Rapport N° 235: Convention République française et Royaume d'Espagne en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole)


M. Emmanuel HAMEL


Commission des Finances -Rapport 235 - 1996 / 1997

Table des matières


AVANT-PROPOS
I.LA SITUATION INTÉRIEURE ET LES RELATIONS BILATÉRALES
A.LA SITUATION DE L'ESPAGNE
B.LES RELATIONS BILATÉRALES
II.LES DISPOSITIONS TECHNIQUES DE L'ACCORD
EXAMEN EN COMMISSION



RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, adopté par l'assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention entre la République française et le Royaume d'Espagne en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole),

Par M. Emmanuel HAMEL,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Christian Poncelet, président ; Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini, vice-présidents ; Emmanuel Hamel, René Régnault, Alain Richard, François Trucy, secrétaires ; Alain Lambert, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc Massion, Michel Mercier, Gérard Miquel , Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Maurice Schumann, Michel Sergent, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale : ( 10 ème législ.) : 3106 , 3298 et T.A. 647 .

Sénat : 203 (1996-1997).

Traités et conventions.



AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi, soumis à l'examen de la Haute Assemblée, a pour objet d'autoriser la ratification de la convention signée le 10 octobre 1995 entre la France et l'Espagne afin d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune.

Il s'agit d'une nouvelle convention destinée à se substituer à la convention du 27 juin 1973 actuellement en vigueur.

Après une brève présentation de la situation politique et économique actuelle de l'Espagne, ainsi que des relations bilatérales franco-espagnoles, le présent rapport décrit les principales dispositions techniques de cet accord.

I. LA SITUATION INTÉRIEURE ET LES RELATIONS BILATÉRALES

A. LA SITUATION DE L'ESPAGNE

Depuis les élections de mars 1996 qui ont entraîné une alternance politique après quatorze ans de pouvoir socialiste, le gouvernement espagnol est dirigé par M. Aznar, président du Parti populaire, qui, faute de majorité absolue, a dû conclure une alliance avec les partis nationalistes basque et catalan. De ce fait, un nouvel équilibre entre l'Etat et les autonomies régionales devrait être prochainement mis en oeuvre.

Sur le plan économique, l'adhésion de l'Espagne à la Communauté économique européenne en 1986 a entraîné une modernisation rapide de l'économie et permis une période de forte croissance.

La récente récession a cependant mis en évidence la persistance de déséquilibres structurels importants.

Ainsi, la coexistence d'un secteur productif ouvert sur l'extérieur et compétitif (marchés financiers, de biens d'équipement et de consommation internationaux) et d'un secteur marqué par les rigidités de l'offre et une faible compétitivité (secteur des services et marché de l'emploi) crée une forte dépendance de l'Espagne vis à vis de l'extérieur et, dans certains domaines, une aggravation des déficits commerciaux.

De même, les déficits publics, supérieurs à la moyenne européenne (5,7 % en 1995 et 4,4 % en 1996), le rapide accroissement de la dette publique, passée de 48 % du PIB en 1992 à plus de 67 % en 1996 et le taux de chômage le plus élevé de l'Union européenne sont une source de fragilité pour l'économie espagnole.

Toutefois, l'objectif du gouvernement de faire participer l'Espagne à la monnaie unique dès 1999 a conduit à l'adoption de mesures de grande ampleur dans le projet de budget pour 1997 : hausse des recettes et réduction des dépenses (gel des salaires et des recrutements dans la fonction publique, diminution des investissements publics, régulation stricte des crédits des ministères).

La clarté de cet engagement a été bien accueillie par les marchés, la peseta s'étant maintenue à une parité élevée et la baisse des taux d'intérêt ayant pu s'affirmer.

Toutefois, quelques incertitudes subsistent en ce qui concerne les dépenses de pensions et de retraites, les dépenses de santé, ainsi que les dépenses de transfert vers les "autonomies". Des réformes structurelles seront, dans ces domaines, nécessaires.

B. LES RELATIONS BILATÉRALES

Au-delà de la grande convergence de vues entre la France et l'Espagne sur le plan politique, notamment en matière de politique européenne, il convient de souligner la vigueur des relations économiques franco-espagnoles.

Ces relations sont anciennes et se sont accrues au fur et à mesure de l'ouverture du marché espagnol.

La France est ainsi le premier partenaire économique de l'Espagne. Elle est son premier client avec 17,1 % de part de marché et son premier fournisseur, devant l'Allemagne. En dix ans, la valeur des échanges entre les deux pays a plus que doublé et a atteint, en 1995, environ 200 milliards de francs.

Depuis 1987, la France enregistre, dans ses échanges commerciaux avec l'Espagne, un solde excédentaire. Cet excédent a été proche de 15 milliards de francs en 1995. Il provient notamment des secteurs de l'agro-alimentaire (céréales et produits laitiers), des biens d'équipement professionnels (machines-outils, matériel électrique), des produits semi-finis et des biens de consommation.

On observera que, récemment, malgré la progression des exportations espagnoles sous l'effet de la dévaluation de la peseta, les échanges commerciaux franco-espagnols se sont intensifiés, que l'excédent français s'est maintenu et que les gains de parts de marché des exportations françaises sur le marché espagnol se sont accrus par rapport aux principaux concurrents étrangers de la France.

Enfin, dans les secteurs sensibles des fruits et légumes et de la pêche, des progrès ont été constatés grâce, en particulier, au Comité franco-espagnol des pêches, instance créée en décembre 1994, qui a joué un rôle très utile de conciliation entre les différentes parties concernées des deux partenaires.

En matière d'investissement, la France qui était au premier rang en 1994 se situe, en 1995, au second rang des investisseurs étrangers en Espagne, derrière les Etats-Unis.

Avec 70 milliards de francs en 1995, les investissements français se sont orientés en priorité vers le secteur manufacturier (pour plus de la moitié du total), le secteur de l'immobilier et le secteur des services.

D'une façon générale, la présence française est particulièrement forte dans les secteurs financiers, de l'automobile, de l'agro-alimentaire, de la chimie, des télécommunications, de l'électronique et de la grande distribution.

Dans le domaine des infrastructures, un accord a été signé en octobre 1995 pour la mise en service d'une liaison ferroviaire à grande vitesse à l'horizon 2002, avec la réalisation d'un tronçon international Perpignan-Figueras.

En revanche, la décision unilatérale française de février 1996 d'abandonner le projet de construction d'une ligne à haute tension Carazil-Aragon a été mal ressentie en Espagne car la liaison des réseaux électriques français et espagnol revêtait un aspect stratégique important.

Dans ce contexte, l'entrée en vigueur de la nouvelle convention fiscale signée à Madrid le 10 octobre 1995 devrait permettre aux investisseurs de profiter au mieux de la libéralisation des relations économiques et financières dans le cadre de l'Union européenne, et favoriser le développement des investissements français en Espagne et espagnols en France.

II. LES DISPOSITIONS TECHNIQUES DE L'ACCORD

La France et l'Espagne sont actuellement liées par une convention en date du 27 juin 1973 tendant à éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune. Cette convention a été modifiée par un avenant en date du 6 décembre 1977.

Une révision de cette convention fiscale étant apparue nécessaire -certaines de ses dispositions ne tenant pas compte de l'évolution des législations fiscales des deux Etats et ne correspondant pas aux recommandations de l'OCDE ainsi qu'à l'état de nos relations économiques- des négociations ont été engagées en 1988. Elles ont abouti à un projet de nouvelle convention fiscale, paraphé à Madrid le 30 avril 1992.

Après diverses adaptations techniques, la convention a été signée à Madrid le 10 octobre 1995 au cours d'un sommet franco-espagnol. Lorsqu'elle entrera en vigueur, elle se substituera à la convention du 27 juin 1973.

Le Parlement espagnol en a autorisé la ratification par le Roi à la fin de l'année 1996 (examen par le Congrès des députés le 31 octobre 1996 et par le Sénat le 3 décembre 1996). Les autorités espagnoles n'ont cependant pas encore adressé leur instrument de ratification à la France.

Dans ses grandes lignes, la convention -dont certaines dispositions sont complétées par un protocole- est conforme aux principes retenus par le modèle de l'OCDE. Elle présente néanmoins les traits originaux suivants :

- les revenus et les plus-values concernant les parts ou actions des sociétés à prépondérance immobilière sont expressément assimilés à des revenus ou plus-values immobiliers (cette précision confirme la possibilité pour la France d'appliquer son droit interne dans ce domaine) ;

- en matière de dividendes, la retenue à la source est supprimée lorsque la société mère bénéficiaire de la distribution détient au moins 10 % du capital de la société distributrice ; il s'agit d'un assouplissement par rapport à la directive communautaire du 23 juillet 1990 dite "mères-filiales" ;

- la possibilité offerte aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières de bénéficier des avantages prévus par la convention en matière de dividendes et d'intérêts ;

- la retenue à la source sur les intérêts est maintenue au taux de 10 %, mais de nombreux cas d'exonération sont prévus en ce qui concerne les intérêts payés par l'Etat ou ses collectivités territoriales, les intérêts payés entre entreprises et les intérêts payés à un établissement de crédit ;

- la retenue à la source sur les redevances est réduite de 6 à 5 % ; par ailleurs, en sont exonérées les redevances afférentes aux droits d'auteurs ;

- le principe de l'imposition des travailleurs frontaliers dans leur Etat de résidence, prévu par la convention du 27 juin 1973, est confirmé ;

- les cotisations versées à une institution de retraite française par une personne résidente d'Espagne sont déductibles du revenu imposable dans ce dernier Etat ; la réciprocité est prévue pour les cotisations versées à une institution de retraite espagnole (cette mesure améliorera la situation des personnels expatriés) ;

- une clause d'assistance au recouvrement entre les deux Etats est prévue (il s'agit d'une nouveauté entre la France et l'Espagne) ;

- l'octroi de crédits d'impôt forfaitaires par la France, prévu par la convention en vigueur, à raison de certains dividendes de source espagnole bénéficiant de régimes d'imposition favorables en Espagne est supprimé.

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Telles sont les principales dispositions de l'accord dont votre commission vous propose d'autoriser la ratification.


EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 26 février 1997, sous la présidence de M. Christian Poncelet, président, la commission a procédé, sur le rapport de M. Emmanuel Hamel, à l'examen du projet de loi autorisant la ratification de la convention fiscale du 10 octobre 1995 entre la France et l'Espagne.

Elle a décidé de proposer l'adoption du projet de loi dont le texte suit :

Article unique

"Est autorisée la ratification de la convention entre la République française et le Royaume d'Espagne en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole), signée à Madrid le 10 octobre 1995, dont le texte est annexé à la présente loi."

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