N° 312

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 17 avril 1996.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur la proposition de résolution présentée en application de l'article 73 bis du Règlement par MM. Jacques GENTON, Denis BADRÉ, Jacques HABERT, Daniel MILLAUD, Yves GUÉNA, Claude ESTIER, James BORDAS et Jacques OUDIN, et la proposition de résolution présentée en application de l'article 73 bis du Règlement par M. Guy FISCHER, Mmes Michelle DEMESSINE, Jacqueline FRAYSSE-CAZALIS, M. Paul LORIDANT, Mmes Danielle BIDARD-REYDET, Marie-Claude BEAUDEAU, MM. Jean-Luc BÉCART, Claude BILLARD, Mme Nicole BORVO, M. Félix LEYZOUR, Mme Hélène LUC, MM. Louis MINETTI, Robert PAGÈS, Jack RALITE et Ivan RENAR sur la proposition de règlement du Conseil modifiant en faveur des travailleurs en chômage le règlement relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté et le règlement fixant les modalités d'application du règlement (E-582) et sur la proposition de règlement du Conseil modifiant en faveur des titulaires de prestations de préretraite le règlement relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté et le règlement fixant les modalités d'application du règlement (E-583),

Par M. Louis SOUVET,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean-Pierre Fourcade, président : Jacques Bimbenet, Mme Michelle Demessine, MM. Claude Huriet, Charles Metzinger, Bernard Seillier, Louis Souvet, vice-présidents : Jean Chérioux, Charles Descours, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Jacques Machet, secrétaires : José Balarello, Henri Belcour, Jacques Bialski, Paul Blanc, Mme Annick Bocandé, MM. Louis Boyer, Jean-Pierre Cantegrit, Francis Cavalier-Benezet, Gilbert Chabroux, Philippe Darniche, Georges Dessaigne, Mme Joëlle Dusseau, MM. Guy Fischer, Alfred Foy, Serge Franchis, Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis, MM. Alain Gournac, Roland Huguet, André Jourdain, Pierre Lagourgue, Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jean-Louis Lorrain, Simon Loueckhote, Jean Madelain, Michel Manet, René Marquès, Serge Mathieu, Georges Mazars, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, MM. Louis Philibert, André Pourny, Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Sénat : 258 et 307 (1995-1996).

Union européenne

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Le mercredi 17 avril 1996, sous la présidence de M. Jean-Pierre Fourcade, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Louis Souvet sur les propositions de résolution n° 258 (1995-1996), présentée, en application de l'article 73 bis du règlement, par M. Jacques Genton sur la proposition de règlement du Conseil modifiant en faveur des travailleurs en chômage le règlement relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté et le règlement fixant les modalités d'application du règlement (n° E-582), et sur la proposition de règlement du Conseil modifiant en faveur des titulaires de prestations de préretraite le règlement relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté et le règlement fixant les modalités d'application du règlement (n° E-583), et n°307 (1995-1996) présentée en application de l'article 73 bis du règlement, par M. Guy Fischer et plusieurs de ses collègues, sur la proposition de règlement du Conseil modifiant en faveur des travailleurs en chômage le règlement relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté et le règlement fixant les modalités d'application du règlement (n° E-582) et la proposition de règlement du Conseil modifiant en faveur des titulaires de prestations de préretraite le règlement relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté et le règlement fixant les modalités d'application du règlement (n° E-583).

M. Louis Souvet, rapporteur, a tout d'abord rappelé que la première proposition de résolution (n° 258) visait à inviter le Gouvernement fiançais à s'opposer à l'adoption de deux modifications de règlements européens, la première relative à l'application des régimes de sécurité sociale en faveur des travailleurs au chômage, la seconde relative aux titulaires de prestations de préretraite, lorsque ces personnes se déplacent à l'intérieur de la Communauté.

La seconde proposition de résolution (n° 307) porte sur les mêmes propositions d'actes européens et conclut de la même façon. Toutefois, cette proposition de résolution propose en outre des solutions alternatives en matière de transférabilité de prestations de chômage et vise à enrichir le droit européen de dispositions relatives au droit du travail et à la fiscalité.

Puis, le rapporteur a exposé le contenu des deux propositions de règlement n os E-582 et E-583, qui visent à modifier le règlement de 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté.

Il a rappelé qu'une première tentative de modification avait été faite en 1980, mais s'était heurtée à l'opposition de plusieurs Etats membres. C'est cependant ce texte qui était aujourd'hui repris, scindé en deux propositions de règlement.

La première concerne la transférabilité des prestations de chômage. Après avoir rappelé le droit actuel, M. Louis Souvet, rapporteur, a présenté le nouveau dispositif proposé par la Commission européenne, justifié par le changement de conditions économiques : prolongation du versement des allocations au-delà de trois mois, renforcement du contrôle, calcul des prestations et computation de la durée selon les modalités du régime d'assurance-chômage le moins favorable du pays d'origine ou du pays où le travailleur cherche un emploi.

Il a précisé que la proposition de règlement envisageait également de modifier le régime des travailleurs frontaliers en situation de chômage en leur permettant de s'inscrire comme demandeurs d'emploi, soit dans le pays de résidence, soit dans le pays de leur dernier emploi.

M. Louis Souvet, rapporteur, a alors fait part des graves réserves que lui inspirait cette proposition de règlement. Ses réticences concernaient l'efficacité du contrôle, la complexité du mécanisme mis en oeuvre pour déterminer le régime le moins favorable applicable, la question du remboursement de l'Etat qui a servi la prestation par celui qui en a la charge financière, les graves risques de contentieux susceptibles de naître entre les deux pays et enfin l'utilité de ce dispositif au regard du faible nombre de travailleurs concernés.

En conclusion, il a observé que ce nouveau dispositif lui semblait difficilement gérable, ce qui apparemment était également la position du ministère du travail. Il a donc conclu à la nécessité d'inviter le Gouvernement à rejeter ce texte.

M. Louis Souvet, rapporteur, a ensuite présenté la seconde proposition de règlement, qui vise à faciliter l'expatriation des anciens travailleurs bénéficiaires de prestations de préretraite.

Après avoir observé qu'aucun texte ne prévoyait actuellement la transférabilité de l'allocation de préretraite, il a indiqué que la proposition d'acte communautaire n° E-583 définissait la notion de prestation de préretraite, précisait la situation juridique de l'ancien salarié au regard des services de l'emploi, étendait le règlement aux prestations de nature conventionnelle et prévoyait l'application de clauses anti-cumul dans le nouvel Etat de résidence, le contrôle revenant à ce dernier.

Le rapporteur a alors observé que la France permettait déjà le transfert des allocations spéciales du fonds national de l'emploi, mais a souligné que les préretraites ne relevaient pas de la protection sociale, secteur dans lequel la Commission européenne pouvait intervenir, mais de la politique de l'emploi qui reste de la compétence des Etats membres.

Il a en outre rappelé que les préretraites ne constituaient pas un droit mais qu'elles étaient de nature conventionnelle et ne pouvaient intervenir que dans des situations précises définies par le code du travail.

Il s'est en conséquence interrogé sur le risque de voir le régime juridique des préretraites dénaturé par le droit européen, ce qui pourrait entraîner des effets pervers dont on ne saurait pour l'instant prendre la mesure. C'est pourquoi il a proposé, comme le faisait la délégation du Sénat pour l'Union européenne, d'inviter le Gouvernement à s'opposer à ce texte.

Le rapporteur a ajouté que des arguments d'ordre technique concernant les travailleurs frontaliers incitaient également à s'y opposer : la proposition de règlement faisait en effet un amalgame entre protection sociale et prestation de préretraite, instaurant de ce fait un mécanisme de compensation entre allocation de préretraite et allocation de chômage dont la mise en oeuvre ne pourrait être que complexe. En tout état de cause, ce règlement s'appliquerait au détriment de la France, qui est l'un des rares pays où le système de préretraite est très développé.

En conclusion, M. Louis Souvet, rapporteur, a invité à adopter une proposition de résolution reprenant en grande partie la rédaction de la proposition de résolution de M. Jacques Genton. La seule modification introduite par le rapporteur concernait l'appréciation de la proposition de règlement n° E-582 (transférabilité des prestations de chômage) au regard du principe de subsidiarité.

M. Jean-Pierre Fourcade, président, a rappelé la procédure concernant l'examen par le Sénat d'actes communautaires et la commission a fixé au mardi 14 mai 1996 à 17 heures le délai-limite pour le dépôt des amendements.

M. Guy Fischer a présenté plus en détail sa proposition de résolution n° 327, notamment en ce qu'elle touche au domaine fiscal et à la contribution sociale généralisée (CSG), et l'a justifiée par le fait que l'intervention des instances européennes avait un effet négatif sur la protection sociale. Il a précisé que son groupe serait conduit à déposer des amendements à la proposition de résolution de la commission.

M. Charles Metzinger a approuvé les conclusions du rapporteur. Il a indiqué à la commission qu'il avait été chargé par la délégation du Sénat pour l'Union européenne d'un rapport sur l'assujettissement des travailleurs frontaliers à la CSG, afin d'éclairer le différend qui oppose cette catégorie de travailleurs au Gouvernement. Il a rappelé que la question était pendante devant la Cour de justice des Communautés européennes et qu'il ne rendrait pas son rapport avant de connaître la position de cette dernière. Il a souhaité attirer l'attention de la commission sur la nécessité de se montrer attentif à toutes les propositions d'actes communautaires touchant au domaine social, citant à ce propos le projet de directive concernant les biotechnologies.

M. Jean-Pierre Fourcade, président, a rappelé que la révision constitutionnelle avait précisément cet objet et a indiqué que la CSG était une contribution fiscale introduite dans le code de la sécurité sociale. M. Louis Souvet, rapporteur, s'est déclaré très intéressé par le rapport de M. Charles Metzinger sur la CSG et les travailleurs frontaliers, souhaitant que son étude porte aussi sur les frontaliers travaillant en Suisse.

Mme Michelle Demessine a observé que la proposition de résolution déposée par son groupe visait notamment à inciter la Commission européenne à négocier avec la Suisse sur toutes ces questions, car celles-ci donnaient lieu, notamment en matière de recrutement, à un abondant contentieux.

M. Jean-Pierre Fourcade, président, a souhaité que la proposition de résolution de la commission ne déborde pas le cadre strict qu'avait délimité la délégation du Sénat pour l'Union européenne. En revanche, les difficultés des frontaliers et leurs régimes fiscaux et sociaux pourraient faire l'objet d'une question orale en vue d'un débat au Sénat.

M. Marcel Lesbros, citant l'exemple de l'Italie, a souligné à son tour la complexité des problèmes se posant aux frontaliers, notamment en matière de protection sociale.

Puis, la commission a adopté la proposition de résolution dans le texte retenu par son rapporteur. Les éventuels amendements seront examinés, avant adoption définitive, le mercredi 15 mai prochain.

Mesdames, Messieurs,

Votre commission des Affaires sociales a été saisie, le 6 mars 1996, en application de l'article 73 bis du règlement, d'une proposition de résolution n° 258 (1995-1996) présentée par le Président de la Délégation pour l'Union européenne sur deux propositions de règlement qui devraient être soumises à l'approbation du Conseil des ministres de l'Union européenne.

La première de ces propositions de règlement (E-582) modifie en faveur des travailleurs en chômage le règlement relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté et le règlement fixant les modalités d'application du précédent règlement.

La seconde (E-583) modifie en faveur des titulaires de prestations de préretraite le règlement relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté et le règlement fixant les modalités d'application du précédent règlement.

Puis, le 11 avril 1996, votre commission a été saisie d'une nouvelle proposition de résolution (n° 307, 1995-1996) portant sur les mêmes propositions de règlement, déposée par M. Guy Fischer et plusieurs de ses collègues.

Ces deux propositions de résolution, qui feront l'objet d'un examen conjoint, concluent de façon identique en invitant le Gouvernement français à s'opposer à l'adoption des deux propositions d'actes européens.

Toutefois, la proposition de résolution de M. Guy Fischer embrasse un champ plus vaste, puisqu'elle propose des solutions alternatives pour ce qui concerne les prestations de chômage et qu'elle vise à enrichir le droit européen de dispositions concernant l'assujettissement des travailleurs frontaliers à la contribution sociale généralisée (CSG), les droits des salariés au travail et l'égalité devant l'impôt.

Votre commission n'a cependant pas cru opportun d'inciter le Gouvernement à engager au niveau européen une politique aussi ambitieuse de réécriture du droit du travail, du droit de la protection sociale et de la fiscalité. Il n'est d'ailleurs pas sûr que les textes constitutionnels et réglementaires lui en donnent la possibilité, mais surtout, dans une telle hypothèse, les travaux parlementaires devraient comporter suffisamment d'indications pour guider le Gouvernement : or, manifestement, une réflexion de cette ampleur déborde largement le cadre du présent examen.

C'est pourquoi la proposition de résolution que vous proposera votre commission ne reprend pas cet aspect de la proposition de résolution des membres du groupe communiste républicain et citoyen et se contente de déterminer une position sur les deux propositions d'actes européens soumis au Sénat par le Gouvernement. Celle-ci consistera, comme le font les deux propositions de résolution, à inviter le Gouvernement à s'opposer à l'adoption de ces textes.

Les deux propositions de règlement du Conseil (E-582 et E-583) visent à modifier le règlement (n° 1408/71) datant de 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté ainsi qu'un second règlement (n° 574/72), datant de 1972, pris pour l'application du premier. Ces règlements visent à faciliter la circulation des travailleurs dans l'Europe communautaire en leur évitant de perdre leurs droits acquis à l'occasion de leur déplacement. Il organise donc une certaine transférabilité des droits relevant de la protection sociale. Touchant à des principes fondamentaux du droit du travail et de la sécurité sociale, ces règlements appellent des dispositions de nature législative, justifiant que leur modification soit soumise au Parlement.

Une première tentative de modification avait été faite en juin 1980, mais s'était heurtée à l'opposition de plusieurs Etats membres, notamment du nord de l'Europe. Cette matière requérant l'unanimité, le texte avait été laissé de côté. Il est aujourd'hui formellement retiré. C'est cependant ce même texte que reprennent les deux propositions de règlement : mais considérant que l'échec de 1980 tenait au fait que la proposition de 1980 liait prestations de chômage et prestations de préretraite, la Commission européenne l'a scindé en deux.

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