Rapport général n° 85 (1997-1998) de M. Alain LAMBERT , fait au nom de la commission des finances, déposé le 20 novembre 1997

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N° 85

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SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès verbal de la séance du 20 novembre 1997 .

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 1998, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Alain LAMBERT,

Sénateur,

Rapporteur général .

TOME III

LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES (Deuxième partie de la loi de finances)

(1) Cette commission est composée de : MM. Christian Poncelet, président ; Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart, Mme Marie Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini, René Régnault, vice-présidents ; Emmanuel Hamel, Gérard Miquel, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Alain Lambert, rapporteur général ; Philippe Adnot, Bernard Angels, Denis Badré, René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc Massion, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Maurice Schumann, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (11ème législ . ) : 230, 305 à 310 et T.A 24

Sénat : 84 (1997-1998) .

Lois de finances.

DEUXIÈME PARTIE : MOYENS DES SERVICES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE PREMIER DISPOSITIONS APPLICABLES À L'ANNÉE 1998

I. OPÉRATIONS À CARACTÈRE DÉFINITIF

A. Budget général

ARTICLE 26 - Budget Général - Services Votés

Commentaire : cet article fixe à 1.781 milliards de francs le montant des crédits ouverts au titre des services votés du budget général pour 1998 .

L'ordonnance organique (article 33) définit les services votés comme "le minimum de dotations que le gouvernement juge indispensables pour poursuivre l'exécution des services publics dans les conditions qui ont été approuvées l'année précédente par le Parlement". Elle dispose en outre (article 41) que les dépenses du budget général font l'objet d'un vote unique en ce qui concerne les services votés.

La part des services votés dans le total des crédits bruts demandés pour 1998 s'établit à 94,9 % au lieu de 94,0 % en 1997, 92,8 % en 1996, 94,3 % en 1995, 91,5 % en 1994 et 93,5 % en 1993.

Les services votés sont égaux à la somme des crédits initiaux votés dans la précédente loi de finances (les crédits ouverts en collectif budgétaire ne sont donc pas pris en compte) et des mesures acquises.


• Pour 1997, les dépenses du budget général s'établissent comme suit (en milliards de francs) :


• Pour 1998, l'égalité définitionnelle est la suivante :

L'accroissement de 21,3 milliards de francs des dépenses du budget général résulte donc d'une augmentation de 60,1 milliards de francs des services votés corrigée des variations en mesures nouvelles (- 14), en remboursements et dégrèvements (- 29,1 ) et en recettes en atténuation de dépenses (+ 4,1). Il convient ensuite de tenir compte des mesures acquises (- 50,1 milliards).

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

ARTICLE 27 - Mesures nouvelles - dépenses ordinaires des services civils

Commentaire : cet article, tel que modifié par l'Assemblée nationale, fixe à 41,5 milliards de francs le montant des mesures nouvelles au titre des dépenses ordinaires des services civils. Ces crédits sont répartis par ministère, conformément à l'état B annexé au présent projet de loi .

Les ouvertures de crédits se présentent ainsi (en francs) :

Titre I

Titre II

Titre III

Titre IV

Total

Projet de loi

Texte adopté par l'Assemblée nationale

Variation

22.481.975.800

118.434.000

8.415.574.804

8.672.379.497

39.688.364.101

23.561.975.800

23.561.975.800

8.422.379.794

9.451.944.497

41.554.734.091

1.080.000.000

0

6.804.990

779.565.000

1.866.369.990

Les variations s'expliquent ainsi qu'il suit :

Titre I : majoration des prélèvements sur recettes au titre des mesures relatives à la taxe d'habitation (Art. 18 quinquies et sexies)

Titre III : effet, pour 3,19 millions de francs, du recrutement des personnels chargés du contrôle de la réglementation du travail dans les transports et pour 3.61 millions de francs de diverses majorations de crédits à titre non reconductible.

Titre IV : effet des mesures inscrites à l'article d'équilibre à l'issue des votes de première partie (+ 500 millions pour le BAPSA, + 100 millions pour le fonds destiné aux journalistes, + 40 millions pour le budget des anciens combattants) et des diverses majorations de crédit à titre non reconductible à hauteur de 139 millions de francs.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'il résultera des votes du Sénat.

ARTICLE 28 - Mesures nouvelles - dépenses en capital des services civils

Commentaire : cet article, tel que modifié par l'Assemblée nationale ouvre, au titre des mesures nouvelles, 71,4 milliards de francs en autorisations de programme et 36,4 milliards de francs en crédits de paiement des dépenses en capital des services civils .

L'Assemblée nationale a modifié les ouvertures ainsi qu'il suit :

Autorisations de programme

Titre V : + 3.500.000 F

Titre VI : + 370.548.000 F

Crédits de paiement

Titre V : + 3.500.000 F

Titre VI : 370.548.000 F

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article tel qu'il résultera des votes du Sénat .

ARTICLE 29 - Mesures nouvelles - Dépenses ordinaires des services militaires

Cet article a été rattaché aux crédits de la Défense (Titre III) et analysé dans l'annexe n° 44 au rapport Sénat n° 85 (M. François Trucy, rapporteur spécial).

ARTICLE 30 - Mesures nouvelles - Dépenses en capital des services militaires

Cet article a été rattaché aux crédits de la Défense (Titres V et VI) et analysé dans l'annexe n° 43 au rapport Sénat n° 85 (M. Maurice Blin, rapporteur spécial).

ARTICLE 3 - Autorisations d'engagement par anticipation

Cet article, ainsi que l'État D, a été rattaché aux crédits de la Défense

(Titre III) et analysé dans l'annexe n° 44 au rapport Sénat n° 85 (M. François Trucy, rapporteur spécial)

B. Budgets Annexes

ARTICLE 32 - Budgets annexes - Services votés

Commentaire : le présent article arrête à 101,2 milliards de francs le montant des crédits ouverts au titre des services votés des budgets annexes .

Cette somme est ainsi répartie :

Aviation civile 7.312.251.960 F

Journaux officiels 843.478.181 F

Légion d'honneur 105.522.940 F

Ordre de la Libération 4.111.414 F

Monnaies et médailles 828.233.560 F

Prestations sociales agricoles 92.100.627.785 F

Total 101.194.225.840 F

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification

ARTICLE 33 - Budgets annexes - Mesures nouvelles

Commentaire : cet article ouvre, au titre des mesures nouvelles, 1,83 milliard de francs en autorisations de programme et 2,45 milliards de francs en crédits .

Ces sommes se répartissent comme suit :

Autorisations de programme :

Aviation civile 1.763.950.000 F

Journaux officiels 19.700.000 F

Légion d'honneur 5.140.000 F

Ordre de la Libération 0 F

Monnaies et médailles 41.020.000 F

Total 1.829.810.000 F

Crédits :

Aviation civile 1.157.216.213 F

Journaux officiels 126.671.819 F

Légion d'honneur 4.612.417 F

Ordre de la Libération 1.652 F

Monnaies et médailles 216.660.004 F

Prestations sociales agricoles 942.372.215 F

Total 2.447.534.320 F

L'Assemblée nationale a modifié le montant des crédits de prestations sociales agricoles de 500 millions de francs afin de financer l'augmentation des petites retraites agricoles (le financement en étant fourni par l'augmentation à due concurrence de la subvention d'équilibre versée par le ministère de l'agriculture et de la pêche). Les crédits correspondants sont passés de 442.372.215 F à 942.372.215 F.

Lors de l'examen des articles de première partie, le Sénat a rejeté l'article 20 du projet de loi, diminuant ainsi de 335 millions de francs le montant attendu du produit des taxes de sécurité et de sûreté affecté au BAAC (budget annexe de l'aviation civile).

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article dans la rédaction qui résultera de ses votes sur l'ensemble des articles du présent projet de loi de finances .

C. Opérations à caractère définitif des comptes d'affectation spéciale

Les articles suivants :

ARTICLE 34 - Clôture du compte d'affectation spéciale n° 902-29 "Fonds pour le logement des personnes en difficulté"
ARTICLE 35 - Modification des recettes du compte d'affectation spéciale n° 902-30 "Fonds pour le financement de l'accession à la propriété"
ARTICLE 36 - Clôture du compte d'affectation spéciale n° 902-28 "Fonds pour l'accession à la propriété"
ARTICLE 37 - Clôture du compte n° 902-18 "Fonds pour la participation des pays en développement aux ressources des grands fonds marins"
ARTICLE 38 - Création d'un compte d'affectation spéciale n° 902-31 "Indemnisation au titre des créances françaises sur la Russie"
ARTICLE 38 bis - Création d'un compte d'affectation spéciale n° 902-32 intitulé "Fonds de modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale"
ARTICLE 39 - Comptes d'affectation spéciale. Opérations définitives. Services votés
ARTICLE 40 - Comptes d'affectation spéciale. Opérations définitives. Mesures nouvelles

ont été examinés par le Sénat lors de sa séance du 3 décembre 1997 sur le rapport spécial présenté par M. Yann Gaillard (annexe n° 45 au rapport général Sénat n° 85).

II. OPÉRATIONS À CARACTÈRE TEMPORAIRE

Les articles suivants :

ARTICLE 41 - Comptes spéciaux du Trésor. Opérations à caractère temporaire. Services votés
ARTICLE 42 - Comptes d'affectation spéciale. Opérations à caractère temporaire. Mesures nouvelles
ARTICLE 43 - Comptes de prêts. Mesures nouvelles
ARTICLE 43 Bis nouveau - Création d'un compte de commerce n° 904-21 intitulé "opérations industrielles et commerciales des directions départementales et régionales de l'équipement"

ont été examinés par le Sénat lors de sa séance du 3 décembre 1997 sur le rapport spécial présenté par M. Yann Gaillard (annexe n° 45 au rapport général Sénat n° 85).

III - DISPOSITIONS DIVERSES

ARTICLE 44 - Autorisation de perception des taxes parafiscales

Commentaire : le présent article a pour objet d'autoriser la perception des taxes parafiscales en 1998. Il a été adopté sans débat par l'Assemblée nationale.

La liste de ces taxes figure à l'État E joint au projet de loi de finances. Les lignes 46 et 47 ont fait l'objet d'un examen dans le rapport spécial de M. Jean Cluzel (annexe n° 7 au rapport n° 85 de la commission des finances).

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

ARTICLE 45 - Crédits évaluatifs

Commentaire : le présent article a pour objet de fixer la liste des chapitres sur lesquels s'imputent les crédits évaluatifs autres que ceux limitativement énumérés à l'article 9 de l'ordonnance de 1959 .

Ordonnance du 2 janvier 1959

Article 9

Les crédits évaluatifs servent à acquitter les dettes de l'État résultant de dispositions législatives spéciales ou de conventions permanentes approuvées par la loi. Ils s'appliquent à la dette publique, à la dette viagère, aux frais de justice et aux réparations civiles, aux remboursements, aux dégrèvements et aux restitutions, ainsi qu'aux dépenses imputables sur les chapitres dont l'énumération figure à un état spécial annexé à la loi de finances.

Les dépenses auxquelles s'appliquent les crédits évaluatifs s'imputent, au besoin, au-delà de la dotation inscrite aux chapitres qui les concernent.

La liste des crédits évaluatifs. autres que ceux énumérés à l'article 9 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 figure à l'état F. Le montant de ces autres crédits s'établit à 102,7 milliards de francs (100,5 milliards de francs en 1997).

L'Assemblée nationale a apporté deux modifications d'ordre technique à cet article. Elle a supprimé dans l'État F les chapitres 37-05 et 42-04 du budget des charges communes dont le présent projet de loi de finances propose par ailleurs la suppression, dans le fascicule bleu correspondant.

Elle a également rectifié des références erronées à la ligne 46-97 du budget annexe des prestations sociales.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

ARTICLE 46 - Crédits provisionnels

Commentaire : le présent article fixe pour 1998, conformément à l'état G annexé au projet de loi de finances, la liste des chapitres dont les dotations ont un caractère provisionnel .

Ordonnance du 2 janvier 1959

Article 10

Les crédits provisionnels s'appliquent aux dépenses dont le montant ne peut correspondre exactement à la dotation inscrite dans la loi de finances parce que les dépenses afférentes à ces crédits sont engagées en vertu d'une loi ou d'un règlement contresigné par le ministre des finances. La liste des chapitres dont les dotations ont un caractère provisionnel est donnée chaque année par la loi de finances .

Les dépenses sur crédits provisionnels ne peuvent être ordonnancées que dans la limite des crédits ouverts. S'il est constaté en cours d'année que ces crédits sont insuffisants, ils peuvent être complétés, par arrêté du ministre des finances, par prélèvement sur le crédit global pour dépenses éventuelles. En cas d'urgence, si ces prélèvements sont eux-mêmes insuffisants, des crédits supplémentaires peuvent être ouverts par décret d'avance pris sur le rapport du ministre des finances et dont la ratification est demandée au Parlement dans la plus prochaine loi de finances .

Les crédits provisionnels énumérés à l'état G sont ceux qui, en cas d'insuffisance, peuvent être complétés en cours d'année par prélèvement sur un chapitre réservoir du budget des charges communes : chapitre 37-94 "dépenses éventuelles" doté de 285 millions de francs en 1998 (contre 245 en 1997).

Au-delà de cette somme, les crédits devraient être ouverts par décret d'avance. Pris sans avis préalable du Conseil d'État, ces décrets peuvent dégrader l'équilibre de la loi de finances.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

ARTICLE 47 - Reports de crédits

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter la liste des chapitres dont les crédits peuvent être reportés par arrêté, sans limitation de montant. L'énumération de ces chapitres figure à l'état H annexé au projet de loi de finances .

Ordonnance du 2 janvier 1959

Article 1 er

"Sous réserve des dispositions concernant les autorisations de programme, les crédits ouverts au titre d'un budget ne créent aucun droit au titre du budget suivant.

Toutefois, les crédits de paiement disponibles sur opérations en capital sont reportés par arrêté du ministre des finances ouvrant une dotation de même montant en sus des dotations de l'année suivante. Avant l'intervention du report, les ministres peuvent, dans la limite des deux tiers des crédits disponibles, engager et ordonnancer des dépenses se rapportant à la continuation des opérations en voie d'exécution au 1er janvier de l'année en cours.

Peuvent également donner lieu à report, par arrêté du ministre des finances, les crédits disponibles figurant à des chapitres dont la liste est donnée par la loi de finances ainsi que, dans la limite du sixième de la dotation du chapitre intéressé, les crédits correspondant aux dépenses effectivement engagées mais non encore ordonnancées."

Pour 1997, les reports se sont établis à 57,42 milliards de francs (soit + 3,7 % par rapport aux crédits de 1995 reportés sur 1996).

Sur proposition du gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté deux modifications à cet article. Elle a tout d'abord réinscrit à l'État H le

FARIF (Fonds pour l'Aménagement de l'Ile-de-France), dont l'absence résultait d'une erreur matérielle. Sur le budget "Poste, télécommunications et espace", elle a ensuite inscrit le chapitre 37-10 "dépenses diverses de fonctionnement de l'Autorité de régulation des télécommunications".

Sur ce dernier point, le Secrétaire d'État au budget a précisé :

" Le projet de loi de finances rectificative qui vous sera soumis dans les prochaines semaines comportera des crédits destinés au déménagement de l'Autorité de régulation des télécommunications. Dès lors, un report de ceux qui sont inscrits en loi de finances initiale semble un gage d'efficacité ."

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

ARTICLE 48 - Approbation de la répartition du produit de la redevance et approbation du produit attendu des recettes publicitaires des organismes du secteur public de la communication audiovisuelle

Cet article a été commenté dans le rapport spécial établi par M. Jean Cluzel (annexe n° 7 au rapport n° 85 de la commission des finances) au titre des crédits de la communication audiovisuelle.

TITRE II - DISPOSITIONS PERMANENTES

A. Mesures fiscales

ARTICLE 49 - Institution d'un crédit d'impôt à raison des dépenses d'entretien de l'habitation principale

Commentaire : le présent article crée un crédit d'impôt sur le revenu portant sur les dépenses de travaux d'entretien et de revêtement de surfaces, à l'exception des réparations locatives, effectués dans la résidence principale. Ce dispositif est un substitut à l'application du taux réduit de TVA sur les travaux portant sur les logements existants, impossible en l'état actuel du droit communautaire. L'Assemblée nationale a relevé les plafonds de dépenses initialement prévus .

I - CHAMP D'APPLICATION

Le présent dispositif s'applique à tous les contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu (qui doivent déclarer leur revenu à ce titre), qu'ils soient propriétaires ou locataires de leur logement.

Il concerne la résidence principale lorsqu'elle est située en France ,

ce qui est traditionnel pour les avantages fiscaux relatifs au logement. La condition d'ancienneté de l'immeuble, deux ans, est plus nouvelle : aucun avantage fiscal ne concernait jusqu'alors l'immobilier ancien récent. Cette condition interdit de bénéficier de l'avantage fiscal pour des travaux consécutifs à une construction ou reconstruction, mais pas, semble-t-il, en cas d'agrandissement .

La consistance précise des travaux éligibles est plus difficile à cerner, et ne sera connue avec précision que lors de la publication de l'instruction fiscale d'application.

Le présent article prévoit que ces travaux doivent être de deux sortes :


• Il peut s'agir de dépenses d'entretien, actuellement exclues des autres avantages fiscaux, notamment de la réduction d'impôt pour grosses réparations prévue par l'article 199 sexies D du code général des impôts.

Ces dépenses d'entretien sont celles qui "ont pour objet de maintenir un immeuble en bon état et d'en permettre un usage normal sans en modifier la consistance, l'agencement ou l'équipement initial" 1 ( * ) .

Toutefois, au sein des dépenses d'entretien, seules celles qui seraient à la charge du propriétaire si l'immeuble était loué sont éligibles au dispositif. Il s'agit de charges déductibles du revenu brut foncier. Les réparations locatives (au sens de l'article 1754 du code civil) qui seraient à la charge du locataire et qui ne sont pas en principe déductibles du revenu foncier, en sont exclues (décret n° 87-713 du 26 août 1987).

Parmi les travaux d'entretien, seuls les plus gros sont donc concernés : par exemple le changement d'un appareil sanitaire (et non le remplacement d'un joint de plomberie) ; le remplacement d'une fenêtre (et non le remplacement du mastic ou d'un carreau cassé) ; la réfection partielle de l'installation électrique (et non le remplacement d'un interrupteur, d'une prise de courant ou d'une baguette de protection des fils électriques).

Sont également concernés les travaux de réparation d'éléments ajoutés à la suite de dépenses d'amélioration. Toutefois, les dépenses d'amélioration elles-mêmes ne sont pas concernées ; elles peuvent bénéficier de la réduction d'impôt pour gros travaux visée par l'article 199 sexies D. Ainsi la réparation d'un interphone pourrait bénéficier de la mesure, mais pas la pose d'un interphone neuf.


• Il peut également s'agir de dépenses de revêtement des surfaces . Seules ces dépenses peuvent en fait concerner aussi le locataire. Il s'agit des revêtements muraux : papiers peints, tapisseries, carreaux, peintures... Il s'agit aussi des revêtements de sol : parquet, moquette, carrelage.

Le partage entre opérations éligibles et opérations non éligibles sera facilité par l'obligation incombant au contribuable souhaitant bénéficier du crédit d'impôt, de produire des factures des entreprises ayant réalisé les travaux à l'appui de sa déclaration de revenus. Ces factures devront indiquer l'adresse de réalisation des travaux, leur nature et leur montant.

En effet, la plupart du temps, les occupants d'une résidence principale ne recourent pas à une entreprise pour leurs plus menus travaux.

II. MODALITÉS D'APPLICATION DU CRÉDIT D'IMPÔT

Le plafond de dépenses était initialement fixé à 4.000 F pour une personne célibataire, veuve ou divorcée, et 8.000 F pour un couple marié soumis à imposition commune.

L'Assemblée nationale a porté ces plafonds à respectivement 5.000 F et 10.000 F et elle y a ajouté des majorations pour personnes à charge, comme cela existe pour de nombreux avantages fiscaux du même type : 500 F par personne à charge (premier enfant, adulte ou enfant handicapé, jeunes adultes ou étudiants rattachés au foyer fiscal, enfants mariés rattachés au foyer fiscal) ; portés à 750 F pour le second enfant et à 1.000 F par enfant à partir du troisième.

Le crédit d'impôt est lui-même de 15 % de la dépense éligible sous plafond.

Contrairement au régime de la réduction d'impôt pour dépenses de gros travaux, ce plafond n'est pas global sur la période considérée (1er janvier 1998 au 31 décembre 2000), mais annuel . Par conséquent, chaque contribuable verra son droit à avantage fiscal se renouveler chaque année pendant trois ans.

Ainsi, pour un couple marié ayant deux enfants, le plafond pourra atteindre 11.250 francs chaque année pendant trois ans, et l'avantage fiscal, égal à 15 % de cette somme, 1.687,50 F chaque année ; soit au total 5.062,50 F sur la période.

Par comparaison, dans le cas de la réduction d'impôt pour gros travaux, l'avantage fiscal maximal de cette famille serait de 8.900 francs globalement sur une période allant du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2001 (soit 5 ans) 2 ( * ) .

Le crédit d'impôt s'impute sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses ont effectivement été payées .

Cette imputation se fait de façon ultime, après :

- les réductions d'impôt ;

- l'avoir fiscal ;

- les autres crédits d'impôt ;

- les prélèvements et retenues libératoires.

Après imputation, la caractéristique essentielle du crédit d'impôt est que la somme résultant de son calcul bénéficie en tout état de cause au contribuable : si l'impôt dû est supérieur, il opère comme une réduction d'impôt, si l'impôt dû est inférieur, la différence est restituée, y compris si l'impôt est nul ou négatif.

Comme toujours, pour ce type d'avantage fiscal, il n'est pas cumulable avec les réductions d'impôt du même type, à savoir celle concernant la résidence principale (article 199 sexies) et les gros travaux (article 199 sexies D). Il ne sera donc pas possible de faire jouer les deux avantages en complément : la réduction d'impôt pour les gros travaux et le crédit d'impôt pour les petits travaux connexes à ces gros travaux.

De façon classique aussi, l'avantage fiscal est rappelé si une condition cesse d'être remplie.

III. PORTÉE ET APPRÉCIATION

Ce dispositif est un substitut à une application du taux réduit de la TVA sur les travaux relatifs à la résidence principale .

En effet, le calcul du taux de réduction a été réalisé pour effectuer une sorte de remboursement de la TVA au contribuable. La TVA représente en effet 17,1 % du coût TTC d'une opération, que le gouvernement a arrondi à 15 % pour simplifier.

Le crédit d'impôt est moins rationnel que ne le serait une baisse du taux de la TVA, en particulier selon la logique que souhaite appliquer le gouvernement :


• il établit une nouvelle petite niche fiscale au sein de l'impôt sur le revenu. La commission DUCAMIN avait en son temps considéré que ce type d'avantage, aussi coûteux globalement pour le budget de l'État que modique individuellement pour chaque contribuable, devrait être supprimé au profit d'un impôt sur le revenu à taux plus bas et à assiette élargie.


• une baisse de la TVA contribuerait au rééquilibrage, souhaité par le gouvernement, entre la fiscalité directe et la fiscalité indirecte ; alors que le crédit d'impôt accentue le déséquilibre ;


• son application sera plus complexe et délicate que ne le serait une baisse du taux de TVA sur l'entretien et le revêtement des logements.

Toutefois, le crédit d'impôt a été préféré à l'application du taux réduit de la TVA pour deux raisons essentielles.

La première est que l'état actuel du droit communautaire ne permet pas une telle extension. L'annexe à la sixième directive TVA précise que le taux réduit n'est applicable qu'aux logements construits ou réhabilités "dans le cadre de la politique sociale."

La seconde est que le crédit d'impôt peut être assorti de plafonds modestes (c'est le cas), et donc se révéler moins coûteux pour les finances publiques. Le rapport du groupe de travail du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie relatif aux possibilités d'évolution des taux de TVA estime ainsi à 21 milliards de francs la perte de TVA occasionnée par une extension du taux réduit aux travaux de toute nature sur les logements existants. Le coût du crédit d'impôt était quant à lui estimé à 1,1 milliard de francs en 1999 dans la version initiale du gouvernement. Les amendements votés par l'Assemblée nationale portent ce coût à 1,38 milliard de francs, qui peut s'analyser ainsi :

- le relèvement des plafonds à 5.000 F et 10.000 F représente un surcoût de 200 millions de francs ;

- la majoration pour charges de famille représente un surcoût de 80 millions de francs.

Toutefois, ainsi que la commission européenne vient de le proposer à l'occasion du sommet sur l'emploi de Luxembourg (20 et 21 novembre), la piste à explorer paraît bien celle d'une réduction du taux de TVA sur l'ensemble des travaux de "rénovation et de réparation de logements", car une telle mesure aurait un fort contenu en emplois et serait plus adaptée à la nature actuelle des besoins des économies européennes, dont le parc de logements a basculé d'une phase de reconstruction dans une phase de rénovation et de renouvellement.

Le gouvernement estime que 1.200.000 contribuables sont susceptibles de bénéficier de cette mesure chaque année, les travaux éligibles s'élevant en moyenne à 9.900 F pour les propriétaires et à 5.600 F pour les locataires.

Comme la réduction d'impôt pour gros travaux, ce dispositif peut être considéré surtout comme une tentative de lutte contre le travail au noir, l'établissement de factures étant nécessaire pour bénéficier du crédit d'impôt. À cet égard toutefois, le groupe de travail précité considère que la tentation du travail clandestin dans l'artisanat du bâtiment n'est pas seulement motivée par le poids de la TVA, mais aussi et surtout par celui des charges sociales, problème auquel le nouveau crédit d'impôt n'apporte pas de réponse.

Mais évidemment, pour appliquer le taux réduit de TVA sur les travaux de bâtiment et pour réduire les charges sociales pesant sur les entreprises, il est nécessaire, au préalable, de réduire de façon nette les dépenses publiques et sociales .

À défaut, et en attendant, il faut se contenter de ce crédit d'impôt, qui n'est qu'un pis aller.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article dans la rédaction de l'Assemblée nationale .

ARTICLE 49 bis - Missions du Fonds de gestion de l'espace rural

Commentaire : cet article additionnel, adopté sur l'initiative de M. Augustin Bonrepaux, vise à revenir à la première définition, extensive, des missions du FGER en abrogeant la seconde, plus restrictive, qui avait fait l'objet d'un article de la loi de finances pour 1997 .

I. LES DOTATIONS BUDGÉTAIRES DU FGER

Créé par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995 (loi "Pasqua") le FGER ne dispose pas de la personnalité morale. C'est un chapitre dans la nomenclature du ministère chargé de l'agriculture (chapitre 44-83). Sa mission fondamentale est "l'entretien et la réhabilitation de l'espace rural". Ses crédits sont pour essentiel répartis entre les départements sur la base de critères "prenant en compte la superficie dont sont déduites les surfaces consacrées au bâti, aux infrastructures, à un usage forestier essentiellement productif ainsi que les surfaces consacrées à un usage agricole autres que celles toujours en herbe" et sont alors mis en oeuvre dans le cadre d'orientations pluriannuelles départementales définies après consultation d'une commission départementale de gestion de l'espace (CODEGE).

Depuis sa création, le Fonds de Gestion de l'Espace Rural (FGER) a connu des fortunes diverses, les crédits étant faiblement consommés pour être reportés ou annulés.

(en millions de francs)

Année

LFI

Annulation crédits

Crédits ouverts

Crédits consommés

1995

500

164

335

51

1996

388

170

502

199

1997

150

145

308

n.d.

Notre rapporteur spécial pour les crédits de l'agriculture, M. Joël Bourdin, a estimé que ces crédits pourraient être utilisés plus efficacement s'ils étaient regroupés au sein d'autres procédures d'aménagement rural. Toutefois, il apparaît qu'en 1996 près d'un tiers des actions du FGER ont été conduites en synergie avec d'autres dispositifs (plans de développement rural, OGAF, programmes Leader). Il serait souhaitable que cette tendance se poursuive. Mais des crédits ouverts de 308 millions de francs pour 98 attributaires (départements et collectivités d'Outre-mer) ne représentent qu'une somme moyenne de 3,1 millions de francs par département.

L'annulation, en juillet 1997, de 145 millions de francs sur la dotation du FGER apparaît d'autant plus surprenante qu'elle correspond presque exactement à la majoration de 150 millions de francs de crédits opérée à l'Assemblée nationale (100 millions) et au Sénat (50 millions).

La dotation ouverte pour 1998 s'établit à 140 millions de francs. Les précédents ci-dessus rappelés ne permettent pas d'anticiper sur le montant des crédits qui seront effectivement consommés. Si l'on estime à 250 millions les crédits qui pourraient être effectivement utilisés en 1997 (199 en 1996), les crédits disponibles en 1998 seraient en baisse (58 de reports + 140 de dotation initiale).

II. LES MISSIONS DU FGER

L'article L 112-16 du code rural dispose que : " le FGER contribue au financement de tout projet d'intérêt collectif concourant à l'entretien ou à la réhabilitation de l'espace rural et dont les agriculteurs ou leurs groupements sont parties prenantes . "

En effet, l'année dernière, sur l'initiative de la commission des Finances de l'Assemblée Nationale, le Parlement a adopté un article additionnel modifiant l'article L 112-16 du code rural afin de mieux déterminer les compétences du FGER. Au lieu de considérer que le fonds devait être " en priorité affecté aux agriculteurs " , l'Assemblée Nationale avait souhaité disposer que le fonds ne devait financer que des projets " dont les agriculteurs... sont parties prenantes " .

L'article en question ayant été "rattaché" aux crédits de l'agriculture, cette modification rédactionnelle n'avait pas emporté la pleine adhésion de votre rapporteur spécial, M. Joël Bourdin, qui avait souligné que :

" Cet article, qui n'a pas clairement sa place en loi de finances, remplace assez subtilement une "priorité" par des "parties prenantes", afin de renforcer la vocation agricole du fonds. Comme l'a indiqué le ministre : "il n'était pas apparu souhaitable d'accorder une exclusivité aux agriculteurs, le cadre global de la gestion de l'espace rural allant au-delà du monde agricole " . Cette rédaction pourrait présenter l'inconvénient de faire apparaître le FGER comme un simple démembrement du budget de l'agriculture et souligner son absence de spécificité, et partant, justifier la disparition progressive de ses crédits.

L'Assemblée Nationale, en votant cette année un article additionnel après l'article 49, se propose de revenir au texte initial de l'article L 112-16, qui n'est autre que le texte figurant dans la loi "Pasqua" sur l'aménagement du territoire.

Le Gouvernement n'a toutefois pas jugé cet article additionnel très opportun . Le Secrétaire d'État au budget a notamment déclaré :

" Il se pose un problème juridique et un problème pratique.

Le problème juridique, d'abord. Si l'on étend le champ de ce fonds sans inscrire de crédits nouveaux, c'est-à-dire si l'on reste à enveloppe constante, cela pose un problème vis-à-vis de la loi de finances.

Un problème pratique, ensuite -et c'est là l'essentiel. À cet égard, je renouvelle l'engagement du ministre de l'agriculture et du ministre de l'aménagement du territoire de faire en sorte que les crédits de ce fonds soient utilisés intégralement. Le Gouvernement n'a pas la volonté -ni implicite ni a fortiori explicite- de réduire les crédits du fonds de gestion de l'espace rural.

Dans les espaces ruraux, il y a toujours un agriculteur à proximité.

Je pense qu'on peut, dans le cadre actuel, faire beaucoup plus que ce qu'a fait la majorité précédente. C'est pourquoi je conseille le retrait de cet amendement. À défaut, j'en demanderai le rejet."

Bref, en 1996 le gouvernement n'était pas d'accord avec sa majorité à l'Assemblée Nationale qui entendait recentrer l'action du FGER, alors qu'en 1997 le nouveau gouvernement n'est pas non plus d'accord avec sa majorité à l'Assemblée Nationale qui souhaite élargir les compétences du même FGER... Il convient toutefois de noter l'engagement ferme du gouvernement de ne procéder à aucune régulation sur les crédits du FGER .

III. PRENDRE LE TEMPS DE LA RÉFLEXION...

Deux versions sont en présence, la version "rurale" assez extensive et la version "agricole", plus restrictive. Le comparatif ci-dessous éclaire ce débat, somme toute confus.

Texte voté par l'Assemblée nationale

Texte en vigueur

Art. L. 112-16 - Le fonds de gestion de l'espace rural contribue au financement de tout projet d'intérêt collectif concourant à l'entretien ou à la réhabilitation de l'espace rural. Il doit être en priorité affecté aux agriculteurs ou à leurs groupements.

Le fonds de gestion de l'espace rural contribue au financement de tout projet d'intérêt collectif concourant à l'entretien ou à la réhabilitation de l'espace rural et dont les agriculteurs ou leurs groupements sont parties prenantes .

La conviction de votre rapporteur général est que cet article n'a pas vocation à être débattu au détour d'un article additionnel d'une loi de finances. Il appelle une concertation approfondie entre tous les acteurs du développement rural. Compte tenu de la modestie relative des dotations, il n'y a pas lieu de craindre des reliquats en 1998, à la condition bien entendu que les crédits soient délégués rapidement sans arrière-pensée de régulation implicite. Enfin, la perspective proche du dépôt d'un projet de loi d'orientation agricole ne saurait conduire le Parlement à voter un article à durée de vie courte.

Décision de la commission : dans l'attente de l'examen du projet de loi d'orientation agricole, votre commission vous propose de supprimer cet article .

ARTICLE 50 - Création de bons de souscription de parts de créateur d'entreprise

Commentaire : cet article tend à créer un nouveau mécanisme d'intéressement du personnel salarié à la valorisation du capital de la société qui les emploie. Ce mécanisme, fiscalement favorisé mais socialement peu incitatif, serait réservé aux entreprises non cotées de création récente et soumis à un certain nombre de conditions restrictives par rapport au régime existant des plans d'options de souscription ou d'achat d'actions .

I. UN PALLIATIF AU DÉCLIN DES OPTIONS DE SOUSCRIPTION OU D'ACHAT D'ACTIONS

Le régime des plans d'options de souscription ou d'achat d'actions a connu une évolution défavorable depuis deux ans :

- la loi de finances pour 1996 a relevé de 16 % à 30 % le taux d'imposition du gain en plus-value réalisé grâce aux options sur actions ;

- la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 a soumis à cotisations sociales ce gain, lorsque la condition d'indisponibilité des titres pendant cinq ans à compter de l'attribution de l'option n'est pas respectée.

Ainsi, le système des plans d'options de souscription ou d'achat d'actions a perdu beaucoup de son intérêt par rapport à une rémunération classique, alors qu'il comporte pour ses bénéficiaires des risques et des contraintes particulières.

Or, ce mécanisme de gain différé est indispensable pour les entreprises qui se créent et se développent . En effet, ces entreprises ont besoin de personnel très qualifié et motivé, sans avoir dans l'immédiat les moyens de lui offrir des rémunérations suffisamment attractives.

La solution la plus simple consisterait à redonner un tour plus favorable au régime fiscal et social des plans d'options sur actions, en revenant sur les dernières modifications qui lui ont été apportées .

Toutefois, le Gouvernement a préféré mettre en place un mécanisme entièrement nouveau , réservé à certaines entreprises et assorti de conditions restrictives.

II. LE MÉCANISME PROPOSÉ

Le mécanisme proposé emprunte la technique des bons de souscription de titres prévus par l'article 339-5 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales.

Les bénéficiaires de ces bons, qualifiés pompeusement et de façon assez impropre de " bons de souscription de parts de créateur d'entreprise " , seront les salariés de la société et ses dirigeants soumis au régime fiscal des salariés.

Les sociétés concernées seront les sociétés non cotées créées depuis moins de sept ans . le texte initial du Gouvernement prévoyant cinq ans seulement. Par ailleurs, ces sociétés de création récente devront satisfaire un certain nombre de conditions :

1. Ne pas exercer une activité bancaire, financière, d'assurances, de gestion ou de location d'immeubles.

2 . Être passible en France de l'impôt sur les sociétés, ce qui exclut les sociétés étrangères exerçant leur activité sur le territoire national.

3 . Être détenue directement et de manière continue pour 75 % au moins par des personnes physiques ou par des personnes morales détenues par des personnes physiques. Toutefois, les participations des divers organismes intervenant en matière de capital-risque ne sont pas prises en compte pour cette condition, dès lors qu'elles restent minoritaires (sociétés de capital risque, sociétés de développement régional, sociétés financières d'innovation, fonds communs de placement à risques, fonds communs de placement dans l'innovation).

4. Ne pas avoir été créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension ou de la reprise d'activités préexistantes. Il doit donc s'agir d'activités entièrement nouvelles, notion qui fait l'objet d'interprétations diverses et donne lieu à beaucoup de contentieux fiscal.

Le mécanisme des bons est comparable à celui des options d'achat ou de souscription d'actions. Le bon, qui est incessible, ouvre à son bénéficiaire le droit de souscrire les titres de la société à un prix fixé lors de son attribution .

Le bénéficiaire pourra donc réaliser une plus-value si la valeur de la société a augmenté entre le moment de l'attribution du bon et le moment de la revente des titres correspondants. Il convient toutefois de souligner qu'il s'agit de titres par définition peu liquides, puisque non cotés.

Le régime fiscal proposé est avantageux : les gains réalisés seraient imposés selon le taux proportionnel de 16 % applicable aux plus-values de cession de valeurs mobilières.

Ce taux est a priori plus favorable que le barème de l'impôt sur le revenu applicable aux rémunérations, mais aussi que le taux spécifique de 30 % applicable aux gains sur options de souscription ou d'achat d'actions.

Toutefois, ce taux de 30 % serait applicable lorsque le bénéficiaire exerce son activité dans la société depuis moins de trois ans, le texte initial du Gouvernement prévoyant une condition de deux ans seulement.

Par ailleurs, à la différence des options sur actions, le bénéfice de ce régime fiscal favorable n'est assorti d'aucune durée d'indisponibilité des titres . Les droits afférents aux bons peuvent donc être exercés dès leur attribution. Néanmoins, dans la mesure ou il n'est pas permis d'accorder de rabais sur la valeur des titres lors de l'attribution des bons, leurs bénéficiaires seront en pratique contraints d'attendre le temps nécessaire à la valorisation de la société avant de pouvoir réaliser une plus-value.

Un décret est prévu pour préciser les modalités d'application du présent article, ce qui effectivement ne semble pas inutile, compte tenu de sa complexité et de ses ambiguïtés.

Enfin, le dispositif ne serait institué qu'à titre provisoire, pour une période de deux ans. jusqu'au 31 décembre 1999. Le Gouvernement estime en effet prudent d'examiner alors s'il y a lieu de prolonger la mesure, en la modifiant le cas échéant.

III. - LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

La mesure proposée par le Gouvernement apparaît inutilement complexe , avec un champ restreint et une multiplicité de conditions qui en réduiront la portée, induiront des effets de seuil et généreront vraisemblablement des contentieux. Elle sera également perçue comme fragile par les entreprises, puisque très provisoire et a priori suspecte aux yeux du Gouvernement.

Cette mesure a du moins le mérite de réhabiliter le mécanisme des options d'achat ou de souscription d'actions, dont elle n'est qu'un succédané . Le Gouvernement reconnaît ainsi les vertus de ce mécanisme, qui a été beaucoup décrié mais apparaît irremplaçable pour les entreprises nouvelles et en développement. Il aurait d'ailleurs été mieux inspiré, pour mettre en place une mesure réservée à certaines entreprises, de partir de ce dispositif qui a fait ses preuves et est bien connu des sociétés.

Toutefois, le système proposé apparaît pour l'instant fort peu attractif, car il ne prévoit pas d'exonération de cotisations sociales pour la plus-value réalisée par les bénéficiaires des bons . Comme l'indique le rapporteur général de l'Assemblée nationale 3 ( * ) , " en l'absence de disposition expresse, elle devrait être assimilée à un salaire par le droit de la sécurité sociale puisqu'afférente à un travail fourni dans la société. Si tel était le cas, il est à craindre que le présent dispositif ne soit privé de portée pratique " . Cette exonération existe toujours pour les options de souscription ou d'achat d'actions dès lors que le délai d'indisponibilité de cinq ans est respecté, ce qui est le cas le plus fréquent.

Votre commission des finances demeure très réservée sur le bien-fondé et sur le caractère réellement attractif d'un dispositif aussi complexe et restrictif .

Néanmoins, dans la mesure où il s'agit de l'une des rares mesures prétendument favorables aux entreprises du présent projet de loi de finances, elle vous propose d'accepter sa mise en place, en lui apportant des améliorations sur quatre points .

1. Le premier amendement proposé par votre commission des finances a pour objet de supprimer le régime moins favorable prévu pour les salariés présents dans l'entreprise depuis moins de trois ans, qui seraient imposés au taux de 30 % au lieu de 16 %.

Cette différence de traitement entre les salariés selon leur ancienneté, dont l'opportunité est discutable, aura vraisemblablement des effets pervers.

Par ailleurs, cette clause apparaît contreproductive, car elle ne s'applique par définition qu'aux salariés demeurés dans l'entreprise. Or, une personne quittant l'entreprise gardera évidemment le bénéfice des bons de souscription qui lui auront été attribués, et pourra les céder aussitôt dans les conditions les plus favorables. Ainsi, ce dispositif, qui vise à encourager la fidélité à l'entreprise, apparaît plutôt de nature à la pénaliser .

2. Le deuxième amendement tend à étendre le bénéfice de la mesure aux sociétés créées par voie d'essaimage , lorsqu'une équipe de cadres et de chercheurs se met à son compte pour reprendre une activité non stratégique de leur entreprise, avec le soutien financier de celle-ci. Le régime fiscal de l'essaimage est fixé à l'article 39 quinquies H du code général des impôts.

Cette extension du champ de la mesure a déjà été proposée à l'Assemblée nationale par le rapporteur général de la commission des finances. Mais elle n'a pas été votée par les députés, sur l'assurance du ministre que l'instruction d'application le prévoirait.

Pour sa part, votre commission des finances ne conçoit pas comment un texte réglementaire d'application pourrait admettre une extension de champ clairement contraire au texte du projet de loi qui, dans sa rédaction actuelle, exclut toute activité qui n'est pas réellement nouvelle . En effet, les entreprises créées par voie d'essaimage sont par définition l'extension ou la reprise d'activités existantes, puisqu'elles sont constituées par le personnel d'une entreprise "souche", dont elles reprennent une activité expérimentale ou marginale pour la développer.

3. Le troisième amendement est rédactionnel . Le texte actuel du paragraphe III du présent article, relatif aux modalités de fixation du prix des bons, est ambigu, puisqu'il implique que l'entreprise a dans tous les cas procédé à une augmentation de capital dans les six mois précédents.

Or, il ne s'agit là que d'une hypothèse qui, si elle est vérifiée, lie l'assemblée générale pour la fixation du prix de souscription des titres attaché au bon. Dans l'hypothèse inverse, l'assemblée générale est libre de fixer ce prix comme elle l'entend, sous le contrôle des commissaires aux comptes.

4. Le quatrième amendement supprime le caractère provisoire du dispositif. En effet, le législateur demeure toujours libre de modifier ou d'abroger des dispositions votées, sans qu'il soit nécessaire d'afficher par avance leur péremption .

De toute façon, la période de deux ans envisagée apparaît bien trop courte pour que le dispositif puisse faire l'objet d'une évaluation, et semble plutôt marquer les réticences du Gouvernement à l'égard du dispositif qu'il propose. Cet affichage sera désastreux pour les entreprises existantes, et surtout pour les candidats à la création qui n'en sont encore qu'au stade du projet : il serait bien imprudent de leur part d'intégrer dans leurs calculs un dispositif aussi périssable .

Par ailleurs, il apparaît inutile de préciser que les bons de souscription pourront être attribués à compter du 1er janvier 1998, puisque cette date correspond à l'entrée en vigueur de la loi qui les créé. Il semble également inutile de préciser que les entreprises ne pourront plus attribuer de bons lorsqu'elles auront dépassé la durée d'existence prévue à compter de leur création. Ce délai n'est d'ailleurs plus de cinq ans, mais de sept ans, suite à l'amendement voté par les députés.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 50 - Retour au taux d'imposition de droit commun pour les plus values sur options de souscription ou d'achat d'actions

Commentaire : cet article additionnel tend à revenir au taux d'imposition de droit commun de 16 % pour les plus-values réalisées grâce à des options de souscription ou d'achat d'actions. Ce taux avait été porté à 30 % par la loi de finances pour 1996.

I. LE MÉCANISME DES PLANS D'OPTIONS SUR ACTIONS

Directement inspiré du "stock options plan" anglo-saxon, le plan d'options sur actions a été introduit en droit français par une loi du 31 décembre 1970, qui a complété la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales par les articles 208-1 à 208-8 relatifs aux options de souscription ou d'achat d'actions.

Il s'agit d'une forme mixte d'intéressement et de participation au capital, dans laquelle l'entreprise consent à son personnel le droit d'acquérir ses propres actions à des conditions privilégiées, lui offrant ainsi l'opportunité de réaliser une plus-value spécifique.

Son principe est simple. Le mécanisme s'inscrit dans le temps pour se décomposer en trois étapes bien distinctes.

1. L'attribution : la société attribue au bénéficiaire le droit, pendant une période donnée, de se porter acquéreur d'un certain nombre de titres à un prix déterminé. Ce prix, éventuellement inférieur au prix du marché, reste fixe pendant toute la période durant laquelle le droit, ou "option", est ouvert au bénéficiaire.

2. La levée : le bénéficiaire choisit de "lever" l'option qui lui a été attribuée, c'est-à-dire d'exercer son droit d'acquisition. Bien entendu, il n'a intérêt à le faire que si le cours, pour les actions cotées, ou la valeur, pour les actions non cotées, se sont maintenus ou ont progressé au-delà du prix invariable initialement fixé lors de l'attribution de l'option : il réalise alors une plus-value dite d'acquisition . Cette étape implique pour lui une sortie de fonds, puisqu'il doit payer au prix convenu les actions sur lesquelles portait son option.

3. La cession : le bénéficiaire revend les actions qu'il a acquises sur option. Ce n'est qu'à ce stade qu'il rentre dans ses fonds et que la plus-value d'acquisition, jusque là virtuelle, se concrétise. Il peut par ailleurs réaliser une plus-value supplémentaire, dite de cession, si la valeur des actions a continué de s'apprécier depuis la levée de l'option.

Cette troisième et dernière étape constitue le fait générateur de l'impôt pour l'ensemble du processus.

Ainsi, le gain retiré d'un plan d'options sur actions est différé, aléatoire et lié à la contribution des bénéficiaires à la prospérité de l'entreprise. Ces trois caractéristiques font du plan d'options sur actions un instrument remarquablement efficace de motivation et de fidélisation des cadres supérieurs et dirigeants des sociétés .

Comme les autres mécanismes d'intéressement et de participation, le plan d'options sur actions bénéficie d'un régime fiscal et social avantageux.

II - UN RÉGIME FISCAL ET SOCIAL AVANTAGEUX MAIS MENACÉ

A. POUR LA SOCIÉTÉ

Indépendamment de son pouvoir de motivation du personnel, le plan d'options sur actions est une forme de rémunération particulièrement intéressante pour l'entreprise au regard de l'impôt et des cotisations sociales.

Tout d'abord, l'avantage représenté par la plus-value d'acquisition (différence entre le prix de souscription ou d'achat et la valeur réelle de l'action à la date de la levée de l'option) est exonérée des cotisations patronales de sécurité sociale ainsi que de toutes taxes assises sur les salaires .

Toutefois, cette exonération ne suffirait pas à rendre les plans d'option plus avantageux pour la société que les formes classiques de rémunération si leurs coûts afférents n'étaient pas fiscalement considérés comme des charges déductibles du résultat imposable.

Tel n'était pas le cas dans le régime initial des plans d'options sur actions, et cette possibilité fondamentale de déduction a été introduite par la loi du 9 juillet 1984 sur le développement de l'initiative économique. Ainsi, l'article 217 quinquies du code général des impôts tel qu'il résulte de cette loi, dispose que "pour la détermination de leurs résultats fiscaux, les sociétés peuvent déduire les charges exposées du fait de la levée des options de souscription ou d'achat d'actions consenties à leurs salariés". C'est-à-dire :

- les frais de rachat des titres destinés à être remis au personnel, lorsqu'il s'agit d'options d'achat ;

- les frais d'augmentation de capital, lorsqu'il s'agit d'options de souscription ;

- les frais de gestion des actions rachetées ou émises jusqu'à la date de levée de l'option ;

- et surtout, les moins-values résultant pour la société de la différence entre le prix d'achat et la valeur réelle des actions.

Le coût des plans d'options sur actions se trouve ainsi fiscalement neutralisé pour la société qui recourt à cet instrument .

B. POUR LE BÉNÉFICIAIRE

En principe, la plus-value d'acquisition réalisée par le bénéficiaire d'une option est considérée comme un complément de salaire et soumise comme tel à l'impôt sur le revenu (article 80 bis I du code général des impôts). La taxation de cet avantage n'a pas lieu lors de la levée de l'option, mais lors de la cession des actions. Il est alors fait application d'un système de quotient destiné à atténuer les effets de la progressivité de l'impôt, qui prend en compte le nombre d'années entières écoulées entre la date d'attribution de l'option et la date de cession des titres (article 163 bis C II du code général des impôts).

Toutefois, l'avantage peut être soumis à un régime d'imposition plus favorable, sous réserve de deux conditions (article 163 bis C I du code général des impôts).

Toutefois, l'avantage peut être soumis à un régime d'imposition plus favorable, sous réserve de deux conditions (article 163 bis C I du code général des impôts) :

- les actions acquises doivent revêtir la forme nominative ;

- elles doivent demeurer indisponibles pendant une période de cinq années à compter de la date d'attribution de l'option (et non de sa levée).

Si ces deux conditions sont remplies, la plus-value d'acquisition est taxée, toujours lors de la cession des titres, selon le régime des plus-values mobilières, au taux de 16 % .

Il est prévu par ailleurs un certain nombre de cas de force majeure où le possesseur d'actions acquises sur options peut exceptionnellement disposer de ses titres avant l'expiration du délai d'indisponibilité de cinq ans, sans perdre pour autant le bénéfice de ce régime d'imposition conditionné.

Ces hypothèses correspondent à certaines de celles qui autorisent le déblocage anticipé des fonds issus de la participation :

- licenciement du titulaire ;

- mise à la retraite du titulaire ;

- invalidité du titulaire ;

- décès du titulaire (au profit de ses héritiers).

Ce régime d'imposition est sensiblement plus avantageux que le précédent, puisque le taux d'imposition des plus-values mobilières est très inférieur au taux marginal d'impôt sur le revenu généralement atteint par les bénéficiaires d'options. Cela explique qu'en pratique la quasi-totalité des bénéficiaires d'options respectent le délai fiscal d'indisponibilité, pour se placer sous le régime d'imposition le plus favorable .

Enfin, l'avantage résultant de la levée d'options est exonéré de toute cotisation salariale de sécurité sociale. Il est en revanche soumis à la CSG, au titre des revenus salariaux ou au titre des revenus du patrimoine, selon les cas.

C. UNE ÉVOLUTION RÉCENTE DÉFAVORABLE

Depuis son instauration par la loi n° 70-1322 du 31 décembre 1970, le mécanisme des options de souscription ou d'achat d'actions a connu un amoindrissement progressif des avantages fiscaux qui lui sont attachés.

Exception notable en sens inverse, l'article 39 de la première loi de finances rectificative pour 1993 a supprimé le délai de portage d'un an entre la levée de l'option et la cession des titres, que devait respecter le bénéficiaire pour avoir droit au traitement fiscal le plus avantageux.

Mais depuis ce dernier assouplissement, toutes les évolutions de la législation fiscale et sociale applicable aux options de souscription ou d'achat d'actions se sont faites dans un sens moins favorable :

- l'article 49 de la loi portant diverses dispositions d'ordre social du 4 février 1995 a soumis aux cotisations sociales la part excédant 5 % du rabais consenti sur le prix de l'option par rapport au prix du marché ;

- l'article 70 de la loi de finances initiale pour 1996 a porté à 30 % le taux d'imposition applicable à la plus-value d'acquisition réalisée lors de la levée d'option ;

- l'article 11 de la loi de financement de la sécurité social pour 1997 a soumis aux cotisations sociales la plus-value d'acquisition lorsque le délai fiscal d'indisponibilité de cinq ans entre l'attribution de l'option et la cession des titres n'est pas respecté.

III - LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. UN OUTIL D'INTÉRESSEMENT TOUJOURS PERTINENT

Les arguments en faveur du mécanisme des stocks options sont bien connus et, en dépit des évolutions récentes, restent toujours valables :

- il s'agit d'un instrument particulièrement astucieux et efficace de fidélisation et de motivation des cadres d'une société, pour qui les systèmes classiques d'intéressement et de participation ne sont pas suffisamment incitatifs ;

- il s'agit d'un instrument taillé sur mesure pour les sociétés qui se créent ou innovent , dont le succès repose tout entier sur la motivation de leur personnel et qui recèlent un potentiel de valorisation considérable tout en ne pouvant pas offrir dans l'immédiat des rémunérations consistantes.

En fait, seules certaines dérives bien réelles du mécanisme des stocks options expliquent l'érosion récente des avantages fiscaux et sociaux qui lui sont attachés .

En effet, le rapport d'information de votre commission des finances publié en mai 1995 (n° 274, 1994-1995) a relevé, au-delà de certaines pratiques frauduleuses marginales - abus de droit et délits d'initiés - une tendance plus générale des sociétés à utiliser les options comme des substituts de rémunération , souvent en neutralisant le risque qui leur est inhérent.

Pour autant, le durcissement récent de la législation fiscale et sociale est sans doute allé trop loin . Avec un taux forfaitaire d'imposition de 40 % hors cotisations sociales éventuelles, il est désormais à peine plus intéressant d'être payé en stock options plutôt qu'en rémunérations, surtout si l'on raisonne en taux moyen et non pas en taux marginal, alors qu'il s'agit d'un avantage par définition aléatoire et différé dans le temps.

B. L'OPPORTUNITÉ DE REVENIR AU TAUX D'IMPOSITION DE DROIT COMMUN

Votre commission des finances vous propose de revenir sur l'aggravation récente de la fiscalité des options de souscription ou d'achat d'actions .

La loi de finances pour 1996 a prévu pour l'imposition des gains réalisés sur options de souscription ou d'achat d'actions un taux spécifique de 30 % , soit un taux presque double du taux de 16 % applicable aux plus-values sur cession de valeurs mobilières.

Votre commission des finances avait alors admis que ce taux majoré correspondait mieux à la nature mixte du gain résultant d'un plan de souscription ou d'achat d'actions, qui est à la fois une plus-value sur titre et un substitut de rémunération.

Toutefois, deux éléments nouveaux sont intervenus depuis :

- d'une part, la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 a soumis à cotisations sociales les gains sur options de souscription ou d'achat d'actions, lorsque le délai d'indisponibilité de cinq ans n'est pas respecté ;

- d'autre part, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 porte à 10% le total des prélèvements sociaux sur les revenus de placement. Le taux d'imposition total des gains sur options de souscription ou d'achat d'action serait ainsi de 40%, hors cotisations sociales éventuelles.

Le régime fiscal et social des plans d'options de souscription ou d'achat d'actions apparaît désormais exagérément restrictif au regard des objectifs de ce mécanisme et de son intérêt pour les entreprises. Votre commission des finances estime donc opportun de revenir, au moins sur le plan fiscal, au régime antérieur à 1996 .

Le coût réel de cette mesure est difficile à estimer, aucune information exhaustive n'existant sur le volume des plus-values sur options. Néanmoins, il est nul à moyen terme, dans la mesure où le nouveau taux de 30 % ne s'applique qu'aux options nouvellement attribuées, à compter du 20 septembre 1995 (cette rétroactivité de la mesure par rapport à l'entrée en vigueur de la loi de finances pour 1996 s'explique par le souci de prévenir tout effet d'aubaine à compter du moment où le relèvement de taux projeté a été rendu public). Compte tenu du délai d'indisponibilité de cinq ans, ce taux ne s'appliquera effectivement qu'à compter de septembre 2000, les options levées dans l'intervalle bénéficiant encore du taux de 16 % .

Au-delà de cette mesure, le rétablissement d'un meilleur équilibre entre les contraintes et les avantages du mécanisme peut seul mettre un terme à la tentation permanente de le remettre en cause. Cet équilibre justifie que le régime des stock options puisse être globalement plus favorable que les autres formes de rémunération et d'intéressement, qui ne comportent pas la même part d'incertitude et ne supposent pas le même investissement personnel.

Ce souci d'un régime mieux équilibré devrait conduire à favoriser le respect d'un code de bonne conduite par les entreprises, à renforcer la transparence du dispositif, et à réouvrir la réflexion sur le "délai de portage" supprimé en 1993.

En effet, seul le portage effectif des actions par le bénéficiaire pendant une certaine durée après la levée des options peut justifier, en pure logique fiscale , le traitement fiscal favorable du gain ainsi réalisé.

L'investissement personnel concret et le risque afférent de moins-value ultérieure justifie alors que ce gain soit considéré comme une plus-value sur valeurs mobilières , soumise à l'impôt sur le revenu à un taux proportionnel et exonérée de cotisations sociales, et non pas comme une rémunération . Or, la suppression du délai de portage permet aujourd'hui de revendre les actions le jour même où l'option est levée, sans aucune sortie effective de trésorerie, ni risque réel en capital pour le bénéficiaire.

De ce point de vue, l'assouplissement accordé en 1993 à vraisemblablement beaucoup contribué à ce que les gains sur options de souscription ou d'achat d'actions aient été depuis traités fiscalement et socialement comme une quasi-rémunération .

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter l'article additionnel qu'elle vous propose .

ARTICLE 50 bis - Abaissement du seuil d'imposition des gains nets en capital réalisés à l'occasion de cessions à titre onéreux de valeurs mobilières et de droits sociaux

Commentaire : le présent article, introduit à l'Assemblée nationale, abaisse à 50.000 francs le seuil d'imposition des gains nets en capital réalisés à l'occasion de cessions de valeurs mobilières, actuellement fixé à 100.000 francs .

I. LE DROIT EXISTANT

Conformément aux dispositions des articles 92 B, 92 J et 200 A du code général des impôts, les plus-values réalisées lors de la cession de valeurs mobilières cotées ou de titres assimilés 4 ( * ) sont taxées, sans option possible, au taux forfaitaire de 16 % dans le cadre de l'impôt sur le revenu (déclaration spécifique) dès lors que le montant des cessions est supérieur à un seuil fixé par le premier alinéa de l'article 92 B du code général des impôts. À ce premier prélèvement, s'ajoutent divers prélèvements sociaux dont les taux cumulés atteignent actuellement 4,9 % et qui devraient passer, avec l'adoption définitive du projet de loi de financement de la sécurité sociale, à 10 %. Comme en matière d'impôt sur le revenu, ces prélèvements sociaux ne s'appliquent que si le seuil d'imposition est franchi.

Toutefois, les gains nets retirés de la cessions des parts ou actions de fonds communs de placement ou de sociétés d'investissement à capital variable, principalement investis en titres de taux et qui ne distribuent pas intégralement leurs produits (OPCVM monétaires et obligataires de capitalisation) sont imposables, dans les mêmes conditions, quel que soit le montant des cessions, c'est à dire, dès le premier franc.

Le seuil de déclenchement de l'imposition est, depuis 1997, de 100.000 francs de cessions. En dessous de ce seuil les plus-values ne sont pas taxées ; au-dessus de ce seuil, elles sont taxées au premier franc .

Ce seuil s'appliquant à l'ensemble des valeurs mobilières et droits assimilés relevant du régime d'imposition prévu au I de l'article 92 B, il convient de prendre en compte les cessions afférentes aux titres d'OPCVM monétaires et obligataires de capitalisation pour apprécier l'imposition éventuelle des plus-values réalisées lors de la cession d'autres valeurs mobilières.

Supposons, par exemple, qu'un contribuable cède, en 1997, 70.000 F d'actions ou titres assimilés et 50.000 F de titres d'OPCVM monétaires et obligataires de capitalisation. Les plus-values afférentes à ces dernières sont en tout état de cause imposables ; celles se rapportant aux actions et obligations sont également taxables dès lors que le total des cessions de valeurs mobilières pour l'année 1997 (70.000 + 50.000) excède le seuil de 100.000 F.

Les pertes subies au cours d'une année sont imputables exclusivement sur les gains de même nature réalisés au cours de la même année ou des cinq années suivantes. Mais il est possible d'imputer des moins values réalisées lors de la cession d'OPCVM de capitalisation sur des plus-values de cessions d'actions et inversement.

II. LE DISPOSITIF PROPOSE

Dans le souci de " rééquilibrer la taxation des revenus du travail et des produits du capital " , l'article 50 bis, adopté à l'initiative de la commission des finances de l'Assemblée nationale, poursuit l'abaissement du seuil d'imposition des plus-values, déjà initié par le précédent Gouvernement, en le ramenant à 50.000 F par an à compter de l'imposition des revenus de 1998.

Cette mesure rapporterait environ 500 millions de francs au budget de l'État.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Quatre observations s'imposent :

En premier lieu, force est de constater que, en l'espace de quelques années, la taxation de droit commun des plus-values mobilières s'est considérablement alourdie. Cet alourdissement a porté aussi bien sur l'assiette que sur les taux de l'impôt :

S'agissant des taux , l'alourdissement a d'abord pris la forme d'un empilement des prélèvements sociaux, puis d'un relèvement de leurs taux :

- institution, en 1987, d'un prélèvement social de 1 % perçu au profit de la Caisse nationale d'allocation vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS) ;

- institution, en 1990, de la contribution sociale généralisée (CSG) dont le taux, initialement fixé à 1,1 %, a été porté à 2,4 % à compter du 1 er juillet 1993 puis à 3,4 % à compter du 1 er janvier 1997 ;

- institution, en 1996, de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) dont le taux est actuellement fixé à 0,5 %.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale, actuellement en fin d'examen par le Parlement, accentue considérablement cette évolution, puisque, d'une part, il substitue au prélèvement de 1 % CNAV, un nouveau prélèvement social de 2 % et, d'autre part, augmente le taux de la CSG de 3,4 % à 7,5 %.

IMPOSITION ACTUELLE

Prélèvements produits

1 % CNAV

CSG

CRDS

Total prélèvements sociaux

Impôt sur le revenu

TOTAL

Plus-values sur titres (actions et obligations)

1 %

3,4 %

0,5 %

4,9 %

Taxation forfaitaire au taux de 16 %

20,9 %

IMPOSITION PROJETÉE

prélèvements produits

Nouveau prélèvement

CSG

CRDS

Total prélèvements sociaux

Impôt sur le revenu

TOTAL

Plus-values sur titres (actions et obligations)

2 %

7,5 %

0,5 %

10 %

Taxation forfaitaire au taux de 16 %

26 %

En l'espace de dix ans, le taux d'imposition des plus-values mobilières est donc passé de 16 % à 26 % .

L'assiette de l'impôt , a également fait l'objet de plusieurs modifications. À l'origine, le seuil d'exonération des plus-values était en effet fixé à 150.000 F, limite révisée chaque année dans la même proportion que la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu 5 ( * ) .

- l'article 10 de la loi du 16 juillet 1992 relative au plan d'épargne en actions a institué, à compter du 1 er janvier 1993, un seuil spécifique pour les cessions d'OPCVM monétaires et obligataires de capitalisation d'un seuil spécifique, égal à la moitié du seuil général (166.000 F pour 1993) ;

- l'article 78 de la loi de finances pour 1994 a ramené ce seuil spécifique à 100.000 F pour 1994 et 50.000 F à partir de 1995 ;

- l'article 71 de la loi de finances pour 1996 a supprimé le seuil spécifique pour les OPCVM monétaires et obligataires, dont les plus-values sont depuis lors taxées au premier franc et a modifié le seuil général en supprimant la revalorisation annuelle et en fixant ce seuil à 200.000 F pour les revenus de 1996 et à 100.000 F pour les revenus de 1997.

Le présent projet de loi prévoit de ramener le seuil général à 50.000 F. On peut craindre que cette quête incessante d'un " rééquilibrage entre les revenus du travail et ceux de l'épargne " , qui inspirait déjà le précédent Gouvernement, ne conduise à terme à l'abolition pure et simple du seuil d'exonération et à la taxation au premier franc de toutes les plus-values réalisées, quelle que soit leur nature.

Deuxième observation : la taxation des plus-values mobilières en France se situe désormais au niveau le plus élevé des pays européens .

Le tableau ci-après fait apparaître en effet que, d'une part, l'exonération des plus-values non spéculatives (titres détenus depuis plus de six mois) est la règle dans beaucoup de pays européens (Allemagne, Belgique,

Pays-Bas, Luxembourg, Italie jusqu'en 1996) et, d'autre part, que dans les pays où les plus values sont taxées, divers mécanismes permettent d'alléger l'imposition (abattement sur la taxation : réduction de l'assiette dans le temps).

Fiscalité des plus-values mobilières appliquées aux résidents

France

imposition actuelle : taxation forfaitaire libératoire de 20,9 % (prélèvements sociaux inclus) avec effet de seuil. À compter de l'imposition des revenus de 1996, le seuil de cession déclenchant l'imposition des revenus est fixé à 100.000 francs. Imposition dans tous les cas s'il y a cession de participation substantielle (il y a participation substantielle lorsque le cessionnaire, son conjoint, ascendants, descendants, détiennent ou ont détenu au cours des cinq années précédentes, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits aux bénéfices de la société - article 160 CGI)

imposition projetée : taxation forfaitaire libératoire de 26 % (prélèvements sociaux inclus). Abaissement du seuil d'exonération à 50.000 F.

Allemagne

exonération sauf :

- opérations spéculatives (cession de titres détenus depuis moins de six mois) : la plus-value est intégrée à l'IR après abattement de 1.000 DM ;

- participation substantielle (il y a participation substantielle si la cession concerne plus de 1 % des actions d'une société dont le vendeur possède ou a possédé au cours des cinq années précédentes, directement ou indirectement plus de 25 % du capital : la plus-value est imposée à l'IR.

Belgique

exonération sauf :

- opérations spéculatives (définition au cas par cas, par la jurisprudence, en fonction du montant et de la fréquence) : intégré à l'IR au taux maximum de 33 % (+ taxe régionale) ;

- participation substantielle (même définition qu'en France) : intégration à l'IR au taux de 16,5 %

Espagne

Taux marginal d'imposition avec un seuil d'exonération de 500.000 pesetas par an. La plus-value prise en compte est réduite en fonction du nombre d'années de détention au-delà des deux premières années avec une exonération au-delà de dix ans

Italie

avant 1996 exonération

depuis 1996 imposition au taux de 25 % avec réintégration possible des moins-values ou prélèvement forfaitaire de 15 % sans possibilité de réintégrer les moins-values.

exonération pour les obligations et pour les actions cotées si cession au cours des douze derniers mois de 2 % du capital de la société

Pays-Bas

exonération sauf en cas de participation substantielle ou d'opérations spéculatives

Royaume-Uni

Taux marginal d'imposition (taux minimum 25 %, taux maximum 40 %) abattement de 6.000 livres par an (12.000 livres pour un couple)

Non seulement, cette taxation des plus-values mobilières est plus importante qu'ailleurs, en elle-même, mais elle se cumule de surcroît à d'autres impositions qui n'existent pas ou qui n'existent plus ailleurs. Ainsi, l'appréciation des valeurs mobilières est prise en compte chaque année dans l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune, (impôt qui, parmi les cinq grands européens, n'existe plus qu'en France et en Espagne) et, le cas échéant, au moment de la transmission du patrimoine.

Cette surtaxation du capital qui constitue un élément de plus à "l'exception fiscale française" risque d'entraîner des délocalisations d'autant plus probables que, d'une façon générale, chaque pays européen n'impose pas les plus-values réalisées sur son territoire par des non-résidents 6 ( * ) .

Troisième observation : la taxation des plus-values en France est économiquement maladroite et fiscalement inéquitable .

En premier lieu, le fait que le critère de la taxation soit fondé sur un élément extérieur au montant et à la nature du revenu aboutit à ne pas prendre en compte la faculté contributive réelle des contribuables . Cette caractéristique a été encore aggravée depuis la disparition du seuil spécifique pour les OPCVM de taux, dans la mesure où les cessions de tels titres entrent en ligne de compte pour l'appréciation du seuil général. Ainsi, une plus-value de 20.000 F sera exonérée si le montant des transactions est de 99.000 F, alors qu'une plus-value de 2.000 F sera taxée si le montant des transactions est de 101.000 F (voire moins si le contribuable cède également des titres d'OPCVM).

En second lieu, le dispositif actuel comporte un très fort "effet de seuil" . Par exemple un portefeuille de 110.000 F intégrant 50.000 F de plus-values ne sera pas taxé si son propriétaire en cède 99.900 F et supportera une taxation de 13.000 F s'il le cède intégralement.

Ensuite, le principe de la taxation forfaitaire dès le premier franc pénalise singulièrement les petits et les moyens épargnants .

Le tableau ci-dessous fait clairement apparaître que dans le cas volontairement simplifié d'un célibataire dont les revenus seraient exclusivement composés soit de salaires, soit de plus-values, les produits du capital sont plus taxés que ceux du travail jusqu'à une limite actuellement égale à 218.212 francs .

Ce n'est qu'au dessus de cette limite (qui serait plus importante si l'on raisonnait sur le cas d'un couple marié avec des enfants) que l'on pourrait parler d'une surtaxation des revenus du travail par rapport aux produits du capital. Si l'on prend pour référence la progression enregistrée depuis le début de l'année par l'indice synthétique le plus large des actions cotées à la bourse de Paris (SBF 250), soit 15 %, un tel montant de plus-values, si l'on suppose qu'elles ont été réalisées en une seule année, implique la détention d'un patrimoine de 1.454.000 F. C'est dire que, dans la très grande majorité des cas, et au moins en ce qui concerne les plus-values mobilières, la comparaison capital-travail fait apparaître une sur taxation et non une sous taxation des produits du capital par rapport aux revenus du travail.

revenu imposable

25 000

50 000

218 212

500 000

compose exclusivement de

salaires

IR

prélèvements sociaux

plus-values

IR

prélèvements sociaux

différence capital/travail

imposition

imposition

imposition

imposition

actuelle

1 172

0

1 l72

5 225

4 000

1 225

+ 4 053

projetée

2 404

0

2 404

6 500

4 000

2 500

+ 4 096

actuelle

2 343

0

2 343

10 450

8 000

2 450

+ 8 107

projetée

4 807

0

4 807

13 000

8 000

5 000

+ 8 193

actuelle

45 606

35 379

10 227

45 606

34 914

10 692

- 0

projetée

57 089

36 110

20 979

56 735

34 914

21 821

- 354

actuelle

156 368

132 934

23 435

104 500

80 000

24 500

- 51 868

projetée

183 107

135 036

48 071

130 000

80 000

50 000

- 53 107

NB : les chiffres négatifs font apparaître une surtaxation du travail par rapport au capital

Enfin, la taxation des plus-values ne prend pas en considération la durée de détention . De ce point de vue, il faut admettre que l'application aux plus values mobilières du système existant en matière de fiscalité immobilière (abattement de 5 % de l'assiette imposable par année de détention au-delà de la deuxième année) ou même d'un système à l'espagnole (réduction de l'assiette de 20 % par an entre la deuxième et la huitième année) ne serait pas forcément souhaitable, dans la mesure où un tel dispositif constituerait un frein à la nécessaire mobilité du capital. C'est pourquoi, les systèmes allemands, luxembourgeois ou hollandais qui exonèrent les plus-values de cessions dès lors que les titres ont été détenus depuis plus de six mois semblent être les mieux adaptés.

Il est vrai que l'existence du plan d'épargne en actions tempère quelque peu l'ensemble de ces conclusions puisque ce dispositif fiscal permet, dans la limite de 600.000 francs de placement, d'exonérer de taxation les plus-values retirées de la cession de valeurs mobilières. Toutefois, comme son nom l'indique, ce dispositif ne concerne que les actions et titres assimilés. En outre, l'extension à compter de 1997 de la CSG et du CRDS aux produits capitalisés dans le cadre d'un PEA, réduit désormais de façon significative l'écart de taxation.

Quatrième et dernière observation, le rééquilibrage de la fiscalité des revenus du travail par rapport à ceux du capital n'est qu'un alibi pour justifier une augmentation des prélèvements obligatoires .

On pourrait en effet s'interroger longuement sur la légitimité de taxer de la même manière les revenus du travail et les produits du capital 7 ( * ) . Au demeurant, si cette volonté, affirmée par le présent Gouvernement, constituait autre chose qu'un simple slogan politique, on pourrait s'attendre à la fin de l'exonération dont bénéficient les livrets d'épargne défiscalisés (livret A, Codevi, livrets jeunes...) qui constituent eux aussi des revenus du capital, à la suppression du prélèvement libératoire et à l'extension de l'abattement général de 20 % dont bénéficient les revenus du travail, aux produits du capital.

Quoiqu'il en soit, votre commission des finances considère, d'une part, que les revenus de l'épargne justifient d'un traitement privilégié en raison de l'importance de celle-ci dans la réalisation de l'équilibre économique et, d'autre part, que si rééquilibrage il doit y avoir, il devrait se faire en diminuant les prélèvements et non en les augmentant. Les mesures proposées par le Gouvernement ne règlent en rien ce problème.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission vous demande de modifier le dispositif actuel afin :

- d'une part de prendre compte non pas le montant de cessions réalisées, mais le montant de plus-values effectivement encaissé ;

- d'autre part de procéder par voie d'abattement et non par voie de seuil .

Cet abattement pourrait être fixé à 8.000 F pour un célibataire et 16.000 F pour un couple marié , ce qui aurait l'avantage de reprendre la logique de l'assimilation des plus-values à des revenus, puisque c'est ce même abattement qui s'applique aux dividendes d'actions et de produits assimilés. Cette solution s'inscrit dans la ligne des observations déjà effectuées par votre commission lors du précédent abaissement du seuil et applique les principes explicités dans le rapport d'information sur la fiscalité de l'épargne 8 ( * ) .

En outre, elle rejoindrait les conclusions du rapport de M. François Hollande déposé, en 1990, au nom de la commission des finances de l'Assemblée nationale 9 ( * ) . Ce rapport préconisait en effet de substituer au critère du volume de transactions celui du niveau de la plus-value réalisée, dans les conditions de progressivité suivantes : montant annuel des plus-values inférieur à 20.000 F : pas d'imposition ; montant compris entre 20.000 et 200.000 F imposition au taux de 16 % ; montant supérieur à 200.000 F taux spécifique de 25 %.

Cette solution considérée alors comme " plus logique sur le plan économique et fiscal " avait pour but d'éviter que : " l'allégement de la fiscalité de l'épargne dans l'optique européenne de la libre circulation des capitaux ne voie ses effets annihilés par un alourdissement excessif de la fiscalité des plus-values mobilières qui lui est étroitement liée " .

Jusqu'à présent, une telle solution a été écartée pour des raisons purement techniques, à savoir la difficulté de calculer les plus-values sur actions lorsque les détenteurs ont changé plusieurs fois d'établissement financier ou lorsqu'ils détiennent leurs titres depuis très longtemps. La taxation des OPCVM de taux au premier franc ainsi que les solutions mises en oeuvre lors de l'abaissement du seuil de 200.000 F à 100.000 F 10 ( * ) ont montré que de tels obstacles n'étaient pas dirimants.

Enfin, la fiscalité comparée montre que, dans les pays qui pratiquent un abattement (Espagne : 500.000 pesetas, soit environ 19.750 F ; Grande-Bretagne : 6.000 / 12.000 livres, soit environ 60.000/120.000 F) celui-ci porte sur les plus-values et non sur les cessions.

Décision de la commission : votre commission vous demande de modifier le présent article afin de remplacer, à compter de l'imposition des revenus de 1998, le seuil d'exonération des plus-values mobilières en fonction des cessions, par un abattement de 8.000 / 16.000 francs, identique à celui applicable aux dividendes d'actions et revenus assimilés .

ARTICLE 50 ter - Abrogation de la contribution complémentaire à l'impôt sur le revenu

Commentaire : le présent article propose d'abroger, à compter de l'imposition des revenus de 1998, la contribution complémentaire à l'impôt sur le revenu prévue par l'article 204 A du code général des impôts .

I. LA SITUATION ACTUELLE

La contribution complémentaire à l'impôt sur le revenu perçue au profit de l'État, qui n'est donc pas à proprement parler un prélèvement social, a été instituée par le paragraphe V de l'article 31 de la loi de finances pour 1985.

Elle a pris la forme :

- d'une contribution de 1 % complémentaire à l'impôt sur le revenu en ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu (article 204 A du CGI) ;

- d'une augmentation de 15 % à 16 % du taux d'imposition proportionnel des plus-values de cession de valeurs mobilières et assimilées (il en est de même pour les plus-values professionnelles à long terme).

Pour les revenus considérés, le champ d'application de cette contribution est le même que celui de l'impôt sur le revenu : elle n'est donc pas exigible lorsque les revenus sont exonérés.

Cette contribution est mise en recouvrement par voie de rôle en même temps que l'impôt sur le revenu. Elle n'est pas déductible de l'impôt sur le revenu.

Elle frappe le revenu brut après l'abattement de 8.000 / 16.000 francs dont bénéficient les dividendes d'actions et revenus assimilés.

II. LE DISPOSITIF PROPOSE

L'Assemblée nationale, à l'initiative du Gouvernement, a décidé de supprimer cette imposition qui fait désormais double emploi avec les dispositions du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, lequel a institué un prélèvement social de 2 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placements, y compris ceux soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

Comme le montre le tableau ci-dessous, si rien n'était fait pour cette catégorie particulière de revenus, ceux-ci supporteraient un prélèvement non pas de 2 % mais de 3 %.

IMPOSITION ACTUELLE

IMPOSITION PROJETÉE

(I) sans prise en compte de l'abattement de 8.000/16.000 F

(2) en prenant en compte l'avoir fiscal

(3) en prenant en compte la déductibilité de la CSG

La suppression de la contribution complémentaire se traduira par une perte de recettes de l'ordre de 600 millions de francs pour 1999.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission approuve la suppression de la contribution complémentaire de 1 % État qui n'est que la conséquence directe de la création du nouveau prélèvement social de 2 %. Il est néanmoins choquant que cette suppression n'ait lieu qu'à compter de 1998 alors que le nouveau prélèvement frappera les revenus de capitaux mobiliers dès 1997. Pendant un an, les épargnants auront donc à supporter une double imposition, à laquelle l'État n'a pas souhaité renoncer pour des raisons budgétaires.

Cependant, la suppression de la contribution complémentaire de 1 % ne tire que partiellement les conséquences de l'institution du prélèvement de 2%.

Afin de neutraliser complètement cette nouvelle taxation, il conviendrait en effet de réduire d'un point le taux du prélèvement libératoire. À défaut, la taxation sera dissymétrique entre les plus-values sur titres (26 %) et les revenus d'obligations (25 %), ce qui conduirait à avantager les revenus de titres de taux, par rapport aux produits des titres de capital, représentatifs d'investissements en fonds propres dans les entreprises.

Décision de la commission : votre commission vous demande de compléter le présent article afin de réduire d'un point le taux de la taxation forfaitaire pesant sur les plus-values sur titres .

ARTICLE 51 - Report d'imposition des plus-values de cession de droits sociaux en cas de remploi dans les PME nouvelles

Commentaire : le présent article propose d'instituer, pour deux ans, un régime optionnel de report d'imposition des plus-values de cession de droits sociaux relevant des articles 92 B et 160 du code général des impôts, en cas d'apport du produit des cessions à des sociétés non cotées créées depuis moins de sept ans et détenues, pour 75 % au moins, par des personnes physiques, directement ou par l'intermédiaire d'une autre société, le réinvestissement devant intervenir dans l'année suivant celle de la cession .

I. LA SITUATION ACTUELLE

L'imposition des gains nets retirés de la cession de valeurs mobilières, réalisées à titre non professionnel, obéit à deux régimes distincts :

- le régime de droit commun qui résulte des articles 92 B, 92 J et 200 A du code général des impôts (CGI) :

- le régime spécifique en cas de détention substantielle qui résulte de l'article 160 du CGI. Il y a participation substantielle lorsque le cessionnaire, son conjoint, ses ascendants ou descendants, détiennent ou ont détenu, au cours des cinq années précédentes, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits aux bénéfices de la société.

La principale différence entre ces deux régimes tient au fait que les plus-values mobilières de droit commun ne sont imposées que lorsque le total des cessions (sauf s'il s'agit de cessions de titres ou de parts d'OPCVM monétaires ou obligataires de capitalisation) excède un certain seuil, actuellement fixé à 100.000 F par an (qui passerait à 50.000 F par an, si l'article 50 bis du présent projet de loi était adopté) alors qu'en cas de détention substantielle, les plus-values sont taxées à partir du premier franc. Une autre différence importante tient au fait que les non résidents sont exonérés du paiement de la taxe forfaitaire dans le cadre du régime de l'article 92 B, mais pas dans celui de l'article 160.

Dans les deux cas, le taux d'imposition est de 16 % au titre des prélèvements fiscaux et de 4,9 % au titre des différents prélèvements sociaux. Le taux global de ces derniers devrait passer à 10 % avec l'adoption définitive du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998.

Ces deux régimes prévoient d'ores et déjà la possibilité de reports d'imposition 11 ( * ) .

1. Les reports d'imposition dans le cadre du régime de l'article 92 B

L'article 92 B II prévoit que l'imposition de la plus-value réalisée en cas d'échange de titres résultant d'une opération d'offre publique, de fusion, de scission, d'absorption d'un fonds commun de placement par une SICAV réalisée conformément à la réglementation en vigueur ou d'un apport de titres à une société soumise à l'IS, peut être reportée au moment où s'opérera la cession ou le rachat des titres reçus lors de l'échange.

En application de l'article 248 G du CGI, ces dispositions s'appliquent également aux échanges de titres réalisés dans le cadre des opérations de privatisation régies par la loi n° 93-923 du 19 juillet 1993 et aux échanges avec soulte , à condition que celle-ci n'excède pas 10 % de la valeur nominale des tires reçus. Toutefois, la partie de la plus-value correspondant à la soulte reçue est imposée immédiatement.

Pour mémoire, l'article 92 B quater prévoit également un report d'imposition pour les titres de certains OPCVM transférés entre le 23 juin et le 31 décembre 1993 sur un plan d'épargne en actions. Toutefois, la plus-value dont l'imposition a été reportée est exonérée lorsque le plan d'épargne en actions n'est pas clos avant l'expiration de la cinquième année.

2. Les reports d'imposition dans le cadre du régime de l'article 160

Il existe trois mécanismes de report dans le cadre de ce régime :

a. Les opérations d'échange de titres (article 160 I ter )

L'imposition de la plus-value réalisée à compter du 1 er janvier 1991 en cas d'échange de droits sociaux résultant d'une opération de fusion, de scission ou d'apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés peut, sur demande expresse du contribuable, être reportée dans les conditions prévues au II de l'article 92 B du CGI (voir supra). Il en est de même lorsque l'échange des titres est réalisé par une société ou un groupement dont les associés ou membres sont personnellement passibles de l'impôt sur le revenu pour la part des bénéfices correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement (article 12 de la loi de finances pour 1997). Cette disposition est également applicable aux échanges avec soulte, à condition que celle-ci n'excède pas 10 % de la valeur nominale des titres reçus.

S'agissant des échanges de droit sociaux réalisés à compter du 1 er janvier 1996 , lorsque les titres reçus dans les cas prévus ci-dessus font l'objet d'un échange dans les mêmes conditions, l'imposition des plus-values antérieurement reportée peut, à la demande du contribuable, être reportée de nouveau au moment où s'opérera la cession, le rachat, le remboursement ou l'annulation des nouveaux titres reçus, à condition que l'imposition de la plus-value réalisée lors de cet échange soit elle-même reportée (article 11 de la loi de finances pour 1997).

b. Les apports de parts ou d'actions à une société créée par ses salariés pour le rachat de tout ou partie du capital de l'entreprise dans laquelle ils exercent (article 160 A)

L'imposition de la plus-value réalisée lors de l'apport des actions ou parts à une société créée dans les conditions prévues par l'article 220 quater du CGI (rachat d'une entreprise par ses salariés, opération plus connue sous sa dénomination anglo-saxonne de MBO management buy out ) peut être reportée au moment de la cession des droits sociaux reçus en rémunération de l'apport :

- par les salariés ayant levé l'option offerte par la société reprise ou ayant bénéficié d'un engagement de cession par un ou plusieurs actionnaires ou porteurs de parts de cette société :

- par un ou plusieurs actionnaires ou porteurs de parts de la société rachetée.

c. Les titres cédés au profit du conjoint, des ascendants ou des descendants (article 160 I)

La deuxième phrase du deuxième alinéa du I. de l'article 160 prévoit que, lorsque la cession est consentie par le cédant au profit de son conjoint, de ses ascendants ou de ses descendants, la plus-value est exonérée si tout ou partie des droits sociaux cédés ne sont pas revendus à un tiers dans un délai de cinq ans. En cas de cession à un tiers dans ce délai, la plus-value est imposée au nom du premier cédant au titre de l'année de la revente des droits aux tiers.

Dans ce dernier cas on peut considérer qu'il y a un report d'imposition, même si le but essentiel de ce dispositif est de permettre l'exonération.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Initialement, le projet déposé par le gouvernement prévoyait d'ajouter un nouveau cas de report ne concernant que les plus-values en cas de participation substantielle (article 160 CGI). Il ne visait donc que les contribuables dont les droits, détenus directement ou indirectement, ont dépassé, à un moment quelconque au cours des cinq années précédant la cession, 25 % des bénéfices sociaux de l'entreprise dont les droits ont été cédés.

Ce dispositif prévoyait que les plus-values réalisées du 1 er janvier 1998 au 31 décembre 1999 par des créateurs d'entreprises pourraient bénéficier du report d'imposition des plus-values de cession de droits sociaux à condition que le produit de la vente de leur entreprise soit réinvesti, dans le délai d'un an à compter de la cession , dans la souscription au capital initial ou à une augmentation de capital d'une ou plusieurs sociétés créées depuis moins de cinq ans . Le report d'imposition s'appliquerait jusqu'au moment où s'opérerait la transmission, le rachat ou l'annulation des titres reçus en contrepartie de l'apport.

Lors de l'examen à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a assoupli son dispositif sur trois points :

- le champ d'application du report d'imposition a été sensiblement modifié : au lieu de viser les plus-values de cessions de participations substantielles, le report serait subordonné à la condition qu'à la date de la cession, les droits détenus directement par le foyer fiscal du cédant excèdent 10 % des bénéfices sociaux de la société dont les titres sont cédés. La plus-value dont les titres sont cédés pourrait ainsi relever selon le cas des régimes des articles 92 B ou 160 du CGI :

- le réinvestissement pourrait intervenir jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle de la cession (et non dans le délai d'un an à compter de cette dernière) :

- enfin, la société bénéficiaire de l'apport devrait être créée depuis moins de sept ans, au lieu de cinq initialement.

De façon plus précise, le régime proposé, tel qu'adopté par l'Assemblée nationale, est le suivant :

A. CHAMP D'APPLICATION

La possibilité de bénéficier d'un report d'imposition est soumise à trois séries de conditions :

1. Conditions sur le chef du cédant

Les conditions posées visent à faire en sorte que ce dispositif, mis en place à titre expérimental, bénéficie uniquement à des créateurs d'entreprise :

a) condition tenant au moment de la cession

La plus-value dont il est demandé le report doit provenir de la cession de titres cédés entre le l er janvier 1998 et le 31 décembre 1999 (paragraphe I. 1. premier alinéa du texte proposé).

Comme le souligne M. Didier Migaud, rapporteur général de l'Assemblée nationale, dans son rapport sur les articles de la deuxième partie du projet de loi de finances, le Gouvernement a considéré que la nouveauté du mécanisme justifiait qu'il soit testé pendant deux ans, afin que, dans l'hypothèse d'une reconduction, on puisse y apporter les améliorations nécessaires 12 ( * ) .

b) conditions tenant à la nature des titres cédés

La plus-value dont il est demandé le report doit provenir de la cession :

- soit de titres mentionnés au I de l'article 92 B , (paragraphe I. 1. premier alinéa) c'est à dire :

- de titres cotés et assimilés (titres non cotés des SICOMI) ;

- de droits sociaux non cotés (à l'exception des titres non cotés des sociétés à prépondérance immobilière) des sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés , sous réserve que le cédant détienne moins de 25 % du capital ;

- d'obligations, titres participatifs, effets publics et autres titres d'emprunt négociables non cotés (cessions réalisées à compter du 1 er septembre 1992).

Dans ce cas, le report d'imposition est subordonné à la condition " qu'à la date de la cession les droits détenus directement par les membres du foyer fiscal du cédant excèdent 10 % des bénéfices sociaux de la société dont les titres sont cédés ". Cette condition exclut de facto que la plus-value provienne de la cession d'obligations et titres assimilés.

- soit de titres mentionnés au I de l'article 160, c'est à dire de droits sociaux (cotés ou non cotés) faisant l'objet d'une participation substantielle , c'est à dire représentant plus de 25 % des droits aux bénéfices sociaux (paragraphe III. du texte proposé).

c) condition tenant à la qualité du cédant

Enfin, le report est subordonné (paragraphe I. 3. a.) à la condition que, au cours des cinq années précédents la cession, le cédant ait été :

- soit salarié de la société dont les titres sont cédés ;

- soit y avoir exercé des fonctions de mandataire social

Le texte proposé renvoie à la définition de mandataire social donnée par le 1° de l'article 885 O bis du CGI, en matière d'ISF. à savoir : " être soit gérant nommé conformément aux statuts d'une société à responsabilité limitée ou en commandite par actions, soit associé en nom d'une société de personnes, soit président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d'une société par actions. "

En outre, il transparaît clairement de la discussion à l'Assemblée nationale 13 ( * ) que la référence au 1° de l'article 885 O bis doit se faire dans son intégralité, c'est à dire que les fonctions énumérées ci-dessus, doivent avoir été " effectivement exercées et donner lieu à une rémunération normale ", laquelle doit avoir représenté "plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé es t soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62 ." Cette seconde condition, conçue spécifiquement pour la détermination des biens professionnels exclus de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune, (ISF) limite singulièrement le champ d'application du présent dispositif sans que son opportunité apparaisse clairement au regard du dispositif proposé.

Le "calibrage" du dispositif qui nous est proposé exclut donc sans ambiguïté les actionnaires minoritaires de son champ d'application. Comme l'a expliqué M. le secrétaire d'État au budget lors de l'examen du présent article devant l'Assemblée nationale : " parce qu'il vise à inciter les entrepreneurs, au sens propre du terme, à mettre leur capacité d'investissement et leur expérience entrepreneuriale au service d'entreprises non cotées, ce dispositif est ciblé sur une population disposant d'une culture d'entreprise et non sur les simples apporteurs de capitaux. " 14 ( * )

2. Conditions tenant au réinvestissement

a) conditions tenant à la société bénéficiaire de l'apport

1. Il doit s'agir d'une société dont les titres ne sont pas admis à la négociation sur un marché réglementé (paragraphe I. 1. premier alinéa)

En application de l'article 41 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières, la reconnaissance de la qualité de marché réglementé d'instruments financiers est décidée par arrêté du ministre chargé de l'économie et des finances. Toutefois, conformément à l'article 97 VIII sont reconnus comme marchés réglementés le premier marché de la bourse de Paris (règlement mensuel et comptant), le Second marché et le Nouveau marché ainsi que le marché des options négociables de Paris (MONEP) 15 ( * ) . L'ancien marché hors cote n'est pas considéré comme un marché réglementé.

Le texte proposé par le Gouvernement ne précise pas s'il doit s'agir d'un marché réglementé français ou étranger. En l'absence de précisions, on doit donc considérer que sont exclus du dispositif les titres cotés sur un marché réglementé quel qu'il soit, a fortiori s'il s'agit d'un marché étranger.

L'exclusion des titres cotés sur le Nouveau marché traduit la volonté du Gouvernement de favoriser le capital d'amorçage ( seed capital ) c'est à dire celui qui s'investit au moment de la création de l'entreprise ou peu de temps après, et non le capital risque en général, notamment dans sa composante plus large de financement des entreprises à fort potentiel de croissance.

.

Cette condition s'apprécie " au moment de la souscription ", ce qui signifie qu'une cotation sur un marché réglementé, postérieure à l'apport ne ferait pas perdre le bénéfice de la mesure au contribuable ayant effectué l'apport en question. Le texte proposé ne fixant pas de délai entre le moment de la souscription et celui de la cotation, on peut même imaginer qu'une souscription effectuée la veille d'une introduction sur le marché ouvrirait néanmoins droit au report d'imposition.

2. Il doit s'agir d'une société en création ou d'une société existante créée depuis moins de sept ans (paragraphe I. 3. b.)

3. Il ne peut s'agir d'une société financière ou de gestion d'immeubles (paragraphe I. 3. c.)

Partant du postulat selon lequel les sociétés prestataires de services financiers ne peuvent être des PME 16 ( * ) , le texte proposé exclut expressément les sociétés visées au deuxième alinéa du 2, du I de l'article 44 sexies du CGI, à savoir : les " entreprises qui exercent une activité bancaire, financière, assurances, de gestion ou de location d'immeubles. "

4. Il doit s'agir d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés (paragraphe I. 3. c.)

Le texte proposé prévoit que la société faisant l'objet de l'apport doit "sans avoir exercé d'option pour un autre régime d'imposition, être passible en France de l'impôt sur les sociétés de plein droit ou sur option". Cette rédaction vise en fait à exclure les sociétés qui, bien que passibles de l'impôt sur les sociétés, n'y sont pas effectivement assujetties soit parce qu'elles sont situées dans des zones d'aménagement du territoire où elles bénéficient d'exonérations (zones franches), soit parce qu'elles sont exonérées dans le cas de reprise d'entreprises en difficulté (articles 44 sexies à 44 decies du CGI).

Cette condition exclut du champ d'application du dispositif proposé les sociétés de personnes (sauf celles soumises à l'IS) et les groupements d'intérêt économique. En revanche, sont susceptibles d'être concernés les filiales de droit français et les établissements stables de sociétés étrangères soumis à l'impôt français sur les sociétés.

5. Il ne peut s'agir de sociétés ayant fait l'objet d'une transformation structurelle (paragraphe I. 3. d.)

Le texte proposé prévoit que la société bénéficiaire de l'apport ne doit pas avoir été créée " dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou pour reprendre de telles activités ".

Cette rédaction est directement inspirée de l'article 44 sexies du CGI (exonérations d'impôt pour certaines entreprises nouvelles) et a pour but de limiter la mesure aux apports en numéraire à des entreprises véritablement nouvelles, par exclusion des sociétés ayant fait l'objet d'une transformation structurelle.

Lors de l'examen à l'Assemblée nationale, la question s'est posée de savoir si cette rédaction n'excluait pas du bénéfice de la mesure les sociétés créées par " essaimage " 1 . Elle s'est du reste posée dans les mêmes termes que pour l'examen de l'article 50 relatif à la mise en place de bons de souscription d'actions ( stock options ) pour les salariés des sociétés innovantes. À cette occasion, le secrétaire d'État au budget a considéré, dans des termes qui méritent d'être rapportés, que les entreprises nouvelles créées par essaimage pourraient bénéficier de la mesure et que cela figurerait dans l'instruction destinée à faciliter l'application du présent dispositif :

" Le fond du problème, c'est qu'il y a des sociétés qui sont juridiquement nouvelles, c'est à dire créées depuis moins de cinq ans. et des sociétés qui, en droit fiscal, sont économiquement nouvelles. À contrario, n'est pas considérée comme nouvelle une entreprise qui résulte d'une concentration, d'une restructuration ou d'une extension d'activité préexistante. À partir du moment où ces bons de souscription sont réservés aux sociétés nouvelles, ils sont automatiquement réservés aux sociétés nées d'une opération d'essaimage et qui peuvent avoir la qualification d'entreprise nouvelle. J'ai dit qu'une instruction préciserait le dispositif de l'article 50. Toutes les sociétés nouvelles, juridiquement et économiquement, pourront bénéficier de ces bons de souscription, en particulier - et l'instruction le précisera - les entreprises créées par essaimage ." ( Plus loin ) " Je reprends les termes que j'ai employés à l'article 50 - s'il s'agit d'entreprises créées par essaimage dans les 1 L'essaimage est la création d'une entreprise par des salariés, généralement des cadres, d'une entreprise existante, celle-ci apportant à celle-là des avantages financiers (prêts, participations en capital) ou en nature (contrats de sous-traitance) L'essaimage bénéficie de quelques dispositions fiscales favorables comme le fait pour la société qui essaime de pouvoir constituer, en franchise d'impôt, une provision spéciale (article 39 quinquies H du CGI. conditions visées par les dispositions que j'ai déjà mentionnées - c'est à dire lorsque des sociétés marraines consentent des prêts à taux privilégié à des entreprises créées par des membres de leur personnel ou lorsque ces sociétés souscrivent au capital d'entreprises créées par ces personnes - il s'agit bien de sociétés nouvelles. Les sociétés résultant d'essaimage sont donc des sociétés nouvelles. " 17 ( * )

Ce raisonnement laisse à vrai dire sceptique et l'on voit mal comment, par simple déclaration à la tribune, confirmée le cas échéant par instruction fiscale, le Gouvernement pourrait poser une dérogation contraire à ce qu'il a lui-même décidé d'inscrire dans la lettre de la loi.

On observera de surcroît que la question ne se pose pas seulement pour l'essaimage mais aussi pour les sociétés reprises par leurs salariés, question qui n'a pas été évoquée dans les débats à l'Assemblée nationale.

6. Il doit s'agir d'une société détenue par des personnes physiques, au moment de l'apport (paragraphe I. 3. e.)

Le texte proposé prévoit que le capital de la société bénéficiaire de l'apport doit : " être détenu de manière continue, pour 75 % au moins par des personnes physiques ou des personnes morales détenues par des personnes physiques. Pour la détermination de ce pourcentage, les participations des sociétés de capital-risque, des sociétés de développement régional et des sociétés financières d'innovation ne sont pas prises en compte à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 1. bis de l'article 39 terdecies 18 ( * ) entre la société bénéficiaire de l'apport et ces dernières sociétés. De même, ce pourcentage ne tient pas compte des participations des fonds communs de placement à risque et des fonds communs de placement dans l'innovation ".

Toutefois, cette condition n'est pas exigée, lorsque : " les titres de la société bénéficiaire de l'apport sont ultérieurement admis à la négociation sur un marché français ou étranger ".

Cette rédaction s'inspire directement de l'article premier de la loi n° 97-1026 du 10 novembre 1997 portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier, qui prévoit, en faveur des petites entreprises, une exonération de la contribution temporaire de 15 % sur l'impôt sur les sociétés. Cette définition s'inspire à son tour de celle donnée par la Commission européenne dans sa recommandation du 3 avril 1996 concernant la définition des petites entreprises.

La condition de détention continue du capital pour 75 % au moins par des personnes physiques ou des personnes morales détenues par des personnes physiques permet à la fois d'éliminer les filiales d'autres sociétés et d'inclure la détention indirecte au premier degré seulement, par exemple par l'entremise de holdings familiales. Il s'agit d'une condition très restrictive puisqu'elle fait dépendre pour un contribuable donné le bénéfice d'une mesure fiscale favorable, censée déterminer son investissement, de conditions sur lesquelles il n'a aucune prise, à savoir la modification dans le temps du capital de la société dans laquelle il investit.

Les participations de professionnels du capital-risque (SCR, SDR, SFI) ne sont pas prises en compte pour la détermination de ce pourcentage, à condition qu'il n'y ait pas de lien de dépendance entre eux et la société. Toutefois, sont exclus de cette condition du lien de dépendance, bien qu'ils entrent dans le calcul du pourcentage, les FCPR et les FCPI. Cela tient au fait que ces fonds communs sont soumis à des ratios de dispersion des risques qui leur interdisent en pratique de prendre le contrôle, directement ou indirectement, d'une société. Cette condition eût donc été superfétatoire.

Enfin, cette condition ne fait pas obstacle à ce que les titres de la société soient ultérieurement cotés sur un marché d'instruments financiers. On relèvera à cet égard une légère modification du texte tel qu'il nous parvient de l'Assemblée nationale. En effet, alors que le texte initial faisait référence à un "marché réglementé", le texte transmis vise un "marché français ou étranger". Si l'on fait abstraction des termes "français ou étranger" qui mis cote à cote sont superfétatoires (il s'agit de tous les marchés) la disparition du terme "réglementé" permet d'envisager la cotation sur un marché qui tout en étant organisé, n'a pas fait pour autant l'objet d'une reconnaissance de marché réglementé au sens de l'article 41 de la loi financière. Ce pourrait être le cas du hors cote français, ou plus vraisemblablement de marchés à formalités simplifiées paneuropéens (l'EASDAQ) ou non européens comme le NASDAQ américain 19 ( * ) .

7. Il doit s'agir d'une société dans laquelle rapporteur de capitaux sollicitant le report de plus-value n'est ni actionnaire, ni mandataire social (paragraphe I. 3. h.)

Le texte proposé prévoit que rapporteur de capitaux, son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants ne doivent pas, préalablement à l'apport et pendant une période de cinq ans suivant celui-ci, être associés de la société bénéficiaire de l'apport ni y exercer les fonctions de mandataire social telles que définies par le 1° de l'article 885 O bis du CGI (voir supra c. du 1.)

Cette condition vise à éviter que rapporteur de capitaux ne bénéficie du report pour apporter ses capitaux à une société qu'il détient ou dans laquelle il exerce déjà des fonctions.

b) conditions tenant aux titres détenus en contrepartie de l'apport

1. Il doit s'agir de titres détenus directement (paragraphe I. 3. f.)

Le texte proposé dispose que " les droits sociaux représentatifs de l'apport en numéraire doivent être détenus directement et en pleine propriété par le contribuable " .

Cette condition vise, semble-t-il, à éviter l'évasion fiscale en prohibant la détention indirecte de titres. Accessoirement, elle empêche le démembrement de la propriété par le recours à l'usufruit.

2. Il doit s'agir de participations minoritaires (paragraphe I. 3. g.)

Le texte proposé prévoit que les droits dans les bénéfices sociaux de la société bénéficiaire de l'apport détenus directement ou indirectement par l'apporteur ou son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants ne doivent pas dépasser ensemble 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq années qui suivent la réalisation de l'apport.

Il a semblé opportun au Gouvernement que rapporteur de capitaux qui, par définition, détient une participation supérieure à 10 % dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres sont cédés, ne détienne pas à nouveau une participation substantielle dans la société bénéficiaire de l'apport.

Les termes de " bénéfices sociaux " ont été préférés à ceux de droits sociaux afin de restreindre le plus possible l'importance de la participation. En effet, dans les sociétés en développement la participation de capital risqueurs s'effectue souvent par le truchement d'actions à dividende prioritaire qui présentent l'avantage de conférer à leur détenteurs un droit privilégié sur le bénéfice distribuable de l'exercice (article 269-2 de la loi de 1966) et offre aux créateurs la possibilité de bénéficier de capitaux sans pour autant aliéner leur pouvoir de décision. La seule prise en compte des "droits sociaux" sur le capital n'aurait pas permis de prendre en compte ce type d'instruments dont l'importance peut représenter jusqu'au quart du capital social.

Comme le souligne le rapporteur général de l'Assemblée nationale 20 ( * ) , le Gouvernement a tenu à ce que l'investisseur demeure minoritaire, car l'esprit du présent article est de faciliter son apport financier et en termes de savoir-faire à une entreprise nouvelle, créée et dirigée par d'autres que lui.

Lors de l'examen en séance publique, le Gouvernement a du reste précisé cette intention. Face à un amendement tendant à augmenter le seuil de participation de 25 % à 50 %, M. le secrétaire d'État au budget a opposé un avis défavorable dans des termes qui méritent d'être cités :

" Nous voulons que les entrepreneurs ayant réussi dans tel secteur puissent donner un coup de main à de nouveaux entrepreneurs, autrement dit que le premier entrepreneur en génère un deuxième (et non) que l'ancien entrepreneur puisse devenir l'entrepreneur de fait de la nouvelle entreprise. " 21 ( * )

c) conditions tenant à l'apport en capital

1. Les droits sociaux émis en contrepartie de l'apport doivent être intégralement libérés au moment de l'apport (paragraphe I. 3. b)

Cette restriction, destinée à garantir l'augmentation réelle des fonds propres de la société, ne vise que les droits sociaux émis en contrepartie de l'apport et n'interdit donc pas, pour les autres apporteurs de capitaux, la faculté reconnue par l'article 75 de la loi du 24 juillet 1996 sur les sociétés commerciales, de ne libérer initialement que la moitié du capital social, la moitié restante pouvant être libérée dans un délai de cinq ans à compter de la constitution.

B. LES MODALITÉS DE MISE EN OEUVRE

1. La nécessité d'une demande émanant du contribuable

En aucun cas le report n'est automatique et il faut que le contribuable en fasse la demande . Cette condition résulte expressément du second alinéa du 1. du texte proposé pour l'article 92 B decies pour les plus-values réalisées dans le cadre de l'article 92 B et de la référence au dernier alinéa du I de l'article 160 pour le texte proposé par le paragraphe III du présent article pour rédiger le II de ce même article 160.

2. Le respect continu des conditions posées

Le 5. du I. du texte proposé prévoit que le non-respect de l'une seulement des conditions prévues entraîne " l'exigibilité immédiate nonobstant toutes dispositions contraires " de l'impôt sur la plus-value. S'agissant d'un report et non d'un sursis, la plus-value , constatée au moment de la cession des éléments taxables, sera imposée selon les modalités en vigueur à l'issue du report .

La mention " nonobstant toutes dispositions contraires " a pour but d'empêcher l'opposabilité de la prescription du droit de reprise de l'administration fiscale. Ce droit de reprise doit, en application de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, être exercé avant la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. En outre, le bénéficiaire pourra se voir appliquer des intérêts de retard . Ces pénalités, prévues à l'article 1727 du CGI, ont un taux d'intérêt de 0,75 % par mois de retard (9 % par an), décompté à partir de la date à laquelle cet impôt aurait dû être appliqué et portent sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable dont le versement a été différé.

C. LES EFFETS DU REPORT

1. Les effets de droit commun

Dans l'hypothèse où le contribuable réunirait toutes les conditions ci-dessus énoncées, il bénéficierait de la possibilité d'échapper à la taxation de la partie de la plus-value réinvestie, de façon indéfinie dans le temps, jusqu'à ce qu'un événement postérieur entraîne l'imposition effective des plus-values.

Les événements en question sont :

- la transmission (à titre onéreux ou à titre gratuit) résultant du décès, de la donation ou de la cession des droits ;

- le rachat ;

- l'annulation des titres. On peut imaginer en effet que les actions reçues en échange de l'apport soient annulées et les liquidités réparties entre les actionnaires, ce qui aurait pour effet d'empêcher l'imposition effective des plus-values ; la précision selon laquelle le report prend fin en cas d'annulation des titres permet de mettre en échec d'éventuels montages d'évasion fiscale.

Bien que cela ne transparaisse pas clairement du texte proposé, la plus-value susceptible de bénéficier du report doit être calculée, le cas échéant, au prorata de la fraction du capital réinvesti 22 ( * ) .

Supposons par exemple une cession de 1 million de francs, intégrant une plus-value de 400.000 francs. Le contribuable réinvestit dans les délais, en une ou plusieurs opérations. 500.000 francs. La plus-value pouvant faire l'objet d'un report est égale à 400.000 X 50 % = 200.000 F. La différence, soit 200.000 F étant taxable au moment de la déclaration des revenus de l'année au cours de laquelle a eu lieu la cession.

2. Le non cumul de ce dispositif avec d'autres dispositifs favorables

Le 3 du I prévoit que le report est exclusif de l'application des dispositions de l'article 199 terdecies O A du CGI. Cet article contient les règles du régime de réduction d'impôt, d'une part pour souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés non cotées et, d'autre part, pour souscription de parts de FCPI.

Compte tenu du dispositif proposé, l'interdiction du non cumul ne vaut que pour les souscriptions et les augmentations de capital des sociétés non cotées mentionnées au I de l'article 199 terdecies O A, la souscription à des parts de FCPI prévue par le paragraphe VI de ce même article ne trouvant pas à s'appliquer.

3. La possibilité de reporter à nouveau

À l'instar de ce qui a été prévu en matière de cessions de participations substantielles (article 160 du CGI), le 5. du I. du texte proposé prévoit la possibilité de reports successifs en cas d'échanges successifs des titres reçus en contrepartie de l'apport et pour lesquels l'imposition a été la première reportée en application du présent article.

Dans ce cas, l'imposition de la plus-value antérieurement reportée peut, à la demande du contribuable, être reportée à nouveau au moment où s'opère la transmission, le rachat, le remboursement ou l'annulation des nouveaux titres reçus, à condition que la plus-value réalisée lors de cet échange soit elle même reportée.

Le fait de viser également le remboursement des titres a pour objet de faire échec à des montages d'évasion fiscale tendant à éluder l'imposition des plus-values par l'échange d'actions avec des obligations remboursables au pair, ce qui aurait pour effet de tenter de faire disparaître la matérialité de la plus-value.

Enfin, il convient de souligner que l'ensemble des conditions ci-dessus énoncées seront complétées, en tant que de besoin, par un décret d'application, prévu par le paragraphe I. 7. du texte proposé, chargé de préciser, notamment, les obligations déclaratives des contribuables.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Le dispositif proposé tend à favoriser l'émergence d'une pratique courante dans les pays anglo-saxons qui est celle dite des " business angels ".

Ces "anges gardiens des affaires" sont en général des créateurs d'entreprises ayant réussi et disposant de liquidités importantes dégagées soit par le bénéfice courant de leur société, soit au moment de la cession de tout ou partie des parts de leur société.

Ils investissent ces liquidités dans de jeunes entreprises, susceptibles de générer de fortes plus-values, ou dans des projets en cours d'élaboration. Dans un but qui n'est pas seulement philanthropique, mais qui a pour souci de veiller à la prospérité de l'investissement réalisé, ces investisseurs font généralement profiter les entreprises dans lesquelles ils investissent de leurs conseils et de leur expérience.

Ces investissements bénéficient d'avantages fiscaux substantiels :

Aux États-Unis, l'investissement dans les sociétés innovantes bénéficie :

- d'une part, d'une prise en compte plus large des moins-values de cession des titres de ces sociétés, à concurrence de 100.000 dollars (environ 580.000 F) pour un couple, alors que la prise en compte de droit commun ne peut être effectuée qu'à concurrence de 3.000 dollars (environ 17.400 F), le solde déficitaire pouvant être reporté sur les plus-values des années ultérieures ;

- d'autre part, et surtout, d'une exonération de 50 % du montant des plus-values de cession de ces titres, plafonnée dans la limite de dix fois le prix d'émission des actions ou de 10 millions de dollars (57,6 millions de francs).

Au Royaume-Uni, des incitations fiscales sont prévues dans le cadre de deux instruments privilégiés :

- les plans EIS (plans d'épargne en actions non cotées), dans lesquels les plus-values sont totalement exonérées , les produits distribués étant imposables ;

- les fonds venture capital trust (VTC), qui sont des fonds de placement à risque dans lesquels l'investissement annuel, limité à 100.000 livres (environ 970.000 F), donne droit à une réduction d'impôt de 20 %. Les produits distribués et les plus-values, dans la limite de 100.000 livres, sont, en outre, exonérés d'impôt .

La mesure proposée, dont le coût est du reste impossible à chiffrer de façon précise, apparaît donc comme faiblement incitative par rapport aux dispositifs en vigueur dans les pays anglo-saxons .

À cet égard, votre commission des finances souhaite formuler deux observations :

En premier lieu, cet article comporte sans aucun doute le rapport contraintes/avantage le plus faible de notre histoire fiscale récente.

En tout, ce ne sont pas moins de treize conditions qu'il faut remplir, de façon continue, pour bénéficier de la mesure , pour mémoire :

- trois conditions tenant à la nature des titres cédés, au moment de la cession et à la qualité du cédant :

- sept conditions tenant à la société bénéficiaire de l'apport ;

- deux conditions tenant aux titres détenus en contrepartie de l'apport ;

- une condition tenant à la nature de l'apport en capital.

En regard de ces treize contraintes , que le Gouvernement a posées dans le but de " faire simple et d'aider les entrepreneurs " 23 ( * ) , le contribuable bénéficierait non pas d'une réduction d'impôt et encore moins d'une exonération, même partielle, des plus-values, comme c'est pourtant le cas dans les pays anglo-saxons, mais d'un simple report d'imposition .

Or, la fiscalité des plus-values ayant tendance à s'accroître inexorablement pour cause de " rééquilibrage entre la fiscalité des revenus du travail et celle des revenus du capital ", on se demande à quel point il est vraiment avantageux de reporter son imposition, étant quasiment assuré d'être imposé davantage demain qu'on ne l'est aujourd'hui.

En outre, les risques pris ne sont pas négligeables puisqu'en cas de rupture de l'une seulement des treize conditions, dont on a vu que certaines ne dépendaient pas de la volonté du contribuable (modification du capital de la société bénéficiaire de l'apport au-delà des seuils prévus par le dispositif) le contribuable serait contraint non seulement de s'acquitter immédiatement de la plus-value, mais encore pourrait se voir infliger des pénalités de retard.

Ce dispositif mériterait donc d'être complètement réécrit afin de remplacer le report par une exonération, totale ou partielle, et de simplifier considérablement le nombre et la portée des conditions posées.

C'est qu'en effet, s'il existait une anthologie de la complexité fiscale, le présent article y figurerait certainement en bonne place. Or, une fiscalité qui en vient à un tel degré de raffinement aboutit à organiser sa propre inefficacité. La loi n'est plus ni générale, ni impersonnelle. Elle devient tout simplement incompréhensible. Le Parlement n'est plus le lieu où s'opère la synthèse de la volonté générale. Il n'est plus que le greffier des bureaux chargés de préparer la législation.

En second lieu, et comme votre rapporteur a déjà eu l'occasion de l'écrire dans un récent rapport sur la fiscalité de l'épargne 24 ( * ) , la volonté de favoriser une sorte de micro-climat fiscal en faveur du capital risque a peu de chances d'aboutir tant elle s'insère dans un environnement défavorable à la création de richesses.

À cet égard, il convient de s'interroger sur l'attitude schizophrénique du Gouvernement tantôt clouant au pilori le capital, tantôt encensant le capital risque. Le Gouvernement souhaiterait favoriser les entrepreneurs à condition qu'ils ne deviennent jamais riches mais qu'ils créent le plus d'emplois possibles. Ce type d'entrepreneur n'existe pas.

Décision de la commission : votre commission s'en remet à la sagesse du Sénat pour l'adoption de cet article dont les effets positifs à attendre sur le financement des sociétés nouvelles seront vraisemblablement très faibles

ART1CLE 51 Bis - Déductibilité de l'impôt sur le revenu de la contribution sociale généralisée affectée à l'assurance maladie

Commentaire : cet article a pour objet de rendre déductible de l'assiette de l'impôt sur le revenu la fraction de la contribution sociale généralisée affectée au financement de l'assurance maladie, qui est parallèlement relevée par le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Cet article nouveau résulte d'un amendement du Gouvernement.

L'an dernier, la nouvelle fraction de CSG au taux de 1 % affectée au financement de l'assurance maladie, en contrepartie de la diminution des cotisations, avait été rendue déductible de l'impôt sur le revenu par l'article 94 de la loi de finances pour 1997. Cette déductibilité est depuis prévue à l'article 154 quinquies du code général des impôts.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, actuellement en instance devant l'Assemblée nationale, prévoit de poursuivre ce basculement des cotisations sociales sur la CSG.

La hausse de la CSG à compter du 1er janvier 1998 sera différenciée selon les catégories de revenus : 4,1 points pour les revenus d'activité et les revenus du patrimoine et des produits de placement ; 2,8 points pour les revenus de remplacement.

Le présent article tend à adapter en conséquence la rédaction de l'article 154 quinquies du code général des impôts. Celui-ci, dans sa rédaction actuelle, vise " la fraction de CSG correspondant au taux de 1% ". Il est donc proposé de viser désormais "la fraction de CSG affectée au financement des régimes obligatoires d'assurance maladie ".

Cette rédaction "balai" permet ainsi de couvrir la pluralité des taux de CSG existants . Elle réserve par ailleurs l'éventualité d'une modification de ces taux : dans cette hypothèse, il ne serait plus nécessaire de modifier l'article 154 quinquies du code général des impôts.

La CSG reste non déductible pour sa part affectée à la CNAF, soit 1,1 %, et sa part affectée au fonds de solidarité vieillesse, soit 1,3 % .

Par ailleurs, il convient de rappeler que la déductibilité partielle de la CSG bénéficie aux revenus du patrimoine , pour lesquels elle est prélevée, sur déclaration, en même temps que l'impôt sur le revenu (essentiellement, les revenus fonciers, les rentes viagères, les revenus de capitaux mobiliers, les plus-values sur biens immobiliers et mobiliers) ;

En revanche, elle ne bénéficie pas aux produits de placement pour lesquels elle est prélevée en même temps que le prélèvement libératoire. En effet, dans ce cas, elle est précomptée directement et n'entre pas dans la définition du revenu net global du bénéficiaire.

La commission des finances a exprimé ses réserves , dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 25 ( * ) , à la fois sur l'ampleur du basculement des cotisations d'assurance maladie vers la CSG et sur les conditions dans lesquelles cette réforme est conduite.

Néanmoins, la déductibilité de la nouvelle fraction de CSG apparaît comme un moindre mal. Votre commission des finances rappelle d'ailleurs qu'elle est favorable, par principe, à une déductibilité totale de la CSG .

Le coût de cette déductibilité est assez délicat à évaluer, en raison des incertitudes qui entourent l'impact prévisionnel de la double opération d'augmentation de la CSG et de diminution des cotisations d'assurance maladie. Le Gouvernement s'est d'ailleurs bien gardé d'avancer un chiffre.

Néanmoins, le bilan global est vraisemblablement neutre, à quelques centaines de millions de francs près, car le coût brut de la déductibilité de la nouvelle fraction de CSG est largement compensé par l'augmentation de l'assiette de l'impôt sur le revenu consécutive à la diminution des taux de cotisations d'assurance maladie, qui accroît d'autant le revenu net imposable.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification .

ARTICLE 52 - Crédit d'impôt pour création d'emplois

Commentaire : Le présent article prévoit d'accorder un crédit d'impôt de 10.000 F par emploi net créé au cours de chacune des années 1998, 1999 et 2000. Ce crédit d'impôt, non remboursable, serait imputé sur la contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés, dans la limite de 500.000 F.

Considérant qu'aucun dispositif ne fait aujourd'hui dépendre l'impôt payé par les entreprises des emplois qu'elles créent, le Gouvernement propose d'encourager fiscalement les entreprises qui embauchent. Tel est l'argument figurant dans l'exposé des motifs fourni à l'appui du présent article.

Le Gouvernement prévoit à cet effet la création d'un crédit d'impôt égal à 10.000 francs par emploi net créé imputable sur la contribution de 10 % sur le taux de l'impôt sur les sociétés instituée par la loi de finances rectificative du 4 août 1995, dans la limite de 500.000 francs.

Le bénéfice de ce crédit d'impôt serait temporaire, réservé aux entreprises passibles de l'impôt sur les sociétés et soumis à deux conditions implicites : la société doit être bénéficiaire et créatrice nette d'emplois sur toute la période d'application du dispositif.

Le Gouvernement indique que 110.000 entreprises seraient concernées par cette mesure, parmi lesquelles 85 % de PME, 11 chiffre le coût de ce dispositif à 2,85 milliards de francs pour un nombre de créations d'emplois de 59.333.

Au total, il apparaît que le dispositif est d'ampleur trop limitée pour être réellement incitatif et vise essentiellement à atténuer le poids de la contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés pesant sur les entreprises qui créent des emplois.

I. UN DISPOSITIF TEMPORAIRE, RÉSERVÉ AUX ENTREPRISES PASSIBLES DE L'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS ET SOUMIS À DEUX CONDITIONS IMPLICITE S

A. UN DISPOSITIF RÉSERVÉ AUX ENTREPRISES SOUMISES À L'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS

Le Gouvernement propose d'insérer un article 220 octies dans la section V (calcul de l'impôt) du chapitre II du code général des impôts relatif à l'impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.

Le premier alinéa de ce nouvel article 220 octies prévoit que les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des emplois créés.

Il s'agit donc des sociétés par actions, des sociétés en commandite par actions et des sociétés en commandite simple 26 ( * ) , des SARL 27 ( * ) , des sociétés en participation 28 ( * ) , des sociétés coopératives et de leurs unions et des sociétés d'exercice libéral. De même, les sociétés civiles à objet commercial et les sociétés de personne ayant opté pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés sont éligibles au dispositif.

À l'inverse, les établissements publics, les organismes de l'État jouissant de l'autonomie financière et les organismes des départements et des communes ne sont pas des entreprises et ne peuvent à ce titre bénéficier du crédit d'impôt.

Il convient de rappeler cependant que les autres crédits d'impôt existants dans la législation fiscale française ne sont pas réservés aux entreprises assujetties à PIS.

Ainsi, les crédits d'impôt spéciaux comme le crédit d'impôt-formation (article 244 quater C) ou le crédit d'impôt pour dépenses de recherche (article 244 quater B) concernent-ils les entreprises industrielles ou commerciales soumises, de plein droit ou sur option, à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu. Il en est de même pour les crédits d'impôt correspondant aux retenues à la source effectuées à l'étranger.

En outre, ces crédits d'impôt s'imputent directement sur l'impôt normalement exigible. S'agissant des sociétés soumises à l'IS, à la différence des avoirs fiscaux et des crédits d'impôt classiques, l'État rembourse aux sociétés ces crédits d'impôt spéciaux lorsque les résultats de l'exercice sont nuls ou insuffisants.

B. UN DISPOSITIF TEMPORAIRE

L'article 220 octies nouveau précise que le crédit d'impôt est applicable aux variations d'effectifs constatées au cours des années 1998 à 2000.

Comme souvent dans ce type de dispositifs, deux raisons justifient la fixation d'une durée d'application limitée :

- il s'agit d'une part d'accroître l'effet incitatif du dispositif en créant une date butoir ;

- il s'agit d'autre part de se donner l'opportunité d'évaluer le dispositif avant sa prolongation éventuelle dans le temps.

C. UN CRÉDIT D'IMPÔT PROPORTIONNEL À LA VARIATION DE L'EFFECTIF SALARIÉ MOYEN

L'article 220 octies nouveau prévoit dans son deuxième alinéa que « le crédit d'impôt est égal au produit de la somme de 10.000 F par la variation constatée pendant l'année par rapport à l'année précédente de effectif salarié. »

Si la société contrôle d'autres entreprises soumises à l'impôt sur le revenu, la variation des effectifs salariés moyens de ces sociétés est également prise en compte au prorata des droits détenus par la société qui les contrôle. Les sociétés visées sont définies limitativement.

Il s'agit :

- des sociétés de personne mentionnées à l'article 8 du CGI : sociétés en nom collectif, sociétés en commandite simple, sociétés civiles, sociétés en participation dont les membres sont indéfiniment responsables et dont les nom et adresses ont été

indiqués à l'administration, SARL de caractère familial ayant opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes, EURL, exploitations agricoles à responsabilité limitée ;

- des sociétés de fait assimilées aux sociétés en participation (article 238 bis L du CGI) ;

- des groupements forestiers (article 238 ter ) ;

- des sociétés civiles de construction d'immeubles (article 239 ter ) ;

- des sociétés civiles de moyens (article 239 quater A) ;

- des groupements d'intérêt public (article 239 quater B) ;

- des groupements d'intérêt économique (GIE) et des groupements européens d'intérêt économique (GEIE) (articles 239 quater et 239 quater C) ;

- des syndicats mixtes de gestion forestière et des groupements syndicaux forestiers (article 239 quinquies ).

Par ailleurs, le texte prévoit que les mouvements de personnel intervenus entre des entreprises ayant des liens de dépendance directe ou indirecte 29 ( * ) sont neutralisés pour le calcul de la variation de l'effectif salarié au sein de ces sociétés. De même, il est fait abstraction des transferts de personnels résultant d'opérations de restructurations d'entreprises telles que les fusions, scissions, apports ou opérations assimilées.

Enfin, le 4 de l'article 220 octies nouveau renvoie à un décret le soin de préciser les conditions du calcul de l'effectif salarié servant de base à la détermination du crédit d'impôt. Le Gouvernement indique qu'il n'a pas souhaité alourdir le texte de la loi de dispositions qu'il estime suffisamment encadrées par ce texte lui-même.

Il a cependant indiqué au rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale 30 ( * ) que le décret en cause s'inspirerait des dispositions de l'article 10 GB de l'annexe III du CGI pris pour l'application de l'article 39 quinquies D du même code, relatif à l'amortissement exceptionnel des immeubles à usage industriel ou commercial construits dans les zones d'aménagement du territoire. Cet article dispose que :

« l'effectif des salariés correspond au nombre mensuel moyen de salariés employés au cours du dernier exercice clos à la date d'achèvement des constructions et titulaires d'un contrat de travail. Chaque salarié à temps partiel entre en compte dans l'effectif des salariés au prorata du rapport qui existe entre la durée hebdomadaire de travail mentionnée dans son contrat et la durée légale de travail sur la même période, ou, si elle est inférieure à la durée légale, la durée normale de travail accomplie dans l'établissement ou la partie de l'établissement où il est employé. »

Serait ainsi pris en compte le nombre moyen de salariés employés au cours d'un exercice , et non le nombre de salariés constaté à la date d'ouverture ou à la date de clôture de l'exercice. Il s'agit d'éviter les fluctuations d'effectif occasionnées par la seule perspective d'un avantage fiscal.

Forte de cette assurance, l'Assemblée nationale a amendé le texte pour préciser que le crédit d'impôt s'appréciait en prenant en compte la variation de l'effectif salarié moyen de l'entreprise. Il apparaît que les collaborateurs occasionnels ou non salariés ne sont pas retenus pour le calcul de cette variation.

Enfin, le Gouvernement a souhaité faire démarrer le dispositif dès le 1 er octobre 1997. Aussi, pour le calcul du crédit d'impôt afférent à l'année 1998, la variation d'effectif constatée en 1998 par rapport à 1997 serait déterminée en comptabilisant l'effectif sur une période de référence de quinze mois au lieu de douze (du 1 er octobre 1997 au 31 décembre 1998).

En clair, au lieu d'être calculé par soustraction de l'effectif moyen constaté en 1997 à l'effectif moyen constaté en 1998, la variation serait déterminée conformément à la formule suivante :

12/15 x effectif moyen occupé du 01/10/1997 au 31/12/1998

12/9 x effectif moyen occupé du 01/01/1997 au 30/09/1997

Il convient de noter à cet égard que la variation des effectifs s'apprécie sur l'année civile et non sur l'exercice de gestion pour les entreprises dont l'exercice ne cadre pas avec l'année civile.

Enfin, s'agissant des sociétés mères, leur crédit d'impôt serait calculé en tenant compte du solde des variations d'effectifs constatées dans l'ensemble de leurs filiales.

D. UN DISPOSITIF RÉSERVÉ AUX ENTREPRISES BÉNÉFICIAIRES

Le texte du présent article prévoit que le crédit d'impôt calculé au titre d'une année est imputé sur la contribution de 10% sur l'impôt sur les sociétés, due au titre de l'exercice ouvert au cours de cette même année, dans la limite de 500.000 F.

Il ajoute que le crédit d'impôt n'est pas restituable. Ces précisions appellent trois commentaires :

En premier lieu, contrairement à ce que le Gouvernement indique dans l'exposé des motifs, il apparaît que l'imputation du crédit d'impôt sur la contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés est la seule affectation possible du crédit d'impôt , et non une de ses possibles utilisations, même si nous verrons par la suite que des débits d'impôt peuvent venir contracter le montant des crédits d'impôt reportés.

En second lieu, le cumul de ces deux dispositions permet de déduire que seules les entreprises qui acquittent l'impôt sur les sociétés pourront effectivement bénéficier du crédit d'impôt . Il s'agit donc des seules entreprises qui font des bénéfices .

En effet, dans la mesure où le crédit d'impôt n'est pas remboursable, les entreprises qui ne dégageraient pas suffisamment ou pas du tout de bénéfices ne pourraient pas jouir de l'avantage fiscal.

Cette disposition tranche avec les autres dispositifs de crédits spéciaux existant dans la législation fiscale française. En effet, l'État rembourse aux sociétés les crédits d'impôt formation ou les crédits d'impôt recherche lorsque les résultats de l'exercice sont nuls ou insuffisants .

Dans le cas présent, le dispositif aboutit à la situation paradoxale en vertu de laquelle une société qui serait créatrice nette d'emplois mais qui ne disposerait pas de suffisamment d'assiette fiscale serait pénalisée par rapport à celle, plus florissante qui ferait des bénéfices et jouirait à ce titre d'un crédit d'impôt.

Une entreprise ne pourra bénéficier de ce crédit d'impôt qu'à hauteur de 50 emplois créés par an puisqu'il ne peut être imputé qu'à hauteur de 500.000 francs par an.

Il est cependant précisé que la fraction du crédit d'impôt qui n'aurait pu faire l'objet d'une imputation au titre d'une année est ajoutée au crédit d'impôt ou imputée sur les débits dégagés ultérieurement. Cette disposition permet le report sur les années ultérieures des crédits d'impôt non utilisés, dans la limite cependant de la durée d'application du dispositif, c'est-à-dire le 31 décembre 2000.

E. UN DISPOSITIF RÉSERVÉ AUX ENTREPRISES CRÉATRICES NETTES D'EMPLOIS SUR TOUTE LA DURÉE DE L'APPLICATION DU DISPOSITIF

Enfin, le présent article prévoit la possibilité de « débits fiscaux » : il s'agit de crédits d'impôt négatifs correspondant au cas où les effectifs moyens diminueraient d'une année sur l'autre. Ce débit s'impute sur le ou les crédits d'impôt suivants et, le cas échéant, sur la fraction du crédit d'impôt qui n'a pas pu précédemment faire l'objet d'une imputation, ce qui permet d'effacer l'avantage fiscal des entreprises qui, après avoir créé des emplois, en suppriment.

En outre, les débits subsistant à la date de cessation de l'entreprise ou à l'issue de la durée d'application du dispositif, feront l'objet d'un reversement à hauteur des crédits de même nature qui auront été imputés par l'entreprise.

Ces deux dernières dispositions ont pour objet de réserver le crédit d'impôt aux seules entreprises qui sont créatrices nettes d'emplois tout au long de la période d'application du dispositif : en conséquence, si le solde des créations et des suppressions d'emplois intervenues entre le 1 er octobre 1997 et le 31 décembre 2000 est négatif, l'entreprise devra reverser à l'État le montant éventuel des crédits d'impôt qu'elle aura imputés.

Ces dispositions s'inspirent tout en étant plus sévères, d'un mécanisme similaire existant dans le cadre du crédit d'impôt recherche.

En effet, l'article 199 ter B du CGI prévoit que « lorsque les dépenses de recherche exposées au cours d'une année sont inférieures à la moyenne de celles exposées au cours des deux années précédentes (...), il est pratiqué, dans la limite des crédits d'impôt antérieurement obtenus, une imputation égale à 50 % du montant de la différence sur le ou les crédits d'impôts suivants. »

II. L'APPRÉCIATION DE VOTRE COMMISSION

En dépit des bonnes intentions affichées par le présent dispositif, il apparaît peu conforme à l'objectif visé. En effet, son caractère faiblement incitatif et fortement discriminatoire en fait en réalité un dispositif d'allégement de la charge fiscale pesant sur les entreprises assujetties à l'impôt sur les sociétés plutôt qu'un encouragement à la création d'emplois.

B. UN DISPOSITIF FAIBLEMENT INCITATIF

On peut mettre sérieusement en doute le caractère incitatif d'une aide de 10.000 francs par emploi créé.

Au demeurant, le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale reconnaît dans son rapport que les créations spontanées d'emplois dans les entreprises dont le bénéfice fiscal est inférieur à 1 million de francs induisent un montant de crédit d'impôt sensiblement égal au montant de la contribution de 10 % acquitté par ces sociétés.

Le crédit d'impôt serait donc une « aubaine » pour ces dernières puisqu'elles auraient en tout état de cause créé les emplois donnant droit au crédit d'impôt.

Le dispositif ne devient incitatif que pour les entreprises dont le crédit d'impôt acquis du fait de l'augmentation spontanée de l'emploi ne suffit pas à « éponger » totalement le montant de la contribution de 10 %.

Le dispositif doit donc être considéré, pour les petites entreprises, comme une mesure d'allégement des charges fiscales, et à cet égard, la suppression de la contribution de 10% aurait sans doute été préférable au mécanisme proposé. Au demeurant, si l'on réserve la suppression de la contribution de 10 % aux PME dont le chiffre d'affaires n'excède pas 50 million de francs, le coût pour le budget de l'État serait équivalent (tout en étant plus certain).

B. UN DISPOSITIF DISCRIMINATOIRE

Trois clauses font du crédit d'impôt pour création d'emplois un dispositif discriminatoire :

En premier lieu, il est réservé aux entreprises assujetties à l'impôt sur les sociétés, à l'exclusion donc de celles qui sont passibles de l'impôt sur le revenu ;

En deuxième lieu, dans la mesure où il n'est pas restituable, le crédit d'impôt n'est en pratique utilisable que par les entreprises qui font des bénéfices. On peut se demander s'il est opportun et équitable de réserver un avantage fiscal aux entreprises les plus florissantes et d'en priver les autres au motif qu'elles dégageraient un résultat insuffisant, alors même qu'elles seraient créatrices d'emplois .

Enfin, l'obligation faite aux entreprises de reverser le trop perçu de crédit d'impôt s'il s'avère que le solde final de créations et de suppressions d'emplois sur la période considérée est négatif, est de nature à pénaliser les entreprises les plus fragiles financièrement.

C. UN DISPOSITIF COÛTEUX

Compte tenu de l'« effet d'aubaine » évoqué plus haut, le crédit d'impôt pour création d'emplois est un dispositif coûteux, en dépit de la faiblesse du montant du crédit accordé par emploi et du plafonnement de 500.000 F.

Le Gouvernement anticipe un coût fiscal de 3 milliards de francs pour un nombre d'emplois créés proche de 60.000.

Cette estimation repose sur les statistiques de la direction générale des impôts pour 1994 et 1995. Comme le précise le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale (cf. rapport précité), « elle doit être considérée comme simplement indicative puisque les variations d'effectifs et les situations bénéficiaires ou déficitaires des entreprises dépendent essentiellement de la conjoncture » .

Les estimations du Gouvernement reposent sur l'hypothèse selon laquelle les emplois induits par le crédit d'impôt seront supérieurs de 10 % aux emplois créés spontanément.

Le tableau ci-après permet d'évaluer le coût du dispositif sur la base d'un nombre d'entreprises éligibles au crédit d'impôt de 106.484 (sur un total d'entreprises soumises à l'IS de 645.021). Il s'agit des entreprises qui cumulaient en 1995 les trois conditions nécessaires :

- elles étaient assujetties à l'impôt sur les sociétés ;

- elles étaient bénéficiaires :

- elles étaient créatrices d'emplois.

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D. UN DISPOSITIF QUI PÉRENNISE LA CONTRIBUTION DE 10 % SUR L'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS

Dans la mesure où le crédit d'impôt s'impute sur la contribution de 10 % sur l'IS instituée à titre provisoire, le dispositif proposé a pour conséquence de pérenniser, au moins jusqu'en 2000, cette contribution.

Décision de votre commission : sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modifications .

ARTICLE 53 - Mise en place d'un régime de caution pour les acquisitions intracommunautaires de moyens de transport

Commentaire : cet article tend à instaurer un régime de caution pour le paiement de la TVA afférente aux acquisitions intracommunautaires de moyens de transport.

Dans le régime transitoire en vigueur depuis 1993, la règle de taxation dans le pays de destination est maintenue pour les assujettis et les personnes morales non assujetties.

Ainsi, les mandataires qui effectuent des opérations d'acquisition intracommunautaire de moyens de transport neufs pour le compte de tiers achètent en exonération de TVA dans le pays d'origine et acquittent la TVA dans le pays de livraison.

En pratique, l'administration fiscale leur délivre un certificat qui permet l'immatriculation du véhicule contre l'engagement qu'ils factureront la TVA à leur client et incluront l'acquisition intracommunautaire dans leur déclaration périodique de chiffre d'affaires.

Des fraudes sont alors possibles si le mandataire s'abstient, une fois le certificat obtenu, de déclarer effectivement l'acquisition et disparaît dans la nature, en ne facturant pas la TVA à son client, ou en conservant le produit de la taxe .

Le problème ne se pose pas lorsqu'il n'y a pas d'intermédiaire car, pour les particuliers, le paiement de la TVA est un préalable à l'immatriculation.

La mesure proposée consiste donc à instaurer une obligation de présenter une caution solvable pour pouvoir obtenir le certificat fiscal préalable qui permet l'immatriculation du véhicule. Cette caution prendrait la forme d'une garantie bancaire.

Toutefois, ce régime de caution obligatoire connaît une mesure de tempérament, puisque les intéressés peuvent demander à en être dispenses lorsqu'ils présentent des garanties de solvabilité suffisantes . L'administration appréciera la consistance de ces garanties de solvabilité dans le délai de trente jours qui lui est imparti, son silence valant acceptation.

En pratique, le nouveau régime de caution ne concernera pas les entreprises qui présentent une certaine surface financière, dès lors qu'elles sont connues depuis suffisamment longtemps et sans incidents par les services fiscaux. Ce régime ne vise qu'à décourager les entreprises éphémères à l'origine de l'essentiel des fraudes.

Du reste, si la caution n'est pas présentée par l'entreprise ou si ses garanties de solvabilité propres ne sont pas jugées suffisantes, le seul inconvénient sera que la délivrance du certificat fiscal nécessaire à l'immatriculation interviendra non pas au préalable, mais en même temps que l'acquittement de la TVA , comme pour les particuliers.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification .

ARTICLE 54 - Paiement de la TVA dans le cadre du travail à façon

Commentaire : cet article tend à instaurer, dans le cadre du travail à façon, une solidarité entre le donneur d'ordre et le façonnier pour le paiement de la TVA .

Le travail à façon est un régime de sous-traitance très particulier, dans lequel le donneur d'ordre fournit et reste propriétaire de la matière première transformée par le façonnier.

Au regard de la TVA, le façonnier n'est tenu de facturer au donneur d'ordre que la valeur de sa prestation de service et des matières qu'il ajoute éventuellement. Le donneur d'ordre, lorsqu'il vend la marchandise façonnée, acquitte la TVA sur la totalité de la valeur de celle-ci, qui inclut la matière première et sa transformation.

Ce mécanisme se prête à certaines fraudes . Le façonnier peut ne pas reverser au Trésor la TVA qu'il a facturé au donneur d'ordre et disparaître dans la nature. Si le donneur d'ordre est complice du façonnier, il bénéficie alors de manière frauduleuse de droits à déduction au titre de la TVA payée sur la transformation de la marchandise.

Le Gouvernement propose donc d'instaurer une solidarité de paiement automatique entre le donneur d'ordre et le façonnier pour décourager toute tentation de collusion de fraude.

Une telle solidarité de paiement est assez rare en droit fiscal, et est généralement justifiée par des motifs impératifs. En matière de TVA, il n'existe de solidarité de paiement que dans deux cas :

- dans le cadre du régime intracommunautaire, le vendeur ou le prestataire est solidairement tenue au paiement de la TVA lorsque l'acquéreur redevable est établi hors de France (22 bis et 2 ter de l'article 28) du code général des impôts) ;

- lorsqu'une personne établie hors de France est redevable de la TVA ou doit accomplir des obligations déclaratives, elle est tenue de faire accréditer auprès du service des impôts un représentant assujetti établi en France qui s'engage à remplir les formalités lui incombant et, en cas d'opérations imposables, à acquitter la taxe à sa place : à défaut la TVA est due par le destinataire de l'opération imposable.

Ainsi, dans ces deux cas, la solidarité de paiement est justifiée par le caractère international de l'opération imposable à la TVA et de l'impossibilité juridique et pratique dans laquelle se trouve l'administration fiscale française de contrôler le redevable de la taxe qui se trouve à l'étranger. L'hypothèse envisagée dans le présent article n'est en rien comparable.

La commission des finances de l'Assemblée nationale a donc estimé que le souci légitime de prévenir la fraude ne pouvait pas justifier une telle mesure, qui instaure une présomption irréfragable de complicité de fraude aux dépens du donneur d'ordre.

Une solidarité de paiement aussi générale apparaît contraire aux principes généraux du droit, et particulièrement aux règles protectrices des contribuables.

Le donneur d'ordre serait tenu au paiement de la TVA, même si le défaut de paiement ne résulte pas d'une fraude du façonnier , mais d'une simple défaillance de celui-ci. Par ailleurs, en cas de fraude avérée du façonnier, le donneur d'ordre serait tenu au paiement de la TVA, même s'il n'en est pas complice .

Les députés ont donc voté en première délibération, contre l'avis du Gouvernement, deux amendements tendant à préciser, d'une part, que le défaut de paiement de la TVA doit résulter d'une fraude du façonnier et, d'autre part, que la mauvaise foi du donneur d'ordre doit être avérée.

La vigoureuse intervention du président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, lors du vote de ces amendements, mérite d'être citée 31 ( * ) :

" M. Henri Emmanuelli , président de la commission : Monsieur le secrétaire d'État, je regrette votre conclusion. Nous réfléchissons toujours avec le double souci de permettre à l'administration fiscale de lutter contre des abus qui sont condamnés sur l'ensemble de ces bancs, mais aussi de faire respecter un certain nombre de principes de droit, et je dirai même les principes généraux du droit.

Je ne pense pas qu'on puisse inscrire dans la loi, fût-ce une loi fiscale, fût-ce à l'occasion d'une loi de finances, d'un amendement, un principe de présomption de culpabilité générale.

Nous sommes devant une de ces dispositions qui, à onze heures du soir, peuvent paraître marginales et qui pourtant ne sont pas admissibles (...).

Je vois bien ce que vous cherchez, monsieur le secrétaire d'État et je n'ai aucun doute sur vos intentions. Vous pensez au façonnier qui disparaît au moment de payer, à l'atelier clandestin qui fonctionne trois semaines ou un mois le temps d'honorer une commande, puis se déplace dans une autre rue, un autre immeuble ou un autre sous-sol. Je comprends ce que vous voulez faire. Mais je vous conjure de ne pas inscrire dans nos principes législatifs, au motif qu'il existe un problème particulier, un principe qui, à mon avis, n'est pas compatible avec un État de droit. "

Cependant, le Gouvernement a imposé en seconde délibération une nouvelle rédaction revenant à la solidarité de paiement automatique , mais prévoyant que celle-ci ne jouerait que lorsque le façonnier réalise plus de 50 % de son chiffre d'affaires avec le même donneur d'ordre.

Cette solution apparaît tout aussi peu satisfaisante, pour deux raisons :

- premièrement, elle pose les mêmes problèmes au regard des principes généraux du droit que la version initiale ;

- deuxièmement, elle concerne en fait la quasi totalité des façonniers , qui travaillent le plus souvent avec un donneur d'ordre principal, sinon exclusif.

En pratique, la mesure proposée apparaît de nature à porter une grave atteinte économique au système du travail à façon. En effet, les donneurs d'ordre seront découragés de recourir à cette technique au regard du risque auquel ils s'exposent, faute de pouvoir contrôler la solidité financière et la moralité des façonniers. Ils préféreront alors recourir à une sous-traitance traditionnelle.

Or, le travail à façon est indispensable au bon fonctionnement de certains secteurs économiques. Il est évidemment très développé dans le secteur du textile, où interviennent d'ailleurs la plupart des fraudes visées par le présent article. Mais il est également important dans les secteurs de l'équipement automobile ou de la transformation des métaux précieux. Dans ces secteurs, la valeur des matières premières façonnée est telle que les PME ou les artisans concernés ne pourraient que très difficilement travailler en sous-traitants ordinaires, c'est-à-dire en étant propriétaires de leurs stocks.

Il convient d'ailleurs de souligner que, sur le fond, la nouvelle rédaction proposée par le Gouvernement n'a pas reçu l'approbation de la commission des finances de l'Assemblée nationale.

En effet, cette rédaction a été votée en même temps que de nombreux autres amendements de seconde délibération, selon la procédure du vote bloquée prévue par l'article 44-3 de la Constitution.

Mais le rapporteur général de l'Assemblée nationale, M. Didier Migaud, a expressément indiqué au Ministre qu'il n'était pas certain que la solution proposée répondait aux préoccupations exprimées par les députés, et a souhaité parvenir à une meilleure rédaction en deuxième lecture.

Pour sa part, votre commission des finances partage l'analyse des députés, et vous propose de rétablir le texte qu'ils avaient adopté en première délibération .

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article dans la rédaction qu'elle vous propose .

ARTICLE 55 - Renforcement du contrôle de la déclaration d'échanges de biens

Commentaire : cet article tend à habiliter les agents des douanes à exercer un droit de communication chez les assujettis à la déclaration d'échanges de biens .

I. LE DISPOSITIF ACTUEL

A. LA SUPPRESSION DES FORMALITÉS PRÉALABLES AUX MOUVEMENTS DE MARCHANDISES POUR LES ÉCHANGES COMMUNAUTAIRES

L'ouverture du marché unique s'est traduite par la liberté de circulation des marchandises au sein des pays membres de la communauté européenne.

En outre, la disparition des notions d'importation et d'exportation, remplacées par les notions d'acquisition et de livraison communautaires a eu pour effet de supprimer la plupart des formalités préalables aux mouvements de marchandises pour les échanges intra-communautaires.

Dans ce cadre, la déclaration en douane a été remplacée par la déclaration d'échanges de biens, document par lequel les entreprises sont tenues d'informer l'administration des douanes, a posteriori , mensuellement et à des fins statistiques et fiscales, de leurs échanges avec les pays de l'Union européenne.

Or, la suppression des barrières douanières a révélé ses limites lors de la crise de la « vache folle ».

B. UN SUIVI INSUFFISANT DES MOUVEMENTS INTRACOMMUNAUTAIRE DE MARCHANDISES

En effet, suite à l'embargo proclamé par la France le 21 mars 1991 sur les bovins, les farines bovines et autres produits dérivés de bovins en provenance du Royaume-Uni, la direction générale des douanes et droits indirects a souhaité procéder à des vérifications a posteriori , visant à s'assurer, pour la période qui a suivi l'ouverture des frontières, du respect de la prohibition sanitaire dont faisait alors l'objet les farines animales et produits assimilés.

Une telle démarche supposait de contrôler le contenu des déclarations d'échanges de biens. L'administration s'est alors rendue compte qu'elle ne disposait pas des outils juridiques suffisants pour contrôler rapidement les éléments documentaires fournis par les importateurs sur la nature des produits achetés dans les pays tiers.

Le système actuel autorise seulement les agents des douanes à adresser aux personnes tenues de souscrire la déclaration d'échanges de biens des demandes de renseignements et de documents destinés à rechercher et à constater les manquements à la production de cette déclaration. Le délai de réponse ne peut pas être inférieur à 5 jours. Ils peuvent également convoquer lesdites personnes. En cas de refus de déférer à la convocation ou en cas de défaut de réponse à une demande de renseignements, les agents des douanes doivent envoyer une mise en demeure et ne peuvent recouvrir l'amende avant l'expiration de 30 jours. Cette procédure particulièrement lourde s'avère totalement inadaptée à la nécessité, en période de crise, de procéder à des vérifications urgentes sans laisser la possibilité aux personnes contrôlées de modifier les documents qui leur sont réclamés.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. L'OBLIGATION DE COMMUNICATION DES DOCUMENTS NÉCESSAIRES À L'ÉTABLISSEMENT DE LA DÉCLARATION D'ÉCHANGES DE BIENS

Le présent article propose que les agents des douanes puissent exiger sans préavis, à des fins de contrôle statistique, la communication des documents nécessaires à l'établissement de la déclaration d'échanges de biens.

Ces documents sont la facture, le contrat commercial et le contrat de transport.

Selon l'exposé des motifs du projet de loi de finances, cette mesure vise à habiliter les agents des douanes à exercer un droit de communication. En réalité, ce dernier diffère fortement aussi bien du droit de communication régi par le livre des procédures fiscales que de celui prévu dans l'article 65 du code des douanes.

Le droit de communication prévu par le présent article est sans rapport avec le droit de communication prévu par l'article L. 81 du livre des procédures fiscales, puisque ce dernier relève de l'établissement de l'assiette et du contrôle des impôts, alors que le premier doit faciliter le contrôle statistique.

Il se distingue également du droit de communication prévu dans l'article 65 du code des douanes :

- en ce qui concerne l'objet de la demande : l'article 65 du code des douanes autorise les agents des douanes à exiger la communication des papiers et documents de toute nature relatifs aux opérations intéressant leur service ; le présent article limite le droit de communication aux documents nécessaires à l'établissement de la déclaration d'échanges de biens ;

- en ce qui concerne les personnes concernées : l'article 65 du code des douanes vise toutes les personnes touchées par des opérations intéressant les services des douanes (importateurs, exportateurs, donneurs d'ordre, transporteurs...) ; les personnes concernées par le présent article sont uniquement les assujettis à la déclaration d'échanges de biens ;

Le droit de communication instauré par le présent article est donc beaucoup plus restreint, et dans son objet, et dans les personnes qu'il vise, et dans le type de documents qu'il permet d'obtenir.

Il a une nature exclusivement administrative et ne peut s'exercer que pour reconstituer des flux de marchandises. En aucun cas il ne permet de procéder à des investigations ou à rechercher des infractions. Il autorise seulement l'agent des douanes, le cas échéant, à constater la non-remise des documents. C'est pourquoi il a vocation à être exercé par des agents de catégorie C.

B. LA FIXATION D'UN DÉLAI DE CONSERVATION

Le présent article fixe le délai de conservation de ces documents à 6 ans. Ce délai correspond au délai de conservation des documents mentionnés dans l'article L. 102 B du livre des procédures fiscales, à savoir les livres, registres, documents ou pièces sur lesquels peuvent s'exercer les droits de communication, d'enquête et de contrôle de l'administration.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

ARTICLE 56 - Renforcement du dispositif des amendes fiscales

Commentaire : cet article, modifié par l'Assemblée nationale, tend à renforcer le dispositif des amendes fiscales destinées à réprimer d'une part les manquements en matière de facturation pour l'établissement de la TVA et, d'autre part, les fausses facturations .

I. LE DROIT D'ENQUÊTE : SES ORIGINES ET SA NATURE

A. LE CONTEXTE DE LA CRÉATION DU DROIT D'ENQUÊTE

La mise en place du marché unique à partir du 1er janvier 1993 impliquait la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux à l'intérieur du territoire communautaire ainsi que la suppression des barrières fiscales et douanières.

Pourtant, le fonctionnement harmonieux du régime communautaire, et par voie de conséquence, l'élimination des principaux risques de fraude, supposaient que trois conditions se trouvassent simultanément réunies :

- donner au vendeur les moyens d'apprécier la qualité de son cocontractant, et donc sa situation au regard de la TVA ;

- assurer un échange d'informations entre les différents États membres, afin de vérifier que toute livraison exonérée trouve, dans un autre pays, sa contrepartie sous la forme d'une acquisition taxée ;

- mettre en place une procédure permettant, si nécessaire, de contrôler la cohérence entre les factures reçues ou émises par une entreprise et les stocks qu'elle détient.

Les moyens à mettre en oeuvre pour atteindre les deux premiers objectifs ont été définis par la directive du 16 décembre 1991 et par un règlement du conseil en date du 27 janvier 1992, relatif à la coopération administrative dans le domaine des impôts indirects.

En revanche, le respect de la troisième condition relevait exclusivement de dispositions internes et dépendait des moyens de contrôle accordés à l'administration fiscale.

C'est pour répondre à ces besoins que l'article 106 de la loi n° 92-677 du 17 juillet 1992 a créé le droit d'enquête.

B. L'ESPRIT DU DISPOSITIF CRÉANT LE DROIT D'ENQUÊTE

Le droit d'enquête donne à l'administration l'instrument lui permettant d'intervenir de manière inopinée dans une entreprise afin de procéder au seul contrôle des règles de facturation.

Il convient de rappeler que lors des débats relatifs à la création du droit d'enquête, la commission des finances du Sénat avait insisté sur le caractère strictement limité de son objet (à savoir les manquements aux règles de facturation) et sur le fait qu'il ne s'apparentait pas à une procédure de contrôle fiscal.

En outre, la commission des finances avait souligné que les éventuels manquements relevés au cours du droit d'enquête faisaient l'objet d'un procès-verbal et non de sanctions immédiates, toute possibilité de redressement s'appuyant sur ces faits étant subordonnées à la mise en oeuvre ultérieure d'une procédure de droit commun. Le droit d'enquête se distingue donc bien de la vérification de comptabilité ou de l'examen contradictoire de la situation personnelle.

II. LA DENATURATION DU DROIT D'ENQUÊTE PAR LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Or, le texte proposé initialement par le Gouvernement visait à faire du droit d'enquête une nouvelle procédure de contrôle fiscal.

A. LE RENVERSEMENT DE LA CHARGE DE LA PREUVE

Le paragraphe II du présent article modifiait la rédaction de l'article L. 80 H du livre des procédures fiscales relatif aux conclusions et aux suites de l'enquête. Il disposait que « les constatations du procès-verbal non contestées par l'assujetti dans le délai qui lui est imparti à l'alinéa précédent pour faire valoir ses observations font foi jusqu'à preuve du contraire » .

En réalité, cette rédaction revenait à renverser la charge de la preuve de l'administration vers le contribuable pour tous les manquements constates s'il ne contestait pas les constatations du procès-verbal dans un délai de quinze jours suivant la signature du procès-verbal.

Jusqu'à présent, l'exercice du droit d'enquête ne pouvait donner lieu qu'à l'application de l'amende prévue à l'article 1725 A, qui sanctionne le défaut de présentation ou de tenue des registres prévus à l'article 286 quater du code général des impôts.

Le paragraphe II de cet article proposait d'élargir cette procédure aux amendes prévues par l'article 1740 ter (qui sanctionne le travestissement ou la dissimulation par une personne, à l'occasion de l'exercice de ses activités professionnelles, de l'identité ou de l'adresse de ses fournisseurs) et l'article 1740 ter A nouveau (qui sanctionne le défaut de présentation des documents prévus à l'article 289 et 290 quinquies du code général des impôts).

Or, pour l'application de ces amendes, il aurait appartenu au contribuable d'apporter la preuve de l'inexactitude des faits retenus contre lui dans les procès-verbaux.

B. L'OPPOSABILITÉ AUX TIERS DES CONSTATATIONS NON CONTESTÉES PAR L'ASSUJETTI

Le paragraphe II du présent article disposait que les constatations du procès-verbal « ne peuvent être opposées à cet assujetti ainsi qu'aux tiers concernés par la facturation que dans le cadre des procédures de contrôle mentionnées à l'article L. 47 au regard des impositions de toute nature et de la procédure d'enquête prévue à l'article L. 80 F » .

Il étendait ainsi l'opposabilité aux tiers concernés par la facturation des constatations non contestées par l'assujetti dans le cadre des contrôles prévus à l'article L. et de la procédure d'enquête. Il permettait en outre d'infliger à un tiers, dans le cadre d'une autre procédure qui lui était destinée, les amendes prévues aux articles 1725 A, 1740 ter et 1740 ter A du code général des impôts.

III. UN DISPOSITIF QUI RESTE INACCEPTABLE EN LA MATIÈRE

Votre rapporteur n'aurait pu émettre qu'un avis défavorable si ce texte avait été présenté au Sénat dans sa rédaction initiale. Non seulement il dénaturait entièrement la notion de droit d'enquête, sans pour autant oser l'affirmer clairement, mais il violait le principe constitutionnel des droits de la défense.

Toutefois, l'Assemblée nationale a gommé les aspects les plus choquants de cet article.

A. UN DISPOSITIF ÉPURE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée a apporté trois modifications qui vise, d'une part, à désamorcer la tentative du Gouvernement de créer une nouvelle procédure de contrôle fiscal et, d'autre part, à mieux garantir les droits de la défense :

- le premier amendement interdit que le procès-verbal puisse être opposé à un tiers qui n'a aucune influence sur sa rédaction. En outre, il porte à trente jours, au lieu de quinze, le délai permettant au contribuable faisant l'objet d'un procès-verbal dans le cadre du droit d'enquête. Votre rapporteur ne peut qu'approuver cet amendement qui empêchera que des tiers, sans enquête préalable les concernant et sans vérification de leur propre comptabilité, se voient opposer les constatations faites chez un redevable qui peut n'avoir avec eux aucune relation réelle ou des relations épisodiques qui n'impliquent aucune participation concertée à la fraude ;

- le second amendement dispose que les constatations du procès-verbal établies lors d'une procédure d'enquête ne pourront pas être opposées à l'occasion d'une nouvelle procédure d'enquête ;

- le troisième amendement entoure les amendes fiscales de l'article 1740 ter A du code général des impôts, instituées par le présent article, des mêmes garanties que celles prévues à l'article 1740 ter , et notamment la possibilité pour l'intéressé de présenter ses observations.

B. UN DISPOSITIF ENCORE À PARFAIRE

Certes, l'Assemblée nationale a contribué à l'amélioration du présent article. Toutefois, certaines dispositions restent inacceptables.

Votre rapporteur a relevé quatre améliorations indispensables.

D'une part, il tient à rappeler que l'enquête a pour seul objet de rechercher les manquements aux règles de facturation et, en conséquence, permet seulement d'ouvrir la voie à d'autres procédures plus lourdes. Or, le texte actuel donne à l'enquêteur un droit de communication portant sur l'ensemble des documents comptables et professionnels de l'entreprise.

Déjà en 1992, la commission des finances du Sénat avait souligné qu'un tel décalage entre objectif et moyens faisait planer le risque d'une dérive du droit d'enquête, qui, de procédure de constat matériel, pourrait insensiblement se transformer en examen fiscal préalable. La commission avait donc proposé de définir de manière plus précise l'étendue de ce droit de communication. Elle avait estimé que s'il devait bien porter sur les factures et la comptabilité matière, il paraissait souhaitable de la limiter aux seules pièces directement liées aux opérations contrôlées, tels les bons de transport ou de commande, les livres d'achats ou de ventes, ainsi que la liste des clients. Tous les documents non liés à l'application des règles de facturation, en particulier les documents comptables de synthèse, doivent rester en dehors du champ d'investigation de l'enquêteur.

Le ministre du budget de l'époque, M. Michel Charasse, avait refusé cet amendement, estimant qu'il ne fallait pas priver les enquêteurs des indices qui pourraient être décelés par l'examen d'autres documents, naturellement de nature professionnelle.

Pourtant, la tentative du Gouvernement de transformer le droit d'enquête en une nouvelle procédure de contrôle fiscal confirme les craintes émises en 1992. En effet, si le Gouvernement estime que les constatations relevées par procès-verbal durant l'enquête pourraient faire foi jusqu'à preuve du contraire, c'est parce que les informations recueillies à partir de l'ensemble des documents professionnels de l'entreprise sont tellement larges que l'administration, après en avoir eu connaissance, pourrait faire l'économie de la vérification de comptabilité.

C'est pourquoi votre rapporteur propose de limiter le droit d'enquête aux seules pièces directement liées aux opérations contrôlées.

Votre rapporteur propose également d'interdire l'application des amendes prévues à l'article 1740 ter suite à la mise en oeuvre du droit d'enquête.

En effet, comme il l'a été souligné à plusieurs reprises dans ce commentaire, le droit d'enquête ne s'apparente pas à une procédure de contrôle fiscal. Les éventuels manquements relevés dans son cadre font l'objet d'un procès-verbal et non de sanctions immédiates. À l'origine, le projet de loi prévoyait toutefois que la mise en oeuvre du droit d'enquête pouvait donner lieu à l'application de l'amende prévue à l'article 1725 A du code général des impôts, c'est-à-dire en cas de défaut de présentation ou de tenue des registres obligatoires en matière de TVA.

Le présent article propose d'élargir le champ des amendes applicables suite à la mise en oeuvre d'un droit d'enquête. Or, cette extension est contestable.

Votre rapporteur accepte que cette procédure autorise l'administration fiscale à sanctionner le défaut de présentation soit des factures ou documents délivrés pour les biens livrés ou les services rendus à un autre assujetti, soit des documents comptables permettant d'identifier l'exécution de travaux immobiliers.

En revanche, il s'oppose à ce que la mise en oeuvre du droit d'enquête puisse avoir comme conséquence directe de sanctionner, sans recours préalable à une véritable procédure de contrôle fiscal, les fausses facturations ou la dissimulation d'identité ou d'adresse. En effet, votre rapporteur estime que le droit d'enquête ne permet aux vérificateurs d'établir que dans tel ou tel cas, il y a eu fausse facturation ou manoeuvre frauduleuse. Pour arriver à ce résultat, l'administration fiscale est obligée d'examiner l'ensemble des documents comptables. En outre, elle dépasse le cadre des constations purement formelles pour porter un jugement de valeur sur les factures examinées. C'est d'ailleurs la position de la Cour de cassation qui, dans une décision du 12 décembre 1995, estime que la preuve de la fausse facturation ne peut être recherchée que dans les conditions prévues à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales.

Par ailleurs, votre rapporteur propose d'améliorer la rédaction de l'alinéa additionnel que le présent article propose d'insérer dans l'article 1740 ter du code général des impôts pour préciser que la charge de la preuve incombe à l'administration.

De même, votre rapporteur propose une rédaction différente de l'article 1740 ter A afin de renforcer les droits de la défense et de moduler le plafond de l'amende prévue dans cet article.

Décision de la commission : la commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé .

ARTICLE 57 - Modalités de contrôle des revenus résultant d'une activité occulte découverte lors d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle

Commentaire : cet article tend à insérer, dans le livre des procédures fiscales, un article L. 47 C, afin de permettre à l'administration fiscale de tirer toutes les conséquences fiscales de l'exercice d'une activité occulte découverte lors d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle .

I. L'INDÉPENDANCE RELATIVE DES PROCÉDURES D'ÉXAMEN CONTRADICTOIRE DE LA SITUATION FISCALE PERSONNELLE ET DE VÉRIFICATION DES COMPTABILITÉS

A. DEUX PROCÉDURES FORMELLEMENT DISTINCTES

1. Quant à leur objet

L'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, prévu à article L. 12 du livre des procédures fiscales, concerne les personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu. À l'occasion de cet examen, l'administration fiscale contrôle la cohérence entre, d'une part, les revenus déclarés du contribuable et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal.

La vérification de comptabilité, prévue à l'article L. 13 du livre des procédures fiscales, ne concerne que les catégories de revenus pour lesquelles le contribuable est astreint à la tenue d'une comptabilité ou encore les sociétés soumises à l'impôt sur le revenu.

2. Quant aux règles de procédure

Certes, tout examen contradictoire de la situation fiscale personnelle et toute vérification de comptabilité doivent être précédés de l'envoi d'un avis de vérification qui doit mentionner les années soumises à vérification et le droit, pour le contribuable, de se faire assister du conseil de son choix. De même, avant le début de toute vérification, l'administration doit envoyer la « charte du contribuable vérifié ».

Mais chacune de ces procédures obéit également à des règles propres.

Ainsi, la durée du contrôle lors de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle est limitée à un an, ce délai étant porté à deux années en cas de découverte d'activité occulte.

De même, l'article L. 49 du livre des procédures fiscales dispose qu'à la suite d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, l'administration doit en porter les résultats à la connaissance du contribuable, même en l'absence de redressement.

En outre, aux termes de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales, lorsqu'elle a procédé à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, l'administration fiscale ne peut plus procéder à des redressements pour la même période et pour le même impôt, à moins que le contribuable n'ait fourni à l'administration des éléments incomplets ou inexacts.

La vérification de comptabilité, elle, est soumise à des règles précises concernant l'exigence d'un débat oral et contradictoire et le lieu où elle doit s'opérer. En effet, il résulte de l'article L. 13 et L. 52 du livre des procédures fiscales que la vérification de comptabilité est un contrôle sur place. Elle doit donc avoir lieu au siège de l'entreprise ou à son principal établissement, selon le cas.

En outre, pour les entreprises de moindre importance, la vérification de comptabilité ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois.

B. DES INTERFERENCES NOMBREUSES ENTRE LES DEUX PROCÉDURE MAIS QUI NE NUISAIENT PAS À L'ACTIVITÉ DE CONTROLE DE L ADMINISTRATION

1. Des procédures concomitantes et imbriquées

Très souvent, l'examen contradictoire de la situation personnelle fiscale résulte d'une vérification de comptabilité ou, à tout le moins, est engagé simultanément à cette dernière procédure.

Tel est le cas de vérifications dites « étendues ». La vérification est dite étendue lorsque l'examen de la comptabilité de l'entreprise s'est déroulé parallèlement à un examen contradictoire de la situation personnelle fiscale de l'exploitant individuel ou des principaux exploitants. Il s'agit alors, pour le vérificateur, de confronter les résultats déclarés ou la valeur des résultats reconstitués et fixés au montant apparent des ressources que laissent supposer le train de vie et les autres dépenses ou acquisitions de l'exploitant individuel ou des principaux exploitants.

À priori, l'examen contradictoire de la situation personnelle se distingue aisément de la vérification de comptabilité en ce que, par définition, il ne comporte pas l'examen d'une comptabilité, les particuliers n'étant pas astreints à la tenue de comptes en vue de l'assiette de l'impôt sur le revenu.

Toutefois, la pratique bancaire permettant l'utilisation d'un compte financier professionnel à des fins personnelles conduit l'administration à être confrontée, lors d'un examen contradictoire de la situation personnelle, à des comptes mixtes.

C'est pourquoi l'article L. 47 B dispose que cette dernière peut examiner les opérations figurant sur ces comptes et demander aux contribuables tous éclaircissements ou justifications sur ces opérations sans que ces demandes constituent le début d'une procédure de vérification de comptabilité.

2. Une jurisprudence favorable à l'administration

Un arrêt du Conseil d'État (CE, 22 mai 1992, Andreani), avait précisé que l'administration qui découvre, à l'occasion d'un examen contradictoire de la situation personnelle, une activité occulte, peut la taxer d'office sans avoir à opérer préalablement une vérification de comptabilité qui devrait, bien entendu, respecter les garanties du contribuable si elle était effectuée. Le fait de s'être mis en situation d'être taxé d'office prive le contribuable du bénéfice des garanties attachées aux procédures contradictoires de redressement.

Cet arrêt s'est avéré, à l'usage, très favorable à l'administration. En effet, celle-ci a considéré que si le contribuable était en position d'être évalué d'office, à raison des bénéfices retirés d'une activité découverte au cours d'une vérification personnelle, elle pouvait fixer le montant du revenu catégoriel taxable sans procéder à l'envoi d'un avis de vérification de comptabilité.

Or, dans son arrêt du 2 février 1996 (ministre du budget arrêt Jean-Paul Talbourdel), le conseil d'État a opéré un revirement de jurisprudence.

En effet, il a jugé que " si l'administration est en droit d'examiner, à l'occasion d'une vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble d'un contribuable, les comptes qui retracent à la fois les opérations privées et les opérations professionnelles qu'il a effectuées, elle ne peut, pour contrôler, et, le cas échéant, redresser les bénéfices retirés par l'intéressé de son activité professionnelle, se fonder sur les données qu'elle a pu recueillir en prenant connaissance des éléments des comptes bancaires qui, se rapportant à l'exercice de cette activité, ont le caractère de documents comptables, sans avoir procédé, préalablement, à une vérification de comptabilité, en respectant les garanties prévues par la loi pour ce type de contrôle ; que le fait que le contribuable se soit placé dans une situation qui autorise l'administration à évaluer d'office ses bénéfices professionnels n'a pas pour effet de couvrir le vice résultant de l'absence d'une vérification de comptabilité régulière, dès lors que cette situation n'a été révélée que par les investigations conduites au cours de la vérification approfondie de situation fiscale personnelle. "

II. UN DISPOSITIF QUI VISE À REDONNER À L'ADMINISTRATION DES MOYENS EFFICACES POUR SON ACTION SANS PARVENIR À CLARIFIER LES RELATIONS ENTRE L'EXAMEN CONTRADICTOIRE DE LA SITUATION PERSONNELLE ET LA VÉRIFICATION DE COMPTABILITÉ

A. UN DISPOSITIF QUI VISE À REDONNER À L'ADMINISTRATION DES MOYENS EFFICACES POUR SON ACTION

1. Les arguments en faveur de cette modification législative

Désormais, l'administration ne peut effectuer un redressement fiscal à la suite des renseignements professionnels qu'elle a retirés de l'examen des comptes mixtes sans engager une procédure de vérification de comptabilité au préalable.

Or, comme le faisait remarquer le commissaire du Gouvernement dans ses conclusions sur l'arrêt Talbourdel, « dans ce cas, exiger de lui (le vérificateur) l'envoi d'un avis de vérification de comptabilité paraît exagérément formaliste, d'autant que l'intérêt d'une vérification de comptabilité est de permettre une discussion contradictoire et qu'un tel débat a bien lieu dans le cadre de la procédure d'établissement des évaluations administratives prévues aux articles L. 7 et L. 8 du livre des procédures fiscales. »

En outre, il convient de rappeler que la vérification de comptabilité permet à l'administration de s'assurer de la régularité des écritures comptables ou de confronter les déclarations du redevable avec les écritures comptables en vue de contrôler la sincérité de ses déclarations. Or, les activités occultes se caractérisent justement par l'absence de comptabilité. Dans ces conditions, l'obligation d'engager une vérification de comptabilité apparaît surtout comme une contrainte supplémentaire et peu justifiée vis-à-vis de l'administration.

Par ailleurs, elle entraîne un allongement des procédures préjudiciable à l'efficacité du contrôle de l'administration. En effet, un examen contradictoire de la situation personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an, cette durée étant portée à deux ans en cas de découverte, en cours de contrôle, d'une activité occulte. En outre, l'article L. 50 du livre des procédures fiscale interdit à l'administration, lorsqu'elle a procédé à un examen contradictoire de la situation personnelle de procéder à des redressements pour la même période et pour le même impôt. Une véritable course contre la montre s'engage donc entre, d'une part, le contribuable, qui essaie de gagner le plus de temps possible pour limiter au maximum le montant de son redressement et, d'autre part, l'administration.

Les services fiscaux contactés par votre rapporteur ont cité l'exemple d'un trafiquant de drogue ; nonobstant le caractère illicite de cette activité, le trafic de produits stupéfiants est considéré comme l'exercice d'une activité commerciale au sens de l'article 34 du code général des impôts. Si l'administration fiscale, suite à un examen contradictoire de la situation personnelle, constate un enrichissement inexpliqué à partir des encaissements bancaires, elle va adresser à la personne concernée une demande d'éclaircissement puis, en l'absence de réponse, une notification de redressement pour enrichissement inexpliqué.

Toutefois, si un mois avant l'expiration du délai de clôture de l'examen contradictoire de la situation personnelle, le contribuable reconnaît qu'il s'agit bien de bénéfices industriels et commerciaux, non seulement elle sera obligée de prendre en compte les charges pour lesquelles le contribuable pourra prouver qu'elles sont liées à cette activité et devra les déduire du bénéfice imposable, mais la procédure risque d'être annulée parce que l'administration n'aura pas engager de vérification de comptabilité. Or, le délai d'un an sera alors dépassé et l'administration sera dans l'incapacité de taxer le contribuable sur son bénéfice imposable. La situation actuelle conduit donc à paralyser l'administration fiscale.

2. Le dispositif

Le I de cet article propose de dispenser l'administration fiscale lorsque, au cours d'un examen contradictoire de la situation personnelle, sont découvertes des activités occultes ou mises en évidence des conditions d'exercice non déclarées de l'activité d'un contribuable, d'engager une vérification de comptabilité pour régulariser la situation fiscale du contribuable au regard de cette activité. Cet article vise donc toutes les situations dans lesquelles soit l'activité ne serait pas déclarée, soit l'activité principale masquerait une activité occulte. Dans ce dernier cas, on pourrait au premier abord estimer que cette disposition n'a pas à s'appliquer puisque l'existence d'une activité officielle implique la présence d'une comptabilité. Mais c'est oublier le formalisme de la vérification de comptabilité. En effet, l'administration ne doit pas envoyer un avis unique de vérification, qui couvrirait l'ensemble de la procédure. Le juge exige que soit adressé au contribuable un avis par activité. Or, le vérificateur ne pourra évidemment pas envoyer un avis concernant une activité occulte de part la nature même de cette activité qui ne découvrira qu'au cours de la vérification de comptabilité,.

En revanche, les dispositions de cet article ne concernent pas la requalification d'un revenu déclaré dans la mauvaise catégorie d'imposition. C'est par exemple le cas lorsqu'un revenu catégoriel d'un contribuable est déclaré comme bénéfice industriel et commercial alors qu'il s'agit d'un bénéfice non commercial.

Le II dispose que seraient « réputés réguliers » les rappels notifiés selon les règles de cet article en tant qu'elles seraient contestées par le moyen tiré du défaut d'engagement d'une vérification de comptabilité.

Selon les informations fournies à votre rapporteur général, les rappels ainsi notifiés porteraient sur 4 milliards de francs. L'État souhaite donc se prémunir contre un afflux de contentieux déclenché par le changement de jurisprudence du Conseil d'État. Toutefois, votre rapporteur tient à souligne sa réticence à accepter cette validation. Le Parlement est en effet appelé, suite à une décision de justice, à revenir rétroactivement sur les règles applicables à des litiges en cours. Comme à l'accoutumée, une telle mesure tend à nier l'indépendance de la justice et à donner l'impression que l'administration fiscale peut échapper aux décisions de justice.

B. UN DISPOSITIF QUI NE RÈGLE PAS LE PROBLÈME DE LA FRONTIÈRE ENTRE EXAMEN CONTRADICTOIRE DE LA SITUATION PERSONNELLE ET VÉRIFICATION DE COMPTABILITÉ

Pour illustrer son propos, votre rapporteur voudrait reprendre les conclusions du commissaire du Gouvernement concernant l'arrêt Tramier du 6 janvier 1993 qui soulevait la question de la frontière entre l'examen contradictoire de la situation personnelle et la vérification de comptabilité.

"Celui-ci pose à nouveau la question lancinante de la distinction, à propos d'opérations déterminées, entre VASFE et vérification de comptabilité."

En effet, quoi qu'il soit fait au point de vue législatif pour réparer les atteintes successives portées par la jurisprudence à l'arsenal de contrôle de l'administration, la question ne cessera de se poser tant que le législateur et l'administration n'auront pas vraiment tiré au plan du contrôle toutes les conséquences du fait que l'impôt sur le revenu a été unifié en 1959 et qu'il est, par suite, suranné d'y appliquer les modes de contrôle mis au point au temps des anciens impôts cédulaires, c'est-à-dire des modes de contrôle propres à chaque catégorie de revenu imposable, en les faisant coexister avec une méthode de contrôle du revenu global connue mais innomée, au moins depuis l'instruction générale du 31 janvier 1928, mais seulement légalisée par l'article 67 de la loi du 30 décembre 1975, sous le nom de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble (VASFE), puis d'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle (ESFP). Il en résulte que, dans la pratique la plus répandue, le contrôle de revenu d'ensemble se présente comme une suite ou un complément du contrôle des revenus catégoriels, alors qu'en bonne logique, le contrôle des divers revenus catégoriels devrait dériver de celui du revenu global. Mais les textes du Livre des procédures fiscales qui instituent les garanties du contribuable essentiellement au niveau du contrôle des revenus catégoriels (vérification de comptabilité par exemple), ne sont pas adaptés à une telle pratique.

Toutefois, seule une clarification de la procédure de l'examen contradictoire de la situation personnelle permettrait de clarifier le débat. Or, elle n'est pas souhaitée par l'administration qui a conscience que cette procédure pourrait éventuellement être remise en cause par le conseil institutionnel.

Décision de la commission : votre commission vous propose l'adoption de cet article sans modification .

ARTICLE 58 - Institution d'une amende en cas de délivrance abusive d'attestations ouvrant droit à un avantage fiscal

Commentaire : cet article tend à insérer un nouvel article 1768 quater dans le code général des impôts, qui institue une amende fiscale à l'encontre de toute personne, organisme ou groupement qui délivre irrégulièrement des attestations de versement ouvrant droit à déduction ou réduction fiscale .

I. UN DISPOSITIF ACTUEL INÉQUITABLE

A. UNE RECRUDESCENCE DES DÉLIVRANCES ABUSIVES D'ATTESTATIONS OUVRANT À UN AVANTAGE FISCAL

Une enquête réalisée l'été dernier par les services du contrôle fiscal a révélé qu'un certain nombre d'assureurs avaient délivré des attestations de versements de primes qui, pourtant, n'ouvrent plus droit à la réduction d'impôt depuis la loi de finances pour 1996 dont l'article 4 module l'avantage fiscal.

Par ailleurs, d'autres enquêtes ont mis en lumière des irrégularités concernant les reçus délivrés aux contribuables ayant effectué des dons au profit d'oeuvres ou d'organismes d'intérêt général et bénéficiant, à ce titre, d'une réduction d'impôt.

B. UN DISPOSITIF QUI PERMET UNIQUEMENT DE SANCTIONNER LES CONTRIBUABLES, MÊME DE BONNE FOI

Or, le dispositif actuel ne permet pas de sanctionner les personnes ou organismes qui ont délivré irrégulièrement les attestations ouvrant droit à une déduction ou une réduction d'impôt.

En effet, l'administration est simplement autorisée à opérer un redressement à l'égard du contribuable ayant bénéficié de cet avantage. En outre, ce dernier se verra appliquer un intérêt de retard même s'il est de bonne foi.

Le présent article propose de remédier à cette situation.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LA POSSIBILITÉ DE SANCTIONNER LES ORGANISMES DÉLIVRANT IRRÉGULIÈREMENT LES ATTESTATIONS

Pour éviter d'avoir à sanctionner le contribuable qui peut s'être fié de bonne foi aux indications portées sur le certificat délivré par l'assureur ou l'organisme d'intérêt général, cet article propose d'instaurer une amende à l'encontre de toute personne, organisme ou groupement qui délivrerait irrégulièrement des attestations de versements ouvrant droit à déduction ou à réduction d'impôt.

Le champ d'application de cet article est très étendu. Ainsi, les redevables éventuels de l'amende peuvent être des personnes physiques comme des personnes morales, des organismes ou des groupements, ce qui inclut donc aussi bien les associations que les organismes d'assurance.

De même, les termes utilisés pour qualifier le document délivré (certificat, reçu, état, attestation) englobent tous les documents qui peuvent être joints à la déclaration de revenu pour justifier le bénéfice d'un avantage fiscal.

Par ailleurs, l'irrégularité envisagée couvre un champ très large puisque l'exposé des motifs vise aussi bien les délivrances abusives (qui peuvent résulter d'une erreur de droit) que frauduleuses, c'est-à-dire intentionnelles. La bonne foi de la personne ou de l'organisme ayant délivré l'attestation n'est donc pas prise en compte.

Cette disposition paraît bien rigoureuse. Elle trouve en partie sa contrepartie dans le fait que les contribuables ne pourront plus faire l'objet de redressement concernant l'avantage fiscal indu dont ils ont bénéficié. Toutefois, votre rapporteur espère que l'administration se montrera compréhensive et fera bon usage du droit de remises et de transactions à titre gracieux que lui accorde l'article L. 247 du livre des procédures pénales.

Ce dispositif n'est acceptable que s'il n'entraîne pas systématiquement une double sanction, et du contribuable et de la personne ou de l'organisme délivrant irrégulièrement un certificat. Or, l'article proposé par le Gouvernement et adopté par l'Assemblée nationale ne mentionne nulle part le fait que l'introduction de cette amende conduit à ne plus opérer de redressement sur le contribuable de bonne foi.

C'est pourquoi votre rapporteur propose un amendement visant à rappeler l'objectif de ce nouveau dispositif.

Le montant de l'amende est fixé à 25 % des sommes indûment mentionnées sur l'attestation fournie au contribuable. Ce taux a été choisi par référence au taux de la réduction d'impôt afférente aux primes d'assurance-vie.

Conformément à l'article L. 80 D, le recouvrement de cette amende ne sera régulier que si la motivation de l'amende fiscale est portée à la connaissance de la personne ou de l'organisme sanctionné trente jours au moins avant la mise en recouvrement. Durant ce délai, ces derniers peuvent présenter leurs observations.

En outre, cet article prévoit la responsabilité solidaire des dirigeants de droit ou de fait des personnes émettrices des attestations. Cette dernière disposition vise essentiellement les dirigeants d'association.

À l'origine, le texte proposé par le Gouvernement ne prenait pas en compte le comportement du dirigeant, et notamment, sa bonne foi. Or, une telle sévérité aurait conduit à des abus d'autant plus regrettables qu'ils auraient gravement affecté le monde associatif. Toutefois, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à limiter au cas où la mauvaise foi est établie, la possibilité de mettre enjeu la responsabilité solidaire.

B. LES PROBLÈMES POSÉS PAR LES ASSOCIATIONS

L'application du dispositif prévue par le présent article aux associations a provoqué des inquiétudes dans le milieu associatif à cause du différend qui les oppose à l'administration fiscale à propos de la déductibilité des cotisations d'adhésion. Alors que la documentation de base de la direction générale des impôts dispose que « la cotisation versée par les membres d'une association ne peut jamais avoir la nature d'un don ouvrant droit à un avantage fiscal » , beaucoup d'associations estiment que les cotisations qu'elles recueillent ne représentent pas la contrepartie d'un service rendu et, en conséquence, sont déductible au titre de l'impôt sur le revenu. En outre, elles soulignent l'inégalité de situation entre, d'une part, les syndicats et partis politiques, dont les cotisations ouvrent droit à réduction conformément au 2 bis de l'article 200 du code général des impôts et, d'autre part, les associations.

Votre rapporteur est conscient de ce problème et estime qu'il mériterait d'être examiné attentivement dans le cadre d'une loi sur le financement des associations.

En attendant, il tient à rappeler la création, dans le cadre de la politique d'amélioration des relations entre l'usager et l'administration, de « correspondants-associations » dans chaque direction départementale des services fiscaux. Ces derniers ont pour mission de recueillir toutes les interrogations des associations sur leur financement ou leur mode de fonctionnement, et de leur apporter les réponses appropriées.

En outre, le service de communication de l'administration fiscale a élaboré une plaquette d'information destinée spécialement aux associations.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter l'article ainsi amendé.

ARTICLE 59 - Revalorisation des redevances d'exploitation auxquelles sont assujettis les exploitants d'installations nucléaires

Commentaire : adopté sans débat à l'Assemblée nationale, cet article vise à revaloriser de 2,5 % les redevances auxquelles sont assujettis les exploitants d'installations nucléaires de base.

D'un produit global de 542,6 millions de francs en 1997, ces redevances ont été revalorisées en dernier lieu par l'article 80 de la loi de finances pour 1997.

L'augmentation de 2,5 % est supérieure au niveau de la hausse des prix constatée en 1997. En fait, comme l'indique l'exposé des motifs du présent article, le produit des redevances est principalement destiné à compenser le coût des analyses de sûreté, qui en consomme près de 75 %. Ce coût augmente fortement, comme le montre le tableau ci-après.

Évolution du coût des analyses de sûreté

Montant (en millions de francs)

Evolution en %

Taux de la revalorisation annuelle des redevances

1991

256,3

6,0 %

1992

264,1

+ 3,1

6,5 %

1993

275,2

+ 4,2

5,1 %

1994

286,1

+ 4,0

14,0%

1995

304,4

+ 6,4

2,0 %

1996

320,0

+ 5,1

0,0 %

1997(1)

335,0

+ 4,7

2,5 %

1998(1)

343,3

+ 2,5

2,5 %

(1) Estimations

Source : Direction de la sûreté des installations nucléaires c omme je l'indiquais dans mon rapport général sur la loi de finances pour 1997, le produit de ces redevances est rattaché au budget de l'industrie par voie de fonds de concours (chapitre 54-93), afin notamment de financer des analyses de sûreté. Celles-ci font l'objet d'un contrat entre la direction de la sûreté des installations nucléaires (DSIN) et l'organisme qui lui fournit la majeure partie de son expertise technique, à savoir l'Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN) du Commissariat à l'énergie atomique.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 60 - Actualisation de la taxe pour frais de chambre de métiers et perception d'un droit pour tenue du registre des métiers

Commentaire : Le présent article a pour objet d'actualiser la taxe pour frais de chambres de métiers, régie par l'article 1601 du code général des impôts.

I - LE DISPOSITIF ACTUEL

Cette taxe sert à financer :

- les dépenses de fonctionnement des chambres de métiers et de l'assemblée permanente des chambres de métiers ;

- la contribution de ces organismes aux caisses prévues par l'article 76 du code de l'artisanat (caisses de secours des artisans privés de travail) ;

- la contribution au fonds de promotion et de communication de l'artisanat créé par l'article 131 de la loi de finances de 1997 et le décret n° 97-1040 du 16 novembre 1997.

Cette taxe prend la forme d'une taxe additionnelle à la taxe professionnelle acquittée par les sociétés ou chefs d'entreprises inscrits au répertoire des métiers conformément au décret n° 83-487 du 10 juin 1983.

La taxe comporte deux éléments :

- un droit fixe par ressortissant dont le maximum est fixé pour 1997 à 595 francs.

Jusqu'en 1997, ce droit faisait l'objet d'une majoration obligatoire comprise entre 50 et 80 % pour financer les actions de formation continue des artisans. L'article 132 de la loi de finances pour 1997 a supprimé ce dispositif; les fonds d'assurance formation (FAF) sont maintenant financés par un prélèvement assis sur le plafond annuel de la sécurité sociale.

La loi de finances pour 1997 (article 131) a créé une majoration obligatoire (10 %) de ce droit fixe pour financer le fonds de promotion et de communication de l'artisanat.

- un droit additionnel dont le produit est arrêté par les chambres de métiers sans pouvoir excéder 50 % de celui du droit fixe, soit 297.5 francs en 1997.

La loi de finances pour 1997 autorise les chambres des métiers à porter exceptionnellement ce plafond à 60 % après autorisation du ministre de tutelle. Un tel mécanisme existe déjà pour les chambres de commerce. En 1997, 21 chambres de métiers ont bénéficié de cette autorisation.

Évolution du produit de la taxe pour frais de chambre

(en millions de francs)

1992

1993

1994

1995

1996

1997

Produit total

929.8

980

1.000,5

1.038,7

1.072,2

1.176,9

Nombre d'assujettis

794.082

786.349

778.104

784.784

788.007

788.000

Taxe moyenne perçue

1.171

1.246

1.286

1.323

1.361

1.493

Évolution en %

+6,4

-3,2

+2,9

+2,8

+9,7

À l'heure actuelle, ce système présente deux inconvénients majeurs :

le plafonnement du droit additionnel a conduit à ce que la croissance du produit de ce droit soit systématiquement inférieure à celle du droit fixe adopté par le Parlement :

le plafonnement du produit du droit additionnel à la taxe professionnelle conduit à limiter l'effet de prise en compte des bases de la taxe professionnelle - essentiellement la masse salariale - dans la taxe perçue sur les artisans. Le mécanisme actuel différencie insuffisamment l'artisan qui travaille seul et l'entreprise avec de nombreux salariés.

Votre rapporteur général estime que la réflexion engagée depuis plusieurs années sur ce sujet devrait aboutir pour régler une question récurrente dans le débat entre le Gouvernement et les chambres de métiers.

II - LES MESURES PROPOSÉES

Le présent article propose, tout d'abord, de revaloriser le montant maximum du droit fixe en le portant à 615 francs (+3,4 %) pour 1998 ; en 1997. cette hausse avait été de 1,71 %.

L'augmentation proposée est sensiblement plus forte que celle retenue pour l'inflation en 1998 (1,4 %).

Cette hausse correspond :

- aux actions engagées par les chambres de métiers ;

- aux frais que va occasionner l'organisation des élections consulaires en 1998.

Évolution en % du montant maximum du droit fixe de la taxe pour frais de chambres de métiers

1989

1990

1991

1 992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

Maximum du droit fixe

4.5

4

4.5

3.5

5

4,95

3,45

2,63

1,71

3,36

Inflation

3,6

3,4

3,2

2,4

2,1

1,6

1,7

2

1,3

1,4

Croissance

4,5

4,1

4,6

3,5

5

4,9

3,5

2,16

1,7

3,0

*provisoire

Sur cet article, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du rapporteur spécial des crédits des PME. du commerce et de l'artisanat qui tend à créer une taxe pour frais de tenue du registre des métiers.

L'article 19 du décret n° 83-487 du 10 juin 1983 autorise les chambres de métiers à percevoir des redevances établies en pourcentage du maximum du droit fixe pour tenue du registre des métiers : immatriculation 100 %, création d'un établissement 50 % etc.

La loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 a rendu obligatoire l'immatriculation aux répertoires des métiers. Cette tâche est donc devenue une "mission de service public" à la charge des chambres de métiers.

Le caractère obligatoire de cet acte, implique qu'il ne peut plus, au regard de la jurisprudence du Conseil d'Etat (Arrêts du 10 février 1995, chambre syndicale du transport aérien), être juridiquement considéré comme "un service rendu", puisqu'il répond désormais au caractère général de mission de service public administratif des chambres de métiers ; l'article 19 du décret de 1983 n'est donc plus applicable et les chambres de métiers ne peuvent procéder lors de l'immatriculation à la perception d'une redevance pour service rendu. Par conséquent, l'amendement propose de financer l'acte par l'impôt.

C'est pourquoi il est créé une taxe additionnelle à la taxe pour frais de chambre des métiers, du montant du droit fixe pour une immatriculation nouvelle et d'un demi droit fixe pour une modification d'immatriculation ou une immatriculation simplifiée.

Ces montants ne représentent aucune charge supplémentaire pour les artisans, puisque l'ancienne redevance était basée elle aussi sur le montant du droit fixe.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 61 - Prorogation de la majoration exceptionnelle des cotisations additionnelles aux contrats d'assurance prélevées au profit du Fonds national de garantie des calamités agricoles

Commentaire : adopté sans débat par l'Assemblée nationale, cet article vise à proroger d'un an les majorations des taux des contributions additionnelles sur les conventions d'assurance versées au F.N.G.C.A. (fonds national de garantie des calamités agricoles).

Cet article proroge d'un an les majorations de taux des contributions additionnelles dans des termes très proches de ceux de l'article 82 du projet de loi de finances pour 1997. tel qu'amendé par le Sénat. Dans la discussion générale, notre collègue Michel Souplet avait en effet observé que :

"Cet amendement a pour objectif de revenir sur une échéance. Dans le projet de loi initial, figurait la date du 31 décembre 2006. L'Assemblée nationale avait ramené cette date au 31 décembre 2000 et, pour ma part, je propose la date du 31 décembre 1997.

Il s'agit de la contribution additionnelle complémentaire de 7 % destinée à alimenter le fonds de garantie contre les calamités agricoles. Les organisations professionnelles agricoles et la commission nationale se sont trouvées un peu devant le fait accompli. Elles sont d'accord pour faire des propositions concrètes. Or, dans la loi de juillet 1964, qui est à l'origine du fonds de garantie contre les calamités agricoles, il est prévu que la commission nationale des calamités agricoles, où sont représentés les organisations professionnelles agricoles et les assureurs, fasse des propositions au ministre compétent sur le taux des contributions additionnelles applicables. Elles n'ont pas besoin de quatre ans pour se réunir et faire des propositions. Nous souhaitons donc qu'elles le fassent au cours de l'année 1997."

On peut rappeler que les ressources du FNCGA proviennent :

d'une contribution additionnelle aux primes ou cotisations afférentes aux conventions d'assurance couvrant, à titre exclusif ou principal, les dommages aux cultures, aux récoltes, aux bâtiments, et au cheptel, mort ou vif, affectés aux exploitations agricoles : le taux de cette contribution additionnelle est actuellement fixé à 15% pour les conventions d'assurance contre l'incendie, à 7 % pour les conventions d'assurance (autres que les assurances incendie) relatives aux bâtiments, et à 5 % pour les conventions d'assurance relatives aux cultures (assurances grêle et tempête) et à la Mortalité du bétail ;

d'une contribution additionnelle particulière applicable aux exploitations conchylicoles :

d'une subvention de l'État inscrite au budget du ministère de l'agriculture et de la pêche (chapitre 46-33) et dont le montant doit être au moins égal au produit des deux contributions précitées ;

à titre exceptionnel, d'une contribution additionnelle complémentaire de 7 % sur les conventions d'assurance relatives aux véhicules utilitaires affectés aux exploitations.

Le FNCGA devrait dégager en 1997 un solde excédentaire de 998,9 millions de francs, mais avant indemnisation en 1998 d'une partie résiduelle des dégâts sécheresse de 1995 et 1996 et surtout de l'indemnisation des dommages consécutifs aux gels du printemps 1997. Alors que le rapporteur général de l'Assemblée nationale juge "fragile" la situation financière du FNCGA, le Gouvernement a néanmoins annulé 15 millions de francs de crédits sur l'exercice 1997 (arrêté du 19 novembre).

Contributions additionnelles au profit du FNCCA

1997

1998

Ecart 1998/1997

Ecart _1998/1997

Sans surtaxes

Avec surtaxes

Sans prorogation des sur taxes

Avec prorogation des surtaxes

Taux

Produits

Taux

Produits

Taux

Produits

Incendie

15 %

282

10 %

188

15 %

282

- 94

0

Grêle, tempête :

- bâtiments

- cultures

- cheptel

7 %

5 %

5 %

90

65

5

5 %

5 %

5 %

64

65

5

7 %

5 %

5 %

90

65

5

-26

-

-

0

-

-

Responsabilité civile et dommages des véhicules utilitaires

7 %

129

-

0

7 %

129

- 129

0

Conchyliculture

(1)

2

-

2

-

2

-

-

Divers (2)

-

5

-

5

-

5

-

Totaux

578

-

329

578

-249

0

(1) La contribution additionnelle particulière applicable aux exploitations conchylicoles est ainsi fixée

- dans les circonscriptions situées entre Dunkerque et Saint- Nazaire 100 % des primes ou cotisations afférentes aux conventions d'assurance contre l'incendie

- dans les autres circonscriptions. 50 % des primes ou cotisations afférentes aux conventions d'assurance contre l'incendie et 30 % des primes ou cotisations afférentes aux conventions d'assurance couvrant les risques nautiques

(2) Montants perçus mais ne pouvant être rattaché à une convention spécifique

Source Ministère de l'Agriculture

Le recours à un système complexe de surtaxes sur des contributions additionnelles et de contribution additionnelle complémentaire n'est guère satisfaisant, conclusion qui figurait déjà dans mon rapport général précédent... Une réflexion d'ensemble s'impose donc plus que jamais, en raison notamment des perspectives de réforme de la Politique Agricole Commune qui devrait rendre plus nécessaire un système global d'assurance contre l* s aléas de l'activité agricole.

Soulignons enfin que la commission nationale des calamités agricoles a été préalablement consultée, au mois de juin dernier, sur l'opportunité des prorogations demandées, et s'est déclarée favorable à cette mesure.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 61 bis - Fixation des coefficients de majoration des valeurs locatives servant de base aux impôts directs locaux

Commentaire : le présent article prévoit la fixation pour 1998 des coefficients de revalorisation des valeurs locatives cadastrales.

La valeur locative cadastrale correspond au loyer annuel théorique que produirait un immeuble bâti ou non bâti figurant au cadastre, s'il était loué aux conditions du marché. Cette notion constitue l'élément central du calcul des bases de l'ensemble des impôts directs locaux.

En l'absence d'une révision des bases cadastrales (la dernière révision remontant à 1970 en ce qui concerne les propriétés bâties et à 1961 en ce qui concerne le foncier non bâti), la revalorisation forfaitaire périodique de ces bases constitue un exercice rituel.

Il convient de rappeler que l'absence d'une disposition prévoyant la revalorisation forfaitaire des bases cadastrales conduirait à faire peser exclusivement sur la variation des taux l'évolution du produit des impôts locaux.

I. UN « OUBLI » RÉPARÉ

Dans le texte initial proposé par le gouvernement, pour la première fois depuis la dernière actualisation des valeurs locatives au 1er janvier 1978, prise en compte pour le calcul des impositions établies depuis 1980, il n'y avait en effet pas de disposition concernant la revalorisation des bases. Cette lacune, dont l'objet semblait être d'appeler l'attention du Parlement sur la nécessité de procéder à la révision des bases cadastrales, a été comblée au cours de la discussion à Assemblée nationale.

À cet égard il convient de rappeler que le précédent Gouvernement avait dans la rédaction initiale du projet de loi de finances pour 1997 prévu une rédaction où les valeurs locatives de l'ensemble des propriétés non bâties, immeubles industriels ne relevant pas de l'article 1500 du code général des impôts et de l'ensemble des autres propriétés bâties se voyaient appliquer un coefficient de revalorisation égal à 1, alors qu'il avait été toujours été supérieure 1,01 depuis 1990.

L'Assemblée nationale, sur proposition de sa commission des finances, avait cependant judicieusement contesté ce gel généralisé des bases et obtenu que le coefficient de revalorisation soit fixé à 1,01, c'est à dire une revalorisation de 1 %, pour l'ensemble des propriétés bâties autres que les immeubles industriels ne relevant pas de l'article 1500 du code général des impôts 32 ( * ) . Pour les propriétés non bâties et les immeubles industriels ne relevant pas de l'article 1500 du code général des impôts, ce coefficient était fixé à 1.

Le même « scénario » s'est en quelque sorte reproduit à l'occasion de la discussion du présent projet de loi de finances, le Gouvernement acceptant, au terme d'une seconde délibération, un coefficient de revalorisation fixé à 1,011, c'est-à-dire une revalorisation de 1,1 %, pour l'ensemble des propriétés bâties autres que les immeubles industriels ne relevant pas de l'article 1500 du code général des impôts. Pour les propriétés non bâties et les immeubles industriels ne relevant pas de l'article 1500 du code général des impôts, ce coefficient reste fixé à 1.

II. RAPPEL DES PRINCIPES QUE DEVRAIENT RESPECTER UNE FUTURE RÉVISION

Le nouveau Gouvernement a confirmé à plusieurs reprises sa volonté de procéder à la révision des bases cadastrales dans le courant de l'année 1998. À cet égard, votre commission des finances tient à rappeler son attachement aux principes qui avaient été retenus par le précédent Gouvernement à la suite des recommandations du comité des finances locales.

Le Gouvernement précédent avait en effet procédé à une nouvelle rédaction du projet de loi portant incorporation dans les rôles d'imposition des nouvelles évaluations cadastrales issues de la loi n° 90-669 du 30 juillet 1990 afin d'intégrer dans ce projet les observations émises par le comité des finances locales au cours de sa séance du 17 septembre 1996.

Quatre demandes émanant du comité des finances locales avaient en effet été expressément reprises par M. Lamassoure ministre délégué au budget, porte-parole du Gouvernement dans son intervention devant le comité des finances locales et avaient été confirmées par M. Jean Arthuis, ministre de l'économie et des finances, devant le congrès de l'association des maires de France :

- la suppression d'un groupe spécifique de tarification pour les logements à caractère social :

- l'application d'un taux de revalorisation de 1,61. au lieu de 1,37 initialement proposé par le Gouvernement, pour les évaluations cadastrales des locaux industriels et commerciaux :

- l'allongement de trois à quatre ans de la période d'intégration des nouvelles bases d'imposition :

- l'abaissement des seuils au-delà desquels l'augmentation des cotisations individuelles d'impôts locaux seront écrêtées : au-delà de 30 % de progression et de 300 francs supplémentaires, au lieu de 50 % et 500 francs.

La commission des finances réitère donc sa demande de voir ces principes figurer dans le futur projet de loi de révision des bases cadastrales dont le Gouvernement a annoncé le dépôt futur.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 61 ter - Exclusion du bénéfice du dégrèvement de taxe professionnelle en cas de transfert d'activité

Commentaire : cet article a pour objet d'exclure du bénéfice du dégrèvement pour cessation d'activité, prévu à l'article 1478-1 du code général des impôts, les entreprises qui procèdent au transfert d'un établissement d'une commune à l'autre.

I. RAPPEL DU DROIT EXISTANT

La taxe professionnelle est due. en principe, pour l'année entière, par le redevable qui exerce l'activité au 1er janvier de l'année d'imposition. Cette règle vaut en cas de changement d'exploitant en cours d'année mais ne s'applique pas lorsqu'il y a :

- création d'établissement en cours d'année ;

- cessation de toute activité dans l'établissement.

À cet égard, il convient de préciser que la notion d'"établissement" vise toute installation utilisée par une entreprise en un lieu déterminé, ou toute unité de production intégrée dans un ensemble industriel ou commercial, lorsqu'elle peut faire l'objet d'une exploitation autonome.

S'agissant de la cessation d'activité, l'article 1478 du code général des impôts dispose que lorsque, dans un établissement, un redevable cesse définitivement d'exercer toute activité imposable en cours d'année, sans l'avoir cédée, la taxe n'est pas due pour les mois restant à courir.

Il faut cependant préciser qu'aucun dégrèvement de cotisation n'est applicable lorsque le redevable poursuit dans l'établissement une autre activité imposable à taxe professionnelle, mais qu'en revanche, ce dégrèvement est applicable si le redevable poursuit ou reprend l'exercice de sa profession dans une autre commune.

Au regard de la taxe professionnelle, le transfert du lieu d'activité d'un établissement à un autre s'analyse en une double opération :

- d'une part, il y a dans la commune de départ fermeture d'établissement (si le contribuable n'a pas de successeur) ou changement d'exploitant (s'il y a successeur) :

- d'autre part, dans la commune de transfert, il y a création d'établissement ou extension d'activité si le redevable était déjà installé dans l'établissement.

Les modalités de détermination de la taxe professionnelle due au titre de l'année du transfert est résumée dans le tableau suivant :

Nature du transfert

Transfert dans une commune différente

Transfert à l'intérieur de la même commune

Ancien établissement

Nouvel établissement

Ancien établissement que le redevable ait

ou non un

successeur

Nouvel

Etablissement que le redevable ait ou non un prédécesseur

Transfert dans un nouvel établissement créé par le redevable - transfert total

- transfert partiel

(année du transfert)

Pas de dégrèvement

Pas de rôle supplémentaire

Fermeture d'établissement dégrèvement partiel sauf si cession de l'activité exercée dans l'établissement d'activité maintien de l'imposition primitive (annualité)

Création d'établissement pas d'imposition

Création d'établissement pas d'imposition

Transfert dans un établissement déjà exploité par le

redevable : - transfert total

- Transfert partiel

Fermeture d'établissement dégrèvement partiel sauf si cession de l'activité exercée dans l'établissement Réduction d'activité maintien de l'imposition primitive (annualité)

Extension d'activité maintien de l'imposition initiale (annualité)

Extension d'activité maintien de l'imposition initiale (annualité)

Source : Mémento guidé "Financements collectivités locales 1997" primitive (annualité)

II. PORTÉE DU NOUVEAU DISPOSITIF

Par rapport au droit existant, le présent article prévoit d'exclure du bénéfice du dégrèvement de taxe professionnelle prévu à l'article 1478-1 du code général des impôts qui cessent leur activité dans un établissement et transfèrent celle-ci dans une autre commune.

A. RAPPEL DE LA JURISPRUDENCE RELATIVE AU TRANSFERT D'ACTIVITÉ

À cet égard, il convient de rappeler (ainsi qu'il ressort du tableau ci-dessus) qu'à l'heure actuelle, un transfert d'activité au sein du territoire d'une même commune n'entraîne aucun dégrèvement de taxe professionnelle.

Dans un arrêt du 6 janvier 1988. le Conseil d'État avait en effet juge qu'en raison du caractère communal de la taxe professionnelle, le simple transfert d'un établissement à l'intérieur de la même commune n'aurait pas droit au dégrèvement pour cessation d'activité.

Un récent arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris, du 7 novembre 1996, SA Soupletube, a d'ailleurs repris le même raisonnement pour le cas d'un transfert d'établissement intervenant non pas au sein de la même commune, mais à l'intérieur du périmètre d'un syndicat d'agglomération nouvelle. La Cour a en effet estimé que l'article 1609 nonies B. du code général des impôts, prévoyant que le syndicat est substitué aux communes membres pour l'application des dispositions relatives à la taxe professionnelle fait de cet établissement public l'unité géographique de référence pour l'application des divers textes concernant l'établissement de la taxe professionnelle et, qu'en conséquence, le dégrèvement prévu à l'article 1478-1 du code général des impôts ne s'applique pas.

Le présent article prévoit cependant d'aller beaucoup plus loin.

B. UNE SUPPRESSION DE PRINCIPE DU DÉGRÈVEMENT EN CAS DE TRANSFERT D'ACTIVITÉ

En pratique, cette disposition qui résulte d'un amendement déposé par M. Brard et les membres du groupe communiste, entraîne la suppression de l'incitation induite à la délocalisation des entreprises qui résulte de la possibilité d'obtenir un dégrèvement à la charge de l'État 33 ( * ) .

Cette mesure n'engendre, en revanche, aucune double imposition pour les entreprises qui seraient concernées, puisque :

- d'une part, en cas de création d'établissement dans la commune d'arrivée, le redevable n'est pas imposé à raison de cet établissement pour l'année du transfert :

- d'autre part, en cas d'extension d'un établissement préexistant dans la commune d'arrivée, les bases transférées ne sont imposées qu'au titre de l'année n+2.

En termes d'impact budgétaire, d'après les informations fournies à votre commission par le service de la législation fiscale, cette disposition aurait un effet positif, puisque son incidence "négative", en termes d'accroissement des compensations liées au plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée 34 ( * ) , serait en tout état de cause inférieure à la diminution du coût du dégrèvement actuellement lié aux transferts d'activités.

Au total, votre commission, considérant que cette disposition ne porte pas atteinte aux finances locales qu'elle ne revient pas sur le principe du dégrèvement de taxe professionnelle en cas de cessation d'activité et qu'elle contribue à modérer le coût de ce dégrèvement pour le budget de l'État, estime qu'il n'y a pas lieu de s'opposer à l'adoption de cet article.

Décision de la commission : sous le bénéfice des observations ci-dessus consignées, votre commission vous propose d'adopter le présent article.

ARTICLE 61 quater - Extension aux créations d'activités artisanales de l'exonération de la taxe professionnelle dans les zones de revitalisation rurale

Commentaire : Le présent article a pour objet d'étendre le bénéfice de l'exonération de la taxe professionnelle applicable dans les zones de revitalisation rurale aux créations d'activités artisanales

L'extension aux créations d'activités artisanales de l'exonération de taxe professionnelle applicable dans les zones de revitalisation rurale constitue un complément positif à l'ensemble du dispositif fiscal et social existant en faveur de ces territoires.

Après avoir rappelé l'économie de ce dispositif, votre commission vous proposera d'adopter la légitime extension que prévoit le présent article.

I. RAPPEL DES PRINCIPALES DISPOSITIONS EXISTANTES EN FAVEUR DES ZONES DE REVITALISATION RURALE

A. LES DIFFERENTES ZONES RURALES

Il convient en effet de rappeler que les zones de revitalisation rurale s'insèrent dans un ensemble de territoires fragiles au sein desquels diverses possibilités d'allégements fiscaux et sociaux ont été autorisés pour tenter de remédier aux handicaps qu'ils doivent surmonter. L'article 42 de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995, dite loi «Pasqua» a défini plusieurs catégories de zones, « caractérisées par des handicaps géographiques, économiques ou sociaux » dans lesquelles sont mises en oeuvre « des politiques renforcées et différenciées de développement ». S'agissant des zones rurales, il convient de mentionner :


Les zones d'aménagement du territoire (ZAT) :

Elles ont été définies par le décret n° 95-149 du 6 février 1995. Elles correspondent aux zones éligibles à la prime d'aménagement du territoire.


Les territoires ruraux de développement prioritaire (TRDP) :

Ils ont été délimités par le décret n° 94-1139 du 26 décembre 1994. Ils comprennent principalement l'ensemble des zones éligibles à l'objectif 5b de la politique régionale communautaire ainsi que les parties les plus rurales des zones retenues au titre de l'objectif 2.


Les zones de revitalisation rurale (ZRR) :

Elles comprennent les communes appartenant aux territoires ruraux de développement prioritaire et situées soit dans les arrondissements dont la densité démographique est inférieure ou égale à trente-trois habitants au kilomètre carré, soit dans les cantons dont la densité démographique est inférieure ou égale à trente et un habitants au kilomètre carré, dès lors que ces arrondissements ou cantons satisfont également à l'un des trois critères suivants :

- le déclin de la population totale :

- le déclin de la population active :

- un taux de population active agricole supérieur au double de la moyenne nationale.

Elles comprennent également les communes situées dans les cantons dont la densité démographique est inférieure ou égale à cinq habitants au kilomètre carré.

B. LE DISPOSITIF D'ALLEGEMENT FISCAL ET SOCIAL APPLICABLE DANS LES ZONES DE REVITALISATION RURALE (ZRR)

Avant d'analyser la portée du présent article, votre commission souhaite en effet rappeler les grandes lignes du dispositif de dérogations fiscales et sociales applicables dans ces zones.

Dans ce domaine, il faut souligner que le décret délimitant les zones de revitalisation rurale (ZRR). a été publié le 15 février 1996 (décret n°96 - 119 du 14 février 1996, qui comporte en annexe la liste des zones concernées), après l'obtention de l'avis favorable de la commission européenne.

Depuis lors, outre les dispositions existant en faveur des territoires faux de développement prioritaire (TRDP), les mesures spécifiques suivantes sont applicables dans les ZRR :


• la compensation par l'État de l'exonération de plein droit de taxe

professionnelle pour la création ou l'extension d'une entreprise (art. 1465 A. du code général des impôts) ;


l'amortissement fiscal exceptionnel de 25 % au cours de l'exercice d'achèvement des investissements immobiliers à usage industriels ou commercial, effectués entre le 1° janvier 1995 et le 31 décembre 1999, des P.M.E. (moins de 250 salariés, chiffre d'affaires hors taxes inférieur à 140 millions de francs ou total du bilan inférieur à 70 millions de francs) (art. 39 quinquies D du code général des impôts) ;


• l'allégement des cotisations d'allocations familiales
(art. L 241-6-2 du code de la sécurité sociale) ;


• la compensation par l'État, à hauteur de 50 % des allégements de la taxe départementale de publicité foncière consentis pour l'acquisition de logements à usage d'habitation ( art. 1594 F quater du code général des impôts) ;


• l'attribution prioritaire des concours financiers
accordés par l'État en faveur de la réhabilitation de bâtiments anciens acquis par les communes pour les transformer en logements locatifs sociaux (art. 62 de la loi n°95-115 du 4 février 1995).

Par ailleurs la loi relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville a prévu l'extension du dispositif d'exonération sur douze mois des cotisations sociales patronales applicable aux embauches dans les

ZRR et les zones de redynamisation urbaine.

Institué par l'article 6-5 de la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989 et modifié par loi n°95-115 du 4 février 1995. cette disposition qui se trouve maintenant codifiée à l'article L. 322-13 du code du travail avait en effet une double extension :


• cette mesure, qui n'était applicable qu'aux embauches ayant pour effet de porter l'effectif à quatre salariés au moins et cinquante au plus, est désormais applicable à partir du premier salarié ;


les bénéficiaires de cette exonération pour embauche sont dorénavant, "les entreprises et les groupements d'employeurs exerçant une activité artisanale, industrielle, commerciale, au sens de l'article 34 du code général des impôts, une activité agricole, au sens de l'article 63 du même code ou non commerciale au sens de l'article 92 du même code".

Applicables depuis le 1° janvier 1997 ces mesures nouvelles sont ainsi venues renforcer les moyens mis en oeuvre en faveur du monde rural, le coût budgétaire en année pleine de l'ensemble des mesures d'exonérations applicables aux ZRR étant évalué par le Gouvernement à environ 1,2 milliards de francs.

II. UNE DISPOSITION POSITIVE MAIS DE PORTÉE LIMITÉE

A. UN PLAN POUR LE MONDE RURAL REMIS À PLUS TARD

Il convient en effet de rappeler qu'un plan pour le monde rural avait été annoncé par le précédent Gouvernement. Celui-ci devait comporter un volet législatif destiné à satisfaire l'objectif, fixé par l'article 61 de la "loi Pasqua" du 4 février 1995. d'assurer aux habitants des ZRR des conditions de vie équivalentes à celles ayant cours sur les autres parties du territoire.

À cette fin. ce plan devait inclure notamment :


• un volet de mesures fiscales destinées à favoriser le maintien et le développement d'activités, ce volet devant comporter une amélioration des conditions d'exonération de la taxe professionnelle dans les ZRR ;


• une série de mesures ayant pour objet d'encourager à la habilitation des logements et de stimuler l'offre locative ;


• une action en faveur de la présence et de la qualité des services collectifs essentiels :


• une dynamisation de la politique des "pays" au terme de la deuxième phase d'expérimentation sur 42 "pays-tests", qui aurait pu déboucher sur l'attribution "d'instruments financiers adaptés" tels que des chartes de pays.

Si le nouveau Gouvernement devrait se prononcer prochainement sur les suites à donner aux divers projets envisagés dans ce domaine, il n'en reste moins, qu'en l'absence de dispositions concrètes applicables dans un proche avenir, la mesure adoptée à l'Assemblée nationale apparaît positive, bien que de portée limitée.

B. UNE ADAPTATION POSITIVE DU DISPOSITIF D'EXONÉRATION DE TAXE PROFESSIONNELLE

En application de l'article 1465 A du code général des impôts certaines entreprises, installées dans les zones de revitalisation rurale bénéficient d'une exonération de taxe professionnelle pendant cinq ans.

Sauf délibération contraire de la collectivité concernée, il s'agit d'une exonération de plein droit. Cette exonération ne s'applique cependant qu'aux entreprises qui procèdent à des créations ou à des extensions d'activité et, surtout, elle ne bénéficiait qu'aux activités industrielles ou de recherche scientifique et technique, ainsi qu'aux services de direction, d'études d'ingénierie et d'informatique.

En outre, il convient d'indiquer que le bénéfice de cette exonération temporaire de taxe professionnelle est subordonnée, en application de l'article 322 G. de l'annexe III du code général des impôts, à la création d'au moins six emplois et à la réalisation d'un investissement d'un montant minimal de 300.000 francs.

L'ensemble de ces dispositions limite donc fortement la portée de cette exonération de taxe professionnelle dans les zones de revitalisation rurale.

Le présent article résulte d'un amendement déposé par le Gouvernement qui est venu en cours de discussion à l'Assemblée nationale se substituer aux nombreux amendements déposés et dont l'objet était de renforcer les mesures incitatives applicables dans les zones de revitalisation rurale. Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale se situe cependant très en retrait par rapport aux propositions de sa commission des finances qui avaient pour ambition d'étendre l'exonération de taxe professionnelle aux entreprises qui procèdent à des créations ou extensions d'activités, quelle que soit la nature de ces activités et sans prendre en considération un plancher d'investissement ou un nombre minima de créations d'emplois.

Bien qu'en retrait sur ces propositions, le dispositif proposé par le Gouvernement comporte deux extensions par rapport au droit applicable.

La première concerne la nature des opérations pouvant bénéficier de l'exonération de taxe professionnelle prévue par l'article 1465 A du code général des impôts.

En effet, la rédaction de cet article renvoie maintenant aux opérations définies à l'article 1465 du code général des impôts qui comporte, outre les créations et les extensions d'activités, les "opérations de décentralisation, de reconversion et de reprise d'établissements en difficulté de façon à couvrir un ensemble très large et à aligner le champ d'application de cette exonération sur le dispositif applicable dans les territoires ruraux de développement prioritaires" (M. Christian Sautter, secrétaire d'État au budget. J.O. débats de l'assemblée nationale, deuxième séance du 18 novembre 1997, J.O. du 19 novembre 1997, page 6084).

La seconde extension constitue une réelle innovation, dont votre commission se félicite. Le champ d'application de cette exonération de taxe professionnelle dans les zones de revitalisation rurale est en effet étendu à l'implantation d'activités artisanales" (M. Christian Sautter, secrétaire d'État au budget, J.O. Assemblée nationale, précité).

La définition retenue pour ces "créations" d'activités par des artisans " qui effectuent principalement des travaux de fabrication, de transformation de réparation ou des prestations de services", est cependant limitée aux artisans dont "la rémunération du travail représente plus de 50 % du chiffre d'affaires global, tous droits et taxes compris". Cette définition reprend les termes du 2° du I de l'article 1468 du code général des impôts qui définit la notion d'artisan à la réduction des bases de la taxe professionnelle.

Incontestable en droit, cette disposition risque cependant, ainsi qu'il ressort des débats à l'Assemblée nationale, de s'avérer relativement arbitraire car l'activité d'artisan peut recouvrir des situations très différentes. Il eut ainsi été préférable que, conformément au souhait exprimé par M. Charles de Courson, l'artisan ne soit pas défini fiscalement, mais au regard de son inscription au registre des métiers.

En outre, votre commission regrette que le Gouvernement n'ait concédé cette mesure qu'en échange d'un financement mis à la charge du fonds national de péréquation.

À cet égard, il convient de rappeler que les principes d'imputation des charges liées à ces exonérations de taxe professionnelle, retenus notamment dans le cadre de la loi "Pasqua" d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, disposent que les pertes de bases résultant des créations d'établissements ou d'activités sont compensées directement par l'État, elles liées à des extensions étant compensées par le fonds national de péréquation institué par l'article 70 de la loi d'orientation précitée.

Or, les pertes de bases liées à des créations d'activités dans le domaine de l'artisanat visées au présent article seront mises à la charge du fonds national de péréquation.

Si votre commission regrette cette entorse au principe du "partage des rôles" entre l'État et le fonds national de péréquation, elle considère cependant qu'il ne faudrait pas "mettre en danger" l'innovation très positive que comporte le présent article en contestant son mode de financement.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 61 quinquies - Adaptation des règles d'éligibilité au Fonds national de péréquation en faveur des communes "pauvres"

Commentaire : Le présent article a pour objet d'adapter les règles d'éligibilité au Fonds national de péréquation, définies à l'article 1648 B bis du code général des impôts, en faveur de certaines communes "pauvres".

Résultant de deux amendements "convergents" déposés, l'un par M. Gilles Carrez et l'autre par Mme Annette Peulvast-Bergeal et les membres du groupe socialiste, le présent article vise à renforcer le bénéfice du Fonds national de péréquation (FNP) pour certaines communes caractérisées par un très faible potentiel fiscal, mais dont l'effort fiscal est moindre que celui de la moyenne des communes de la même strate démographique.

Ce dispositif prévoit en effet que les communes de 10.000 habitants au moins dont le potentiel fiscal est inférieur du tiers au potentiel fiscal moyen appartenant à la même strate démographique et dont l'effort fiscal est supérieur à 80 % de l'effort fiscal moyen de ces mêmes communes bénéficient du fonds.

Bien que cet article s'inscrit dans la logique des dérogations déjà prévues aux deux conditions cumulatives fixées au paragraphe III de l'article 1648B bis du code général des impôts, il constitue néanmoins un renforcement significatif de ces dérogations.

Les deux conditions cumulatives fixées par l'article 1648 B bis- III du code général des impôts pour déterminer l'accès des communes au bénéfice du FNP sont :

- un potentiel fiscal inférieur de 5 % au potentiel fiscal moyen d'ensemble des communes appartenant à la même strate démographique ;

- et un effort fiscal supérieur à l'effort fiscal moyen des communes appartenant au même groupe démographique.

Les exceptions déjà prévues au principe de la réunion de ces deux conditions pour bénéficier du FNP concernent le critère effort fiscal. Il en va ainsi d'une part des communes qui remplissent la condition liée au potentiel fiscal et dont le taux de taxe professionnel atteint le taux plafond fixé à l'article 1636B septies (le double du taux moyen national) et. d'autre part, les communes dont l'effort fiscal n'est pas inférieur à 90 % de l'effort fiscal moyen des communes du même groupe démographique.

Le présent article comporte pour sa part une condition renforcée de potentiel fiscal (celui-ci doit être inférieur du tiers au potentiel fiscal moyen) et une condition assouplie d'effort fiscal (celui-ci doit être supérieur à 80 % de l'effort fiscal moyen).

Il vise donc à favoriser des communes de plus de 10.000 habitants caractérisées par un très faible potentiel fiscal, et au sein desquelles les conseils municipaux ne souhaitent pas relever la pression fiscale jusqu'à atteindre le niveau d'effort fiscal qui ouvrirait droit au FNP.

Les informations recueillies par votre rapporteur général montrent que 19 communes deviendraient ainsi éligibles au FNP et devraient ainsi bénéficier d'un montant total de 28,8 millions de francs à ce titre.

Eu égard à la faible proportion de ces sommes au sein de l'enveloppe globale du FNP (dont le montant global reste inchangé) qui s'élève à près de 3 milliards de francs, votre commission considère que ce léger renforcement de la péréquation en faveur de ces communes n'apparaît pas illégitime, qu'il s'agisse de l'objectif recherché ou des montants concernés.

Cependant; dans l'attente des informations demandées par votre rapporteur général au Gouvernement pour recevoir communication de la liste des communes bénéficiaires de cette mesure, votre commission réservera son vote sur cet article jusqu'à l'examen des amendements "extérieurs" aux articles non rattachés de la deuxième partie du présent projet de loi de finances.

Décision de la commission : votre commission a décidé de réserver son vote sur cet article.

ARTICLE 61 sexies - Fixation du plafond de la taxe spéciale d'équipement au profit de l'Établissement public d'action foncière d'Argenteuil-Bezons

Commentaire : Cet article a pour objet d'autoriser l'établissement public d'action foncière d'Argenteuil-Bezons à percevoir la taxe spéciale d'équipement dans la limite d'un plafond fixé à 25 millions de francs.

Les établissements publics fonciers, à caractère industriel et commercial, sont créés selon les modalités de l'article L. 324-1 du code de l'urbanisme, par le représentant de l'État en vue de réaliser des acquisitions foncières pour le compte de leurs membres 35 ( * ) ou de l'État.

Ils peuvent exercer leur droit de préemption et agir à cette fin par voie d'expropriation. Leurs recettes sont principalement le produit de la taxe spéciale d'équipement (article 1607 bis du Code Général des Impôts), la participation à la diversité de l'habitat mise à la charge des constructeurs (article L 332-17 du code de l'urbanisme), la contribution à la charge des communes pour les villes de plus de 200.000 habitants dont les logements sociaux représentent moins de 20 % du parc et les subventions des communes ou de l'État.

La taxe spéciale d'équipement est perçue dans la limite d'un plafond fixé pour chaque établissement par la loi de finances. Son montant annuel est suite fixé par le conseil d'administration de chaque établissement.

L'établissement public foncier d'Argenteuil-Bezons a été créé le 5 janvier 1994 pour conduire les politiques foncières des deux communes et réaliser les acquisitions de terrains et constructions. Il a fonctionné jusqu'à présent grâce aux subventions apportées par les budgets des communes (18,8 millions de francs) et l'endettement.

Ces charges financières ont conduit l'établissement à demander à ces deux communes un recours accru à la fiscalité pour que celles-ci puissent maintenir le niveau de leurs subventions à hauteur de 18,8 millions de francs.

Or, les difficultés financières que connaissent ces deux communes s'opposent à ce subventionnement.

Il est donc proposé d'autoriser cet établissement public à instituer la taxe spéciale d'équipement.

Cette autorisation va dans le sens des recommandations de la chambre régionale des comptes d'Ile de France qui a recommandé une augmentation de la fiscalité communale destinée exclusivement à diminuer le recours à l'emprunt de ces communes et ses recommandations de limitation du recours à l'emprunt de cet établissement public.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 61 septies - Faculté d'exonération de la "vignette" pour les véhicules électriques ou peu polluants

Commentaire : Cet article prévoit d'ouvrir une faculté pour les départements d'exonérer, totalement ou partiellement, de la "vignette" les véhicules fonctionnant au moyen de l'énergie électrique ou utilisant une énergie peu polluante.

Reprenant purement et simplement une disposition qui figurait dans le projet de loi sur l'air et dont votre commission des finances avait obtenu la suppression, le présent article conduira votre commission, à l'occasion de son commentaire, a rappeler les motifs qui l'avaient conduite à s'opposer à son adoption, tout en lui permettant de proposer des modalités d'action plus pertinentes pour rendre la fiscalité des automobiles plus « écologique ».

I LE RETOUR D'UNE « FAUSSE BONNE IDÉE »

Cet article autorise les conseils généraux et l'assemblée de Corse à exonérer les véhicules électriques ou utilisant une énergie peu polluante de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur.

A. UNE MESURE LARGEMENT SYMBOLIQUE ...

Dans son volet financier et fiscal, la loi sur l'air du 30 décembre 1996 comporte un ensemble de dispositions destinées à favoriser les véhicules électrique et les véhicules utilisant les carburants peu polluants que constituent le gaz naturel véhicules (GNV) et le gaz de pétrole liquéfié (GPL).

La principale mesure incitative créée par cette loi porte sur la taxe sur les véhicules de société, dont les véhicules « propres » peuvent, en application de l'article 1010 A du code général des impôts, être exonérés en totalité s'il s'agit de véhicules fonctionnant exclusivement au moyen de l'énergie électrique, du GNV ou du GPL et du quart du montant de cette taxe s'il s'agit de véhicules, dits « bimodes » ou « bicarburés ». fonctionnant alternativement au moyen de supercarburants et de GPL.

Cette mesure est réellement incitative en raison du montant de cette taxe annuelle, dont il convient de rappeler que les tarifs ont été relevés par l'article 18 octies du présent projet de loi de finances, respectivement à 6.800 francs pour les véhicules de moins de 7 CV et à 14.800 francs pour les véhicules de plus de 7 CV.

S'agissant de la vignette une mesure d'exonération, dont le présent article prévoit qu'elle pourrait être décidée « de façon totale ou partielle » par les conseils généraux, n'aurait qu'une portée relativement symbolique pour l'acheteur d'un véhicule « propre » . À cet égard, votre commission des finances note qu'en outre que cet « avantage » serait particulièrement limité pour les véhicules électriques, les seuls qui soient réellement non polluants, en raison de leur très faible puissance fiscale qui ne dépasse en général pas 2 CV, ce qui correspond à des tarifs de vignette très faibles. L'économie procurée par une exonération de la vignette serait en effet sans rapport avec le surcoût de l'ordre de 50.000 francs que présente à l'achat un véhicule électrique.

Sur ce point, votre commission des finances estime qu'il s'agit là d'une mesure d'incitation inadaptée à son objectif. Votre commission rappelle d'ailleurs que les particuliers et les entreprises peuvent bénéficier d'un ensemble de primes pour l'acquisition de véhicules électriques. Ces primes à l'achat versées par l'État et HDF s'élèvent à 10.000 francs (5.000 francs État, 5.000 francs HDF) pour les véhicules dont la charge utile est inférieure à 300 kilos et à 15.000 francs au-delà de ce seuil (5.000 francs État, 10.000 francs EDF). En ce qui concerne les autres véhicules « propres », il faut ajouter que rien n'empêche le Gouvernement d'adopter une mesure de même nature.

Inadaptée à son objectif, l'exonération de la vignette constituerait en outre pour les départements une source de pertes de recettes non compensées par l'État que votre commission ne saurait approuver.

B. FONDÉE SUR UN PRINCIPE CONTESTABLE

En effet, si cette mesure est symbolique pour le particulier, elle constitue en revanche pour les départements une disposition fondée sur un principe contestable.

Le présent article, qui prévoit le caractère facultatif - et donc non compensé par l'État - de cette exonération, entre en contradiction avec l'affirmation par la loi sur l'air d'une responsabilité nationale en matière de politique de surveillance de la qualité de l'air. Ce système serait en effet susceptible d'entraîner des distorsions géographiques dans le « traitement fiscal » des véhicules « propres ». Il est en outre de nature à exposer les conseils généraux à d'éventuelles pressions locales.

La réponse aux inconvénients du caractère facultatif de ces mesures pourrait consister à rendre obligatoires - et donc à faire compenser par l'État - les exonérations envisagées. Cette solution aurait l'avantage de rétablir une cohérence par rapport à la dimension nationale du problème de la pollution atmosphérique, tout en prenant en considération la situation financière difficile des collectivités locales.

Cette perspective se heurterait cependant à une réserve de principe : si les compensations sont initialement financées dans des conditions acceptables, l'expérience montre que, trop souvent, ces dernières se dégradent au fil du temps.

En tout état de cause, s'agissant du principal impôt transféré aux départements par l'État en contrepartie des transferts de compétences (14,47 milliards de francs prévus pour 1997), votre commission des finances ne saurait accepter l'engagement d'un volet supplémentaire de « grignotage » des ressources fiscales des collectivités locales.

À cet égard, il convient de relever que s'agissant des véhicules « bimodes » GPL-essence, les pertes de recettes pour les départements pourraient être relativement importantes s'agissant de véhicules dont la puissance fiscale est généralement supérieure à 7 CV. Or. le développement de ce type de véhicules est déjà très largement relancé par la forte baisse du carburant GPL à la pompe. Le prix de ce carburant a en effet fortement baissé à la suite de la forte réduction du tarif de la taxe intérieure sur les produits pétroliers décidée à l'occasion de la loi de finances pour 1997. Redescendu à 2,50 francs le litre en 1997. le prix de ce carburant connaîtra, en 1998. une nouvelle diminution de la TIPP sur le GPL qui débouchera sur un prix à la pompe d'environ 2,40 francs le litre.

Enfin, la mise en oeuvre pratique d'une telle disposition serait à l'origine, pour les services de la direction générale des impôts, d'un acc roissement considérable de la charge de travail liée à la gestion de cette taxe.

L'ensemble de cette réflexion conduit donc votre commission des finances à proposer la suppression du présent article et ce d'autant plus qu'il existe des actions beaucoup qui seraient beaucoup plus pertinentes pour intégrer des préoccupations « écologiques » dans la fiscalité des véhicules.

II. L'INTEGRATION DE CRITÈRES ENVIRONNEMENTAUX DANS LA FISCALITÉ DES VÉHICULES : UNE VOIE À EXPLORER

S'agissant de la fiscalité des véhicules, le caractère croissant de cette fiscalité en fonction de la puissance des véhicules apparaît cohérente au regard de l'environnement.

En revanche, il convient de souligner que le principe de la moindre imposition, voire de l'exonération, des véhicules les plus anciens, rentre en contradiction avec la volonté de favoriser les automobiles moins polluantes.

Au regard de cet objectif, il paraît en effet illogique de faire peser une moindre charge fiscale sur des véhicules anciens, dont il est admis qu'ils sont à l'origine d'une part beaucoup plus que proportionnelle de la pollution atmosphérique urbaine due à la circulation automobile. On considère, en effet, que 80 % de la pollution d'origine automobile provient de 20 % du parc constitué des véhicules les plus anciens .

La mise en oeuvre d'une telle réflexion impliquerait de revenir sur le caractère chronologiquement dégressif de la fiscalité des véhicules qui est actuellement fondée sur la réduction progressive de la valeur vénale des véhicules.

Même si une application intégrale du principe « pollueur-payeur » dans ce domaine paraît difficilement envisageable, il convient de rappeler les règles existantes.

A. LES RÈGLES EXISTANTES

En ce qui concerne la fiscalité de l'État, il résulte des dispositions combinées de l'article 1010 et de l'article 310 D de l'annexe II du code général des impôts que sont exonérés de la taxe sur les véhicules des sociétés les véhicules de plus de dix ans.

Dans le cadre de la fiscalité locale, la taxe différentielle sur les véhicules à moteur (la vignette) et la taxe sur les certificats d'immatriculation des véhicules (taxe sur les « cartes grises »), sont assorties d'un système de réduction de la taxe due en fonction de l'âge du véhicule.

Pour la vignette, l'article 1599 Ci du code général des impôts dispose en effet que les tarifs de cette taxe « sont réduits de moitié » pour les véhicules ayant plus de cinq ans . Les véhicules dont l'âge est compris entre vingt et vingt-cinq ans bénéficient, quant à eux, d'un coefficient réducteur de 0,4 ; les véhicules de plus de vingt-cinq ans étant, pour leur part, exonérés en application de l'article 317 nonies de l'annexe II du code général des impôts.

Pour la « carte grise », l'article 1599 sexdecies du même code prévoit une réduction de moitié de la taxe pour « les véhicules ayant plus de dix ans d'âge ».

B. LES IMPLICATIONS D'UNE ÉVENTUELLE APPLICATION DU PRINCIPE « POLLUEUR-PAYEUR »

Sans préjudice de la détermination d'un âge élevé permettant d'exonérer, notamment, les voitures de collection, l'application du principe « pollueur-payeur» conduirait à supprimer les diverses dispositions tendant à faire bénéficier les véhicules les plus anciens, et pourtant de très loin les plus polluants, d'une taxation atténuée ou d'une exonération.

Une telle adaptation de la fiscalité des véhicules serait plus simple à mettre en oeuvre que l'intégration éventuelle dans ces taxations de critères destinés à prendre en compte le caractère plus ou moins polluant des véhicules qui est parfois évoqué.

Il s'agirait en outre d'une application modérée du principe « pollueur-payeur », uniquement destinée à égaliser les conditions de taxation entre les véhicules récents et les véhicules plus anciens et non d'une pénalisation relative de ces derniers.

Une telle mesure pourrait contribuer de façon positive à la lutte en faveur de la qualité de Pair. Ce relèvement constituerait en effet une incitation au renouvellement du parc automobile et donc à la substitution véhicules neufs, moins polluants, à des véhicules anciens.

Une telle décision se heurterait cependant à deux obstacles principaux : d'une part, il entraînerait une hausse des prélèvements obligatoires et d'autre part, il constituerait, pour les redevables concernés par cette hausse (surtout pour la vignette), une charge nouvelle difficile à faire accepter socialement. Il s'agirait en outre d'une atteinte supplémentaire au principe de stabilité de la norme fiscale auquel votre commission rappelle son attachement.

Un signal pourrait cependant être donné concernant la taxe sur les véhicules de société (TVS), qui relève de l'État, en supprimant ou en modulant le principe posé à l'article 310 D de l'annexe II du code général des Pots d'exonération des véhicules de société de plus de dix ans. Il ne s'agirait, en l'espèce, que d'un signal, dans la mesure où l'exonération ne s'applique qu'aux véhicules de plus de dix ans. Or, le nombre des véhicules de plus de dix ans au sein du parc des véhicules de société est assez limité - notamment en raison des règles de l'amortissement.

Au total, votre commission considère que la faculté d'exonération de la vignette en faveur des voitures « propres » constitue à la fois une mesure inadaptée à son objectif et une atteinte potentielle aux budgets départementaux importante et qu'il convient en conséquence de supprimer le présent article.

Décision de la commission : Votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 61 octies - Présentation d'un rapport relatif au bilan de l'application du crédit d'impôt-recherche

Commentaire : le présent article tend à demander au Gouvernement le dépôt, d'ici le 30 juin 1998, d'un rapport sur l'application, au cours des cinq dernières années, du crédit d'impôt-recherche.

Le crédit d'impôt-recherche est la principale mesure fiscale d'incitation des entreprises à augmenter leurs activités de recherche-développement.

I - LE DISPOSITIF DU CRÉDIT D'IMPÔT-RECHERCHE...

L'article 67 de la loi du 29 décembre 1982 codifié à l'article 244 quater B du code général des impôts a institué une mesure fiscale en matière de développement de l'effort de recherche scientifique et technique des entreprises sous forme d'un crédit d'impôt.

Ce crédit d'impôt consiste en une réduction de l'impôt sur les sociétés ou de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises, ou en une restitution, représentant 50 % de l'accroissement en volume de leur effort de recherche et développement d'une année par rapport à la moyenne des deux années précédentes.

Huit types de dépenses ouvrent droit au crédit d'impôt recherche :

- les dotations aux amortissements des immobilisations créées ou acquises à l'état neuf et affectées directement à la réalisation en France d'opérations de recherche scientifique et technique, y compris la réalisation de prototypes ou d'installations pilotes :

- les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations ;

- les autres dépenses de fonctionnement exposées dans les mêmes opérations ; ces dépenses, dont la modulation en fonction de la localisation des activités de recherche auxquelles elles se rapportent a été introduite par la loi d'orientation et d'aménagement du territoire de février 1995, sont fixées forfaitairement aux taux de :


• 65 % des dépenses de personnel qui se rapportent aux chercheurs et techniciens de recherche qui exercent tout ou partie de leur activité dans la région Ile-de-France ;


• 100 % des dépenses de personnel qui se rapportent aux chercheurs et techniciens de recherche affectés exclusivement dans les territoires ruraux de développement prioritaire et dans les zones d'aménagement du territoire :


• 75 % des dépenses de personnel dans les autres cas.

- les dépenses exposées pour la réalisation d'opérations de même nature confiées à des organismes de recherche publics ou privés agréés par le ministre de la recherche et de l'industrie, ou à des experts scientifiques ou techniques agréés dans les mêmes conditions :

- les frais de prise et de maintenance de brevets ;

- les dotations aux amortissements des brevets acquis en vue de réaliser des opérations de recherche et de développement expérimental ;

- certaines dépenses de normalisation afférentes aux produits de l'entreprise, définies comme suit, pour la moitié de leur montant (notamment les salaires et charges sociales afférents aux périodes pendant lesquelles les salariés participent aux réunions officielles de normalisation, ou encore les autres dépenses exposées à raison de ces mêmes opérations ; ces dépenses sont fixées forfaitairement à 30 % des salaires mentionnés précédemment...).

- les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections exposées par les entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir.

Le montant du crédit d'impôt-recherche est limité à 40 millions de francs par entreprise et par an.

Le crédit d'impôt s'applique à toutes les entreprises industrielles, commerciales ou agricoles soumises à l'impôt suivant un régime de bénéfice réel, simplifié ou non. L'attribution de l'allégement fiscal est de droit, sur simple déclaration.

II -... EST INSUFFISAMMENT ORIENTÉ VERS LES PME-PMI...

Le nombre d'entreprises bénéficiaires du crédit d'impôt-recherche s'est réduit en raison de la conjoncture économique des deux dernières années, mais aussi par le fait que le crédit d'impôt est basé sur l'accroissement de l'effort de recherche.

L'évolution en a été la suivante pour les exercices fiscaux des années précédentes :

(millions de francs)

Au titre de l'année (1) : 1994 1995

Nombre d'entreprises bénéficiaires 4.277 3.740

Montant cumulé annuel CIR 2.633 2.943

(1) Comptabilisés à l'année de réalisation des travaux de R & D

En 1995, 7.497 entreprises ont souscrit une déclaration de crédit d'impôt au titre de l'année 1995 et 3.740 parmi celles-ci ont déclaré un crédit positif pour un montant cumulé de 2.943 millions de francs.

Les entreprises de moins de 50 millions de chiffre d'affaires réalisent 9,09 % des dépenses globales de recherche-développement et obtiennent 21,48 % du crédit d'impôt. Les entreprises dont le chiffre d'affaires est compris entre 50 et 200 millions de francs, représentent 9,24 % des dépenses et 16,43 % du crédit d'impôt-recherche. Les entreprises dont le chiffre d'affaires se situe entre 200 millions et 500 millions de francs réalisent 7,68 % des dépenses de recherche-développement et obtiennent 7,16 % du crédit d'impôt-recherche. Enfin les grandes entreprises (plus de 500 millions de francs de chiffre d'affaires) totalisent 73.98 % des frais de recherche et bénéficient de 54,92 % du crédit d'impôt.

L'examen de la ventilation des dépenses de recherche et développement déclarées confirme que le crédit d'impôt-recherche constitue une incitation en faveur de l'embauche de chercheurs et de techniciens ; les frais de personnel constituent à eux seuls près de 40 % des dépenses brutes de recherche (avant déduction des subventions) et environ 69 % de celles-ci si on leur ajoute les frais de fonctionnement. En 1995. les travaux confiés à des organismes agréés représentent plus de 21 % des dépenses totales. Les dépenses de brevet sont faibles : elles représentent 2,7 % des dépenses totales.

L'ensemble des dépenses éligibles de normalisation s'élève à 44 millions de francs (soit 0,06 %) et les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections exposées par les entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir ont représenté 1.026 millions de francs, soit 1,46 % des dépenses de recherche totales.

Les secteurs du matériel électronique, de l'industrie pharmaceutique, de la construction automobile ainsi que les activités de services, de conseil et de soutien au développement commercial ont bénéficié, en 1994. de près de la moitié du montant total.

Le présent article additionnel s'inscrit dans la démarche, annoncée à plusieurs reprises par le ministre, d'une réorientation des aides publiques vers les PME-PMI innovantes qui présentent, comme le prouve la situation américaine, les meilleures potentialités de créations d'emplois.

III. ... ET DOIT CONTRIBUER A LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

La recherche française souffre encore d'une excessive concentration géographique en Ile-de-France.

L'article 15 de la loi d'orientation sur l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995 a institué une modulation, précisée plus haut, du crédit d'impôt-recherche en fonction de la localisation des chercheurs de l'entreprise bénéficiaire. La logique est celle de la discrimination positive.

Le premier bilan de cette mesure apparaît relativement contrasté.

L'effet sur les entreprises existantes paraît faible : cette mesure ne serait pour elles que peu incitative, au regard des contraintes résultant d'une nouvelle implantation de leurs équipes de recherche.

Cette disposition est susceptible d'avoir un effet incitatif plus important sur les créations d'entreprises, d'autant plus qu'elle s'ajoute à l'exonération fiscale pour les entreprises nouvelles.

Cependant, les premières statistiques font ressortir un effet d'incitation mesuré.

C'est pourquoi, il conviendrait d'approfondir l'analyse relative au rôle que pourrait jouer le crédit d'impôt-recherche dans l'implantation des entreprises en régions et. in fine, dans le développement harmonieux du territoire.

Votre commission des finances présentera un amendement en ce sens.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi amendé.

ARTICLE 61 nonies - Suspension provisoire des poursuites engagées à la suite d'une situation d'endettement à (`encontre des rapatriés réinstallés

Commentaire : le présent article additionnel tend à accorder aux rapatriés réinstallés une suspension provisoire des poursuites dont ils font l'objet en raison d'une situation d'endettement liée à leur activité professionnelle.

Pour permettre aux agriculteurs, aux commerçants et aux artisans rapatriés de reconstituer en France des exploitations agricoles ou des entreprises comparables à celles qu'ils avaient dû abandonner, des prêts de reclassement ou de réinstallation, à taux bonifié, ont été mis en place dans le cadre de la loi du 26 décembre 1961.

La charge de l'endettement professionnel de ces rapatriés, généralement alourdie par des prêts complémentaires importants, surtout pour les agriculteurs, contractés aux conditions du marché, a placé certains des intéressés dans des situations de surendettement insupportables à l'égard desquelles l'État a pris des mesures de remises partielles de prêts et mis en place des aides à la consolidation des dettes.

La persistance de grandes difficultés pour 800 à 1.000 personnes a par ailleurs conduit à la mise en place d'une procédure de traitement individualisé.


Des remises partielles de prêts

Le décret du 26 septembre 1977 a permis l'effacement de 62 millions de francs de prêts de réinstallation, répartis entre 928 bénéficiaires.

La loi n° 82-4 du 6 janvier 1982 portant diverses dispositions relatives à la réinstallation des rapatriés a permis 3.570 mesures de remises partielles de prêts pour un montant total de 500 millions de francs.

L'article 44 de la loi n° 86-1918 du 30 décembre 1986 portant loi de finances rectificative pour 1986 a ouvert une nouvelle procédure d'effacement des prêts de réinstallation consentis par des établissements conventionnés par l'État, et des prêts complémentaires de réinstallation contractés avant le 31 décembre 1985.


Des aides à la consolidation des dettes

La loi n° 87-1918 du 16 juillet 1987 relative au règlement de l'indemnisation des rapatriés a prévu une mesure de consolidation des dettes contractées avant le 31 décembre 1985 par les rapatriés dont l'exploitation se heure à de graves difficultés économiques et financières. Les demandes devaient être déposées avant le 31 juillet 1988.

Les dettes consolidables sont les arriérés de cotisations sociales, les dettes aux fournisseurs et les encours bancaires non éligibles à la remise des prêts. En sont exclues les dettes fiscales.

La consolidation est effectuée au moyen de prêts bonifiés sur 15 ou 20 ans, garantis, le cas échéant par l'État. et consentis après examen des dossiers par les commissions départementales du passif des rapatriés (CODEPRA).


Des traitements individualisés de l'endettement professionnel global

Un recensement effectué en 1993 a fait apparaître qu'il subsistait un nombre non négligeable de rapatriés réinstallés, évalués entre 800 et 1.000, en grande difficulté et n'ayant pu bénéficier pleinement des mesures antérieurement prises en leur faveur.

C'est pourquoi un décret et une circulaire du 28 mars 1994 ont institué des commissions départementales d'aide aux rapatriés réinstallés (CODAIR), chargées d'assurer l'examen, au cas par cas, des dossiers des rapatriés réinstallés encore en difficulté, en vue de parvenir, autant que faire se peut, à leur désendettement professionnel définitif.

Les CODAIR ont donc pour mission non seulement d'examiner les demandes de prêts de consolidation mais également de conduire l'élaboration de plans d'apurement des dettes négociés avec les créanciers.

Afin de protéger, durant le temps nécessaire à l'examen de leur dossier, les rapatriés ayant demandé le bénéfice des remises de dettes et des prêts de consolidation, l'article 67 de la loi n° 89-18 du 19 janvier 1989 portant diverses mesures d'ordre social a institué une mesure de suspension de plein droit des poursuites jusqu'au 31 décembre 1989.

Depuis lors, cette mesure a été prorogée :

- jusqu'au 31 décembre 1990. par l'article 34 de la loi n° 89-1010 du 31 décembre 1989 relative à la prévention et au règlement des difficultés liées au surendettement des particuliers et des familles ;

- jusqu'au 31 décembre 1991, par l'article 39 de la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 portant diverses dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales.

L'article 37 de la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991 portant diverses dispositions d'ordre social a prorogé à nouveau ces dispositions jusqu'au 30 juin 1993, au profit des personnes dont la demande de prêts n'avait pas fait l'objet d'une décision définitive à la date du 31 décembre 1991, ainsi que pour celles ayant usé, avant cette date, d'une voie de recours contre les décisions de rejet prises à leur encontre.

L'article 81 de la loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 portant diverses mesures d'ordre social a prorogé ces mesures jusqu'au 31 décembre 1993 au bénéfice des personnes ayant déposé un dossier de consolidation de leurs dettes en application de l'article 7 de la loi n° 82-4 du 6 janvier 1982 ou de l'article 10 de la loi n° 87-549 du 16 juillet 1987.

Enfin, en dernier lieu, l'article 22 de la loi n° 93-1444 du 31 décembre 1993 portant diverses dispositions relatives à la Banque de France, à l'assurance, au crédit et aux marchés financiers, a prorogé ces mesures jusqu'en décembre 1995 au bénéfice des rapatriés ayant déposé un dossier de candidature de leurs dettes en application de l'article 7 de la loi de 1982 ou de l'article 10 de la loi de 1987, d'une part, des personnes ayant sollicité une remise de prêt sur le fondement de l'article 44 de la loi de finances rectificative pour 1986 et de l'article 12 de la loi de 1987, d'autre part.

La loi du 14 février 1996 a de nouveau prorogé la suspension des poursuites engagées à l'encontre des rapatriés réinstallés, en portant le délai d'application des dispositions de l'article 22 de la loi du 31 décembre 1993 jusqu'au 31 décembre 1996.

La loi a également précisé qu'elle s'appliquait aux instances pendantes devant la Cour de cassation, afin que cette dernière puisse faire application de cette prorogation, au cas où elle aurait été saisie d'une décision d'appel intervenue entre le 1er janvier 1996 (date de la fin de la précédente prorogation) et la date d'entrée en vigueur de ladite loi.

Le dispositif de suspension des poursuites introduit par la loi du 14 février 1996 a pris fin le 31 décembre 1996, alors que des dossiers étaient encore en suspens devant les CODA1R.

Le présent article additionnel entend proroger une nouvelle fois la suspension des poursuites, mais sans attribuer de délai à ladite prorogation qui durera "jusqu'à la décision de l'autorité administrative compétente". Il s'agit de permettre ainsi un terme aux prorogations de suspension de poursuites à répétition.

Cette suspension s'impose à toutes les juridictions, même sur recours en cassation.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 61 decies - Suspension provisoire des poursuites jusqu'au règlement des situations de surendettement des Harkis et de leur famille sollicitant un secours exceptionnel

Commentaire : le présent article tend à accorder aux Harkis sollicitant un secours exceptionnel une suspension des poursuites, jusqu'à ce qu'il soit statué définitivement sur leur situation d'endettement.

Le surendettement touche environ 100.000 ménages en France.

Les rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie et leurs enfants peuvent solliciter un secours exceptionnel lorsqu'ils sont, eux aussi, confrontés à une situation de surendettement.

Le secours exceptionnel est visé à l'article 9 de la loi du 11 juin 1994.

Il ne peut être accordé que dans un cas très précis : celui d'un surendettement consécutif à une opération d'accession à la propriété d'une résidence principale.

Afin d'éviter que ce dispositif nouveau n'incite certaines personnes à se surendetter volontairement, ne sont visées par le texte que les opérations réalisées avant le 1er janvier 1994.

Un large délai est prévu pour déposer les dossiers : celui du 30 juin 1999. Cette date a été retenue dans un souci d'harmonisation avec la date de forclusion prévue par les autres articles de la loi, mais aussi pour prévenir un surendettement naissant.

Ce mécanisme de secours exceptionnel est réservé aux Français musulmans rapatriés de la première génération.

Ses modalités d'application ont été déterminées par la circulaire du 25 octobre 1994, abrogée par celle du 31 mai 1997.

CIRCULAIRE. DE 31 MAI 1997

Le décret modifié du 22 juillet 1994 pris pour l'application de la loi du 11 juin 1994 relative aux rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie a prévu, en ses articles 8 et 9, une mesure d'aide financière destinée à contribuer au désendettement des Français musulmans rapatriés dans le cadre d'une opération d'accession à la propriété d'un logement.

Cette aide est complémentaire au dispositif de traitement du surendettement des particuliers institué au livre III du titre III du code de la consommation.

La présente circulaire, qui abroge celle du 25 octobre 1994. a pour objet de préciser les modalités d'application de ce décret.

Le décret du 31 mai 1997 a mis en place une nouvelle procédure d'instruction des dossiers de demande, au niveau départemental, par la mise en place d'une commission spécifique.

Les bénéficiaires sont les Français musulmans rapatriés, qui remplissent les conditions de l'article 1er de la loi du 26 décembre 1961 relative à l'accueil et à la réinstallation des Français d'outre-mer, anciennement de statut civil de droit local ou dont les ascendants, anciennement de statut civil de droit local, ont été admis au statut civil de droit commun.

Cette mesure vise les personnes se trouvant dans des conditions économiques et financières difficiles, qui les empêchent de faire face à leur passif pour lequel les mesures spécifiques antérieures ou de droit commun se sont révélées insuffisantes ou inadaptées.

Une Commission d'aide au désendettement immobilier des anciens membres des formations supplétives et assimilés (COMADEF) est instaurée dans chaque département.

Elle est composée du préfet ou de son représentant, du trésorier-payeur général ou de son représentant d'une assistante sociale du département et d'un représentant de la communauté des Français musulmans rapatriés ou de son suppléant. Le représentant de la communauté des Français musulmans rapatriés et son suppléant sont nommés par arrêté du préfet, sur proposition des associations représentatives des Français musulmans rapatriés au sein du département.

Elle est présidée par le préfet ou son représentant, ses services en assurant le secrétariat.

La COMADEF a pour objet :

- de statuer sur l'éligibilité du dossier aux dispositions de l'article 9 de la loi du 11 juin 1994 précitée ;

- de transmettre à la commission de surendettement des particuliers les dossiers avec la proposition d'aide éventuelle au désendettement.

L'intéressé dépose sa demande d'aide au désendettement auprès du secrétariat de la COMADEF. La demande doit être déposée au plus tard le 30 juin 1999, délai de rigueur.

Le dossier ainsi déposé vaut saisine de la Commission de surendettement des particuliers instituée au livre III du titre III du code de la consommation.

La COMADEF se prononce sur la recevabilité de la demande aux dispositions de l'article 9 de la loi du 11 juin 1994 précitée et transmet au secrétariat de la commission de surendettement des particuliers copie du dossier de l'intéressé.

En cas d'inéligibilité. la COMADEF en informe l'intéressé ainsi que la Commission de surendettement des particuliers.

Si le dossier est déclaré éligible, elle propose d'attribuer ou non une aide exceptionnelle dont elle fixe le montant en tenant compte du passif de l'intéressé et de ses capacités de remboursement et le préfet transmet au secrétariat de la commission de surendettement des particuliers la proposition d'aide financière.

Cette aide doit conserver dans tous les cas sa fonction de levier pour inciter débiteurs et créanciers à accepter à l'amiable un effort nécessaire et suffisant pour aboutir à la résorption du surendettement du débiteur.

Après examen, la commission de surendettement des particuliers notifie à la COMADEF le plan conventionnel de redressement adopté.

Le préfet décide alors de l'octroi de l'aide exceptionnelle, qui ne peut intervenir que dans le cadre d'un plan conventionnel de redressement adopté par la commission de surendettement des particuliers en phase amiable. La décision d'aide est notifiée par le préfet après visa du trésorier-paveur général dans le cadre du contrôle financier déconcentré.

Cette aide financière prend la forme d'un secours exceptionnel tel que le permet l'article 41 du décret du 10 mais 1962. pris en application de la loi du 26 décembre 1961 relative à l'accueil et à la réinstallation des Français d'outre-mer. et s'intitule secours exceptionnel de désendettement immobilier.

L'objectif recherché est de permettre à la commission de surendettement des particuliers d'aboutir à un désendettement définitif de l'intéressé tout en lui permettant de maintenir un niveau de vie décent.

Les dépenses sont imputées sur les crédits des services du Premier ministre, chapitre 46-03, article 80 (Aide sociales aux rapatriés et actions culturelles) L'ordonnateur de la dépense est le préfet, le comptable assignataire est le trésorier-payeur général.

Ce secours, dérogatoire au droit commun, est en fait une reconduction, au profit des Français musulmans rapatriés de la première génération, de certaines dispositions figurant déjà dans une circulaire du 15 février 193 dont l'objet est la mise en place d'une mesure spécifique destinée à résorber certaines situations de surendettement des rapatriés d'origine nord-africaine.

Cette mesure spécifique vient elle-même s'ajouter au dispositif général mis en place par la loi du 31 décembre 1989 (dite "loi Neiertz") relative à la prévention et au règlement des difficultés liées au surendettement des particuliers et des familles.

Cette aide s'appelle secours exceptionnel de résorption du surendettement (SERS). Compte tenu de son caractère exceptionnel, la demande de SERS n'est instruite que si. au préalable, la commission de surendettement a été saisie en vue d'un règlement global des dettes. Elle est versée aux créanciers par priorité aux prêteurs immobiliers et en aucun cas au demandeur surendetté.

Le SERS n'est mis en place qu'après épuisement de tous les dispositifs existants et susceptibles de faire aboutir les dossiers.

Cependant, le SERS est plutôt mal perçu par les Français musulmans rapatriés de la première génération. Sa base de fonctionnement n'est pas spécifique et, surtout, des informations erronées sur les conséquences de la procédure sont ancrées dans cette communauté (interdit bancaire, retrait de chéquier...).

En outre, le montant moyen de l'aide attribuée par le SERS (35.000 francs) ne permet pas de régler au fond les dossiers.

Enfin, le système est long et compliqué. La procédure dure six mois, en raison d'une instruction du dossier au niveau départemental (par la commission de surendettement), puis au niveau national (devant le service central des rapatriés à Agen).

Le présent article propose ainsi de suspendre les poursuites engagées suite à cette situation de surendettement.

Aucun délai n'est plus mentionné, la suspension étant prorogée "jusqu'à ce qu'il soit statué définitivement sur leur situation d'endettement".

La suspension des poursuites s'impose à toutes les juridictions, même sur recours en cassation.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

B. Autres mesures

ARTICLE 62 A - Revalorisation des retraites agricoles

Article rattaché au budget de l'agriculture (rapport spécial de M. Joël Bourdin, annexe n° 3 au rapport général - Sénat - n° 85).

ARTICLE 62 B - Élargissement de l'assiette et majoration du taux de la taxe pour l'atténuation des nuisances sonores au voisinage des aérodromes
ARTICLE 62 C - Reconduction du taux maximum du prélèvement effectué par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie sur le produit de la taxe sur le traitement et le stockage des déchets
ARTICLE 62 D - Rapport sur le rôle et l'évolution des moyens de la commission nationale du débat public

Articles rattachés au budget de l'environnement (rapport spécial M. Philippe Adnot. annexe n° 5 au rapport général - Sénat n° 85).

ARTICLE 62 - Indemnisation des étrangers déportés depuis la France, ayant acquis depuis lors la nationalité française
ARTICLE 62 bis - Modification des modalités de calcul relatives au montant maximal de la majoration par l'État de la rente mutualiste
ARTICLE 62 ter - Assouplissement des conditions d'attribution de la carte d'ancien combattant d'Afrique du Nord
ARTICLE 62 quater - Augmentation de l'allocation différentielle pour les anciens combattants d'Afrique du Nord ayant cotisé au moins 160 trimestres

Articles rattachés au budget des anciens combattants (rapport spécial de M. Jacques Baudot, annexe n° 6 au rapport général - Sénat n° 85)

ARTICLE 63 - Majoration légale des rentes viagères

Article rattaché au budget des charges communes (rapport spécial de M. Claude Belot , annexe n° 9 au rapport général - Sénat n° 85)

ARTICLE 63 bis - Publication d'un état récapitulatif dénommé budget coordonné de l'enseignement supérieur

Article rattaché au budget de l'enseignement supérieur (rapport spécial de M. Philippe Lachenaud. annexe n° 15 au rapport général - Sénat n°85)

ARTICLE 63 ter - Réintégration au budget général de certaines recettes extrabudgétaires de la direction générale des impôts

Article rattaché au budget des services financiers (rapport spécial de M. Bernard Angels, annexe n° 10 au rapport général - Sénat n° 85)

ARTICLE 64 - Suppression des emplois de ville

Commentaire : le présent article propose de supprimer les emplois de ville, créés par la loi du 6 mai 1996 dans le cadre du pacte de relance pour la ville.

I. POURQUOI SUPPRIMER LES EMPLOIS DE VILLE ?

1. Les similitudes certaines entre les emplois de ville et les nouveaux emplois-jeunes

Les nouveaux emplois-jeunes et les emplois de ville sont soumis à des régimes juridiques différents. Les emplois de ville s'inscrivent dans le cadre légal et réglementaire des contrats emplois-consolidés et sont nés d'une loi portant réforme de l'apprentissage. Les emplois-jeunes sont des contrats de droit privé conclus entre le jeune et son employeur.

Malgré ces différences d'origine, les dispositifs présentent des points communs :

- il s'adressent à des jeunes de moins de 26 ans ;

- les aides de l'État sont limitées à 5 ans dans les deux cas ;

- les employeurs potentiels sont les mêmes ;

- ils visent à répondre à des besoins collectifs non satisfaits :

La circulaire du 28 mai 1996 relative à la mise en oeuvre des emplois de ville dispose qu'elle « permettra le développement de filières de métiers de services de qualité, en vue de répondre à des besoins collectifs non satisfaits auprès des collectivités locales, des associations, des établissements publics, » et autres employeurs habilités à recruter des contrats emploi-solidarité.

La circulaire du 24 octobre 1997 relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes incite les préfets à « repérer les domaines d'activités et les filières professionnelles où des besoins émergents ou non satisfaits existent » .

2. Les emplois de ville n'ont pas obtenu le succès escompté

Le Gouvernement précédent avait fixé un objectif de 100 000 créations d'emplois de ville en quatre ans, soit 25 000 par an. À la fin de 1997, entre 10 et 12 000 emplois de ville auraient été créés.

Presque la totalité d'entre eux font l'objet de contrats à durée déterminée d'un an renouvelable. 54 % ont été créés par des associations, 31°/° par les collectivités locales et 15 % par des établissements publics à caractère industriel et commercial, des établissements sanitaires publics et des entreprises privées délégataires de services publics.

Les résultats des emplois de ville sont en deçà des espérances. Néanmoins, selon le délégué interministériel à la ville, ils ont trouvé leur rythme de croisière en 1997, à raison de 1000 à 1200 créations par mois.

3. Le caractère financièrement plus avantageux des emplois-jeunes ne laisse aucune chance aux emplois de ville

L'une des raisons du succès modéré des emplois de ville réside dans le manque de ressources des associations et des communes les plus intéressées par la création de ces emplois. Par conséquent, les employeurs n'hésiteront pas à transformer leurs emplois de ville en emplois-jeunes.

Le taux de prise en charge par l'État des emplois de ville a été fixe à 75 % la première année, dégressif de 10 % par an pendant cinq ans (jusqu'à 35 % la cinquième année). Les employeurs qui le désirent peuvent opter pour une prise en charge de 55 % par an pendant cinq ans. En outre, les contrats de ville bénéficient d'une exonération de charges sociales patronales pour une durée maximale de cinq ans.

Les emplois-jeunes sont pris en charge par l'État à hauteur de 80 % charges comprises, pendant cinq ans.

II. UNE DISPARITION REGRETTABLE : LES EMPLOIS DE VILLE CORRESPONDENT MIEUX AUX OBJECTIFS DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

La disparition, inévitable, des emplois de ville au profit des emplois-jeunes est regrettable car il existe une différence de nature entre les deux dispositifs.

Les emplois-jeunes, tels qu'ils sont prévus par la loi du 16 octobre 1997, relèvent d'une logique de résorption quantitative du chômage : des emplois sont créés, et ils doivent être pourvus par des jeunes. En revanche, les emplois de ville insistaient sur l'amélioration de l'employabilité d'individus susceptibles d'être durablement tenus à l'écart du marché du travail.

1. L'objectif des emplois de ville : l'amélioration de l'employabilité des jeunes les plus en difficulté

Les emplois de ville bénéficient à ceux qui en ont le plus besoin

La circulaire du 28 mai 1996 réserve le bénéfice du régime des emplois de ville aux jeunes résidant dans les grands ensembles ou les quartiers d'habitat dégradé. La géographie d'application de la mesure est celle des zones urbaines sensibles. L'objectif recherché est de permettre « une insertion professionnelle durable des jeunes des quartiers en difficulté. »

Parmi ces jeunes, seuls ceux dont le niveau de qualification ne dépasse pas le baccalauréat (inclus) sont retenus.

Ils peuvent accéder aux emplois de ville sans, contrairement aux contrats emplois-consolidés, passer préalablement par un contrat emploi-solidarité.

Les titulaires des contrats de ville doivent recevoir une formation

Le dispositif des contrats de ville prévoit que chaque jeune pourra bénéficier d'une formation adaptée, financée par les crédits formation accompagnant le contrat emploi-consolidés (allocation plafonnée à 400 heures par contrat sur la base de 22F de l'heure, soit 8800 francs).

La formation peut être pilotée par les conseils régionaux dans le cadre des programmes régionaux pour l'emploi des jeunes, ou par les employeurs avec l'aide des budgets formation des collectivités locales, des établissements publics ou les ressources des organismes collecteurs de la formation continue.

En complément, les préfets sont incités à développer des mesures d'accompagnement dans l'emploi des bénéficiaires des emplois de ville, ainsi que le soutien au développement des projets et activités utilisant les emplois de ville. Ces mesures peuvent être financées à partir du fonds interministériel d'intervention pour la ville, le FIV. et sont éligibles aux crédits du fonds social européen (FSE).

2. L'objectif des emplois-jeunes : professionnaliser de nouvelles filières

Si les emplois de ville recherchent à améliorer l'employabilité des jeunes en difficulté en les orientant vers des métiers répondant à des besoins sociaux non satisfaits, les emplois-jeunes cherchent avant tout à résorber le chômage des jeunes en créant de nouveaux métiers. Les aides de l'État sont limitées à cinq ans car cette période est jugée suffisante pour faire la preuve de la solvabilité de ces emplois, qui n'auraient alors plus besoin d'aides pour exister.

Cette logique, par ailleurs contestable, ne prend pas en compte les objectifs de la politique de la ville. En effet, le souci de pérenniser les nouvelles filières professionnelles conduit à être indifférent à l'origine géographique et au niveau de qualification des emplois créés. Or, le succès limité des emplois de ville montre la difficulté de trouver des emplois à des jeunes non qualifiés originaires des quartiers en difficulté même lorsque des places leur sont réservées. L'abandon de cette condition va donc provoquer l'éviction de cette population au profit de jeunes mieux qualifiés.

Pour éviter cet écueil, la circulaire du 24 octobre 1997 incite les préfets à être particulièrement attentifs à la situation des jeunes vivant en zone sensible, et les autorise même à fixer des objectifs quantifiés. Elle les engage également à s'assurer de l'adéquation entre les tâches à accomplir et le niveau de qualification du jeune recruté.

Ces précautions ne semblent pas de nature à corriger les faiblesses du dispositif car la formation des jeunes disparaît des priorités du Gouvernement. En effet, selon la circulaire, la formation « pourra se traduire, en fonction des acquis et des besoins identifiés, par la construction progressive d actions de formation, de bilan de compétences ou de démarches de validation des acquis » . La formation n'est nullement impérative, et ne fait l'objet d'aucune annexe à la circulaire (contrairement, par exemple, aux « Aides aux projets », à la « Professionnalisation des activités » ou au « Suivi statistique et évaluation » du dispositif).

Dans ces conditions, la disparition des emplois de ville conduit à retirer une chance de s'insérer aux jeunes non qualifiés originaires des quartiers en difficulté, donc au retour de l'emploi et de sources de revenu dans ces quartiers. Cette évolution va à contre-courant des orientations définies par la commission européenne dans les travaux préparatoires au sommet de Luxembourg de novembre 1997 (COM(97) 497 final), dans ce document, les commissaires insistent sur l'importance de créer en Europe « une nouvelle culture de la capacité d'insertion professionnelle » en améliorant l'employabilité des populations, et, particulièrement, celle des « jeunes qui Quittent l'école prématurément ou sans qualifications » .

Décision de la commission : sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 65 - Aménagement de la réduction dégressive des cotisations patronales de sécurité sociale relatives aux bas salaires

Commentaire : L'article 65 pérennise et modifie le dispositif de "ristourne dégressive fusionnée" sur les bas salaires, issu de l'article 113 de la loi de finances pour 1996.

I. LE DISPOSITIF DE LA RISTOURNE DÉGRESSIVE "FUSIONNÉE"

A. LE PRINCIPE DE BASE

La ristourne dégressive "fusionnée" est issue de la fusion :

- de l'exonération de cotisations d'allocations familiales instituée par la loi du 17 juillet 1993, rendue pluriannuelle par la loi quinquennale sur l'emploi du 20 décembre 1995, et qui devait concerner tous les salaires inférieurs ou égaux à 1,6 SMIC à partir du 1er janvier 1998.

- de la ristourne dégressive de cotisations sociales sur les bas salaires instituée par la loi du 4 août 1995 relative à des mesures d'urgence pour l'emploi et la sécurité sociale, concernant les salaires inférieurs ou égaux à 1,2 SMIC.

La fusion de ces deux dispositifs a été opérée par l'article 113 de la loi de finances pour 1996, qui a prévu la mise "entre parenthèses" entre le 1er octobre 1996 et le 31 décembre 1997. des deux dispositifs précédents, au profit d'une ristourne dégressive "fusionnée", concernant tous les salaires allant du SMIC à 1,33 SMIC.

B. LE CHAMP D'APPLICA TION DU RÉGIME

Les entreprises pouvant bénéficier de la nouvelle réduction sont les mêmes que celles comprises dans le champ d'application de la loi du 4 août 1995 : entreprises du secteur privé marchand, (régime général et régime agricole), associations, syndicats professionnels et établissements publics industriels et commerciaux, et employeurs relevant du régime spécial de sécurité sociale des marins.

Par ailleurs, la réduction est étendue aux employeurs relevant des régimes spéciaux des mines et des notaires, sous réserve d'adaptations réglementaires.

C. LE CALCUL DE LA RÉDUCTION DÉGRESSIVE

Pour les salaires égaux ou supérieurs au SMIC mensuel, et inférieurs ou égaux au SMIC mensuel majoré de 33 % , le montant de la réduction est dégressif.

Il est ainsi calculé : (1.33 SMIC - rémunération) x 0.55. le coefficient de 0,55 étant fixé par décret.

Actuellement le montant de la ristourne est de 1.212,79 francs pour le SMIC, puis linéairement dégressif jusqu'à 1.33 SMIC.

Pour les salaires inférieurs au SMIC mensuel, la réduction est égale au produit de la rémunération par un coefficient égal à 0,182.

D. LE CUMUL AVEC D'AUTRES AVANTAGES

Actuellement, la ristourne dégressive n'est plus cumulable avec un allégement de cotisations d'allocations familiales.

Elle est en revanche cumulable avec :

- l'allégement des charges sociales en faveur de l'aménagement et de la réduction du temps de travail dans le cadre de la loi "de Robien" du 11 juin 1996.

- l'abattement de charges sociales en faveur du travail à temps partiel prévu par l'article L 322-12 du code du travail, actuellement fixé à 30 %.

En cas de cumul de mesures d'allégement, l'ordre d'application est le suivant :

- l'allégement "de Robien" est appliqué aux cotisations dues,

- puis le cas échéant, l'abattement "temps partiel",

- enfin, la ristourne dégressive.

E. LE CAS DU TEMPS PARTIEL

Le mode de calcul de la réduction ne dépend pas du nombre d'heures de travail rémunérées.

En effet, la réduction est calculée en fonction des seules rémunérations versées au cours du mois : c'est la "dé-proratisation" de la ristourne, qui prouve évidemment un avantage important au temps partiel.

F. LES EXCEPTIONS AU RÉGIME

1. Le maintien d'exonérations de cotisations d'allocations familiales

L'exonération de cotisations d'allocations familiales reste en vigueur :

- pour les entreprises situées en zone de revitalisation rurale,

- pour les entreprises nouvelles exonérées d'impôt,

- pour certaines entreprises publiques.

2. Le cas particulier des secteurs du textile, habillement, cuir et chaussure

Par ailleurs, pour tenir compte de difficultés sectorielles spécifiques, l'article 99 de la loi du 12 avril 1996 portant diverses mesures d'ordre économique et financier a porté le plafond des salaires concernés par la ristourne à 1,5 SMIC dans le cadre de conventions passées avec les entreprises des secteurs du textile, de l'habillement, du cuir et de la chaussure, portant sur l'emploi et tenant compte de l'aménagement et de la réduction du temps de travail, et ce jusqu'au 31 décembre 1997.

II. LES PROPOSITIONS DE L'ARTICLE 65

L'article 65 aménage de façon importante le dispositif de la ristourne dégressive.

A. LA PÉRENNISATION DE LA RISTOURNE FUSIONNÉE

Le paragraphe de l'article 65 rend permanent le dispositif qui n'était prévu, au départ, que pour une période allant du 1er octobre 1996 au 31 décembre 1997.

Par conséquence, les deux dispositifs antérieurs : exonérations de cotisations d'allocations familiales et ristourne sur les salaires allant jusqu'à 1,2 SMIC, sont supprimés.

Les exonérations de cotisations d'allocations familiales demeurent pour les zones de revitalisation rurale, les entreprises nouvelles, et certaines entreprises publiques.

B. LES RÈGLES DE NON CUMUL

Les règles de cumul de la ristourne avec les autres allégements de charges restent inchangées.

C. LE PLAFOND DES SALAIRES CONCERNÉS

L'article 65 propose de ramener le plafond des salaires concernés de 1,33 à 1,3 SMIC, soit un montant mensuel de 8.662.77 francs (à l'issue de la revalorisation de 4 % du SMIC décidée le 1er janvier dernier).

Cette mesure procure une économie budgétaire de 2.1 milliards de francs.

Le gouvernement fait valoir qu'elle ne remet pas le dispositif en cause, et qu'à l'issue de la revalorisation du SMIC de juillet dernier, le "1,3 SMIC" de 1998 sera supérieur au "1,33 SMIC" des premiers mois de 1997.

Par ailleurs, le gouvernement s'apprête à geler, par décret, le montant maximum de la réduction dégressive au niveau de 1997, soit 1.212,79 francs : dès lors, les revalorisations du SMIC n'auraient plus d'incidence sur l'avantage procuré par la ristourne. Cette mesure permettrait une économie budgétaire de 400 millions de francs.

D. LA "REPRORATISATION" DE LA RISTOURNE DÉGRESSIVE

L'article 65 réintroduit la proportionnalité de la ristourne au nombre d'heures travaillées, afin de supprimer l'avantage, jugé excessif, accordé par la "dé-proratisation" au travail à temps partiel.

E. DES MESURES DE COORDINATION

L'article 65 procède, au surplus, à diverses mesures de coordination, rendues notamment nécessaires par la suppression de l'exonération de cotisations d'allocations familiales, et par la "reproratisation" de la ristourne.

Il apporte une précision utile d'exigence de respect des dispositions spécifiques en matière de durée maximale du travail, dans des secteurs tels que ceux des transports routiers.

III - LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission considère que la ristourne de charges sociales sur les bas salaires est un élément essentiel de défense des emplois peu qualifiés ; elle concerne actuellement un peu moins de cinq millions de salariés.

Son effet sur l'emploi est incontestable : ainsi, les documents de préparation de la conférence internationale sur l'emploi et les salaires du 10 octobre 1997 relèvent que "après avoir augmenté sur la période 1970-1984, le coût relatif du travail peu qualifié a retrouvé, au cours des années récents, son niveau de 1970, sous l'effet notamment de la réduction des charges sociales pesant sur les bas salaires", et aussi que "la relative bonne résistance de l'emploi, dans une conjoncture peu favorable résulte pour partie des premiers effets de la baisse du coût du travail au voisinage du salaire minimum (- 12,6 % depuis 1993)".

C'est pourquoi votre commission vous propose de rétablir le plafond des salaires concernés à 1.33 SMIC. L'argument selon lequel l'augmentation du SMIC du mois de juillet compenserait l'abaissement du seuil n'est pas recevable à ses yeux : les entreprises doivent pouvoir compter sur un avantage stable à partir de leurs grilles de salaires.

Par ailleurs, votre commission déplore que le gouvernement entende "geler" par voie réglementaire le niveau maximum de la ristourne au niveau atteint en 1997.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 65 bis - Exonération de charges patronales spécifiques aux secteurs de l'hôtellerie et de la restauration

Commentaire : l'article 65 bis institue une exonération de cotisations patronales sur la partie de la rémunération constituée par l'avantage en nature que représentent les repas des salariés dans les secteurs de l'hôtellerie et de la restauration.

Cet article, introduit à l'Assemblée nationale par le gouvernement, institue une exonération de cotisations sociales patronales spécifique au secteur des "hôtels cafés restaurants".

En effet, une convention collective a pu être signée en avril 1997, après plusieurs années de négociation, avec les secteurs de l'hôtellerie et de la restauration. Dans ce cadre. l'État s'est engagé à compléter le dispositif d'allégement de charges sur les bas salaires par une mesure spécifique d'exonération de charges patronales.

En effet, l'avantage en nature constitué par les repas est bien spécifique à l'hôtellerie et la restauration. Par ailleurs, il ferme l'accès des entreprises au titre restaurant, pratiqué dans les autres secteurs.

Le gouvernement a estimé que cette mesure pourrait être financée, en 1998, par le chapitre 44-78 "Exonérations de cotisations sociales en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle" article 85 : "Autres exonérations" doté de 160 millions de francs.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 65 ter - Prorogation pour les petites entreprises du plan d'allégement des charges sociales dans les secteurs du textile, de l'habillement, du cuir et de la chaussure

Commentaire : introduit par voie d'amendement du gouvernement à l'Assemblée nationale, le présent article proroge d'un an, pour les petites entreprises, le plan d'allégement des charges sociales spécifiques institué au printemps 1996 en faveur des entreprises du textile, de l'habillement, du cuir et de la chaussure.

I. LE DISPOSITIF ACTUEL

A. UN PLAN SPÉCIFIQUE POUR LES SECTEURS EN DIFFICULTÉ

L'article 99 de la loi du 12 avril 1996 portant diverses mesures d'ordre économique et financier a institué un plan d'allégement de charges sociales spécifiques à certains secteurs en difficulté : dans le cadre de conventions conclues avec les branches professionnelles du textile, de l'habillement, du cuir et de la chaussure, "relatives au maintien ou au développement de l'emploi tenant compte des résultats de la négociation sur l'aménagement et la réduction du temps de travail engagée par l'accord national interprofessionnel sur l'emploi du 31 octobre 1995", les entreprises pouvaient bénéficier d'une réduction dégressive sur les salaires inférieurs ou égaux à 1,5 SMIC.

Pour les entreprises de plus de 50 salariés, une convention signée entre l'entreprise et l'État et portant sur le même objet était nécessaire.

B . UNE JUSTIFICATION PAR L'URGENCE

Ce plan d'allégement des charges spécifique se justifiait par les difficultés particulières des tranches concernées : en effet, à une compétition internationale sans merci de la part des pays du sud-est asiatique s'étaient ajoutés les effets dévastateurs des "dévaluations compétitives" de certains pays de l'Union européenne.

C'est ainsi qu'entre 1993 et 1995, le secteur du textile habillement a perdu 46.000 emplois, soit 15 % de ses effectifs totaux. Au premier semestre 1996, la baisse des effectifs s'inscrivait sur une tendance de 9 à 10% pour l'année.

II. LE BILAN DU PLAN D'ALLÉGEMENT DE CHARGES

A. UN FORT TAUX D'ADHÉSION AU PLAN

D'après les chiffres de l'Observatoire national de l'emploi dans le textile, ce sont 2.212 entreprises, représentant 100.000 salariés, qui ont bénéficié du plan. Pour l'ensemble des secteurs concernés, ce sont quelque 5.600 entreprises qui ont adhéré au plan, représentant 230.000 salariés -sur un total de 300.000 salariés employés dans ces secteurs.

B. UN BILAN TRÈS POSITIF POUR L'EMPLOI

Les chiffres fournis par les Unions professionnelles montrent que pour la période allant du 1er juin 1996 au 31 mai 1997. les effectifs de l'habillement ont diminué de 1 %, alors que ceux du textile, du cuir et de la chaussure se sont stabilisés.

Sur l'ensemble de la période. 9.900 embauches de jeunes ont pu être réalisées.

III. LA CONDAMNATION DU PLAN PAR LA COMMISSION EUROPÉENNE

A. LA PRÉSENTATION DU PLAN PAR LA FRANCE À BRUXELLES

La France a notifié, dès le 26 mars 1996, son projet de plan d'allégement de charges sociales spécifique à la commission européenne. Ce plan visait à l'embauche de 7.000 jeunes chômeurs et au maintien de 35.000 postes de travail.

Le 16 juillet 1997. la France, en réponse aux objections de la commission sur le caractère sectoriel des mesures envisagées, a insisté sur le caractère compensatoire des aides par rapport aux surcoûts liés à l'aménagement et à la réduction du temps de travail contenus dans les accords de branches considérés.

Enfin la France a l'ait valoir que ce dispositif expérimental était mis en place dans toutes les branches industrielles pour lesquelles le pourcentage des salariés à rémunération inférieure à 1.5 SM1C était supérieur à 70 % des effectifs.

Toutefois, la commission a estimé que l'ensemble de ces critères ne suffisaient pas à enlever au dispositif un caractère sectoriel. Elle s'est référée à sa jurisprudence selon laquelle seuls les effets des aides d'État sur la concurrence doivent être examinés, quel que soit le bien-fondé de leurs objectifs.

En conséquence, la commission a invité la France à mettre fin au plan d'allégement de charges à partir du 9 avril 1997.

IV - LA MESURE PROPOSÉE

A. LA RÈGLE DU "DE MINIMIS"

L'article 65 ter utilise la possibilité offerte par la règle européenne dite du "de minimis", selon laquelle une entreprise peut percevoir des aides publiques spécifiques, à condition de ne pas dépasser un montant de 100.000 écus, soit 650.000 francs, en trois ans. C'est dans ce cadre que le plan d'allégement de charges des secteurs du textile, de l'habillement, du cuir et de la chaussure, pourra être prorogé jusqu'au 31 décembre 1998. On peut considérer que seules des entreprises de moins de 50 salariés seront concernées par ce dispositif : elles seraient au nombre de 4.500 pour quelque 80.000 salariés.

B. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission estime bien sûr souhaitable la poursuite des mesures du plan d'allégement dans le cadre du "de minimis".

Elle estime toutefois que cette disposition est très loin de régler le problème des secteurs considérés, où la compétition internationale menace des dizaines de milliers d'emplois. Il faudra donc que le gouvernement trouve une solution pour éviter ces suppressions d'emplois, ce qui ne pourra se faire qu'en ménageant les transitions nécessaires à l'adaptation des secteurs considérés.

À cet égard, votre commission relève que le gouvernement alourdit encore les charges de ces secteurs en abaissant le plafond des salaires auxquelles s'applique la ristourne dégressive sur les bas salaires, de 1,33 à 1,3 SMIC (cf. article 65), mesure à laquelle elle s'oppose résolument.

Par ailleurs, votre commission relève la difficulté d'application d'une mesure qui impliquera, pour chaque entreprise, un calcul lui permettant d'arrêter "à temps" l'adhésion au plan textile sous peine de remboursement. Ce calcul devra se faire par rapport aux aides de droit commun, dont la base est d'ailleurs censée changer au 1er janvier 1998 en ce qui concerne la ristourne dégressive...

Enfin, votre commission remarque que le financement de cette prorogation, soit 500 millions de francs, a pu être dégagé au sein du budget de l'emploi, par constatation de l'effet, sur la compensation des exonérations de charges des contrats d'apprentissage, du basculement des cotisations salariales d'assurance-maladie sur la CSG -constatation non incluse dans le projet de loi de finances initial- et par un prélèvement, inopiné, sur les fonds de la formation en alternance de 100 millions de francs.

Décision de la commission : sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 66 - Suppression de l'exonération de cotisations d'assurance maladie -maternité instituée par l'article 37 de la loi du 11 février 1994 relative à l'entreprise individuelle

Commentaire : le présent article propose de supprimer l'exonération de 30 % de leurs cotisations d'assurance maladie-maternité dont bénéficient les travailleurs non salariés non agricoles créant ou reprenant une entreprise.

I. HISTORIQUE DE LA MESURE

La loi du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle a prévu que les travailleurs non salariés non agricoles créant ou reprenant une entreprise seraient exonérés, pendant les vingt-quatre premiers mois de leur activité, de cotisations d'assurance maladie-maternité dans une proportion qui a par la suite été fixée, par décret, à 30 %. Cette exonération est entièrement compensée par l'État.

Pour les chômeurs créateurs d'entreprise qui bénéficient d'une exonération totale pendant les douze premiers mois de leur activité, le dispositif s'applique entre le treizième et vingt-quatrième mois.

Cette mesure s'inscrit dans la philosophie de la loi quinquennale pour l'emploi de 1993, selon laquelle la baisse du coût du travail doit permettre de créer des emplois.

En l'espèce, l'exonération d'une fraction des cotisations d'assurance maladie-maternité a pour but de résoudre les problèmes de trésorerie auxquels sont confrontés les entrepreneurs au début de leur activité. L'idée est que la période de deux ans permettra aux entreprises de s'installer et de se stabiliser. Elles pourront alors commencer à s'acquitter sans risque de leurs cotisations sociales.

Sur le plan des principes, réduire le coût du travail par des exonérations de charges, limitées dans le temps, est plus satisfaisant que des aides financières directes aux entreprises.

II. BILAN DE LA MESURE

1. Un effet quantitatif important

L'exposé des motifs de l'article 66 de la loi de finances pour 1998 considère que « la mesure n `ayant pas produit les effets attendus, il est proposé de mettre fin aux nouvelles entrées dans le dispositif à compter du 1er janvier 1998. »

La loi de 1994 ne fixait aucun objectif chiffré, ni en terme de nombre de faillites évitées, ni de bénéficiaires concernés par la mesure. Il est donc inadéquat de parler d'« effets attendus ».

En outre, cette mesure a coûté plutôt plus cher que prévu puisque la dotation en loi de finances initiale pour 1997 destinée à son financement était de 400 millions de francs alors que les prévisions de la CANAM font état d'un coût final de 700 millions de francs. Le nombre de bénéficiaires est passé de 185 630 en 1995 à 388 339 en 1996. chiffre qui devrait être stable en 1997.

2. Un détournement de l'esprit du texte

Un décret, devenu l'article 612-6 du code de la sécurité sociale, a prévu qu'une même personne ne peut bénéficier une nouvelle fois de l'exonération qu'à l'issue d'une période de cinq ans à compter de la cessation d'activité non salariée non agricole. Cette disposition permet d'éviter, efficacement semble-t-il, les abus.

Les détournements de l'esprit du texte invoqués par le gouvernement proviennent d'entrepreneurs qui ont imposé à leurs salariés de prendre le statut de travailleur indépendant pour contourner le code du travail.

III. LES ARGUMENTS DU GOUVERNEMENT EN FAVEUR DE LA SUPPRESSION DU DISPOSITIF

Le gouvernement développe, implicitement ou explicitement, quatre arguments à rencontre du dispositif :

1. La suppression de la mesure permettrait une économie budgétaire

L'économie attendue de l'arrêt des entrées dans le dispositif prévu à l'article L. 612-5 du code de la sécurité sociale est estimée à 243 millions de francs en 1998 et à 500 millions de francs à partir de 1999.

2. La mesure permettrait de contourner le code du travail

Le fait que des chefs d'entreprises incitent leurs salariés à prendre le statut de travailleurs indépendants, sans pour autant que le lien de subordination entre l'employeur et l'employé (caractéristique du contrat de travail) disparaisse, a conduit le ministre de l'emploi et de la solidarité à estimer, devant les députés, que « cette exonération n `a pas de sens » .

3. Le dispositif serait mal ciblé

Tous les travailleurs indépendants débutant une activité ont droit à exonération de 30 % sur la cotisation d'assurance maladie-maternité, quel que soit le montant de leur revenu au cours de ces deux premières années exercice. Or, certaines professions libérales procurent assez rapidement des revenus très élevés.

La mesure serait donc source « effets d'aubaine ».

4. Le basculement de la cotisation maladie sur la CSG devrait avantager les travailleurs indépendants aux revenus modiques

Les cotisations d'assurance maladie des travailleurs indépendants sont forfaitaires, donc dégressives avec le revenu. Ce système pénalise les faibles revenus. Pour eux. le basculement va entraîner une réduction de ces cotisations supérieure à l'augmentation de la CSG.

La cotisation minimale d'assurance maladie, à laquelle sont soumis près de 40 % des travailleurs non salariés, devrait pratiquement diminuer de moitié, passant d'environ 7500 francs à moins de 4000 francs par an. Pour les travailleurs non salariés non agricoles qui disposent d'un revenu de moins de 25 000 francs par an et sont donc, compte tenu des seuils de recouvrement, exonérés de CSG, le gain devrait être de 3600 francs.

Le ministre de l'emploi et de la solidarité a relevé à l'Assemblée nationale que les gains du basculement seront plus importants, pour les travailleurs indépendants aux faibles revenus, que ceux procurés par l'exonération de 30 % en vigueur actuellement.

IV. UN AMÉNAGEMENT DU DISPOSITIF EST PRÉFÉRABLE À SA SUPPRESSION

1. La nécessité d'un aménagement n'est pas contestable

Le maintien du dispositif en l'état est envisageable car, compte tenu du basculement vers la CSG d'une partie des cotisations d'assurance maladie, le coût de la mesure diminuerait sensiblement. Il passerait de 700 millions de francs (prévision 97) à 375 millions de francs.

Cependant, deux raisons plaident en faveur d'un aménagement du dispositif :

- le basculement vers la CSG des cotisations d'assurance maladie modifie considérablement les termes du débat ;

- l'attachement du Sénat à la maîtrise des dépenses publiques, ainsi que les effets d'aubaine constatés, plaident en faveur d'un ciblage du dispositif.

2. Le maintien d'un régime spécifique aux créateurs ou repreneurs d'entreprises est nécessaire

La suppression du dispositif au motif qu'il serait détourné de son objet par certains employeurs n'est pas un argument recevable. En effet, si de tels comportements ont été constatés, le droit du travail dispose de tous les outils nécessaires à la requalification de la relation entre l'employé présumé et l'employeur présumé en contrat de travail de droit commun.

La loi du 11 février 1994 contenait des dispositions tendant à limiter le champ des requalifications mais, en pratique, les juges n'ont pas véritablement modifié leur jurisprudence.

Le basculement vers la CSG ne compenserait pas les pertes liées à une suppression de l'exonération de 30 % pour tous les travailleurs indépendants. Ainsi, selon la CANAM, les travailleurs indépendants dont les revenus se situent entre 50 et 65 000 francs par an perdraient, selon leur niveau de revenu et leur catégorie socioprofessionnelle, de 1160 à 2220 francs par an si l'exonération était supprimée.

Ni les évolutions récentes, ni les abus éventuels, ne remettent en cause la nécessité de soutenir les 250 000 créateurs ou repreneurs d'entreprise annuels, qui prennent des risques et sont le moteur de l'innovation et du dynamisme dans notre économie, et dont les problèmes de trésorerie ne disparaîtront pas quoi qu'il arrive.

3. La solution préconisée : le maintien du régime actuel pour les travailleurs indépendants dont les revenus n'excèdent pas 40 % du plafond de la sécurité sociale

L'Assemblée nationale avait adopté en première lecture un amendement déposé puis retiré par M. Gérard Bapt, avant d'être repris par M. Jacques Barrot.

Il consistait à réserver le bénéfice de l'exonération de 30 % des cotisations d'assurance maladie aux travailleurs indépendants dont les revenus n'excèdent pas 40 % du plafond de la sécurité sociale, soit 65 856 francs (plus ou moins le SMIC).

Son coût a été estimé à 190 millions de francs, donc substantiellement inférieur au coût du dispositif actuel.

Le gouvernement a intégré la suppression du dispositif dans le projet de loi de finances pour 1998. Cependant, son rétablissement partiel n'aurait pas pour conséquence de dégrader le solde budgétaire pour l'année à venir. En effet, la charge sera supportée par la CANAM en 1998, la régularisation par l'État n'intervenant qu'en 1999.

Cet amendement a été rejeté au cours d'une deuxième délibération. Votre rapporteur général estime souhaitable de le reprendre.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

ARTICLE 67 - Revalorisation de la dotation affectée aux barreaux au titre de l'aide juridique

Article rattaché au budget de la Justice (rapport spécial de M. Hubert Haenel, annexe n° 32 au rapport général - Sénat n° 85)

* 1 instruction fiscale du 28 avril 1997 prise pour l'application de la réduction d'impôt pour gros travaux dans la résidence principale.

* 2 20 % de (40.000 F + 2.000 F + 2.500 F) = 8 900 F

* 3 Rapport Assemblée nationale n ° 305 - Tome III - Page 131

* 4 entrent dans le champ d'application de ces articles :

- les titres cotés et assimilés (titres non cotés des SICOMI) ;

- les obligations, titres participatifs, effets publics et autres titres d'emprunt négociables non cotés (cessions réalisées à compter du 1er septembre 1992) ;

- les droits sociaux non cotés (à l'exception des titres non cotés des sociétés à prépondérance immobilière) des sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés , sous réserve que le cédant détienne moins de 25 % du capital.

En revanche, les cessions de participations substantielles (il y a participation substantielle lorsque le cessionnaire, son conjoint, ascendants, descendants détiennent ou ont détenu au cours des cinq années précédentes, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits aux bénéfices de la société font l'objet d'une taxation spécifique (article 160 du CGI) et sont taxées au taux de 16 % dès le premier franc.

De même, lorsque la cession porte sur des titres de sociétés non cotées à prépondérance immobilière, la plus-value fait l'objet d'une taxation selon le régime des plus-values immobilières.

* 5 Cette limite était ainsi de 332.000 F en 1993, 336.700 F en 1994 et de 342.800 F en 1995

* 6 Sur l'importance et la réalité de risques de mouvements de sortie de capitaux voir rapport d'information du Sénat n° 82 du 13 novembre 1997 sur la fiscalité de l'épargne : "De l'importance de l'épargne et des dangers de la mal aimer"

* 7 Voir rapport d'information n° 82 précité page 25 et suivantes.

* 8 Voir Rapport général n° 77 sur le projet de loi de finances pour 1996, tome II pages 33 et suivantes et rapport d'information n° 82 précité

* 9 Rapport d'information n° 1415 page 40 et suivantes ; page 72 et suivantes. On notera que la Commission des finances de l'Assemblée nationale était à l'époque présidée par M. Dominique Strauss Kahn et que son rapporteur général était M Alain Richard

* 10 L'instruction fiscale n° 24 du 4 février 1997 (5 G 4-97) prévoit que les établissements financiers proposent à leurs clients d'effectuer le calcul de leurs plus-values en retenant, pour l'ensemble des titres cotés et assimilés en portefeuille au 31 décembre 1995, le prix de revient réel des titres ou un prix de revient forfaitaire, égal à 85 % de leur cours coté au 29 décembre 1995.

* 11 On rappelle que le report d'imposition se distingue du sursis d'imposition par le fait que la plus-value, constatée au moment de la cession des éléments taxables, sera imposée selon les modalités en vigueur à l'issue du report. Dans le cadre des mécanismes de sursis d'imposition, l'impôt est liquidé au moment de la réalisation de la plus-value, selon les modalités prévues à ce moment et n'est recouvré qu'après la période de sursis.

* 12 Rapport Assemblée nationale onzième législature n° 305 Tome III p. 139 .

* 13 J.O. débats - Assemblée nationale - 3 eme séance du 17 novembre 1997 p. 6011 discussion du sous amendement n° 332 de M. Olivier de Chazeaux.

* 14 J O débats - Assemblée nationale - 3 eme séance du 17 novembre 1997 p. 6009 et suivantes.

* 15 La question ne se pose pas pour le marché à terme d'instruments financiers de France (MATlF) puisque les valeurs cotées sur ce marché ne sont pas susceptibles de rentrer dans le cadre du présent dispositif

* 16 Voir Rapport Assemblée nationale n° 305 précité, page 143.

* 17 J.O. débats - Assemblée nationale - 2 eme séance du 17 novembre 1997 p. 5998 2 eme colonne et 3 ème séance du 17 novembre 1997 p. 6014 1 ère colonne

* 18 Cet article dispose que : " des liens de dépendance sont réputés exister entre deux entreprises : " Lorsque l'une détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social de l'autre ou y exerce en fait le pouvoir de décision, " Lorsqu'elles sont placées l'une et l'autre, dans les conditions définies à l'alinéa précédent, sous le contrôle d'une même tierce personne"

* 19 EASDAQ : European Association of securities dealers by automated quotations ; NASDAQ : National Association of securities dealers by automated quotations.

* 20 Rapport Assemblée nationale n° 305 précité page 147

* 21 J.O. débats - Assemblée nationale - 3 eme séance du 17 novembre I997 p. 6012 2 eme colonne

* 22 J.O. débats - Assemblée nationale - 3 eme séance du 17 novembre 1997 p. 6010 discussion du sous amendement n° 327 de M. Olivier de Chazeaux.

* 23 J.O. débats - Assemblée nationale - 2 éme séance du 17 novembre 1997 p. 5995 2 eme colonne

* 24 Rapport d'information du Sénat n c 82, 13 novembre 1997 "De l'importance de l'épargne et des dangers de la mal aimer" page 3"

* 25 cf. Avis n° 79 (1997-1998) présenté par M. Jacques Oudin au nom de la commission des finances.

* 26 Pour ces dernières, seuls les commanditaires sont soumis à l'impôt sur les sociétés.

* 27 À l'exception des EURL créées par des personnes physiques et des SARL à caractère familial.

* 28 Uniquement pour la part de bénéfices revenant aux associés dont la responsabilité est limitée ou dont l'identité n'est pas révélée à l'administration

* 29 Des liens Je dépendance sont réputés exister entre deux entreprises lorsque l'une détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social de I autre ou y exerce en fait le pouvoir de décision (article 39 terdecies)

* 30 Rapport AN n° 305 de M Didier Migaud, tome III. p 159

* 31 JO Débats AN - 3e séance du 17 novembre 1997 - pages 6021-6022

* 32 Les bâtiments et terrains industriels qui ne figurent pas à l'actif d'une entreprise industriel ou commerciale astreinte aux obligations du régime de l'imposition d'après le bénéfice réel sont en effet évalués, par dérogation, selon les modalités spécifiques prévues pour les locaux commerciaux et biens divers à l'article 1498 du code général des impôts

* 33 En effet, le coût des dégrèvements résultant de l'application de l'article !478 du code général des impôts est à la charge du budget de l'État, les collectivités locales concernées percevant. pour leur part qu'il s'agisse d'une fermeture ou d'un transfert d'établissement, l'intégralité du produit voté.

* 34 2 Le calcul de ce plafonnement ne s'effectuerait plus sur une cotisation réduite mais sur la totalité de la cotisation mise à la charge de l'entreprise

* 35 à savoir des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale

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