Rapport général n° 86 (1996-1997) de M. Hubert HAENEL , fait au nom de la commission des finances, déposé le 7 décembre 1996

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N° 86

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1996.

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 1997, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Alain LAMBERT,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Deuxième partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 31

JUSTICE

Rapporteur spécial : M. Hubert HAENEL

(1) Cette commission est composée de : MM. Christian Poncelet, président  ; Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini, vice-présidents  ; Emmanuel Hamel, René Régnault, Alain Richard, François Trucy, secrétaires  ; Alain Lambert, rapporteur général  ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc Massion, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Maurice Schumann, Michel Sergent, Henri Torre, René Trégouët.

PRINCIPALES OBSERVATIONS

Si l'on part du principe que les moyens mis depuis un certain nombre d'années à la disposition de la justice sont globalement à la mesure de l'enjeu, alors le budget de 1997 peut apparaître, dans le contexte budgétaire actuel, comme relativement satisfaisant.

Une augmentation du budget global de près de + 2 % -et même + 4,5 % pour les services judiciaires - des créations d'empois - 30 magistrats, près de 150 greffiers - qui font de la Chancellerie le seul secteur "régalien" qui verra en 1997 ses effectifs renforcés, un taux d'exécution convenable, en dépit de l'étalement sur une année supplémentaire, d'un programme I pluriannuel qui devrait représenter, sur une durée de cinq ans, un appoint de plus de 8 milliards de francs (soit un tiers du budget 1997) et plus de 6.000 emplois (dont 300 magistrats, soit 5 % de l'effectif actuel) : tous ces éléments pourraient constituer des motifs de satisfaction., de même d'ailleurs que la prise en compte récente d'un certain nombre de propositions de réforme émanant du Parlement, et singulièrement de la Haute Assemblée, à travers ses commissions de contrôle et ses missions d'information.

Citons-en quelques unes, ne serait-ce que pour démontrer que le travail de réflexion du Parlement sur le fonctionnement de la justice n'a pas été inutile : l'institution de magistrats exerçant a titre temporaire ; le recrutement de conseiller de cour d'appel en service extraordinaire ; le développement des maisons de justice ; l'évolution de la conciliation et de la médiation civiles ; l'assouplissement des conditions d'affectation des magistrats "places" auprès des chefs de cour d'appel : le recrutement d'assistants de justice, la possibilité pour les juges du tribunal de grande instance de procéder à des audiences foraines dans les tribunaux d'instance ; la dévolution aux greffiers en chef de délégations de compétence ; la généralisation du traitement "en temps" réel des affaires par les parquets.

En dépit de ces progrès pourtant significatifs, on a le sentiment que le profond malaise qui affecte le monde judiciaire ne se résorbe pas, voire s'amplifie.

Le Garde des Sceaux a eu bien raison lors du récent débat au Sénat sur les moyens de la justice de reconnaître que "la solution ne peut être seulement quantitative".

Le malaise, selon toute vraisemblance, est généré par l'incompréhension qui s'aggrave entre d'une part, les citoyens et leur justice, d'autre part la justice et les autres composantes de la puissance publique.

Chez les citoyens - les récentes enquêtes d'opinion confirment les résultats du sondage que nous avions nous-mêmes sollicité lors de la commission de contrôle sur le fonctionnement de la justice judiciaire en 1991 - prévaut tout simplement le sentiment que la justice ne fait pas son travail : les délais de jugement des juridictions judiciaires et administratives sont anormalement longs ; seuls 20 % des faits constitutifs d'infractions ou "ressentis" comme tels font l'objet de poursuites par les parquets.

Dans son rapport écrit, votre rapporteur spécial jugera, au demeurant, utile de dresser un bilan de l'activité du Conseil supérieur (qui aura fêté ses cinquante ans le 27 octobre dernier) après l'important remaniement dont il a fait l'objet.

A preuve, dans un autre registre la création, il y a moins de deux ans, au ministère de la justice, d'un "bureau de police judiciaire", embryon de ce qui pourrait, peut-être, devenir demain un véritable service chargé de "cogérer" avec le ministère de l'intérieur les statuts des personnels qui exercent des fonctions de police judiciaire.

Dirigé par un magistrat de l'administration centrale (MACJ), ce bureau est actuellement en outre composé de deux magistrats (MACJ), d'un lieutenant-colonel de Gendarmerie et d'un commissaire divisionnaire de la Police nationale. Il sensibilise les fonctionnaires de police et les militaires de la Gendarmerie aux problèmes de la direction de la police judiciaire et entretient une concertation permanente entre magistrats et services de police et de gendarmerie notamment sur les questions d'habilitation et de discipline des fonctionnaires placés sous l'autorité des parquets et des juges d'instruction.

De grands chantiers sont donc devant nous. De nombreuses "pistes" ont d'ores et déjà été ouvertes par le Parlement et par les magistrats eux-mêmes. La contribution souvent soulignée du Sénat à ces réflexions ne fait que traduire la démarche tout à la fois sereine et tenace qui caractérise notre assemblée.

Plus que jamais, il importe de maintenir notre effort.

INTRODUCTION

Les crédits demandés pour la justice en 1997 progressent de 1,77 % et atteignent 23,892 milliards de francs. Cette stabilisation en francs constants succède à une augmentation de 6,04 % annoncée par la loi de finances initiale pour 1996. Relevons que la régulation budgétaire 1996 a toutefois amputé le budget de la justice de 306 millions de francs en dépenses ordinaires, de 215 millions de francs en autorisations de programme et de 15,5 millions de francs, en net (l'annulation de 88,5 millions de francs étant compensée par une ouverture de 73 millions de francs dans le projet de loi de finances rectificative), en crédits de paiement.

Ces amputations sont intervenues après un gel décidé, au mois de février 1996, qui a porté sur 416 millions de francs en dépenses ordinaires, 406 millions de francs en autorisations de programme et 86 millions de francs en crédits de paiement (soit 15 % des crédits de fonctionnement et 25 % des crédits d'équipement nouveaux).

Quoiqu'il en soit, la part du budget de la justice dans le budget de l'Etat devrait poursuivre sa très lente progression en passant de 1,506 % en 1996 à 1,511 % en 1997. Cette part, dans les budgets ministériels civils, devrait atteindre l'année prochaine 2,55 % contre 2,51 % en 1996.

Notons que la part du budget "Justice" dans le budget de l'Etat peut être exprimée différemment selon les références que l'on adopte pour le "budget de l'Etat" :

- si l'on retient la ligne "total budget général", la part "Justice" est de 1,767 % en 1997 ;

- si l'on retient la ligne "total des charges nettes", la part "Justice" est de 1,538 % en 1997 ;

- si l'on se réfère au tableau d'équilibre général du budget, ligne "montant des dépenses nettes (article 33 du PLF 1997 : 1.580,995 milliards), la part "Justice" est de 1,511 % en 1997.

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution des crédits de 1996 à 1997 :

Il convient de souligner que la très forte progression de + 364 % du titre IV ("interventions publiques") s'explique par le transfert des crédits évaluatifs de l'aide juridique du chapitre 37-12 (titre III) au chapitre 46-12 (titre IV).

En 1995, première année d'application de la loi de programme sur la justice, l'accent fut mis sur les juridictions administratives. En 1996, la progression la plus nette fut celle des crédits de l'administration pénitentiaire. Le projet de loi de finances pour 1997 privilégie, quant à lui, les services judiciaires dont la part relative dans le budget de la justice (44,1 %) augmente alors qu'elle s'était réduite l'année dernière au profit de l'administration pénitentiaire ainsi que le montre le tableau ci-après :

(1) Ordre de la Libération, Ordre de la Légion d'Honneur, Commission nationale de l'informatique Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, Budget civil de recherche et de développement. Source : Ministère de la justice

I. LES PERSONNELS : EFFECTIFS ET STATUT

Par grand secteur d'activité (ou agrégat) les créations d'emplois sont retracées dans le tableau ci-après :

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Par rapport aux budgets civils de l'Etat, l'évolution des effectifs gérés par la Chancellerie de 1994 à 1997 apparaît dans le tableau ci-dessous :

On relève que sur 516 créations brutes réparties entre tous les agrégats, 25 résultent de transferts des services judiciaires et pénitentiaires vers la protection judiciaire de la Jeunesse, pour contribuer à la création des unités à encadrement éducatif renforcé (UEER) et que 16 résultent de transformations d'emplois au sein de différents agrégats.

Hors transferts et transformations, le nombre de créations brutes d'emplois est donc de 475, soit près de 13 % du total des créations brutes aux budgets civils de l'Etat (3.721), alors que les effectifs budgétaires du ministère de la Justice représentaient en 1996 3,56 % des effectifs budgétaires civils.

Les créations nettes d'emplois budgétaires étant de 327, l'effectif budgétaire de la Justice atteindra ainsi 60.102 agents

Les juridictions judiciaires bénéficieront d'un crédit de vacations (3,8 millions de francs) leur permettant de faire appel à 100 nouveaux assistants de justice (en plus des 200 créés en 1996).

S'agissant des mesures statutaires et indemnitaires, on note qu'un crédit de + 33,9 millions de francs est inscrit pour l'achèvement des réformes statutaires engagées au titre du protocole d'accord sur la rénovation de la grille de la fonction publique (dit "protocole Durafour"), recouvrant :


• la mise en oeuvre de la septième et dernière tranche du protocole avec l'achèvement de la restructuration des corps de catégorie B (12,5 millions de francs ; 814 emplois concernés) ;


• le financement en année pleine des dispositions statutaires inscrites en loi de finances initiale 1996 au titre du protocole Durafour et prenant effet au 1er août 1996 (121,4 millions de francs)

Au total, depuis 1990, année de mise en oeuvre de la première tranche, 384,2 millions de francs auront été inscrits au budget de la Justice au titre du protocole.

En dehors du Protocole, des crédits sont inscrits pour diverses mesures de réformes statutaires (+ 11,2 millions de francs) tandis qu'un ajustement important (+ 85,4 millions de francs) sera effectué sur les crédits de rémunérations compte tenu de l'effet "glissement - vieillesse - technicité" et de la réduction des emplois vacants.

II. LES ÉQUIPEMENTS

Le montant total des nouvelles autorisations de programme atteindra 1.357 millions de francs en 1957, soit l/6e du montant total des autorisations de programme prévues par la loi de programme (8.100 millions de francs).

Sur les trois budgets écoulés depuis le début de la loi de programme, le taux global d'exécution budgétaire de la loi de programme en autorisations de programme aura été de 56 %, soit 72 % pour les juridictions (dont 900 millions de francs en 1997), 31 % pour les établissements pénitentiaires (dont 333 millions de francs en 1997), 60 % pour la PJJ (dont 80 millions de francs en 1997) et 60 % pour les juridictions administratives (dont 40 millions de francs en 1997).

Le plus faible taux d'exécution constaté pour les services pénitentiaires tient à ce que les constructions de places nouvelles de différentes sortes (classiques, maisons centrales à effectifs réduits, centres de semi-liberté) se dérouleront dans la seconde partie de l'exécution du PPJ.

En revanche, l'"avance des juridictions" s'explique par le fait que plusieurs projets étaient prêts, compte tenu des schémas directeurs mis en place au début des années 90 à la délégation générale au programme pluriannuel d'équipement.

Avec une dotation de 1.292,5 millions de francs, le montant des crédits de paiement diminue quant à lui de - 91,4 millions de francs (alors que l'on avait enregistré une augmentation de + 192,2 millions de francs en 1996).

En agrégats, l'évolution des crédits de paiement est retracée dans le tableau ci-dessous :


• Juridictions et administration centrale 902 MF (soit + 148,4 MF et + 20 %)


• Secteur pénitentiaire 297 MF (soit - 223 MF et - 43 %)


• Protection judiciaire de la jeunesse 52 MF (soit - 33 MF et - 39 %)


• Conseil d'Etat 41 MF (soit + 16 MF et + 64 %)

Ces évolutions tant globales que par grands secteurs d'activités (agrégats) s'expliquent par les efforts d'économie, mais aussi par l'état du déroulement de l'exécution du PPJ. Dans le secteur pénitentiaire, par exemple, la construction des établissements de Ducos, Baie-Mahaut et Remiré-Montjoly est achevée tandis que le nouveau programme de construction des 4.390 places ne devrait que démarrer. En revanche, de nombreuses opérations en études ou en chantier concernent les services judiciaires en 1997.

III. LES GRANDS SECTEURS

A. LES SERVICES DE L'ADMINISTRATION CENTRALE

Agrégats 01 - Administration générale

Les crédits qui leur sont alloués progressent de 0,35 % pour atteindre 3,2 milliards de francs, soit 14 % de l'ensemble. Il est prévu 43 suppressions d'emplois et la création par transformation d'un emploi de sous-directeur d'administration centrale affecté au Casier judiciaire national.

Les crédits "informatique" enregistrent une diminution de 12,3 %, après une réduction du même ordre dans la loi de finances initiale pour 1996. Ceci s'explique par l'achèvement du plan intérimaire de 1992 et le recentrage des dotations sur un seul grand projet, le projet de gestion informatique des détenus en établissement (GIDE).

L'effectif budgétaire de magistrats de l'administration centrale (MACJ) était de 154 au 1er septembre 1996 et se décomposait en 18 premiers substituts et 136 substituts.

Les magistrats exercent au ministère de la justice des fonctions analogues à celles exercées par les administrateurs civils dans les autres départements : chef de bureau, rédacteur, etc.

Certains de ces magistrats assurent la gestion du corps des magistrats ainsi que de corps dont l'activité est directement liée à celle des magistrats (greffiers, éducateurs, personnels de l'administration pénitentiaire...) tout en participant à la gestion des moyens matériels de l'institution judiciaire.

D'autres exercent des activités à dominante juridique, telle que la préparation de projets de lois et décrets et de leurs circulaires d'application à destination des juridictions.

Quelques MACJ exercent une activité quasi juridictionnelle avec l'instruction des dossiers de grâce et de nationalité.

Malgré un développement très important de l'activité de la Chancellerie dans tous les domaines (production législative, affaires internationales, modernisation de la gestion...), le nombre de MACJ est resté constant depuis plusieurs années.

Il convient aussi de noter le faible nombre d'emplois du premier grade par rapport à celui des emplois du second grade, ce qui rend souvent malaisé le développement d'une véritable carrière dans l'administration centrale des magistrats qui y sont affectés et provoque une "rotation" importante des effectifs.

Le tableau ci-après montre l'évolution du nombre des MACJ du ministère de la justice depuis 1981 :

Les MACJ se répartissent de la manière suivante :

Votre rapporteur soulignera l'importance des mises à disposition dans l'administration centrale du ministère de la justice. Au 1er septembre 1996, la situation se présentait comme l'indique le tableau ci-après :

B. LES SERVICES JUDICIAIRES

Dans la nomenclature budgétaire, l'agrégat "services judiciaires" regroupe les moyens des juridictions de l'ordre judiciaire, du conseil supérieur de la magistrature, de l'école nationale de la magistrature et de l'école nationale des greffes.

Les dotations prévues financent :


• les crédits de personnel ;


• les crédits de fonctionnement (moyens de fonctionnement des juridictions et des services, y compris l'informatique et la bureautique, école nationale des greffes, école nationale de la magistrature ; frais de justice) ;


• les crédits d'intervention intéressant principalement le contrôle judiciaire, l'aide aux victimes, l'accès au droit et la médiation, la formation professionnelle des avocats et l'aide juridictionnelle ;


• le remboursement aux collectivités locales d'annuités d'emprunts pour des opérations d'équipement ;


• les crédits d'équipement consacrés à la modernisation et à l'extension du parc immobilier judiciaire.

On dénombrera en 1997 25.290 emplois budgétaires dans les services judiciaires ainsi que le retrace le tableau ci-dessous :

Au 1er décembre 1996 et en dehors de la Cour de cassation, la "carte judiciaire se présente de la manière suivante :

35 Cours d'appel, 2 Tribunaux de grande instance, 186 Tribunaux de grande instance, 473 Tribunaux d'instance, 271 Conseils de prud'hommes, et 227 Tribunaux de commerce.

Les deux tableaux ci-après présentent les dernières statistiques connues sur l'activité des juridictions tant au civil qu'au pénal, ainsi que sur la durée des procédures :

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Cette année, votre rapporteur spécial évoquera plus particulièrement l'activité des parquets et notamment la pratique des classements sans suite.

Au cours de l'année 1997, votre rapporteur spécial, conformément au souhait exprimé par la Commission des finances, effectuera des missions de contrôle budgétaire dans un certain nombre de parquets de tribunaux de grande instance et de cour d'appel afin d'analyser les causes des diverses pratiques de classement sans suite constatées dans les parquets.

En 1995, 5.191.255 plaintes, dénonciations et procès-verbaux sont parvenus aux parquets.

Sur ce nombre 58 % (soit 3.017.000) ont été transmises contre auteurs inconnus.

Le nombre de procédures classées sans suite a atteint 4.161.924.

Si le nombre de classements sans suite avec auteurs inconnus a enregistré une baisse, en revanche le nombre des classements sans suite avec auteurs connus a progressé d'environ 70.000. Il a représente en 1995 environ 28 % des classements sans suite.

Cette augmentation est vraisemblablement liée à celle des procédures "alternatives" (82.828 en 1995), et notamment des mesures de médiation pénale.

En cas de respect des obligations mises à la charge des intéressés, les procédures les concernant seront classées sans suite : bien qu'il y ait eu une réponse judiciaire, elles iront alimenter la rubrique "classement sans suite" avec les affaires n'ayant reçu aucune réponse de la part de l'institution judiciaire.

On note que le nombre total d'affaires poursuivies en 1995 (553.731) était en réduction de 9,6 % par rapport à l'année précédente, en conséquence de la diminution du nombre de procédures donnant lieu à poursuites (- 9,4 %).

44.554 affaires ont fait l'objet d'une ouverture d'information auprès des juges d'instruction.

39.207 affaires ont été transmises par les parquets aux juges des enfants en 1995.

373.660 affaires ont été poursuivies devant les tribunaux correctionnels, soit une baisse de 4,9 % par rapport à l'année précédente.

Enfin, 96.310 affaires ont été poursuivies en 1995 devant les tribunaux de police.

Les tableaux ci-après retracent l'évolution du classement sans suite par les parquets de 1985 à 1995, les orientations de procédure décidées par les parquets durant la même période, enfin l'évolution de l'activité des tribunaux correctionnels :

Le projet de budget pour 1997 prévoit pour les services judiciaires des crédits en progression de 4,46 % qui devraient représenter 10.535 millions de francs.

On relève, au titre du PPJ, la création de trente emplois de magistrats et de 147 emplois de greffes uniquement en catégorie C.

En revanche, sont supprimés 69 emplois de greffiers ainsi que 12 emplois de catégorie B et C.

Les créations nettes d'emplois de fonctionnaires dans les services judiciaires sont ainsi de 66.

Ces choix n'ont pas été sans émouvoir les personnels des greffes qui jugent les suppressions annoncées difficilement conciliables avec la politique mise en place depuis quelques années à partir du constat de l'insuffisance du nombre des greffiers de catégorie B pour assister les magistrats à l'audience. A preuve, le plan de transformation sur cinq ans de 1.200 emplois de catégorie C en emplois de catégorie B mis en place en 1991. Les personnels des greffes estiment que le bon ratio dans les services judiciaires serait de "un fonctionnaire de catégorie B" et de "deux fonctionnaires de catégorie C" pour chaque magistrat.

D'autre part, 3,8 millions de francs de crédits de vacations permettront le recrutement de cent assistants de justice ce qui ne peut que réjouir le Sénat qui fut à l'origine, rappelons-le, de cette initiative.

Sur le plan indemnitaire et statutaire, le projet de budget prévoit un crédit de 2,2 millions de francs pour achever le plan de repyramidage du corps des greffiers des cours et tribunaux (79 emplois sont concernés).

Un effort sera exigé, en revanche, des juridictions sur les dotations de fonctionnement courant (- 1,4 %). Sur les 1.207 millions de francs de crédits de fonctionnement destinés aux juridictions, 77 millions de francs devraient être consacrés au programme de mise aux normes de sécurité des bâtiments et 19 millions de francs à l'entretien des nouveaux bâtiments entrés en service en 1996 et 1997.

Les frais de justice représenteront 1.519 millions de francs, soit une progression de + 7,8 % après une augmentation de 7,6 % en 1996.

La dotation d'aide juridique atteindra 1.214 millions de francs, soit + 11,9 % par rapport à l'année dernière.

S'agissant des investissements, le projet de budget prévoit l'inscription d'une enveloppe de 884,5 millions de francs en autorisations de programme (- 21 % par rapport à 1996) pour l'équipement des juridictions. Cette dotation se répartirait de la manière suivante :

- 590 millions de francs pour les autorisations de programme affectées aux constructions neuves et aux opérations lourdes de rénovation prévues au programme pluriannuel d'équipement judiciaire ;

- 294,5 millions de francs pour les autorisations de programme affectées aux opérations déconcentrées de construction, de rénovation et de restructuration.

On relèvera la progression sensible des crédits de paiement : 896,8 millions de francs au lieu de 732,8 millions de francs en 1996, soit une progression de 22,4 %. L'augmentation de ces crédits devrait permettre de rattraper légèrement le report de plusieurs opérations d'équipement intervenu en 1996.

Enfin, si les nouveaux palais de justice de Caen, de Montpellier et de Nanterre ont été mis en service en 1996, l'achèvement des travaux engagés à Aix-en-Provence et à Béthune ainsi que l'engagement d'opérations pour les nouveaux palais de justice d'Avesnes-sur-Helpe, Avignon, Bourgoin-Jallieu, Fort-de-France, Narbonne et enfin Pontoise devraient intervenir en 1997.

C. LES SERVICES PENITENTIAIRES

L'agrégat "services pénitentiaires" comprend l'ensemble des moyens permettant à l'administration pénitentiaire d'assurer l'exécution des décisions pénales :

- par la prise en charge, au sein des établissements pénitentiaires, des personnes en détention provisoire ou condamnées à une peine privative de liberté ;

- par la prise en charge des personnes relevant des actions de surveillance et d'assistance en milieu ouvert.

Les dotations prévues par le projet de budget financeront ainsi :

- les crédits de personnel ;

- les crédits de fonctionnement comprenant :


• les crédits nécessaires à la prise en charge des détenus en termes d'entretien, de réinsertion sociale et de santé ;


• les crédits nécessaires au fonctionnement des établissements pénitentiaires et des services, y compris l'informatique, la bureautique et la formation du personnel ;

- les crédits d'intervention destinés aux comités de probation et d'assistance aux libérés ainsi qu'aux associations et organismes oeuvrant pour la réinsertion sociale des condamnés ;

- les crédits d'équipement destinés à la modernisation et à l'extension du parc immobilier.

L'évolution des effectifs budgétaires apparaît dans le tableau ci-dessous :

Au 1er juillet 1996, on recensait 184 établissements répartis comme suit :

Au 1er janvier 1996, l'effectif de la population pénale relevant du "milieu fermé" s'élevait à 52.658 ainsi que le retrace le tableau ci-dessous :

On note que la durée moyenne de détention a plutôt tendance à s'accroître :

Le parc pénitentiaire total (parc classique et "nouvelles prisons") enregistrait au 1er août 1996 un taux d'occupation de 114 % ainsi que le montre le tableau ci-dessous :

Nombre de places disponibles au 1er août 1996 et taux d'occupation (Métropole et DOM)

Le projet de budget pour 1997 prévoit pour les services pénitentiaires, une dotation qui devrait atteindre 6.777 millions de francs, en diminution de 1,8 % par rapport à l'année dernière.

Les dépenses ordinaires augmentent de 1,5 %, tandis que les crédits de paiement enregistrent une baisse de 42,9 %, les autorisations de programme diminuant, pour leur part, de 3,7 %.

Le projet de loi de finances pour 1997 prévoit la création de 211 nouveaux emplois et la suppression de 44 emplois, soit 167 créations nettes d'emplois.

127 nouveaux emplois sont destinés au centre pénitentiaire de Remire-Montjoly en Guyane, tandis que 37 renforceront les moyens du "milieu ouvert" (20 emplois de chef de service d'insertion et de probation et 17 emplois de conseiller d'insertion et de probation).

Notons le maintient d'une autorisation de recrutement en surnombre de 150 emplois de personnels de surveillance.

Par ailleurs, les personnels de surveillance des établissements pénitentiaires bénéficieront de l'amélioration de leur retraite par la "bonification du cinquième" (bonification d'annuités à raison d'une annuité pour cinq années de services effectifs, dans la limite de cinq annuités). L'incidence financière de cette mesure est évaluée à 2 millions de francs pour 1996 et devrait atteindre 68 millions de francs par an, à partir de l'an 2.000.

On ne peut que se réjouir de voir enfin satisfaite une revendication ancienne des personnels de surveillances dont la motivation ne pourra qu'être renforcée.

Les crédits d'équipement devraient atteindre 337 millions de francs en autorisations de programme (- 1,8 %) et 297 millions de francs en crédits de paiement (- 42,9 %).

Les acquisitions foncières et la poursuite des études pour le plan de construction de 4.390 places nouvelles de détention (169 millions de francs) devraient être réalisées en 1997, ainsi que la poursuite du programme d'ouverture de 1.200 places en centre de semi-liberté (29 millions de francs).

Une dotation de 13 millions de francs sera également consacrée à l'engagement ou à la poursuite d'opérations de rénovation notamment dans les quartiers de détention des mineurs.

*

D. LES SERVICES DE PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE

L'agrégat "protection judiciaire de la Jeunesse" récapitule :

- les moyens des directions régionales et départementales,

- les moyens permettant aux services de la protection judiciaire de la jeunesse d'assurer la prise en charge éducative des mineurs délinquants ou en danger et des jeunes majeurs qui leur sont confiés par les magistrats de la jeunesse.

Les dotations prévues par le projet de budget financeront :

- les crédits du personnel du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse (éducateurs et autres personnels) ;

- les crédits de fonctionnement du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse : moyens de fonctionnement de l'administration déconcentrée et des établissements et des services, y compris l'informatique, la bureautique et la formation initiale et continue du personnel ;

- les crédits destinés au secteur associatif habilité : prise en charge des mesures éducatives prononcées par les magistrats de la jeunesse et remboursement du coût de la prise en charge par l'Etat des mineurs délinquants, des jeunes majeurs et des investigations ;

- les crédits d'intervention en faveur d'associations ou d'organismes contribuant à la protection judiciaire de la jeunesse, à la prévention de la délinquance et à la lutte contre l'exclusion ;

- les crédits d'équipement consacrés à la modernisation et à l'extension du parc immobilier.

Au 1er janvier 1996, on dénombrait 98 "services éducatifs auprès des tribunaux" (SEAT), 234 "centres d'action éducative" et 34 "foyers d'action éducative" (FAE). Ce dispositif était coiffé par 14 directions régionales et 100 directions départementales.

L'effectif de postes budgétaires dans les services de la protection judiciaire de la Jeunesse atteindra 6.145 en 1997 dont 2.902 éducateurs.

En 1995, l'effectif des "jeunes pris en charge", répartis selon les catégories de "mineurs délinquants", "mineurs en danger" et "Jeunes majeurs" était de 32.325 dans le secteur public. Dans le secteur dit habilité, le public pris en charge avoisinera, comme l'année précédente, la centaine de milliers.

Les données connues à ce jour sont retracées dans le tableau ci-dessous :

Au regard de ces effectifs, la "capacité d'hébergement" des services de la protection judiciaire de la Jeunesse apparaît bien modeste ainsi que le montre le tableau ci-dessous :

Le projet de budget pour 1997 prévoit pour les services de la protection judiciaire de la jeunesse une dotation de 2,5 milliards de francs en augmentation de 1,5 %, par rapport à 1996 après, notons-le, une progression de 5,5 % l'année dernière.

Il est prévu la création de 65 emplois, dont 25 par transformation d'emplois en provenance des services judiciaires (12 emplois) et des services pénitentiaires (13 emplois).

On note en revanche la suppression de 5 emplois, soit au total une création nette d'emplois de 60.

Ces nouveaux emplois sont affectés aux unités à encadrement éducatif renforcé (UEER).

Au nombre de cinquante, ces institutions, dont vingt devraient être mises en service dès la fin de cette année, auront une capacité d'hébergement de 250 places. Les services éducatifs auprès des tribunaux devraient également bénéficier d'un renforcement de leurs effectifs.

Enfin, signalons que 80 millions de francs d'autorisations de programme et 52 millions de francs de crédits de paiement sont destinés à la création de nouveaux foyers à Chartres, Bourges, Rouen, Metz, Dijon et Strasbourg, ainsi qu'à la mise en service de places nouvelles dans les foyers existants.

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* *

E. LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES

Les juridictions administratives sont le Conseil d'Etat, les cinq cours administratives d'appel et les 35 tribunaux administratifs.

L'agrégat "Conseil d'Etat et juridictions administratives" récapitule l'ensemble des moyens du Conseil d'Etat, des cours administratives d'appel et des tribunaux administratifs :

- les crédits de personnel ;

- les crédits de fonctionnement ;

- les crédits "informatique" ;

- les subventions correspondant au remboursement, aux collectivités locales, d'annuités d'emprunts pour des opérations d'équipement.

- enfin, les crédits d'équipement destinés aux travaux d'aménagement, de rénovation et d'extension des locaux, ainsi que ceux destinés à la construction ou à l'achat de bâtiments pour le relogement de juridictions existantes ou l'installation de nouvelles juridictions.

Le projet de loi de finances pour 1997 prévoit pour les juridictions administratives un budget de 677 millions d francs en dépenses ordinaires et en crédits de paiement, soit une progression de 7,9 % par rapport à l'année dernière.

Les dépenses ordinaires augmentent de 5 %, pour s'établir à 636 millions de francs, tandis que les crédits de paiement des opérations en capital progressent de 64 % (41 millions de francs).

Les autorisations de programme demeurent, quant à elles, stables (40 millions de francs).

Il sera créé seize emplois de magistrats dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel et trente emplois de fonctionnaires, dont six au Conseil d'Etat, soit un total de 46 nouveaux emplois.

Les dotations de fonctionnement courant des juridictions progressent de + 6,6 %, même si le budget "informatique" enregistre une baisse de -19,4 %.

Les crédits d'investissement devraient permettre l'achat et l'aménagement du bâtiment de la nouvelle cour administrative d'appel de Marseille, de même que l'engagement et la poursuite des opérations d'aménagement des juridictions de Lyon et de Lille.

Au 31 décembre 1996, on devrait dénombrer 217 membres du Conseil d'Etat, 309 fonctionnaires travaillant au Conseil d'Etat, 641 magistrats et 895 personnels de greffes dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel.

En dépit d'une amélioration notable de la "productivité" des juridictions administratives, les délais moyens de jugement restaient manifestement trop longs en 1995 ainsi que le montre les deux tableaux ci-après pour les trois années 1993, 1994 et 1995 :

IV. LE PROGRAMME PLURIANNUEL POUR LA JUSTICE (PPJ)

Le montant des autorisations de programme prévues pour l'exécution de ce programme (loi de programme n° 95-9 du 6 juin 1995 relative à la justice) a été fixé à 8,1 milliards de francs :

- services judiciaires 4,5 milliards de francs

- administration judiciaire 3 milliards de francs

- protection judiciaire de la jeunesse 0,4 milliard de francs

- juridictions administratives 0,2 milliard de francs

Le "PPJ" a prévu la création de 5.760 emplois budgétaires pendant la période 1995-1999.

Ces créations d'emplois devraient permettre d'augmenter de 6.100 les effectifs disponibles :

- services judiciaires 1.400

dont :


• magistrats
300


fonctionnaires 1.020


• magistrats exerçant à titre temporaire (en équivalent temps plein) 80

- Conseil d'Etat et juridictions administratives 380

dont :


• magistrats
180


• fonctionnaires
200

- Administration pénitentiaire 3.920

- Protection judiciaire de la jeunesse 400

Le Gouvernement a décidé d'étaler sur une année supplémentaire l'exécution des lois de programme. Pour la justice, cela implique une application de la loi de programme sur six budgets (1995 à 2000) au lieu de cinq (1995 à 1999).

Dans ce contexte, l'exécution de la loi de programme se présente de la manière suivante, s'agissant d'une part des créations d'emplois, d'autre part des équipements :

- sur les quatre grandes actions de la Chancellerie (services judiciaires, administration pénitentiaire, protection judiciaire de la jeunesse et juridictions administratives), le PPJ prévoit de créer 5.760 emplois budgétaires. A l'intérieur de ces créations, 1.750 ont été réservées pour les budgets 1998 et 1999 : il s'agit des emplois pénitentiaires liés à l'ouverture du programme de construction "4.390" et des 1.200 places nouvelles en centres de semi-liberté.

Il aurait donc été souhaitable, aux termes des budgets 1995, 1996 et - 1997, de pouvoir "afficher" 2.005 créations d'emplois nets, soit 50 % des 4.010 emplois (5.760-1.750).

De fait, en dépit de l'étalement, les quatre grands secteurs auront reçu, à la fin de l'année 1997 au titre du programme, 1.943 créations d'emplois nets, soit 48,5 % de l'ensemble.

Par secteur, l'application du PPJ se présente de la manière suivante :

- services judiciaires : 419 créations au titre du programme en trois ans sur 1.135 prévues au total (37 %), s'ajoutant aux 300 catégories C hors programme du budget 1996 ;

- administration pénitentiaire (hors emplois liées aux constructions futures) : 1.158 créations sur trois ans sur 2.170 prévues au total (53 %), dont 61 des 127 emplois pour le nouvel établissement pénitentiaire de REMIRE (Guyane) ;

- protection judiciaire de la jeunesse : 198 créations sur trois ans sur les 400 prévues au total (49,5 %), s'ajoutant aux emplois inscrits en 1997 pour les unités d'encadrement éducatif renforcé (59, dont 25 par transfert d'emplois) ;

- juridictions administratives : 168 sur 305 prévues au total (55 %).

L'exécution du programme de créations d'emplois depuis 1995 est présentée dans le tableau ci-dessous :

S'agissant des équipements, la loi de programme a prévu une enveloppe de 8.500 millions de francs en autorisations de programme.

Sur les trois premières années d'exécution, 4.528 millions de francs ont été inscrits dans les lois de finances 1995 et 1996 et dans le projet de loi de finances pour 1997, soit 55,9 % de l'ensemble.

Les services ont été dotés de la manière suivante :

- services judiciaires : 3.246 millions de francs sur 4.500 millions prévus (72,1 %) ;

- services pénitentiaires : 922 millions de francs sur 3.000 millions prévus (30,7 %) ;

- protection judiciaire de la jeunesse : 240 millions de francs sur 400 millions prévus (60 %) ;

-juridictions administratives : 120 millions de francs sur 200 millions prévus (60 %).

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 20 novembre 1996, sous la présidence de M. Christian Poncelet, président, la commission a procédé à l'examen des crédits de la justice, sur le rapporteur de M. Hubert Haenel, rapporteur spécial.

Le rapporteur spécial a exposé les grandes lignes du budget de la justice et formulé ses observations. Un débat s'est ensuite instauré.

M. Alain Lambert, rapporteur général, s'est inquiété de la hausse continue de l'aide juridique en se demandant si celle-ci n'allait pas constituer une sorte de "sécurité sociale" de la justice. Il a ensuite, au même titre que le rapporteur spécial, appelé de ses voeux une profonde organisation de la justice en relevant lui aussi certaines lenteurs dans l'application de réformes adoptées par le Parlement.

Il a enfin souhaité que soit mis en place un traitement "externe" du contentieux de masse afin de réduire les délais de jugement.

M. Maurice Blin a estimé que la justice d'aujourd'hui était en décalage par rapport aux réalités de la France contemporaine. Il a souligné qu'en 1997 l'effectif de magistrats serait globalement comparable à celui de 1910.

M. Michel Sergent s'est demandé si les crédits de la protection judiciaire de la jeunesse, prévue dans le projet de budget pour 1997, seraient suffisants. Il s'est aussi interrogé sur la situation de notre pays au regard du taux de détention préventive.

M. Emmanuel Hamel, s'est lui aussi demandé si la France avait accompli des progrès significatifs en matière de détention préventive. Il a en second lieu interrogé le rapporteur sur l'évolution des délais de jugement.

M. Christian Poncelet, président, s'est demandé si les dispositions relatives à l'intégration directe dans la magistrature étaient appliquées dans des conditions satisfaisantes

En réponse, M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a jugé que le développement continu de l'aide juridique allait bientôt poser à la justice un problème majeur. Il a ensuite estimé que les contentieux répétitifs devaient faire l'objet d'un traitement spécifique sous le contrôle du juge. Il a enfin relevé que les délais de jugement, tant des juridictions de l'ordre judiciaire que de l'ordre administratif, demeuraient globalement constants depuis un certain nombre d'années.

Puis, sur proposition de son rapporteur, la commission a adopté les crédits de la justice dans le projet de loi de finances pour 1997 avant d'approuver, à l'unanimité, l'idée du rapporteur spécial d'effectuer l'année prochaine une mission de contrôle budgétaire dans les services des parquets afin de déterminer les causes des pratiques de classement sans suite.

ANNEXE I - MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Titre III

- Majoration des crédits de 3 millions de francs sur le chapitre 34-05 "dépenses d'informatique et de télématique".

Titre IV

- Majoration des crédits de 180.000 francs sur le chapitre 46-01 "services pénitentiaires - subventions et interventions directes".

Titre V

- Majoration de 4,470 millions de francs des autorisations de programme et des crédits de paiement sur les chapitres 57-11 et 57-60 "équipement administratif des juridictions" et "équipement (nouveau) des services judiciaires".

ANNEXE II - LE CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE DEPUIS LA RÉFORME CONSTITUTIONNELLE DU 27 JUILLET 1993

L'année 1996 marque le cinquantième anniversaire du conseil supérieur de la magistrature. En effet, si le conseil supérieur apparaît pour la première fois en France avec la loi du 31 août 1883 relative à l'organisation judiciaire (tel est le nom alors de la Cour de cassation, statuant, toutes chambres réunies, en matière de discipline des magistrats), ce n'est qu'en 1946 que la Constitution de la IVe République institue un conseil supérieur de la magistrature autonome.

L'institution mise en place par la Constitution du 27 octobre 1946 est présidée par le Président de la République, son vice-président est le garde des sceaux. Elle est composée de six membres élus par l'Assemblée nationale, quatre magistrats élus par leurs pairs, et deux membres désignés, au sein des professions judiciaires, par le Président de la République. Le conseil propose au Président de la République la nomination des magistrats du siège ; il assure la discipline et l'indépendance de ces magistrats et l'administration des tribunaux judiciaires.

Avec la Constitution du 4 octobre 1958, la composition du CSM est corrigée. Autour du Président de la République et du garde des sceaux, qui restent président et vice-président, neuf membres sont désignés par le Président de la République, soit directement (deux personnalités qualifiées), soit sur proposition du bureau de la Cour de cassation (six magistrats) ou de l'assemblée générale du Conseil d'Etat (un conseiller d'Etat). Contrairement au conseil institué par la Constitution de 1946, le conseil supérieur ne propose plus au Président de la République que la nomination des conseillers à la Cour de cassation et des premiers présidents de cour d'appel ; il donne un avis simple sur les projets de nomination des autres magistrats du siège ; demeurant conseil de discipline des magistrats du siège, il statue alors sous la présidence du premier président de la Cour de cassation.

La loi constitutionnelle du 27 juillet 1993 et la loi organique du 5 février 1994 ont modifié en profondeur la composition et les attributions du CSM : élection des magistrats membres du conseil, création de deux formations distinctes, compétentes l'une à l'égard des magistrats du siège et l'autre, à l'égard des magistrats du parquet, nomination de membres communs à ces deux formations par le Président de la République, les présidents des deux Assemblées, l'assemblée générale du conseil d'Etat, extension du pouvoir de proposition , renforcement aux présidents des tribunaux de grande instance et renforcement du pouvoir consultatif, par des avis désormais conformes, pour les magistrats du siège et simples pour ceux du parquet.

On relève que des institutions s'inspirant du conseil supérieur de la magistrature française ont été créées chez trois de nos proches voisins : l'Italie, l'Espagne et le Portugal.

Le "conseil supérieur de la magistrature" Italien, institué par une loi de 1907 est actuellement composée de trois membres de droit (le Président de la République, le Premier président et le procureur général de la Cour de cassation) et de trente membres dont 20 magistrats élus par leurs pairs et dix personnalités qualifiées désignées par les deux chambres du Parlement. Ce conseil décide de la nomination et de l'avancement des magistrats du siège et du parquet sur l'avis motivé de conseils judiciaires établis dans chaque cour d'appel. Il exerce aussi la discipline de tous ces magistrats.

Le "conseil général du pouvoir judiciaire" espagnol, définitivement mis en place par une loi organique de 1985, est composé de membres nommé par le Roi dont un président (qui est également le président du tribunal suprême, qui joue, en gros, le rôle de la Cour de cassation), 12 membres magistrats nommés sur proposition des deux chambres du Parlement et 8 juristes nommés sur proposition, également, des députés et sénateurs. Ce conseil est doté de prérogatives très étendues (juges, magistrats et magistrats du tribunal suprême).

Enfin, au Portugal, un "conseil supérieur de la magistrature", issu d'une loi de 1985, composé d'un président de droit, le président du tribunal suprême (= Cour de cassation), élu par ses pairs et de 16 membres (7 élus par l'assemblée parlementaire, 7 par leurs pairs, 2 désignés par le Président de la République) constitue "l'organe de gestion et de discipline de la magistrature judiciaire" tandis qu'un "conseil supérieur du ministère public" composé d'un président de droit, (le procureur général de la République) nommé par le Président de la République et de 17 membres (10 magistrats de parquet élus par leurs pairs, 2 membres désignés par le garde des sceaux et 5 membres élus par l'assemblée parlementaire) exerce les mêmes attributions en ce qui concerne les magistrats du parquet.

Un certain nombre de pays du Maghreb et d'Afrique francophone sont également pourvus d'un "conseil supérieur de la magistrature" proche de l'exemple français.

A. LA NOUVELLE COMPOSITION DU C.S.M.

Garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire, aux termes de l'article 64 de la Constitution, le Président de la République demeure, bien sûr, le président du conseil supérieur. La réforme a maintenu le garde des sceaux (cette règle a pu être critiquée) comme vice-président de l'institution.

Le conseil comprend en outre seize membres. Quatre, qui ne sont pas des magistrats de l'ordre judiciaire, siègent dans les deux formations du conseil ; douze magistrats de l'ordre judiciaire se répartissent également dans chaque formation, cinq magistrats du siège et un magistrat du parquet dans la formation compétente à l'égard des magistrats du siège, cinq magistrats du parquet et un magistrat du siège dans la formation compétente à l'égard des magistrats du parquet.

Le Président de la République, le Président du Sénat et le Président de l'Assemblée nationale, désignent chacun une personnalité qualifiée ; l'assemblée générale du Conseil d'Etat élit un conseiller d'Etat.

Parmi les magistrats de la formation du siège, on relève un conseiller à la Cour de cassation, un procureur général, un procureur de la République, deux magistrats du parquet et un magistrat du siège élus dans les mêmes conditions.

Le conseil exerce ses prérogatives au sein de ces deux formations distinctes, compétentes respectivement à l'égard des magistrats du siège, et des magistrats du parquet. Les réunions de travail de chacune de ces formations, à l'exception des séances solennelles présidées par le Chef de l'Etat ou le garde des sceaux, sont présidées par un de ses membres élu à cette fin pour un an non renouvelable.

Le mandat des membres élus ou désignés du conseil est de quatre ans et n'est pas renouvelable.

Soulignons que dans la pratique les seize membres du conseil supérieur se réunissent une fois par mois en réunion plénière pour évoquer les sujets d'intérêt commun.

B. LES NOUVELLES ATTRIBUTIONS DU C.S.M.

La réforme constitutionnelle de 1993 a conforté les deux champs de compétence essentiel du conseil supérieur : les nominations de magistrats et leur discipline. Mais désormais, dans ces deux domaines, il importe de distinguer les pouvoirs de la formation du siège de ceux de la formation du parquet.

1. Les nominations de magistrats.

S'agissant de la nomination des magistrats du siège, la formation du siège dispose de deux types de pouvoirs distincts.

Elle propose les nominations des magistrats du siège de la Cour de cassation, des premiers présidents de cours d'appel et des présidents de tribunaux de grande instance. Pour ces quelque 350 postes, elle dispose donc d'un pouvoir d'initiative, recense les candidatures, étudie les dossiers des candidats, les reçoit, et arrête les propositions qu'elle soumet au Président de la République, sur le rapport d'un de ses membres, lors d'une séance du conseil tenue au Palais de l'Elysée.

Pour toutes les autres nominations de magistrats du siège, la formation dispose d'un pouvoir d'avis conforme. Le garde des sceaux conserve l'initiative, et propose les nominations ; la formation étudie les dossiers des magistrats proposés, ceux des candidats qui n'ont pas été retenus par la Chancellerie et spécialement des magistrats qui ont formulé des observations sur les projets de nomination, puis elle donne, lors d'une séance tenue au Palais de l'Alma, un avis qui lie le garde des sceaux.

S'agissant de la nomination des magistrats du parquet, la formation du parquet dispose d'un pouvoir d'avis simple qui ne lie pas le ministre pour toutes les nominations à des postes du parquet proposées par le garde des sceaux, à l'exception des postes de procureurs généraux qui sont nommés en Conseil des ministres. Elle donne cet avis dans les mêmes conditions que la formation du siège, après examen des dossiers et rapport, en séance au Palais de l'Alma.

Il convient de souligner que les recommandations du conseil sont suivies. Depuis le 10 juin 1994, date de l'installation du conseil, aucune délibération n'a été remise en cause par le Président de la République ou le Garde des sceaux. Au terme de la première année de fonctionnement de l'institution dans ses attributions nouvelles, aucune nomination entrant dans sa compétence n'est intervenue dans la magistrature contre son avis.

A l'issue de ses dix huit premiers mois d'activité (puisqu'il s'est installé au début du mois de juin 1994), le nouveau CSM a publié un rapport conformément à l'article 20 de la loi organique du 5 février 1994.

Dans cette étude, il a mis en lumière les principales difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre des mouvements de magistrats :


• l'insuffisante mobilité des magistrats ;


• une cadence accélérée de rotation des magistrats dans certains tribunaux pour lesquels les candidats sont peu nombreux, voire inexistants, y compris à des postes de chefs de juridiction (ressorts du Nord et de l'Est de la France notamment) ;


• la troisième difficulté résultait de la suppression de la "transparence".

La "transparence" est un document contenant en réalité deux éléments bien distincts : l'état établi par la direction des services judiciaires des projets de nomination aux fonctions du premier et second grade et à certaines fonctions hors hiérarchie, ainsi que la liste des candidats à ces mêmes fonctions. Après avoir été diffusée dans l'ensemble du corps judiciaire, la "transparence" communiquée aux magistrats ne contenait plus que l'état des projets de nominations établi par la direction des services judiciaires. Le CSM disposait certes de la "transparence" complète, c'est à dire l'état des projets de nomination et la liste des candidats, mais le corps judiciaire n'en avait plus connaissance.

Le candidat non retenu par la Chancellerie ne pouvait connaître l'état de la concurrence sur le poste recherché, et connaître exactement sa situation. La suppression de la "transparence" a provoqué d'ailleurs un certain nombre recours formés, non pas tant pour contester un projet de nomination que pour obtenir des informations.

Le conseil supérieur s'est ainsi félicité du rétablissement de la pratique ancienne au cours de l'année 1995 :


• le phénomène des "fausses candidatures"(caractère "fictif de certains desiderata exprimés par des magistrats ; maintien sur les listes de candidats à certains emplois alors que ces candidats ont obtenu l'un des postes sollicités ; maintien de desiderata dépassés ou retirés par leurs auteurs) ;

Le CSM souhaiterait que ne soient examinées pour chacune des propositions du garde des sceaux, que les requêtes et desiderata de magistrats parvenus à la Chancellerie à des dates précises, déterminées par circulaire, et connues de tous, afin d'assurer la sincérité des desiderata et l'égalité de tous les postulants ;


• enfin, l'absence fréquente d'évaluation pour les magistrats classés hors hiérarchie. Cette situation rend malaisé l'appréciation par le conseil supérieur de la valeur respective des candidats aux plus hautes fonctions de la magistrature.

2. La discipline des magistrats

En matière disciplinaire, les deux formations du conseil siègent à la Cour de cassation. Le premier président préside alors la formation du siège statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège ; le procureur général près la Cour préside la formation compétente à l'égard des magistrats du parquet.

Le garde des sceaux détient seul l'initiative des poursuites disciplinaires contre les magistrats du siège ou du parquet. Pour ce qui concerne les magistrats du siège, les sanctions disciplinaires sont prises, après enquête et rapport d'un des membres, par décision motivée de la formation du siège du conseil.

Pour ce qui concerne les magistrats du parquet, c'est le garde des sceaux qui décide des sanctions, mais après avis, rendu dans les mêmes conditions, de la formation du parquet.

La procédure disciplinaire est régie par un ensemble de dispositions résultant :


• de la Constitution du 4 octobre 1958 (art. 65 modifié par la loi constitutionnelle du 27 juillet 1993 portant révision de la Constitution),


• de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le conseil supérieur de la magistrature (art. 18 et 19),


• de l'ordonnance du 22 décembre 1958 modifiée portant loi organique relative au statut de la magistrature (art. 43 à 66),


• du décret du 9 mars 1994 relative au conseil supérieur de la magistrature (art. 40 à 44)

Abstraction faite du pouvoir d'avertissement donné aux chefs de cour, aux directeurs d'administration centrale et à l'inspecteur général des services judiciaires, par l'article 44 du statut de la magistrature, deux instances disciplinaires peuvent intervenir :


• la formation du conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard des magistrats du siège statue, sous la présidence du premier président de la Cour de cassation, comme conseil de discipline des magistrats du siège ;


• celle qui est compétente à l'égard des magistrats du parquet, présidée par le procureur général, émet un avis motivé sur la sanction qui lui paraît appropriée, cet avis étant transmis au garde des sceaux.

Si celui-ci souhaite prendre une sanction plus grave, la formation compétente, après avoir entendu à nouveau le magistrat en ses observations, émet un nouvel avis versé à son dossier.

Cette formation compétente à l'égard des magistrats du parquet est une composante nouvelle du conseil supérieur de la magistrature qui s'est substituée à l'ancienne commission de discipline du parquet ; elle traduit sur ce point la volonté du Constituant de rapprocher le statut des magistrats du parquet de celui des magistrats du siège.

L'action disciplinaire à l'égard des magistrats du parquet de l'administration centrale du ministère de la justice demeure de la compétence exclusive du garde des sceaux.

En matière disciplinaire, le conseil siège à la Cour de cassation ; le secrétariat est assuré, selon l'appartenance du magistrat intéressé, par le substitut chargé du secrétariat général de la première présidence ou par celui chargé du secrétariat général du parquet général.

La formation disciplinaire compétente est saisie par le garde des sceaux d'une dénonciation des faits retenus au soutien de l'action engagée. Celui-ci transmet également au président de la formation saisie le dossier personnel du magistrat mis en cause ainsi que tous les documents intéressant la poursuite, notamment, le cas échéant, le rapport établi par l'inspection générale des services judiciaires.

Si une action judiciaire est intentée pour des faits entrant dans le champ de l'action disciplinaire, les pièces s'y rapportant sont également versées.

Le président de la formation concernée désigne un rapporteur parmi ses membres et la charge, s'il y a lieu, de procéder à une enquête.

Le rapporteur peut entendre le magistrat intéressé ou le faire entendre par un pair d'un rang au moins égal, ainsi que le plaignant et les témoins si nécessaire.

Dès la saisine du conseil, le magistrat mis en cause peut obtenir communication du dossier.

Au cours de l'enquête il peut se faire assister par l'un de ses pairs, par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ou par un avocat inscrit au barreau.

La procédure doit être tenue à la disposition de l'intéressé ou de son conseil quarante-huit heures au moins avant chaque audition.

La décision de la formation compétente à l'égard des magistrats du siège, motivée, est notifiée au magistrat intéressé en la forme administrative et prend effet le jour de la notification.

A l'égard du magistrat du parquet, la décision du garde des sceaux, est notifiée au magistrat en la forme administrative et prend, elle aussi, effet le jour de cette notification.

Signalons qu'en cas d'urgence et après avis des chefs hiérarchiques, le garde des sceaux a la faculté de proposer à la formation compétente à l'égard des magistrats du siège d'interdire au magistrat faisant l'objet d'une enquête l'exercice de ses fonctions, jusqu'à ce qu'une décision définitive intervienne sur le mérite des poursuites disciplinaires. Pris dans l'intérêt du service, cette décision ne peut être rendue publique.

Après avis de la formation compétente à l'égard des magistrats du parquet, le garde des sceaux peut prononcer la même décision.

L'article 45 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 détermine les sanctions disciplinaires applicables aux magistrats :

1) la réprimande avec inscription au dossier,

2) le déplacement d'office,

3) le retrait de certaines fonctions

4) l'abaissement d'échelon

5) la rétrogradation

6) la mise à la retraite d'office ou l'admission à cesser ses fonctions lorsque le magistrat n'a pas droit à une pension de retraite,

7) la révocation avec ou sans suspension des droits à pension

Il importe de rappeler que constitue une faute disciplinaire tout manquement par un magistrat aux devoirs de son état, à l'honneur, à la délicatesse ou à la dignité (art. 43 de l'ordonnance du 22 décembre 1958)

A l'égard des chefs de juridiction, soulignons que le CSM considère que les termes de l'article 43 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 "doivent être entendus de manière particulièrement rigoureuse".

Dans son rapport d'activité, le conseil supérieur a relevé, en matière disciplinaire, un certain nombre d'évolutions souhaitables :


• l'amélioration des méthodes utilisées par l'inspection générale des services judiciaires, pour accroître les garanties offertes aux magistrats intéressés lors de l'enquête préalable à la saisine : par exemple l'énonciation précise des griefs pouvant être retenus et la transcription sur procès-verbal de toute audition ;


• la prise en charge sur les frais de justice criminelle des dépenses engagées au cours de l'instance disciplinaire : honoraires d'experts, frais de déplacements de témoins... ;


• l'attribution d'une voix prépondérante au président de la formation disciplinaire en cas de partage des voix ;


• la modification de l'échelle et de la nature des sanctions disciplinaires, notamment par la création de la sanction de suspension temporaire sans droit à traitement, assortie d'un déplacement d'office.

3. L'assistance au Président de la République

L'article 64 de la Constitution dispose que : "le Président de la République est garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire. Il est assisté par le conseil supérieur de la magistrature".

Le C.S.M. exerce cette prérogative essentiellement par les avis, les notes d'information et l'étude des requêtes individuelles.

Ainsi, le conseil a le pouvoir constitutionnel de donner au Président de la République, à sa demande, son avis sur toute question concernant l'indépendance de la magistrature ou des notes d'information sur toute question touchant à l'indépendance et aux conditions de son exercice.

C'est ainsi qu'une note d'information adressée au Président de la République et au garde des sceaux, le 15 juin 1995, à la suite de la mission aux Antilles et en Guyane d'une délégation de cinq membres du conseil préconisait un certain nombre de mesures concrètes afin de renforcer la présence de l'autorité judiciaire outre-mer.

Enfin, le conseil est saisi d'un certain nombre de requêtes individuelles émanant soit de magistrats, soit de particuliers. Chaque requête émanant de magistrats est communiquée à la formation compétente du conseil ; elle fait également l'objet d'une réponse écrite.

Toutefois, le conseil ne peut, accéder au désir des magistrats qui souhaitent être reçus en vue d'exposer une situation personnelle. A l'occasion des missions d'information effectuées dans les cours d'appel, la délégation du conseil pourra néanmoins recevoir en entretiens individuels les magistrats qui en expriment le désir.

4. Les missions d'information

L'article 20 de la loi organique du 5 février 1994 a prévu la possibilité pour le conseil supérieur d'effectuer des missions d'information auprès de la Cour de cassation, des cours d'appel, des tribunaux et de l'école nationale de la magistrature.

L'objet de ces missions est triple :

- il s'agit tout d'abord pour le conseil supérieur de s'informer sur place de la situation et des particularités des juridictions afin d'en mesurer les difficultés propres. Cette connaissance lui permet de mieux apprécier la spécificité des postes pour lesquels il doit formuler ses propositions ou donner ses avis ;

- il s'agit ensuite de faire connaître l'institution afin que sa mission, ses compétences et ses règles de fonctionnement soient plus transparentes ;

- il s'agit enfin de permettre des rencontres individuelles. Tout magistrat, s'il le souhaite, est en effet reçu par des membres de la délégation afin de pouvoir évoquer librement ses préoccupations professionnelles.

Les membres actuels du CSM ont souhaité effectuer, durant les quatre années de leur mandat, une mission d'information dans chacune des cours d'appel de métropole et d'outre-mer. Ils ont constitué trois groupes de cinq ou six personnes représentatives de sa composition : personnalités désignées, magistrats du siège et du parquet, chaque délégation étant dirigée par l'un des présidents de formation.

Le conseil a décidé d'assurer ses missions dès le début de son mandat et il a tenu à ce que l'ensemble de ses membres effectue la première d'entre elles à l'école nationale de la magistrature à Bordeaux, en novembre 1994, manifestant par ce choix symbolique l'intérêt qu'il porte à la formation initiale des auditeurs de justice.

5. Les autres attributions du CSM

Elles sont, pour l'essentiel, prévues par l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature et par la loi organique du 7 janvier 1988.

L'ordonnance organique précise sur de nombreux points l'étendue des pouvoirs du conseil supérieur. Tout d'abord, en matière de carrière des magistrats, l'article 26 évoque les modalités de la nomination des auditeurs de justice à leurs premières fonctions judiciaires ; les articles 27-1, 28, 37-1, 38 et 41-2 concernent les autres nominations de magistrats ; l'article 34 prévoit la communication du tableau d'avancement aux formations du conseil ; les articles 72, 77, 79 et 43 à 66 fixent respectivement les compétences du conseil en matière de détachement, de refus ou de retrait de l'honorariat, et sur le plan disciplinaire, définissent la faute, les sanctions, et les règles de procédure applicables devant les formations du conseil.

La loi organique du 7 janvier 1988 prévoit, quant à elle, l'intervention du CSM pour les décisions de maintien en activité en surnombre, dans les formes prévues pour les nominations de magistrats.

C. LE FONCTIONNEMENT ADMINISTRATIF DU CSM

L'article 34 du décret du 9 mars 1994 dispose que le CSM se réunit à Paris. Le conseil demeure hébergé par son président, le Président de la République dans une annexe du Palais de l'Elysée. Au cours de sa première réunion, il a émis le voeu de continuer à se réunir au palais de l'Alma, 15 quai Branly. L'affectation par la présidence de la République de quelques bureaux supplémentaires pourrait résoudre la difficulté matérielle qu'à créé le renforcement de l'effectif du CSM.

Le personnel du conseil est un personnel mis à disposition. Sous l'autorité du secrétaire administratif, qui peut désormais être assisté d'un ou plusieurs adjoints, on trouve un greffier en chef et trois fonctionnaires de catégorie B ou C. Le secrétaire administratif n'intervient ni dans la répartition des rapports entre les membres, ni dans la sélection des candidats que le conseil supérieur souhaite convoquer, pas plus qu'il n'assiste à la phase de délibération au cours de laquelle s'élaborent, au sein de chaque formation, avis et propositions.

La gestion budgétaire a pris une place importante dans les attributions du secrétariat administratif. Conformément à l'article 12 de la loi organique du 5 février 1994, le CSM dispose, depuis le début de l'exercice budgétaire 1995 de crédits individualisés au sein du budget du ministère de la justice, crédits dont le secrétaire administratif à été institué ordonnateur secondaire. Sont ainsi identifiées les dépenses liées au fonctionnement du conseil supérieur et naguère prises en charge de façon globale soit par le ministère de la justice, soit par la présidence de la République. Le conseil supérieur souhaiterait néanmoins - c'est une des propositions de son rapport d'activité- que son budget soit clairement individualisé dans la nomenclature budgétaire et fasse l'objet, en tant que budget autonome, d'un vote du Parlement. Votre rapporteur spécial ne peut que se rallier à ce souhait.

D. LES ÉLÉMENTS D'INFORMATION OBTENUS PAR VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Votre rapporteur spécial a souhaité obtenir des informations comparatives sur l'activité du CSM avant l'entrée en vigueur de la réforme constitutionnelle du 27 juillet 1993 et durant les deux premières années d'application du régime nouveau, avec notamment :

- le nombre d'avis rendus,

- le nombre de propositions formulées,

- le nombre de réclamations à la suite de la publication de la "transparence",

- le nombre de réunions et notamment celles qui ont été présidées par le Président de la République et par le garde des sceaux,

- le nombre et la fréquence des déplacements des membres du conseil,

- le nombre de visiteurs ou de groupes de visiteurs enregistrés au conseil.

Votre rapporteur spécial s'est ensuite enquis du statut juridique et situation indemnitaire des magistrats du conseil et de son personnel administratif et d'exécution, ainsi que des moyens matériels du CSM.

Les éléments de réponse figurent dans les tableaux et développements qui suivent :

Nombre d'avis rendus par le CSM en 1993 (avant l'entrée en vigueur de la réforme constitutionnelle)

Nombre d'avis rendus par la formation du siège

Nombre d'avis rendus par la formation du parquet

Total général (de juin 1994 à décembre 1995)

- siège : 1.710 avis, dont 48 avis négatifs

- parquet : 565 avis, dont 22 avis négatifs.

Nombre de propositions arrêtées par le CSM

Propositions formulées par le CSM en 1993

(avant la réforme constitutionnelle)

Nombre de réunions tenues par la formation du siège

En 1994 et en 1995

Nombre de réunions tenues par la formation du parquet

En 1994 et en 1995

Total (1994+1995) : 5 réunions présidées par le Président de la République (CSM siège)

24 réunions présidées par le garde des sceaux (CSM siège + parquet)

21 réunions disciplinaires (siège + parquet)

DEPLACEMENT DES MEMBRES DU CSM DANS LES COURS D'APPEL

NOMBRE DE VISITEURS ENREGISTRES AU CONSEIL

S'agissant du statut juridique et de la situation indemnitaire des magistrats du conseil et de son personnel administratif, il a été précisé à votre rapporteur spécial que la loi organique du 5 février 1994 autorisait les membres du conseil supérieur, sur leur demande, à être placés en position de détachement.

Les membres de l'actuel conseil ont préféré rester titulaires de leurs postes à l'exception de l'un d'entre eux qui a été obligé de se démettre de sa profession d'avocat, celle-ci étant incompatible avec la qualité de membre du conseil.

Les membres du conseil perçoivent des indemnités de vacation prévues par le décret du 10 mai 1995.

Le secrétaire administratif du CSM et son secrétaire administratif adjoint sont des magistrats détachés. Le greffier en chef affecté au conseil a été mis à disposition par son administration d'origine ainsi que les trois fonctionnaires travaillant au secrétariat.

Deux gardes républicains sont affectés à la sécurité des locaux du conseil et trois chauffeurs effectuant leur service national sont, par ailleurs, mis à disposition du conseil par les services de la présidence de la République.

E. LES PROPOSITIONS FORMULÉES PAR LE CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE DANS SON RAPPORT D'ACTIVITÉ POUR LES ANNÉES 1994-1995

1. Informer les magistrats proposés par la Chancellerie pour une nomination, des réclamations dirigées contre le projet de nomination et les réclamants du sort réservé à leurs réclamations.

2. Ne pas permettre à un candidat, qui s'est engagé par écrit à accepter un poste, de se soustraire à son engagement tant qu'il ne l'a pas révoqué par écrit. Le magistrat ne doit pas pouvoir se récuser après la saisine du conseil, ni refuser de rejoindre le poste auquel il a été affecté.

3. Rappeler à l'autorité hiérarchique que les magistrats classés hors hiérarchie restent soumis à la notation, à l'exception des magistrats de la Cour de cassation et des chefs de cour.

4. Revoir la procédure de nomination des maîtres de conférence à l'école nationale de la magistrature par l'institution d'une liste d'aptitude spéciale.

5. Individualiser le budget du conseil supérieur de la magistrature dans la nomenclature budgétaire. Il serait souhaitable que le budget soit voté en tant que budget autonome par le Parlement.

6. Ouvrir la saisine du conseil supérieur de la magistrature aux présidents des deux assemblées dans le cas d'atteinte à l'indépendance de la magistrature afin de permettre au pouvoir législatif de contribuer au respect des principes constitutionnels.

7. Elargir la compétence du conseil supérieur à toutes les affectations concernant un magistrat, par la révision de la liste des emplois pourvus en Conseil des ministres de façon à en exclure les procureurs généraux.

8. Prévoir l'avis du conseil supérieur sur la nomination de son secrétaire administratif et de son secrétaire administratif adjoint.

9. Communiquer au conseil supérieur les rapports dits « sectoriels » de l'inspection générale des services judiciaires.

10. Développer l'enseignement de la déontologie professionnelle à l'école nationale de la magistrature.

11. Attribuer une voix prépondérante au président de la formation disciplinaire.

12. Renforcer les garanties du magistrat lors de la procédure conduite par l'inspection générale en prévoyant l'énumération précise des griefs pouvant être retenus et la transcription par procès-verbal de toute audition.

13. Modifier l'échelle et la nature des sanctions disciplinaires, notamment par la création d'une sanction de suspension temporaire sans droit à traitement, assortie d'un déplacement d'office.

14. Rendre plus effectif l'exercice de ses pouvoirs par le conseil en prévoyant la prise en charge, sur les frais de justice criminelle, des dépenses engagées au cours de l'instance disciplinaire (frais d'expertise, de déplacements de témoins, etc...).

Il y aura lieu d'attendre la fin du mandat des membres actuels du CSM (1998) pour prendre définitivement position sur les propositions formulées dans le rapport d'activité.

F. LE BUDGET DE FONCTIONNEMENT DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE

Chapitre 34-98 article 90

Budget global 1996 1.960.000 francs

Acompte versé à ce jour 1.470.000 francs

Le solde devrait être délégué en partie dans le courant du quatrième trimestre.

Les crédits relevant de la première délégation ont été répartis et consommés de la façon suivante :

Certains paragraphes sont suffisamment approvisionnés pour faire face aux dépenses courantes jusqu'à la fin de l'exercice budgétaire. D'autres devront être abondés après le versement du solde du budget.

Tel est le cas des paragraphes suivants :

§ 20 (travaux d'impression) : 50.000 francs supplémentaires au moins pour faire face aux frais occasionnés par l'impression et la diffusion du rapport annuel.

§ 50 (frais de déplacement) : 350.000 francs. Les crédits engagés ont été, à ce jour intégralement consommés sans attendre la délégation du solde, un transfert de crédits va être effectué d'un autre paragraphe sur ce poste dès la fin de ce mois-ci.

§ 93 (abonnements et télécommunications) : 40.000 francs sont à prévoir pour permettre le paiement des frais d'abonnement à Transpac (liaison informatique avec la paierie générale).

Prévisions budgétaires 1997 : 2.180.000 francs

§ 10 : 250.000 francs. Des économies pourront être réalisées (en 1996, acquisition d'un photocopieur et de meubles de rangement, équipement d'un bureau).

§ 20 : 200.000 francs.

§ 30 : 350.000 francs. Poursuite des travaux de rénovation devis demandé pour la remise en état du grand hall "salon".

§ 35 : 80.000 francs. Dépense nouvelle en année pleine. Le nettoyage des locaux est désormais assuré par une entreprise privée agréée par l'Elysée.

§ 50 : 950.000 francs. Frais de déplacements prévisibles pour 1996 : 875.000 francs.

§ 90 : 350.000 francs. Micro-ordinateurs, logiciels éventuellement formation, Transpac, et dépenses téléphoniques.

G. LES RÉPONSES AUX QUESTIONS ÉCRITES DÉPOSÉES LE 2 NOVEMBRE 1995 PAR NOTRE COLLÈGUE BERNARD PLASAIT

A la suite de la publication du premier rapport d'activité du conseil supérieur de la magistrature, notre collègue Bernard Plasait a posé au garde des sceaux sept questions écrites. Votre rapporteur spécial a jugé utile de faire figurer dans son rapport les questions de notre collègue et les réponses du Gouvernement (J.O. Sénat, 26 septembre 1996).

Conditions de nomination du secrétaire administratif du conseil supérieur de la magistrature

M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conditions de la nomination du secrétaire administratif et du secrétaire administratif adjoint du conseil supérieur de la magistrature. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer s'il envisage de requérir l'avis du conseil et, à cet effet, de modifier la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 et le décret n° 94-199 du 9 mars 1994 relatifs au conseil supérieur de la magistrature.

Réponse : le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la proposition qu'il a formulée consistant à prévoir que l'avis du conseil supérieur de la magistrature serait désormais recueilli lors de la procédure de nomination du secrétaire administratif et du secrétaire administratif adjoint de cet organisme remet directement en cause une règle qui a fait l'objet d'un large débat devant le Parlement lors de son adoption par la loi organique ; elle correspond à une option clairement prise par le législateur, dans le droit-fil de la réforme constitutionnelle de 1993.

Compte tenu du caractère très récent de cette réforme, qui ne présente aucune difficulté, il n'apparaît pas aujourd'hui opportun d'envisager une telle modification.

Information du conseil supérieur de la magistrature

M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'information du conseil supérieur de la magistrature. En effet, il paraîtrait souhaitable que soient communiqués au conseil les rapports dits "sectoriels" de l'inspection générale des services judiciaires. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer s'il entend donner des instructions en ce sens.

Réponse : le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que, par ses rapports "sectoriels", l'inspection générale des services judiciaires, placée directement auprès du garde des sceaux, le renseigne sur l'organisation et le fonctionnement des juridictions judiciaires dans leur ensemble ou, le cas échéant, sur l'un des services dont elles se composent, selon un programme d'inspection arrêté chaque année. Le champ des données contenues dans ces rapports dépasse donc largement celui de la situation personnelle des magistrats. Ces rapports, qui n'ont donc pas pour objet de renseigner le garde des sceaux sur le comportement professionnel de tel magistrat ou fonctionnaire, ne relèvent pas du domaine de compétence du conseil supérieur de la magistrature qui, conformément à la Constitution, fait des propositions de nomination de magistrat au Président de la République ou donne son avis sur les propositions formulées par le ministre de la justice. C'est pourquoi, contrairement à ce que semblait souhaiter l'honorable parlementaire, ces rapports n'ont pas vocation à être communiqués au conseil supérieur de la magistrature. Il en va différemment des rapports établis par l'inspection des services judiciaires en matière disciplinaire qui sont systématiquement transmis au conseil supérieur de la magistrature lorsque le garde des sceaux le saisit d'une poursuite disciplinaire contre un magistrat.

Etablissement d'un budget autonome pour le conseil supérieur de la magistrature

M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'autonomie du conseil supérieur de la magistrature. Afin de renforcer celle-ci, il pourrait être souhaitable d'individualiser le budget du CSM dans la nomenclature budgétaire et de faire en sorte qu'il soit voté en tant que budget autonome par le Parlement. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer s'il envisage de modifier l'article 12 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 dans le sens précité.

Réponse : Le garde des sceaux fait connaître à l'honorable parlementaire que la proposition qu'il a formulée consistant à prévoir que le budget du conseil supérieur de la magistrature serait désormais voté en tant que budget autonome par le Parlement met en cause une règle qui a fait l'objet d'un large débat devant le Parlement lors de son adoption par la loi organique ; elle correspond à une option clairement prise par le législateur, dans le droit fil de la réforme constitutionnelle de 1993. Compte tenu du caractère très récent de cette réforme, il n'apparaît pas aujourd'hui opportun d'envisager une telle modification.

Saisine du conseil supérieur de la magistrature par les présidents des assemblées

M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conditions de saisine du conseil supérieur de la magistrature. Il serait en effet intéressant d'ouvrir la saisine aux présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat dans le cas d'atteinte à l'indépendance de la magistrature, afin de permettre au pouvoir législatif de contribuer au respect des principes constitutionnels. A cet effet devraient être modifiés la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 et le décret n° 94-199 du 9 mars 1994. Il lui demande donc de bien vouloir lui préciser l'état de ses réflexions sur ce sujet.

Réponse : Le garde des sceaux fait connaître à l'honorable parlementaire que la réforme du conseil supérieur de la magistrature - loi constitutionnelle du 27 juillet 1993 et loi organique du 5 février 1994 - a fait l'objet d'un très large débat au Parlement. La proposition formulée par l'honorable parlementaire, qui consiste à ouvrir la saisine du conseil supérieur de la magistrature aux présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat en cas d'atteinte à l'indépendance de la magistrature, remet en cause l'option clairement prise sur cette question par le législateur lors de l'adoption de la loi organique, dans le droit-fil de la réforme constitutionnelle. Compte tenu du caractère très récent de cette réforme, qui ne présente aucune difficulté d'application sur ce point, il n'apparaît pas aujourd'hui opportun d'envisager une telle modification.

Elargissement des compétences du conseil supérieur de la magistrature à toutes les affectations de magistrats

M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le garde des sceaux sur l'opportunité d'élargir la compétence du conseil supérieur de la magistrature à toutes les affectations concernant les magistrats, par la révision de la liste des emplois pourvus en conseil des ministres, de façon à exclure les procureurs généraux et à permettre un contrôle sur la nomination aux plus hauts postes du parquet. Par conséquent, il lui demande de bien vouloir lui indiquer s'il entend modifier l'article 38 de l'ordonnance du 22 décembre 1958, portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans le sens précité.

Réponse : Le garde des sceaux fait connaître à l'honorable parlementaire que la réforme du conseil supérieur de la magistrature - loi constitutionnelle du 27 juillet 1993 et loi organique du 5 février 1994 - a fait l'objet d'un très large débat au Parlement. La proposition formulée par l'honorable parlementaire, qui consiste à soumettre la nomination des procureurs généraux au conseil supérieur de la magistrature, remet en cause l'option clairement prise sur cette question par le législateur lors de l'adoption de la loi organique, dans le droit-fil de la réforme constitutionnelle. Compte tenu du caractère très récent de cette réforme, qui ne présente aucune difficulté d'application sur ce point, il n'apparaît pas aujourd'hui opportun d'envisager une telle modification.

Absence de notation des magistrats classés hors hiérarchie

M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le garde des sceaux sur l'absence de notation des magistrats classés hors hiérarchie. En effet, l'absence de notation rend plus difficile l'appréciation de la valeur respective des candidats aux plus hauts postes de la hiérarchie, au regard de la qualité du travail effectué dans les fonctions et de la réalité des missions accomplies. Aussi, pourrait-il être opportun de rappeler à l'autorité hiérarchique que les magistrats classés hors hiérarchie restent soumis à la notation, à l'exception de magistrats de la Cour de cassation et des chefs de cour. De même, pourrait-il être rappelé aux "notateurs" l'importance d'une évaluation réaliste et, le cas échéant, critique, appliquée à l'ensemble des magistrats. Il lui demande donc de bien vouloir lui préciser s'il envisage de prendre des mesures en ce sens.

Réponse : Le garde des sceaux fait connaître à l'honorable parlementaire que la loi organique du 25 février 1992 a introduit à l'article 12-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, le principe de l'évaluation de l'activité professionnelle de chaque magistrat tous les deux ans. Ce principe, qui figure au nombre des dispositions générales de ce texte, s'applique à tous les magistrats quel que soit leur niveau hiérarchique, à la seule exception des magistrats, hors hiérarchie de la Cour de cassation et des premiers présidents et des procureurs généraux des cours d'appel conformément à l'article 39 de la même ordonnance. Par notes du 21 décembre 1995 et du 5 août 1996, un rappel de l'application de cette règle aux magistrats placés hors hiérarchie a été fait aux chefs de cour d'appel qui ont la responsabilité de procéder à cette évaluation.

Amélioration de l'information des magistrats en matière de nominations

M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le garde des sceaux sur l'opportunité de compléter l'article 27-1 de l'ordonnance 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. En effet, dans son rapport annuel 1995, le conseil supérieur de la magistrature suggère d'informer les magistrats proposés par la Chancellerie pour une nomination, des réclamations dirigées contre le projet de nomination et les réclamants du sort réservé à leurs réclamations. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer s'il entend donner suite à cette proposition.

Réponse : Le garde des sceaux fait connaître à l'honorable parlementaire que l'information des magistrats faisant l'objet d'un projet de nomination de l'existence d'observations formées par un autre magistrat candidat sur ce projet, conformément à l'article 27-01 de l'ordonnance du 22 décembre 1958, ainsi que l'information du magistrat auteur des observations sur les suites qui leur ont été réservées sont de simples modalités pratiques qui ne relèvent pas du niveau d'une loi organique. En fait, sur le premier point, les magistrats concernés sont déjà informés par la voie hiérarchique de l'existence d'observations sur leur projet de nomination. S'agissant des modalités d'information sur les suites réservées aux observations, elles sont actuellement en cours de définition en liaison avec le conseil supérieur de la magistrature.

La situation du conseil supérieur de la magistrature quelque dix-huit mois après sa réorganisation inspire à votre rapporteur spécial plusieurs réflexions.

En-dehors du Président de la République, du Gouvernement et du Parlement et au même titre que quelques rares autres institutions telles que le Conseil constitutionnel, le Conseil économique et social et les hautes cours de Justice, le conseil supérieur de la magistrature est un organe constitutionnel dont une des missions essentielles est d'assister le Président de la République, garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire.

A cet égard, on peut s'étonner que les services de la Chancellerie semblent parfois hésiter à tirer pleinement les conséquences de la réforme du 27 juillet 1993 - voulue par le pouvoir constituant - dont l'objet fût notamment de rappeler la place éminente du conseil supérieur en renforçant ses prérogatives exclusives en ce qui concerne les nominations et le déroulement de la carrière des magistrats du siège et en étendant notablement ses attributions en ce qui concerne les magistrats du parquet.

Il semble que, sur ce point capital, un certain nombre de mises au point soient aujourd'hui nécessaires.

Pourtant, dans les temps difficiles que vit actuellement la Justice, la manière dont on traitera le conseil supérieur de la magistrature ne fera que refléter l'état de la considération dont bénéficie l'institution judiciaire elle-même. De ce point de vue, des aspects qui peuvent paraître secondaires (hébergement du conseil supérieur, gestion budgétaire, personnel...) ont en réalité une dimension lourde de signification.

Pour mettre un terme à l'image "brouillée" que nos concitoyens ont de leur Justice et au profond malaise d'un monde judiciaire qui a de plus en plus le sentiment que l'institution n'est plus que le réceptacle de tous les dysfonctionnements de la société, il faudra bien cependant en passer également par une "réévaluation" du statut et des attributions du conseil supérieur.

Les cérémonies, présidées par le Président de la République, qui commémoreront, au début de l'année prochaine, le cinquantième anniversaire du conseil supérieur de la magistrature, devraient fournir l'occasion d'apporter des réponses aux interrogations qui se font jour sur le rôle que les diverses composantes de la puissance publique souhaitent lui voir jouer demain.

Réunie le mercredi 20 novembre 1996, sous la présidence de M. Roland du Luart, vice-président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la justice dans le projet de loi de finances pour 1997.

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