N° 90

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1996.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 1997, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME I

AFFAIRES SOCIALES

Par M. Jean CHÉRIOUX,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean-Pierre Fourcade, président ; Jacques Bimbenet, Mmes Michelle Demessine, Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Claude Huriet. Bernard Seillier, Louis Souvet, vice-présidents ; Jean Chérioux, Charles Descours, Roland Huguet, Jacques Machet, secrétaires ; François Autain, Henri Belcour, Jacques Bialski, Jean Bizet, Paul Blanc, Mme Annick Bocandé, MM. Louis Boyer, Jean-Pierre Cantegrit, Francis Cavalier-Benezet, Gilbert Chabroux, Philippe Darniche, Georges Dessaigne, Mme Joëlle Dusseau, MM. Guy Fischer, Alfred Foy, Serge Franchis, Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis, MM. Alain Gournac, André Jourdain, Pierre Lagourgue, Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jean-Louis Lorrain, Simon Loueckhote, Jean Madelain, Michel Manet, René Marqués, Serge Mathieu, Georges Mazars, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, M. André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DU MINISTRE

Réunie le mardi 5 novembre 1996, sous la présidence de M. Jean-Pierre Fourcade président, la commission a procédé à l'audition de M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales, accompagné de M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale sur les crédits de son département ministériel pour 1997, consacrés aux affaires sociales et à la santé.

M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales, a

tout d'abord souligné que le projet de budget pour 1997 des affaires sociales et de la santé d'un montant de 69,5 milliards de francs était « un bon budget » qui donnerait les moyens de conduire la politique de santé et les politiques sociales voulues par le ministère.

Il a souligné que les crédits progressaient cette année d'un peu plus de 2 milliards de francs en estimant que cette hausse significative traduisait la priorité que le Gouvernement attachait à la santé publique et au renforcement de la cohésion sociale.

Il a tout d'abord présenté le budget de l'action sociale et de la solidarité en indiquant que les crédits s'élèveraient à 61,4 milliards de francs en 1997, soit une progression de 3,7 % par rapport à 1996. Il a souligné que la première priorité de ce budget était l'accroissement des crédits en faveur des dispositifs de lutte contre l'exclusion et de renforcement de la cohésion sociale.

Il a indiqué que les crédits relatifs au revenu minimum d'insertion (RMI) progressaient de 5,3 % et qu'ils constituaient le premier poste de dépenses du budget. Il a estimé que cette progression des crédits permettrait, sans modifier les conditions d'attribution et en mobilisant de manière accrue les moyens locaux de contrôle, de faire face à la croissance éventuelle du nombre de bénéficiaires. Il a considéré que la mise en oeuvre du projet de loi de renforcement de la cohésion sociale permettrait aux allocataires du RMI de bénéficier dès le second semestre de 1997 d'une politique d'insertion professionnelle plus vigoureuse.

Il a constaté en second lieu que les crédits relatifs aux centres d'hébergement et de réadaptation sociale (CHRS) progresseraient de 5,6 %, soit un doublement de l'effort réalisé en 1995 et en 1996 afin de financer la création de 1.000 places nouvelles en 1997.

Il a précisé que les crédits des programmes d'action sociale de l'État consacrés à la lutte contre l'exclusion et à l'accueil d'urgence des sans-abri augmentaient de 6 % pour atteindre près d'un milliard de francs et que les crédits déconcentrés relatifs à la prise en charge de l'urgence sociale progressaient de 100 millions de francs.

Enfin, il s'est félicité de l'augmentation de 10 % des effectifs d'éducateurs et d'assistantes sociales qui permettait la mise en place de 13 millions de francs de mesures nouvelles.

Il a ensuite évoqué la seconde priorité du projet de budget relative à l'accentuation de l'effort en faveur des personnes handicapées. Il a rappelé que la politique en faveur des personnes handicapées s'inscrivait dans la ligne du discours prononcé en juillet 1995, à Bort-les-Orgues, par le Président de la République et qu'elle visait de manière prioritaire l'insertion sociale et professionnelle des travailleurs handicapés dans le droit fil de la loi d'orientation du 30 juin 1975.

Il a indiqué que le budget permettrait de créer 2.000 places nouvelles de centres d'aide par le travail (CAT), pour un montant total de 135 millions de francs, qui viendrait s'ajouter aux 84.300 places autorisées à ce jour afin notamment de contribuer à résorber les effectifs de jeunes adultes maintenus dans les établissements d'éducation spéciale au titre de l'amendement « Creton ».

Il a mis l'accent par ailleurs sur la revalorisation de 7,2 % des crédits de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) qui représentera 1,5 milliard de francs en 1997.

Pour conclure, il a souligné la progression très importante, de l'ordre de 18 %, des crédits inscrits pour financer les associations gérant les mesures de tutelle et de curatelle d État dans le cadre de la prise en charge des personnes âgées dépendantes, ainsi que des crédits ouverts pour l'aide médicale à la charge de l'État, en hausse de 17 %, afin d'éviter tout report de charges entraînant des retards de paiement préjudiciables aux acteurs du système de santé et d'améliorer l'accès aux soins des plus démunis.

M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis, s'est interrogé sur les réformes envisagées par le ministre pour mieux maîtriser la forte augmentation des dépenses de personnel dans le secteur social et médico-social sous l'effet du glissement vieillissement-technicité (GVT), des mesures catégorielles et des conventions collectives, sur l'utilité de l'application d'un taux directeur aux enveloppes budgétaires des institutions sociales et médico-sociales, sur l'origine de l'augmentation du coût unitaire des places de CAT, sur les mesures prévues pour améliorer l'insertion des travailleurs handicapés en milieu ordinaire et sur les risques de fraude ou d'erreurs dans l'attribution du RMI évalué à 2 milliards de francs pour la Cour des Comptes en 1995.

En réponse, M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales, a apporté les précisions suivantes :

S'agissant des dépenses de personnel dans le secteur social, il a constaté que l'application des conventions collectives répercutait en pratique les mesures salariales intéressant la fonction publique, mais aussi les mesures catégorielles résultant des différents protocoles passés dans l'ensemble des institutions sociales et médico-sociales. Il a rappelé que les instructions budgétaires adressées aux préfets admettaient un taux moyen de GVT de 0,8 % et, qu'au-delà de ce taux, il appartenait aux établissements de dégager par leurs moyens, ou par négociation avec l'autorité de tutelle locale, les marges permettant de faire face à des GVT atypiques.

Il a précisé qu'avait été mise en place une politique de refus des avenants en matière salariale qui ne trouveraient pas leur financement dans les marges ouvertes par le taux directeur de l'exercice.

S'agissant de l'encadrement des dépenses, il a souligné que le secteur social et médico-social ne pouvait pas faire exception au principe de l'encadrement des dépenses par des enveloppes opposables auxquelles s'applique un taux directeur de croissance des dépenses et a estimé que les décisions budgétaires de l'État ne pouvaient être prises sous la menace constante d'une remise en cause par le juge.

Néanmoins, il a précisé que le principe de l'opposabilité des enveloppes budgétaires devrait figurer dans la réforme de la loi du 15 juin 1975 après la mise au point d'outils fins d'allocation des ressources.

Concernant les places de CAT, il a constaté que le montant du coût unitaire pour la place de CAT retenu dans le projet de budget pour 1997 ne traduisait pas de dérive en 1997 par rapport au coût moyen constaté en 1995 et a rappelé que, de 1989 à 1995, le coût moyen en francs constants de la place de CAT avait connu une augmentation de 5 % alors que le SMIC progressait de 24 % sur la période.

Il a souligné que le coût à la place des CAT connaissait une progression mesurée qu'enregistrait l'impact inévitable mais contenu des évolutions salariales, compte tenu des consignes de rigueur du financeur public.

Concernant la fraude au RMI, il a souligné que les estimations du rapport de la Cour des Comptes en 1995 étaient antérieures à la mise en place des procédures de contrôle par croisement de fichiers informatiques.

Il a estimé que les indus ne devaient plus représenter que 1,2 milliard de francs en 1996 dont les trois quarts au demeurant étaient récupérés ou compensés, en soulignant que les indus ne pouvaient toujours être assimilés à des fraudes.

Il a souligné que le RMI était une prestation plus contrôlée que les autres par les agents des caisses d'allocations familiales (CAF) et que des progrès pourraient vraisemblablement être encore obtenus dans le cadre de la réforme des commissions locales d'insertion (CLI) prévue par Vavant-projet de loi de cohésion sociale.

Concernant l'insertion des travailleurs handicapés en milieu ordinaire, il a souligné que la garantie de ressource était un mécanisme essentiel pour assurer cette insertion en estimant que des progrès pourraient être recherchés en matière d'insertion des handicapés dans la fonction publique.

M. Paul Blanc s'est interrogé sur la prise en charge des travailleurs handicapés âgés et sur la mise en oeuvre du principe de la transformation du RMI en un « revenu minimum d'activité ».

M. Jean Madelain s'est interrogé sur l'accueil des handicapés adultes qui ne sont pas aptes à s'intégrer en milieu protégé et sur les mesures envisagées à l'issue de l'achèvement du programme triennal de construction de maisons d'accueil spécialisées (MAS) et de foyers à double tarification.

M. Alain Vasselle s'est interrogé sur les mesures prises pour renforcer le rôle des maires et des centres communaux d'action sociale (CCAS) dans l'attribution du RMI, sur l'estimation du nombre de places de soins infirmiers à domicile qui seraient dégagées dans le cadre de la prise en charge de la dépendance des personnes âgées, sur la réforme de la double tarification.

Mme Marie-Madeleine Dieulangard a constaté que le secteur associatif rencontrait parfois des difficultés à assumer les augmentations des dépenses salariales. Elle a souhaité qu'une période de neutralisation soit mise en place pour que les titulaires du RMI puissent continuer à bénéficier de cette prestation au cours des premiers mois de la reprise d'une activité salariée.

M. Claude Huriet s'est interrogé sur les difficultés d'hébergement des handicapés mentaux âgés, sur la baisse des crédits relatifs aux objecteurs de conscience.

M. Alain Gournac s'est interrogé sur l'accroissement des dépenses au titre de l'aide médicale sur le RMI à travers la carte santé en mettant l'accent sur la nécessité de mettre en oeuvre l'obligation alimentaire. Il s'est interrogé sur l'augmentation des crédits destinés aux commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) dans le contexte créé par la mise en oeuvre de la loi sur la dépendance des personnes âgées.

M. Bernard Seillier s'est interrogé sur la diminution des crédits de formation pour les intervenants à domicile.

En réponse, M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales, a apporté les précisions suivantes :

s'agissant de la prise en charge des handicapés mentaux âgés, il a précisé que le Gouvernement avait commandé une étude à Mme Geneviève Laroque, présidente de la fondation nationale de gérontologie, sur cette question afin de dégager les réponses spécifiques les plus adéquates et il a estimé que ce dossier devrait être traité dans le cadre de la révision de la loi de 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales afin notamment d'améliorer et de clarifier les règles du jeu entre l'État et les collectivités locales ;

- concernant la notion de « revenu minimum d'activité », il a indiqué que dans le cadre de l'avant-projet de loi de cohésion sociale, le Gouvernement proposerait aux bénéficiaires de minima sociaux des contrats d'initiative locale (CIL) réservés aux employeurs publics et aux associations à but non lucratif qui s'inscriraient dans une logique d'activation des dépenses passives ;

- s'agissant des handicapés qui ne peuvent être accueillis en milieu protégé, il a estimé que leur cas pourrait être traité dans le cadre de la réforme de la loi de 1975 en mettant l'accent sur les aspects sanitaires ;

- concernant le RMI, il a souligné que le projet de loi de cohésion sociale aurait pour objectif de permettre une gestion plus décentralisée de cette prestation en réformant notamment les commissions d'attribution dont il a souligné qu'elle devrait disposer d'un véritable relais communal ;

- s'agissant de la dépendance des personnes âgées, il a estimé à 2.000 le nombre de places d'infirmiers à domicile qui seraient financées par le Gouvernement ;

- concernant la reprise d'une activité par les titulaires du RMI, il a précisé qu'en cas d'activité temporaire, la règle dite « de l'intéressement » permettait d'éviter les à-coups dans le versement de la prestation maintenue pendant trois mois en soulignant qu'il souhaitait donner plus de publicité à cette mesure qui concernerait actuellement 100.000 personnes ;

- s'agissant des crédits relatifs aux objecteurs de conscience, il a précisé que l'économie de 98 millions de francs prévue dans le projet de loi de finances pour 1997 était due à la décélération du nombre de jeunes appelés qui demandent à bénéficier de ce statut dans la perspective de la réforme prochaine du service national, ainsi qu'au souhait du Gouvernement de rendre plus équilibré le partage de la charge financière entre l'État et les associations ;

- s'agissant de l'aide médicale gratuite pour les titulaires de RMI, il a estimé regrettable que l'attribution de la carte santé soit conditionnée par l'attribution de cette prestation tout en soulignant que ce problème devrait être résolu dans le cadre de la loi sur l'assurance maladie universelle ;

- concernant les COTOREP, il a précisé que les crédits étaient augmentés de 10 % pour assurer la prise en charge des vacations médicales qui font actuellement l'objet de retards de remboursement importants ;

- s'agissant de l'aide à domicile, il a estimé que le financement de la formation qui avait été assuré à titre exceptionnel par l'État relevait en principe de la responsabilité des collectivités locales.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page