N° 473

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 26 juin 1996.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi, ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, améliorant la protection des acquéreurs de lots de copropriété,

Par M. François BLAIZOT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, François Giacobbi, Charles Jolibois, Robert Pagès, vice-présidents ; Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson, secrétaires ; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, Pierre Biarnès, François Blaizot, André Bohl, Christian Bonnet, Mme Nicole Borvo, MM. Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Michel Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel Millaud, Georges Othily, Jean-Claude Peyronnet, Claude Pradille, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre Schosteck, Alex Türk, Maurice Ulrich.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (10ème législ.) : 2432, 2706 et T.A. 520.

Sénat : 320 (1995-1996).

Logement et habitat

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 26 juin 1996 sous la présidence de M. Jacques Larché, président, la commission des Lois a examiné, sur le rapport de M. François Blaizot, la proposition de loi améliorant la protection des acquéreurs de lots de copropriété adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale le 18 avril 1996.

Elle a adopté sur ce texte dix amendements. Tout en procédant à un certain nombre d'améliorations rédactionnelles, la commission propose :

- d'exclure du champ d'application de l'obligation de mentionner la superficie l'ensemble des dépendances attachées au local principal ;

- de réduire de deux mois le délai imparti à l'acquéreur pour exercer l'action en nullité ;

- de prévoir la régularisation, par l'indication de la superficie dans l'acte authentique constatant la réalisation de la vente, de la promesse ou de l'avant-contrat l'ayant précédé, dépourvus de cette mention ;

- d'étendre les dispositions de la proposition de loi aux territoires d'outre-mer et à la collectivité territoriale de Mayotte ;

- de différer de six mois l'entrée en vigueur de la loi à compter de sa promulgation.

Mesdames, Messieurs,

La proposition de loi améliorant la protection des acquéreurs de lots de copropriété, soumise à votre examen après avoir été adoptée en première lecture le 18 avril 1996 par l'Assemblée nationale, trouve son origine dans un amendement présenté par M. Gilles Carrez lors de la discussion du projet de loi relatif à l'habitat au mois de juin 1994 1 ( * ) .

Cet amendement tendait à compléter l'article 1619 du code civil en exigeant la mention de la surface habitable dans les contrats de vente d'un local à usage d'habitation. Il fut rejeté en commission mixte paritaire, à la demande de la commission des Lois du Sénat au motif qu'il était risqué de modifier de façon incidente des dispositions du code civil sans en avoir mesuré au préalable toutes les implications juridiques et pratiques.

Après avoir procédé à une large concertation avec les professionnels concernés, M. Gilles Carrez déposait, le 12 décembre 1995, une proposition de loi améliorant la protection des acquéreurs de logements anciens dont l'intitulé et le dispositif furent modifiés par les conclusions de la commission des Lois de l'Assemblée nationale.

Le texte adopté par l'Assemblée nationale propose de compléter la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis pour rendre obligatoire, à peine de nullité, dans une promesse ou un acte de vente d'un lot, la mention de la surface de la partie privative correspondante. La sanction de cette obligation profite exclusivement à l'acquéreur qui dispose, en cas d'omission de l'indication exigée, d'un recours en nullité, et en cas de différentiel d'une certaine importance entre la surface effective et celle figurant dans l'acte, d'un recours en réduction du prix.

I. UNE OBLIGATION D'INDICATION DE SURFACE LIMITÉE AUX TRANSACTIONS IMMOBILIÈRES RELATIVES À DES LOTS DE COPROPRIÉTÉ

Le champ d'application des dispositions proposées est délibérément limité aux biens immobiliers constitutifs de lots de copropriété, l'obligation de mentionner la surface concernant la partie privative dudit lot.

A. UN CHAMP D'APPLICATION CIRCONSCRIT

Contrairement à l'amendement présenté lors de l'examen du projet de loi relatif à l'habitat, la proposition de loi renonce à modifier le code civil et complète la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

Il s'agit d'éviter que l'obligation de mention de surface ne s'applique à toutes les sortes de transactions immobilières. En effet, si la notion de surface et en particulier le prix au mètre carré constituent des critères déterminants de la transaction pour les ventes d'appartements ou de locaux commerciaux, l'achat d'une maison individuelle résulte souvent de la prise en considération d'autres éléments d'appréciation (environnement, existence d'un terrain ...).

En outre, comme l'a fort justement rappelé M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur au nom de la commission des Lois de l'Assemblée nationale, la généralisation de cette obligation « aurait des conséquences négatives pour certains biens fonciers non bâtis, pour lesquels le coût des opérations de métrage pourrait s'avérer supérieur à la valeur même du bien » .

L'insertion de ces dispositions dans la loi du 10 juillet 1965 limite leur champ d'application aux transactions portant sur des lots de copropriété ou des fractions de lots, quelle que soit leur affectation définie par le règlement de copropriété. Sont donc concernés non seulement les lots à usage d'habitation mais également les lots à usage mixte, professionnel ou commercial. Viser l'ensemble des lots de copropriété est de nature à éviter des contentieux fondés sur la détermination de la destination du lot en cause. Il paraît en outre aussi légitime de protéger le commerçant ou celui qui s'installe pour exercer une profession libérale que l'acquéreur d'un logement.

B. LA PORTÉE DE L'OBLIGATION D'INDICATION DE SURFACE

Contrairement à l'article 1619 du code civil envisageant l'éventualité d'une mention de « mesure de l'objet vendu » , la proposition de loi qui vous est soumise exige, à peine de nullité, que cette indication soit portée sur tout acte réalisant ou constatant la vente d'un lot de copropriété ou d'une fraction de lot.

Une telle obligation est d'ordre public : elle ne peut être écartée par une stipulation contraire, laquelle serait réputée non écrite.

La surface qui doit être indiquée dans la promesse unilatérale ou synallagmatique et dans l'acte authentifiant la vente est celle de la partie privative attachée au lot. La proposition de loi n'opère aucune distinction entre les différents types de locaux susceptibles de constituer des lots indépendants ou d'être regroupés dans la description d'un même lot.

Si la création d'une telle obligation, « dans la mesure où elle constitue une garantie des principes fondamentaux du régime de la propriété » , relève de la compétence du législateur, la définition et les modalités de calcul de la surface considérée ressortissent au domaine réglementaire.

Afin de respecter l'intention du législateur et en particulier celle de l'auteur de la proposition de loi, la définition réglementaire de la surface devra être suffisamment simple pour être mise en oeuvre par les particuliers eux-mêmes, sans avoir à recourir aux services d'un professionnel pour effectuer le métrage. Il s'agit à la fois de ne pas entraver la fluidité des transactions par des coûts supplémentaires et d'éviter les litiges susceptibles de découler d'une définition faisant référence à des critères donnant lieu à interprétation. En outre, la définition doit être formulée de façon suffisamment générale pour pouvoir s'appliquer à la fois aux locaux à usage d'habitation et aux locaux professionnels ou commerciaux.

La proposition de loi assortit l'exigence d'indication de surface d'une double sanction, au bénéfice exclusif de l'acquéreur.

* 1 J.O. Débats AN du 27 juin 1996. p. 3650

Page mise à jour le

Partager cette page