N° 412

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 5 juin 1996.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur :

1°) la proposition de loi organique de MM. Charles de CUTTOLI, Jacques HABERT, Pierre CROZE, Paul d'ORNANO, Jean-Pierre CANTEGRIT, Xavier de VILLEPIN, Mme Paulette BRISEPIERRE, MM. Hubert DURAND-CHASTEL et André MAMAN tendant à compléter la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le vote des Français établis hors de France pour l' élection du président de la République.

2°) la proposition de loi organique de MM. Charles de CUTTOLI, Jacques HABERT, Pierre CROZE, Paul d'ORNANO, Jean-Pierre CANTEGRIT, Xavier de VILLEPIN, Mme Paulette BRISEPIERRE, MM. Hubert DURAND-CHASTEL et André MAMAN tendant à modifier et compléter la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le vote des Français établis hors de France pour l 'élection du président de la République,

3°) la proposition de loi organique de Mme Monique ben GUIGA, MM Guy PENNE et Pierre BIARNÈS tendant à modifier la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le vote des Français établis hors de France pour l 'élection du président de la République,

4°) la proposition de loi organique de Mme Monique ben GUIGA, MM. Guy PENNE et Pierre BIARNÈS tendant à compléter la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le vote des Français établis hors de France pour l 'élection du président de la République,

Par M. Charles de CUTTOLI,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, François Giacobbi, Charles Jolibois, Robert Pagès, vice-présidents ; Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson, secrétaires ; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, Pierre Biarnès, François Blaizot, André Bohl, Christian Bonnet, Mme Nicole Borvo, MM. Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Michel Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod. Daniel Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel Millaud, Georges Othily, Jean-Claude Peyronnet, Claude Pradille, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre Schosteck. Alex Türk, Maurice Ulrich.

Voir les numéros :

Sénat : 270, 271 (1994-1995), 397 et 398 (1995-1996)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le 5 juin 1996 sous la présidence de M. Jacques Larché, président, la commission des Lois a examiné, sur le rapport de M. Charles de Cuttoli, rapporteur, deux propositions de loi organique (n° 270 et 271) présentées le 15 mai 1995 par MM. Charles de Cuttoli, Jacques Habert, Pierre Croze, Paul d'Ornano, Jean-Pierre Cantegrit, Xavier de Villepin, Mme Paulette Brisepierre et MM. Hubert Durand-Chastel et André Maman.

Elle a également décidé d'examiner conjointement deux propositions de loi organique identiques (n° 398 et 397) déposées la veille par Mme Monique Ben-Guiga et MM. Guy Penne et Pierre Biarnès.


• Les propositions de loi organique n° 270 et 398 ont pour objet d'autoriser la création de bureaux de vote à l'étranger dans certaines villes dotées d'une agence consulaire, pour compenser la disparition des centres de vote consécutives à la fermeture de 51 postes consulaires depuis une vingtaine d'années.

Le rapporteur a rappelé que le texte de ces deux propositions de loi organique reprenait avec quelques modifications un amendement adopté par le Sénat et l'Assemblée nationale en 1994 mais qui avait été déclaré contraire à la Constitution en raison d'un renvoi à un « décret d'adaptation » , formule que le Conseil constitutionnel avait jugée inappropriée en matière organique.


• Les propositions de loi organique n° 271 et 397 ont quant à elles pour objet de combler deux lacunes dans les règles relatives aux listes électorales des centres de vote à l'étranger.

Sous réserve d'un amendement de précision, la commission des Lois a approuvé ces quatre propositions de loi organique.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Ainsi que le prévoit l'article 24, alinéa 3, de la Constitution, « les Français établis hors de France sont représentés au Sénat ». Le Sénat se doit donc d'accorder une attention toute particulière aux dispositions législatives intéressant nos compatriotes expatriés, notamment celles qui leur permettent d'exercer leurs droits civiques.

Au cas présent, votre commission des Lois avait tenu à examiner avant la fin de la présente session les deux propositions de loi organique (n° 270 et 271) présentées le 15 mai 1995 par MM. Charles de Cuttoli, Jacques Habert, Pierre Croze, Paul d'Ornano, Jean-Pierre Cantegrit, Xavier de Villepin, Mme Paulette Brisepierre et MM. Hubert Durand-Chastel et André Maman.

A la suite d'une observation de M. Pierre Biarnès, informant la commission qu'il avait lui-même déposé la veille, avec Mme Monique Ben-Guiga et M. Guy Penne, deux propositions de loi organique identiques (n° 398 et 397), votre commission des Lois, lors de sa réunion du 5 juin 1996. a décidé d'examiner conjointement ces deux textes.

Le fait que ces quatre propositions de loi organique réunissent les signatures de la totalité des sénateurs représentant les Français établis hors de France témoigne à lui seul de l'importance de ces textes pour les Français de l'étranger.

Ces propositions de loi organique tendent à modifier et à compléter la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République.

Certes, la date de la prochaine élection présidentielle n'impose à cet égard aucune précipitation.

Mais la loi organique du 31 janvier 1976 régit aussi la participation des Français de l'étranger aux élections européennes, qui doivent avoir lieu dans trois ans.

Par ailleurs, elle « est applicable au cas de référendum » (article 20). Les modifications proposées peuvent donc trouver à s'appliquer plus rapidement, du fait de l'élargissement du champ du référendum par la révision constitutionnelle du 4 août 1995.

Ces propositions de loi organique méritent donc un examen rapide car il serait regrettable que certains Français de l'étranger soient écartés des consultations susceptibles d'être organisées dans les quelques mois ou années à venir.

I. LES PROPOSITIONS DE LOI ORGANIQUE N° 270 ET 398 TENDENT À TIRER EN MATIÈRE ÉLECTORALE LES CONSÉQUENCES DE REMANIEMENTS INTERVENUS DANS LA CARTE CONSULAIRE DEPUIS UNE VINGTAINE D'ANNÉES

On sait que les Français de l'étranger peuvent participer à certaines consultations électorales en votant dans leur « centre de vote à l'étranger » , ces centres étant établis dans les ambassades et les consulats français désignés par décret. Or, depuis une vingtaine d'années, 51 postes consulaires ont été supprimés et, par voie de conséquence, les centres de vote qui y étaient implantés.

Les électeurs inscrits dans ces centres de vote ont, certes, été rattachés à de nouveaux centres mais dans de nombreux cas, ces centres sont beaucoup plus éloignés de leur domicile, parfois à des centaines, voire à des milliers de kilomètres. En pratique, cette distance met un sérieux obstacle à l'exercice personnel du droit de vote, en particulier dans les pays où les déplacements sont difficiles, onéreux et parfois dangereux.


• Pour remédier à cette situation, le Conseil supérieur des Français de l'étranger (CFSE) a émis le voeu que des bureaux de vote puissent être créés dans des lieux moins éloignés. Le ministre des Affaires étrangères avait accepté cette proposition à la triple condition :

- que ces bureaux de vote soient créés (par décret) dans des villes dotées d'une agence consulaire ;

- que cette création n'intervienne que dans les pays où les circonstances locales et le nombre des Français le justifient ;

- que cette création reçoive l'accord de l'État concerné.

Telles étaient les raisons qui ont conduit en 1994 les auteurs de la proposition de loi organique n° 270 à présenter, lors de la discussion de la loi organique n° 95-62 du 19 janvier 1995, un amendement qui fut adopté par le Sénat puis, finalement, par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, avec l'approbation du Gouvernement. Cet amendement comportait six mesures :

- il autorisait la création avec l'accord de l'État concerné des nouveaux bureaux de vote dans les localités où une agence consulaire est établie. Cette création aurait été facultative, et les bureaux de vote auraient été créés par décret lorsque les circonstances locales et le nombre des électeurs l'exigeront ;

- il prévoyait qu'à chaque bureau de vote serait affecté un périmètre géographique ;

- il disposait qu'une liste électorale spéciale pour chaque bureau de vote devait être dressée dans les mêmes conditions et par les mêmes commissions que pour les listes de centre de vote ;

- il spécifiait que le fonctionnement des bureaux de vote serait assuré exclusivement par des fonctionnaires français ;

- il prévoyait que les candidats et leurs mandataires exerceraient leur contrôle dans les mêmes conditions que dans les centres de vote ;

- il renvoyait enfin à un décret en Conseil d'État la fixation des « mesures d'adaptation » de la loi organique du 31 janvier 1976 au fonctionnement des nouveaux bureaux de vote.

Saisi de la loi organique, le Conseil constitutionnel a déclaré cette disposition contraire à la Constitution, au motif « qu'en permettant au pouvoir réglementaire non pas seulement de fixer certaines modalités d'application d'une loi organique ... mais encore d'adapter les dispositions de celle-ci en vue d'assurer le fonctionnement de certains bureaux de vote à l'étranger, le législateur a méconnu la compétence exclusive » qu'il tient de l'article 6 de la Constitution. Les autres alinéas de l'article ont été déclarés inséparables de ce dernier alinéa et, en conséquence, censurés.


• Pour les auteurs de cet amendement, les « mesures d'adaptation » en question n'auraient pourtant consisté qu'en des dispositions techniques permettant simplement de transposer aux nouveaux bureaux de vote les règles déjà applicables dans les centres de vote.

L'alinéa censuré reprenait pourtant en termes identiques le second alinéa de l'article 13 de la loi organique du 31 janvier 1976, que le Conseil constitutionnel avait déclaré conforme à la Constitution.

Il est à souligner que le Conseil constitutionnel a approuvé implicitement la création des nouveaux bureaux de vote, compte tenu des garanties apportées par ce texte.

Quoi qu'il en soit, le problème demeure. Les propositions de loi organique n° 270 et 398 ont précisément pour objet d'y remédier, en reprenant le dispositif adopté en 1994, modifié toutefois en fonction des considérants du Conseil constitutionnel :

- un alinéa nouveau précise que les opérations électorales sont régies par les mêmes dispositions que dans les centres de vote. Cette formulation générale aurait pour effet d'étendre au fonctionnement des nouveaux bureaux de vote les règles relatives aux listes électorales (articles 3 à 9), à la propagande (articles 10 et 11), au vote (articles 12 à 15), à la prise en charge par l'État des frais de fonctionnement des bureaux de vote et aux dispositions fiscales (article 17), ainsi qu'au champ d'application de la loi (articles 18 et 20) ;

- le renvoi à un décret d'» adaptation » a été purement et simplement supprimé.

En effet, la disposition précédente a pour objet de faire préciser par le législateur lui-même les dispositions d'adaptation qu'il ne pouvait renvoyer au pouvoir réglementaire, ainsi que l'a considéré le Conseil constitutionnel.

Bien entendu, la faculté conférée au pouvoir réglementaire de fixer les « modalités d'application » de la loi organique du 31 janvier 1976 par un décret d'» application » en Conseil d'État -telle qu'elle est déjà prévue à l'article 19 de cette loi organique- subsiste.

Sans qu'il soit nécessaire de le préciser dans le texte, elle vaudrait également ipso jure pour le nouvel article 18-1 dont l'insertion est proposée par les deux propositions de loi organique.

Par ailleurs, compte tenu des exigences constitutionnelles en matière pénale et de procédure pénale, les auteurs des deux propositions de loi organique ont jugé nécessaire de viser expressément les sanctions pénales et les fonctionnaires autorisés à dresser procès-verbal. En conséquence, l'article 16 de la loi organique du 31 janvier 1976 serait déclaré applicable dans les nouveaux bureaux de vote.

Comme le Sénat, qui en avait approuvé le principe à l'unanimité en 1994, votre commission des Lois a adopté ce dispositif.

Tout au plus l'a-t-elle assorti, sur la proposition de votre rapporteur, d'un alinéa additionnel selon lequel : « A chaque bureau de vote est affecté un périmètre géographique » . Cette disposition avait déjà été adoptée et figurait dans le texte de la loi organique du 19 janvier 1995.

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