EXAMEN DES ARTICLES

Article premier (Art. L. 439-1 du code du travail) - Périmètre du comité de groupe

Le droit français du travail, à l'article L. 439-1 du code du travail, retient une définition de l'entreprise dominante, à qui il incombe de mettre en place le comité de groupe, quelque peu différente de celle retenue par l'article 3 de la directive du 22 septembre 1994.

Pour éviter la juxtaposition de deux définitions qui, bien que relevant d'une même logique fondée sur des critères juridiques et économiques, aurait pu générer des difficultés d'application, le projet de loi opte pour l'unification. En conséquence, l'article premier propose une réécriture de l'article L. 439-1 afin de définir l'entreprise dominante dans la législation relative aux comités de groupe au moyen des critères retenus par la directive pour déterminer « l'entreprise qui exerce le contrôle » dans la législation relative au comité d'entreprise européen. En outre, pour éviter toute distorsion avec la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, la notion de contrôle d'une société par une autre est définie par renvoi à cette loi. En conséquence, pour l'application des dispositions relatives au comité d'entreprise européen, qui figurent aux articles suivants, il sera fait renvoi à la définition de l'entreprise dominante mentionnée à l'article L. 439-1 dans sa nouvelle rédaction.

La fusion des critères de l'actuel article L. 439-1 du code du travail, du droit des sociétés et de l'article 3 de la directive ne modifie pas sensiblement le droit positif.

L'article L. 439-1 inclut dans le comité de groupe, outre la société dominante, les filiales de celle-ci au sens de l'article 354 de la loi du 24 juillet 1966 (dont elle détient plus de la moitié du capital), les sociétés dont elle détient indirectement plus de la moitié du capital (sous-filiales) et les sociétés dont le capital est détenu par la société dominante dans une proportion variant de 10 à 50 % (cf. art. 355 de la loi du 25 juillet 1966) dès lors que le comité d'entreprise de ces sociétés a demandé et obtenu du chef de l'entreprise dominante l'inclusion dans le groupe.

L'article 3 de la directive fixe le périmètre du groupe d'entreprises de dimension communautaire en définissant la notion « d'entreprise qui exerce le contrôle » : il s'agit d'une entreprise qui peut exercer une influence dominante sur une autre entreprise, dite « entreprise contrôlée », par exemple du fait de la propriété, de la participation financière ou des règles qui la régissent. Le 2 de l'article dispose en outre que le fait de pouvoir exercer une influence dominante est présumé établi, sans préjudice de la preuve du contraire, lorsqu'une entreprise, directement ou indirectement, à l'égard d'une autre entreprise :

a) détient la majorité du capital souscrit de l'entreprise

ou

b) dispose de la majorité des voix attachées aux parts émises par l'entreprise

ou

c) peut nommer plus que la moitié des membres du conseil d'administration, de direction ou de surveillance de l'entreprise.

Ce dernier point prime, sans préjudice de la preuve contraire, si, en cas de conflit de lois, deux ou plusieurs entreprises satisfont aux autres critères, la loi applicable étant en effet celle de l'État membre dont relève l'entreprise supposée exercer le contrôle.

Ainsi, la directive, plus précise et plus détaillée dans la définition de l'entreprise dominante que la législation française actuelle, se situe néanmoins dans la même logique.

L'article premier du présent projet de loi reprend cette définition en proposant une nouvelle rédaction de l'article L. 439-1 relatif au comité de groupe, introduit dans le code du travail par la loi du 28 octobre 1982 sur les institutions représentatives du personnel.

Le paragraphe I précise que les dispositions relatives au comité de groupe sont applicables aux entreprises et autres organismes mentionnés à l'article L. 431-1, c'est-à-dire aux entreprises et autres organismes assujettis à l'obligation de constituer un comité d'entreprise : sont notamment visés les entreprises industrielles et commerciales, les offices publics et ministériels, les professions libérales, les sociétés civiles, les syndicats professionnels, les sociétés mutualistes, les organismes de sécurité sociale, à l'exception de ceux qui ont le caractère d'établissement public administratif, et les associations quels que soient leurs formes et objet ou encore aux exploitations, entreprises et établissements agricoles ou assimilés.

Il est toutefois précisé que les dispositions s'appliquent quelque soit le nombre de salariés employés, cela pour ne pas limiter le groupe aux entreprises d'au moins cinquante salariés, seules soumises à l'obligation de créer un comité d'entreprise. Certaines sociétés, notamment de type holding, peuvent en effet ne regrouper que quelques salariés.

Le paragraphe II constitue le coeur du dispositif. Il détermine le champ du groupe au sein duquel doit être constitué un comité de groupe en définissant l'entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle :


• l'entreprise est dominante lorsqu'elle contrôle d'autres entreprises dans les conditions définies :

- à l'article 354 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales : une société est filiale d'une autre si cette dernière possède plus de la moitié du capital de la première ;

- à l'article 355-1 de cette même loi : détention directe ou indirecte d'une fraction du capital conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de la société contrôlée, majorité des droits de vote en vertu d'accords, ou encore possibilité de déterminer les décisions des assemblées générales ;

- et à l'article 357-1, deuxième alinéa : détention directe ou indirecte des droits de vote, désignation de la majorité des membres des organes d'administration, influence dominante en vertu d'un contrat ou de clauses statutaires.


• l'entreprise est également dominante si elle détient au moins 10 % du capital et exerce une influence dominante, lorsque la permanence et l'importance des relations de ces entreprises établissent l'appartenance à un même ensemble économique.

Enfin, l'influence dominante est présumée établie dans les conditions reprises de l'article 3 de la directive exposée ci-dessus ; en cas de conflit, si plusieurs entreprises satisfont à un ou plusieurs des critères mentionnés, la primauté est accordée au critère de nomination de plus de la moitié des membres des organes de direction, d'administration ou de surveillance. L'entreprise qui répond à ce critère est considérée comme l'entreprise dominante.

Toutes ces entreprises doivent avoir leur siège social en France.

Le paragraphe III reprend pour partie les dispositions de l'article L. 439-1 relative à l'inclusion dans le comité de groupe d'une entreprise à la demande du comité d'entreprise d'une entreprise sur laquelle s'exerce une influence dominante. La procédure de demande, ainsi que celle de retrait en cas de cessation des relations restent les mêmes qu'aujourd'hui, si ce n'est que le chef d'entreprise sollicité « fait droit » à la demande dans un délai de trois mois alors qu'actuellement il doit motiver sa décision et ne peut rejeter la demande lorsque l'appartenance à un même ensemble économique a créé des liens complexes que l'article énumère (administrateurs communs, comptes consolidés, etc.).

Si les relations de dépendance apparaissent alors que le comité de groupe est déjà constitué, l'inclusion des nouveaux représentants des salariés se fait à l'occasion du renouvellement de celui-ci.

Le paragraphe IV, qui prévoit la compétence du tribunal de grande instance du siège de l'entreprise dominante en cas de litige, est la reprise à l'identique d'une disposition de l'article L. 439-1.

Le paragraphe V exclut du dispositif, en ne les considérant pas comme dominantes, les entreprises intervenant au titre de sociétés d'assurance ou d'établissement de crédit ou au titre d'opérations de participation financière (points a et c du paragraphe 5 de l'article 3 du règlement CEE n° 4064/89 du conseil du 21 décembre 1989). Cette exclusion est justifiée par le caractère purement financier des relations entre ces entreprises et les entreprises « contrôlées ».

L'ensemble de cet article, reprise harmonisée avec la directive de l'actuel article L. 439-1, adopté sans amendement par l'Assemblée nationale malgré un long débat portant sur la réécriture alinéa par alinéa de l'article, n'appelle pas de remarques particulières de la part de votre commission. Aussi, vous propose-t-elle de l'adopter sans modification.

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