérieur du périmètre des transports urbains, concourent à la desserte de l'agglomération dans le cadre d'un contrat passé avec l'autorité responsable de l'organisation des transports urbains.

Le produit de la taxe est versé au budget de la commune ou de l'établissement public qui rembourse toutefois les versements effectués :

- aux employeurs qui justifient avoir assuré le logement permanent sur le lieu de travail ou effectué intégralement et à titre gratuit le transport collectif de tous leurs salariés ou de certains d'entre eux au prorata des effectifs transportés ou logés par rapport à l'effectif total (1° de l'article L. 2333-70 du code général des collectivités territoriales) ;

- aux employeurs pour les salariés employés à l'intérieur des périmètres d'urbanisation des villes nouvelles ou de certaines zones industrielles ou commerciales prévues aux documents d'urbanisme, lorsque ces zones ou ces périmètres ont été désignés dans la délibération institutive (2° de l'article L. 2333-70 du code général des collectivités territoriales).

Le solde du produit du versement est ensuite réparti par la commune ou l'établissement public, conformément aux affectations décrites ci-dessus.

II. LES DISPOSITIONS VOTÉES EN PREMIÈRE LECTURE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'auteur du présent article additionnel a justifié son amendement en rappelant que les employeurs demandant une participation aux salariés dont ils assurent le transport ne peuvent prétendre au remboursement, même partiel, des versement-transports qu'ils acquittent auprès de la collectivité dans laquelle leur entreprise est localisée.

Le 1° bis inséré dans l'article L.2333-70 du code général des collectivités territoriales étend ainsi le remboursement du versement transports "aux employeurs qui justifient avoir effectué intégralement le transport collectif de tous ou de certains de leurs salariés résidant hors du périmètre des transports urbains, dans la limite de la dépense nette de transport correspondante ".

Votre commission des finances note, à titre liminaire, que s'agissant d'une mesure qui aura pour effet de priver de ressources certaines collectivités locales, un principe de prudence s'impose (14 ( * )) . Or, aucune étude d'impact n'a été effectuée pour mesurer les conséquences financières du présent article sur les budgets concernés.

Ensuite, l'application du dispositif adopté par nos collègues députés, aussi justifié soit-il sur le fond, est exposée à plusieurs difficultés :

1° Aucune date d'entrée en vigueur n'est prévue, ce qui laisse supposer que le nouveau régime pourrait s'appliquer dès cette année. Or, les collectivités concernées en sont, à l'heure où ce rapport paraît, à la phase d'adoption de leur budget et n'ont certainement pas intégré la perte de recettes correspondante à leurs prévisions.

2° La rédaction du nouveau 1° bis, par son caractère général, vise aussi bien le transport à titre gratuit que le transport à titre onéreux de salariés par l'employeur. Dès lors, le champ couvert par cet alinéa recouvre partiellement celui du 1° de l'article L. 2333-70 du code général des collectivités territoriales (qui ne mentionne que le transport à titre gratuit) tout en offrant un régime sensiblement différent en matière d'imputation du coût réel des frais de transport sur le montant du versement transport (lire le point 3° ci-dessous). L'existence de dispositions concurrentes et incompatibles ne relève assurément pas d'une bonne législation.

3° L'avantage donné aux employeurs transportant leurs salariés résidant hors du périmètre des transports urbains (PTU) alors que le transport des salariés résidant dans le PTU ne ferait, en tout état de cause, pas l'objet d'un remboursement au titre du versement transports, remet en cause, sans aucun motif d'intérêt général, le principe de l'égalité des citoyens devant les charges publiques.

4° Enfin, le régime proposé par le présent article repose sur le principe d'une imputation des frais de transport exposés par l'employeur, nets de la participation des salariés, sur le montant total du versement transports qu'il acquitte.

Dans le mécanisme inscrit au 1° de l'article L. 2333-70, le remboursement du versement transports par la collectivité qui a institué l'impôt s'effectue au prorata des salariés transportés gratuitement par l'entreprise (ou logés directement sur le lieu de travail).

Il paraît indispensable d'unifier ces deux modes d'imputation. Toutefois, si l'on devait opter pour la technique de la proratisation en fonction du nombre des salariés transportés dans l'effectif total, en vigueur aujourd'hui pour le seul transport à titre gratuit de salariés, l'équité commanderait de fixer un plafond pour la participation des salariés au financement du transport par l'employeur. Un taux de 25 %, comme celui préconisé par le Sénat, lors de la discussion de la loi n° 85-2 du 2 janvier 1985 dont est issu le 1° de l'article L. 2333-70, semble devoir constituer de ce point de vue un maximum.

Dans tous les cas de figures, des simulations doivent être effectuées afin de ne pas déstabiliser certains budgets locaux.

Décision de la commission : votre commission a décidé de suspendre sa décision sur cet article en attendant la production de simulations permettant de mesurer sa portée.

Article 8

Délais de réponse de l'administration fiscale

Commentaire : le présent article institue, à compter du 1er juillet prochain, un accord tacite de l'administration en cas de silence gardé pendant trois mois sur les demandes d'accès à certains régimes fiscaux présentées par les entreprises.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LES MODALITÉS DE L'ACCORD TACITE

1. La garantie accordée au redevable

Actuellement, l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales exclut la possibilité de rehaussement d'impositions antérieures vis-à-vis des redevables de bonne foi intéressant l'interprétation d'un texte fiscal, lorsqu'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement acceptée par l'administration.

L'article 8 étend cette garantie donnée au contribuable aux cas où l'administration n'a pas répondu dans un délai de trois mois à un redevable de bonne foi demandant à bénéficier de certains régimes fiscaux limitativement énumérés.

2. Les conditions imposées à la demande

L'article 8 prévoit deux types de conditions :

a) Des conditions de nature législative

Certaines sont énoncées dans la loi elle-même : ainsi la demande, ou la notification, doivent être :

- préalables à l'opération en cause.

Cette condition est celle qui s'applique actuellement à l'ensemble des agréments auxquels est subordonné l'octroi d'avantages fiscaux (article 1649 nonies du code général des impôts).

- effectuées à partir d'une présentation écrite précise et complète de la situation de fait.

Ainsi, l'article 8 exclut toute possibilité de régularisation a posteriori, ou bien de demande trop allusive, qui ne permettrait pas à l'administration de statuer en connaissance de cause.

b) Un cadre réglementaire

L'article 8 renvoie expressément à un décret en Conseil d'État les conditions d'application du nouveau dispositif d'approbation tacite, notamment : le contenu et le lieu de dépôt des demandes, et les modalités permettant à l'administration d'accuser leur réception.

B. LES RÉGIMES CONCERNÉS

L'article 8 étend le champ d'application de l'agrément à certains régimes qui n'y sont actuellement pas soumis, tout en simplifiant les modalités d'intervention de cet accord.

L'article 8 prévoit d'appliquer ce régime d'accord tacite à deux sortes de demandes exprimées par les entreprises : les demandes d'agrément et les notifications préalables.

1. Les demandes d'agrément préalable

L'accord tacite simplifié sera applicable aux demandes d'agrément préalable présentées en vue de bénéficier des régimes d'amortissement exceptionnel suivants :

- amortissement sur douze mois à compter de leur mise en service des matériels utilisés dans des opérations permettant des économies d'énergie (article 39 AB du code général des impôts).

- amortissement exceptionnel de 25 % du prix de revient à l'achèvement de la construction, et de la valeur résiduelle sur la durée normale utilisation, des immeubles à usage industriel et commercial construits par les entreprises pour les besoins de leur exploitation, lorsqu'elles ont une activité bancaire, financière, d'assurances, de gestion ou de location d'immeubles (article 39 quinquies D).

- amortissement exceptionnel sur douze mois des matériels permettant de réduire d'au moins 50 % le niveau acoustique d'installations existant au 31 décembre 1990 (article 39 quinquies DD).

Au cours des dernières années, on a recensé quelques dizaines de demandes d'agrément préalable pour ces régimes d'amortissement exceptionnel.

2. Les notifications

L'article 8 prévoit également d'instituer un accord tacite simplifié pour les opérations bénéficiant des régimes d'amortissement exceptionnel sans demande d'agrément. L'accord tacite sera réputé accordé en cas de silence gardé pendant 3 mois sur la notification préalable de l'opération. Ces régimes sont les suivants :

- amortissement exceptionnel sur douze mois à compter de leur mise en service des matériels destinés à économiser l'énergie qui figurent sur une liste établie par arrêté conjoint du ministre du budget et du ministre de l'industrie, acquis ou fabriqués entre le 1er janvier 1991 et le 31 décembre 1995 (article 39 AB) ;

- amortissement exceptionnel sur douze mois à compter de la date de leur première mise en circulation des véhicules automobiles terrestres à moteur acquis à l'état neuf qui fonctionnent exclusivement au moyen de l'énergie électrique (article 39 AC) ;

- amortissement exceptionnel de 50 % du prix de revient des investissements en immeubles réalisés en vue d'opérations de recherche scientifique ou technique, dès la première année de leur réalisation (article 39 quinquies A) ;

- amortissement exceptionnel de 25 % du prix de revient des immeubles à usage industriel ou commercial réalisés par les entreprises entre le 1er janvier 1995 et le 31 décembre 1999 pour les besoins de leur exploitation dans les zones de revitalisation rurale ou les zones de redynamisation urbaine (article 39 quinquies D) ;

- amortissement exceptionnel sur douze mois à compter de leur mise en service des matériels acquis ou fabriqués entre le 1er janvier 1992 et le 31 décembre 1995, qui figurent sur une liste établie par arrêté conjoint du ministre du budget et du ministre de l'environnement, destinés à réduire le niveau acoustique d'installations existant au 31 décembre 1990 (article 39 quinquies DA) ;

- amortissement exceptionnel des immeubles destinés à l'épuration des eaux industrielles, de 50 % du prix de revient dès achèvement des constructions (article 39 quinquies E) ;

- amortissement exceptionnel de 50 % du prix de revient des immeubles satisfaisant aux obligations de lutte contre les pollutions atmosphériques et les odeurs (article 39 quinquies F) ;

- majoration de la base de calcul de l'amortissement des immobilisations acquises ou créées au moyen de primes de développement régional, ou d'aménagement du territoire, d'orientation pour les entreprises de produits agricoles et alimentaires, d'installation et de développement artisanal, d'équipement dans les départements d'outre-mer accordées au cours des années 1979 à 1995 de la moitié du montant de la prime, pour la détermination du bénéfice imposable ;

- amortissement exceptionnel des constructions qui s'incorporent à des installations de production agricole destinées à satisfaire aux obligations relatives aux installations classées pour la protection de l'environnement ;

- régime d'exonération d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés des entreprises nouvelles (article 44 sexies).

Pour l'ensemble de ces régimes, l'approbation tacite représente une sécurité juridique plus grande que le système actuel, qui ne prévoit pas de formalité préalable et ne préserve pas d'une contestation ultérieure de l'administration.

La charge de travail qui en résultera pour l'administration est difficile estimer aujourd'hui : on peut simplement observer que 1.210 entreprises (relevant du régime réel) ont bénéficié des dispositifs d'amortissement exceptionnel en 1993.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 8

Aménagement du régime des donations-partages

Commentaire : sur proposition de M. Alain Lambert, rapporteur général, le commission a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 8, et ayant pour objet d'aménager le régime fiscal de la donation-partage sur deux points :

- d'une part, étendre le bénéfice de ce régime aux donations consenties par des parents à leur enfant unique ;

- d'autre part, majorer à titre temporaire le taux de la réduction de droits associé à ce régime.

Le contexte dans lequel se situent cette proposition, et les raisons qui la motivent a été développé dans l'exposé général, auquel il convient de se reporter. On rappellera donc simplement qu'il s'agit d'un élément du dispositif préconisé par votre commission afin de faciliter les transmissions d'entreprises, après avoir pris acte de l'extrême difficulté d'organiser un régime centré sur ce seul type d'actif.

Compte tenu de cet objectif, cette proposition reste limitée au cas des transmissions anticipées, qu'elle propose d'encourager en s'appuyant sur le régime fiscal de la donation-partage.


• Rétabli en 1986, ce régime figure à l'article 790 du code général des impôts.

Aux termes de ce texte, "les donations-partages effectuées conformément à l'article 1075 du code civil bénéficient sur les droits liquidés en application des dispositions des articles 777 et suivants, d'une réduction de 25 % lorsque le donateur est âgé de moins de 65 ans et de 15 % lorsque le donateur a 65 ans révolus et moins de 75 ans".

Selon les dispositions de l'article 1075 du code civil, la donation-partage est l'acte par lequel les pères et mères ou autres ascendants font donation à leurs enfants et descendants de leurs biens en opérant la distribution et le partage de ces biens.

Or, la notion de partage suppose l'existence de plusieurs enfants.

Dans l'optique du code civil, cette précision est essentielle, et traduit la nécessité de situer cette donation, lors de sa réalisation, dans le cadre des règles de dévolution successorale.


Mais, au regard du dispositif fiscal, cet enchaînement a une conséquence originale. Il interdit de faire bénéficier de la réduction de droit les transmissions pour lesquelles la notion de partage n'intervient pas, c'est-à-dire les donations effectuées par des parents à leur enfant unique.

En revanche, la réduction de droit est susceptible de s'appliquer à la donation consentie aux enfants d'un enfant unique prédécédé.

Dans une approche purement fiscale, cette situation n'est guère satisfaisante, et au cas d'espèce, complique singulièrement la transmission, en supprimant l'attrait d'une donation anticipée.

Si le bien transmis est une entreprise, la solution la plus adaptée au plan économique et fiscal ne peut être encouragée.

Pour supprimer cette anomalie, le présent article prévoit donc, en premier lieu, d'étendre le bénéfice de la réduction de droit au cas des donations à l'enfant unique.

Parallèlement, le présent article propose de porter, à titre temporaire, à 35 % et 25 % le taux de réduction de droits prévue dans le cadre du régime fiscal de la donation-partage.

Tous les intervenants entendus par votre commission sur la transmission d'entreprise rappellent que les difficultés constatées en ce domaine trouvent leur origine dans la réforme du barème opérée en 1984. A cette occasion, l'ancienne tranche de 20 % a en effet été complétée par trois nouvelles strates, assorties respectivement d'un taux de 30 %, 35 % et 40 %. Très concrètement, les droits dus à l'occasion des transmissions de certaine importance, et parmi lesquelles figurent les transmissions d'entreprise, ont été pratiquement doublés à cette occasion.

Il est certain que la réponse la plus adaptée serait de revenir sur une partie de cette réforme, en élargissant des tranches qui n'ont jamais été actualisées, ou en ramenant le taux maximum applicable en ligne directe aux alentours de 25 %.

Nécessaire et utile au plan économique, une telle démarche est toutefois délicate à mettre en oeuvre dans l'immédiat. Parallèlement, un régime dérogatoire centré sur l'entreprise suppose un corset de règles et de contraintes qui en limitent de façon excessive la portée réelle.

Face à ce constat, et convaincue de la nécessité d'agir, votre commission vous propose donc une approche prenant la forme d'une réduction plus substantielle des droits en cas de transmission anticipée. A cet effet, elle suggère de majorer de dix points le taux de réduction de droit associé au régime fiscal de la donation-partage.

Ainsi, l'abattement se trouerait ainsi porté à 35 % pour les donations consenties avant l'âge de 65 ans et à 25 % dans les cas où le donateur a un âge compris entre 65 et 75 ans.

Dans un premier temps, il est prévu que ce régime s'appliquerait aux donations consenties entre le 1er avril 1996 et le 30 mars 1998. Le caractère temporaire de cette mesure a pour but de créer un effet incitatif immédiat, mais pourra toujours être reconsidérée dans l'avenir.

De fait, ce dispositif constitue une réponse immédiate, et sans doute imparfaite, dans l'attente de la nécessaire réforme d'ensemble de notre régime fiscal des transmissions.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.

* 9 . Toutefois, ce régime ne s'applique pas lorsque la commune est classée comme station balnéaire, thermale, climatique, de tourisme ou de sports d'hiver, et dispose de plus de 2.500 lits touristiques.

* 10 L'option est ouverte aux sociétés en nom collectif, aux sociétés en commandite simple, aux sociétés en participation, et à la plupart des sociétés civiles autres que les SCP et les sociétés de moyens.

* 11 Voir rapport général sur la deuxième loi de finances rectificative n °132 (1995-1996) page 109

* 12 Cette disposition de l'avant-projet de décret parait s'appliquer à tous les FCPR, ce qui ne serait pas cohérent avec la réforme.

* 13 Le versement transports en région Île-de-France obéit à un régime spécifique défini aux articles L.2531-2 à L.2531_11 du code général des collectivités territoriales.

S'agissant de la description du versement transports, lire également le commentaire sous l'article 7.

* 14 Le versement transports représente un produit d'environ 17 milliards de francs dont cependant une dizaine de milliards en région Île-de-France, qui n'est pas ici concernée, et le reliquat en province .

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