TITRE IV BIS - SANCTIONS PÉNALES

Pour les dispositions de ce titre, inséré en première lecture au Sénat, votre commission des Finances s'en remet à l'appréciation de votre commission des Lois, saisie pour avis.

TITRE V - DISPOSITIONS DIVERSES

CHAPITRE PREMIER - DISPOSITIONS RELATIVES À LA COMMISSION DES OPÉRATIONS DE BOURSE

Article 52 - Modification de l'ordonnance de 1967 relative à la Commission des opérations de bourse

Commentaire : le présent article propose de mettre en oeuvre une réforme substantielle du statut de la Commission des opérations de bourse afin d'accroître son indépendance, de renforcer son assise institutionnelle et de mieux assurer la transparence et la collégialité de ses décisions.

I. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a tout d'abord souhaité revenir sur la redéfinition des missions de la COB effectuée par le Sénat à l'article premier de l'ordonnance du 28 septembre 1967, afin d'éviter les risques de chevauchement de compétence. À l'initiative de sa commission des Finances, l'Assemblée a en effet considérer que le fait d'énoncer que la COB n'était chargée d'exercer une surveillance générale du bon fonctionnement des marchés d'instruments financiers porterait atteinte à son " positionnement " par rapport aux autorités étrangères homologues et aurait : " des conséquences judiciaires difficiles à évaluer " .

S'agissant de la composition de la COB, l'Assemblée nationale a souhaité que les membres du collège nommés directement par les Présidents des assemblées et le Président du Conseil économique et social puissent être choisis non seulement en fonction de leur compétence financière mais aussi juridique.

L'Assemblée nationale a adopté une modification rédactionnelle consistant à préciser que le représentant de l'économie et des finances est entendu par la commission, " sauf en matière de décisions individuelles " .

L'Assemblée nationale n'a pas souhaité l'homologation du règlement intérieur. En outre, elle a exclu du champ d'intervention de ce règlement, les règles relatives à l'organisation des services et les conditions de fonctionnement de la COB.

Au paragraphe III bis, elle a adopté une disposition de coordination avec l'article 17 ter relatif au marché hors cote.

Elle a également souhaité que le document destiné à l'information du public en cas d'admission d'une société sur un marché réglementé soit disponible également auprès de l'entreprise de marché.

Enfin, elle a précisé le fait que le délit d'initié ne vise que les émetteurs de titres de sociétés cotées, quel que soit le lieu où ces titres sont négociés, mais ne s'étend pas aux titres de sociétés non cotées.

II. LA POSITION DE LA COMMISSION

Votre commission des Finances vous demande d'accepter l'ensemble des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, à l'exception toutefois de celle portant sur l'article premier de l'ordonnance de 1967, pour laquelle elle vous demande de rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture. S'agissant de l'article 10-1 relatif au délit d'initié, elle s'en remet à l'avis de votre commission des Lois,.

La redéfinition de la mission de la COB appelle en effet plusieurs précisions.

Il convient tout d'abord de rappeler que la mission originelle de la COB, qui s'est élargie progressivement avec l'évolution des marchés financiers, était bien axée sur le contrôle de l'information financière.

En effet, bien qu'il soit difficile de se référer à " l'intention du législateur " s'agissant d'une autorité instituée par voie d'ordonnance, l'exposé des motifs (reproduit ci-après dans son intégralité) ne laisse guère de doute sur les motivations qui ont présidé à la mise en place de la COB puisque on peut y lire que :

Exposé des motifs de l'ordonnance du 28 septembre 1967 recueil des lois de l'Assemblée nationale 1966-1967 Tome II Annexe, p. 180

"Pour inciter l'épargne à long terme, notamment celle de nouvelles catégories d'épargnants, à s'investir davantage en valeurs mobilières, il convient d'assurer la clarté et la sincérité des informations diffusées par les sociétés auprès du public, en particulier sur leur situation, leurs résultats et l'évolution de leurs affaires, ainsi que d'organiser la publicité de certaines opérations de bourse.

"Il s'agit aussi de permettre au marché financier et à la Bourse de Paris de jouer le rôle international élargi qui peut et doit être le leur dans le cadre de relations financières appelées à se développer entre la France et les pays étrangers.

"Pour assurer le développement et surtout la garantie de l'information donnée aux porteurs de valeurs mobilières, il est institué une commission des opérations de bourse à l'image de ce qui existe dans certains pays étrangers. Pour remplir sa mission, la commission qui sera composée pour moitié de personnalités n'appartenant pas à des professions financières et dont le président exercera son activité à temps plein, aura le pouvoir de faire les vérifications nécessaires et d'obtenir communication des documents qu'elle jugera utile. Elle rassemblera chaque année ses observations dans un rapport au Président de la République.

"Afin d'améliorer l'information du public sur les sociétés qui font appel à son épargne, plusieurs dispositions nouvelles sont prévues :

"Les sociétés devront, avant toute émission ou introduction en bourse, établir un document qui sera soumis au visa de la commission des opérations de bourse et mis à la disposition du public ;

"Les personnes qui ont un accès privilégié à des informations sur la vie d'une société et des sociétés avec lesquelles elle a des relations de filiation devront déclarer à la commission les opérations de bourse qu'elles auront effectues sur les actions desdites sociétés et la commission pourra rendre publique ces transactions.

"La commission sera, par ailleurs, chargée par décret des tâches incombant jusqu'ici au comité des bourses de valeurs."

" Pour assurer le développement et surtout la garantie de l'information donnée aux porteurs de valeurs mobilières, il est institué une commission des opérations de bourse à l'image de ce qui existe dans certains pays étrangers. "

On notera également que, dans cet exposé des motifs, il n'est nulle part fait référence à la mission d'assurer le bon fonctionnement des marchés qui pourtant figure dès 1967, dans l'article premier de l'ordonnance. Celui-ci dispose en effet que :

" Il est institué une commission des opérations de bourse qui est chargée de contrôler l'information des porteurs de valeurs et du public sur les sociétés qui font publiquement appel à l'épargne et sur les valeurs émises par ces sociétés, ainsi que de veiller au bon fonctionnement des bourses de valeurs. "

On peut en déduire :

- d'une part que la Commission a été créée en même temps que le principe de l'information équitable et véritable des porteurs de valeurs mobilières : le principe et l'autorité chargée de le faire respecter ont donc été confondus ;

- d'autre part, que dès l'origine, la Commission n'a compétence pour veiller au bon fonctionnement des marchés de valeurs mobilières que dans l'optique d'assurer une information équitable des investisseurs. En effet, on peut supposer que si les rédacteurs du projet avaient souhaité véritablement assurer à la nouvelle autorité, une fonction autonome de surveillance des marchés, distincte de sa mission plus générale de contrôle de l'information, ils auraient pris le soin de le préciser dans l'exposé des motifs. La référence aux "bourses de valeur" doit se comprendre par la nécessité d'assurer une limite matérielle à sa mission.

Le développement des marchés financiers et de l'épargne investie en valeurs mobilières à conduit progressivement à élargir les attributions de la COB à des produits financiers tels les parts de sociétés civiles de placement immobilier ou les "biens divers" tels que les parts ou actions de conteneurs, de wagons, de navire... (1985) ou à des métiers spécifiques comme ceux des sociétés de gestion d'OPCVM (1988).

C'est la loi du 11 juillet 1985, confirmée en ce sens par la loi du 22 janvier 1988, qui a élargi la mission confiée à la COB à l'ensemble de la protection de l'épargne, dès lors que celle-ci est investie en valeurs mobilières. La nouvelle rédaction de l'article premier (toujours en vigueur) prévoit en effet que :

" Il est institué une Commission des opérations de bourse chargée de veiller à la protection de l'épargne investie en valeurs mobilières ou tous autres placements donnant lieu à appel public à l'épargne, à l'information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés de valeurs mobilières, de produits financiers cotés ou de contrats à terme négociables".

Compte tenu de cette extension, le législateur de l'époque a ressenti le besoin de limiter, matériellement, la compétence de la COB, puisqu'il a prévu, dans ce même article premier de l'ordonnance de 1967 que :

"Ne sont pas soumis au contrôle de la commission les marchés d'instruments créés en représentation des opérations de banque ou de bons ou billets à court terme négociables visés par l'article premier et le 4° de l'article 12 de la loi n° 84- 46 du 24 janvier 1984 et les marchés placés sous la surveillance de la Banque de France, en application de la loi n°73-7 du 3 janvier 1973."

Par ailleurs, la loi du 2 août 1989 relative à la "transparence et à la sécurité des marchés financiers" a profondément modifié l'organisation, les attributions et la structure de la COB.

Au terme de cette évolution, la COB dispose donc de deux sortes d'attributions :

- une compétence horizontale élargie à l'ensemble de la protection de l'épargne publique, ou plus précisément celle à laquelle il est fait publiquement appel ;

- des compétences verticales par types de produits ou par types de métiers (gestion pour compte de tiers).

Elle dispose pour accomplir ces missions d'importants pouvoirs de réglementation, de contrôle et de répression. Elle a également le monopole de la coopération internationale en matière financière.

Pour autant, elle ne détient pas de monopole dans son domaine d'activité : les marchés financiers. En effet, le Conseil des bourses de valeurs et le Conseil du marché à terme, organismes professionnels, préparent la réglementation générale des marchés organisés placés sous leur contrôle et agréent les personnes morales et physiques habilitées à y opérer. Ils disposent d'un pouvoir disciplinaire à l'égard des membres de ces marchés. Par ailleurs, les activités financières relèvent également, lorsqu'elles sont exercées par des établissements de crédit, du contrôle prudentiel et déontologique de la Commission bancaire. Enfin, la loi du 2 août 1989 a créé un Conseil de discipline des OPCVM chargé de sanctionner, sur le plan disciplinaire, les infractions à la réglementation et à la législation relative à ces produits.

Dans ce contexte, le présent projet de loi contient une double innovation : l'émergence d'une autorité professionnelle forte - le CMF -

dotée de pouvoirs importants en matière de réglementation et de contrôle et le renforcement de l'indépendance de l'autorité publique chargée de veiller à la protection de l'épargne investie dans des placements donnant lieu à appel public

Cette double évolution pose le problème de l'articulation des compétences entre l'autorité publique et l'autorité professionnelle qui bien qu'étant de nature différente et ne disposant pas des mêmes pouvoirs et, en dépit de la prééminence accordée à la COB (elle donne son avis lors de l'homologation des règlements du CMF), se trouvent ainsi placés sur un même plan.

En effet, le texte adopté par l'Assemblée nationale peut laisser perplexe, puisque

- d'un côté la COB, serait chargée de " veiller au bon fonctionnement des marchés d'instruments financiers " (article 52 adopté par l'Assemblée nationale) ;

- de l'autre le CMF serait en charge, d'une part, de déterminer, dans son règlement général, " les principes généraux que doivent respecter les marchés réglementés, ainsi que les règles relatives à l'exécution, au compte rendu et à la publicité des transactions sur instruments financiers admis sur ces marchés " (article 17) et, d'autre part, de " veiller au respect par les prestataires de services d'investissement exerçant leur activité en France, les entreprises de marché et les chambres de compensation des règles de bonne conduite qui leur sont applicables en vertu des lois et règlements en vigueur " et de " veiller également à la régularité des opérations effectuées sur un marché réglementé " (article 40)

La juxtaposition de ces dispositions conduit immanquablement à un recouvrement des compétences entre la COB et le CMF.

On rappelle que pour éviter cette situation, la commission des Finances avait proposé, dans une proposition de loi du printemps 1995, de hiérarchiser les deux autorités. Le Gouvernement n'a pas souhaité retenir cette solution. La commission des Finances du Sénat a accepté ce choix.

Afin de viabiliser l'horizontalité du contrôle, la commission des Finances avait proposé initialement d'assurer la présence, sans voix délibérative, d'un représentant de la COB au sein du CMF, qui aurait permis une meilleure communication entre les deux autorités Le Gouvernement ne l'a pas souhaité et a demandé au rapporteur de la commission des Finances de rectifier son amendement en conséquence, ce qui a été accepté

La commission des Finances du Sénat a proposé également de clarifier cette articulation en précisant que la mission confiée à la COB ne s'exerce qu'au titre, c'est à dire dans la perspective, de sa mission plus générale de protection de l'épargne publique. Cette modification a été adoptée par le Sénat en première lecture.

Nous aurions ainsi dans cette hypothèse une autorité publique chargée de la protection des investisseurs et une autorité professionnelle chargée du contrôle des intermédiaires.

Il est important de souligner que cette clarification n'enlèverait rien aux pouvoirs actuels de la COB, mais aboutirait à ce que celle-ci concentre son activité sur la protection des investisseurs et, plus particulièrement, sur la qualité des informations données par les émetteurs.

En revanche, l'absence de clarification risquerait de déboucher à brève échéance sur une "guerre des polices".

En effet, que peuvent signifier les mots : " veiller au bon fonctionnement des marchés d'instruments financiers " isolés de leur contexte de protection de l'épargne ?

S'agit-il d'assurer le contrôle de la régularité des opérations ? Ce ne peut être le cas, puisque, en vertu de la directive, ce contrôle n'existe pas sur les marchés de gré à gré et qu'il est confié au CMF sur les marchés réglementés.

S'agit-il d'assurer le contrôle des intermédiaires ? Là non plus, ce ne saurait être le cas, puisque ce contrôle est confié pour les règles prudentielles à la Commission bancaire et pour les règles de bonne conduite au CMF

Il ne peut donc s'agir que de veiller, d'une façon générale, à la protection de l'épargne investie sur ces marchés et, plus particulièrement, à l'information des investisseurs

La clarification proposée, qui ne retire à la COB aucune de ses attributions présentes, organise une meilleure articulation du rôle respectif de chaque autorité pour l'avenir.

On ajoutera que faire le procès à la commission des Finances du Sénat de vouloir " écorner " les compétences de la COB est particulièrement injuste alors que celle-ci a :

- adopté une proposition de loi tendant à faire de cette institution l'autorité faîtière des marchés financiers ;

- institué à son profit, dans le texte actuellement en cours de discussion, un bloc de compétences considérable sur l'ensemble des métiers de la gestion ;

- souhaité la participation pleine et entière de son président aux travaux du Comité de la réglementation bancaire et financière ;

- et concernant précisément l'article premier, étendu sa mission à tous les marchés (et pas seulement ceux de valeurs mobilières) et levé les restrictions concernant les marchés placés sous la surveillance de la Banque de France.

Décision de la commission : votre commission vous demande de modifier cet article afin de rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture pour l'article premier de l'ordonnance de 1967.

Page mise à jour le

Partager cette page