Rapport n° 413 - Projet de loi adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence portant diverses dispositions d'ordre économique et financier


M. Alain LAMBERT, Sénateur


Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation - Rapport n° 413 - 1997-1998

Table des matières






N° 413

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 29 avril 1998

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, portant diverses dispositions d'ordre économique et financier,

TOME I

Par M. Alain LAMBERT,

Sénateur,

Rapporteur Général.

EXAMEN DES TITRES I, III, IV ET V

(1) Cette commission est composée de : MM. Christian Poncelet, président ; Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini, René Régnault, vice-présidents ; Emmanuel Hamel, Gérard Miquel, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Alain Lambert, rapporteur général ; Philippe Adnot, Bernard Angels, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy Cabanel, Jean-Pierre Camoin, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc Massion, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ .) : 727, 781, et T.A. 115.

Sénat
: 373 et 408 ( 1997-1998)

Politique économique.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Hétérogène par nature, ce projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier regroupe des dispositifs qui pourraient faire l'objet de textes autonomes. Trois séries de dispositions peuvent ainsi être distinguées :

- celles relatives à la simplification administrative,

- celles relatives au plan français de passage à l'euro, accompagnées d'un perfectionnement de notre législation sur les marchés financiers ;

- la troisième série de dispositions concerne des sujets divers, dont l'autonomie se borne le plus souvent à un seul article et qui ont donc toute leur place dans un DDOEF. Le gouvernement a regroupé certaines de ces dispositions éparses en deux titres, le titre III, relatif au secteur public et aux procédures publiques, et le titre IV, relatif à la protection de l'environnement et à la santé publique. En réalité toutefois, les articles contenus dans ces deux titres sont dénués de liens entre eux.

I. TITRE I - DISPOSITIONS RELATIVES À LA SIMPLIFICATION ADMINISTRATIVE

Ces propositions sont le fruit des réflexions menées par le gouvernement en vue de faciliter la vie des PME et des artisans. Elles se fondent sur un rapport du député du Nord, Dominique Baert.

Les mesures proposées sont libérales, puisqu'il s'agit de réduire les formalités administratives qui frappent les entreprises.

Votre rapporteur remarque que le projet de DDOEF de 1997 1( * ) comportait certaines mesures identiques ou proches de celles contenues dans ce titre I :

la déclaration unique d'embauche (article 21) ;

l'harmonisation de l'assiette des contributions dues par les employeurs (articles 28-1997 et 1-1998).

Votre commission n'a pas de remarques particulières à formuler sur ce dispositif, qu'elle juge excellent d'une façon générale.

Elle profite du débat ouvert par l'article 11 sur la TVA pour rappeler son attachement à deux mesures non prises à ce jour : la possibilité pour les collectivités locales d'opter pour l'assujettissement de leurs déchetteries à la TVA ; et l'engagement de négociations communautaires afin que le bois de chauffage des réseaux de chaleur puisse bénéficier du taux réduit.

II. TITRE II - DISPOSITIONS RELATIVES À L'ADAPTATION DE LA LÉGISLATION FRANÇAISE ET À LA MODERNISATION DES ACTIVITÉS FINANCIÈRES EN VUE DE LA TROISIÈME PHASE DE L'UNION ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE

Le titre II constitue le troisième volet
du débat européen de ce printemps, en vue de permettre à la France d'adopter la monnaie unique dès le 1er janvier 1999.

Il vient ainsi compléter la loi modifiant le statut de la Banque de France en vue de sa participation au Système européen de banques centrales adoptée définitivement par le Sénat le 29 avril, et la résolution de votre commission des finances que le Sénat a bien voulu adopter le 23 avril sur la recommandation de la Commission des communautés européennes relative à l'engagement de la troisième phase de l'Union économique et monétaire. Ce titre II est traité en détail dans le tome II du présent rapport par notre collègue Philippe Marini. Votre rapporteur en mentionne ici les grandes lignes pour être complet sur la présentation de ce projet de loi.

Toutefois, de nombreuses dispositions du titre II n'ont pas de lien direct avec le passage à l'euro. Elles sont issues des débats relatifs à la modernisation de la gestion financière pour compte de tiers et à la législation de l'épargne.

A. LE PLAN DE PASSAGE À L'EURO

Le plan français de passage à l'euro est établi sur le principe du "ni-ni" entre 1999 et 2002 : ni obligation (de conversion), ni interdiction.

Les principales dispositions du DDOEF concernant ce plan sont les suivantes :

- conversion de la comptabilité du capital social et des déclarations fiscales des entreprises ;

- autorisation de cotation des instruments financiers en euros, adaptation des systèmes de règlement-livraison, substitution des indices " euro " aux indices " franc " et continuité des contrats ;

- conversion des dettes négociables en euros, en particulier celle de l'Etat ;

- possibilité d'indexer les nouvelles émissions (de l'Etat notamment), sur l'inflation afin d'alléger la charge de la dette publique. Cette disposition a rencontré l'hostilité de la Banque de France ;

- passage des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) à l'euro ;

- extension de l'euro à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Ces dispositions, de nature technique, sont destinées à permettre de convertir les grands mouvements financiers en euros dès 1999.

B. MODERNISATION DES ACTIVITÉS FINANCIÈRES

Un certain nombre de dispositions du projet de DDOEF sont relatives aux marchés financiers. Ces dispositions sont les suivantes :

- irrévocabilité des opérations de règlement-livraison de titres (art. 18) et modification des règles de transfert de propriété (art. 19) ;

- définition législative de l'appel public à l'épargne (art. 25) et établissement d'un corpus de règles propres aux investisseurs "qualifiés" et aux "cercles restreints d'investisseurs" ;

- création de nouveaux types d'OPCVM (art. 27 à 29) ;

- rachat par une société de ses propres actions (art. 30), dispositif décidé sur la base du rapport de M. Bernard Esambert ;

- modification du processus de décision au sein du Conseil des marchés financiers (art. 32) ;

- extension de la procédure de retrait obligatoire aux certificats d'investissement et fusion obligatoire des certificats d'investissement et des certificats de droits de vote (art. 33).

III. TITRE III - DISPOSITIONS RELATIVES AU SECTEUR PUBLIC ET AUX PROCÉDURES PUBLIQUES

Sous ce titre sont regroupés quatre articles sans lien entre eux.

L'article 35 est relatif au schéma directeur de desserte gazière . Il a pour but de permettre la desserte des zones non desservies actuellement par Gaz de France. Ce dispositif écorne le monopole de Gaz de France et a suscité l'ire de ses salariés. Il se substitue au dispositif voté dans le cadre du DDOEF de 1996 2( * ) et qui n'a pas trouvé à s'appliquer faute de décret d'application. L'Assemblée nationale l'a modifié dans un sens plus protecteur du monopole de GDF, d'une part, en supprimant la liberté pour les communes non desservies de faire appel à l'opérateur de leur choix, et, d'autre part, en prévoyant que les nouveaux opérateurs autorisés à distribuer le gaz devront être détenus à 30 % au moins par l'Etat ou des établissements publics. Votre commission considère que la difficulté à faire jouer la concurrence pour les collectivités ou leurs groupements est de nature à entraver la desserte du territoire. Elle vous proposera donc d'étendre aux collectivités locales cette condition de détention de 30 %.

L'article 36 est relatif à l'ouverture du capital d'Air France . Il organise notamment un échange d'actions contre des baisses de salaires. La décision de ne pas privatiser complètement Air France avait provoqué le départ de son précédent président Christian Blanc. Cet article suscite aujourd'hui une forte hostilité des pilotes. Votre commission ne peut que rappeler son attachement à la privatisation intégrale 3( * ) , toute solution intermédiaire ne pouvant que mener à une impasse.

L'article 37 peut s'analyser comme l'ouverture au secteur privé de la société nationale des poudres et explosifs, qui souhaite constituer une société commune avec la société britannique "Royal Ordnance".

L'article 38 est relatif à un toilettage juridique des règles du versement de transport, sans modification de son régime sur le fond. Cet article est au demeurant identique à l'article 47 du projet de 1996.

IV. TITRE IV - DISPOSITIONS FISCALES ET FINANCIÈRES RELATIVES À LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ET À LA SANTÉ PUBLIQUE

Ce titre comprend trois articles sans lien entre eux.

L'article 39 est relatif à une modification du calcul de la puissance fiscale des véhicules particuliers . Il est consécutif à la remise au Parlement d'un rapport gouvernemental demandé à l'initiative de votre commission. Celle-ci s'est impliquée depuis plusieurs années dans le débat sur une fiscalité plus rationnelle des carburants. Il faut noter que le dispositif proposé n'a pas d'incidence sur la taxe intérieure sur les produits pétroliers. En revanche, il en a sur les recettes des collectivités locales, en particulier celles des départements, via la "vignette". Votre commission est favorable à ce dispositif, qui devrait encourager l'utilisation des carburants les moins polluants. Toutefois, conformément à une position constante, elle restera attentive à d'éventuels transferts de recettes entre les départements et demandera, le cas échéant, qu'un dispositif vienne limiter ce transfert.

L'article 40 est relatif à la responsabilité civile et à l'assurance des propriétaires de navires pour les dommages résultant de la pollution par les hydrocarbures.

L'article 41 crée une taxe sur les achats de viande pour financer l'élimination des farines animales non conformes aux normes communautaires. Jugeant qu'il n'est pas équitable que cette charge repose sur la petite distribution, votre commission présentera un amendement tendant à éviter cet effet.

V. TITRE V - DISPOSITIONS DIVERSES

Ce titre comprend six articles entre lesquels le gouvernement n'a pu trouver de point commun.

L'article 42 est relatif au paiement des impôts par virement ou prélèvement automatique.

L'article 43 est relatif au recensement, sur six mois, des porteurs de créances sur la Russie tsariste. Un compte d'affectation spéciale a été créé et doté à cette fin dans la loi de finances pour 1998.

L'article 44 a pour objet de valider une délibération de la fondation nationale des sciences politiques relative à son budget. Cette disposition figurait déjà à l'article 72 du projet de DDOEF de 1997. Votre commission ne s'oppose pas à cette validation, mais elle ne peut que critiquer les dysfonctionnements qui l'ont rendu nécessaire.

L'article 45 crée un nouveau prélèvement sur l'Association de gestion du fonds des formations en alternance. Le caractère récurrent de ce type de prélèvement démontre à l'évidence que la cotisation demandée aux entreprises à ce titre est trop élevée.

L'article 46 limite l'avantage fiscal tiré de l'amortissement des biens donnés en location par une société de personnes . Cette limitation ne sera pas applicable à certaines opérations agréées par le ministre du budget relatives à des équipements lourds, amortissables sur une durée au moins égale à 8 ans. Il s'agit, notamment, d'épargner les navires de commerce. Votre rapporteur rappelle à ce sujet que la commission des finances s'est toujours montrée favorable à une législation tendant à attirer l'épargne vers le financement des navires de commerce, afin de renforcer la flotte de commerce française qui s'est dangereusement réduite depuis vingt ans. Elle peut difficilement se satisfaire d'un dispositif qui ne les avantage pas, mais se contente de ne pas les pénaliser . C'est pourquoi elle vous proposera un amendement tendant à tenir compte du prix de revient effectif des biens acquis pour le calcul de l'amortissement, afin de permettre l'acquisition de navires d'occasion. Elle vous proposera en outre de supprimer le plafond de 20 % du résultat imposable au-delà duquel les associés ne sont plus autorisés à imputer les pertes dans la mesure où cette disposition apparaît aussi inutile qu'inapplicable.

L'article 47 est relatif à un abaissement du seuil d'autorisation des cinémas multiplexes.

VI. MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale n'a pas apporté de modifications très substantielles aux dispositions originelles de ce projet de DDOEF. En revanche, elle a adopté de nombreux articles additionnels (28 au total), ouvrant des débats sur des thèmes absents du projet d'origine.

Quatre volets nouveaux ont ainsi été ouverts :

- un important volet collectivités locales , avec cinq articles nouveaux (46 bis , 48, 50, 52 et 56) ;

- des dispositions relatives au logement (articles 4 bis , 4 ter , 31 bis , 38 bis , 38 ter , 38 quater , 38 quinquies et 53) ;

- des dispositions disparates relatives aux questions financières , mais ne concernant pas le titre II (articles 42 A, 55, 59, 60 et 62) ;

- un volet concernant à la fois l' aménagement du territoire et les questions agricoles ou agro-alimentaires (articles 41 bis , 49 et 51).

De nouvelles dispositions diverses ont par ailleurs été adoptées.

A. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX COLLECTIVITÉS LOCALES

Les députés ont souhaité adopter un certain nombre de dispositions relatives aux collectivités locales, le plus souvent hors l'initiative de leur commission des finances et parfois contre l'avis du gouvernement. Il en a été ainsi de la création d'une taxe communale sur les pylônes de téléphonie mobile (article 46 bis ), calquée sur la taxe sur les pylônes électriques acquittée par EDF. Cette proposition offre une recette nouvelle aux communes concernées qui, d'après les calculs de votre rapporteur, pourrait être de l'ordre de 350 millions de francs. Toutefois, cette taxe n'est pas sans inconvénient : elle est peu compatible avec les principes de la baisse des charges des entreprises et de l'aménagement du territoire défendus par votre commission. En effet, les opérateurs hésiteront désormais à implanter des antennes ou pylônes dans les communes qui en sont dépourvues pour le moment, en particulier lorsque la population à desservir sera peu nombreuse.

L'avis du gouvernement a également été négatif sur une proposition de la commission des finances de l'Assemblée nationale créant une possibilité de déroger à l'obligation d'établir un budget annexe pour les services de distribution d'eau potable et d'assainissement pour les communes de moins de 500 habitants (article 48). Votre commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur cet article, qui facilite la gestion des petites communes, mais nuit à la transparence du prix de l'eau.

D'autres dispositions significatives ont fait l'objet à l'Assemblée nationale d'un débat moins polémique :

à l'initiative du gouvernement, l'assujettissement des poids lourds de plus de 12 tonnes à la taxe à l'essieu en application d'une directive européenne que la France n'avait pas encore transposée (article 50). Ce dispositif, qui entraîne la suppression de la vignette et du droit de timbre pour ces véhicules, fait l'objet d'une compensation aux départements ;

à l'initiative de M. René Dosière, les députés ont voté un dispositif de coordination entre la loi du 7 mars 1998 relative au fonctionnement des conseils régionaux et le code général des impôts. Il s'agit notamment de l'application de la procédure dite du "49-3 régional" (article 52) ;

à l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté un amendement consensuel permettant aux communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale de transférer à ce dernier la propriété (et les obligations d'entretien) des édifices cultuels (article 58).

B. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU LOGEMENT

L'Assemblée nationale a également ouvert un volet "logement", ce qui est devenu traditionnel dans les projets portant DDOEF.

Ce volet porte essentiellement sur deux thèmes :

le logement locatif privé avec la prolongation du régime de l'amortissement "Périssol", applicable aux logements locatifs neufs à usage de résidence principale. Le gouvernement a annoncé son intention de réformer ce système, mais cette réforme étant encore en chantier, il préfère éviter une rupture dans les opérations, et a donc donné son accord à la prorogation de six mois proposée par la commission des finances (article 11 bis ). Votre commission approuve cette prolongation, en attendant d'examiner le nouveau dispositif. Toutefois, votre rapporteur demandera au gouvernement des engagements de calendrier précis sur ce nouveau système. S'il était présenté trop tardivement, les opérations de construction des logements locatifs privés pourraient être entravées.

Par ailleurs, l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat verra sa compétence étendue aux transformations de locaux agricoles en logements dans les zones de revitalisation rurale (article 38 bis ), selon un dispositif voté à l'unanimité du Sénat après un avis favorable de votre commission au cours du débat sur la loi de finances pour 1998, et annulé par le Conseil Constitutionnel comme étant un "cavalier budgétaire" ;

le logement locatif public. Il s'agit, pour l'essentiel, de compléments à des dispositifs existants. Ainsi, les sociétés d'économie mixte pourront bénéficier du taux réduit de la TVA sur les acquisitions de terrains à bâtir (article 11 ter ). Les locataires de SEM souhaitant acquérir leur logement dans le cadre de la loi relative à l'habitat de 1994 bénéficieront du même régime fiscal que les locataires d'organismes HLM placés dans la même situation (article 38 quinquies ).

L'Assemblée nationale a souhaité également aligner le statut des sociétés anonymes coopératives d'HLM sur les sociétés anonymes d'HLM (articles 38 ter et 38 quater ).

C. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX QUESTIONS FINANCIÈRES.

Des dispositifs très disparates peuvent être regroupés sous cette rubrique. Il s'agit notamment :

de l'extension du régime juridique des scissions aux caisses de crédit municipal (article 42 A). Ce dispositif a été accepté sans débat par l'Assemblée nationale ;

de la modification du régime des prélèvements sociaux sur les options sur actions accordées dans le cadre de plans d'options de souscription ou d'achat d'actions (stock-options). A l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale est revenue sur un dispositif voté à l'initiative de la commission des affaires sociales du Sénat dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997, et qui soumet les plus-values sur options levées avant cinq ans aux cotisations sociales. Elle a limité le prélèvement aux entreprises de plus de 15 ans à la date de l'attribution des options (article 55). Votre commission approuve la démarche retenue par l'Assemblée nationale, mais juge arbitraire et inéquitable de réserver le traitement favorable aux entreprises de moins de quinze ans. Elle vous proposera donc une extension à toutes les entreprises. Mais, fidèle à sa démarche, elle vous proposera également d'accroître la transparence des attributions d'options par un article additionnel ;

du renforcement de la lutte contre le blanchiment des capitaux (article 59), en créant des contrôles relatifs aux méthodes de blanchiment empruntant les canaux de l'investissement immobilier ;

de la prolongation de la mise à disposition de fonctionnaires auprès de la CNP Assurances SA (article 60) ;

enfin, de la validation des opérations de recapitalisation de la Compagnie du bâtiment et des travaux publics (article 62). Sur ce dossier, qui concerne à la fois le traitement des crises bancaires et l'octroi de la garantie de l'Etat, votre commission ne peut que répéter, d'une part, qu'elle considère que les faillites bancaires doivent être possibles, sauf à encourager l'irresponsabilité de leurs dirigeants (ce que les anglo-saxons appellent "l'aléa moral") et, d'autre part, qu'il est anormal dans un Etat de droit que les services d'un ministère puissent engager l'argent du contribuable sans aucune information ni autorisation législative.

D. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU MONDE RURAL, À L'AGRICULTURE ET À L'AGRO-ALIMENTAIRE

Trois articles, dépourvus de tout lien entre eux, traitent de problèmes relatifs au monde rural et agricole. Ils viennent s'ajouter à l'article 41, relatif à la taxe dite "d'équarrissage" en vue d'éliminer les farines animales non conformes à la réglementation européenne.

Il s'agit des articles 41 bis , 49 et 51. L'article 41 bis étend les compétences du fonds de gestion de l'espace rural. Il reprend le dispositif de l'article 75 de la loi de finances pour 1998, déclaré contraire à la Constitution par le Conseil Constitutionnel comme n'ayant pas d'incidence budgétaire.

L'article 49 autorise la publicité pour les boissons alcoolisées sous forme de dons ou de vente d'objets publicitaires sur les lieux de production ou de distribution. Voté à l'unanimité par l'Assemblée, cet article reprend un dispositif contenu dans un décret du 29 mars 1993 annulé par le Conseil d'Etat pour défaut de base légale. Il a été voté après que l'Assemblée eut rejeté une proposition de revenir à une autorisation plus large de la publicité commerciale en faveur des boissons alcooliques, qui aurait été contraire à la loi Evin.

L'article 51 aménage les conditions d'assujettissement des entreprises agricoles à l'impôt sur le bénéfice réel.

E. AUTRES DISPOSITIONS

Quatre autres dispositions adoptées par l'Assemblée nationale méritent d'être signalées.

L'article 54 crée une fonction d'assistant spécialisé auprès des Cours d'appel et tribunaux de grande instance. Voté à l'initiative du gouvernement à la demande du Garde des Sceaux, Mme Elisabeth Guigou, cet amendement a pour objet de renforcer les services judiciaires en charge de la grande délinquance financière. Votre commission ne peut qu'être favorable sur ce principe, tout en regrettant qu'une disposition de cette nature n'ait fait l'objet d'un examen ni par le Conseil d'Etat, ni par les commissions des lois.

Voté également à l'initiative du gouvernement, l'article 57 aligne les conditions de promotion et de nomination des agents des douanes ayant accompli un acte de bravoure, sur celles des fonctionnaires de police placés dans la même situation.

Proposé par la commission des finances, l'article 58 modifie le régime de la taxe perçue sur les artisans bateliers au profit de la Chambre nationale de la batellerie artisanale.

Enfin, voté à l'initiative du gouvernement, l'article 61 comble une carence de la loi de finances pour 1998 sur l'entrée en vigueur du relèvement du plafond de la réduction d'impôt pour dépenses d'hospitalisation de long séjour et de cure.

Sous le bénéfice de ces observations et des amendements qu'elle vous soumet, votre commission vous propose d'adopter le présent projet de loi.

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE PREMIER

DISPOSITIONS RELATIVES
À LA SIMPLIFICATION ADMINISTRATIVE
ARTICLE PREMIER

Harmonisation de l'assiette des contributions dues par les employeurs
au titre de la formation professionnelle continue

Commentaire : le présent article vise à aligner l'assiette de deux cotisations spécifiques dues par les employeurs au titre de la formation professionnelle sur celle des cotisations de sécurité sociale. Ainsi sera parachevé le mouvement d'harmonisation engagé par les articles 105, 106 et 107 de la loi n°95-116 du 4 février 1995 portant diverses dispositions d'ordre social.

I. L'ÉTAT ACTUEL DU DROIT


Depuis le 1 er janvier 1996, l'assiette des contributions dues par les employeurs au titre de la formation professionnelle continue est alignée sur celle des cotisations de sécurité sociale, à l'instar de la taxe d'apprentissage et de la participation à l'effort de construction. Cette assiette n'est plus celle de la taxe sur les salaires, mais celle des cotisations de sécurité sociale. A la notion de salaire 4( * ) , s'est donc substituée, que ce soit dans le code du travail, le code général des impôts ou le code de la construction et de l'habitation, celle de rémunérations 5( * ) . Cette mesure a contribué à la simplification des formalités administratives mises à la charge des entreprises, et notamment des plus petites d'entre elles.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à compléter et surtout à parachever, au plan législatif 6( * ) , le mouvement d'harmonisation engagé par la loi précitée du 4 février 1995 en alignant l'assiette de deux cotisations spécifiques à la charge des employeurs au titre de la formation professionnelle et qui n'avaient pas été mentionnées lors de ladite harmonisation. Il s'agit de l'article L.931-20 du code du travail qui institue une contribution spécifique de 1 % au titre du congé individuel de formation et du bilan de compétences des salariés sous contrat à durée déterminée et de l'article L.954 du même code qui fixe à un pourcentage ne pouvant être inférieur à 2 % la contribution spécifique destinée à financer la formation professionnelle des salariés intermittents du spectacle.

Votre rapporteur vous propose d'adopter ces dispositions telles qu'amendées et complétées au plan rédactionnel par l'Assemblée nationale. Elles figuraient déjà dans l'article 28 du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier déposé le 2 avril 1997 à l'Assemblée nationale. En outre, bien que la notion de rémunération soit plus large que celle de salaire, à laquelle elle se substitue désormais, l'incidence financière de cette mesure devrait être, d'après les indications qui lui ont été confirmées par les services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, faible, voire négligeable, pour les entreprises (de l'ordre de quelques millions de francs au total).

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 2

Suppression de l'autorisation préalable
en matière de télétransmission de factures

Commentaire : le présent article tend à supprimer l'autorisation préalable en matière de télétransmission de factures. Désormais, l'administration rédigera un cahier des charges que les entreprises désirant télétransmettre leurs factures devront respecter. Ces entreprises devront simplement souscrire une déclaration contenant les données techniques propres à chaque système.

I - LE DISPOSITIF ACTUEL PRÉVOIT L'AUTORISATION PRÉALABLE PAR L'ADMINISTRATION DE LA TÉLÉTRANSMISSION DES FACTURES


Pour éviter les fraudes au paiement de la TVA, l'administration fiscale impose à tout assujetti la délivrance de factures pour tous biens livrés ou services rendus ainsi que leur conservation.

Ayant à gérer une masse considérable de documents papiers, les entreprises ont souhaité développer la télétransmission des factures.

C'est pourquoi l'article 47 de la loi de finances rectificative pour 1990, devenu l'article 289 bis du Code général des impôts a autorisé la transmission de factures par voie télématique.

Trois cas sont à distinguer :

- les entreprises qui veulent recourir à la télétransmission des factures déposent une demande d'autorisation auprès de l'administration fiscale. A compter de la réception de la demande, l'administration dépose d'un délai de six mois pour se prononcer, délai qui peut être prorogé de trois mois si nécessaire ;

- si l'entreprise souhaite modifier le système soumis à autorisation, elle doit le faire savoir à l'administration préalablement à sa mise en oeuvre. A défaut d'une réponse dans un délai de deux mois, la modification est considérée comme acceptée ;

- les contribuables qui entendent utiliser un système déjà autorisé doivent en faire la déclaration auprès de l'administration fiscale au plus tard 30 jours avant sa mise en oeuvre. A l'expiration de ce délai, l'administration est réputée avoir donné son autorisation.

Toutefois, la procédure imposée par l'administration fiscale est jugée encore trop lourde pour les entreprises puisque seulement 24 systèmes de télétransmission ont été autorisés, pour la facturation de 236 entreprises.

II - LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le rapport remis par M. Dominique Baert à Mme Marylise Lebranchu, Secrétaire d'Etat aux PME, au Commerce et à l'Artisanat prône une simplification des mesures administratives qui pèsent sur les entreprises. Parmi les "dix commandements" de la simplification administrative, deux mesures concernent l'article 289 bis de Code général des impôts. En effet, le rapport préconise à la fois de faciliter les téléprocédures et d'éviter les autorisations ou les agréments préalables.

Prenant acte de ces remarques, le gouvernement propose donc une modification de l'article 289 bis du code général des impôts en remplaçant la procédure d'autorisation préalable par le système de la déclaration.

Le présent article modifie tout d'abord le II de l'article 289 bis du code général des impôts. Désormais, les entreprises qui veulent recourir à la télétransmission des factures ou modifier de manière substantielle le dispositif existant n'ont plus à déposer une demande d'autorisation. Il leur suffit d'en faire la déclaration auprès de l'autorité administrative selon des modalités et un modèle de déclaration définis par arrêté du ministre chargé du budget. Cet arrêté définira le cahier des charges que devront respecter les entreprises.

Le dispositif est donc doublement assoupli : non seulement les déclarations ont remplacé les autorisations, mais elles sont obligatoires seulement dans le cas d'une modification substantielle alors que l'ancien système prévoyait une demande d'autorisation pour toute modification. Votre rapporteur tient toutefois à faire remarquer que la notion de modification substantielle est très subjective.

Le présent article modifie également l'alinéa 2 du paragraphe III de l'article 289 bis du code général des impôts en précisant que la liste séquentielle de tous les messages émis et reçus ainsi que leurs anomalies éventuelles peut être conservées sur support papier, mais également sur support informatique.

Enfin, le présent article modifie les troisième, quatrième, cinquième et sixième alinéas du paragraphe III de l'article 289 bis du code général des impôts afin d'adapter au nouveau système de déclaration les suites à donner aux contrôles inopinés des agents de l'administration sans modifier les règles qui encadrent le droit de la défense et la nature des contrôles effectués.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 3

Harmonisation des dates de dépôt
des principales déclarations professionnelles

Commentaire : le présent article vise à fixer, au plus tard au 30 avril, les dates de dépôt des principales déclarations fiscales professionnelles.

Cette disposition constitue la traduction législative d'une mesure destinée à " faciliter les rendez-vous fiscaux de l'entreprise " qui avait été préconisée par M. Dominique Baert, député, dans le rapport remis en octobre 1997 à Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.

Le présent article a pour effet d'harmoniser les dates de dépôt des principales déclarations professionnelles suivantes :

- déclaration des commissions, courtages, ristournes et honoraires (art. 240 du code général des impôts) ;

- déclaration des droits d'auteur ou d'inventeur (art. 241 du code général des impôts) ;

- déclaration des bénéfices industriels et commerciaux des entreprises individuelles imposables d'après le régime du réel normal ou simplifié, de résultats des exploitants agricoles placés sous un régime réel d'imposition et de résultats des personnes exerçant une activité non commerciale placée sous le régime de la déclaration contrôlée (art. 175 du code général des impôts) ;

- déclaration de résultats des entreprises passibles de l'impôt sur les sociétés, lorsqu'aucun exercice n'est clos au cours d'une année (art. 223 du code général des impôts) ;

- déclaration pour la taxe d'apprentissage (art. 229 du code général des impôts) ;

- déclaration pour la participation à la formation professionnelle continue des entreprises de 10 salariés et plus (art. 235 ter J du code général des impôts) ;

- déclaration pour la participation à la formation professionnelle continue des entreprises de moins de 10 salariés (art. 235 ter KD du code général des impôts) .

Par ailleurs, votre rapporteur tient à indiquer que deux décrets actuellement en préparation et qui seront publiés après l'adoption du présent projet de loi opéreront une harmonisation identique au profit de :

- la déclaration de régularisation de TVA (art. 242 sexies de l'annexe II du code général des impôts) et la déclaration relative à l'investissement obligatoire dans la construction (art. 161 de l'annexe II du code général des impôts) ;

- la déclaration annuelle concernant l'ensemble des paiements et opérations sur valeurs mobilières (art. 49 D de l'annexe III du code général des impôts).

On peut par ailleurs souligner que cette mesure, qui n'aura aucune conséquence sur les finances publiques, officialisera une pratique suivie depuis plusieurs années par le ministre des finances et tendant déjà à reporter, à titre gracieux, le dépôt de la plupart de ces déclarations au 30 avril.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification

ARTICLE 3 bis (nouveau)

Harmonisation des délais concernant les obligations fiscales
liées à la cession ou à la cessation d'activité

Commentaire : cet article tend à porter de trente à soixante jours le délai de déclaration pour les PME de la taxe sur la valeur ajoutée en cas de cession ou de cessation d'activité afin de l'harmoniser avec celui concernant la déclaration de bénéfice.

I - LE DISPOSITIF ACTUEL


L'article 201 du Code général des impôts fixe les dispositions spéciales concernant les déclarations de plus-values des contribuables en cas de cession, de cessation ou de décès.

Ainsi, il dispose que  " dans le cas de cession ou de cessation, en totalité ou en partie, d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou minière, ou d'une exploitation agricole dont les résultats sont imposés d'après le régime du bénéfice réel, l'impôt sur le revenu dû en raison des bénéfices réalisés dans cette entreprise ou exploitation et qui n'ont pas encore été imposés est immédiatement établi. "

Cet article précise par ailleurs les délais dont disposent les contribuables pour faire parvenir à l'administration soit la déclaration de leurs plus-values lorsqu'ils sont imposés au forfait, soit la déclaration de leur bénéfice réel accompagnée d'un résumé de leur compte de résultat dans les autres cas.

Jusqu'en 1987, les contribuables disposaient de trente jours pour effectuer cette démarche. Toutefois, l'article 6 de la loi n °87-502 du 8 juillet 1987 modifiant les procédures fiscales et douanières a porté de trente à soixante jours le délai de régularisation de ces deux types de déclaration.

II - LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Cet allongement des délais ne concernait jusqu'à présent que la seule déclaration de bénéfices. Les déclarations de recettes imposées à tout redevable de la taxe sur la valeur ajoutée obéissaient à un régime différent.

Ainsi, l'article 287 du Code général des impôts disposait que " en cas de cession ou de cessation d'une activité professionnelle, les redevables sont tenus de souscrire dans les trente jours la déclaration [...] ".

Le présent article tend à modifier cette disposition afin d'harmoniser les délais de déclaration de plus-values ou de bénéfice réel d 'une part et de recettes d'autres part. Cette mesure vise à simplifier les obligations fiscales des entreprises en évitant la multiplication de délais différents.

Elle n'a toutefois pas vocation à intéresser toutes les entreprises. Le texte voté par l'Assemblée nationale précise que le délai de déclaration des recettes est porté à soixante jours uniquement pour les entreprises placées sous le régime simplifié d'imposition. Cette limitation du champ d'application de la mesure proposée par le présent article s'explique par les modalités de paiement de la TVA pour les entreprises soumises au régime réel simplifié.

En effet, ces entreprises, des PME pour la plupart, paient la TVA sous forme d'acomptes trimestriels calculés à partir du montant de TVA payé l'année précédente. Une déclaration de régularisation est faite une fois par an, qui nécessite une récapitulation de toutes les opérations de l'année. Or, en cas de cession ou de cessation, le dispositif actuel prévoit que les redevables sont tenus de souscrire une telle déclaration dans les 30 jours. Afin de leur donner plus de temps pour réaliser cette opération assez lourde, le présent article élargit le délai de déclaration à 60 jours.

En revanche, une extension du délai n'est pas justifiée pour les entreprises soumises au régime réel normal. En effet, celles-ci comptabilisent au jour le jour toutes leurs opérations et font une déclaration mensuelle de TVA. En cas de cession ou de cessation, elles n'ont donc pas de difficulté à déclarer dans un délai de 30 jours le montant dû de TVA.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 4

Simplification des dispositions relatives aux régimes d'imposition

Commentaire : le présent article a pour objet d'autoriser les contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et placés sous le régime du forfait d'opter, s'ils le souhaitent, pour le régime normal d'imposition, et, en conséquence, de bénéficier de la franchise d'impôt sur les plus-values acquises à la date de l'option.

Les modalités concrètes de déclaration du résultat varient selon la taille des entreprises : les plus importantes sont soumises au régime de l'évaluation réelle normale ; les autres sont soumises à des obligations moins astreignantes. En effet, les règles applicables aux bénéfices industriels et commerciaux impliquent que le chef d'entreprise soit entouré d'une équipe de comptables et de fiscalistes, ce qu'un petit artisan ne peut pas toujours se permettre.

C'est pourquoi les petites entreprises dont le chiffre d'affaires ne dépasse pas un plafond fixé par la loi sont soumises au régime du forfait qui les dispense de tenir une comptabilité.

Toutefois, le souci des pouvoirs publics est d'inciter les petites entreprises à renoncer au régime du forfait et à se doter d'une véritable comptabilité. Il s'agit pour l'administration de mieux cerner la réalité des bénéfices de ces entreprises.

Pour les entreprises, l'existence d'une comptabilité est un instrument indispensable de gestion. En outre, bien que le forfait soit généralement avantageux pour le contribuable, il peut aussi présenter de sérieux inconvénients.

En effet, si en principe le forfait ne prend pas en compte les plus-values d'actifs, il ignore en revanche les pertes en capital ainsi que les déficits d'exploitation. Par là, ce mode d'évaluation peut se révéler très rigoureux pour les forfaitaires quand on songe que près de la moitié des personnes morales soumises à l'impôt sur les sociétés sont fiscalement déficitaires et que la taxation des plus-values dans les régimes de bénéfice réel est le plus souvent modérée.

Enfin, le contribuable soumis au forfait peut voir son forfait remis en cause et il n'est pas à l'abri d'un examen d'ensemble de sa situation fiscale personnelle visant à comparer ses revenus forfaitaires avec le montant apparent de ses disponibilités.

La première méthode utilisée par l'administration fiscale pour inciter les petites entreprises à renoncer au forfait est de ne pas relever les limites du forfait. En effet, ces dernières n'ayant pas été modifiées depuis 1965, un bon nombre d'entreprises dépassent mécaniquement chaque année le seuil du forfait.

L'administration peut également inciter les entreprises à opter pour le régime de l'évaluation réelle en assortissant cette option d'un certain nombre d'avantages fiscaux.

Les entreprises ont ainsi déjà la possibilité d'opter pour le régime réel simplifié. Le présent article propose de les autoriser à opter pour le régime réel normal.

On peut toutefois se demander si les entreprises y trouveront un intérêt dès lors qu'elles bénéficient déjà de la faculté d'opter pour le régime réel simplifié.

I - LE DROIT EN VIGUEUR

A.LE RÉGIME DU FORFAIT


Les toutes petites entreprises exerçant une activité industrielle ou commerciale et ne réalisant qu'un chiffre d'affaires modeste sont dispensées de tenir une véritable comptabilité et de se livrer aux calculs savants du résultat imposable selon les lois de la science fiscale. Leur bénéfice est déterminé forfaitairement une fois tous les deux ou trois ans à partir de rudiments de comptabilité.

1. Les limites du forfait

Sous réserve d'exclusions, liées à la forme juridique de l'entreprise ou à la nature des opérations effectuées, le régime du forfait est le régime de droit commun applicable aux entreprises individuelles dont le chiffre d'affaires annuel TTC n'excède pas :

- 500.000 F si l'activité de l'entreprise est la vente de marchandises, l'exploitation d'hôtels, de meublés, de restaurants ou de cafés ;

- 150.000 F s'il s'agit d'un prestataire de services.

2. Évaluation et fixation du forfait

Le bénéfice forfaitaire correspond au bénéfice que l'entreprise peut produire normalement. Il s'agit donc d'un bénéfice approximatif , évalué par l'agent des impôts à partir des éléments qui sont à sa disposition : déclaration annuelle fournie par le contribuable, qualité du fonds, emplacement, marges habituelles du secteur d'activité... Il utilise également les monographies professionnelles, nationales ou régionales.

La discussion du forfait vise à la fois le bénéfice imposable et le chiffre d'affaires soumis à la TVA. L'évaluation faite par l'agent des impôts est notifiée au contribuable qui dispose de 30 jours pour accepter ou formuler ses observations. A défaut d'accord amiable, c'est la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui détermine le montant du bénéfice forfaitaire.

La notion de bénéfice forfaitaire s'oppose à la reconnaissance d'un déficit d'exploitation : au mieux l'administration considère le résultat comme égal à zéro ; si les résultats sont déficitaires, le contribuable a intérêt à renoncer au forfait .

Une fois fixé, le forfait est valable pour deux années et peut être reconduit pour une troisième année. Sauf exception, le forfait ainsi établi ne peut être remis en cause. Cette sécurité est fortement appréciée par les exploitants. Enfin, en l'absence de dénonciation, les forfaits font l'objet d'une reconduction tacite pour une durée d'un an renouvelable.

3. Obligations comptables et déclaratives des forfaitaires

Les obligations comptables imposées au contribuable relevant du régime du forfait sont réduites au minimum
. Le Code du commerce dispense en effet les commerçants relevant du forfait de tenir une comptabilité d'engagement et de présenter des comptes annuels. Ils ne sont en conséquence astreints qu'à la tenue d'une comptabilité de trésorerie . En cours d'année, la tenue d'un seul registre est imposée :

- registre des achats, appuyé des factures et de toutes autres pièces justificatives, pour ceux qui achètent en vue de revendre ;

- livre-journal des recettes pour les prestataires de services.

A la fin de l'année, le contribuable doit adresser à l'administration, avant le 16 février, une déclaration spéciale (imprimé n° 951 M) contenant les renseignements nécessaires à leur identification et à la fixation de leur forfait de bénéfice et de chiffre d'affaires (montant des achats et des ventes, détail des frais généraux, valeur du stock, détail des immobilisations).

4. Atténuations d'impôt accordées aux forfaitaires

Le bénéfice normal ne tient pas compte des revenus exceptionnels. En conséquence, les plus-values sont en principe exonérées (article 151 septies du CGI), à condition que l'activité ait été exercée pendant au moins cinq ans.

Par ailleurs, en vue d'alléger les charges des petits contribuables dans les limites compatibles avec le maintien des conditions de la concurrence, l'article 282 du CGI a prévu en leur faveur, des dispositions particulières aboutissant à un abandon ou à une réduction de la TVA leur incombant .

La TVA n'est ainsi pas acquittée lorsque son montant annuel n'excède pas 1.350 F avant déduction de la taxe ayant grevé les biens amortissables (franchise en impôt).

Lorsque le montant annuel de la TVA avant déduction pour investissement est supérieur à 1.350 F et n'excède pas 5.400 F, l'impôt exigible est réduit d'une somme égale au tiers de la différence entre 5.400 F et le montant de la TVA exigible au titre de l'année civile (décote générale).

Enfin, lorsque le montant annuel de la TVA due avant déduction pour investissement est compris entre 1.350 F et 20.000 F, l'impôt exigible est réduit par application d'une décote, pour les redevables inscrits au répertoire des métiers ou au registre de la chambre nationale de la batellerie artisanale qui justifient que la rémunération de leur travail et de celui des personnes qu'elles emploient représente plus de 35 % du chiffre d'affaires global annuel tous droits et taxes compris (décote spéciale).

B. ACTUELLEMENT, LES CONTRIBUABLES RELEVANT DU FORFAIT PEUVENT OPTER POUR LE RÉGIME RÉEL SIMPLIFIÉ

1. La faculté d'opter pour le régime réel simplifié


Actuellement, l'article 302 septies A du code général des impôts autorise les entreprises soumises au régime du forfait à opter, si elles le souhaitent, pour le régime réel simplifié . L'option doit être notifiée à l'administration avant le 1 er février de la première année au titre de laquelle les entreprises désirent appliquer ce régime.

Pour rappel, le régime du réel simplifié s'applique de plein droit aux entreprises dont le chiffre d'affaires annuel, hors taxes, se trouve compris entre le plafond du forfait et le plancher du réel normal, c'est-à-dire :

- chiffre d'affaires compris entre 500.000 F (TTC) et 5.000.000 F (HT) pour les entreprises de vente de marchandises, les hôtels, les loueurs en meublé, les restaurants et les cafés ;

- chiffre d'affaires compris entre 150.000 F (TTC) et 1.500.000 F (HT) pour les autres entreprises (prestataires de services).

Les contribuables ayant opté pour le régime réel simplifié sont soumis à des obligations déclaratoires plus lourdes, même si elles restent simplifiées par rapport au régime réel normal :

La déclaration des résultats dans le régime réel simplifié

La déclaration de résultats doit être faite sur un imprimé spécial n° 2031. A cette déclaration, doivent être joints un certain nombre de tableaux composant la liasse fiscale. Cette liasse est cependant plus sommaire que dans le régime réel normal. Elle ne comprend que quatre tableaux annexes :

- un bilan abrégé ;

- un compte simplifié de résultat fiscal, dégagé à partir du bénéfice brut, des frais généraux, des amortissements et des provisions ;

- un tableau des immobilisations et des amortissements ;

- un relevé des provisions.

En particulier les entreprises n'ont pas à remplir l'état n° 2058 A (rectifications extra-comptables).

Les entreprises sont cependant soumises aux règles comptables de droit commun, semblables à celles appliquées pour le régime normal. Toutefois, depuis 1984, la tenue d'une comptabilité " super-simplifiée " qui se rapproche d'une comptabilité de caisse est possible. Mais dans ce cas, l'entreprise ne peut pas constituer de provisions, ce qui peut être un grave inconvénient pour sa gestion prévisionnelle.

La déclaration des résultats doit être déposée avant le 1 er avril ou le 16 avril selon les cas.

En matière de taxes sur le chiffre d'affaires, les entreprises relevant du régime réel simplifié n'ont à remplir que des déclarations abrégées.

Enfin, l'option des forfaitaires pour le régime simplifié doit être exercée simultanément en matière de TVA et d'impôt sur le revenu, en vertu d'un arrêt du Conseil d'Etat du 6 février 1981.

2. Les incitations fiscales à la renonciation au forfait

• En contrepartie, les entreprises qui exercent l'option sont, en vertu de l'article 39 octodecies du CGI, autorisées à réévaluer en franchise d'impôt les éléments d'actifs non amortissables : fonds de commerce, droit au bail, terrain. Les entreprises peuvent par là se prémunir contre une éventuelle taxation des plus-values attachées à ces éléments d'actifs au taux de droit commun.

En effet, le franchissement du plafond du forfait entraîne la soumission de l'entreprise au droit commun d'imposition des plus-values. Une entreprise qui serait près de franchir le seuil aura donc tout intérêt à ce que la plus-value résultant d'une éventuelle cession de ses actifs soit calculée d'après la valeur réévaluée et non d'après la valeur d'acquisition initiale.

Cette disposition ne s'applique pas aux entreprises placées de plein droit sous le régime simplifié.

• Par ailleurs, afin d'inciter les contribuables soumis au forfait à opter pour un régime de bénéfice réel, le législateur a prévu, en 1975, l'institution de centres de gestion agréés pour les aider à remplir leurs obligations fiscales et à gérer leur entreprise.

Les adhérents à ces organismes bénéficient, sous certaines conditions et dans certaines limites, d'avantages fiscaux qui consistent en :

- un abattement de 20 % sur le montant de leur bénéfice imposable , dans la limite de 701.000 F. Cette faculté est en revanche interdite aux contribuables relevant du forfait, ce qui les incite à opter pour le régime de l'évaluation réelle simplifiée.

- une déduction plus importante de la rémunération versée au conjoint dans les entreprises individuelles ;

- une réduction d'impôt, plafonnée à 6.000 F, destinée à compenser les frais de tenue de comptabilité pour les petits contribuables dont le chiffre d'affaires n'excède pas les limites du forfait.

• Enfin, la franchise et les décotes en matière de TVA (cf. supra) sont applicables aux redevables placés par option sous le régime simplifié d'imposition.

II - LE DISPOSITIF PROPOSE

A. LE PRÉSENT DISPOSITIF PROPOSE D'AUTORISER LES ENTREPRISES RELEVANT DU FORFAIT À OPTER POUR LE RÉGIME RÉEL NORMAL


Le présent article propose d'ouvrir aux forfaitaires la faculté d'opter pour le régime normal d'imposition .

Le gouvernement prévoit de fixer par décret en Conseil d'Etat les modalités réglementaires d'application de cette faculté.

Les contribuables ayant exercé l'option seraient en conséquence soumis aux obligations déclaratives correspondantes qui peuvent être assez lourdes.

La déclaration des résultats dans le régime réel normal

Le régime du bénéfice réel normal implique la tenue d'une comptabilité complète conforme au Plan comptable général ainsi que la présentation de tous les documents comptables et fiscaux qui doivent accompagner la déclaration de résultats.

La déclaration de résultats doit être faite sur un imprimé spécial n° 2031. La liasse que les contribuables doivent joindre à cette déclaration des résultats est particulièrement lourde et compliquée. Elle comprend ainsi un certain nombre de tableaux, les uns étant de nature comptable (bilan, compte de résultat, tableau des immobilisations, amortissements, provisions) ; les autres de nature fiscale (état n° 2058 A de détermination du résultat fiscal, déficits et provisions non déductibles, plus-values et moins-values).

En plus de ces imprimés normalisés, les entreprises doivent joindre un certain nombre d'autres documents :

- état explicitant le calcul des provisions de caractère fiscal ;

- état de suivi des valeurs fiscales ;

- état d'affectation des voitures de tourisme...

La déclaration des résultats doit parvenir à l'administration :

- avant le 1 er avril si l'exercice comptable coïncide avec l'année civile ;

- avant le 1 er mars dans les autres hypothèses.

Lorsque la déclaration n'est pas adressée dans les délais, l'entreprise encourt, outre certaines amendes fiscales, le risque de voir son bénéfice évalué d'office par l'administration. Aussi bien a-t-elle intérêt, si certains renseignements lui font défaut, à établir dans les délais une déclaration provisoire qui sera complétée dès que la situation définitive sera connue.

En contrepartie, l'option pour le régime réel normal emporterait les mêmes avantages fiscaux que l'option pour le régime réel simplifié : réévaluation en franchise fiscale des immobilisations non amortissables, abattement sur bénéfice et réduction d'impôt en cas d'adhésion à un centre de gestion agréé.

En outre, les députés ont adopté un amendement tendant à permettre à un forfaitaire qui opterait pour le régime réel normal de continuer à bénéficier de la franchise ou de la décote de TVA.

Selon la fiche d'impact annexée au présent projet de loi, 100.000 entreprises seraient concernées.

Néanmoins, comme l'écrit le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, " on peut douter [du succès réel de cette mesure de souplesse] auprès des entrepreneurs individuels qui ne retireront aucun avantage particulier de la préférence donnée au régime normal par rapport au régime simplifié d'imposition ".

B. MESURE DE COORDINATION EN MATIÈRE DE BÉNÉFICES NON COMMERCIAUX


Les personnes qui perçoivent des bénéfices non commerciaux ou des revenus assimilés sont placées :

- soit sous le régime de la déclaration contrôlée 7( * ) du bénéfice net ;

- soit sous le régime de l'évaluation administrative 8( * ) du bénéfice imposable (articles 101 à 102 du CGI).

- soit sous le régime déclaratif spécial 9( * ) lorsque le montant annuel des recettes n'excède pas 100.000 F.

Le régime de la déclaration contrôlée s'applique à titre obligatoire, notamment :

- aux contribuables dont le montant annuel des recettes excède 175.000 F ;

- aux contribuables qui optent pour le régime réel simplifié TVA pour l'imposition de leur chiffre d'affaires (article 302 septies A quater du CGI).

Le présent article prévoit dans son paragraphe IV d'étendre cette dernière obligation à tout contribuable qui a opté pour un régime réel.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 5

Simplification de la gestion des emplois occasionnels

Commentaire : le présent article vise à appliquer au secteur des spectacles un dispositif expérimental de simplification administrative.

I - L'ÉTAT ACTUEL DU DROIT

Les employeurs recrutant des salariés pour accomplir des tâches occasionnelles doivent actuellement effectuer de nombreuses démarches auprès d'interlocuteurs différents, qu'il s'agisse du paiement des cotisations sociales ou du respect des dispositions du code du travail relatives à l'embauche, à l'établissement ou à la rupture du code du travail. Cette situation leur est d'autant plus préjudiciable qu'il s'agit le plus souvent de petites entreprises, associations ou comités d'entreprises n'ayant pas toujours les moyens matériels ou humains de s'acquitter de ces différentes obligations et confrontés, par nature, à la nécessité de réaliser fréquemment, et souvent de façon urgente, de telles tâches, puisqu'il s'agit de gérer des emplois occasionnels.

Par ailleurs, cela se traduit, de fait, par une évasion de cotisations sociales pénalisante tant pour les salariés et les régimes de sécurité sociale que pour les organisateurs de spectacles s'acquittant de ces obligations et qui doivent, en conséquence, faire face à une concurrence déloyale.

Actuellement, les secteurs du spectacle, du bâtiment et des travaux publics, les hôtels, cafés et restaurants ainsi que le tourisme traditionnellement fortement utilisateurs d'emplois occasionnels, sont particulièrement touchés et concernés par ce phénomène.

II - LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à simplifier les modalités de gestion de ces emplois en permettant aux entreprises du secteur du spectacle vivant de s'acquitter auprès d'un interlocuteur unique de l'ensemble des tâches concernant les déclarations de sécurité sociale ou les formalités prescrites par le code du travail 10( * ) .

Afin de garantir la sécurité du système ainsi mis en place, le paragraphe I de cet article précise que cet interlocuteur unique doit être expressément habilité par arrêté ministériel, dans la mesure notamment où il recouvre les cotisations et contributions sociales, qu'elles soient d'origine légale ou conventionnelle, imposées par la loi.

Le paragraphe II détermine les modalités selon lesquelles s'effectue le recouvrement de ces cotisations et contributions. Par amendement déposé à l'Assemblée nationale en seconde délibération, le gouvernement a entendu clarifier les modalités de ce recouvrement. Il est désormais précisé, a contrario, à l'instar de ce que la commission des finances de l'Assemblée nationale avait préconisé, mais qui n'avait pas été retenu dans un premier temps, que le recouvrement pré-contentieux s'opère selon une règle unique applicable à l'ensemble de ces cotisations et contributions. Cette règle sera définie par convention homologuée par les ministres du travail et de l'emploi. Et cela dans un souci de simplification administrative afin de ne pas rendre trop complexe pour l'organisme collecteur la procédure de recouvrement.

Au contraire, dans l'hypothèse d'un recouvrement contentieux, seront appliquées les règles spécifiques à chaque cotisation ou contribution, et notamment celles relatives à la détermination de la juridiction compétente, qu'il s'agisse des juridictions spéciales ou des juridictions civiles de droit commun. Et cela afin de ne pas opérer d'unification du contentieux aux dépens de l'un ou l'autre de ces deux ordres de juridictions.

Enfin, le paragraphe IV pose le caractère expérimental du dispositif ainsi mis en place. Il ne s'appliquera, dans un premier temps, qu'au seul secteur du spectacle. Il est cependant prévu de pouvoir étendre ces mesures de simplification de la gestion des emplois occasionnels aux secteurs du bâtiment, de l'hôtellerie-restauration et du tourisme, et cela par décret en Conseil d'Etat. D'après les informations obtenues par votre rapporteur, cette extension sera effectuée dès que les concertations menées tant avec les partenaires sociaux qu'avec les organismes sociaux, auront abouti.

A l'initiative du gouvernement, il a par ailleurs été précisé en seconde délibération que l'arrêté d'habilitation de l'organisme collecteur serait pris, en pareil cas, par les ministres chargés de l'emploi et de la sécurité sociale et par les ministres compétents à l'instar de ce qui était déjà prévu dans la rédaction initiale du projet de loi pour le secteur des spectacles.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 6

Suppression de la déclaration d'embauche et de licenciement
aux caisses primaires d'assurance-maladie

Commentaire : le présent article vise à supprimer une disposition législative du code de la sécurité sociale datant d'octobre 1945 et devenue obsolète.

Les employeurs sont actuellement confrontés à une double obligation de déclaration aux caisses primaires d'assurance-maladie (CPAM).

Cette obligation résulte, pour les salariés ayant déjà été immatriculés, de l'article L.312-1 du code de la sécurité sociale qui impose à l'employeur d'informer la CPAM de "tout embauchage ou tout licenciement de personnel". Par ailleurs les articles L. 312-2 et R. 312-4 du même code permettent auxdites caisses d'immatriculer un salarié n'ayant jamais été antérieurement affilié à un régime de sécurité sociale 11( * ) . Cette affiliation doit être effectuée dans la huitaine suivant l'embauche de ladite personne.

Le présent article vise à mettre fin à cette redondance inutile en raison, notamment, de la création des unions de recouvrement des cotisations sociales et familiales (URSSAF) qui, depuis 1960, ont pour mission de recouvrer les cotisations sociales à la place des CPAM, et de l'instauration de la déclaration annuelle de données sociales.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 7

Suppression de l'obligation de tenue du livre de paie
et simplification du bulletin de paie

Commentaire : le présent article a pour objet de simplifier la procédure d'établissement de la paie par l'entreprise.

Préconisées par le rapport de M. Dominique Baert, député, afin de " rendre le droit du travail plus abordable ", les dispositions du présent article ont pour objet, d'une part, de supprimer l'obligation de tenue du livre de paie et, d'autre part, d'autoriser l'établissement d'un récapitulatif annuel du montant des cotisations sociales patronales.

I. - LA SUPPRESSION DU LIVRE DE PAIE ET SON REMPLACEMENT PAR LA CONSERVATION SUR 5 ANS D'UN DOUBLE DES BULLETINS DE PAIE

A. L'ETAT ACTUEL DU DROIT


En application de l'article L. 143-5 du code du travail, la tenue d'un livre de paie constitue une obligation générale applicable à tous les entrepreneurs -à l'exception des particuliers qui occupent des employés de maison ou des assistantes maternelles. Celui-ci recense toutes les mentions obligatoires portées sur les bulletins de paie. A ce titre, il doit être tenu de façon particulièrement rigoureuse afin de présenter une fiabilité absolue, et cela d'autant plus qu'il peut être contrôlé ou consulté tant par les inspecteurs du travail, l'administration fiscale, les inspecteurs des affaires sanitaires et sociales que les salariés.

Cependant, avec le développement de l'informatique et du traitement automatisé de l'établissement des bulletins de paie, des solutions alternatives, souvent moins contraignantes ont été mises en place, se traduisant par l'adoption d'une présentation plus succincte ou l'aménagement des délais dans lesquels doit être effectivement accomplie l'obligation de présentation de ces documents.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

La mesure présentée par cet article s'inscrit dans ce cadre : son paragraphe II abroge l'obligation de tenue du livre de paie en contrepartie de celle faite à l'employeur de conserver pendant 5 ans un double des bulletins de paie remis par l'employeur. A l'initiative du gouvernement, il a également été prévu que cette conservation pourrait s'effectuer par "d'autres moyens, notamment informatiques, lorsque des garanties de contrôle équivalentes sont maintenues", à l'instar de ce qui est déjà prévu par l'article L. 620-7 du code du travail pour " la tenue de certains registres " par les entreprises.

Parallèlement, en supprimant le dernier alinéa de l'article L. 611-9 du même code, a été affirmée la nécessité pour l'employeur de conserver les éléments relatifs à la paie sur le lieu de travail.

II. - LA POSSIBILITÉ DE REMPLACER LA MENTION DES COTISATIONS PATRONALES SUR LES BULLETINS DE PAIE PAR UN RÉCAPITULATIF ANNUEL DE CELLES-CI

A. LA MENTION OBLIGATOIRE DES COTISATIONS PATRONALES


Depuis le 1 er janvier 1989, en application de l'article 10 de la loi n° 86-966 du 18 août 1986 portant diverses mesures relatives au financement des retraites et pensions, est désormais obligatoirement indiqué sur chaque bulletin de paie le montant des cotisations patronales, qu'il s'agisse des cotisations de sécurité sociale ou de celles versées aux régimes complémentaires de retraite et de prévoyance.

En sont dispensés les particuliers occupant des employés de maison ou des assistantes maternelles ainsi que les personnes payées par chèque emploi-service.

Cette disposition que votre commission avait alors approuvée, devait permettre d'informer plus complètement les salariés sur le coût réel du travail à la charge de l'employeur.

A l'usage cependant, celle-ci a pu se révéler pénalisante pour certaines entreprises, et notamment les plus petites d'entre elles, ainsi que l'avait relevé en 1996 un rapport de la commission de simplification du bulletin de paie présidée par M. Patrick Turbot.

Par ailleurs, force est de constater que cette mention obligatoire n'a pas empêché le coût du travail d'augmenter dans la période au profit des prélèvements publics, et au détriment des entreprises et des salariés 12( * ) .

B. L'OPTION OFFERTE À L'EMPLOYEUR

Tout en continuant à approuver pleinement l'objectif qui était recherché par l'article 10 de la loi n° 86-966 précitée, votre commission partage cette volonté de simplifier, pour les entreprises, les opérations d'établissement des bulletins de paie, et cela d'autant plus que le dispositif proposé par le présent article leur offre une option. En effet, ces cotisations pourront soit figurer sur chaque bulletin de paie, soit être portées sur un document annuel récapitulant lesdites charges patronales.

L'ensemble de ces dispositions sera applicable dans des délais brefs, à savoir, le premier jour du mois qui suit la publication de la présente loi.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 8

Aménagement des règles de prescription
applicables aux majorations de retard

Commentaire : le présent article tend à ramener à deux ans le délai de prescription des pénalités de retard afin de l'harmoniser avec celui des majorations de retard.

I - LES SANCTIONS APPLICABLES EN CAS DE NON RESPECT DES PRESCRIPTIONS DE LA LÉGISLATION DE LA SÉCURITÉ SOCIALE


L'article L. 244-1du code de la sécurité sociale dispose que " l'employeur ou le travailleur indépendant, qui ne s'est pas conformé aux prescriptions de la législation de sécurité sociale, est poursuivi devant le tribunal de police  [...]".

L'article L.244-2 précise toutefois que toute action ou poursuite est obligatoirement précédée soit d'un avertissement par lettre recommandée du directeur régional des affaires sanitaires et sociales si elle a lieu à la requête du ministère public, soit d'une mise en demeure adressée par lettre recommandée à l'employeur ou au travailleur indépendant.

L'avertissement ou la mise en demeure concerne soit les majorations de retard, soit les pénalités de retard.

Selon l'article R.243-18, une majoration de retard de 10 p.100 du montant des cotisations est appliquée lorsque les cotisations n'ont pas été versées aux dates limites d'exigibilité. En outre, cette majoration de retard est augmentée de 3 p.100 du montant des cotisations dues par trimestre ou fraction de trimestre écoulé après expiration d'un délai de trois mois à compter de la date limite d'exigibilité des cotisations.

Selon l'article R. 243-16, une pénalité de 50 francs par salarié ou assimilé figurant sur le dernier bordereau ou la dernière déclaration remise par l'employeur est appliquée en cas de défaut de production, dans les délais prescrits, des bordereaux et déclarations. Cette pénalité est également encourue pour chaque inexactitude quant aux montant des rémunérations déclarées ou chaque omission de salarié.

II - L'HARMONISATION DES RÈGLES DE PRESCRIPTION APPLICABLES AUX PÉNALITÉS DE RETARD

Si le régime des majorations de retard et celui des pénalités se ressemblent dans la mesure où ils supposent l'intervention préalable d'un avertissement ou d'une mise en demeure, ils diffèrent à propos des règles de prescription.

En effet, l'article L. 244-3 du code de la sécurité sociale dispose dans son deuxième alinéa que "  l'avertissement ou la mise en demeure qui concerne le recouvrement des majorations de retard correspondant aux cotisations payées ou aux cotisations exigibles dans le délai fixé au premier alinéa doit être adressé avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter du paiement des cotisations qui ont donné lieu à l'application desdites majorations ".

En revanche, aucune disposition particulière ne régit le délai de prescription applicable aux pénalités de retard. C'est donc la prescription trentenaire de droit commun qui s'applique à ces dernières.

Or, ces disparités ne sont pas justifiées. C'est pourquoi le présent article propose de ramener de trente à deux ans le délai de prescription applicable aux pénalités de retard. En outre, le délai est calculé soit à compter de la date de production des documents lorsque ceux-ci ont été remis mais s'avèrent inexacts, soit à compter de la mise en demeure lorsqu'ils n'ont pas été envoyés.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 9

Délai d'inscription des créances sociales au greffe
du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance

Commentaire : le présent article tend à préciser la date à partir de laquelle court le délai d'inscription des créances détenues par les organismes de recouvrement sur les employeurs.

I - LE DISPOSITIF ACTUEL


Le code de la sécurité sociale prévoit des garanties pour assurer le paiement des cotisations sociales.

Ainsi, l'article L. 243-4 dispose que " le paiement des cotisations sociales est garanti pendant un an à dater de leur date d'exigibilité, par un privilège sur les biens meubles du débiteur, lequel privilège prend rang concurremment avec celui des gens de service et des ouvriers [...] ."

En outre, l'article L. 243-5 renforce encore les garanties entourant le paiement des cotisations lorsque celles-ci dépassent 80.000 francs. Elles doivent être inscrites à un registre public tenu au greffe du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance dans le délai de trois mois suivant leur échéance. L'inscription régulière de ces créances est en outre obligatoire en cas de redressement ou de liquidation judiciaire du redevable ou d'un tiers tenu légalement au paiement de ces sommes sous peine de ne plus pouvoir exercer le privilège. Cette inscription permet en contrepartie de conserver le privilège pendant deux années et trois mois à compter du jour où elle a été effectuée.

Pourtant, la rédaction de l'article L. 243-5 n'est pas satisfaisante. En effet, dans sa rédaction actuelle, cet article précise que l'inscription des cotisations dues doit être effectuée dans le délai de trois mois suivant leur date d'échéance. Or, cette notion d'échéance n'est pas claire et donne lieu à des interprétations diverses. Ainsi, certaines URSSAF retiennent comme échéance le point de départ de la période pendant laquelle les cotisations peuvent être payées tandis que d'autres retiennent la date limite de paiement des cotisations. Il en résulte une inégalité de traitement des cotisants.

Par ailleurs, la rédaction actuelle de l'article L. 243-5 n'autorise pas les URSSAF à inscrire les cotisations dues à la suite d'un redressement. En effet, les sommes privilégiées doivent être inscrites dans le délai de trois mois suivant leur échéance. Or dans ce cas, le premier jour de la période durant laquelle lesdites cotisations auraient dû être versées remonte à plus de trois mois.

II - LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article tend à remédier à ces deux difficultés.

D'une part, il fixe le point de départ du délai d'inscription des sommes privilégiées à la date limite de paiement des cotisations. cette modification permet d'allonger la période durant laquelle le cotisant peut régulariser sa situation à l'égard de l'organisme, lui évitant ainsi la publicité de sa dette vis-à-vis des tiers.

Cette mesure va également dans le sens de l'harmonisation des règles applicables en matière fiscale et sociale.

D'autre part, en cas de redressement, le présent article fixe le point de départ du délai d'inscription des sommes privilégiées à la date de notification de l'avertissement ou de la mise en demeure qui doivent précéder toute action ou poursuite contre l'employeur.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 10

Autorisation d'exercer une activité commerciale dans un local d'habitation

Commentaire : le présent article propose de permettre, sans autorisation préalable, mais sous certaines conditions, d'exercer une activité commerciale dans un local d'habitation.

I - LA LÉGISLATION EN VIGUEUR

A. DES DISPOSITIONS RELATIVES A LA DOMICILIATION DES ENTREPRISES NOUVELLES


L'article 2 de la loi n° 84-1149 du 21 décembre 1984 modifiant l'ordonnance n°58-1352 du 27 décembre 1958 relative à la domiciliation des entreprises, permet aux personnes qui créent une entreprise de se domicilier dans leur résidence principale pendant deux ans.

Au-delà, elles doivent justifier du transfert de leur activité dans un local commercial, sauf à être condamnées, sous astreinte, à se conformer aux clauses du règlement de copropriété ou à voir leur bail résilié de plein droit par le juge.

B. L'ARTICLE L.631-7 DU CODE DE LA CONSTRUCTION ET DE L'HABITATION VISANT A PROTÉGER LE NOMBRE DE LOGEMENTS DANS LES GRANDES VILLES

Dans les communes définies à l'article 10-7 de la loi n°48-1360 du 1er septembre 1948 , afin de maintenir ou d'augmenter le nombre de logements, s'appliquent les dispositions de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation.

Le deuxième alinéa de l'article L. 631-7 interdit le changement d'affectation des locaux d'habitation, et leur transformation en hôtels, pensions de famille, ou établissements dont l'exploitant exerce la profession de loueur en meublé.

Le troisième alinéa prévoit que les locaux à usage professionnel ou administratif ainsi que les meublés, hôtels et établissements similaires, ne peuvent, s'ils ne conservent pas leur destination primitive, être affectés à un usage autre que l'habitation .

Il faut noter que l'article L. 631-7 n'est pas applicable aux zones franches urbaines définies à l'article 42 de la loi n°95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (article L. 631-7-10 du code de la construction et de l'habitation), et ceci afin de ne pas compromettre le développement de nouvelles activités dans ces zones.

C. DES DEROGATIONS SUR AUTORISATION ADMINISTRATIVE

L'article prévoit qu'il peut être dérogé aux interdictions de l'article L.631-7 par autorisation administrative préalable et motivée, après avis du maire:

- le préfet peut autoriser, après avis du directeur départemental de l'équipement (article R.631-4 du code de la construction et de l'habitation), le changement d'affectation d'un local à usage d'habitation en tout autre usage, y compris commercial .

- il peut également autoriser un usage mixte, mais qui exclut alors expressément les activités à caractère commercial .

Les dérogations et autorisations sont accordées à titre personnel.



II - LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE PRESENT ARTICLE

A. LA SUPPRESSION DE L'AUTORISATION PREALABLE POUR L'EXERCICE D'UNE ACTIVITE PROFESSIONNELLE DANS UNE PARTIE D'UN LOCAL D'HABITATION


Le présent article propose donc d'insérer dans le code de l'habitat et de la construction un nouvel article L. 631-7-3 qui prévoit de plein droit, sans autorisation préalable, la faculté d'exercer une activité professionnelle, y compris commerciale, dans une partie d'un local à usage d'habitation .

Cette disposition générale prévoit toutefois deux conditions . L'usage professionnel d'un local d'habitation ne peut se faire que si :

- les occupants y ont leur résidence principale,

- et à condition que ne soit reçue ni clientèle, ni marchandise .

Il s'agit, par cette mesure, de faciliter de nouvelles activités, telles que le télétravail et le commerce électronique , mais sans prendre le risque d'attirer dans des locaux à usage d'habitation des activités qui devraient prendre place dans des locaux spécifiques.

Cette mesure est excellente. Elle est de nature à fluidifier le marché du logement locatif, entravé par la difficulté de créer des locaux à usage mixte.

B. LA TRANSFORMATION COMPLÈTE D'AFFECTATION D'UN LOCAL D'HABITATION N'EST PAS CONCERNÉE

Seul le régime d'utilisation "mixte" (professionnelle et d'habitation) est donc concerné. Il s'agit, par rapport au droit existant, à la fois d'une mesure de simplification (aucune autorisation préalable n'est requise), mais également d'un élargissement, puisque les activités de nature commerciale seront autorisées.

Le régime de dérogation, permettant la transformation d'un local d'habitation en un tout autre usage, y compris commercial, sur décision du Préfet et après avis du maire et du directeur départemental de l'équipement, n'est donc pas concerné.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 11

Modification du mécanisme de la déduction en cascade de la TVA en cas d'autoliquidation

Commentaire : cet article tire les conséquences d'une décision récente du Conseil d'Etat relative aux rappels de TVA en supprimant, lorsque la taxe est autoliquidée, la possibilité pour l'entreprise qui fait l'objet du redressement de déduire "en cascade" la TVA de son résultat imposable.

Lorsque, dans le cadre d'une vérification de comptabilité qui porte à la fois sur la fiscalité directe et indirecte, une entreprise fait l'objet d'un rappel de TVA, elle conserve le droit de déduire -conformément aux règles de droit- commun la taxe qu'elle a omis de déclarer.

En vertu de l'article L. 77 du livre des procédures fiscales, cette TVA est alors déduite de son résultat imposable non pas au titre de l'exercice de recouvrement effectif, mais au titre de l'exercice vérifié : c'est ce qu'il est convenu d'appeler la "déduction en cascade". Cette solution favorable au contribuable vérifié est justifiée par le fait que la TVA déductible ne constitue jamais une charge pour l'entreprise, et doit rester sans incidence sur son résultat imposable.

La "déduction en cascade" est applicable de plein droit, à moins que le contribuable y renonce expressément. En effet, dans certaines hypothèses (résultat imposable négatif, par exemple), il peut lui être plus favorable d'imputer la TVA rappelée sur l'exercice de recouvrement.

Toutefois, telle quelle, cette "déduction en cascade" pourrait avoir pour effet de permettre à l'entreprise de réaliser un gain, en minorant de manière artificielle son résultat soumis à l'IS, dès lors que la TVA non déclarée initialement est déductible. Pour éviter cela, cet avantage indu, qui est qualifié de "profit sur le Trésor", est réintégré dans la base de l'IS au titre de l'exercice de rappel. En revanche, il n'y a pas de "profit sur le trésor" si la TVA rappelée reste non déductible.

Un problème particulier se pose dans le cas où la TVA est autoliquidée, c'est-à-dire lorsque l'entreprise est à la fois créditrice et débitrice de la TVA pour une même opération (prestations réalisées par un prestataire établi hors de France au profit d'un assujetti français, livraisons à soi-même, acquisitions intracommunautaires).

Dans cette hypothèse, il n'y a ni décaissement ni encaissement effectif de TVA et, par définition, l'opération reste sans effet sur le résultat imposable de l'entreprise, qu'elle soit ou non déclarée.

Par un arrêt du 6 octobre 1997, SCI Hurks, le Conseil d'Etat a jugé que, dans ce cas de figure, l'administration fiscale n'était pas fondée à réintégrer le "profit sur le Trésor" dans le résultat de l'entreprise vérifiée, au double motif suivant :

- en s'abstenant de déclarer la TVA dont il est débiteur, le redevable se prive corrélativement d'une créance équivalente sur le Trésor et n'accroît en rien son résultat imposable ;

- dès lors, l'imputation d'un "profit sur le Trésor" ne peut être justifiée par la nécessité d'équilibrer l'incidence de l'application de la "déduction en cascade" prévue par l'article L. 77 du code des procédures fiscales.

Le fondement de la décision du Conseil d'Etat est incontestable. Néanmoins, il apparaît nécessaire d'en tirer toutes les conséquences en interdisant aux entreprises qui font l'objet d'un rappel de TVA, dans le seul cas d'une taxe autoliquidée, de bénéficier du mécanisme de la déduction "en cascade".

En effet, puisque l'administration fiscale ne peut pas leur imputer un "profit sur le Trésor", réciproquement, il est logique que les entreprises ne puissent pas déduire de leur bénéfice imposable la TVA rappelée.

Tel est l'objet du présent article, dont le paragraphe I modifie l'article L. 77 du code des procédures fiscales, afin de supprimer l'application de la déduction "en cascade" pour les rappels de taxe afférents à des opérations autoliquidées par le redevable.

Par coordination, le paragraphe II du présent article complète le 4° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, afin de supprimer le droit à déduction de la TVA rappelée du bénéfice imposable, au titre de l'exercice de recouvrement.

Le paragraphe III précise que ces dispositions s'appliquent aux rappels de TVA notifiés à compter du 1er janvier 1998.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 11

Droit d'option des collectivités locales pour l'assujettissement à la TVA au titre des déchetteries

Commentaire : cet article additionnel tend à autoriser les collectivités locales à opter pour l'assujettissement à la TVA au titre des déchetteries dont elles ont la gestion, indépendamment du régime fiscal de leur service d'enlèvement et traitement des ordures.

Lors du dernier débat budgétaire, la mesure qui fait l'objet de l'article additionnel proposé votre commission des finances avait été défendue au Sénat sur divers bancs de la majorité. Elle a été reprise par la commission des finances de l'Assemblée nationale dans le cadre du présent projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier.

Le problème est donc bien connu. Pour financer le service de ramassage et du traitement des ordures, les collectivités locales peuvent recourir à leur budget général ou instaurer une taxe, auxquels cas la TVA afférente aux investissements du service est récupérable par la voie du FCTVA, si le service n'est pas concédé à un tiers.

Lorsque le service n'est financé ni par le budget général, ni par une taxe, mais par la redevance générale d'enlèvement des ordures ménagères prévue à l'article L. 2333-76 du code général des collectivités territoriales, celles-ci peuvent opter pour l'assujettissement à la TVA, qui est alors récupérée par la voie fiscale. Cette solution semble particulièrement justifiée pour les déchetteries, qui ont vocation à générer des recettes de TVA en commercialisant des produits dérivés des ordures, résidus et déchets, ainsi éventuellement que de la chaleur.

Toutefois, les déchetteries ne sont pas expressément visées par l'article 260 A du code général des impôts, relatif au droit d'option à la TVA des collectivités locales pour certains de leurs services.

Dès lors, les collectivités locales qui ont choisi le budget général ou la taxation pour financer l'enlèvement et le traitement des ordures, au sens strict, ne peuvent plus opter pour la TVA au titre de la déchetterie qui se situe en bout du circuit. Les services fiscaux considèrent en effet que l'option ne peut être que globale, pour l'ensemble du service.

Comme l'observe fort justement le rapporteur général de l'Assemblée nationale dans son rapport sur le présent projet de loi, " ce raisonnement, aussi fondé soit-il, méconnaît la réalité économique et juridique de la filière. Les déchetteries n'ont pas vocation à gérer des ordures ménagères, mais à traiter des déchets particuliers (déchets de jardins, de construction, etc.). Elles doivent être considérées de façon spécifique, indépendamment de la collecte et du traitement des ordures ménagères. Leur activité, qui témoigne d'une unité fonctionnelle certaine et qui implique par ailleurs des investissements importants, doit pouvoir être soumise à la TVA avec déduction par la voie fiscale, dans la mesure où elle fait l'objet d'un financement par les usagers en fonction du service rendu".

L'amendement proposé par votre commission des finances consiste donc à viser expressément les déchetteries dans l'article 260 A du code général des impôts, de façon à ce que le droit d'option des collectivités locales puisse s'exercer librement à leur égard, indépendamment du régime applicable au service de ramassage et de traitement des ordures stricto sensu .

Il convient de signaler que le coût de l'amendement est symbolique. En effet, si l'option crée des droits à déduction, elle génère aussi des recettes de TVA, sans qu'il soit démontré que les uns dépassent les autres. Quant à la TVA sur les investissements, lorsque l'option est interdite, elle est déjà actuellement récupérable par le biais du FCTVA si la déchetterie n'est pas concédée à un tiers.

Devant l'Assemblée nationale, le ministre de l'économie et des finances a reconnu tout l'intérêt de l'amendement. Le seul argument qu'il lui a opposé est son éventuelle incompatibilité avec le droit communautaire. Mais il s'est engagé à ce que cette mesure figure dans le prochain projet de loi de finances, dès lors que ce point aura été éclairci.

Or, la compatibilité de l'amendement avec le droit communautaire ne fait pas de doute.
L'annexe H de la directive TVA prévoit même expressément que le taux réduit peut être appliqué aux " services fournis dans le cadre du nettoyage des voies publiques, de l'enlèvement des ordures ménagères et du traitement des déchets ". En l'occurence, le droit communautaire en matière de TVA est en avance sur le droit national français.

Le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, tout en acceptant de retirer son amendement, a d'ailleurs indiqué qu'il ne croyait pas à la validité de l'argument communautaire invoqué par le ministre.

Dès lors, votre commission des finances estime qu'il n'y a aucune raison de ne pas adopter dès maintenant une disposition qui, sur le fond, semble emporter l'adhésion générale.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 11

Application du taux réduit de TVA aux réseaux de chaleur utilisant du bois de chauffage

Commentaire : cet article additionnel manifeste la volonté de votre commission des finances de voir adaptées les règles communautaires relatives à la TVA afin que le bénéfice du taux réduit puisse être étendu aux ventes d'énergie des réseaux de chaleur utilisant du bois de chauffage.

L'article 20 de la loi de finances pour 1997, voté à l'initiative de votre commission des finances, a étendu le champ du taux réduit de la TVA au bois de chauffage " à usage domestique " (y compris pour les produits assimilés, tels que les produits de la sylviculture agglomérés et les déchets de bois).

L'instruction fiscale nécessaire à l'application de cette mesure est toujours en instance de parution.

D'après les engagements pris devant le Sénat par le secrétaire d'Etat au budget lors du dernier débat budgétaire, cette instruction devrait trancher en sens opposés deux questions qui ont été soulevées depuis le vote de cette disposition :

- une interprétation très large de " l'usage domestique " du bois de chauffage, qui ferait bénéficier du taux réduit le chauffage de tous les locaux collectifs non lucratifs, et notamment ceux dépendant des collectivités locales ;

- la confirmation que les réseaux de chaleur restent exclus du bénéfice la mesure, ainsi que cela avait d'ailleurs été indiqué dès le vote de la disposition.

Ce dernier point avait fait l'objet d'amendements lors du dernier débat budgétaire, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale. La commission des finances de l'Assemblée avait notamment défendu l'idée de permettre aux réseaux de chaleur de répercuter vers leurs clients le taux de 5,5%, en proportion de la part du bois de chauffage dans leurs approvisionnements en combustibles.

Toutefois, le gouvernement avait alors opposé à cette demande le droit communautaire en matière de TVA, à juste titre. En effet, la sixième directive TVA de 1977 prévoit expressément que la fourniture d'énergie relève du taux normal : cette règle prévaut sur l'exception faite, dans l'annexe H de la dite directive, en faveur du bois de chauffage.

C'est d'ailleurs la justification de la restriction prévue, en droit interne français, à " l'usage domestique " de ce combustible. On peut en effet considérer qu'il n'y a pas lieu d'appliquer le taux de 5,5% aux usages industriels et commerciaux du bois de chauffage, dès lors que le bénéfice du taux réduit ne peut pas être répercuté vers les clients. Par ailleurs, la taxe supportée en amont, au taux de 20,6%, est déduite par l'entreprise et reste sans incidence sur son résultat.

Pour sa part, votre commission des finances estime que l'application, en amont, du taux réduit au bois de chauffage dans tous ses usages industriels et commerciaux ne peut que favoriser le développement de cette énergie renouvelable, en apportant un avantage de trésorerie aux entreprises concernées. C'est pourquoi elle entend supprimer la restriction " à usage domestique " dans l'article 278 bis du code général des impôts. Tel est l'objet du I. de l'amendement qu'elle vous propose.

Cette extension du champ de la mesure n'est pas interdite par l'annexe H de la directive TVA, qui prévoit l'application du taux réduit au " bois de chauffage " sans restriction particulière. Son coût pour l'Etat, qui reste à évaluer mais est vraisemblablement modique, serait une perte de trésorerie uniquement, s'agissant par hypothèse de TVA déductible.

Par ailleurs, votre commission des finances vous propose d'aller plus loin et de permettre aux entreprises principalement intéressées par le développement du bois de chauffage, à savoir les réseaux de chaleur, de répercuter vers leurs clients le bénéfice du taux réduit. Tel est l'objet du II. de l'amendement qu'elle vous propose, qui précise par ailleurs expressément dans la loi que les exploitations de chaufferies collectives utilisant du bois de chauffage sont fiscalement transparentes au regard du taux réduit.

Cette disposition relative aux réseaux de chaleur présente l'inconvénient d'être pour l'instant contraire au droit communautaire. Toutefois, elle pourrait devenir compatible si la Commission européenne hâtait sa réflexion sur la "fiscalité écologique de l'énergie ", ainsi qu'elle s'y est engagée , et proposait enfin de modifier la sixième directive TVA en conséquence. D'autres énergies renouvelables que le bois de chauffage pourraient d'ailleurs bénéficier du taux réduit de TVA, telles la géothermie ou la cogénération.

La procédure de révision de la directive étant assez lourde et nécessitant un accord des quinze Etats-membres, la France aurait intérêt à demander une dérogation sur ce point précis. Tel était d'ailleurs le souhait exprimé par le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale dans son rapport en seconde lecture sur le projet de loi de finances pour 1998, qui précisait :

" Cette orientation irait dans le sens des préoccupations, régulièrement exprimées, tant par le Parlement européen que par la Commission, en faveur de l'utilisation des énergies renouvelables.

"Au demeurant, on note que l'article 13-3-b de la sixième directive TVA prévoit que les Etats membres peuvent appliquer un taux réduit aux fournitures de gaz naturel et d'électricité, à condition qu'il n'en résulte aucun risque de distorsion de concurrence. On voit mal pourquoi ce qui est prévu pour les énergies fossiles et fissiles ne pourrait pas être étendu à la chaleur produite à partir d'une énergie renouvelable et locale".


A priori, les partenaires de la France au sein de l'Union européenne ne devraient pas voir d'inconvénient à cette demande de dérogation, car l'application du taux réduit à l'énergie produite par les réseaux de chaleur à partir du bois de chauffage n'est pas susceptible d'entraîner de distorsions de concurrence. En effet, cette forme d'énergie n'est pas exportable, sous réserve de l'hypothèse très théorique de réseaux de chaleur transfrontaliers.

L'amendement que votre commission des finances a jugé opportun de présenter sur le sujet du taux réduit de TVA applicable au bois de chauffage, vise ainsi un double but :

- hâter la parution, depuis trop longtemps imminente, de l'instruction fiscale annoncée ;

- encourager le Gouvernement à défendre au sein des instances communautaires une adaptation de la directive TVA, ou une dérogation à celle-ci, afin que le bénéfice du taux réduit puisse être étendu aux réseaux de chaleur utilisant du bois de chauffage.

Le Gouvernement, qui a fait de la "fiscalité écologique" l'un de ses thèmes de réflexion pour la prochaine loi de finances, ne peut qu'être sensible au souhait ainsi exprimé par le Parlement.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article additionnel.

ARTICLE 11 bis (nouveau)

Prorogation temporaire du régime de l'amortissement des logements neufs donnés en location

Commentaire : le présent article, issu d'un amendement adopté à l'Assemblée Nationale, tend à proroger, pour une période de six mois, le régime de la déduction au titre de l'amortissement des logements neufs donnés en location (amortissement Périssol).

I - LE REGIME DE L'AMORTISSEMENT DES LOGEMENTS NEUFS DONNES EN LOCATION

A. UN REGIME D'AMORTISSEMENT AUTONOME

1 - Les dispositions de l'article 31 du code général des impôts


L'article 29 de la loi n°96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a créé un régime autonome d'amortissement pour les biens locatifs neufs (nouvelles dispositions du f. du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, relatif aux charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net)

Il permet aux contribuables qui, entre le 1er janvier 1996 et le 31 décembre 1998 font construire un logement, ou encore un local en vue de sa transformation en logement, de déduire de leurs revenus fonciers un amortissement égal, les quatre premières années, à 10% du prix de revient ou d'acquisition de l'immeuble et à 2% les vingt années suivantes.

L'amortissement est donc égal à 80% du coût de l'investissement, étalé dans le temps. Les 20 % restant sont représentatifs de la charge foncière (terrain viabilisé) qui n'est pas amortissable.

Le taux de la déduction forfaitaire applicable au montant annuel des loyers, prévu au e. du 1° du I du code général des impôts, est parallèlement ramené de 14% à 6%. Cette déduction représente les frais de gestion et les primes d'assurance.

Les dépenses d'amélioration ne sont plus immédiatement déductibles du revenu foncier comme le prévoit le b. du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, mais sont amortissables sur dix ans.

Enfin, pour les opérations entrant dans le champ d'application de ce régime, le plafond d'imputation du déficit foncier sur le revenu global est porté à 100.000 F contre 70.000 F dans le droit commun (neuvième alinéa du 3° du I de l'article 156 du code général des impôts).

2 - Un régime sous conditions

Plusieurs conditions sont posées :

1) Le bénéfice du dispositif est réservé aux contribuables qui en font la demande expresse , à l'occasion de leur déclaration de revenus.

2) L'option pour le régime est irrévocable

3) Le propriétaire du logement s'engage à le louer pour 9 ans

4) Il dispose d'un délai de 12 mois entre l'achèvement des travaux et la mise en location.

5) Le régime ne doit pas se cumuler avec d'autres avantages fiscaux

6) L'opération doit être commencée avant le 31 décembre 1998 .

Ce dispositif devait donc cesser de s'appliquer aux investissements réalisés à compter du 1er janvier 1999.

B. LA MISE EN OEUVRE DE L'AMORTISSEMENT PERISSOL : UN DISPOSITIF EFFICACE

Sur 40.000 logements locatifs neufs construits en 1997, 35.000 ont bénéficié des dispositions de l'amortissement Périssol, tandis que 5.000 bénéficiaient du dispositif Quilès-Méhaignerie qui a pris fin le 31 décembre 1997.

Ainsi, 85 % des constructions de logements locatifs neufs s'opèrent grâce à l'amortissement Périssol.

Depuis plus de six mois, la tendance des permis de construire s'améliore, en partie en raison de l'effet de ce dispositif. Le rythme annuel des autorisations est de 327.000 logements contre 309.000 sur les douze derniers mois et 304.000 en 1997.

Cependant, cette conjoncture plutôt favorable ne doit pas masquer la faiblesse persistante du marché de la construction neuve : alors qu'en 1988, il y avait 420.000 autorisations de construire, il y en a moins de 300.000 par an aujourd'hui.

De plus, les besoins en termes de logements locatifs restent très importants.

En 1997, près d'un logement sur trois a été acquis dans le cadre du régime "Périssol".

II - LES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A. UNE PROROGATION INDISPENSABLE


L'article adopté par l'Assemblée Nationale tend à proroger, pour une période de six mois, le régime de la déduction au titre de l'amortissement.

La prorogation du régime de l'amortissement concerne les logements remplissant cumulativement les conditions suivantes :

- avoir fait l'objet d'un permis de construire avant le 1er janvier 1999 ;

- être acquis neufs ou en l'état futur d'achèvement entre cette date et le 30 juin 1999 ;

- être achevés dans les deux ans suivant la délivrance du permis de construire.

Ainsi, compte tenu de ce dispositif de sortie, le régime de l'amortissement s'appliquerait comme le montre le tableau suivant.

 

Avant le 1er janvier 1999

Du 1er Janvier au 1er juillet 1999

1er juillet 1999

 

31 décembre 2000

Dispositif Périssol

Logement mis en chantier

ou acquis en état futur d'achèvement

Pas de contrainte d'achèvement

Prorogation

Obtient le permis de construire

Logement acquis neuf

 
 
 
 

Logement acquis en état futur d'achèvement

Logement achevé dans les deux ans suivant le permis de construire

B. NE PAS CREER DE RUPTURE DANS L'INVESTISSENT IMMOBILIER

Le délai d'instruction d'un permis de construire pour la construction de logements à usage d'habitation est en principe de 2 mois, mais il peut être majoré dans certains cas :

- pour les constructions de plus de 200 logements, il est de trois mois,

- pour les immeubles classés monuments historiques, il est fixé à quatre mois.

Tous ces délais sont d'ordre public et sont donc des maxima : au-delà de ce délai, le demandeur peut se prévaloir d'un permis de construire tacite.

En conséquence, dans le cas général, les dossiers déposés avant le 1er octobre 1998 entreront dans le régime de la prorogation.

Si l'on reprend les trois conditions données à la prolongation du dispositif d'amortissement, il semble qu'il n'y aura pas de rupture dans le dispositif. L'annonce de la prolongation pour six mois devrait avoir pour effet d'accélérer les dépôts de permis de construire dans les mois à venir, avant que le nouveau dispositif soit connu en fin d'année.

Cependant les investisseurs sont en droit d'être rassurés sur les intentions du gouvernement en la matière, et ceci dès à présent. Il convient, en toute hypothèse, qu'ils soient en mesure de connaître, dès la prochaine loi de finances, les propositions du gouvernement pour un nouveau régime applicable à compter du 1er janvier 1999.

Votre rapporteur sera donc attentif au calendrier prévu par le gouvernement pour la réforme de la fiscalité du logement locatif, afin d'éviter toute rupture dans la construction.

III - UNE MISE EN GARDE POUR L'AVENIR


Il convient de rappeler à l'occasion de l'examen de cet article, un certain nombre de points :

-
tout d'abord, la commission des finances du Sénat ne peut que se réjouir que le gouvernement reconnaisse l'efficacité du dispositif d'amortissement "Périssol" en le prolongeant. L'amendement adopté par la commission des finances de l'Assemblée Nationale est une reconnaissance de fait la pertinence d'une telle mesure pour la construction neuve.

- ensuite, il convient tout de même d'adresser une mise en garde .

Lors de la mise en place du système d'amortissement des biens immobiliers locatifs neufs, la commission des finances du Sénat avait salué l'intérêt économique très fort du dispositif : cet intérêt ne s'est pas démenti.

Elle avait par ailleurs soulevé le problème du logement locatif ancien , en présentant un amendement pour étendre le régime aux acquisitions se faisant avec une quotité de travaux minimale, soit 30% du total de l'investissement.

Les priorités de votre commission en matière de financement du logement locatif restent les mêmes : le gouvernement doit savoir que la commission des finances du Sénat sera attentive à ce que l'incitation à la construction de biens locatifs neufs reste efficace, et puisse se combiner avec des mesures complémentaires, dans un souci d'équilibre du marché du logement.

Elle rappelle de ce point de vue son attachement à une fiscalité stabilisée.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 11 ter (nouveau)

Application du taux réduit de TVA aux achats de terrains à bâtir
destinés à la construction sociale

Commentaire : le présent article, introduit à l'Assemblée Nationale à l'initiative du gouvernement, propose de généraliser l'application directe du taux réduit de TVA pour tous les opérateurs qui achètent des terrains à bâtir destinés à la construction sociale.

I - LE DROIT EXISTANT

A. L'ARTICLE 278 SEXIES DU CODE GENERAL DES IMPÔTS

En application de l'article 278 sexies du code général des impôts, les organismes d'habitations à loyer modéré visés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation bénéficient d'un taux réduit de TVA sur leurs acquisitions de terrains à bâtir.

Les autres opérateurs, et notamment les sociétés d'économie mixte, n'en bénéficient que pour les acquisitions de terrains financées à l'aide d'un prêt aidé.

En effet, les autres personnes visées sont les personnes bénéficiaires des aides de l'Etat prévues aux articles L. 301-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation :

- pour la construction de logements visés au 3° de l'article L. 351-2 du même code (logements sociaux à usage locatif),

- et de logements financés au moyen d'un prêt aidé par l'Etat destiné à l'accession à la propriété prévu par l'article R. 331-32 du même code.

Dans le premier cas, jusqu'en 1997, étaient visés les prêts locatifs aidés (PLA) et prêts locatifs aidés très sociaux (PLA-TS), et dans le second les prêts d'accession à la propriété (PAP).

B. LE CHAMP D'APPLICATION DU TAUX RÉDUIT DE TVA S'EST RESTREINT EN RAISON DE LA REFORME DU FINANCEMENT DU LOGEMENT SOCIAL

En raison de l'abandon des subventions au profit de mécanismes fiscaux, le champ d'application du taux réduit de TVA pour l'acquisition de terrains à bâtir s'est réduit pour les opérateurs autres que les organismes d'habitations à loyer modéré.

En effet, l'article 17 de la loi de finances pour 1997 (loi n°96-1181 du 30 décembre 1996) a appliqué le taux réduit de TVA aux opérations de construction de logements sociaux neufs à usage locatif. Cette mesure a compensé la suppression des subventions budgétaires accordées par l'Etat au titre de la construction de ces logements.

Les subventions accordées au titre des PLA et des PLA-TS pour la construction de logements neufs ont été supprimées, alors qu'étaient maintenues des financements budgétaires en matière de majorations de subventions spécifiques aux PLA-TS.

Du fait du maintien de la rédaction initiale du I de l'article 278 sexies du code général des impôts, le bénéfice de ses dispositions s'est donc en fait réduit aux prêts adossés à un PLA-TS.

C. UNE TVA DÉDUCTIBLE DANS LES CONDITIONS DE DROIT COMMUN

Les organismes constructeurs autres que les organismes d'habitations à loyer modéré doivent acquitter une TVA au taux de 20,6 % sur les acquisitions de terrains non financées à l'aide d'un PLA-TS, sous réserve de certaines exonérations pour les sociétés d'économie mixte à participation publique majoritaire.

L'article 17 de la loi de finances pour 1997 (loi n°96-1181 du 30 décembre 1996) permet toutefois de rendre déductible cette TVA dans les conditions de droit commun -au travers du mécanisme de la livraison à soi-même- et les constructeurs ne supportent donc en définitive qu'une TVA à 5,5 %.

II - LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE PRESENT ARTICLE

Le présent article confère un avantage de trésorerie aux opérateurs du logement social.

Il modifie l'article 278 sexies du code général des impôts en ajoutant une référence aux prêts mentionnés à l'article R 331-1 du code de la construction et de l'habitation, afin d'appliquer directement le taux réduit de TVA à toute acquisition de terrain financée par un PLA-TS ou un PLA.

Il s'agit en réalité de corriger ce qui apparaît comme une omission de la loi de finances pour 1997 : en effet, l'application du taux réduit de TVA à la livraison de logement sociaux à usage locatif à soi-même se référait explicitement aux prêts prévus à l'article R. 331-1 du code de la construction et de l'habitation, en raison précisément de la réduction de l'aide de l'Etat.

La nouvelle rédaction de l'article 278 sexies supprime donc le désavantage de trésorerie des opérateurs autres que les organismes HLM et met en cohérence la fiscalité de l'acquisition des terrains à bâtir destinés à la construction sociale avec celle de la construction de logements sociaux, qui avait fait l'objet d'une réforme dans la loi de finances pour 1997.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.


TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES
À L'ADAPTATION DE LA LÉGISLATION FRANÇAISE
ET À LA MODERNISATION DES ACTIVITÉS FINANCIÈRES
EN VUE DE LA TROISIÈME PHASE DE L'UNION ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE
ARTICLES 12 à 34

Ces articles sont commentés dans le tome II du présent rapport par M. Philippe Marini, rapporteur.

TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES AU SECTEUR PUBLIC
ET AUX PROCEDURES PUBLIQUES
ARTICLE 35

Schéma directeur de desserte gazière

Commentaire : le présent article propose d'accélérer la desserte par Gaz de France des communes non encore desservies en gaz en prévoyant l'établissement par l'autorité administrative d'un plan de desserte gazière. A titre subsidiaire, il autorise des opérateurs autres que Gaz de France à assurer l'approvisionnement des communes non encore desservies en gaz.

Il convient de préciser d'emblée que le présent article n'a pas pour objet d'ouvrir le monopole de Gaz de France sur les zones qu'il dessert actuellement mais de permettre aux communes non desservies de faire appel à l'opérateur de leur choix.

Il fait suite à une mise en demeure de la Commission européenne qui a relevé un abus de position dominante de la part de Gaz de France dès lors que l'établissement public s'oppose, au nom du monopole de distribution qui lui a été confié par la loi du 8 avril 1946, à l'intervention d'autres distributeurs dans les zones non encore desservies, alors même qu'il n'envisage pas lui même d'assurer la desserte de ces zones.

Le présent article prévoit un dispositif en deux étapes :


• dans une première étape, afin de contraindre GDF à accélérer l'extension de son réseau, les services de l'Etat établiraient un plan de desserte gazière énumérant l'ensemble des communes non encore desservies qui souhaiteraient être alimentées en gaz naturel et pour lesquelles les investissements seraient suffisamment rentables. Au sein de ce plan, les communes disposeraient de l'alternative suivante : celles qui sont connexes à des communes déjà desservies par une des 17 régies municipales existantes pourraient être desservies par ces mêmes régies si elles en manifestent le souhait ; les autres devraient impérativement être desservies par GDF dans un délai maximum de trois ans.

Cela représenterait 1.000 à 1.200 communes sur cette période contre 600 à 750 selon les objectifs assignés à GDF par le contrat Etat-entreprise du 1er avril 1997. Le coût pour GDF (400 millions de francs) de ces investissements supplémentaires devrait être compensé par un avenant au contrat d'entreprise.


• les communes non desservies qui ne figureraient pas dans le plan ou dont les travaux de desserte prévus n'auraient pas été engagés dans le délai de trois ans, pourraient concéder leur distribution de gaz à toute entreprise ou SEM régulièrement agréée par le ministre de l'énergie. Elles pourraient également créer une régie de distribution, avoir recours à une régie existante ou confier la distribution à une SEM existante.

Les députés ont apporté deux modifications importantes au texte initial, dans un sens assez restrictif et protecteur du monopole de Gaz de France. Votre commission craint qu'en laissant aux opérateurs du secteur libre les seules communes pour lesquelles la desserte n'est pas rentable, ce texte ne recueille pas l'agrément de la Commission européenne.

I. LE CONTEXTE


Le présent article fait suite à une lettre de la Commission européenne du 9 juin 1995 mettant la France en demeure de mettre fin à la position dominante de Gaz de France.

Il convient de rappeler, en préliminaire, que l'article 3 de la loi de nationalisation du 8 avril 1946 a confié à Gaz de France le monopole de la desserte en gaz naturel du territoire.

Certes ce monopole n'est pas absolu dans la mesure où la loi du 8 avril 1946 prévoit deux exceptions :

- d'une part, elle exclut de la nationalisation, les entreprises gazières dont la production annuelle de 1942 et 1943 est inférieure à 6 millions de m 3 ;

- d'autre part, elle autorise le maintien des services publics locaux de distribution du gaz en cours d'exploitation à la date de promulgation de la loi 13( * ) .

Mais, ces derniers n'étant pas autorisés à s'étendre , Gaz de France se trouve de fait en position quasi-monopolistique.

Au demeurant, la loi d'orientation relative à l'administration territoriale de la République du 6 février 1992 a confirmé que la loi de 1946 devait bien être interprétée comme interdisant la création de nouvelles régies et l'extension des régies existantes, et a inscrit ce principe dans le code des communes. Pour régulariser la situation des régies qui s'étaient créées ou qui s'étaient étendues au delà des limites territoriales qu'elles couvraient en 1946, la loi a remis les compteurs à zéro au 1 er juillet 1991.

A la fin de 1997, on recensait 17 distributeurs de gaz naturel non nationalisés qui desservaient 174 communes. Le tableau suivant résume l'état actuel de la desserte en gaz :



Or, contrairement à d'autres entreprises de service public, Gaz de France n'est pas tenu de desservir la totalité du territoire . Aux termes d'une circulaire du 2 octobre 1985 tout projet de desserte nouvelle doit en effet être précédé d'une étude technico-économique faisant ressortir l'intérêt et la rentabilité de l'opération projetée. Deux circulaires ultérieures ont fixé le seuil minimal de rentabilité des investissements 14( * ) à 0,3.

En conséquence, les communes dont le raccordement au réseau ne permettrait pas à Gaz de France de satisfaire ce critère de rentabilité ne peuvent prétendre être desservies par l'opérateur public. Comme elles ne peuvent pas non plus être desservies par les sociétés d'économie mixte et régies non nationalisées, l'accès au gaz naturel leur est interdit.

Certes, comme le rappelle le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, le gaz est une énergie substituable qui n'a pas, contrairement à l'électricité, vocation à être distribué sur la totalité du territoire. Néanmoins, la Commission européenne a considéré dans une lettre de mise en demeure adressée aux autorités françaises le 9 juin 1995 qu'" il exist[ait] des opérateurs indépendants qui seraient techniquement et financièrement en mesure de répondre à la demande existante, mais qui ne peuvent le faire qu'en contrevenant à la législation française ".

Aussi, la Commission a-t-elle estimé que Gaz de France était amené " à commettre des abus de position dominante, dès lors que l'établissement public n'est pas en mesure de satisfaire la demande, soit parce que les conditions de rentabilité pour GDF ne sont pas remplies, soit que GDF se propose de ne satisfaire la demande qu'à une échéance lointaine incompatible avec les souhaits exprimés par les communes, soit parce que l'établissement public n'est susceptible de procéder à un raccordement qu'à des conditions économiquement plus onéreuses, soit parce que techniquement, la solution est moins avantageuse et peut présenter des inconvénients pour les consommateurs et pour l'environnement ". Cette situation est manifestement en contradiction avec la mission de service public censée être assurée par l'opérateur.

La loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier du 12 avril 1996 a bien tenté de remédier à cette situation en permettant aux services publics locaux de distribution du gaz en activité au 1 er janvier 1996 d'étendre leur activité aux communes connexes à celles qu'elles desservent. Mais, cette loi n'a pas connu d'application faute de publication du décret censé définir les conditions de rentabilité qui doivent s'imposer aux communes concédantes. Saisi du projet de décret, le Conseil d'Etat a en effet estimé que le seuil de rentabilité prévu, calqué sur le seuil de rentabilité imposé à Gaz de France, était trop élevé au regard de la lettre du texte législatif.

Le présent article, dont le principe avait été annoncé en décembre 1997 pendant les négociations communautaires sur l'ouverture du marché du gaz, vise donc à exaucer la demande de la Commission européenne en ouvrant une première brèche dans le monopole de Gaz de France.

On comprend l'intérêt stratégique d'une telle démarche : en prenant les devants alors que la Commission s'apprêtait à utiliser les moyens que lui accorde l'article 90, paragraphe 3 du Traité, le gouvernement français a pu obtenir que " le maintien de son système actuel de distribution qui repose sur le principe de service public 15( * ) " soit approuvé dans le projet de directive sur l'ouverture du marché du gaz, au titre du principe de subsidiarité. Paris a également obtenu que les contrats " take or pay " aient une existence officiellement reconnue.



II. L'OUVERTURE À LA CONCURRENCE DES ZONES NON ENCORE DESSERVIES PAR GAZ DE FRANCE

Le présent article prévoit un dispositif en deux étapes :

A. L'ÉTABLISSEMENT D'UN PLAN DE DESSERTE GAZIÈRE

Dans une première étape, le présent article prévoit l'établissement par les services de l'Etat d'un plan de desserte gazière . Ce plan comprendrait deux volets :

- dans un premier volet , seraient inscrites les communes non encore desservies qui souhaitent être alimentées en gaz naturel ; elles devraient impérativement être desservies par Gaz de France dans un délai maximum de trois ans 16( * ) .

Il s'agit de contraindre Gaz de France à accélérer l'extension de son réseau, ce qu'aucune obligation légale ne l'obligeait à faire jusqu'à présent, même si le contrat Etat-entreprise signé le 1 er avril par l'Etat et GDF pour la période 1997-1999, prescrit à l'opérateur public de raccorder 200 à 250 nouvelles communes chaque année.

Selon le rapport de l'Assemblée nationale, le plan de desserte devrait permettre de raccorder 1.000 à 1.200 communes sur la période triennale , soit 400 à 450 communes de plus que ce qui était prévu dans le contrat Etat-entreprise. Le rapport chiffre à 300 millions de francs par an le surcoût engendré par ces investissements supplémentaires pour GDF (sur la base d'un coût de 1,2 à 1,5 million de francs par an et par commune raccordée). Le gouvernement a déclaré que ce coût serait compensé par un avenant au contrat d'entreprise.

- dans un deuxième volet , figureraient les communes connexes à des communes déjà desservies par une régie existante qui manifestent leur souhait d'être desservies par ces mêmes régies ou SEM.

L'encadré ci-après précise le nombre de communes connexes et limitrophes qui pourraient être inscrites à ce deuxième volet du plan de desserte.

Evolution de la desserte gazière par les entreprises non nationalisées

Nombre de communes desservies par les ENN en 1997 : 174

Nombre de communes limitrophes aux ENN non desservies : 220

Nombre de communes limitrophes susceptibles

d'être desservies en gaz naturel (B/I estimé supérieur à 0) : 15 à 20

Nombre de communes connexes susceptibles

d'être desservies en gaz naturel (B/I estimé supérieur à 0) : 30 à 40

Communes raccordées par les ENN depuis 1996 : 7 1

1. Mommenheim, Breuschwickersheim (Gaz de Strasbourg),Andlau, Mittelbergheim, Eichhoffen (Barr), Lautenbach, Bergholzzell (Guebwiller).

Le texte précise cependant que ne peuvent figurer au plan, parmi les communes qui en font la demande, que les communes dont la desserte donne lieu à des investissements pour lesquels la rentabilité est au moins égale à un taux fixé par décret.

Le ratio de rentabilité devrait être calculé de la façon suivante :

Modalités de calcul du ratio de rentabilité B/I

L'évaluation de la rentabilité des investissements d'une nouvelle desserte devrait être établie en calculant le ratio de rentabilité B/I du projet selon les modalités suivantes :

B est égal à la somme actualisée des bénéfices et I à la somme actualisée des investissements à réaliser ;

B est calculé en effectuant la somme algébrique R - (D + I) où :

R représente la valeur actualisée des recettes escomptées sur la base des estimations de consommation, par tarif et par usage ;

D représente la valeur actualisée des coûts d'exploitation, c'est-à-dire le montant total de toutes les dépenses auxquelles aura à faire face le concessionnaire hors amortissement des investissements. Celles-ci comprennent, notamment, les dépenses liées à l'achat de gaz par le concessionnaire, à la gestion de la fourniture aux abonnés et à la maintenance du réseau.

I représente la valeur actualisée des dépenses d'investissement à la charge de l'opérateur nécessaires pour la mise en exploitation, comprenant le montant des investissements à réaliser dans la concession proprement dite et le montant des investissements des raccordement au réseau de transport.

Le taux d'actualisation utilisé est le taux recommandé par le Commissariat général du Plan à la date de dépôt de leur demande d'inscription au plan par les communes.

La période d'amortissement est de 25 ans.

Le seuil de rentabilité minimal sera fixé par décret en Conseil d'Etat. Il devrait, selon le rapport de l'Assemblée nationale, être inférieur au seuil actuel de 0,3 et proche de 0.

L'étude d'impact jointe au présent projet de loi précise toutefois que " les règles économiques prévues dans le présent article (...) devraient concourir à diminuer, voire à faire disparaître les participations des collectivités locales aux investissements nécessaires à la desserte ". En effet, dans l'état de droit actuel, la circulaire qui organise les conditions économiques régissant les investissements de GDF prévoit une contribution des communes pour le cas où la rentabilité, sans être négative, serait inférieure au seuil retenu par l'Etat (soit 0,3). Cette disposition n'est pas reprise dans le présent projet.

Le texte initial précisait par ailleurs que le plan de desserte était élaboré dans chaque région par le préfet de région. L'Assemblée nationale a considéré que le préfet de département était l'échelon pertinent dans la mesure où il est plus au fait de la situation des communes. Le rapport de l'Assemblée nationale précise que les préfets de département pourraient s'appuyer sur les nombreux schémas directeurs de desserte gazière déjà étudiés au niveau départemental dans le cadre des travaux de la charte DATAR de 1994, et qu'ils pourraient bénéficier de l'assistance des Directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE).

Le texte précise en outre que le ministre chargé de l'énergie arrêtera ce plan au vu d'une étude d'incidence énergétique et après avoir vérifié sa cohérence avec les objectifs nationaux de politique énergétique, à savoir le respect des conditions de la concurrence entre énergies et le développement des énergies renouvelables. L'étude d'impact jointe en annexe du présent projet de loi précise l'objectif poursuivi :

" Le gaz naturel étant une énergie importée dans sa quasi-totalité, il importe, d'une part de ne pas obérer le développement des énergies renouvelables, et, d'autre part, de ne pas créer artificiellement des dessertes en gaz qui pourraient s'avérer inutiles, voire coûteuses pour la collectivité nationale. "

Il ne faudrait en effet pas que la concurrence du gaz naturel mette en péril la survie ou le développement d'autres énergies (gaz butane et propane, biomasse, éoliennes...).

Enfin, l'Assemblée nationale a précisé que le décret en Conseil d'Etat fixant les conditions d'application du présent dispositif devrait intervenir dans les six mois à compter de l'entrée en vigueur de la loi.

Le plan de desserte gazière serait révisé tous les trois ans.

B. LA LIBERTÉ DE CHOIX DES COMMUNES NON DESSERVIES

Pourraient choisir de s'adresser au secteur libre :

- non seulement les communes qui ne répondent pas aux conditions de rentabilité leur permettant d'être inscrites au plan de desserte gazière ;

- mais aussi et surtout les communes qui, tout en satisfaisant ces conditions, choisissent de ne pas demander leur inscription dans le plan de desserte.

- enfin, les communes non desservies qui figuraient dans le plan mais dont les travaux de desserte n'auraient pas été engagés par GDF dans le délai de trois ans.

Ces communes disposeraient des possibilités suivantes :

- concéder leur distribution de gaz à un nouvel opérateur (entreprise ou SEM) régulièrement agréé par le ministre de l'énergie ;

- créer une régie de distribution,

- recourir à une régie existante ou participer à une SEM existante dans ce domaine. Le terme participer laisse ici entendre que les communes devraient entrer dans le capital de la SEM, ce qui ne semble pas être l'objectif du gouvernement. Votre commission vous proposera en conséquence un amendement tendant à remplacer le terme participer par la formule : concéder leur distribution de gaz.

Il est à noter que seuls les nouveaux opérateurs sur le marché de la distribution du gaz devraient obtenir un agrément auprès du ministre chargé de l'énergie, à l'exclusion donc des régies ou SEM existantes. Les conditions subordonnant l'octroi de l'agrément devraient être définies par décret, le texte du présent article précisant simplement qu'elles devraient prendre en compte les capacités techniques et financières de l'opérateur.

Le projet de décret d'application (non définitif) transmis à votre rapporteur par le gouvernement prévoit d'imposer à toute société souhaitant distribuer le gaz d' être immatriculée en France et de disposer de fonds propres d'un montant au moins égal aux investissements nécessaires à la réalisation de la desserte. Le gouvernement se ménage toutefois la possibilité de refuser l'agrément " pour des motifs visant à la sauvegarde de l'ordre public ou des besoins de la défense ou de la sécurité publique ainsi qu'en raison de contraintes techniques inhérentes à l'approvisionnement en gaz ".

Le ministre disposerait de deux mois pour agréer la société par arrêté.

Il pourrait s'agir des opérateurs de service public communaux intervenant déjà dans le secteur de l'eau, de compagnies pétrolières ou de groupes étrangers souhaitant s'implanter en France dans la perspective de l'ouverture du marché du gaz à la concurrence.

L'étude d'impact précise que les collectivités locales resteront libres de procéder aux financements qu'elles souhaitent pour la desserte relevant du secteur libre. Elles devraient en principe procéder par appel d'offre pour l'attribution du marché de la distribution du gaz.

III. L'ASSEMBLÉE NATIONALE A MODIFIÉ LE DISPOSITIF DANS UN SENS TRÈS PROTECTEUR POUR GAZ DE FRANCE

L'Assemblée nationale a apporté trois modifications importantes au texte initial.

A. L'INTRODUCTION DES GROUPEMENTS DE COMMUNES

Les députés ont tout d'abord étendu le dispositif aux groupements de commune afin d'éviter un blocage juridique dans le cas où la commune aurait transféré sa compétence en matière de distribution du gaz à un groupement.

B. LA SUPPRESSION DU LIBRE-CHOIX DES COMMUNES

L'Assemblée a ensuite, sur proposition de M. Jean-Pierre Balligand, supprimé la possibilité pour les communes de choisir entre Gaz de France et le secteur libre . En clair, alors que dans le texte initial, les communes souhaitant figurer au plan de desserte devaient en faire la demande, le texte issu de l'Assemblée nationale prévoit que toutes les communes " qui souhaitent bénéficier d'une desserte en gaz naturel " pourront être inscrites au plan dès lors qu'elles satisfont les conditions de rentabilité.

M. Balligand a fait valoir que la rédaction ancienne risquait d'évincer Gaz de France des 6.400 communes qu'il dessert en encourageant ces dernières à choisir un autre opérateur une fois leur contrat de concession avec Gaz de France arrivé à expiration.

Or, outre que cette crainte n'est pas fondée 17( * ) , le présent article n'ayant pas pour objet d'ouvrir à la concurrence les territoires actuellement desservis par Gaz de France, l'objectif poursuivi par cet amendement est clairement en contradiction avec l'argumentaire figurant dans la fiche d'impact jointe au projet de loi . On peut en effet y lire :

"  Les communes non encore desservies pourront choisir de ne pas demander leur inscription dans le plan de desserte ou de ne pas figurer. (...) Il s'agit clairement de donner aux communes non encore desservies le choix entre deux solutions : une desserte par Gaz de France (ou une régie dans le cas d'une commune connexe) ou l'appel au secteur libre en recourant à d'autres opérateurs de distribution (y compris des opérateurs qu'elles pourront créer). Cette approche qui respecte la liberté des communes, vise à répondre aux remarques faites par la Commission tout en assurant la pérennité de l'action de Gaz de France au moyen d'objectifs triennaux. "

Il semble cependant que le texte préserve la liberté des communes dans la mesure où elles devront continuer à émettre le souhait d'être desservies pour être inscrites au plan de desserte gazière. En tout état de cause, si le texte devait être interprété à la lumière des débats ayant eu lieu à l'Assemblée nationale, il serait de nature à poser des problèmes d'application dans la mesure où il semble impossible de forcer les communes à concéder leur distribution à GDF si telle n'est pas leur volonté.

Par ailleurs, si la Haute Assemblée suivait la position exprimée par l'Assemblée nationale, les opérateurs privés n'auront pour clients potentiels que les communes pour lesquelles la desserte en gaz n'est pas rentable , ce qui n'était pas la volonté initiale du Gouvernement.

Il est en outre pour le moins contraire aux principes du service public de permettre à l'opérateur national d'écrémer les zones les plus rentables, en négligeant les communes dont le coût de raccordement est prohibitif. Il semble en effet à votre rapporteur que la justification d'un monopole de service public est de permettre à l'opérateur public de compenser les pertes engendrées par la desserte des zones non rentables grâce aux bénéfices engrangés sur les zones les plus rentables.

Dans ces conditions, on peut légitimement se demander si cette nouvelle rédaction recueillera l'agrément de la Commission européenne.

C. L'IMPOSITION D'UNE PARTICIPATION DE L'ÉTAT OU D'UN ÉTABLISSEMENT PUBLIC DANS LE CAPITAL DES NOUVEAUX OPÉRATEURS AGRÉÉS

Les députés ont enfin adopté un amendement de leur commission des finances tendant à réserver la possibilité d'intervenir comme opérateurs aux seules entreprises dans lesquelles au moins 30 % du capital est détenu , directement ou indirectement, par l'Etat ou des établissements publics 18( * ) .

Cet amendement appelle quatre remarques :

En premier lieu, on peut se demander si une " garantie " supplémentaire est nécessaire alors que les opérateurs souhaitant intervenir dans la distribution de gaz en substitution à Gaz de France devront déjà obtenir un agrément auprès du ministre de l'énergie . Il ne faudrait pas par exemple, que cette disposition conduise Gaz de France à entrer dans le capital des nouveaux opérateurs, pour verrouiller la distribution du gaz à son profit.

En second lieu, cet amendement est inspiré de l'article 8 19( * ) de la loi de nationalisation de 1946, qui impose que le capital des sociétés non nationalisés de transport du gaz soit détenu à hauteur de 30 % au moins par l'Etat ou par des établissements publics. Il convient en effet de rappeler que GDF ne détient pas un monopole absolu en matière de transport de gaz : la société Gaz du Sud-Ouest (GSO) au capital de laquelle participent Elf et GDF, transporte le gaz dans le sud-ouest de la France, tandis que la Compagnie française de méthane (CFM), détenue par GDF, Elf et Total, transporte le gaz dans le centre de la France.

Or, s'il est légitime de permettre à l'Etat de garder un droit de regard sur les sociétés non nationalisées de transport du gaz dès lors qu'il s'agit d'un secteur stratégique pour la sécurité de l'approvisionnement du pays, on voit mal pourquoi cette disposition devrait être étendue au secteur de la distribution qui n'a rien de stratégique, Gaz de France demeurant le fournisseur obligé des sociétés de distribution de gaz naturel.

En outre, cette disposition interdit à des sociétés gazières étrangères qui posséderaient des canalisations à proximité de nos frontières de desservir les communes frontalières, sauf à créer des filiales détenues à 30 % par l'Etat ou un établissement public français. La Commission européenne fait clairement référence, dans sa lettre de mise en demeure, à la possibilité pour les communes proches des frontières de recevoir des fournitures de gaz en provenance d'autres Etats membres. Elle considère notamment qu'en limitant la distribution du gaz sur le territoire national, GDF entrave le développement du commerce entre Etats membres. Elle cite notamment l'exemple de la commune de Wissembourg, située le long de la frontière allemande dans le nord du Bas-Rhin, qui après avoir obtenu en mars 1988 deux offres allemandes, a fini par concéder la desserte à GDF qui avait fait de nouvelles propositions.

Enfin, la rédaction actuelle de l'amendement ne permet pas aux collectivités territoriales de figurer au nombre des actionnaires détenant 30 % des nouveaux opérateurs. Or, si la présence des collectivités territoriales ne s'imposait pas dans le capital des sociétés de transport du gaz dans la mesure où l'assise territoriale de ces société excède le territoire des collectivités locales les plus grandes, il paraît normal d'autoriser les communes ou les départements à entrer dans le capital de sociétés censées desservir leur territoire. Votre commission vous proposera un amendement en ce sens.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi amendé.

ARTICLE 36

Ouverture du capital et actionnariat salarié de la
compagnie nationale Air France

Commentaire : le présent article vise :

- dans son paragraphe I, à substituer dans l'ordre juridique les mots "société Air France" aux mots "Compagnie nationale Air France",

- dans son paragraphe II, à autoriser l'Etat à céder gratuitement une quote-part du capital de la société aux salariés en échange d'une réduction de leurs salaires,

- dans son paragraphe III, à poser l'obligation pour l'Etat de proposer une quote-part des opérations éventuelles de cessions de sa participation aux salariés et aux retraités de la société.




Cet article inspire un premier commentaire de forme pour souligner l'inadaptation d'un texte tel que le présent DDOEF pour traiter de la question cruciale de l'avenir d'Air France. Cette compagnie à laquelle les Français sont particulièrement attachés, ce qu'ils ont amplement démontré en lui apportant 20 milliards de francs au cours des années récentes, mérite mieux qu'un article parmi d'autres dans un projet de loi qui en compte des dizaines.

Si la compagnie paraît aujourd'hui redressée, son devenir reste dépendant de sa capacité à relever les défis qui s'imposent à elle, à assurer sa croissance et son plein rétablissement financier dans le contexte de concurrence très vive qui est celui du transport aérien. Cela implique que l'entreprise soit en mesure d'être guidée par un actionnaire capable d'exercer entièrement les responsabilités d'un gestionnaire d'entreprise, c'est-à-dire d'accompagner financièrement son développement et d'assumer sans faiblesse les décisions propres à favoriser son succès.

L'Etat ne remplit pas ces conditions et, malgré cela, le gouvernement entend lui conserver un rôle prépondérant. Le dispositif prévu par l'article 36 doit être apprécié en fonction de cette situation d'incohérence.

I - UN REDRESSEMENT A CONFORTER

La compagnie Air France qui était il y a 5 ans au bord de la cessation de paiements a connu, depuis, un redressement remarquable. Il s'agit désormais de réussir une étape ultérieure, celle de la croissance du groupe et de l'amélioration de sa situation financière. Dans cette perspective, une privatisation de l'entreprise s'impose.

A. UNE ENTREPRISE REDRESSÉE

Le tableau ci-après rend compte du redressement de l'entreprise à la suite de la mise en oeuvre du "projet pour l'entreprise" mis en place en 1993.

Evolution de la situation d'Air France de 1986 à 1996-1997

(en millions de francs)

 
 

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994-1995

1995-1996

1996-1997

 

CA consolidé

30.967

32.916

35.584

39.791

57.070

57.852

57.215

55.157

55.055

52.940

55.845

 

dont part export

15.181

15.798

17.210

20.156

23.331

23.767

24.233

23.548

24.148

23.889

28.234

I - Activité et

Résultat net consolidé part du groupe

562

1.221

1.152

841

- 717

- 685

- 3.266

- 8.476

- 1.536

- 2.410

- 147

Résultat

dont provisions pour restructuration

0

0

0

0

104

700

66

1.800

484

2.196

0

II -

Marge brute d'autofinancement (MBA)

2.655

3.101

3.734

2.444

404

2.560

1.445

- 2.506

1.822

3.256

3.080

Investissements

Résultat d'exploitation

1.934

2.484

2.365

1.273

- 1.144

213

- 1.509

- 3.348

- 385

418

579

 

Investissement

3.986

2.506

4.676

6.758

15.497

12.779

9.508

8.359

8.803

3.202

3.944

 

dont opérations de croissance externe

566

466

499

953

5.786

1.347

1.953

326

 

0

0

 

Fonds propres consolidés

3.627

5.148

6.159

9.996

11.521

12.617

9.089

6.971

5.793

8.531

13.614

 

Intérêts minoritaires

53

49

122

136

2.327

1.902

1.346

750

1.530

1.318

1.315

III -

Concours publics

3

0

0,0

0,0

0

2.000

0

1.500

8.500

5.000

5.000

Structure des

Bénéfice réinvestis

425

1.028

865

642

0

0

0

0

0

0

0

fonds propres

Autres apports publics

0

0

0

0

0

0

0

0

0

0

0

 

Apports externes

0

0

0

0

0

1.250

0,0

1.500

0

10

0

 

Capitalisation boursière

0

0

0

0

0

0,0

0,0

0

0

0

0

 

Dettes financières consolidées nettes

5.542

05.349

5.431

7.555

17.119

21.466

28.298

35.303

29.304

21.695

16.933

IV -

Dettes PLT (1 an)

5.358

5.791

5.053

7.202

14.235

19.184

20.041

35.100

30.177

29.154

25.534

Endettement

Frais financiers

1.999

1.984

2.608

2.328

4.216

4.494

4.279

5.775

2.564

1.557

1.168

V - Données sociales

Effectifs au 31/12

35.269

41.849

42.663

44.335

64.894

64.973

63.853

61.759

57.549

55.605

55.269

VI -

MBA/Investissement

66,6

123,7

79,9

36,2

2,6

20,0

15,2

- 11,0

20,7

101,7,

78,1

Ratios

Frais financiers / CA

6,5

6,0

7,3

5,9

7,4

7,8

7,5

10,5

4,7

2,9

- 0,3

Source : Rapport sur la situation économique et financière du secteur public.

Accusant une perte de plus de 8 milliards de francs en 1993, le résultat de l'entreprise s'est rapproché de l'équilibre en 1996-1997 et devrait être significativement positif à l'issue de l'exercice 1997-1998.

Cette performance a été très largement acquise grâce à une diminution des frais financiers, réduits de plus de 4,5 milliards de francs sous l'effet d'un désendettement rendu possible par le versement échelonné de vingt milliards de francs consenti par les français à la compagnie.

Les efforts de productivité du personnel de la compagnie ont également contribué à ce résultat obtenu dans un contexte où le chiffre d'affaires 1996-1997 équivaut à peu près à celui de 1993, un rétablissement de l'activité ayant succédé à une chute des ventes de la compagnie.

Les gains de productivité qui étaient recherchés s'élevaient à 30 % à travers des mesures générales applicables à l'ensemble des personnels, pour 10,8 % et des mesures catégorielles propres au personnel navigant technique (PNT) pour 19,2 %. Les objectifs ont, semble-t-il, été globalement atteints.

Les mesures relatives au PNT ont permis de réduire la valeur de l'indicateur de masse salariale sur heures de vol de 19,2 %, ce qui était la cible visée. Les mesures générales, elles, n'ont pas été totalement efficaces, mais les gains de productivité acquis dans un contexte de réduction des effectifs ont, globalement, répondu aux exigences du redressement immédiat de l'entreprise.

Enfin, une gestion dynamique a favorisé le redressement de la recette unitaire et l'augmentation des taux d'utilisation des capacités de production, des évolutions favorables ayant permis de contenir certains coûts fixes, parmi lesquels les charges de carburant.

B. UNE NOUVELLE ÉTAPE DOIT ÊTRE PARCOURUE

La stratégie d'Air France pour 1998-2002 doit être une stratégie de croissance et d'amélioration de la rentabilité.

L'objectif de croissance est entièrement pertinent . Le redressement de la compagnie s'est fait à offre constante, contrainte imposée par la commission européenne. Les capacités de production fortement sollicitées peuvent et doivent désormais être accrues . Un objectif d'investissement de 40 milliards de francs sur 5 ans a été posé, 27 milliards de francs devant être consacrés à accroître et moderniser la flotte. A supposer que cet objectif soit suffisant, sa réalisation permettrait de contribuer à développer l'offre de la compagnie. Cet essor est d'abord nécessaire pour regagner les parts de marché perdues. On rappelle à ce stade que, sur une base 100 en 1993, le chiffre d'affaires d'Air France se sera situé à 101 au 31 mars 1997, les compagnies Lufthansa, KLM et British Airways se situant respectivement aux indices 118, 119 et 127. Mais, il s'agit également de tirer parti du développement du nombre des créneaux horaires disponibles à l'aéroport Charles de Gaulle à la suite de son extension. C'est là un atout considérable pour Air France qui, s'il venait à ne pas être joué par défaut de moyens, se retournerait contre elle.

L'objectif d'amélioration de la rentabilité s'impose aussi . Le tableau suivant rend compte de la situation actuelle du taux de marge 20( * ) de l'entreprise et de ses principaux concurrents européens ainsi que des objectifs d'Air France et de ces derniers à horizon 2000.

Taux de marge

 

1995

1996

1997 1

1998 1

1999 1

2000 1

Air France

9.1

9.0

11.7

13.0

14.4

15.0

British Airways

15.0

13.6

12.2

16.7

17.5

ND

Lufthansa

11.1

10.5

11.7

11.7

11.8

ND

KLM

13.9

9.2

11.9

12.6

12.8

ND

1) Objectifs

En 1996, Air France se trouvait en retard par rapport à ses concurrents. En 1997, ce retard serait largement comblé du fait des progrès réalisés par la compagnie, mais aussi des difficultés traversées par British Airways.

Les objectifs d'Air France pour les années futures sont très ambitieux, le taux de marge devant s'accroître de près de 28 % par rapport au niveau atteint en 1997. Ils sont beaucoup plus ambitieux que ceux de Lufthansa, mais ils le sont bien moins que ceux de British Airways.

En toute hypothèse, ces objectifs ne seront atteints que si les coûts salariaux de l'entreprise sont substantiellement réduits.

Un tel objectif suppose donc une forte adhésion des personnels et il faut alors proposer à ceux-ci un projet attrayant, ce que le gouvernement n'offre pas.

Les raisons pour lesquelles l'accroissement de l'excédent brut d'exploitation est si activement recherché doivent être ici rappelées.

L'objectif d'Air France d'investir 40 milliards de francs en 5 ans, soit 8 milliards de francs par an, crée un besoin de financement. Deux solutions sont envisageables pour le satisfaire : l'endettement et l'autofinancement. Le recours à l'endettement devrait être marginal, la compagnie ayant à l'égard de cette formule une forte aversion. Reste alors l'autofinancement : or, celui-ci ne viendra pas de dotations en capital sur fonds publics car l'Etat, qui pourtant souhaite rester actionnaire principal, n'en a pas les moyens financiers. L'actionnaire principal faisant défaut, il faut donc recourir à l'autre branche de l'alternative : l'augmentation de l'excédent brut d'exploitation

Pour l'exercice 1997-1998, l'excédent brut d'exploitation, qui aura été formé dans un contexte de hausse de l'activité du transport aérien, pourrait être proche de 5 milliards de francs. Il manque donc au moins 3 milliards de francs pour dégager les moyens financiers nécessaires aux investissements.

Dans l'immédiat, cette situation peut être surmontée car le capital devrait augmenter naturellement de 3 milliards de francs du fait du bouclage de deux opérations :

1,2 milliard viendrait de remboursements d'obligations en actions ;

1,8 milliard viendra de l'exercice de bons de souscription d'action.

Mais, le besoin de financement subsistera au-delà. Il s'élève au minimum à 4 fois 3 milliards de francs : 12 milliards de francs. Il est à souligner qu'une réduction de l'activité élèverait le niveau de ces besoins.

Il devient alors nécessaire de combler cette impasse en améliorant l'excédent brut d'exploitation de la société. Il faudrait pour cela que le taux de marge progresse d'au moins 3 points et s'accroisse donc de 25 % par rapport à son niveau actuel.

Sans même qu'il soit nécessaire de débattre à ce stade de la pertinence de l'objectif posé ni même des chances de l'atteindre, il faut souligner combien il est choquant que l'actionnaire majoritaire se dispense d'accompagner financièrement le développement de son entreprise. Il est manifeste qu'en agissant ainsi l'Etat ne remplit pas ses devoirs d'actionnaire. C'est d'ailleurs cette impuissance qu'il reconnaît lorsqu'il envisage d'ouvrir partiellement le capital d'Air France.

C. UNE NECESSAIRE PRIVATISATION


Le gouvernement n'a pas tiré les conséquences de l'impuissance financière de l'Etat. Il a solennellement rappelé qu'Air France resterait dans le secteur public. A l'heure où la "World Airlines" est privatisée à hauteur d'à peu près 80 %, il faut sans doute voir dans cette position opiniâtre une illustration supplémentaire de la volonté d'imposer l'exception française.

Pourtant, le Gouvernement entend procéder à la "respiration" du capital de la compagnie mais une telle ouverture du capital qui fait l'objet d'annonces ici ou là n'apparaît pas une bonne solution. Il est en effet très douteux qu'elle permette d'attirer les fonds propres nécessaires à Air France dans de bonnes conditions. Divers scénarios peuvent être envisagés. L'un où des investisseurs institutionnels sous tutelle seraient appelés à la rescousse, l'autre où des investisseurs paieraient un ticket d'entrée dans la perspective d'une privatisation ultérieure de la compagnie.

Dans le premier cas, l'apport des institutionnels serait réalisé dans des conditions, selon toute vraisemblance, douteuses, et ne changerait rien au management de la société. On voit mal dans ces conditions comment au-delà de l'achat des titres mis sur le marché ces institutionnels pourraient s'impliquer plus avant dans l'entreprise et lui apporter les fonds propres dont elle a besoin.

Dans le second cas, le prix du ticket d'entrée devrait être modéré ce qui ne garantit en rien que les intérêts patrimoniaux de l'Etat n'en sortiraient pas affectés. Là aussi il n'y aurait pas à attendre d'un nouvel entrant une quelconque contribution financière au développement d'une compagnie qui jusqu'à sa privatisation n'offrirait pour lui aucune visibilité.

Seule donc une privatisation est de nature à apporter une solution satisfaisante aux difficultés financières suscitées pour la compagnie et l'Etat par le maintien d'Air France dans le secteur public.

Ce maintien voulu par le gouvernement, favorise d'ailleurs la réticence des personnels de l'entreprise à en devenir également les actionnaires. On doit ajouter que la volonté ainsi manifestée par le gouvernement de conserver à l'Etat la majorité du capital de l'entreprise bride sa capacité à proposer aux salariés d'Air France une association plus étroite à la gestion de la compagnie. Une telle association pourrait pourtant favoriser sans aucun doute l'acceptation de la part des salariés d'efforts portant sur les rémunérations.

Mais la privatisation ne doit pas être comprise comme une opération seulement financière. Elle représente aussi une solution aux problèmes de gestion d'Air France.

L'appartenance de la compagnie au secteur public limite en temps ordinaires l'autonomie de gestion de l'entreprise
. Les tutelles qui pèsent sur elle ralentissent les décisions ou même entravent les mesures d'adaptation qui se révéleraient nécessaires. Les choix industriels peuvent être biaisés et le dialogue social est vicié dès lors que les ministres apparaissent comme des recours d'autant mieux mobilisables que pèsent sur eux des contraintes de toutes sortes.

Que dans ces conditions nul ne s'empresse d'apporter un soutien financier substantiel à la compagnie ne doit pas étonner.

On trouve un pendant à cette timidité dans les réticences des alliés potentiels d'Air France à conclure avec l'entreprise des accords stratégiques.

Air France est en effet la seule compagnie européenne de cette dimension à n'avoir pas conclu d'alliance globale avec l'une ou l'autre des compagnies américaines.

A supposer même que celles-ci ne souhaitent pas réaliser d'opérations de participations croisées avec Air France, elles semblent rétives à conclure des alliances avec un partenaire dont la gestion est susceptible d'obéir à des considérations étrangères à l'objet social de l'entreprise.

Cette situation est, faut-il le rappeler, très dommageable pour Air France. Il est d'ailleurs piquant d'observer que de telles alliances pourraient se révéler comme autant de moyens efficaces de réduire les besoins d'investissement de la compagnie ne serait-ce que parce qu'elles lui permettraient d'optimiser encore l'utilisation de ses capacités de production.

Le maintien d'Air France dans le secteur public n'a pas fini de dévoiler ses conséquences financières néfastes.

II - LE DISPOSITIF D'ÉCHANGE SALAIRES CONTRE ACTIONS


Le mécanisme essentiel mis en place par l'article 36, consistant à prévoir un échange entre des diminutions de salaires et la distribution d'actions gratuites, n'est affecté d'aucun vice propre. Au contraire, en associant le personnel au devenir de l'entreprise, en offrant une contrepartie à des efforts salariaux nécessaires, il peut offrir une modalité importante de la modernisation d'Air France.

Encore faut-il qu'une telle opération soit bien conduite, ce qui suppose un bon dialogue social, mais aussi et surtout de promouvoir une réforme ambitieuse de l'entreprise, cohérent avec le projet proposé aux salariés, avec les intérêts de l'Etat et avec la stratégie de l'entreprise.

En choisissant le chemin d'une ouverture du capital d'Air France limitée et étriquée, contrainte par le dogme du maintien dans le secteur public, le gouvernement ne se met pas en situation de valoriser Air France et d'entraîner l'adhésion de ses personnels à une formule d'actionnariat salarié qui apparaît alors simplement défensive.

A supposer même que le gouvernement impose la mesure agencée par ses soins, la contrainte financière et la nécessaire modernisation du cadre de gestion de l'entreprise subsisteraient. En outre, une occasion aurait été manquée de mobiliser les personnels autour de l'avenir d'Air France.

Le présent article tire d'ailleurs les conséquences de cette occasion manquée en rendant obligatoire un échange qu'une opération plus ambitieuse aurait sans doute grandement facilité.

A. UN DISPOSITIF CONTRAIGNANT...

Le paragraphe II de l'article autorise l'Etat à céder gratuitement des actions de la société Air France aux salariés de cette société qui auront consenti à des réductions de salaires.

Il s'agit donc de réunir les conditions légales d'un échange entre actions et salaires.

Cette opération ne constitue pas, dans son principe, une innovation. La loi n° 94-679 du 8 août 1994 avait ouvert à l'Etat la possibilité d'un tel échange. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, les porteurs de droits sociaux ayant acquis des titres dans le cadre de cet échange sont au nombre de 12.074 et détiennent 1.381.577 actions. Les titres ainsi acquis ont été recueillis dans un fonds commun de placement baptisé Pélican II qui doit avoir reçu en mars dernier 650.000 actions nouvelles correspondant à la dernière tranche d'échange.

Au total, ce fonds regroupe 1 % du capital auquel s'ajoutent des bons de souscription d'actions. Il est intéressant de mettre en évidence ce résultat, somme toute modeste, pour le comparer avec les ambitions affichées par le gouvernement dans le cadre de l'article sous examen.

Mais, si l'opération proposée n'est pas une innovation dans son principe, elle l'est bien dans ses modalités.

La loi de 1994 avait organisé un échange sur une base volontaire et individuelle. De plus, la contrepartie de la cession d'actions était constituée d'une réduction des salaires consentie pour une durée de 3 ans.

Le dispositif de l'article 36 diffère profondément de celui de 1994.

Première différence essentielle
, le texte met en place un dispositif destiné à rendre contraignant pour les catégories concernées l'échange "actions - salaires".

Celui-ci reste, sans doute, subordonné à un accord social. Mais, cet accord n'est plus individuel mais collectif. Dès lors qu'un accord collectif entre la direction de l'entreprise et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives des personnels concernés aura été conclu le consentement individuel des salariés ne sera plus nécessaire. Un accord collectif est, en effet, opposable individuellement aux salariés d'une entreprise. Par conséquent, une fois un accord de réduction des salaires conclu, le refus individuel de l'appliquer constituerait un motif légitime de licenciement.

Le 3° du paragraphe II organise d'ailleurs une dérogation aux règles du droit du travail dans cette perspective.

L'article L.321-1-3 du code du travail prévoit en effet que, lorsqu'un employeur envisage le licenciement de plusieurs salariés ayant refusé une modification substantielle de leur contrat de travail, ces licenciements sont soumis aux dispositions applicables en cas de licenciement collectif pour motif économique.

Or, un arrêt de la Cour de cassation du 3 décembre 1996, Majorette et Framatome, a posé le principe "que dans les entreprises où sont occupés habituellement au moins cinquante salariés, les employeurs qui projettent d'y effectuer un licenciement pour motif économique, sont tenus, lorsque le nombre de licenciements envisagés est au mois égal à dix dans une même période de trente jours, non seulement de réunir et de consulter le comité d'entreprise, mais d'établir et mettre en oeuvre un plan social pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre ; qu'en outre, en application de l'alinéa 2 de l'article L.321-1 du code du travail, ces disposions sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant d'une cause économique".

La direction de la société nouvelle Majorette estimait ne pas être obligée d'organiser un plan social avant d'avoir obtenu la réponse des salariés à l'expiration du délai prévu par l'article L.321-1-2 du code du travail. La Cour de cassation n'a pas fait droit à cette façon de voir.

L'avant-dernier alinéa (3°) du paragraphe II de l'article 36 prévoit donc une procédure de licenciement spécifique.

Il dispose en effet que " l'engagement éventuel de la procédure prévue à l'article L.321-1-3 du code du travail ne peut intervenir qu'à l'issue de la procédure visée à l'article L.321-1-2 du même code ".

On rappelle que celui-ci impose à un employeur qui envisage une modification substantielle des contrats de travail, d'en informer chaque salarié par lettre recommandée avec accusé de réception . Le salarié dispose d'un mois pour notifier son refus. A défaut de réponse de sa part, il est réputé avoir accepté la modification proposée.

Cette disposition du texte dispense donc la direction d'établir un plan social avant de connaître le nombre de salariés qui seront concernés par des licenciements.

Mais, dira-t-on, la condition d'un accord collectif étant posée, un refus individuel manifesterait un manquement aux règles collectivement négociées et choisies. C'est négliger l'existence de nombreuses organisations syndicales jugées représentatives dans la société Air France et la possibilité de conclure un accord avec une organisation représentative mais minoritaire. La signature d'un seul syndicat suffirait à permettre la mise en oeuvre du plan. Cette "équation sociale" ne paraît pas de nature à entraîner l'adhésion d'une majorité de salariés envers un dispositif qui s'inscrit dans les paradoxes et faiblesses de la négociation collective à la française.

Seconde différence essentielle par rapport au texte de 1997, les réductions salariales, contrepartie de la cession gratuite d'actions, ne sont pas consenties pour une durée donnée (3 ans en 1994) mais pour la durée de la carrière professionnelle . Cela signifie que l'accord devra modifier la grille des salaires afin qu' in fine les salaires moyens perçus au cours d'une carrière soient réduits d'un pourcentage à déterminer lors de la négociation sociale. Cette condition, rejetée par le principal syndicat des pilotes, devrait être, en pratique, difficile à mettre en oeuvre. Ajoutons qu'elle n'est pas de nature à se trouver garantie, l'évolution des relations sociales pouvant à tout instant la remettre en cause dans un contexte où l'actionnariat salarié n'apparaîtra pas aux salariés de l'entreprise comme les associant suffisamment au devenir d'Air France.

B. ...OUVRANT LA PERSPECTIVE D'UN ACTIONNARIAT SALARIÉ RENFORCÉ MAIS LIMITÉ...

La répartition actuelle du capital d'Air France est la suivante :

Répartition du capital d'Air France

 

Nombre de titres
(en millions)

(en %)

Etat

184,74

94,0

SNCF

3,01

1,5

CDC Participations

1,12

0,6

CDR Participations

0,98

0,5

Chambre de commerce de Paris

0,42

0,2

sous-total secteur public

190,27

96,8

Arenia (groupe Air France)

0,90

0,5

Salariés en société coopérative

,2,30

1,2

Salariés volontaires 1994

1,39

1,3

Salariés Air France Europe

0,03

N.S.

sous-total salariés

3,72

3,0

Divers

0,45

0,2

TOTAL

194,44

100

L'exercice des bons de souscriptions d'actions par les salariés pourrait porter leur part de détention du capital de la société de 2,5 à 8 %

Comme le plafond du capital échangeable contre une réduction salariale est fixé à 12 %, la part du capital détenu par les salariés n'excéderait pas 20 % à l'issue de cette opération d'échange. Elle serait ainsi très inférieure non seulement à ce qu'elle est dans les entreprises concurrentes ayant développé l'actionnariat salarié (51 % du capital chez United Airlines ; 37 % chez Northwest) mais aussi aux seuils permettant aux actionnaires d'influer sur les décisions de la société.

80 % du capital au minimum resterait donc à l'Etat.

C. ...AU TERME D'UN "ÉCHANGE SALARIES - ACTIONS" INCERTAIN.

Il est à souligner que le chiffre de 12 % évoqué ci-dessus est un plafond.

La distribution d'actions gratuites et donc la quote-part du capital cédée gratuitement aux salariés dépendront en effet, d'une part, du niveau de valorisation d'Air France et, d'autre part, de la contribution de la réduction salariale à cette valorisation.

La valeur de l'entreprise dépend elle-même d'une évaluation que devra réaliser la commission des participations et des transferts, autrefois dénommée "commission de privatisation". Celles-ci disposera à l'évidence d'une large marge d'appréciation.

Il faudra alors que cette même commission évalue l'augmentation de valeur de la compagnie résultant des réductions salariales consenties par les personnels. Les actions cédées gratuitement par l'Etat ne peuvent en effet représenter un montant supérieur à cette augmentation de valeur. Cette dernière disposition est respectueuse des intérêts patrimoniaux de l'Etat mais le dispositif est globalement mal agencé.

Un problème séquentiel se pose d'abord. L'évaluation de la valeur de l'entreprise et de l'augmentation de la valeur de la participation de l'Etat résultant des abandons de salaires suppose que ceux-ci aient, au préalable, été formalisés dans l'accord collectif visé au 1° du paragraphe II.

Mais, cet accord suppose à son tour que les salariés connaissent précisément les indemnités auxquelles peuvent donner lieu les réductions de salaires auxquelles ils pourraient consentir. La question cruciale est de déterminer quelle est la valeur d'Air France car c'est à partir de cet élément actuel que sera évaluée l'augmentation de valeur résultant d'une réduction donnée de salaires. C'est également à partir de cette donnée que les salariés pourraient anticiper une valorisation éventuelle des titres reçus en guise d'indemnité.

Or, la méthode choisie par le gouvernement ne permet pas cela. Par conséquent, elle obère les chances de succès d'un accord qui suppose pour réussir la conclusion favorable des négociations mais aussi une adhésion des personnels.

Au-delà, il faut souligner combien les incertitudes sur l'avenir du capital de la compagnie réduisent l'attrait d'en détenir une part pour les salariés, et d'ailleurs pour n'importe quel investisseur, qui s'exposent alors à un risque relatif d'illiquidité du marché du titre tout en n'ayant aucune visibilité ni aucun pouvoir sur le contrôle des décisions essentielles de gestion et pour seule certitude l'incapacité de l'actionnaire majoritaire à accompagner le développement de l'entreprise.

Dans ces conditions, la disposition offrant aux salariés un encouragement supplémentaire à une réduction volontaire du salaire, contenue dans le septième alinéa (4°) du paragraphe II qui prévoit l'application d'un régime fiscal favorable aux actions cédées aux salariés, paraît peu décisive. Au terme de cette disposition, la valeur des actions cédées n'entrerait pas en compte dans le calcul des impôts, taxes et prélèvements assis sur les salaires ou les revenus. Ces actions relèveront en revanche de la fiscalité de droit commun des titres (l'imposition sur les plus-values s'applique, pour les opérations réalisées depuis le 1er janvier 1998, lorsque le montant annuel des cessions excède 50.000 francs, article 92 B du code général des impôts) et entreront dans le champ de l'impôt de solidarité sur la fortune et des droits sur les successions.

Enfin, à supposer même que le gouvernement impose l'échange envisagé, celui-ci ne déboucherait pas sur une économie suffisante pour assurer le financement des projets d'investissement de la compagnie.

Sur la base de chiffrages évidemment incertains, on estime que l'amélioration de l'excédent brut d'exploitation qui pourrait résulter d'un tel processus n'excéderait pas, au mieux, 0,5 milliard de francs. Une impasse de financement substantielle, toutes choses égales d'ailleurs, demeurerait donc de l'ordre de 2,5 milliards de francs.

*

* *

En faisant le choix d'un refus de privatiser Air France, le gouvernement s'est lui-même privé des marges lui permettant d'entraîner la pleine adhésion des personnels aux mesures de modernisation destinées à assurer le développement de l'entreprise.

Celui-ci, que la qualité du savoir-faire de ses salariés alliée aux considérables atouts naturels d'Air France devraient rendre particulièrement brillant, suppose, alors que la compagnie est redressée, sa privatisation, gage du dynamisme nécessaire à un acteur majeur du transport aérien.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 37

Régime des actifs de la société nationale des poudres et explosifs

Commentaire : afin de sceller le projet de filiale commune entre la SNPE et son homologue britannique, Royal Ordnance , le présent article autorise le transfert au secteur privé des actifs de la Société nationale des poudres et explosifs (SNPE) nécessaires à la production et à la vente de poudres et substances explosives destinées à des fins militaires.

Bien que la société nationale des poudres et explosifs (SNPE), société créée en 1970 et détenue à 100 % par l'Etat, affiche un excédent d'une cinquantaine de millions de francs 21( * ) grâce au développement de ses ventes dans la chimie et la pyrotechnie civiles, certaines de ses activités ne sont pas rentables. Ainsi, la fabrication des poudres et explosifs à des fins militaires , qui ne représente plus que 7 à 8 % du chiffre d'affaires du groupe (350 millions de francs sur un chiffre d'affaires total de 4,9 milliards de francs en 1997) continue à enregistrer des pertes (112 millions de francs en 1996 et 60 millions de francs en 1997 22( * ) ) et des baisses de commandes, malgré des efforts importants de restructuration 23( * )

Cette situation découle de la saturation du marché européen qui est elle-même la conséquence de la restriction des budgets militaires. En effet, les douze producteurs de poudres et explosifs militaires d'Europe occidentale disposent d'une capacité de production de 8 milliards de francs pour un marché estimé à 1,5 milliard de francs.

Pour préserver leur potentiel industriel et technologique dans un contexte de très forte contraction des besoins en munitions des armées et pour rétablir l'équilibre économique de l'activité, les deux principaux fabricants de poudres et explosifs européens, la SNPE et la société britannique Royal Ordnance , filiale de British Aerospace, ont conçu le projet de regrouper leurs activités dans ce domaine afin d'optimiser leurs moyens. Le nouvel ensemble devrait compter un chiffre d'affaires de quelque 650 millions de francs et l'essentiel des fabrications devrait être regroupé dans 4 établissements principaux.

Or, comme le précise la note d'impact jointe au présent projet de loi, " les Britanniques posent comme condition sine qua non de leur acceptation du projet que la future société soit détenue à parité, et soit donc de droit privé. "

Le rapport général de l'Assemblée nationale précise que la SNPE et de Royal Ordnance devraient au préalable transférer leurs activités respectives de fabrication des poudres et explosifs militaires à des filiales nationales qui apporteraient à leur tour leurs actions dans une société de droit britannique, détenue à parité par la SNPE et Royal Ordnance . Toutefois, la SNPE conservera directement 10 % du capital avec droit de vote de la filiale française, tandis que Royal Ordnance conservera 5 % de la filiale anglaise.

La filialisation par la SNPE de ses activités de fabrication des poudres et explosifs militaires aurait pu être autorisée par une simple décision administrative dans la mesure où la SNPE restera actionnaire, mais le Conseil d'Etat consulté n'en a pas jugé ainsi.

En effet, tout en considérant qu'aucun texte ni principe de valeur constitutionnelle ne s'opposait à ce que la fabrication des poudres et explosifs militaires soit confiée au secteur privé, le Conseil d'Etat a, dans un avis du 2 octobre 1997, estimé que la privatisation de la partie des actifs de la SNPE destinée à être mise en commun avec ceux de Royal Ordnance, devait être autorisée par le législateur, conformément à l'article 34 de la Constitution 24( * ) . Il écrit en effet :

" L'activité de fabrication des poudres et explosifs à usage militaire, monopole d'Etat dont l'organisation a été fixée par la loi du 13 Fructidor an V et dont la SNPE créée par la loi du 1 er octobre 1971 a repris l'ensemble des activités industrielles et commerciales, constitue par elle-même un service public national dont l'existence ne peut qu'être regardée comme consacrée par la loi. En conséquence, seul le législateur peut mettre un terme à l'existence de ce service public dans des conditions qui ne soient pas contraires à la Constitution . "

C'est l'objet du présent article qui modifie la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des poudres et substances explosives de façon à prévoir explicitement la possibilité de transférer au secteur privé, selon les dispositions de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations, la propriété des actifs nécessaires à la vente de poudres et substances explosives.

On peut néanmoins mettre en doute la nécessité d'une disposition législative dans la mesure où, comme le relève le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale 25( * ) , l'article premier de la loi précitée dispose déjà que " en application des dispositions du traité de Rome, le monopole de l'Etat en matière de production, d'importation, d'exportation et de commerce des poudres et substances explosives est , à dater de la publication de la présente loi, aménagé de telle sorte que l'Etat puisse soit déléguer certaines opérations à des entreprises publiques, soit autoriser des entreprises publiques ou privées à exécuter ces opérations . "

Il convient de préciser en tout état de cause que cette disposition n'a pas pour effet de faire figurer la SNPE sur la liste des entreprises privatisables annexée à la loi de privatisation précitée. Son objet est strictement circonscrit à l'activité poudres et explosifs militaires. Comme l'indiquait le ministre de la défense devant les députés : " En fait, il s'agit d'un réaménagement des activités de participation de la SNPE. Il n'en résultera aucun transfert d'actions au secteur privé. L'Etat conserve toutes ses actions et la SNPE devient actionnaire à 50 % d'une société franco-britannique commune. "

Le ministre de la défense a en outre précisé qu'une majorité des activités de production serait maintenue en France et que Royal Ordnance réduirait la part d'activité de ses propres installations en Grande-Bretagne (Bridgewater et Bishopton) ou aux Pays-Bas où elle possède également une usine (Muiden). Il a cependant ajouté que l'alliance modifierait la répartition de l'activité entre les trois sites français : le site d'Angoulême, qui est le plus dépendant des marchés de l'armement, serait privé d'une partie de son activité à partir de 1999 alors que les établissements de Bergerac et de Sorgues bénéficieraient de la création nette d'une centaine d'emplois.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

ARTICLE 38

Modification des règles d'attribution du versement
transport en Ile-de-France

Commentaire : cet article, qui figurait déjà dans le projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier déposé en 1997 par le précédent gouvernement, modifie les règles d'affectation du produit du versement de transport en Ile-de-France, en s'inspirant du système pratiqué dans les autres régions, afin de régulariser certaines pratiques et d'autoriser le financement de nouvelles dépenses, notamment les " tarifications sociales ".

Créé par une loi du 12 juillet 1971, et régi par l'article L 2531 du code des collectivités territoriales, le versement de transport (VT) est acquitté par les entreprises de la région parisienne 26( * ) employant plus de neuf salariés.

L'assiette du versement est, depuis la loi du 24 février 1996, constituée par le montant des salaires payés. Auparavant, le versement de transport était plafonné, au niveau du plafond de la sécurité sociale. Son taux est fixé par décret dans les limites de 2,5% à Paris et dans le département des Hauts-de-Seine, de 1,6% dans les départements de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, et de 1,3% dans les départements de l'Essonne, des Yvelines, du Val d'Oise et de la Seine-et-Marne.

Le versement est effectué auprès des organismes ou services chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale et des allocations familiales, qui perçoivent des frais de recouvrement. Son produit, qui s'élève environ à 12 milliards de francs 27( * ) , est versé au Syndicat des transports parisiens (STP).

L'article 2531-5 du code général des collectivité territoriales prévoit trois affectations possibles pour le versement de transport :

1°) la compensation intégrale des réductions de tarifs consenties aux salariés par les entreprises de transport en commun de la région des transports parisiens ;

2°) le financement d'investissements spécifiques aux transports collectifs ;

3°) le financement de contributions prévues par les conventions éventuellement passées entre le Syndicat des transports parisiens et les entreprises de transport pour les améliorations, réorganisations, extensions ou créations de services.

I - L'UTILISATION DU PRODUIT DU VERSEMENT DE TRANSPORT REFLÈTE UNE INTERPRÉTATION EXTENSIVE DES TEXTES

Les trois affectations possibles du versement de transport n'occupent pas une place équivalente dans les dépenses du STP. Le financement de la compensation est prioritaire et représente presque les trois quarts des dépenses.

Le " reliquat " sert à financer les " investissements spécifiques en faveur des transports collectifs " et, marginalement, les contributions conventionnelles.

Répartition du produit du versement de transport entre les affectations prévues
(budget 1998 du Syndicat des transports parisiens)

 

Montant
(en millions de francs)

%

Produit disponible (après déduction des dépenses obligatoires)

11.623

100

Compensation

8.599

73,9

Investissement

2.713

23,34

Contributions conventionnelles

281

2,41

Enquêtes de trafic

30

0,25

Cette hiérarchie entre les affectations résulte de la nécessité de compenser " intégralement " les réductions de tarifs. En revanche, si la présentation du budget du STP respecte les trois affectations prévues par la loi, le lien entre l'objectif et la dépense réelle est parfois ténu, comme l'a rappelé à plusieurs reprises la Cour des comptes, notamment dans son rapport public de 1995.

A. LA COMPENSATION NE S'EST JAMAIS LIMITÉE AUX RÉDUCTIONS CONSENTIES AUX SALARIÉS

Dès l'origine, et singulièrement depuis la création de la " carte orange " en 1975, le versement de transport a servi à compenser aux entreprises de transports publics l'ensemble de la perte de recette due aux réductions de tarifs consenties. Cette liberté prise avec l'article L 2531-5 du code général des collectivités territoriales, qui limite le champ de la compensation aux réductions accordées aux salariés, revient à faire subventionner les titres de transport des non salariés par les employeurs redevables du versement de transport.

Sachant que la proportion de cartes oranges détenue par des salariés est comprise entre 60 et 65%, et que 8,6 milliards de francs seront consacrés en 1998 à la compensation, on peut estimer entre 3 et 3,4 milliards de francs les crédits du VT " indûment " consacrés à la compensation.

Les compensations sont versées à la RATP et à la SNCF, mais également aux entreprises privées de transport en commun. La région parisienne en compte quatre-vingt, qui assurent principalement la desserte d'autobus dans la grande couronne. Celles-ci bénéficient d'un régime particulier de compensation. Les versements en provenance du VT constituent environ 70% de leurs recettes. L'origine de ce régime dérogatoire provient du fait que ces entreprises ne vendent pas la carte orange et n'ont pratiquement pas de recettes directes. La compensation qui leur est versée correspond aux recettes qui auraient été les leurs si l'ensemble des voyageurs qu'elles transportent utilisait des titres de transport acquis auprès d'elles, et non auprès de la RATP ou de la SNCF.

B. LES CONTRIBUTIONS CONVENTIONNELLES RÉDUITES À LA PORTION CONGRUE

Les " contributions prévues par les conventions éventuellement passées entre le Syndicat des transports parisiens et les entreprises de transport pour les améliorations, réorganisations, extensions ou créations de services " ne représentent que 2,4% de l'utilisation du produit du VT.

Pourtant, l'élaboration des actions financées dans ce cadre constitue l'unique marge de manoeuvre du STP en matière de détermination de la politique des transports.

Les actions conventionnelles correspondent à l'objectif fixé par l'article L 2531-5 du code général des collectivités territoriales. En 1998, ces crédits servent principalement à financer la rémunération d'agents d'ambiance recrutés par les entreprises privées, la desserte vingt-quatre heures sur vingt-quatre de l'aéroport de Roissy, un programme de transport porte à porte de personnes handicapées ainsi que la " mise sous cocon " d'un site situé à Noisy.

C. LE VERSEMENT DE TRANSPORT EST UTILISÉ POUR LIMITER LE MONTANT DE " L'INDEMNITÉ COMPENSATRICE " VERSÉ PAR LES COLLECTIVITÉS PUBLIQUES AUX ENTREPRISES DE TRANSPORT

Les " praticiens " du versement de transport ont coutume de considérer que le versement de transport est utilisé à deux fins. En premier lieu, et principalement, il sert à financer la compensation des réductions de tarifs. En second lieu, le " reliquat " est affecté à une " contribution aux charges d'amortissement " 28( * ) des deux entreprises publiques de transport collectif, la SNCF et la RATP.

Cette affectation, qui ne correspond en rien au " financement d'investissements spécifiques aux transports collectifs " prévu par la loi, est justifiée ainsi par le gouvernement, dans sa réponse aux critiques formulées par la Cour des comptes dans son rapport public de 1995 : " L'affectation d'une part du VT à l'atténuation des charges d'amortissement dans les comptes des deux entreprises publiques peut s'expliquer par le fait que les investissements d'extension de réseaux étant subventionnés à 80% (par l'Etat et la région), ces entreprises, maîtres d'ouvrage de ces opérations, ne peuvent constituer de dotation aux amortissements correspondant à ces investissements. Le VT vient donc, non pas financer directement des investissements, comme c'est largement le cas en province, mais assurer des quasi-dotations aux amortissements pour des investissements subventionnés par ailleurs ".

Le député Michel Bouvard, dans un rapport publié en 1996 et intitulé Les transports collectifs en Ile-de-France : le défi de la réforme , a considéré qu' " une telle argumentation n'est recevable ni en droit, ni dans les faits, même si elle s'inscrit dans la nécessité d'assurer des investissements indispensables à la vie économique et sociale de l'Ile-de-France. D'une part, la loi n'est pas respectée. Il convient donc de la faire respecter ou de la modifier. D'autre part, la situation actuelle transfère sur les employeurs des charges anormales, qui, en outre, en diminuant les sommes normalement affectées aux investissements, accroissent l'endettement des entreprises publiques ".

En réalité, la fraction du produit du versement de transport versée aux entreprises publiques de transport collectif permet à l'Etat et aux départements de minorer d'autant le montant de l' " indemnité compensatrice " qu'ils versent à ces entreprises.

1. Le mécanisme de l'indemnité compensatrice


L'origine de cette " indemnité compensatrice " remonte au décret du 7 janvier 1959 qui organise les relations entre le Syndicat des transports parisiens et les entreprises publiques de transport collectif. Le décret prévoit en effet que le STP fixe les tarifs de manière à permettre l'équilibre financier des entreprises. En cas d'opposition du ministre des transports aux tarifs fixés par le STP, le déficit qui en résulte pour les entreprises est pris en charge par l'Etat à hauteur de 70% et les départements pour 30%. En pratique, jamais les tarifs pratiqués par les entreprises n'ont permis d'équilibrer les charges d'exploitation. Les recettes directes n'ont jamais dépassé 40 % du montant nécessaire à l'équilibre d'exploitation.

L'existence de l'indemnité compensatrice a pour conséquence de garantir aux entreprises la couverture intégrale de leurs déficits d'exploitation, indépendamment de la qualité de leur gestion.

Les charges d'exploitation des entreprises publiques de transports collectifs ont fortement augmenté au cours des années récentes sous l'influence conjuguée de trois facteurs :

- les charges d'exploitation sont pour plus de 50% des dépenses de personnel, qui augmentent à un rythme supérieur à celui des prix ;

- les dépenses en capital croissent à un rythme rapide, également supérieur à l'inflation, du fait de la politique d'investissement massif dans les années récentes ;

- la fiscalité locale s'alourdit, ce qui en fait le poste de charge qui a le plus augmenté ces dernières années.

Contrairement à ce que pourrait laisser penser la forte augmentation des tarifs pratiqués sur la même période, la hausse des charges d'exploitation n'a pas été financée par les usagers. Comme le montre le tableau ci-dessous, la part des recettes directes (vente des billets au voyageurs) fluctue à un niveau légèrement inférieur à 40% de l'ensemble des recettes.

Financement des charges d'exploitation

 

1992

1993

1994

1995

1996 (2)

1997 (3)

1998 (prévisions)

Usagers (1)

38 %

33,7 %

35,8 %

33,8 %

36,9 %

37,8 %

38,4 %

Employeurs (VT)

23,9 %

27,4 %

23,4 %

26,6 %

28,3 %

27,6 %

28,5 %

Etat

19,7 %

16,6 %

19,5 %

19,6 %

17,2 %

17,1 %

16,1 %

Collectivités locales

8,4 %

8,3 %

9,6 %

9,5 %

8,6 %

8,5 %

8,1 %

Autres (produits financiers et annexes)


10 %


10,7 %


11,7 %


10,5 %


9 %


9 %


8,9 %

Total

100 %

100 %

100 %

100 %

100 %

100 %

100 %

(1) Non déduit le remboursement par l'employeur de 50 % depuis le 1er octobre 1984 des titres d'abonnements utilisés par leurs salariés pour se rendre à leur lieu de travail.

(2) Les taux sont calculés à partir des résultats de la RATP et des résultats provisoires de la SNCF Ile-de-France. Ils tiennent compte des effets définitifs des grèves de fin 1995 et attentats durant le second semestre.

(3) Les taux sont calculés à partir du budget révisé de la RATP et du budget initial de la SNCF.


Les produits financiers et annexes représentant un peu moins de 10% des ressources, l'indemnité compensatrice doit donc apporter entre 50 et 60% du financement des charges d'exploitation de la RATP et de la SNCF . Le tableau ci-dessous retrace l'évolution en valeur des différentes contributions :

 

1995

1996

1997

1998

Usagers

10 779

12 133

12 867

13 385

Employeurs (VT)

8474

9 495

9 392

9 940

Etat

6 250

5 092

5 836

5 598

Collectivités locales

3 040

2 937

2 888

2 804

Autres

3 329

3 598

3 083

3 114

Total

31 872

34 065

34 065

34 840

2. L'indemnité compensatrice et le versement transport

L'indemnité compensatrice est théoriquement versée par l'Etat et les départements aux entreprises de transport en commun. En réalité, les collectivités regroupées au sein du STP, précisément l'Etat et les départements, décident d'affecter le " reliquat " du VT aux charges d'exploitations des entreprises publiques afin de minorer d'autant le montant de l'indemnité compensatrice qu'elles doivent verser.

Ainsi, en 1998, le montant de l'indemnité compensatrice versé par les collectivités publiques aurait du s'élever à 10,3 milliards de francs et, grâce au VT, ne sera que de 8,4.



Aujourd'hui, les employeurs redevables du versement de transport sont les premiers financeurs des charges d'exploitation des entreprises publiques de transport en commun, avec 28,5% de l'apport. Depuis 1996, ce taux est même supérieur à la somme des taux de participation de l'Etat et des département.

Toutefois, la part du VT dans le financement des charges d'exploitation n'est pas appelée à s'accroître dans des proportions trop importantes au cours des années à venir compte tenu du fait que le VT affecté aux " investissements " n'est que le reliquat d'une dépense incompressible, la compensation des réductions de tarifs consenties aux usagers.

Le graphique ci-dessous montre néanmoins que, si les évolutions sont lentes et les pourcentages relativement stables, la tendance est malgré tout à un désengagement de l'Etat et des départements, et à une prise en charge progressive du financement des charges d'exploitation par les usagers, ce qui est compréhensible, et par les employeurs, ce qui est plus curieux.



3. Le détournement du versement de transport n'est qu'un symptôme


Au-delà du fait que cette utilisation du produit du versement de transport est manifestement incompatible avec l'article L 2531-5 du code des collectivités territoriales, le recours au versement de transport met en évidence deux dysfonctionnements dans le système de financement des transports collectifs en Ile-de-France :

Le système de la couverture automatique des déficits d'exploitation de la RATP et de la SNCF atteint ses limites en raison de l'impécuniosité des collectivités publiques chargées de l'assurer.

L'existence même de l'indemnité compensatrice, qui n'existe pas en dehors de l'Ile-de-France, constitue un obstacle à la responsabilisation des entreprises publiques de transport.

En outre, s'agissant de la RATP, la Cour des comptes souligne qu'une partie de l'indemnité compensatrice ne sert même pas au financement des charges d'exploitation, mais à la couverture du déficit des régimes sociaux de l'entreprise.

Diverses pistes sont à l'étude dans la perspective d'une éventuelle modification du système de l'indemnité compensatrice. Il est notamment envisagé de recourir à la contractualisation, de démarrer en Ile-de-France le processus de régionalisation de la SNCF et de fixer à la RATP des objectifs en matière de gestion.

L'accroissement des charges financières des entreprises publiques de transports collectifs, qui conduit à l'augmentation de l'indemnité compensatrice et donc au recours au VT pour la financer, conduit à s'interroger sur la rationalité du processus de décision qui conduit à engager des investissements engendrant des charges financières difficiles à assumer.

L'indemnité compensatrice est versée par l'Etat et les départements, qui sont les deux collectivités publiques présentes dans le STP. Les investissements d'infrastructures nouvelles, en revanche, sont financés dans un autre cadre, celui du contrat de plan entre l'Etat et la région.

En d'autres termes, la région participe au financement des infrastructures nouvelles mais pas au financement des charges d'exploitation qui en découlent. Elle ne prend donc pas totalement en compte la " soutenabilité " financière de ses choix.

L'incorporation de la région dans le processus de prise de décision est une piste fréquemment évoquée pour rationaliser les choix en matière d'investissements de transports collectifs. Elle recueille l'adhésion de la Cour de comptes, elle a été mise en avant par le député Michel Bouvard dans son rapport et, récemment, figurait dans le programme électoral de la majorité sortante au Conseil régional d'Ile-de-France.

La modification des règles d'affectation du produit du versement de transport n'a pas vocation à résoudre les problèmes de l'organisation institutionnelle du secteur des transports en Ile-de-France, dont elle n'est qu'un symptôme. Elle fournit cependant une occasion de rappeler la nécessité d'un réexamen de l'ensemble des procédures et de l'organisation administrative du secteur 29( * ) .

II - LA MODIFICATION PROPOSÉE

L'article 38 du présent projet de loi propose de remplacer la rédaction actuelle de l'article 2531-5 du code général des collectivités territoriales par le texte suivant :

" Sous réserve des dispositions de l'article L 2531-7 30( * ) , le versement est affecté au financement des dépenses d'investissement et de fonctionnement des transports publics réguliers de personnes effectués dans la région des transports parisiens. "

Cette rédaction, vague, rapproche le système applicable en Ile-de-France de celui en vigueur dans les autres régions, prévu à l'article L 2333-68 du code général des collectivités territoriales et selon lequel " le versement est affecté au financement des dépenses d'investissement et de fonctionnement des transports publics urbains et des autres services de transports publics qui, sans être effectués entièrement à l'intérieur du périmètre des transports urbains, concourent à la desserte de l'agglomération dans le cadre d'un contrat passé avec l'autorité responsable de l'organisation des transports urbains ".

Cette modification a trois conséquences :

Elle ne remet en cause aucune des affectations actuelles du versement de transport ;

Elle valide la compensation de l'ensemble des titres de transport, ainsi que l'affectation jusqu'alors abusive du versement de transport aux charges d'exploitations des entreprises publiques de transports collectifs ;

Elle permet de financer des actions qui n'entraient pas dans le cadre des affectations du VT autorisées jusqu'ici .

Il peut sembler paradoxal de justifier la modification des règles d'affectation du VT, caractérisées depuis l'origine par leur détournement, en invoquant l'impossibilité de financer certaines actions dans le cadre législatif actuel.

Pourtant, chacune des utilisations du versement conserve un lien, même ténu, avec l'une de ses trois affectations théoriques. Or, aujourd'hui, le VT est perçu comme un instrument adéquat pour expérimenter en matière de politique tarifaire, de tarification " sociale " notamment. De telles dépenses n'entrent pas, même de loin, dans le cadre d'aucune des trois missions financées par le VT.

Le syndicat des transports parisiens a commencé en juillet 1997 à travailler sur un projet de " chèque transport " destiné aux demandeurs d'emploi, à la demande du ministre de l'Equipement, du Logement, des Transports et du Tourisme. Le " chèque mobilité " est aujourd'hui entré en vigueur. Ce dispositif est financé à hauteur de 30% (150 millions de francs) par le STP sur les crédits du versement de transport. En outre, le STP assure le financement intégral des chèques destinés aux bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique (ASS).

Des projets de tarification spécifique à destination des jeunes, étudiants et scolaires notamment sont à l'étude actuellement. Parmi les hypothèses envisagées figurent la création d'une carte orange remboursée comme pour les salariés, la gratuité des transports pendant les vacances ou encore la liberté de circulation dans l'ensemble des zones durant la fin de semaine.

En résumé, la modification proposée consiste, d'une part, à valider les utilisations abusives du VT et, d'autre part, à permettre les " tarifications sociales " , qui sont appelées à se développer à l'avenir. Elle ne résout toutefois pas les problèmes posés par l'organisation actuelle des processus de prise de décision, qui devront, à terme, faire l'objet d'une autre réforme.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 38bis (nouveau)

Extension du champ de compétence de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH)

Commentaire : le présent article propose d'étendre le champ d'intervention de l'ANAH à la transformation en logements locatifs des immeubles situés dans les zones de revitalisation rurale, dès lors qu'ils appartiennent à une zone bâtie agglomérée.

En adoptant à l'unanimité un amendement de M. William Chervy, le Sénat avait introduit un article additionnel au projet de loi de finances pour 1998, étendant les compétences de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.

Adoptée également par l'Assemblée Nationale, cette disposition figurant à l'article 119 a toutefois été censurée par le Conseil constitutionnel (décision n° 97-395 DC du 30 décembre 1997), au motif qu'elle était étrangère à l'objet des lois de finances, et donc contraire à la Constitution.

I - LES DISPOSITIONS DU PRESENT ARTICLE

La compétence de l'ANAH est définie par l'article L 321-1 du code de l'habitation et de la construction.

Art. L. 321-1 "l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat a pour objet de faciliter l'exécution des travaux de réparation, d'assainissement et d'amélioration des immeubles à usage principal d'habitation, notamment par la prise en charge totale ou partielle de l'intérêt des capitaux investis dans les travaux".

Le présent article propose d'étendre ses compétences à la transformation en logements locatifs des immeubles qui n'entrent pas dans la catégorie des "immeubles à usage principal d'habitation", mais sont situés dans les zones de revitalisation rurale, et sous la condition qu'ils appartiennent à une zone bâtie agglomérée.

L'article 62 de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire prévoit que les concours financiers de l'Etat à la réhabilitation de l'habitat ancien seront attribués par priorité aux communes situées dans les zones de revitalisation rurale, en vue de développer l'offre de logements locatifs sociaux.

Dans le même esprit, l'extension des compétences de l'ANAH devrait permettre de transformer des bâtiments à usage agricole (granges..), voire à usage industriel, en logements.

Même si la formulation n'est pas d'une grande précision juridique, la condition d'appartenance à une "zone bâtie agglomérée" permet de cibler l'intervention de l'ANAH sur les bourgs ruraux.

Il sera par contre légitime de s'interroger, après une première expérimentation de ces nouvelles dispositions, sur une extension au-delà des seules zones de revitalisation rurale.

En effet, cet article est mesuré en ce sens qu'il limite son champ aux zones de revitalisation rurale qui sont des zones délimitées au plan national et définies par l'article 42 de la loi n°95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.

Une des raisons de cette limitation est qu'aucun moyen financier supplémentaire n'est, pour le moment, prévu pour accompagner de cette extension.



II- LE DEBAT SUR LES MOYENS DE L'ANAH RESTE ENTIER

L'article proposé n'aura que pour effet d'orienter des crédits vers les logement ruraux, sans que le budget global de l'ANAH soit modifié.

Il faut rappeler une nouvelle fois que le produit de la taxe additionnelle au droit au bail taxe est de 3,5 milliards de francs, dont seulement 2,2 milliards de francs sont reversés à l'ANAH.

En bénéficiant d'une part plus importante, l'agence pourrait sans aucun doute étendre ses activités, au-delà de ce qui est ici proposé.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 38 ter (nouveau)

Alignement des compétences des sociétés anonymes coopératives d'HLM sur celles des sociétés anonymes d'HLM

Commentaire : le présent article vise à faire entrer les sociétés coopératives d'HLM dans un champ de dispositions jusqu'alors réservées aux organismes d'HLM, et dont elles étaient partiellement exclues.

I - UNE POSSIBILITÉ OFFERTE AUX SOCIETES COOPERATIVES DE GERER DES LOGEMENTS DANS DES COPROPRIETES EN DIFFICULTE

A. UNE EXTENSION DES DISPOSITIONS PREVUES POUR LES ORGANISMES D'HLM DABS LA LOI DE 1994 RELATIVE A L'HABITAT


Le I du présent article étend aux sociétés coopératives d'HLM la possibilité de gérer en qualité d'administrateurs de biens, des logements situés dans des copropriétés connaissant des difficultés importantes de fonctionnement ou être syndics de ces copropriétés .

L'article 40 de la loi n°94-624 du 21 juillet 1994 a habilité les organismes d'HLM à gérer, en qualité d'administrateurs de biens, des logements situés dans des copropriétés connaissant des difficultés importantes de fonctionnement ou être syndics de ces copropriétés.

Cette faculté est encadrée grâce à la condition d'un accord du maire de la commune d'implantation et du représentant de l'Etat dans le département.

Le présent article propose d'accorder la même faculté aux sociétés coopératives d'HLM qui ont été, par décision de l'autorité administrative, autorisées à gérer des immeubles en vue de leur location (article L 422-3-2 du code de la construction et de l'habitation).

B. DES CONTRAINTES IMPOSEES PAR LES DISPOSITIONS DE LA LOI "HOGUET"

En matière de gestion pour compte de tiers, des garanties sont exigées des dirigeants en matière de diplôme et d'expérience professionnelle de la gestion immobilière.

Ces exigences résultent des dispositions de la loi n°70-9 du 2 janvier 1970, dite "loi Hoguet", réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce.

L'article 3 cette loi prévoit que les opérations mentionnées ne peuvent être exercées que par les personnes physiques ou morales titulaires d'une carte professionnelle délivrée par le Préfet.

Cette carte est délivrée si certaines conditions sont remplies, et notamment des conditions d'aptitude professionnelle et de garanties financières.

Il faudra donc que les sociétés coopératives, de faible taille, disposent à la fois des qualifications requises pour faire de la prestation de services immobiliers et des garanties financières correspondantes.

II- L'EXTENSION A TOUTES LES SOCIETES COOPERATIVES DES DISPOSITIONS DE LA LOI "MEYER"

A. LES SOCIETES COOPERATIVES QUI REMPLISSENT LES CONDITIONS REQUISES PEUVENT DEJA PRENDRE A BAIL DES LOGEMENS VACANTS EN VUE DE LEUR SOUS-LOCATION


Le II du présent article étend à toutes les sociétés coopératives de production d'HLM, la possibilité offerte aux organismes d'HLM, par la récente loi n°98-87 du 19 février 1998 (dite "loi Meyer"), d'intervenir sur le parc locatif privé en prenant à bail des logements vacants pour les donner en sous-location.

L'article premier de la loi "Meyer" a complété le titre IV du livre IV du code de la construction et de l'habitation par un nouveau chapitre IV, concernant la prise à bail de logements vacants par les organismes d'habitations à loyer modéré.

L'article L. 444-1 de ce nouveau chapitre énumère quatre catégories d'organismes HLM qui pourront intervenir pour prendre à bail des logements vacants.

Il s'agit des principales catégories d'organismes citées à l'article L. 411-2 du code précité, à savoir :

- les offices publics d'aménagement et de construction ;

- les offices publics d'habitation à loyer modéré ;

- les sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré ;

- les sociétés anonymes coopératives de production d'habitations à loyer modéré, visées à l'article L. 422-3-2 du code de la construction et de l'habitat.

Ainsi, seules peuvent recourir au dispositif de la prise à bail les sociétés anonymes coopératives de production d'HLM qui, selon les dispositions de l'article L.422-3-2 du code de la construction et de l'habitat, peuvent par décision de l'autorité administrative, être autorisées à construire, acquérir ou gérer des immeubles en vue de la location et destinés à l'habitation . Cette autorisation ne peut être délivrée qu'après constat de la qualité de leur gestion sur les plans technique et financier. Elles doivent alors procéder à un examen analytique et périodique de leurs comptes et de leur gestion.

B. L'EXTENSION A TOUTES LES SOCIETES COOPERATIVES DES DISPOSITIONS DE LA LOI MEYER NE PEUT ETRE RETENUE

La limitation prévue par la loi "Meyer" est pleinement justifiée : les sociétés coopératives n'ayant pas obtenu d'autorisation pour construire, acquérir ou gérer des immeubles en vue de la location et destinés à l'habitation, ne pourraient offrir de garanties sérieuses de relogement aux sous-locataires, telles qu'elles sont prévues à l'article L. 444-6 du nouveau chapitre IV du titre IV du livre IV du code de la construction et de l'habitation.

Le deuxième alinéa de l'article L. 444-6 impose en effet une obligation à l'organisme HLM : il prévoit que l'organisme d'habitations à loyer modéré doit proposer au sous-locataire qui n'a pas conclu de contrat de location avec le propriétaire, s'il remplit les conditions pour l'attribution d'un logement HLM, la location d'un logement répondant à ses besoins et à ses possibilités. L'offre de relogement soit être présentée trois mois avant l'expiration du contrat conclu par l'organisme HLM avec le propriétaire.

Les sociétés coopératives qui ne seraient pas autorisées à "construire, acquérir ou gérer des immeubles" en vue de la location (article L.422-3-2 du code de la construction et de l'habitat) mais seulement en vue de l'accession à la propriété (article L. 422-3) n'offriraient pas cette garantie.

Partant du constat simple que des organismes n'étant pas autorisés à faire de la location, ne sauraient être autorisés à faire de la sous-location, votre rapporteur vous propose donc de supprimer le II du présent article.

III - UN ASSOUPLISSEMENT DU REGIME D'ADMINISTRATION DES SOCIÉTÉS COOPÉRATIVES D'HLM.


Le III du présent article étend aux sociétés coopératives d'HLM les dispositions de la loi du 13 juillet 1991 d'orientation pour la ville selon lesquelles les sociétés anonymes d'HLM et les sociétés anonymes de crédit immobilier peuvent être administrées par des directoires et conseils de surveillance.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

ARTICLE 38 quater (nouveau)

Simplification de la procédure de transformation des sociétés anonymes coopératives de location-attribution d'HLM en sociétés anonymes coopératives de production d'HLM.

Commentaire : le présent article propose de simplifier la procédure de transformation des sociétés anonymes coopératives de location-attribution d'HLM en sociétés anonymes coopératives de production d'HLM, en supprimant l'agrément du ministre chargé de la construction et de l'habitation.

Les sociétés coopératives de location-attribution se sont vues retirer toute compétence de construction
par la loi n°71-580 du 16 juillet 1971.

L'article L. 422-14 du code de l'habitat et de la construction leur permet, sur agrément du ministre chargé de la construction et de l'habitation, de se transformer en sociétés anonymes de production d'habitations à loyer modéré .

Cette possibilité, offerte pendant un délai d'un an à compter de la date de publication de la loi n°92-643 du 13 juillet 1992 relative à la modernisation des entreprises coopératives, peut se faire sans condition de délai depuis l'entrée en vigueur de la loi n°94-624 du 21 juillet 1994 relative à l'habitat.

Le présent article propose, dans un souci de simplification administrative, de supprimer la procédure d'agrément.

Fin 1995, il ne restait plus que 40 sociétés de location-attribution, dont la plupart ont une activité en voie d'extinction, puisqu'elles gèrent seulement l'encours des emprunts et des prêts passés avant 1971.

Seules une ou deux par an demandent un agrément, qui est parfois un agrément de pure précaution, afin de pouvoir reprendre une activité le moment venu. L'immense majorité des sociétés de location-attribution se sont en effet transformées de longue date.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 38 quinquies (nouveau)

Extension aux sociétés d'économie mixte de l'exonération de taxe départementale de publicité foncière ou de droits départementaux d'enregistrement pour les cessions de logements réalisées
au profit de leur locataires.

Commentaire : le présent article propose d'étendre aux sociétés d'économie mixte l'exonération de taxe départementale de publicité foncière ou de droits départementaux d'enregistrement pour les cessions de logements réalisées au profit de leur locataires.

En vertu de l'article 1594 G du Code général des impôts, les Conseils généraux ont la possibilité d'exonérer de taxe départementale de publicité foncière ou de droits départementaux d'enregistrement les cessions de logements réalisées par les organismes HLM au profit de leurs locataires .

Cette possibilité a été mise en oeuvre dans 56 départements français.

La cession mentionnée au Code général des impôts doit entrer dans le champ d'application de l'article 61 de la loi n°86-1290 du 23 décembre 1986 modifiée, tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière.

Cette loi fixe les dispositions applicables aux cessions pour l'accession à la propriété de certains logements sociaux :

- les organismes d'habitation à loyer modéré peuvent vendre leurs logements à des sociétés d'économie mixte . Les locataires en place continuent à bénéficier des conditions antérieures de location (article L. 443-11 du code de l'habitat et de la construction).

- les sociétés d'économie mixte peuvent vendre au profit de leurs locataires, suivant les mêmes modalités que celles imposées aux organismes HLM, les logements acquis suite à une telle vente (article L.443-15-2 du code de la construction et de l'habitation).

Le présent article a pour objet d'étendre la faculté offerte aux départements d'exonérer de taxe de publicité foncière ou de droits départements d'enregistrement ces cessions réalisées par les sociétés d'économie mixte .

Cette mesure est une mesure de bon sens, s'agissant d'opérations qui sont exactement de même nature, qu'elles soient réalisées par des organismes d'habitation à loyer modéré ou par des sociétés d'économie mixte.

Il faut noter que, s'agissant d'une faculté offerte aux conseils généraux, ces exonérations ne sont pas compensées par l'Etat.



Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

TITRE IV

DISPOSITIONS FISCALES ET FINANCIERES RELATIVES A LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ET A LA SANTE PUBLIQUE

ARTICLE 39

Modification des modalités d'évaluation de la puissance administrative de certaines catégories de véhicules

Commentaire : le présent article a pour objet de modifier la formule de calcul de la puissance administrative des voitures particulières, à la suite du rapport demandé par votre commission, et qui figure à l'article 117 de la loi de finances pour 1997.

Les règles actuelles de la puissance fiscale des véhicules, qui est utilisée pour l'établissement de la vignette, de la taxe sur les cartes grises et de la taxe sur les véhicules de sociétés, ont été fixées pour la première fois en 1956 et ont été profondément modifiées en 1977. Elles sont extrêmement complexes, puisqu'elles reposent, non sur la performance globale du véhicule, mais sur de multiples paramètres de construction.

Elles ont donné lieu à de multiples difficultés juridiques, tenant notamment à la conformité de ces règles de calcul au droit communautaire, et ne sont pas neutres suivant la nature du carburant utilisé par le véhicule puisque les cylindrées diesel ont été affectées en 1956 d'une minoration de 30 %.

Ces raisons ont conduit votre commission des finances à demander au Gouvernement un rapport sur le mode de calcul de la puissance fiscale des véhicules automobiles ainsi que sur les conditions d'une modification de ces règles de calcul de façon à prendre en compte les caractéristiques techniques des différentes catégories de véhicules et à tendre vers la neutralité. Ce fut l'objet de l'article 117 de la loi de finances pour 1997 qui fixait au 30 juin 1997 la date de remise de ce rapport.

Ce rapport, déposé au cours du mois de janvier dernier sur le bureau des deux assemblées, concluait à la nécessité d'une modification de la formule de calcul de la puissance administrative des véhicules, afin de prendre en compte, d'une part, la puissance réelle des véhicules, et, d'autre part, le niveau de leurs émissions de gaz carbonique . Le rapport préconisait en outre de n'appliquer la nouvelle formule qu'aux nouveaux véhicules immatriculés à compter du 1 er juillet 1998 et de maintenir constant le produit global des taxes assises sur cette formule.

C'est l'objet du présent article.

Conformément au souhait du Sénat, un souci de neutralité a guidé l'action du Gouvernement dans sa recherche d'une nouvelle formule de calcul de la puissance fiscale des véhicules, souci qui s'est décliné selon quatre axes :

Une formule dont les paramètres de calcul sont neutres.

Une formule neutre pour les modèles de véhicules les plus courants vendus en France.

Une formule fiscalement neutre : le produit global de chacune des trois taxes assises sur la puissance fiscale est globalement préservé.

Une formule neutre pour les véhicules existants.

I - LA PUISSANCE ADMINISTRATIVE DES VÉHICULES SERT AU CALCUL DE DEUX TAXES LOCALES ET D'UNE TAXE NATIONALE

La puissance administrative des véhicules automobiles est l'élément à partir duquel sont calculées trois taxes :

- la taxe sur les véhicules des sociétés,

- la taxe différentielle sur les véhicules à moteur ou " vignette ",

- la taxe sur les certificats d'immatriculation des véhicules, ou taxe sur les cartes grises.

La fiscalité du véhicule


Taxe sur les véhicules des sociétés


Créée par la loi du 30 juin 1956 portant institution d'un fonds national de solidarité, son régime est fixé aux articles 1010 et 1010 A du code général des impôts.

Elle vise les véhicules immatriculés dans la catégorie des voitures particulières, possédés ou utilisés par les sociétés. Elle est annuelle et n'est pas déductible pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés.

Son tarif est lié à la puissance fiscale des véhicules :

6.800 francs pour les voitures n'excédant pas 7 CV de puissance fiscale,

14.800 francs pour les véhicules de 8 CV fiscaux et plus.

Son produit est affecté au budget général :

produit collecté en 1996 : 2,8 milliards de francs

évaluation proposée pour 1997 : 2,62 milliards de francs

(dont 250 millions de moindres recettes au titre de l'exonération accordée aux véhicules de sociétés fonctionnant au GPL ou au GNV - mesure de la loi sur l'air).

Taxe différentielle sur les véhicules à moteur (" Vignette ")

Cette taxe, dont le régime est fixé aux articles 1599 C à 1599 J du CGI, est perçue depuis le 1 er janvier 1984 au profit des départements où sont immatriculés les véhicules.

Elle s'applique à tous les véhicules particuliers et utilitaires de moins de 25 ans d'âge, à l'exception des poids lourds qui sont soumis à la " taxe à l'essieu 31( * ) ".

Le tarif annuel de la taxe est arrêté par chaque conseil général.

Ce tarif est lié à la puissance fiscale des véhicules, cette puissance déterminant 10 catégories différentes de véhicules : 1 à 4 CV, 5 à 7 CV, 8 et 9 CV, 10 et 11 CV, 12 à 14 CV, 15 et 16 CV, 17 et 18 CV, 19 et 20 CV, 21 et 22 CV, 23 CV et plus.

Le tarif est réduit de moitié pour les véhicules de plus de 5 ans et devient symbolique au-delà de 20 ans. Les variations de tarif d'un département à l'autre sont significatives, allant jusqu'à plus ou moins 20 % par rapport à la moyenne nationale.

Son produit alimente les budgets des départements :

recettes perçues en 1995 : 13,43 milliards de francs,

recettes perçues en 1996 : 13,99 milliards de francs.

Taxe sur les certificats d'immatriculation des véhicules (" cartes grises ")

Cette taxe, dont le régime est fixé aux articles 1599 quindecies à 1599 novodecies du CGI, est perçue depuis le 1 er janvier 1983 au profit des régions.

Elle s'applique à tous les véhicules à moteur avec des régimes particuliers pour certaines catégories de véhicules : véhicules utilitaires supérieurs à 3,5 tonnes, véhicules agricoles, motocyclettes, remorques.

Son tarif est proportionnel à la puissance fiscale des véhicules.

Son taux unitaire est arrêté chaque année par délibération du conseil régional. En 1996, ce taux se situait entre 100 et 200 francs, avec une moyenne d'environ 160 francs. Il est réduit de moitié pour les véhicules de plus de 10 ans.

Son produit alimente les budgets des régions :

recette perçue en 1995 : 7,31 milliards de francs,

recette perçue en 1996 : 8,07 milliards de francs.

II - LA FORMULE ACTUELLE DE CALCUL DE LA PUISSANCE ADMINISTRATIVE DES VÉHICULES EST OBSOLÈTE

A. GENÈSE DE LA FORMULE ACTUELLE DE CALCUL DE LA PUISSANCE ADMINISTRATIVE DES VÉHICULES


Les règles permettant de déterminer la puissance fiscale des véhicules - à partir de laquelle seront calculées les trois taxes - figuraient jusqu'à présent dans des circulaires ministérielles 32( * ) , auxquelles l'article 35 de la loi de finances rectificative pour 1993 a donné valeur législative 33( * ) .

Le rapport rédigé par le Gouvernement sur les modalités actuelles de calcul de la puissance fiscale des véhicules automobiles, en application de l'article 117 de la loi de finances pour 1997, rappelle brièvement la genèse de ces règles :

" La circulaire du 28 décembre 1956, élaborée peu après l'instauration de la vignette fiscale et qui continue à s'appliquer aujourd'hui à certaines catégories de véhicules, définit la puissance administrative des moteurs thermiques comme proportionnelle à la cylindrée du moteur, la formule applicable au diesel comportant un abattement de 30 % pour compenser la plus forte cylindrée nécessaire du diesel à puissance réelle comparable à celle de l'essence sur un même modèle.

" Au moment du premier choc pétrolier de 1973, de nombreuses critiques ont été formulées contre le mode de calcul contenu dans la circulaire de 1956. Un consensus des milieux politiques et industriels est apparu sur la nécessité d'adopter une nouvelle formule incitant aux économies d'énergie et laissant aux constructeurs une plus grande souplesse dans la conception de la chaîne cinématique (moteur et transmission).

" Après plus de deux années de discussions, le ministre de l'équipement a publié la circulaire du 23 décembre 1977. Le contenu de celle-ci n'a pas été significativement modifié depuis et le mode de calcul qu'elle définit est toujours applicable pour les voitures particulières. "


La formule actuelle de calcul déterminant la puissance fiscale des voitures particulières est donc fixée par la circulaire du 23 décembre 1977. Elle repose sur une combinaison de paramètres dont la valeur est fonction du carburant utilisé (essence ou gazole), de la cylindrée du véhicule exprimée en cm 3 du modèle, ainsi que d'un coefficient caractérisant le mode de transmission, exprimé en km/h, d'une boite de vitesses.

Cette formule est la suivante :



Dans cette formule, m est un coefficient qui vaut 1 pour l'essence et 0,7 pour le gazole , C représente la cylindrée du moteur et K est un paramètre caractérisant la transmission du mouvement.

B. LES CRITIQUES ADRESSÉES À LA FORMULE ACTUELLE

Outre sa complexité, cette formule suscite trois sortes de critiques :

Le paramètre de la cylindrée ne permet pas de prendre en compte les innovations technologiques apparaissant au fur et à mesure . C'est le cas en particulier des turbos, des compresseurs ou des multi-soupapes, innovations grâce auxquelles il est possible, à cylindrée inchangée et donc sans impact sur la puissance fiscale, d'accroître les performances d'un moteur. On voit ainsi apparaître, avec la même puissance administrative, des voitures de puissance réelle et de classes très différentes.

Par ailleurs, comme l'indique le rapport du gouvernement précité, " la formule actuelle dépend de paramètres de construction très précis correspondant à la technologie des années 1970 ; elle est donc peu adaptée aux modèles actuels et inapplicable dans un certain nombre de cas. "

En conséquence, " tous les véhicules dont la technologie de construction n'entre pas explicitement dans les catégories limitatives définies par la circulaire de 1977 relèvent de la circulaire du 28 décembre 1956. C'est en particulier le cas des véhicules équipés de boîtes manuelles ayant un nombre de rapports supérieur à cinq vitesses ou de boîtes automatiques disposant de plus de quatre vitesses. Il en résulte que les véhicules modernes à six vitesses, plus économes et plus silencieux que ceux dotés d'une boîte à cinq rapports sont pénalisés d'au moins 3 CV ", ajoute le rapport qui souligne que la formule de 1977 est globalement pénalisante pour les voitures à boîte de vitesses automatique.

Enfin, comme l'avait déjà relevé votre commission des finances à plusieurs reprises 34( * ) , les véhicules diesel bénéficient , à cylindrée égale, d'un double avantage par rapport aux voitures à moteur essence :

un coefficient 0,7 au lieu de 1,

un paramètre K plus favorable, les moteurs diesel tournant en général moins vite que les moteurs essence.

Par le jeu de ces deux facteurs, la puissance fiscale d'un moteur diesel est de 20 à 30 % inférieure à celle d'un moteur essence correspondant 36( * ) , ce qui signifie un écart de 1 à 2 CV dans le bas de gamme, de 2 à 3 CV dans le milieu de gamme et de 3 à 5 CV dans le haut de gamme.

Ce régime de faveur avait, lors de sa confirmation en 1977, pour objet de prendre en compte la moindre consommation des véhicules diesel par rapport à un moteur à essence comparable. Il trouvait sa logique dans le contexte énergétique de l'époque qui rendait la France étroitement dépendante des importations de pétrole en provenance des pays de l'OPEP.

Aujourd'hui, bien que le souci d'économiser l'énergie demeure, plus rien ne justifie cette discrimination positive en faveur des véhicules diesel, qui s'ajoute au demeurant à une fiscalité des carburants particulièrement favorable au gazole. Le contexte a en effet beaucoup évolué depuis sa dernière définition technique en 1977, avec en particulier le développement d'un parc de voitures diesel très important. Les dernières statistiques du Comité français des constructeurs d'automobiles indiquent ainsi que le moteur diesel équipait 30,8 % des voitures particulières en circulation au 1 er janvier 1998 contre 29,3 % au 1 er janvier 1997. Rappelons que ce parc était inexistant en 1977.

Enfin, le rapport du gouvernement observe que la préoccupation énergétique introduite dans la formule instituée en 1977 s'est traduite par une baisse générale des puissances administratives et a engendré une situation " d'autant plus floue que la très grande majorité des voitures neuves se trouve en dessous de 8 CV, zone dans laquelle la différenciation du barème de la taxe différentielle est faible, alors qu'à partir de 8 CV, la progressivité du barème, qui ne concerne que très peu de véhicules, est très importante. "

C'est d'autant plus paradoxal que l'objectif du choix fait en 1956 n'était pas de faire évoluer la conception ou le marché des véhicules, mais de créer, s'agissant de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur, une imposition d'inspiration sociale, frappant plus fortement les grosses voitures que les petites et les récentes que les anciennes.

III - LA FORMULE DE CALCUL PROPOSÉE PAR LE PRÉSENT ARTICLE TENTE DE RÉPONDRE À UNE EXIGENCE DE NEUTRALITÉ GLOBALE...

Conformément au souhait du Sénat, la recherche par le Gouvernement d'une nouvelle formule de calcul pour la puissance administrative des véhicules a été guidée par une exigence de neutralité. Celle-ci est déclinée selon quatre axes :

La neutralité des paramètres de calcul.

Le Gouvernement a recherché des paramètres de calcul qui ne dépendent ni du carburant utilisé, ni de la technologie du moteur, ni du mode de transmission du véhicule.

Il s'est en outre efforcé de faire dépendre la formule de paramètres définis et mesurés par une directive technique de l'Union européenne.

La nouvelle formule de calcul proposée est la suivante :



P A désigne la puissance administrative exprimée en chevaux-vapeur, arrondie à l'entier le plus proche ;

P désigne la puissance réelle du moteur exprimée en kilowatts et mesurée selon les conditions annexées à la directive communautaire n° CE 88/195 du 24 mars 1988 ;

CO 2 désigne les émissions de dioxyde de carbone exprimées en grammes par kilomètre et mesurées dans les conditions annexées à la directive communautaire n° CE 93/116 du 17 décembre 1993.

Il faut saluer la prise en compte au numérateur des émissions de dioxyde de carbone : elle marque le souci de la France de lutter contre l'effet de serre. Les véhicules diesel y trouveront leur intérêt puisqu'ils émettent des quantités plus faibles de CO 2 que les voitures à essence, ce qui compensera en partie la perte de l'abattement de 30 % dont ils bénéficiaient dans l'ancienne formule. On peut néanmoins regretter que d'autres émissions polluantes comme le dioxyde d'azote (NOX) ou les particules fines, dont les moteurs diesel sont de gros producteurs, ne soient pas concernées.

Le choix des coefficients numériques a en outre été effectué en tenant compte de deux exigences :

L'absence de bouleversement pour les modèles les plus courants vendus en France.

Les simulations jointes en annexe du rapport du Gouvernement ont pu être établies grâce à un fichier de 889.352 véhicules dont les caractéristiques techniques et le résultat de CO 2 étaient disponibles.

Le tableau ci-après indique le nombre de véhicules par tranches de puissances fiscales :



On constate que la tranche fiscale " 5 à 7 CV " qui regroupe 76 % des voitures particulières de l'échantillon est celle dont l'effectif est le moins affecté par la modification du calcul de la puissance administrative. Il ne diminue que de 16 % au profit des tranches voisines (ce qui représente 12 % de l'échantillon).

Le tableau fait en revanche apparaître des variations assez sensibles dans les autres tranches de taxation.

L'application de la nouvelle formule de calcul induirait ainsi 58.757 immatriculations supplémentaires dans la tranche des véhicules dont la puissance fiscale est inférieure ou égale à 4 CV (soit une progression de 46 %) et 72.651 dans la tranche " 8 et 9 CV " (soit une progression de 256 %).

Au delà de 10 CV fiscaux, toutes les tranches perdraient des immatriculations sauf la tranche " 21 et 22 CV ".

Cette situation est confirmée par l'analyse de l'impact de la réforme sur les principaux modèles vendus figurant dans le tableau suivant.



IMPACT DE LA RÉFORME SUR LES MODÈLES DE VÉHICULES LES PLUS VENDUS
(BASE : IMMATRICULATIONS JANVIER-SEPTEMBRE 1997)


Marque


Modèle

Boite de vitesse manuelle (M) ou automa-
tique (A)

Carbu-ration
essence (ES)
ou
gazole (GO)


turbo

(Oui/
Non)

Cylin-drée

(cm3)

Puissance maximale

(kW)

CO2

(g/km)

Puissance adminis-trative

Nouvelle puissance adminis-trative


Différence

RENAULT

TWINGO

M5

ES

N

1149

43

143

4

4

0

RENAULT

CLIO

M5

ES

N

1149

43

144

4

4

0

RENAULT

MÉGANE

M5

GO

O

1870

68,5

183

5

6

+ 1

RENAULT

CLIO

M5

GO

N

1870

47

165

6

5

- 1

RENAULT

MEGANE

M5

ES

N

1598

66

193

7

7

0

RENAULT

CLIO

M5

ES

N

1149

43

149

5

4

- 1

PEUGEOT

106

M5

ES

N

954

37

149

4

4

0

PEUGEOT

106

M5

ES

N

1124

44

159

5

5

0

RENAULT

LAGUNA

M5

GO

O

2188

83

192

6

7

+ 1

CITROEN

SAXO

M5

ES

N

954

37

149

4

4

0

CITROEN

SAXO

M5

ES

N

1124

44

159

5

5

0

RENAULT

MEGANE

M5

GO

N

1870

47

179

6

5

- 1

RENAULT

LAGUNA

M5

ES

N

1783

68

202

7

7

0

RENAULT

ESPACE

M5

GO

O

2188

82,8

216

7

8

+ 1

FORD

KA

M5

ES

N

1299

44

154

5

5

0

PEUGEOT

406

M5

GO

O

1905

66

181

6

6

0

RENAULT

MEGANE

M5

ES

N

1598

66

176

7

6

- 1

OPEL

CORSA

M5

ES

N

1389

44

175

7

5

- 2

PEUGEOT

406

M5

ES

N

1761

81

202

7

8

+ 1

PEUGEOT

306

M5

GO

N

1905

50

169

6

5

- 1

PEUGEOT

306

M5

GO

O

1905

66

175

6

6

0

RENAULT

SAFRANE

M5

GO

O

2188

82,8

195

6

8

+ 2

PEUGEOT

106

M5

GO

N

1527

42

139

5

4

- 1

RENAULT

LAGUNA

M5

GO

N

2188

61

190

7

6

- 1

RENAULT

CLIO

M5

ES

N

1390

55

167

7

5

- 2

OPEL

CORSA

M5

GO

N

1686

44

139

5

4

- 1

RENAULT

MEGANE

M5

ES

N

1390

55

180

6

6

0

PEUGEOT

406

M5

GO

O

2088

80

184

6

7

+ 1

PEUGEOT

306

M5

ES

N

1360

55

176

6

6

0

CITROEN

SAXO

M5

GO

N

1527

42

139

5

4

- 1

VOLKSWAGEN

PASSAT

M5

GO

O

1896

81

146

5

6

+ 1

FORD

FIESTA

M5

ES

N

1299

44

166

5

5

0

PEUGEOT

306

M5

ES

N

1587

65

180

7

6

- 1

FIAT

BRAVA

M5

ES

N

1581

76

197

7

7

0

.../...


Marque


Modèle

Boite de vitesse manuelle (M) ou automa-
tique (A)

Carbu-ration
essence (ES)
ou
gazole (GO)


turbo

(Oui/
Non)


Cylin-drée

(cm3)


Puissance maximale

(kW)


CO2

(g/km)


Puissance adminis-trative


Nouvelle puissance adminis-trative


Différence

OPEL

CORSA

M5

ES

N

1195

33

158

5

4

- 1

RENAULT

TWINGO

M5

ES

N

1149

43

148

5

4

- 1

FIAT

BRAVA

M5

GO

O

1910

74

174

5

7

+ 2

FORD

MONDEO

M5

GO

O

1753

66

169

5

6

+ 1

OPEL

VECTRA

M5

ES

N

1598

74

191

7

7

0

FORD

FIESTA

M5

GO

N

1753

44

161

6

5

- 1

RENAULT

MEGANE

M5

ES

N

1598

66

172

7

6

- 1

VOLKSWAGEN

GOLF

M5

GO

O

1896

66

126

5

5

0

RENAULT

MEGANE

M5

GO

O

1870

68

166

5

6

+ 1

PEUGEOT

106

M5

ES

N

1360

55

164

5

5

0

SEAT

IBIZA

M5

GO

N

1896

47

165

6

5

- 1

FORD

MONDEO

M5

ES

N

1796

85

181

7

7

0

FIAT

MAREA

M5

GO

O

1910

74

172

6

6

0

RENAULT

ESPACE

M5

ES

N

1988

83,

227

10

8

- 2

VOLKSWAGEN

POLO

M5

ES

N

1390

44

151

6

5

- 1

FORD

KA

M5

ES

N

1299

44

163

6

5

- 1

NISSAN

MICRA

M5

ES

N

998

40

152

4

4

0

FIAT

PUNTO

M5

GO

O

1698

46

173

6

5

- 1

NISSAN

PRIMERA

M5

GO

O

1974

66

184

6

6

0

CITROEN

XSARA

M5

GO

N

1905

50

169

6

5

- 1

CITROEN

SAXO

M5

ES

N

1360

55

164

6

5

- 1

SEAT

IBIZA

M5

ES

N

1390

44

156

6

5

- 1

MERCEDES-BENZ

CLASSE C

M5

GO

N

2155

70

191

7

7

0

VOLKSWAGEN

PASSAT

M5

GO

O

1896

66

149

5

6

+ 1

RENAULT

TWINGO

A3

ES

N

1149

43

166

5

5

0

BMW

SERIE 5

M5

GO

O

2497

105

207

7

9

+ 2

CITROEN

SAXO

M5

GO

N

1527

42

134

4

4

0

FORD

ESCORT

M5

GO

O

1753

66

172

6

6

0

OPEL

ASTRA

M5

GO

O

1700

50

169

5

5

0

OPEL

CORSA

M5

ES

N

1195

33

161

5

4

- 1

PEUGEOT

406

M5

GO

O

1905

55

183

6

6

0

AUDI

A4

M5

GO

O

1896

81

148

5

6

+ 1

RENAULT

LAGUNA

M5

ES

N

1998

83

207

9

8

- 1

OPEL

TIGRA

M5

ES

N

1389

66

176

6

6

0

FORD

ESCORT

M5

ES

N

1597

66

188

7

6

- 1

RENAULT

CLIO

A3

ES

N

1390

55

187

6

6

0

FORD

FIESTA

M5

ES

N

1242

55

166

6

5

- 1

RENAULT

MEGANE

M5

GO

O

1870

72

139

5

6

+ 1

OPEL

VECTRA

M5

GO

O

1994

60

162

5

6

+ 1

OPEL

ASTRA

M5

GO

O

1700

50

174

5

5

0

FORD

MONDEO

M5

GO

O

1753

66

180

5

6

+ 1

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie,
Ministère de l'équipement, des transports et du logement.

La préservation du produit global de chacune des trois taxes assises sur la puissance fiscale.

Les simulations font apparaître une très légère augmentation du produit de la vignette obtenu par application de la nouvelle formule de calcul, ainsi que des transferts de charge fiscale du fait de changements de tranche de taxation.

S'agissant de la taxe sur les certificats d'immatriculation, la perte (théorique) est de l'ordre de 25 millions de francs au niveau national, sur un produit total de 8,07 milliards de francs en 1996.

Enfin, le produit de la taxe sur les véhicules de sociétés devrait augmenter du fait du glissement d'un certain nombre de véhicules vers le tarif le plus élevé.

L'application de la nouvelle formule aux seuls véhicules nouveaux immatriculés à compter du 1 er juillet 1998.

Il ne pouvait pas être envisagé d'appliquer la nouvelle formule de calcul aux voitures déjà en circulation dès lors que les paramètres de cette formule ne sont exigibles que depuis le 1 er janvier 1997, qu'ils ne peuvent être calculés a posteriori et que les voitures déjà immatriculées doivent conserver leur puissance administrative telle que fixée au moment de leur mise en circulation, de façon à éviter toute fraude et toute altération des ressources des collectivités publiques bénéficiaires des taxes.

Le nouveau dispositif ne concernera donc que les voitures mises en circulation à l'état neuf à compter du 1 er juillet 1998, soit environ 1,8 million d'unités en année pleine sur un parc de l'ordre de 25,9 millions de voitures particulières selon les dernières statistiques du Comité des constructeurs français d'automobiles (CCFA).

IV - TOUTEFOIS LA NOUVELLE FORMULE N'EST PAS NEUTRE POUR LES RECETTES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Aux termes de l'article L. 1614-5 du code général des collectivités territoriales, " les pertes de produit fiscal résultant, le cas échéant, pour les départements ou les régions, de la modification , postérieurement à la date de transfert des impôts et du fait de l'Etat, de l'assiette ou des taux de ces impôts sont compensées intégralement, collectivité par collectivité , soit par des attributions, de dotation générale de décentralisation, soit par des diminutions des ajustements prévues au 2 ème alinéa de l'article L. 1614-4 ".

Cette disposition de principe du code général des collectivités territoriales, qui se trouve au coeur des règles de la décentralisation, est, en l'absence de disposition législative contraire, applicable de droit en cas de modification de la définition législative de l'assiette des impôts transférés . Or, cette réforme modifie l'assiette tant de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur, la " vignette " dont le produit est perçu par les conseils généraux, que celle de la taxe sur les certificats d'immatriculation, la taxe sur les " cartes grises ", dont le produit est perçu par les conseils régionaux.

A cet égard, les seules informations dont disposait la représentation nationale pour apprécier l'incidence de cette nouvelle formule de calcul de la puissance fiscale sur le niveau des recettes que perçoivent les conseils généraux et les conseils régionaux, au titre respectivement de la " vignette " et de taxe sur les " cartes grises ", figurent à l'annexe 3 du rapport déposé par le Gouvernement en application de l'article 117 de la loi de finances pour 1997.

Or, ces éléments de chiffrage, présentés au niveau national, font apparaître des variations non négligeables de la répartition du produit de la " vignette " entre les différentes tranches de puissance fiscale (forte progression du produit de la tranche 8 et 9 CV et diminution du produit de la tranche 5 à 7 CV notamment). Le même rapport, en ce qui concerne la taxe sur les cartes grises, estime que cette réforme entraînera " une perte théorique " de 25 millions de francs au niveau national (sur un montant global de 8 milliards de francs).

A cet égard, si la neutralité au niveau national de la nouvelle formule au regard du produit total de la vignette et de la taxe sur les cartes grises semble assurée , les variations du produit résultant des différentes tranches de la " vignette " et de cette taxe sont susceptibles d'entraîner des variations du niveau des recettes provenant de ces impositions, en fonction de la composition du flux annuel d'immatriculations d'un département ou d'une région à l'autre .

C'est pourquoi votre rapporteur a demandé au Gouvernement de procéder à une présentation par collectivité concernée de l'analyse présentée au niveau national . La réponse à cette demande n'ayant été fournie qu'au cours de la matinée du 29 avril, soit pendant le déroulement de la réunion de votre commission consacrée à l'examen des articles du présent projet de loi, votre commission a décidé de réserver son vote sur cet article jusqu'à l'examen des amendements extérieurs à ce projet de loi afin de permettre à son rapporteur de procéder à une étude approfondie de ce document.

Votre commission a néanmoins souhaité que les principales informations de ce document 36( * ) , qui ne porte que sur la vignette, soient publiées dans le cadre du présent rapport.



V. - LE DÉBAT SUR LES FAIBLES TARIFS DE LA VIGNETTE PRATIQUÉS PAR CERTAINS DÉPARTEMENTS DOIT RESPECTER LES PRINCIPES DE LA DECENTRALISATION.

A. RAPPEL DE LA SITUATION : UNE VOLONTÉ D'ALLÉGEMENT DE LA FISCALITÉ RÉCEMMENT " EXPLOITÉE " PAR CERTAINES SOCIÉTÉS


La vignette représente pour les départements une ressource fiscale dont le produit global s'élève à 14 milliards de francs en 1997.

Depuis deux ans (1996 et 1997) la politique volontariste de faibles tarifs de vignette pratiquée par le département de la Marne (notamment car le département du Var et dans une moindre proportion celui de la Haute Garonne ont aussi pratiqué cette politique) depuis 1989 est à l'origine d'un phénomène évident " migration fiscale ", se traduisant par la délocalisation de certaines flottes de véhicules (en particulier les véhicules appartenant à des sociétés de location et dans une mesure bien inférieure les véhicules utilitaires).

1. Les faits

a) Les tarifs

Le tarif de base de la vignette de ces départements :

Marne : 170 F en 1989, 150 F en 1990, 136 F à partir de 1991 puis léger relèvement à 142 F en 1996 et à 146 F en 1997 37( * ) .

Soit, au terme de cette baisse, un tarif qui est, en moyenne, près de moitié plus faible à celui pratiqué par les autres départements. Le tarif de base moyen national étant de 216 F en 1989, 219 F en 1990, 223 F en 1991, 228 F en 1992 pour atteindre 263 F en 1997 .

Var : 170 F en 1989, 154 F en 1990, 146 F à partir de 1991 puis relèvement à 154 F en 1995 pour atteindre 183 F en 1997 .

Haute Garonne : tarif de base maintenu à 200 F de 1989 à 1993 , puis relevé légèrement chaque année pour atteindre 218 F en 1997 .

b) Le flux d'immatriculation de voitures particulières neuves

Il est manifeste que depuis 1996, le département de la Marne connaît une véritable explosion du nombre des immatriculations de voitures particulières neuves. Le flux d'immatriculation annuel dans ce département s'établissait en effet, jusqu'en 1995 , dans une fourchette allant de 18.665 véhicules (1993) à 25.418 véhicules (1989), correspondant à une moyenne annuelle de 22.850 sur la période 1989-1995.

Puis, ce flux s'est élevé à 110.802 en 1996 et à 165.614 en 1997.
Cette progression fulgurante (près de 625 % en deux ans) traduit, malgré sa découverte tardive, l'exploitation de ce bas tarif de vignette, par certaines sociétés et tout particulièrement les sociétés de location de véhicules.

Cette évolution se traduit évidemment par la diminution du nombre d'immatriculations de voitures particulières neuves dans un certain nombre de départements . Cette situation est d'autant plus perceptible que ce phénomène s'est cumulé, en 1997, avec la dégradation de la situation du marché de l'automobile, le nombre d'immatriculations de voitures particulières neuves ayant reculé de 19,65% par rapport à 1996 (1,713 millions de véhicules en 1997 contre 2,132 millions en 1996).

Bien qu'il soit difficile d'isoler exactement l'effet de la délocalisation des immatriculations des évolutions spontanées du marché automobile dans chaque département, une appréciation peut cependant être portée sur ce phénomène en comparant la moyenne du nombre d'immatriculations des deux années 1996 et 1997 à celle des années 1989 à 1995.

Cette analyse, qui permet de " lisser " en partie les effets du recul du marché de l'automobile en 1997 fait clairement ressortir que ce mouvement touche plus particulièrement certains départements. La baisse tendancielle au cours des deux années 1996 et 1997 est en effet particulièrement marquée pour les départements de la région parisienne , les Hauts de Seine , Paris , le Val d'Oise , la Seine Saint Denis , le Val de Marne et l'Essonne ainsi que dans un certain nombre d'autres départements comme le Doubs , le Rhône , le Nord , la Gironde ou les Alpes Maritimes .



Source : Commission des Finances à partir des données fournies par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et le ministère de l'équipement, des transports et du logement.

c) L'impact sur les recettes fiscales des départements et des régions

S'agissant d'un flux, ce mouvement de délocalisation se traduit bien entendu, mais de façon moins évidente, dans le niveau des recettes fiscales (sachant que la direction générale des collectivités locales -DGCL- du ministère de l'intérieur n'a pas encore fini le recensement pour 1997).

En effet, " l'effet stock " joint dans un certain nombre de départements à " l'effet taux ", amortit l'effet de la délocalisation des immatriculations sur les recettes des départements et des régions. L'impact de cette délocalisation apparaît surtout dans la progression des recettes de la vignette du département de la Marne et, corrélativement, dans celle des recettes de la taxe sur les cartes grises de la région Champagne-Ardenne.

Dans le premier cas, les chiffres fournis par la DGCL font apparaître qu'entre 1995 et 1996 le produit de la vignette de la Marne est passé de 91 millions de francs à près de 142 millions de francs (sur un total national de 14 milliards de francs). Les estimations dont dispose votre commission pour les recettes de 1997 indiquent que celles-ci s'élèveraient à près 170 millions de francs .

Dans le deuxième cas, la forte progression du nombre des immatriculations de voitures particulières neuves dans le département de la Marne entraîne un fort accroissement des recettes de la taxe sur les cartes grises de la région Champagne-Ardenne . Ces recettes sont en effet passées d'un montant de 161 millions de francs en 1995 à 241,8 millions de francs en 1996 et de 311,3 millions de francs en 1997 .



TAXE DIFFÉRENTIELLE SUR LES VÉHICULES À MOTEUR (OU VIGNETTE)

(en francs)

Départements

1984

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Ain

68.765.726

102.841.927

110.556.264

113.427.036

114.567.996

119.663.299

122.303.201

128.402.180

Aisne

70.857.876

95.691.940

101.300.059

102.299.532

109.192.223

110.757.675

112.607.342

114.907.958

Allier

54.699.336

70.538.560

70.329.319

70.541.219

76.250.811

80.247.839

82.327.338

84.522.381

Alpes-Hte-Provence

20.610.187

32.184.306

32.409.648

32.804.118

32.561.053

33.406.206

33.654.208

34.440.672

Hautes-Alpes

18.945.181

26.521.493

28.236.553

28.735.826

30.852.026

32.946.933

33.767.168

35.915.515

Alpes-Maritimes

151.877.495

217.750.736

233.189.988

216.948.984

263.501.071

248.204.782

247.567.944

253.855.141

Ardèche

37.999.075

54.654.399

55.592.459

57.921.219

59.883.231

62.842.167

63.844.447

66.974.878

Ardennes

38.287.714

50.445.232

51.356.047

53.314.446

54.106.849

56.965.331

60.181.313

62.919.358

Ariège

19.902.346

28.861.187

29.218.013

30.073.709

31.580.908

34.991.719

35.976.207

38.039.880

Aube

44.206.942

62.470.035

64.859.164

66.839.515

68.215.130

70.484.018

70.412.553

72.282.130

Aude

43.110.973

67.308.436

69.400.291

68.987.134

68.774.537

70.898.596

69.906.615

71.521.063

Aveyron

39.024.746

53.085.764

54.385.868

56.858.460

57.642.779

59.893.112

61.071.992

63.974.632

Bouches-du-Rhône

259.778.307

359.514.004

361.287.896

364.695.977

355.791.223

362.745.619

361.222.732

398.672.034

Calvados

77.154.341

95.475.647

99.024.004

102.984.954

105.681.354

110.376.084

117.113.877

121.565.833

Cantal

21.639.352

31.382.107

32.743.860

33.027.548

34.556.649

39.124.622

40.652.176

41.364.808

Charente

52.579.303

69.502.046

72.996.165

76.123.198

77.471.034

83.076.746

82.457.293

82.228.438

Charente-Maritime

95.942.311

111.060.207

116.368.294

121.733.214

124.226.267

129.215.812

132.918.198

140.955.425

Cher

45.356.546

65.028.780

65.253.525

69.410.336

70.312.520

73.757.687

75.467.664

77.328.119

Corrèze

36.950.265

53.036.365

54.471.921

55.609.928

56.061.296

57.096.743

57.903.535

59.463.330

Côte d'Or

74.213.878

105.041.167

109.284.874

113.954.486

115.849.254

119.553.372

117.783.313

119.468.175

Côtes d'Armor

71.803.385

105.340.181

109.246.234

113.904.912

117.048.575

124.579.384

127.635.330

136.323.596

Creuse

18.227.247

25.063.284

26.011.952

26.545.782

27.039.307

28.419.679

28.835.264

29.212.842

Dordogne

61.870.708

84.834.401

84.526.139

85.197.910

89.633.090

98.348.867

98.017.843

99.123.960

Doubs

71.729.139

118.088.789

113.627.023

111.463.062

111.284.926

114.956.550

116.515.074

120.830.506

Drôme

68.317.914

93.971.684

101.980.695

104.303.572

105.244.841

108.535.503

108.176.844

111.589.303

Eure

70.627.040

100.800.741

103.048.851

107.855.999

112.308.824

117.823.094

120.909.516

123.976.389

Eure-et-Loir

55.032.595

85.261.179

88.249.415

92.818.013

95.832.268

99.048.447

100.921.954

105.162.585

Finistère

111.373.832

154.069.558

160.050.629

165.381.702

169.086.028

178.340.996

187.231.202

198.415.673

Gard

84.829.203

124.396.701

127.776.975

128.753.439

142.302.202

149.641.234

151.803.205

158.648.105

Haute-Garonne

125.651.988

195.379.809

183.028.930

185.114.859

187.863.975

194.413.261

198.642.137

204.095.466

Gers

28.030.797

37.433.260

36.893.152

37.041.840

38.483.631

39.726.259

43.774.523

45.491.756

Gironde

174.185.143

246.843.640

269.635.417

270.784.581

279.768.133

294.075.844

304.865.297

323.222.512

Hérault

103.607.125

178.622.434

180.914.454

180.734.204

183.329.256

195.659.470

203.014.497

217.737.761

Ille-et-Vilaine

104.821.528

162.270.377

165.945.688

171.514.963

176.719.242

186.439.928

192.367.001

199.121.302

Indre

34.632.289

48.147.734

49.065.552

50.939.909

51.872.377

53.566.852

54.512.685

56.538.068

Indre-et-Loire

73.496.434

114.341.913

115.514.378

123.314.671

128.746.850

131.399.072

134.205.133

136.542.163

Isère

148.770.310

227.085.690

227.069.787

233.026.153

233.675.409

241.579.839

248.456.056

258.248.082

Jura

37.455.251

51.389.343

52.132.828

52.312.936

51.985.137

52.976.593

57.454.811

59.462.621

Landes

47.973.837

70.401.539

73.746.416

76.524.953

77.796.720

80.776.192

83.997.931

89.118.305

Loir-et-cher

45.169.658

67.931.568

70.032.775

70.688.182

69.249.773

73.190.479

75.536.751

78.999.811

Loire

108.071.789

147.724.564

153.682.318

153.462.063

151.885.122

158.818.870

161.594.700

167.040.864

Haute-Loire

28.122.177

40.151.368

42.228.841

43.679.539

44.866.783

46.992.348

48.301.490

50.592.585

Loire Atlantique

121.450.957

203.823.028

211.326.284

220.656.303

227.360.934

248.223.452

258.591.926

268.141.091

Loiret

84.143.986

131.106.877

136.021.818

138.372.812

136.245.096

136.758.409

143.075.313

149.396.763

Lot

24.100.445

35.004.483

35.728.270

35.861.883

35.551.411

38.053.059

39.471.397

42.471.790

Lot-et-Garonne

49.174.687

65.406.561

67.354.610

68.077.339

68.689.064

71.475.165

72.142.884

74.768.955

Départements

1984

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Lozère

11.027.917

15.836.985

15.244.771

15.488.468

15.794.366

16.568.251

17.399.308

18.587.716

Maine-et-Loire

90.311.130

138.536.856

143.214.282

147.719.554

152.174.095

155.596.098

157.338.756

160.306.423

Manche

63.839.759

85.344.516

88.106.021

90.429.652

92.511.926

96.781.242

100.878.209

103.847.037

Marne

81.501.762

78.191.102

78.830.846

79.949.096

78.929.054

81.389.752

91.162.540

141.711.229

Haute-Marne

31.571.740

41.414.101

42.609.552

43.999.907

43.440.732

45.734.798

47.900.123

48.656.865

Mayenne

35.957.114

53.235.720

54.897.222

57.789.885

58.692.013

63.807.350

65.538.827

68.422.814

Meurthe-et-Moselle

96.759.015

130.164.314

131.368.408

132.116.816

136.086.602

143.840.190

145.290.999

150.110.481

Meuse

27.115.445

35.831.192

36.791.209

38.234.794

39.003.131

39.815.318

39.819.372

44.760.567

Morbihan

79.387.132

114.972.164

114.701.159

116.176.276

117.253.317

136.092.713

143.128.223

150.727.144

Moselle

138.374.846

187.541.741

191.873.617

195.921.292

193.512.722

202.758.604

203.747.506

212.864.608

Nièvre

33.638.773

48.869.064

50.514.612

50.809.768

51.476.186

52.953.742

53.211.599

54.024.592

Nord

301.474.629

379.432.967

380.144.883

391.078.282

416.568.321

428.551.186

445.820.625

461.877.324

Oise

92.984.688

109.481.521

166.269.431

148.094.421

149.659.572

157.321.973

161.783.610

165.714.522

Orne

40.688.951

57.637.660

59.610.610

59.815.438

62.503.685

65.172.190

68.365.529

70.596.596

Pas-de-Calais

154.499.721

197.337.448

201.014.705

206.961.415

209.056.165

220.082.348

224.537.732

229.806.447

Puy-de-Dôme

89.576.427

139.646.167

132.666.253

135.352.194

144.187.154

146.536.609

147.131.126

149.758.702

Pyrénées Atlant.

86.472.735

132.922.541

138.776.854

144.194.548

144.123.799

148.930.346

152.892.461

158.425.926

Hautes-Pyrénées

34.966.613

48.423.209

48.700.322

48.779.069

52.449.828

53.681.715

56.682.655

59.760.312

Pyrénées Orientales

53.487.298

73.377.704

77.218.869

79.720.976

87.097.197

98.696.512

99.611.959

103.305.818

Bas-Rhin

142.117.409

210.114.231

215.458.585

217.815.971

225.510.652

229.925.630

240.774.519

248.491.869

Haut-Rhin

105.656.440

164.914.696

161.959.617

166.791.709

166.706.907

170.447.333

171.435.703

173.912.916

Rhône

219.863.465

311.832.802

324.218.134

328.651.341

326.870.243

347.969.903

369.778.647

399.610.282

Haute-Saône

32.496.996

43.140.926

45.011.462

46.346.419

47.700.751

49.403.522

50.329.380

52.587.963

Saône-et-Loire

84.191.303

122.866.250

126.669.440

130.391.407

131.117.287

139.532.085

142.079.543

144.633.350

Sarthe

67.558.744

100.607.199

101.358.222

104.650.645

109.008.109

115.301.735

120.023.628

122.590.355

Savoie

56.681.038

87.810.993

92.211.481

96.120.357

94.481.019

97.927.205

101.910.487

103.681.121

Haute-Savoie

96.515.700

153.705.299

154.820.303

169.858.167

158.059.137

160.321.730

164.373.814

171.394.338

Paris

394.197.889

836.005.677

830.214.514

848.259.354

802.570.955

860.604.153

835.201.590

854.669.395

Seine-Maritime

166.618.556

205.713.833

209.079.829

209.581.524

208.046.194

239.173.783

246.482.662

256.609.711

Seine-et-Marne

147.401.699

221.228.797

228.118.560

236.661.851

245.336.999

265.038.533

275.923.289

294.628.550

Yvelines

204.052.654

324.442.354

339.715.349

335.626.305

324.849.929

334.791.707

329.612.046

327.580.671

Deux-Sèvres

49.759.379

71.918.071

74.556.634

77.275.811

78.035.608

81.353.934

83.583.013

87.230.440

Somme

67.075.996

92.373.531

91.130.684

89.039.310

97.236.992

98.936.983

103.773.291

108.744.399

Tarn

50.248.281

72.990.377

71.040.279

75.445.409

75.413.459

78.775.971

79.294.834

83.384.421

Tarn-et-Garonne

28.913.898

43.351.782

46.434.740

44.222.603

44.697.014

46.926.222

48.143.533

50.824.821

Var

104.016.744

119.671.345

123.682.879

126.948.768

125.814.795

134.923.117

140.906.799

161.047.263

Vaucluse

75.690.453

115.168.096

120.576.280

125.337.253

122.049.523

128.012.114

129.792.601

138.291.120

Vendée

68.077.616

109.413.382

108.941.288

112.317.135

115.569.420

121.137.760

126.002.641

133.527.267

Vienne

54.636.753

76.354.102

75.908.302

77.814.953

80.759.203

84.435.121

84.851.815

86.497.363

Haute-Vienne

53.647.002

76.491.342

78.371.845

78.439.300

77.801.856

80.614.260

84.667.986

89.385.640

Vosges

55.551.312

76.144.668

79.506.600

82.732.421

81.829.601

85.207.104

86.204.751

89.844.031

Yonne

47.502.852

66.770.304

68.893.539

71.248.567

77.509.008

80.746.529

82.053.466

85.120.060

Territoire de Belfort

19.469.028

26.254.799

27.327.503

27.119.588

26.563.139

26.909.752

26.735.225

27.131.679

Essonne

126.393.557

205.193.084

203.797.939

218.987.276

224.622.309

227.822.571

233.396.181

236.767.643

Hauts-de-Seine

230.549.789

324.264.351

334.254.930

340.703.318

332.450.433

369.270.938

375.584.279

378.783.331

Seine-Saint-Denis

156.851.365

228.300.779

227.397.395

224.383.877

214.358.075

218.350.763

213.475.874

212.232.842

Val-de-Marne

173.482.999

210.850.842

208.038.865

207.213.897

218.525.565

226.335.267

229.351.589

222.452.762

Val d'Oise

137.788.347

181.283.688

220.694.027

204.985.846

211.767.178

216.882.790

220.891.606

229.555.933

Total Métropole

7.985.214.321

11.616.659.626

11.939.046.494

12.142.234.653

12.310.728.410

12.891.456.660

13.158.065.831

13.697.551.463

Départements

1984

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Départements d'Outre-mer

 
 
 
 
 
 
 
 

Guadeloupe

24.521.356

38.917.236

56.163.564

38.343.354

40.848.348

42.479.820

42.523.947

47.719.334

Martinique

26.334.660

42.936.146

45.497.855

50.297.576

52.199.185

55.933.247

57.171.070

59.737.132

Guyane

6.819.051

15.264.162

17.403.187

16.828.490

16.722.966

19.459.804

19.644.009

20.786.223

Réunion

39.573.943

79.740.739

91.760.705

103.890.420

104.728.587

110.402.063

113.188.312

122.958.905

Total DOM

97.249.010

176.858.283

210.825.311

209.359.840

214.499.086

228.274.934

232.527.338

251.201.594

Total départemental


8.082.463.331


11.791.517.909


12.149.871.805


12.351.594.493


12.525.227.496


13.119.731.594


13.390.593.169


13.948.753.057

Région Corse

24.106.108

38.487.540

40.118.170

39.222.273

44.139.605

44.320.816

42.555.683

47.725.843

Total général

8.106.571.539

11.830.005.449

12.189.989.975

12.390.816.766

12.569.367.101

13.164.052.410

13.433.148.852

13.996.478.900

TAXE SUR LES CERTIFICATS D'IMMATRICULATION DES VÉHICULES (OU CARTES GRISES)

(en francs)

Régions

1983

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Ile de France

288.089.848

710.000.000

894.700.000

1.303.400.000

1.264.272.000

1.512.948.870

1.410.958.996

1.659.218.538

Champagne-Ardenne

59.672.893

146.627.308

131.904.876

132.306.963

131.781.340

153.634.797

161.086.990

241.798.483

Picardie

66.645.933

141.638.948

131.065.795

130.625.425

138.735.258

196.595.293

206.257.779

215.831.361

Haute-Normandie

78.843.164

155.381.800

157.258.535

165.154.980

171.125.233

212.505.704

208.703.715

208.721.629

Centre

95.459.617

185.045.950

173.166.493

173.497.559

237.147.472

251.448.264

246.160.201

250.422.302

Basse-Normandie

43.359.364

133.642.061

130.454.301

133.776.748

148.950.879

208.754.318

203.630.395

203.029.560

Bourgogne

54.975.457

161.569.047

169.102.642

158.611.274

156.886.785

194.249.739

199.104.804

225.577.260

Nord Pas-de-Calais

131.032.883

375.557.177

325.708.234

378.489.538

389.121.290

438.450.439

485.269.279

497.715.552

Lorraine

91.375.934

224.517.569

221.129.190

223.759.980

215.710.565

251.377.872

274.047.264

322.786.657

Alsace

54.161.733

150.296.585

155.799.316

160.114.658

182.589.356

201.295.034

203.301.784

229.744.293

Franche-Comté

45.98.007

130.391.185

127.873.637

125.360.350

127.813.754

148.295.389

157.049.056

167.288.666

Pays-de-la-Loire

122.435.616

300.115.398

276.919.309

248.485.773

258.094.680

282.555.871

292.277.546

313.248.010

Bretagne

109.818.000

275.956.685

248.000.000

255.682.610

254.102.012

290.606.305

298.956.955

320.182.214

Poitou-Charentes

69.855.884

151.555.685

142.840.951

144.527.067

143.757.097

182.928.109

147.652.831

195.644.318

Aquitaine

119.366.000

340.375.972

328.848.981

323.709.244

325.210.281

361.712.807

362.318.613

426.272.152

Midi-Pyrénées

101.344.733

264.150.246

246.820.282

252.556.424

252.597.237

279.298.257

300.119.963

341.650.234

Limousin

33.113.675

69.762.280

67.732.862

69.950.960

65.861.053

72.552.739

88.113.614

90.749.692

Rhône-Alpes

226.170.180

731.247.278

761.084.303

728.968.678

744.688.031

817.250.252

819.893.727

836.640.205

Auvergne

48.820.759

100.685.403

99.042.837

103.352.433

108.886.397

122.400.518

139.910.091

152.496.668

Languedoc-Roussillon

62.000.000

215.084.000

205.865.657

211.452.798

272.081.309

296.203.925

292.891.246

308.700.000

Provence-Alpes-Côte d'Azur


150.232.277


540.900.767


552.500.113


554.057.996


604.900.000


687.636.212


660.364.000


686.041.487

Corse

14.555.000

25.994.254

26.771.817

28.352.486

27.297.000

29.012.000

26.852.883

29.297.979

Total France métropolitaine


2.067.311.957


5.530.495.598


5.574.590.131


6.006.193.944


6.221.609.029


7.191.712.714


7.184.921.732


7.923.057.260

Régions

1983

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Départements d'outre-mer

 
 
 
 
 
 
 
 

Guadeloupe

12.808.822

21.350.334

20.646.866

19.387.361

21.520.541

24.182.950

24.268.547

17.595.038

Martinique

12.428.046

19.688.186

14.053.930

24.410.100

24.940.235

38.654.525

36.621.490

53.802.758

Guyane

1.771.967

5.825.813

6.093.620

6.423.845

5.994.210

8.816.522

9.536.640

11.179.554

Réunion

12.823.487

37.895.000

44.054.823

50.027.728

49.882.293

54.233.266

58.389.563

66.535.486

Total DOM

39.832.322

84.759.333

84.849.239

100.249.034

102.337.279

125.887.263

128.816.240

149.112.836

Total général

2.107.144.279

5.615.254.931

5.659.439.370

6.106.442.978

6.323.946.308

7.317.599.977

7.313.737.972

8.072.170.096

Source : Direction générale des collectivités locales, ministère de l'Intérieur.

B. UNE RÉFORME NÉCESSAIRE DANS LE RESPECT DES PRINCIPES DE LA DÉCENTRALISATION


Les longs débats qui ont entouré ce thème, tant au Sénat, à l'occasion de la discussion du projet de loi de finances pour 1998, qu'à l'Assemblée nationale, au cours de la discussion du présent projet de loi, démontrent que si une réforme est nécessaire, celle-ci ne doit pas avoir pour conséquence de porter atteinte aux principes de la décentralisation .

La vignette fait en effet partie des ressources fiscales transférées aux départements en contrepartie des accroissements nets de charges résultant des transferts de compétences effectués entre l'Etat et, en l'espèce, les départements à l'occasion de la décentralisation.

Or, la discussion du présent projet devrait très certainement voir se concrétiser les travaux conduits par le Gouvernement en vue de tenir son engagement de trouver une solution permettant de régler ce problème avant la campagne des vignettes du millésime 1999.

A cet égard, quelle que soit les modalités de cette réforme, il convient de rappeler que M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget, avait déclaré devant le Sénat : " Nous sommes tous très attachés au fait que les taux des impôts qui sont affectés aux collectivités locales soient librement déterminés par celles-ci " 38( * ) .

Ce principe doit en effet être respecté.

A cet égard, toute formule de nationalisation du taux de la vignette de certaines catégories de véhicules avec redistribution aux départements doit être évitée.

De même, un taux national défini par la loi avec une possibilité pour le conseil général de faire varier ce tarif dans une fourchette de plus ou moins 25 % (solution proposée et retirée par la commission des finances de l'Assemblée nationale à l'occasion de la discussion du présent projet de loi ; le taux national était fixé à 278 francs pour le tarif de base) serait contestable . Cette solution, outre le fait qu'elle obligerait certains départements à relever fortement le tarif de leur vignette, porterait atteinte à la faculté de baisser les tarifs d'un impôt, dont la lisibilité favorise une maîtrise de la pression fiscale locale (plus de 40 départements n'ont pas relevé le tarif de leur vignette en 1997).

La seule solution acceptable est un dispositif d'obligation d'immatriculation des véhicules en fonction de critères objectifs d'utilisation. A cet égard , il pourrait être procédé par référence au lieu d'imposition des véhicules à la taxe professionnelle qui repose sur trois critères : le lieu de stationnement habituel ; à défaut, le lieu d'entretien ou de réparation ; ou en dernier ressort, le lieu de situation du principal établissement. Sur ce point la solution annoncée par le gouvernement de modifier dans cette perspective la partie réglementaire du code de la route, qui détermine les règles d'immatriculation, apparaît contestable dans la mesure où il s'agit de l'assiette d'un impôt et que celle-ci doit être fixée par la loi.

Décision de la commission : votre commission a décidé de réserver sa position sur le présent article.

ARTICLE 40

Adaptation du régime de responsabilité civile et
de l'obligation d'assurance des propriétaires de navires
pour les dommages résultant de la pollution par les hydrocarbures

Commentaire : le présent article vise à adapter la loi n°77-530 du 26 mai 1977 relative à la responsabilité civile des propriétaires de navires pour les dommages résultant de la pollution par les hydrocarbures, compte tenu de l'adoption du protocole du 27 novembre 1992 modifiant la convention de Bruxelles de 1969, dont la loi de 1977 transposait les principales dispositions.

I - LE RÉGIME D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE POLLUTION PAR LES HYDROCARBURES EST NÉ DE LA CONVENTION DE BRUXELLES DE 1969

A. LA CONVENTION DE BRUXELLES DE 1969 A DÉFINI LES RÈGLES DE RESPONSABILITÉ CIVILE POUR LES DOMMAGES DUS A LA POLLUTION PAR LES HYDROCARBURES...


La convention de Bruxelles du 29 novembre 1969 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures définit les règles de responsabilité civile et instaure un régime d'indemnisation pour les victimes ainsi que pour les frais occasionnés pour la mise en place de mesures préventives.

L'article III de la Convention pose le principe de la responsabilité objective du propriétaire du navire , même en l'absence de faute. Il dispose que "le propriétaire du navire (...) est responsable de tout dommage par pollution qui résulte d'une fuite ou de rejets d'hydrocarbures de son navire".

Il n'est toutefois pas responsable :

- en cas de guerre, d'insurrection et de phénomène naturel de caractère exceptionnel,

- si le dommage résulte en totalité du fait de l'action ou l'abstention intentionnelle d'un tiers,

- si le dommage résulte en totalité de la négligence des autorités responsables de la sécurité de la navigation.

L'article V permet de limiter la responsabilité du propriétaire de navire à un montant total par événement de 2.000 francs par tonneau de jauge du navire, et à 210 millions de francs au total , sauf cas de faute personnelle du propriétaire.

Cette limitation ne peut être appliquée que si le propriétaire constitue un fonds s'élevant à la limite de sa responsabilité.

B. ..CE DISPOSITIF A ÉTÉ COMPLÉTÉ PAR LA CRÉATION D'UN FONDS INTERNATIONAL D'INDEMNISATION (FIPOL) PAR LA CONVENTION DE 1971

Une convention du 18 décembre 1971, élaborée par l'organisation maritime internationale (OMI) a créé le Fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (FIPOL).

Le fonds indemnise toute personne ayant subi un dommage par pollution et qui n'a pu obtenir "une réparation équitable sur la base de la convention de 1969", soit parce que le dommage excède la limite de responsabilité civile du propriétaire, soit en raison d'une défaillance financière de ce dernier ou de ses garants.

Le paiement par le FIPOL intervient donc en complément des dispositions de la convention de 1969.

Le FIPOL bénéficie de contributions versées annuellement, pour chacun des Etats contractants, par toute personne ayant reçu des quantités d'hydrocarbures totales supérieures à 150.000 tonnes.

Fonds de 1971 : Quantités d'hydrocarbures donnant lieu à contribution
reçues dans le territoire des Etats membres pendant l'année civile 1995

Etat Membre

Hydrocarbures donnant lieu à contribution (tonnes)

Pourcentage
du total

Japon

280.933.626

24,73

Italie

147.130.496

12,95

Pays-Bas

98.648.509

8,69

République de Corée

97.931.477

8,62

France

93.349.995

8,22

Royaume-Uni

83.306.441

7,33

Espagne

58.011.893

5,11

Canada

36.668.232

3,23

Allemagne

33.694.330

2,97

Australie

29.293.967

2,58

Norvège

24.019.234

2,12

Suède

19.493.011

1,72

Grèce

19.082.743

1,59

Portugal

15.731.376

1,39

Malaisie

14.009.623

1,23

Mexique

12.165.722

1,07

Finlande

11.378.019

1,00

Indonésie

9.966.115

0,88

Venezuela

8.105.141

0,71

Belgique

6.698.245

0,59

Danemark

6.597.134

0,58

Maroc

6.377.581

0,56

Pologne

5.038.165

0,44

Bahamas

3.544.036

0,31

Irlande

3.166.174

0,28

Côte d'Ivoire

2.768.775

0,24

Tunisie

2.692.690

0,24

Sri Lanka

1.871.602

0,17

Chypre

1.493.194

0,13

Cameroun

1.440.494

0,13

Ghana

948.863

0,08

Malte

908.052

0,08

Barbade

178.762

0,02

Maurice

161.705

0,01

Brunéi Darussalam

0

0,0

Djibouti

0

0,0

Estonie

0

0,0

Islande

0

0,0

Maldives

0

0,0

Iles Marshall

0

0,0

Monaco

0

0,0

Oman

0

0,0

Papouasie-Nouvelle-Guinée

0

0,0

Slovénie

0

0,0

Vanuatu

0

0,0

Yougoslavie

0

0,0

 

1.135.850.422

100,00

II - CE RÉGIME A ÉTÉ MODIFIÉ PAR DEUX PROTOCOLES DE 1992

Deux protocoles modifiant les conventions de 1969 et 1971 ont été adoptés à Londres le 25 mai 1984. Ils élargissaient le champ d'application du régime de responsabilité civile et revalorisaient les plafonds d'indemnisation du FIPOL. Toutefois, ils ne sont pas entrés en vigueur en raison de la défection des Etats-Unis et du Japon.

Deux nouveaux protocoles ont donc été signés le 27 novembre 1992, dont le contenu est identique à celui des protocoles de 1984 mais avec des conditions d'entrée en vigueur assouplies.

Les protocoles de 1992 procèdent à une forte revalorisation des montants d'assurance et des plafonds d'indemnisation prévus par la convention de 1971.

Les montants d'assurance étaient jusqu'alors calculés par tonneau de jauge brute (1.096 francs/jauge), avec un plafond de 115,45 millions de francs pour les jauges supérieures à 105.263 tonnes.

Elles sont désormais fixées dans une fourchette de 24,74 millions de francs (jauge inférieure à 5.000 unités) à 193,84 millions de francs (jauge égale ou supérieure à 140.000 francs).

Le plafond des indemnités payables pour un événement donné, fixé à 60 millions de droits de tirage spéciaux DTS (494,81 millions de francs), y compris la somme versée en application des dispositions de la convention de 1969, est porté à 135 millions de DTS (1.113 millions de francs) .

Le parlement français a autorisé la ratification de ces protocoles par deux lois (n°94-478 et 94-479) en date du 10 juin 1994. Ils sont entrés en vigueur le 30 mai 1996.

Fonds de 1992 : Quantités d'hydrocarbures donnant lieu à contribution
reçues dans le territoire des Etats membres pendant l'année civile 1995

Etat Membre

Hydrocarbures donnant lieu à contribution (tonnes)

Pourcentage
du total

Japon

280.933.626

42,93

France

93.349.995

14,27

Royaume-Uni

83.306.441

12,73

Allemagne

75.707.307

11,57

Australie

29.293.967

4,48

Norvège

24.019.234

3,67

Suède

19.493.011

2,98

Grèce

18.082.743

2,76

Mexique

12.165.722

1,86

Finlande

11.378.019

1,74

Danemark

6.597.134

1,01

Iles Marshall

0

0,00

Oman

0

0,00

 

645.327.199

100,00

III - L'ENTRÉE EN VIGUEUR DE CES PROTOCOLES NÉCESSITE UNE ADAPTATION DE LA LÉGISLATION FRANÇAISE

L'entrée en vigueur des protocoles de 1992 rend nécessaire une adaptation de la loi n° 77-530 du 26 mai 1977, relative à la responsabilité civile et à l'obligation d'assurance des propriétaires de navires pour les dommages résultant de la pollution par les hydrocarbures.

Les adaptations proposées sont les suivantes :

- une modification des références à la convention de 1969 (article premier de la loi)

- des mesures transitoires, jusqu'à la dénonciation par la France de la convention de 1969.

La dénonciation de la convention de 1971 devait intervenir dès lors que la quantité totale des hydrocarbures donnant lieu à contribution reçus dans les Etats parties au deuxième protocole de 1992 atteindrait 750 millions de tonnes. Cette condition a été réalisée en mai 1996. Elle n'avait pas de conséquence en droit français. En revanche, la dénonciation de la convention de 1969 doit intervenir un an après les dépôts des instrument de dénonciation par les Etats adhérents, elle sera effective le 15 mai 1998.

Les dispositions du présent article ménagent les trois situations envisageables jusqu'à cette date :

- si l'Etat du pavillon du navire est adhérent au protocole de 1992, le navire doit être assuré dans les conditions prévues par ce protocole,

- si l'Etat du navire est adhérent à la convention de 1969, la France, également adhérente à cette convention jusqu'au 15 mai 1998, ne peut exiger un niveau d'assurance supérieur, équivalent à celui prévu par le protocole de 1992 ;

- si l'Etat du pavillon du navire n'est adhérent à aucune convention, la France peut exiger un niveau d'assurance équivalent à celui prévu par le protocole de 1992.

Ces mesures sont étendues aux territoires d'Outre-mer ainsi qu'à Mayotte.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 41

Financement de l'élimination de farines animales
non conformes aux normes communautaires

Commentaire : cet article vise à financer l'élimination de farines animales, non conformes aux normes fixées par la réglementation européenne, par une taxe additionnelle à la taxe sur les achats de viande.

L'inscription du présent article au projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier constitue la réponse de la France à l'ouverture par la Commission européenne d'une procédure d'infraction 39( * ) à l'encontre du procédé français de transformation des déchets d'origine animale en farines.

Le dispositif actuellement en vigueur en France a été mis en place en 1996, sur la base des avis rendus par le comité présidé par M. Dominique Dormont 40( * ) . Il prévoit que :

- l'ensemble des déchets animaux est transformé en farines par traitement thermique selon la norme 94-382 ;

- les farines à " haut risque " (issues de matériels à risque spécifiés et de déchets provenant de cadavres ou de saisies sanitaires) sont éliminées par incinération dans le cadre du service public de l'équarissage créé par la loi du 26 décembre 1996 relative à la collecte et à l'élimination des cadavres d'animaux et des déchets d'abattoirs ;

- les autres farines, à " bas risque ", sont par mesure de précaution, interdites pour l'alimentations des ruminants et réservées aux animaux monogastriques (porcs, volailles et poissons).

Le procédé de traitement des déchets animaux conduisant à la production de farines à " bas risque " est aujourd'hui remis en cause par la Commission européenne qui, dans une décision n° 96-449 du 18 juillet 1996, avait établit que " les Etats membres n'autorisent pas la transformation de déchets animaux, à moins qu'ils ne soient transformés conformément aux paramètres prévus à l'annexe 41( * ) ".

Or, le système appliqué en France, malgré l'existence, unique en Europe à l'exception du Royaume-Uni, d'un tri des déchets entre ceux à " haut risque " et ceux à " bas risque ", n'est pas conforme à la décision 96-449 car les normes de transformation des déchets à " faible risque " préconisées par le comité Dormont sont différentes de celles requises par la Commission. Les normes françaises imposent en effet une durée de chauffage supérieure à celle de la décision de la Commission, pendant une durée également supérieure, mais n'imposent pas de pression minimale.

La procédure ouverte par la Commission européenne est donc juridiquement justifiée.

I - LA MISE SUR PIED D'UNE OPÉRATION TENDANT À RETIRER DU MARCHÉ LES FARINES NON CONFORMES AUX NORMES COMMUNAUTAIRES

A. LE CHOIX D'UNE MISE EN OEUVRE ACCÉLÉRÉE DE LA LÉGISLATION COMMUNAUTAIRE


La procédure d'infraction a été ouverte le 7 juillet 1997, date de la mise en demeure faite à la France de se conformer à la décision n° 96-449. L'avis motivé a ensuite été transmis le 22 décembre 1997. Le délai accordé par la Commission aux Etats mis en cause étant de deux mois, la Commission aurait été en droit de saisir la Cour de justice à partir du 22 février 1998 si la France n'avait pas pris des mesures tendant à mettre sa législation en conformité avec les normes communautaires.

Deux réponses à l'avis motivé étaient possibles :

La première consistait à défendre l'idée selon laquelle, de leur propre fait, les producteurs français de farines animales, les équarrisseurs procédaient à la mise aux normes de leurs installations.

Ces investissements, coûteux, s'imposent en effet à eux pour des raisons commerciales : les acheteurs de farines animales souhaitent se procurer des produits comportant le maximum de garanties. Par conséquent, afin de ne pas voir leurs clients se tourner vers d'autres producteurs de farines animales ou vers des produits d'origine végétale (tels que le soja, dont les cours sont très bas), les producteurs de farine ont commencé à calquer leur mode de production sur celui pratiqué dans le reste de l'Union européenne.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, en l'absence de toute mesure incitative, la presque totalité des sites produisant des farines d'origine bovine aurait vraisemblablement satisfait aux exigences européennes dans le courant de l'année 1998.

Ainsi, en retardant de quelques mois la transposition de la décision n°96-449 de la Commission européenne, le droit n'aurait eu qu'à prendre acte de la pratique, pour un coût budgétaire nul.

Cette solution était risquée politiquement mais n'aurait pas présenté de risque sanitaire puisque les capacités de production actuellement utilisées en France satisfont aux exigences du comité Dormont. Ce point ne fait l'objet d'aucune contestation gouvernementale : dans son point de presse du 9 février 1998, le ministre de l'Agriculture a indiqué que la décision de la France d'accélérer la mise aux normes n'était pas " prise au titre du principe de précaution mais ( était ) une mesure d'ordre juridique ".

le Gouvernement n'a pas retenu cette solution et a fait le choix d'accélérer la mise aux normes de la production de farines animales "bas risque".

Dans un premier temps, le ministre de l'Agriculture a réagi en prenant, le 6 février 1998, un arrêté prévoyant que :

- les déchets visés par la décision de la Commission européenne n° 96-449 " sont transformés conformément aux paramètres minimaux fixés par cette décision ".

- les établissements dont les productions ne sont pas réalisées dans des conditions conformes aux paramètres doivent " procéder ou faire procéder au retraitement ou à l'élimination de ces produits afin d'interdire leur entrée dans la chaîne alimentaire animale ".

Cette évolution réglementaire a eu pour conséquence de rendre illégale la commercialisation des farines animales produites à partir du 6 février 1998 selon des paramètres différents de ceux fixés par la Commission européenne.

L'arrêt de la production des farines non conformes n'est pas une solution envisageable en raison de la nécessité de détruire les déchets animaux . En conséquence, l'objet du présent article est de définir les modalités du financement, sous la forme d'aides versées aux producteurs, de leur élimination.

L'élimination peut prendre deux formes :

- la destruction par incinération ;

- le retraitement, par le producteur ou par un tiers, qui permet aux farines d'être ensuite commercialisées.

Afin d'inciter les producteurs à mettre leurs installations aux normes le plus rapidement possible, le dispositif prévoit que les aides ne s'appliqueront qu'aux farines produites entre le 6 février et le 30 juin 98, ainsi qu'au stock non commercialisé existant 42( * ) .

B. UNE OPÉRATION AU COÛT INCERTAIN

Le coût total de l'élimination des farines produites entre le 6 février et le 30 juin dépend de deux facteurs :

- la vitesse de mise aux normes des installations . La mise aux normes concerne trente lignes de production, nécessitant 8 millions de francs d'investissements chacune. Ces travaux, d'un montant total de 240 millions de francs, sont subventionnés à hauteur de 30% par des crédits relevant du FEOGA 5a 43( * ) . La " contrepartie nationale " de cette subvention européenne (l'aide que les Etats membres sont autorisés à accorder en accompagnement des fonds structurels) a été fixée à 12%, sur les crédits de l'OFIVAL ;

- la proportion de farines qui seront incinérées et de farines qui seront retraitées . En effet, le coût budgétaire de l'incinération est très supérieur à celui du retraitement. Les plafonds de remboursement aux opérateurs ont été fixés de la manière suivante par les services du ministère de l'Agriculture :

Comparaisons des coûts respectifs du retraitement
et de l'incinération pour les finances publiques

(en millions de francs)

 

Farines retraitées

Farines incinérées

Retraitement

300*

-

Transport

450**

250**

Stockage

150

150

Incinération

-

800

Indemnités pour perte de valeur marchande

-

1.500

Total

900

2.700

* 150 si le retraitement est effectué par l'opérateur et concerne un stérilisateur en aval.

** Déduction faite du coût théorique du transport usine/client, calculée selon un forfait de 0,40 franc par T X km.


Plusieurs évaluations du coût de l'opération ont été réalisées. La première provient d'un rapport demandé à l'inspection générale des finances, le rapport Girodolle, qui avance le chiffre de 500 millions de francs. Cette estimation est basée sur l'hypothèse d'une élimination par incinération de la quasi-totalité des farines.

Au mois de février 1998, le ministre de l'Agriculture a estimé que, si la moitié des farines était brûlée et l'autre retraitée, l'opération pourrait coûter entre 300 et 450 millions de francs.

Aujourd'hui, selon les informations recueillies par votre rapporteur, les estimations doivent être encore revues à la baisse. En effet, d'une part, le rythme de mise aux normes des installations serait très soutenu 44( * ) et, d'autre part, il semble que la quantité de farines incinérées sera très faible, les producteurs préférant soit les retraiter eux-mêmes, soit les faire retraiter, soit les stocker en attendant la mise aux normes de leurs installations, puis les retraiter. Leur choix s'explique par des considérations commerciales : les farines retraitées conservent une valeur commerciale et, dans un contexte concurrentiel, il est risqué de se retirer du marché 45( * ) .

Par conséquent, il est aujourd'hui possible de procéder à une nouvelle estimation du coût de l'opération. Sachant que le ministère de l'agriculture estime à 36 000 tonnes la production mensuelle de farines non conformes (estimation effectuée avant l'accélération de la mise aux normes), que la mesure s'applique aux farines produites de février à juin 1998 inclus, que la proportion de farines incinérées devrait être proche de zéro et que le plafond de remboursement des farines retraitées est de 900 francs par tonne, le coût de l'élimination de ces farines s'élèverait, au plus, à :

36 000 tonnes X 5 mois X 900 francs = 162 000 000 F

En imaginant que les farines incinérées représentent 10% du total, le coût serait alors, au plus, de :

(32 400 X 5 X 900) + (3600X 5 X 2700) = 194 400 000 F

En tout état de cause, le coût de la mesure sera vraisemblablement substantiellement inférieur aux 300 à 450 millions de francs annoncés par le ministre de l'Agriculture au mois de février 1998.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ POUR FINANCER L'ÉLIMINATION DES FARINES ANIMALES

A. LA SOLUTION RETENUE PAR LE GOUVERNEMENT

Le Gouvernement a choisi de financer l'élimination des farines animales par des crédits provenant de deux origines :

Une taxe additionnelle à la taxe sur les achats de viande instaurée par la loi du 26 décembre 1996

La taxe sur les achats de viande est régie par l'article 302 bis ZD du code général des impôts :

- elle est assise sur la valeur hors taxe sur la valeur ajoutée des achats de toute provenance de viande et abats (...), de salaisons, de produits de charcuterie, saindoux, conserves de viandes et abats transformés et d'aliments pour animaux à base de viande et d'abats ;

- elle est recouvrée dans les mêmes conditions que la TVA ;

- elle est applicable aux entreprises dont le chiffre d'affaire de l'année civile précédente est supérieur ou égal à 2,5 millions de francs, et n'est pas due lorsque le montant d'achats mensuels est inférieur à 20 000 francs ;

- les taux d'imposition, par tranche d'achats mensuels hors taxe sur la valeur ajoutée, sont fixés dans les limites suivantes : 0,6% jusqu'à 125 000 francs et 1% au delà de 125.000 francs.

Le présent article prévoit que la taxe additionnelle proposée est soumise aux mêmes règles que la taxe d'équarrissage à deux réserves près :

- elle n'est acquittée que par les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur ou égal à 3 millions de francs ;

- les taux sont de 0,3% pour les achats d'un montant inférieur à 125 000 francs et 0,5% au delà.

La taxe additionnelle est par ailleurs temporaire : elle n'est applicable qu'aux achats réalisés entre le 1er juillet 1998 et le 31 mai 1998.

Son taux et sa durée d'application ont été calculés de façon à ce qu'elle rapporte 250 millions de francs 46( * ) .

Le produit de la taxe sera versé à un fonds spécialement créé, et géré par le Conseil national pour l'aménagement des structures agricoles, le CNASEA. Compte tenu de la nécessité de dégager des crédits dès le lancement de l'opération, le CNASEA avancera les sommes nécessaires dans des conditions fixées par une convention entre lui et ministère de l'Agriculture.

Un éventuel recours à des crédits budgétaires

Le ministre de l'agriculture, le 9 février 1998, a estimé le coût total de l'opération entre 300 et 450 millions de francs. Sachant que le rendement prévu de la taxe ne devrait pas dépasser 250 millions de francs, un complément budgétaire est nécessaire.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, il a été envisagé de recourir à l'OFIVAL, et éventuellement à l'ONILAIT et au fonds de gestion des déchets géré par l'ADEME, pour assurer le complément budgétaire. Toutefois, selon les informations recueillies auprès de la direction du budget, les conseils de direction des offices ne s'étant pas réunis, la prise d'acte des plans de financement élaborés n'a pas eu lieu. En outre, les offices concernés ne semblent pas être informés de ces projets.

Le dispositif envisagé par le Gouvernement, notamment le recours à une taxe additionnelle, est simple à mettre en oeuvre, puisqu'il ne nécessite aucune formalité administrative supplémentaire de la part des entreprises. En cela, il permet de répondre à la nécessité de recueillir de manière urgente les sommes nécessaires au financement de l'élimination des farines animales non conformes aux normes communautaires, et évite l'élaboration d'une procédure administrative nouvelle applicable pour une durée de onze mois.

L'Assemblée nationale a, en première lecture, amélioré la rédaction de l'article en relevant le seuil minimal d'imposition à 3 millions de francs et, en contrepartie, a allongé d'un mois de délai de perception de la taxe. La rédaction initiale reprenait en effet le seuil de 2,5 millions de la taxe d'équarrissage.

Sur le fond, la décision de recourir à une taxe pesant sur l'extrémité de la filière peut se justifier par le fait que le coût de l'élimination fait partie intégrante du prix de revient du produit fini et que, par conséquent, il n'est pas absurde qu'il soit répercuté jusqu'aux consommateurs.

B. UNE SOLUTION PEU SATISFAISANTE

La taxe additionnelle présente l'inconvénient d'être " adossée " à une taxe contestée, la taxe sur les achats de viande. Celle-ci a été créée au cours de la première lecture à l'Assemblée nationale du projet de loi relatif à la collecte et à l'élimination des cadavres d'animaux et des déchets d'abattoirs, par un amendement du gouvernement déposé après la discussion générale.

Le projet de loi ne comportait, à l'origine, pas de dispositions concernant le financement du service public de l'équarissage, dont les modalités avaient été définies quelques semaines auparavant par l'article 16 de la loi de finances rectificative pour 1996, qui prévoyait notamment la création d'une taxe additionnelle dont le produit était censé être " affecté à un fonds ayant pour objet de financer la collecte et la destruction des cadavres d'animaux et des saisies sanitaires totales d'abattoirs et géré par le Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles ".

Cette disposition faisait supporter le coût de l'élimination des farines animales à " haut risque " aux abattoirs, en application du principe du " pollueur-payeur ". Elle a été abandonnée au profit de la taxe sur les achats de viande, pesant sur les grandes et moyennes surfaces ainsi que sur les détaillants, en raison du danger que comportait la création de ce nouveau prélèvement pour la santé financière des éleveurs, sur lesquels le coût de la taxe aurait été répercuté.

Une fois admis le principe de la taxe sur les achats de viande, les modalités de la taxe telle qu'elle a été votée posent un certain nombre de difficultés, identifiées par le rapporteur de la commission des affaires économiques du Sénat dès la discussion de la loi relative à la collecte et à l'élimination des cadavres d'animaux et des déchets d'abattoirs.

1. La compatibilité de la taxe sur les achats de viande avec le droit communautaire est discutable

Deux arguments peuvent être invoqués dans ce sens :

Sous réserve de cas particuliers, les directives communautaires prohibent toute nouvelle taxe portant sur le chiffre d'affaires ;

En vertu des article 12 et 95 du traité sur l'Union européenne, la Cour de justice des communautés européennes pourrait considérer, comme elle l'a déjà fait, qu'une taxe perçue sur la vente des viandes produites en France mais également des viandes importées, mais dont le produit ne bénéficie qu'aux producteurs nationaux, est contraire au droit communautaire.

A la suite de plaintes déposées par la Confédération nationale de la boucherie, boucherie-charcuterie, traiteurs (CNBCT) et par la Fédération du commerce et de la distribution (FCD), la Commission européenne a d'ailleurs, par une décision du 28 mars 1998, décidé d'entamer à l'encontre de la France une procédure d'infraction, qui doit se traduire par l'envoi au Gouvernement français d'une lettre de mise en demeure . La procédure étant secrète au stade de la mise en demeure, votre rapporteur n'a pu se procurer les moyens retenus par la Commission contre la taxe sur les achats de viande, qui ne seront connu que si, passé le délai de deux mois suivant la mise en demeure, la Commission décide de publier un avis motivé.

Si la Cour de justice devait finalement être saisie, et la taxe déclarée contraire au droit communautaire, la taxe additionnelle le serait également. Toutefois, la durée de vie de la taxe additionnelle étant brève, elle ne serait déjà plus en vigueur lorsque la procédure en arriverait au stade de la saisine.

2. La taxe pose des problèmes pratiques

Le principe de l'affectation du produit de la taxe à un fonds spécifique géré par un établissement public administratif est en contradiction avec le principe budgétaire de non affectation des recettes.

La taxe, alors même que d'autres dispositions du présent projet de loi ont pour objet la simplification administrative, provoque un alourdissement des formalités administratives pour les entreprises.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, la taxe obligerait notamment les entreprises qui réalisent un chiffre d'affaire inférieur à 5 millions de francs, et peuvent par conséquent bénéficier du régime simplifié de TVA, à malgré tout procéder à un tri au sein de leurs achats entre ceux qui entrent dans l'assiette de la taxe et les autres.

Certaines entreprises, devant s'acquitter du paiement de la taxe, pourraient être tentées de répercuter sur les producteurs l'augmentation de leurs coûts.

Cette crainte, formulée par de nombreux orateurs lors de la discussion au Sénat au mois de décembre 1996, ne semble pas s'être vérifiée ou, si elle l'a été, a été plus que compensée par les aides importantes versées tant par l'Etat que l'Union européenne aux producteurs de viande bovine depuis le début de l'affaire de la " vache folle ". Dans la perspective d'un retour à la normale du marché du boeuf, le risque pourrait néanmoins se reconstituer.

3. L'assiette de la taxe est difficile à déterminer

La commission des affaires économiques du Sénat avait, dans son rapport de 1996 consacré à la loi sur le service public de l'équarissage, envisagé plusieurs difficultés liées à l'assiette de la taxe.

En premier lieu, l'ambition d'exhaustivité affichée par la rédaction du texte, qui énumère les produits assujettis, comporte le risque d'oublier certaines catégories de viandes. En second lieu, des problèmes pratiques de recouvrement se posaient s'agissant des détaillants qui vendent de la viande de manière annexe à leur activité principale, et en très petite quantité, tels que les boulangers ou les stations service. Ce point a été résolu en introduisant le niveau minimal de 20 000 francs d'achat mensuel pour être soumis à la taxe.

Aujourd'hui, l'assiette de la taxe est constituée par les grandes et moyennes surfaces (GMS), les supérettes, les boucheries, charcuteries, les charcuteries artisanales et les vendeurs de nourriture pour animaux domestiques (pet food). Au sein de ces catégories, seules sont soumises à la taxe sur les achats de viande les entreprises dont le chiffre d'affaire est supérieur à 2,5 millions de francs. S'agissant de la taxe additionnelle, le texte adopté en première lecture à l'Assemblée nationale porte le seuil à 3 millions de francs.

L'existence de ce seuil est destinée à exonérer de la taxe les commerces de proximité, dont l'importance n'est plus à prouver en matière de politique de la ville et d'aménagement du territoire, et qui se trouvent dans une situation financière souvent difficile. Malgré des taux de marge supérieurs à ceux des grandes surfaces, les petits commerces sont plus fragilisés par la mise en place d'un nouveau prélèvement car ils sont contraints de répercuter la taxe dans les prix du petit nombre de produits qu'ils vendent alors que les GMS peuvent le répartir entre les prix de centaines de produits.

Source : INSEE

Taux de marge en 1992 et 1993 1

Hypermarchés

Supermarchés

superettes

boucheries, charcuteries

Charcuteries artisanales

20,6%

18,9%

25,9%

55,0%

86,6%

1. Le taux est la marge appliquée sur le montant des achats hors taxe. Les données disponibles datent de 1993 mais ne sont pas susceptible d'avoir évolué négativement compte tenu du fait que les ventes ont plutôt tendance à augmenter.

La création du seuil avait emporté l'adhésion des parlementaires à la taxe. En effet, le gouvernement avait avancé des chiffres tendant à prouver que les commerces de proximités étaient très largement exonérés de la taxe. Le tableau ci-dessous retrace la proportion d'effectifs exonérés du paiement de la taxe, ainsi que l'évolution de ce taux en cas de relèvement du seuil à 3 et 5 millions de francs :


Répartition des effectifs exonérés en fonction du chiffre d'affaire hors taxe

Effectif

CAHT 2,5 MF

CAHT 3 MF

CAHT 5 MF

Source : INSEE

nombre

%

 

%

nombre

%

GMS

33

0,7

43

0,9

123

2,6

Supérettes

350

10,9

650

20,3

1.553

48,5

Boucheries, charcuteries

35.500

92,4

37.000

96,3

37.911

98,7

Charcuteries artisanales

9.544

87,0

10.144

92,4

10.747

97,9

Epiceries

20.540

87,3

23.540

100,0

23.540

100,0

Total

65.967

81,6

71.377

88,3

73.874

91,4

Ces chiffres, fournis par le ministère de l'Agriculture, sont aujourd'hui contestés par certains redevables de la taxe. Ils s'appuient sur une enquête réalisée par la direction de l'Artisanat et l'ADEME, selon laquelle 27% des bouchers-charcutiers seraient soumis à la taxe, soit plus du double du taux affiché par le tableau ci-dessus. En outre, selon le tableau, 35.500 boucheries et charcuteries sont réputées être exonérées de la taxe, alors même que, selon l'INSEE, ils ne seraient que 23 000 en France.

La controverse sur le nombre s'assujettis à la taxe a son importance car c'est précisément la forte proportion de commerces de proximité exonérés qui a conduit les parlementaires, de tous bord, à finalement accepter le principe d'une taxe sur les achats de viande . Votre rapporteur a pu se procurer des détails sur la façon dont les différents chiffrages avancés ont été élaborés :

- l'enquête réalisée par la direction de l'artisanat et l'ADEME, relative aux déchets produits en boucherie (carton, os, suifs), se base sur 2.043 réponses à un questionnaire soumis dans tous les départements et qui a reçu un taux de réponse à cette question de 96,3%.

- les données du ministère de l'agriculture ont été élaborées, en 1996, par le service central des enquêtes et études statistiques (SCEES) de ce ministère à partir de plusieurs sources statistiques 47( * ) .

Le différend sur le nombre de bouchers et de charcutiers provient d'un changement dans la nomenclature de l'INSEE. Aujourd'hui, la définition retenue est effectivement de 23 000. Ce chiffre repose sur une conception stricte de la profession de boucher : 15 500 bouchers ayant diversifié leur activité, en vendant des sandwiches par exemple, ont en effet été sortis de la définition statistique des boucheries et charcuteries stricto sensu, mais restent dans la catégorie des " commerces alimentaires hors tabac " de l'INSEE, au sein de laquelle seuls 11% des effectifs ont un chiffre d'affaire supérieur à 2,5 millions de francs.

Les données officielles relative au chiffre d'affaire des entreprises assujetties à la taxe sur les achats de viande n'apparaissent pas contestables dans les ordres de grandeur qu'elles fournissent. Cependant, les services statistiques du ministère de l'agriculture conviennent que la composition de l'assiette de cette taxe est très difficile à établir et que, statistiquement du moins, l'assiette d'une taxe à l'abattage serait beaucoup plus simple à déterminer.

4. Le rendement de la taxe ne fait pas l'objet d'estimations fiables


Selon les informations transmises par le CNASEA à votre rapporteur, la collecte de la taxe d'équarrissage en 1997 à été conforme aux prévisions. Hormis des difficultés dans les premiers mois, liées à la mise en place de la taxe, le produit s'élève à environ 600 millions de francs. Selon le bureau des études et des affaires fiscales du ministère de l'Agriculture, le produit constaté en 1997 a été de 520 millions de francs. Le ministre de l'Agriculture a déclaré pendant la discussion de la loi de finances pour 1998 que le " produit anticipé " de la taxe était de 530 millions de francs.

Pourtant, les calculs de rendement reposent sur des hypothèses fragiles, liées aux difficultés de recenser l'ensemble des entreprises assujetties. Le SCEES, qui a réalisé les estimations, a procédé en 1996 à des simulations à partir de deux séries statistiques différentes :

- les comptes de commerce de l'INSEE, qui fournissent les ventes de l'ensemble des entreprises, et desquels le montant des achats est déduit en appliquant les taux de marges ;

- les enquêtes EAE du SCEES, qui recensent les ventes de la filière aux distributeurs, mais ne concernent que les entreprises de plus de 10 salariés.

Les tableaux ci-dessous retracent les montants d'achats déterminés selon chacune des méthodes :

Répartition des achats en fonction du CAHT (d'après les comptes de commerce)

 

Achats taxables d'un montant inférieur à 1,5 MF (125 000 F par mois)

Achats taxables d'un montant supérieur à 1,5 MF

 

Montant

%

Montant

%

Entreprises dont le CAHT est > 2,5 MF
GMS

1.824

1,9 %

92.250

97,7 %

Supérettes

2.852

35,6 %

4.279

53,4 %

Boucheries, charcuteries

2.388

6,3 %

394

1,0 %

charcuteries artisanales

1.083

12,5 %

44

0,5 %

Pet-food

2.000

25,0 %

5.000

62,5 %

TOTAL

10.147

6,5 %

101.967

64,9 %

Entreprises dont le CAHT est > 3 MF
GMS

1.715

1,8 %

92.250

97,7 %

Supérettes

1.630

20,4 %

4.000

50,0 %

Boucheries, charcuteries

1.500

3,9 %

350

0,9 %

charcuteries artisanales

603

7,0 %

44

0,5 %

Pet-food

1.500

18,8 %

4.500

56,3 %

TOTAL

6.948

4,4 %

101.144

64,4 %

Entreprises dont le CAHT est > 5 MF
GMS

841

0,9 %

92.250

97,7 %

Supérettes

1.649

20,6 %

2.476

30,9 %

Boucheries, charcuteries

101

0,3 %

394

1,0 %

charcuteries artisanales

1.078

12,5 %

44

0,5 %

Pet-food

2.000

25,0 %

5.000

62,5 %

TOTAL

5.669

3,6 %

100.164

63,7 %

Répartition des achats en fonction du CAHT (d'après l'EAE IAA du SCEES)

 

Achats taxables d'un montant inférieur à 1,5 MF (125 000 F par mois)

Achats taxables d'un montant supérieur à 1,5 MF

 
 
 

Montant

%

Montant

%

Entreprises dont le CAHT est > 2,5 MF
 
 
 
 
GMS + supérettes

3.378

4,6 %

69.730

94,2 %

Boucheries, charcuteries

2.196

6,3 %

362

1,0 %

charcuteries artisanales

1.083

12,5 %

44

0,5 %

Pet-food

2.000

25,0 %

5.000

62,5 %

TOTAL

8.657

6,9 %

75.136

59,8 %

Entreprises dont le CAHT est > 3 MF
 
 
GMS + supérettes

2.416

3,3 %

69.528

94,0 %

Boucheries, charcuteries

1.380

3,9 %

322

0,9 %

charcuteries artisanales

603

7,0 %

44

0,5 %

Pet-food

1.500

18,8 %

4.500

56,3 %

TOTAL

5.899

4,7 %

74.394

59,2 %

Entreprises dont le CAHT est > 5 MF
 
 
 
 
GMS

554

0,9 %

60.144

97,7 %

Supérettes

1.112

20,6 %

1.669

30,9 %

Boucheries, charcuteries

96

0,3 %

321

0,9 %

charcuteries artisanales

1.078

12,5 %

44

0,5 %

Pet-food

2.000

25,0 %

5.000

62,5 %

TOTAL

3.728

3,6 %

65.509

63,7 %

A partir de ces montants, le rendement des deux taxes est estimé en applicant les deux taux (0,6 et 1% pour la taxe d'équarissage, 0,3 et 0,5% pour la taxe addtionnelle) :

Produit de la taxe additionnelle évalué en appliquant les taux de la taxe (0,3 et 0,5%) aux montants d'achats déterminés par deux sources statistiques distinctes

(en millions de francs)

SEUIL

EAE - SCEES

INSEE

> 2,5 MF

400,16

540,27

> 3 MF

389,66

526,4

> 5 MF

338,72

517,82

Produit de la taxe d'équarrissage évalué en appliquant les taux de la taxe (0,6 et 1 %)
aux montants d'achats déterminés par deux sources statistiques distinctes

(en millions de francs)

SEUIL

EAE - SCEES

INSEE

> 2,5 MF

803

1.080

> 3 MF

779

1.053

> 5 MF

677

1.035

Il ressort de ces simulations que le rendement théorique est très supérieur au produit effectif constaté . En outre, les montants obtenus à partir des données du SCEES, qui ne prennent en compte que les entreprises de plus de 10 salariés, sont plus proches de la réalité que ceux obtenus à partir des chiffres de l'INSEE, alors qu'un nombre important des contribuables de la taxe sont des entreprises de moins de 10 salariés.

Les services du ministère de l'agriculture ne se sont pas déclarés en mesure de fournir à votre rapporteur une explication de ces résultats surprenants. Trois pistes semblent possibles à explorer :

- le nombre des redevables serait surestimé. Cette piste ne semble pas avérée car, s'agissant des grandes et moyennes surfaces, dont le nombre, le chiffre d'affaire et le montant des achats sont connus avec certitude, le montant qu'elles sont statistiquement censées acquitter est supérieur au produit total constaté ;

- la taxe pourrait n'être pas acquittée sur l'ensemble des achats ;

- les informations recueillies par votre rapporteur font généralement état d'une collecte de la taxe conforme aux espérances. Pourtant, le graphique ci-dessous, élaboré à partir d'informations transmises par le ministère de l'Agriculture, conduit à ne pas exclure l'hypothèse d'une montée en charge progressive du rendement de la taxe.

(en millions de francs)

L'écart entre le produit constaté et l'application des taux de la taxe aux montants d'achats réalisés par l'ensemble des entreprises assujetties, sachant que le nombre de redevable ne semble pas contestable, est mystérieux. Il est cependant possible de retenir deux choses :

Si les données à partir desquelles a été élaborée la taxe d'équarissage ne permettent pas prévoir le rendement de la taxe, elles renseignent sur la répartition des effectifs en fonction de leur chiffre d'affaire hors taxe.

On constate à partir des simulations que le relèvement du seuil d'exonération n'entraîne pas de perte de recette importante. Ceci conduit à penser que le nombre d'entreprises redevables de la taxe dont le chiffre d'affaire est compris entre 2,5 et 5 millions de francs est très faible.

La possibilité que de nombreux bouchers charcutiers réalisent un chiffre d'affaire supérieur à 5 millions de francs étant écartée, ce résultat semble accréditer l'idée selon laquelle la plupart des artisans et des petits commerces sont déjà exonérés du paiement de la taxe.

S'agissant de la taxe additionnelle, le chiffrage du Gouvernement repose sur le produit constaté de la taxe d'équarissage

Le Gouvernement, dans son étude d'impact, évalue le produit de la taxe additionnelle à 250 millions de francs. Ce montant correspond au rendement souhaité. Il a été obtenu en divisant par deux les taux de la taxe principale. Ces taux ayant permis de rapporter 600 millions de francs, leur moitié devrait en toute logique assurer un produit de 250 à 300 millions de francs.

III - COMMENT AMÉNAGER LE DISPOSITIF ?

A. LE RECOURS A UN FINANCEMENT BUDGÉTAIRE NE DEVRAIT PAS ÊTRE ÉCARTÉ


Le financement de la mesure par le budget de l'Etat ne serait pas illogique tant pour des raisons de forme que fond. Sur la forme, il est délicat de financer l'élimination des farines par une taxe additionnelle " adossée " à une taxe présumée contraire au droit communautaire.

Sur le fond, cette mesure est justifiée par des considérations relatives aux notions de service public et de santé publique et, par conséquent, un appel à la solidarité nationale est envisageable.

En outre, le Gouvernement avait prévu au départ que l'opération pouvait coûter jusqu'à 450 millions de francs. En choisissant de prélever 250 millions de francs par la taxe additionnelle, il se sentait donc en mesure d'apporter jusqu'à 200 millions de francs sur des crédits budgétaires. Or, l'élimination des farines animales s'effectuera probablement pour un coût limité à environ 200 millions de francs.

Enfin, le rapport de l'Assemblée nationale consacré à l'article 41 du présent projet de loi considère que le taux de la taxe est " suffisamment faible pour qu'on ne puisse pas exclure qu'il soit répercuté sans trop de dommage sur le consommateur ". Votre rapporteur considère, au contraire, que si les Français doivent, in fine, financer l'élimination des farines animales non conformes, il serait préférable qu'ils le fassent directement, en tant que contribuables, plutôt qu'indirectement, en tant que consommateurs sur lesquels les entreprises répercuteraient le coût de la taxe. Ceci permettrait notamment d'éviter aux entreprises les coûts administratifs de gestion de la taxe et serait conforme au principe de solidarité nationale.

B. L'ORGANISATION DE LA TAXE NE PEUT PAS ÊTRE MODIFIÉE

Certains députés, conscients du caractère injuste d'un prélèvement supporté par des agents économiques étrangers à la difficulté à résoudre, ont proposé, lors de la première lecture du projet de loi à l'Assemblée nationale, des aménagements à la taxe additionnelle tels que :

- la prise en compte de la superficie des magasins dans la détermination de l'assiette de la taxe .

Proposé par M. George Sarre, ce critère avait été suggéré au Sénat dès 1996 par M. Philippe Marini. Un tel dispositif ne permet pourtant pas de rendre la taxe plus juste. En effet, certains magasins, en zone rurale notamment, peuvent avoir une taille très supérieure à celle de boucherie du centre des grandes villes, et un chiffre d'affaire très nettement inférieur. En outre, la nécessité de mesurer l'ensemble des magasins rend cette solution illusoire.

- la déconnexion des deux taxes .

Proposé par Mme Nicole Bricq, ce dispositif consiste à substituer à la taxe additionnelle une " taxe de modernisation des industries d'équarrissage et de traitement des farines animales non conformes ". La déconnexion, théorique puisque la taxe est perçue dans les conditions de la taxe d'équarrissage, permettrait de ne pas s'interdire de réformer cette dernière dès que l'occasion s'en présenterait. Mais elle comporterait l'inconvénient d'aboutir au même résultat que la taxe additionnelle, par un prélèvement sur les détaillants, tout en contraignant ces derniers à effectuer deux déclarations au lieu d'une seule.

Par conséquent, si le principe d'une taxe additionnelle n'est pas entièrement satisfaisant, la rédaction actuelle de l'article 41 semble la plus opérationnelle pour la mettre en oeuvre.

C. UN RELÈVEMENT DU SEUIL D'EXONÉRATION EST SOUHAITABLE

Votre commission des finances vous propose de relever le seuil d'exonération de 3 millions à 5 millions de francs de chiffre d'affaire hors taxe
. Cet aménagement aurait pour effet :

- de couper court à la controverse sur le nombre réel de petits commerces assujettis à la taxe , sans pour autant modifier substantiellement le produit de celle-ci. En effet, les données de l'INSEE et du ministère de l'agriculture montrent que le nombre de contribuables de la taxe dont le chiffre d'affaire est compris entre le seuil actuel de 2,5 millions et le seuil proposé de 5 millions est très faible. En outre, les taux proposés pour la taxe additionnelle sont prévus pour rapporter 300 millions de francs. Enfin, si le relèvement du seuil devait conduire à des pertes de recettes, le Gouvernement serait malgré tout en mesure d'atteindre son objectif d'un rendement de 250 millions de francs.

- de prendre acte du fait que l'opération coûtera vraisemblablement moins cher que prévu car, dans la quasi-totalité des cas, le retraitement sera préféré à l'incinération. Par conséquent, un allongement de la durée du prélèvement ne serait même pas nécessaire.

- de contribuer à la simplification administrative, encouragée par d'autres articles de ce texte . Aujourd'hui, les entreprises dont le chiffre d'affaire est compris entre 2,5 et à 5 millions de francs ne peuvent profiter de tous les avantages du régime simplifié de TVA, auquel elles ont droit, car le paiement de la taxe les oblige à trier les produits qui entrent dans le champ d'application de la taxe pour en déterminer l'assiette.

En harmonisant le seuil d'exonération de la taxe additionnelle avec celui du régime simplifié de la TVA, cette modification ouvrirait la voie à une souhaitable réforme future de la taxe d'équarrissage.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 41 bis (nouveau)

Modification des missions du fonds de gestion de l'espace rural

Commentaire : créé par l'article 38 de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995, le fonds de gestion de l'espace rurale (FGER) connaît une existence chaotique, tant d'un point de vue juridique que budgétaire. Le présent article redonne ainsi au FGER sa vocation originelle, cette vocation ayant connu des évolutions multiples depuis 1995.

I - LES DYSFONCTIONNEMENTS BUDGÉTAIRES DU FGER


Le FGER est un fonds qui ne dispose pas de la personnalité morale. Il est géré par le ministère de l'Agriculture et ses crédits figurent au chapitre 44-83 du budget de ce ministère. Ces crédits sont presque intégralement déconcentrés. Ils sont alors distribués par le préfet dans le cadre d'orientations pluriannuelles départementales définies après consultation d'une commission départementale de gestion de l'espace (CODEGE).

Doté de 500 millions de francs en 1995 et de 388 millions de francs en 1996, le FGER faillit disparaître en 1997. Devant l'émotion des parlementaires à l'annonce de cette décision, le fonds fut finalement doté de 100 millions de francs à l'Assemblée nationale et de 50 supplémentaires lors de la discussion au Sénat. Mais le chapitre 44-83 du budget du ministère de l'Agriculture devait en cours d'année faire l'objet d'une spectaculaire annulation de crédit portant sur 145 millions de francs, soit 96,6% de la dotation du FGER.

En 1998, le fonds dispose de 140 millions de francs et le Secrétaire d'Etat chargé du budget a annoncé, au cours de la discussion budgétaire à l'Assemblée nationale, son intention de ne pas amputer les crédits du FGER.

Si elles sont symboliquement choquantes, les décisions prises en 1997 de ne pas doter le fonds, puis d'en annuler les crédits, sont compréhensibles budgétairement compte tenu, d'une part, du montant de crédits reportés disponibles et, d'autre part, du niveau de consommation des crédits.

Année

LFI

Annulations crédits

Crédits ouverts

Crédits consommés

1995

500

164

335

51

1996

388

170

502

199

1997

150

145

308

n.d.

1998

140

nd

nd

nd

Ainsi, en 1997, malgré l'annulation de 145 des 150 millions de francs inscrits dans la loi de finances, les crédits ouverts s'élevaient à 308 millions de francs, soit 54% de plus que le montant des crédits consommés en 1996.

Dans son rapport spécial consacré aux crédits de l'aménagement du territoire dans la loi de finances pour 1998, notre collègue Roger Besse attribue les dysfonctionnements du FGER " à des lourdeurs de procédure retardant la déconcentration des crédits, ainsi qu'à la lenteur du processus de décision au sein des départements ".

II - UNE DÉFINITION VERSATILE

L'article L112-16 du code rural, qui détermine les missions du FGER, a fait l'objet de quatre votes au Parlement depuis 1995 :

L'article 38 de la loi d'orientation de 1995, devenue l'article L.112-16 du code rural, prévoyait à l'origine que " le fonds de gestion de l'espace rural contribue au financement de tout projet d'intérêt collectif concourant à l'entretien ou à la réhabilitation de l'espace rural . Il doit être en priorité affecté aux agriculteurs ou à leurs groupements ".

Cette rédaction prend en compte le fait que la gestion de l'espace rural incombe également à des acteurs extérieurs au monde agricole.

L'année suivante, un amendement, adopté par l'Assemblée nationale pendant la discussion sur le projet de loi de finances pour 1997, modifiait le texte de l'article L112-16 et proposait la rédaction suivante : " Le fonds de gestion de l'espace rural contribue au financement de tout projet d'intérêt collectif concourant à l'entretien ou à la réhabilitation de l'espace rural et dont les agriculteurs ou leurs groupements sont parties prenantes ".

Le renforcement de la vocation " agricole " du fonds avait deux ambitions aux yeux de ses promoteurs :

- affirmer que les agriculteurs n'étaient pas une composante accessoire du FGER mais en étaient totalement partie prenante ;

- confirmer que l'agriculture était non seulement un acteur économique mais également un gestionnaire de l'espace.

Au cours de la discussion de la loi de finances pour 1998, à l'initiative de M. Augustin Bonrepaux, les députés sont revenus à la première rédaction de l'article L112-16 mais leur amendement, devenu l'article 75 de la loi de finances, a été censuré par le Conseil constitutionnel en raison de son caractère étranger au domaine des lois de finances.

Le présent projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a fourni aux députés l'occasion de présenter à nouveau le même amendement, qui a été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale contre l'avis du Gouvernement.

La situation est la suivante : en deux ans, le principe d'un FGER " rural " été défendu par l'Assemblée nationale de l'actuelle législature et le précédent gouvernement, et celui d'un FGER " agricole " a été soutenu par l'Assemblée de la précédente législature et le gouvernement actuel.

La rédaction aujourd'hui proposée semble la plus adaptée à la gestion de l'espace rural. Toutefois, votre rapporteur s'interroge sur la nécessité de modifier une nouvelle loi le code rural à quelques mois de la discussion du projet de loi d'orientation agricole.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

TITRE V

DISPOSITIONS DIVERSES

ARTICLE 42 A (nouveau)

Extension du régime de la transmission universelle des biens aux actifs apportés par une Caisse de crédit municipal à une société anonyme

Commentaire : inséré par l'Assemblée nationale, le présent article additionnel a pour objet de faciliter le transfert par une caisse de crédit municipal de ses biens et obligations à une société anonyme en faisant bénéficier ces apports partiels d'actifs du mécanisme de la transmission universelle.

Le présent article a pour objet de réparer un oubli. En effet, la loi n° 92-518 du 15 juin 1992 relative aux caisses de crédit municipal a autorisé ces dernières à confier l'exercice de leurs activités autres que le prêt sur gage à une filiale constituée sous la forme juridique d'une société anonyme agréée comme établissement de crédit et habilitée à exercer des activités de crédit aux particuliers.

La loi n'a cependant pas prévu les modalités selon lesquelles les caisses de crédit municipal pouvaient procéder aux transferts d'actifs nécessaires à la constitution de cette filiale.

Théoriquement, si une caisse souhaitait, dans une perspective de coopération et de restructuration, s'associer à un autre établissement au sein d'une filiale commune, elle devrait obtenir l'accord écrit et individuel de chacun des titulaires de comptes. On comprend qu'une telle contrainte rende difficile la réalisation d'un tel apport.

En pratique, d'après les informations recueillies par votre rapporteur général, aucune caisse de crédit municipal n'a profité de la liberté que lui octroyait la loi du 15 juin 1992.

Le présent article tend donc à les faire bénéficier du régime de la transmission universelle des biens tel que prévu à l'article 372-1 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966, modifiée en dernier lieu par la loi n° 88-17 du 5 janvier 1988.

Cet article dispose :

" La fusion ou la scission entraîne la dissolution sans liquidation des sociétés qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine aux sociétés bénéficiaires, dans l'état où il se trouve à la date de réalisation définitive de l'opération. "

Ainsi, en cas de fusion, la société absorbante se substitue à la société absorbée dans tous ses droits, biens et obligations. Les créanciers de la société absorbée deviennent les créanciers de la société absorbante. Cet automatisme joue également à l'égard des débiteurs de la société absorbée qui ont désormais affaire à un nouveau créancier.

Ce mécanisme est en principe réservé aux opérations de fusion ou de scission mais depuis un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 16 février 1988, il est de jurisprudence constante de l'appliquer aux apports partiels d'actif placés sous le régime des scissions.

Les conséquences pratiques en sont considérables :

- les créances transmises à l'occasion d'un apport partiel d'actif, placé sous le régime des scissions, n'emportent pas d'obligation pour la société apporteuse de respecter les formalités de publicité de l'article 1690 du code civil ;

- les créances se trouvent en principe transmises sans novation et avec l'ensemble des garanties et accessoires qui leur sont attachés ;

- les dettes qui se rattachent à la branche d'activité apportée sont transférées de plein droit et sans novation à la société bénéficiaire dès lors que le traité d'apport ne les a pas expressément exclues de l'objet de l'apport partiel d'actif ;

- en vertu de l'article 35-1 du décret du 30 septembre 1953, la transmission du bail commercial se réalise de plein droit, nonobstant toute clause contraire.

Jusqu'à présent, les caisses de crédit municipal ne pouvaient se voir appliquer ce régime en raison de leur statut juridique.

En effet, le bénéfice de ce régime préférentiel est subordonné à l'assimilation déclarée de l'apport partiel d'actif à une scission. Or, la lettre des articles 387 et 388-1 de la loi du 24 juillet 1966, réserve cette faculté aux seules sociétés anonymes et sociétés à responsabilité limitée .

Les caisses de crédit municipal, en tant qu'établissements publics communaux de crédit et d'aide sociale, et contrairement au plus grand nombre des établissements de crédit, ne peuvent donc se prévaloir de ce mécanisme dans la mesure où elles ne revêtent ni la forme de société anonyme, ni celle de SARL.

Le présent article a pour objet de compléter le texte de la loi du 15 juin 1992, en réputant assimilable à une scission au regard du mécanisme de la transmission universelle, l'apport partiel d'actif réalisé par une caisse de crédit municipal au profit d'une société anonyme créée à cet effet.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

ARTICLE 42

Aménagement des modalités de paiement des impôts par virement ou prélèvement automatique

Commentaire : le présent article d'une part rend obligatoire le paiement par prélèvement automatique ou virement sur le compte courant du Trésor à la Banque de France des principaux impôts recouvrés par les comptables du Trésor lorsque la somme due est égale ou supérieure à 500.000 francs et, d'autre part, réduit le seuil de chiffre d'affaires au-delà duquel le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée par virement est obligatoire.

Les contribuables disposent d'une grande liberté dans les moyens de paiement de l'impôt : par versement d'espèces, par remises de chèques ou effets bancaires ou postaux ou encore par versement ou virement à l'un des comptes externes de disponibilités ouverts au nom du comptable public

Cette liberté de paiement a cependant des inconvénients pour le Trésor. D'une part, la multiplicité des moyens de paiement gène la dématérialisation et la simplification de l'acte de paiement. D'autre part, elle ne permet pas un lissage des rentrées fiscales qui facilite l'exécution du budget.

Certaines mesures ont déjà été prises pour améliorer le paiement de l'impôt par le développement des prélèvements et des virements. Le présent article élargit encore le champ d'application de la procédure de paiement par prélèvement ou virement.

En ce qui concerne les impôts recouvrés par le Trésor public, il abaisse le seuil à partir duquel le paiement par virement de l'impôt sur les sociétés et la taxe professionnelle devient obligatoire de 1 million de francs à 500.000 francs. En outre, il étend cette obligation aux pricipaux impôts recouvrés par les comptables du Trésor (impôts sur le revenu, taxe d'habitation et taxes foncières, taxe sur les salaires).

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée, le présent article propose d'abaisser le seuil à partir duquel les entreprises doivent acquitter cette taxe par virement, de 100 millions de francs de chiffre d'affaires à 10 millions de francs à compter du 1er janvier 1999 et à 5 millions de francs à partir du 1er janvier 2000.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 43

Modalités de recensement des bénéficiaires de l'accord du 27 mai 1997 entre le Gouvernement de la République française et
le Gouvernement de la Fédération de Russie
sur le règlement définitif des créances réciproques financières
et réelles apparues antérieurement au 9 mai 1945

Commentaire : le présent article tend à ouvrir les opérations de recensement des personnes titulaires de créances sur la Russie non honorées à la suite de la révolution d'octobre 1917, afin qu'elles puissent être indemnisées en application de l'accord conclu le 27 mai 1997 entre la France et la Fédération de Russie.

I - L'INDEMNISATION PRÉVUE PAR L'ACCORD FRANCO-RUSSE DU 27 MAI 1997


Le présent article constitue une modalité d'application en droit interne de l'accord international signé le 27 mai 1997 entre la République française et la Fédération de Russie. Une présentation détaillée du contexte historique et diplomatique de cet accord se trouve dans le rapport (n°150, 1997-1998) fait par notre excellent collègue Claude Estier au nom de la commission des affaires étrangères.

La question des investisseurs français spoliés par la révolution bolchevique est plus large que la seule répudiation par Lénine, en janvier 1918, des dettes du Gouvernement impérial. Elle concerne également les biens possédés en Russie par des Français, qui ont été collectivisés. Certains de nos compatriotes se sont ainsi trouvé dépossédés plus tardivement, à l'occasion des annexions réalisées par l'URSS en Europe centrale et orientale entre 1939 et 1945. Ceci explique d'ailleurs que le champ de l'accord couvre les créances antérieures au 9 mai 1945.

Les Français dépossédés par la nationalisation des biens des étrangers ont bénéficié d'une indemnisation partielle dès 1928. Mais rien de tel n'avait été conclu au profit des porteurs de titres d'emprunt ou d'obligation.

D'autres Etats ont obtenu de la Russie des accords d'indemnisation plus tôt que la France, qui était pourtant le principal créancier de la Russie avant 1917 : la Suède en 1941, le Canada en 1944, la Norvège en 1959, le Danemark en 1964, les Pays-Bas en 1967. Mais c'est l'accord soviéto-britannique de juillet 1986, relatif au dédommagement des porteurs d'emprunts russes, qui a réveillé les revendications des porteurs français.

Cet accord n'était toutefois pas directement transposable à la France, car l'indemnisation des porteurs britanniques a pu être financée par 45 millions de livres d'avoirs impériaux russes bloqués sur les comptes de la banque Barings. Le règlement du contentieux soviéto-britannique a donc été effectué à coût nul pour l'URSS.

Il n'en va pas de même pour l'accord du 27 mai 1997 entre la France et la Russie. S'agissant de ses modalités juridiques, la Russie s'engage à verser au Gouvernement français une somme forfaitaire, pour "solde de tout compte", à charge pour ce dernier de procéder à l'indemnisation de ses ressortissants. Chacun des deux Etats contractants renonce aux créances détenues par ses pouvoirs publics, ainsi qu'à soutenir les recours de ses ressortissants.

Formellement, l'abandon de créances est mutuel, puisque la Russie renonce à ses propres revendications au titre des dommages imputables à l'intervention française de 1918-1922 contre la Russie soviétique, de l'or remis à l'Allemagne par la Russie en vertu de l'accord complémentaire au traité de Brest-Litovsk et ensuite attribué à la France en vertu du traité de Versailles, et de l'or prétendument remis à la France par l'amiral Koltchak. Toutefois, la France n'a jamais reconnu la validité de ces créances présentées par la Russie.

S'agissant des modalités financières de l'accord, la Russie s'est engagée à verser 400 millions de dollars en huit versements semestriels, entre le 1er août 1997 et le 1er août 2000, soit 2,4 milliards de francs au cours actuel du dollar. L'indemnisation sera donc extrêmement partielle, la valeur actualisée des créances françaises étant estimée à 235 milliards de francs.

Un compte d'affectation spéciale n° 902-31, intitulé "Indemnisation au titre des créances françaises sur la Russie", a été créé par l'article 61 de la loi de finances pour 1998 afin d'accueillir les sommes versées. La Russie a déjà effectué trois versements, et les recettes du compte à la fin de février 1998 s'élèvent à 910,9 millions de francs.

A l'occasion de la discussion du présent article devant l'Assemblée nationale, le secrétaire d'Etat au budget a confirmé que les intérêts produits par ces sommes en attente de répartition viendront abonder le principal. Une disposition ad hoc devrait être votée dans la prochaine loi de finances.

II - LE RECENSEMENT DES DÉTENTEURS FRANÇAIS DE CRÉANCES RUSSES PRÉVU PAR LE PRESSENT ARTICLE

L'objet du présent article est d'ouvrir les opérations de recensement des personnes titulaires des créances mentionnées à l'article I de l'accord franco-russe du 27 mai 1997. Seules les personnes physiques et morales françaises peuvent bénéficier de l'accord. Les opérations de recensement, dont les modalités seront précisées par décret, dureront six mois.

Il convient de souligner que le second alinéa du présent article prévoit que, à défaut d'avoir déclaré leurs créances dans un délai de six mois à compter de l'entrée en vigueur du décret, les créanciers ne seront plus admis au bénéfice des opérations de recensement et ne pourront prétendre à une indemnisation au titre de l'accord précité.

Cette clause couperet, qui peut sembler rigoureuse, permet de prévenir toute complication ultérieure et de clore définitivement un contentieux qui dure depuis maintenant plus de quatre-vingts ans. Toutefois, pour être équitable, elle implique de la part des pouvoirs publics une campagne d'information efficace.

Deux circuits seront mis en place pour le recensement des créances visées par l'accord du 27 mai 1997, sous la responsabilité de la Direction de la comptabilité publique :

- le recensement des titres d'emprunt et d'obligation se fera auprès du réseau du Trésor public, le réseau des banques et de la poste pouvant servir d'intermédiaire pour les porteurs qui le souhaitent ;

- le recensement et l'évaluation des biens nationalisés sera confié à l'Agence française pour l'indemnisation des Français d'outre-mer (ANIFOM). Cette agence, créée en 1970 pour instruire les dossiers d'indemnisation des biens des rapatriés, semble en effet particulièrement qualifiée pour ce genre de mission. Elle est disponible pour cette tâche nouvelle, car le processus prévu par la dernière loi d'indemnisation des rapatriés de 1987 est parvenu à son terme l'an dernier.

Il convient de signaler que la frontière n'est pas parfaitement étanche entre les deux circuits de recensement. En effet, certaines des sociétés situées en Russie et nationalisées après la révolution détenaient des titres d'emprunt ou d'obligation. Les personnes spoliées, ou leurs ayant droits, pourront soit présenter leurs titres aux guichets du trésor, soit les joindre au dossier qu'ils confieront à l'ANIFOM.

La procédure de recensement retenue vise à minimiser les coûts et les délais. Elle ne préjuge en rien des modalités d'évaluation ni des taux d'indemnisation des créances, selon leur nature, qui seront arrêtés ultérieurement.

Le gouvernement déterminera ces modalités d'indemnisation sur la base des propositions de la commission de suivi du mémorandum d'accord signé le 26 novembre 1996, instituée par un décret du 12 février 1997 et présidée par M. Jean-Claude Paye, conseiller d'Etat en service extraordinaire. Un nouveau dispositif législatif sera vraisemblablement nécessaire.

III - LA QUESTION DU TRAITEMENT PRIVILÉGIÉ DES TITRES DÉTENUS PAR VOIE D'HÉRITAGE

L'une des demandes constantes de certaines associations de porteurs d'emprunts russes est que seules les personnes qui détiennent leurs titres par voie d'héritage soient indemnisées, ou du moins, que celles-ci bénéficient d'un taux d'indemnisation préférentiel.

A l'appui de cette revendication, les associations font valoir que les personnes qui ont acquis, pour une somme symbolique, leurs titres sur le marché ou chez les brocanteurs et numismates après 1917 n'ont pas été réellement spoliées et que, par ailleurs, la spéculation s'est développée à partir du moment où l'hypothèse d'une indemnisation est devenue vraisemblable.

Toutefois, cette demande pose des problèmes au regard du droit des valeurs mobilières, pour lequel "possession vaut titre". Elle introduirait en outre une discrimination entre des titres identiques, selon leur origine de propriété. Enfin, elle serait contradictoire avec la logique qui a été suivie par les pouvoirs publics depuis 1917, qui n'ont jamais suspendu la cotation des emprunts russes, jusqu'à la veille de l'accord du 27 mai 1997. D'une certaine manière, la spéculation sur les chances d'un remboursement des emprunts russes a toujours été autorisée, sinon encouragée, et elle était certainement plus forte dans les années 1920 qu'à la fin des années 1990.

Par ailleurs, la demande des associations pose également des problèmes au regard du droit des successions. En effet, s'agissant de titres qui ont été pendant longtemps communément considérés comme dépourvus de valeur, il est douteux que toutes les règles et procédures aient été respectées. Dès lors, des problèmes de preuve se poseraient pour leur possesseur actuel, même de bonne foi. L'enchaînement des successions et des indivisions risque d'avoir pour effet que le porteur du titre, qui en est pleinement propriétaire au regard du droit financier, n'en soit pas régulièrement propriétaire au regard du droit civil.

Enfin, la complication pratique d'une procédure de contrôle et de vérification minutieuse des droits des "porteurs par héritage" aurait pour effet d'entraîner des coûts de gestion disproportionnés avec l'enjeu, et de retarder au-delà du raisonnable la dernière phase de l'indemnisation proprement dite.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 44

Gestion administrative et financière
de l'institut d'études politiques de Paris

Commentaire : le présent article tend à rehausser au niveau législatif la délégation confiée à la fondation nationale des sciences politiques pour assurer la gestion administrative et financière de l'institut d'études politiques. En outre, il propose de valider la délibération de son conseil d'administration ayant fixé les droits de scolarité pour 1992-1993.

I - LA SPÉCIFICITÉ DE L'INSTITUT D'ETUDES POLITIQUES DE PARIS SUSCEPTIBLE D'ÊTRE REMISE EN CAUSE

A. LA SPECIFICITE HISTORIQUE DE L'INSTITUT D'ETUDES POLITIQUES DE PARIS


L'institut d'études politiques de Paris (IEP) est l'héritier, même lointain, de l'école libre des sciences politiques fondée en 1872 par Emile Boutmy sous l'inspiration de Taine et de Renan afin d'offrir une formation spécifique essentiellement axée sur les sciences politiques dans une optique comparatiste, que l'université n'était pas en mesure d'offrir.

En 1945, le gouvernement du général de Gaulle voulut maintenir la spécificité de cette institution qui avait rencontré un succès considérable, tout en procédant à sa nationalisation. L'ordonnance n° 45-2284 du 9 octobre 1945 portant création d'une fondation nationale des sciences politiques (FNSP) et le décret n °45-2288 du 9 octobre 1945 portant création de l'institut d'études politiques à Paris ont tout à la fois intégré l'IEP au sein de l'enseignement supérieur et assuré son autonomie à l'égard de l'Etat en créant la FNSP à laquelle furent dévolus les bâtiments et la bibliothèque de l'ancienne école libre des sciences politiques.

Depuis cette date, la spécificité de l'IEP de Paris est rappelée après chaque grande loi relative à l'enseignement supérieur, par décret, notamment pour ce qui concerne la délégation de sa gestion administrative et financière à la FNSP.

Aujourd'hui, le fonctionnement et l'organisation de l'IEP de Paris sont régis par le décret n °85-497 du 10 mai 1985 relatif à l'institut d'études politiques de Paris.

L'article premier de ce décret dispose que " L'IEP de Paris constitue un grand établissement soumis aux dispositions de la loi n °84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur . "

Pourtant, d'autres articles de ce décret consacrent la spécificité de l'IEP de Paris et son étroite union avec la fondation nationale des sciences politiques.

Ainsi, le deuxième alinéa de l'article 2 dispose que " l'institut d'études politiques de Paris exerce ses activités en liaison avec les services de documentation et les centres de recherche de la fondation nationale des sciences politiques . "

En outre, selon l'article 11, " la gestion administrative et financière de l'institut d'études politiques de Paris est assurée par la fondation nationale des sciences politiques ".

Or, cette spécificité est remise en cause.

B. LA REMISE EN CAUSE DE LA SPÉCIFITÉ DE L'INSTITUT D'ÉTUDES POLITIQUES DE PARIS

Chaque année, le conseil d'administration de la fondation nationale des sciences politiques fixe le budget de l'ensemble "FNSP-IEP" et le montant des droits de scolarité. Or, deux requêtes déposées le 22 août 1992 ont demandé l'annulation pour excès de pouvoir de la délibération du 23 juin 1992 relative à l'année universitaire 1992/1993.

Le tribunal administratif de Paris les a rejetées dans un jugement du 9 mars 1994 mais l'association générale des étudiants de Sciences-Po s'est pourvue en appel devant le Conseil d'Etat qui ne s'est pas encore, à ce jour, prononcé.

Les requérants poursuivent deux objectifs.

D'une part, ils contestent la légalité des droits de scolarité fixés par le conseil d'administration parce qu'ils sont plus élevés que ceux pratiqués par les universités. Selon les instances dirigeantes de Sciences-Po, cette difficulté a été résolue. En effet, l'ambiguïté résultait de ce que cet institut délivre deux sortes de diplômes, à savoir des diplômes qui lui sont propres et des diplômes nationaux de troisième cycle (DESS, DEA et doctorats).

En ce qui concerne les droits de scolarité afin d'obtenir le diplôme propre à l'IEP de Paris, ceux-ci peuvent être librement fixés puisque l'arrêté du ministre de l'éducation nationale et du ministre délégué au budget, du 5 août 1991, pris en application de l'article 48 de la loi de finances pour 1951, délègue la fixation des montants des droits de scolarité afférents aux diplômes propres au conseil d'administration des établissements, en précisant que cette redevance ne peut être inférieure à celle imposée pour un diplôme national.

Votre rapporteur tient à ce titre à rappeler que la forte augmentation des droits de scolarité constatée entre 1987/1988 et 1991/1992 ne doit pas conduire, de fait, à une sélection des étudiants par l'argent. Une telle situation serait, en effet, en complète contradiction avec l'exposé des motifs de l'ordonnance n °45-2284 du 9 octobre 1945 portant création d'une fondation nationale des sciences politiques et qui reconnaissait que l'une des " ombres " de l'école libre des sciences politiques avait été  d'avoir " un champ d'action limité aux jeunes gens à qui leur situation sociale permettait des études longues et coûteuses ".

Sur ce point, les informations recueillies par votre rapporteur ont permis d'établir que Sciences-Po a mis en place une véritable politique d'aide sociale, au-delà des diverses bourses accordées par l'Etat.

En ce qui concerne les droits forfaitaires prélevés par la FNSP en sus des droits nationaux, on peut légitimement s'interroger sur leur légalité, dans la mesure où depuis la rentrée 1997, ces droits de scolarité sont fixés conformément à l'arrêté ministériel.

D'autre part, en exigeant que l'IEP de Paris vote son budget, les auteurs de la requête visent à dissocier ce dernier de la FNSP pour l'aligner sur le régime des autres établissements d'enseignement supérieur. Or, si la dénonciation du lien entre l'IEP de Paris et la FNSP contraste avec la volonté politique permanente de maintenir ce lien, l'argument juridique utilisé s'avère, lui, pertinent.

En effet, la délégation de la gestion administrative et financière de l'IEP de Paris à la FNSP, symbole du lien organique entre les deux institutions, a toujours été consacrée par voie réglementaire.

Or, l'article 20 de la loi n °84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur, auquel est soumise l'IEP de Paris en tant que grand établissement, dispose que " les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel sont des établissements nationaux d'enseignement supérieur et de recherche jouissant de la personnalité morale et de l'autonomie pédagogique et scientifique, administrative et financière. "

L'article 42 ajoute que " chaque établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel vote son budget, qui doit être en équilibre réel ,et faire l'objet d'une publicité appropriée . "

Le Conseil d'Etat pourrait exciper de l'illégalité du décret de 1985 sur la base duquel la délibération a été prise au regard de la loi de 1984 pour annuler ladite délibération. Le présent article propose de prévenir cette annulation et d'éviter ainsi une remise en cause du statut de Sciences-Po.

II - LA PRÉSERVATION DU STATUT SPÉCIFIQUE DE L'IEP DE PARIS

A. LE PARTICULARISME DE SCIENCES-PO REHAUSSÉ AU NIVEAU LÉGISLATIF


Dans son paragraphe I, le présent article propose d'insérer deux alinéas dans l'article 2 de l'ordonnance n°45-2284 du 9 octobre 1945 portant création d'une fondation des sciences politiques et ayant valeur législative.

Le premier alinéa dispose que cette dernière " assure la gestion administrative et financière de l'institut d'études politiques de Paris. Elle fixe notamment les moyens de fonctionnement de l'institut et les droits de scolarité pour les diplômes propres à l'institut. "

Cette disposition, jusqu'à présent fixée au niveau réglementaire sera donc portée au niveau législatif afin de consacrer la volonté du législateur de maintenir le lien organique existant entre l'IEP et la FNSP.

Par ailleurs, certains députés ont tenu à dénoncer l'absence de représentants des étudiants au conseil d'administration de la fondation, instance qui fixe le budget de la "FNSP-IEP" et le montant des droits de scolarité.

Cette absence doit cependant être relativisée. En effet, les informations recueillies par votre rapporteur révèlent que le conseil de direction de l'IEP, qui comporte des représentants élus des étudiants, délibère toujours et préalablement sur le projet soumis au conseil d'administration de la FNSP et que son avis a toujours été suivi. En outre, les délibérations du conseil d'administration et du conseil de direction sont préparées par une commission mixte à laquelle s'inscrivent, en ce qui concerne le conseil de direction, ceux des ses membres qui le désirent : tous les représentants étudiants peuvent donc y siéger sans limitation de nombre.

Toutefois, dans un souci de transparence et de compromis, le présent article propose d'insérer un autre alinéa à l'article 2 de l'ordonnance de 1945 pour permettre à cinq étudiants élus au conseil de direction de l'IEP de participer au conseil d'administration de la FNSP, avec voix délibérative, lorsque ce dernier examine le budget de l'IEP et fixe les droits de scolarité pour les formations menant à des diplômes propres de l'établissement.

En effet, la fondation fixe non seulement les montants des droits, mais prend également des décisions qui concernent ses activités propres. Il s'agit donc de concilier l'autonomie de la FNSP et la volonté légitime des étudiants de participer aux délibérations concernant l'IEP. Le chiffre de cinq étudiants a été retenu car il correspond au nombre de représentants du personnel présents au conseil d'administration.

B. LA VALIDATION DE LA DÉLIBÉRATION FIXANT LES DROITS DE SCOLARITÉ POUR L'ANNÉE 1992/1993

Même si le lien entre l'IEP et la FNSP est rehaussé au niveau législatif, cette modification n'entrera en vigueur qu'à partir de la promulgation de la présente loi. Le Conseil d'Etat, s'il retient l'exception d'illégalité soulevé par les requérants à l'encontre de l'article 11 du décret du 10 mai 1985, pourrait être porté à annuler la délibération du conseil d'administration de la FNSP du 23 juin 1992 qui fixe les droits de scolarité pour l'année universitaire1992-1993.

Ce risque n'est pas à écarter : l'élévation au niveau législatif de la délégation de la gestion administrative et financière de l'IEP à la FNSP, conduit, de fait, à s'interroger sur la légalité du décret du 10 mai 1985.

A cet égard, on peut légitimement s'étonner de ce que l'IEP, qui prépare les étudiants à exercer des fonctions de responsabilité, notamment au sein de la haute fonction publique ait attendu un recours formé par un syndicat d'étudiants pour prendre conscience de la fragilité de son statut juridique au regard du respect de la hiérarchie des normes.

Pour éviter que le cas échéant, le Conseil d'Etat n'annule la délibération du conseil d'administration du 23 juin 1992, le présent article propose de valider de manière préventive ladite délibération en tant qu'elle fixe les prévisions de recettes et de dépenses présentées pour l'exercice 1992 et les droits de scolarité afférents à la préparation des diplômes propres de l'IEP pour l'année universitaire 1992-1993.

Votre rapporteur s'étonne que, quatre ans après avoir été saisi, le Conseil d'Etat n'ait toujours pas statué sur ce contentieux, en apparence simple et ne nécessitant aucune enquête préliminaire.

Dans son rapport public pour 1995, le Conseil d'Etat affirmait que " la durée moyenne des litiges se réduit et qu'un effort tout particulier a été entrepris pour juger les affaires les plus anciennes ainsi que celles auxquelles il est le plus urgent d'apporter une solution ".

De façon générale, votre rapporteur souhaite également rappeler son opposition de principe à la multiplication des validations proposées au Parlement depuis quelques années, qui témoigne de la réticence de l'Etat à assumer ses responsabilités. Ces validations n'encouragent pas à remédier aux dysfonctionnements constatés. Votre rapporteur tient en outre à faire remarquer que les validations préventives, telles que celle qui est proposée par le présent article, sont d'autant plus critiquables qu'elles visent à contourner l'interdiction posée par le Conseil constitutionnel de censurer directement les décisions de justice.

Par ailleurs, votre rapporteur s'interroge sur la pertinence, au regard de l'intérêt général, de cette validation.

En effet, une éventuelle annulation contentieuse de cette délibération ne remettrait pas en cause le lien organique privilégié entre la FNSP et l'IEP de Paris. Le rehaussement au niveau législatif de la délégation confiée à la FNSP a justement pour conséquence de mettre fin à cette incertitude juridique relative à la nature des liens entre l'IEP et la FNSP. L'argument invoqué paraît donc contestable.

On peut également s'interroger sur la pertinence de l'argument financier invoqué. Si la délibération fixant les droits de scolarité pour l'année scolaire 1992-1993 était annulée, les étudiants seraient en droit de demander le remboursement de leurs frais de scolarité, ce qui représenterait un coût financier pour l'IEP de 14 millions de francs, soit 6 % de ses recettes. Il y a doute sur le point de savoir si, eu égard aux sommes concernées, la seule considération de l'intérêt financier soit un motif d'intérêt général autorisant le législateur à faire obstacle à une décision de justice à venir.

Certes, on peut imaginer que, sur le fondement d'une annulation de la délibération pour 1992-1993, les étudiants en scolarité les années ultérieures demandent, par la voie du recours en responsabilité, le remboursement des droits prélevés entre 1993 et 1998. L'enjeu financier serait alors beaucoup plus important (84 millions de francs).

C'est donc sous les réserves énoncées ci-dessus, et compte tenu des observations ici développées, que votre rapporteur vous demande de ne pas vous opposer à une telle validation.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 45

Prélèvement sur l'Association de gestion
du fonds des formations en alternance (AGEFAL)

Commentaire : le présent article institue une contribution exceptionnelle au budget de l'Etat de 500 millions de francs prélevée sur l'AGEFAL, association chargée de gérer la trésorerie des organismes collecteurs des fonds de la formation en alternance.

Les concours financiers des entreprises au titre de la formation continue sont soit directement alloués aux organismes de formation, soit transitent par des organismes intermédiaires et paritaires de financement. Ces derniers interviennent dans trois domaines : au titre du congé individuel de formation, du plan de formation des entreprises ou de l'alternance .

I - LES MISSIONS DE L'AGEFAL

L'AGEFAL gère la trésorerie des organismes collecteurs des fonds de la formation en alternance

Les règles concernant la participation des entreprises au financement de la formation professionnelle en alternance ont été fixées par l'article 30 de la loi de finances pour 1985. Cette formation s'adresse aux jeunes, est pour partie théorique et s'effectue pour l'autre partie en entreprise, dans le cadre de contrats de travail spécifiques (contrats de qualification, d'orientation ou d'adaptation).

L'article 74 de la loi quinquennale pour l'emploi du 20 décembre 1993 a rationalisé le dispositif de collecte de la participation des entreprises à la formation professionnelle, notamment pour ce qui relève de la formation en alternance. Elle a ainsi remplacé à compter du 1er janvier 1996 les 255 organismes collecteurs au titre du congé individuel, du plan de formation ou de l'alternance par 66 organismes nouvellement agréés, compétents exclusivement au titre de la formation en alternance ou du plan de formation des entreprises, que celles-ci comprennent plus ou moins de 10 salariés. Par ailleurs, 38 organismes interviennent au titre du congé individuel de formation.

En outre, les organismes compétents au titre de la formation en alternance doivent, en application des dispositions de l'article 45 de la loi de finances rectificative pour 1986 déposer leur trésorerie au sein d'un compte unique pouvant, le cas échéant, leur consentir des avances. Ce rôle de compte unique est joué par l'AGEFAL (association de type loi 1901) qui de ce fait a pour mission principale de transférer les excédents vers ceux des organismes ayant des besoins de trésorerie non couverts par leur collecte.

En 1997, l'ensemble des ressources collectées par les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) s'élevait à 6.300 millions de francs. Le résultat de l'AGEFAL en 1997, - 508 millions de francs, a réduit le niveau de sa trésorerie de 2.071 à 1.543 millions de francs au 31 décembre 1997. Au 31 mars 1998, elle était estimée à 1.510 millions de francs.

Situation financière de l'AGEFAL

(en millions de francs)

 

1995

1996

1997

Ressources

2.197

423 1

1.926

Charges

722

805

2.434 2

Résultat

1.475

- 382

- 508

Trésorerie (au 31/12)

2.506

2.071

1.543

1) Cette année n'est pas significative pour les ressources en raison d'une restructuation du réseau de collecte.

2) Y compris le prélèvement exceptionnel de 1.370 millions de francs.


II - LE PRÉLÈVEMENT PRÉVU PAR L'ARTICLE 45

Il constitue le troisième opéré en moins de deux ans sur les excédents de trésorerie des organismes collecteurs des fonds de la formation continue.

A ce titre, votre commission s'inquiète de la multiplication des prélèvements opérés sur les trésoreries d'organismes publics ou parapublics.

A. LES PRÉLÈVEMENTS DE 1996 ET 1997

L'article 29 de la loi de finances pour 1996 avait institué un fonds d'affectation des excédents financiers des organismes collectant les fonds du congé individuel de formation, ainsi qu'un prélèvement exceptionnel de 60 % sur les excédents financiers de ce fonds au profit du budget de l'Etat. Effectué le 31 août 1996, le versement avait atteint 1.465 millions de francs et notamment permis d'abonder les crédits consacrés aux primes d'apprentissage à hauteur de 900 millions de francs.

L'article 40 de la loi de finances pour 1997 a autorisé avant le 1er septembre 1997 un prélèvement exceptionnel de 40 % sur la trésorerie de l'AGEFAL. Son produit estimé alors à un milliard de francs s'était finalement élevé à 1.370 millions de francs en raison d'un niveau supérieur aux prévisions des excédents de l'AGEFAL. Il fut affecté au budget général et permit, de fait, de financer la suppression de l'économie que souhaitait réaliser le gouvernement sur la compensation de la réduction de la taxe professionnelle pour embauche et investissement (REI).

Au total ce sont donc 2.835 millions de francs qui ont déjà ainsi été prélevés en l'espace d'une année.

B. LE PRÉLÈVEMENT POUR 1998

1. Le dispositif envisagé


Cet article prévoit avant le 1er septembre 1998 un nouveau prélèvement d'un montant de 500 millions de francs au profit du budget de l'Etat selon des modalités identiques à celles du prélèvement opéré par l'article 40 de la loi de finances pour 1997 précitée.

Il s'en distingue cependant à un double titre :

- d'une part le montant du prélèvement proposé est fixé en valeur absolue (500 millions de francs) et non plus par l'application d'un taux à une assiette définie à l'avance. Il n'y a donc pas d'incertitude concernant son montant définitif exact à la différence de ce qui se produisit lors du précédent prélèvement de 1997 ;

- d'autre part, si ce prélèvement est versé "au budget de l'Etat", en vertu du respect de la règle de l'universalité budgétaire, il devrait avoir, d'après les indications qui avaient été fournies par le gouvernement lors de l'examen du projet de loi de finances pour 1998 une affectation précise.

Ainsi que cela avait été relevé par votre rapporteur spécial lors de la discussion des crédits de l'emploi et de la solidarité pour 1998, la dotation afférente aux primes à l'apprentissage transférées du budget des charges communes au budget de l'emploi avait fait l'objet initialement, dans le projet de loi de finances, d'une réduction de 400 millions de francs (4.874 millions de francs en 1998 contre 5.270 millions de francs en 1997, soit une diminution de 7,5 %). Celle-ci devrait être compensée intégralement par une contribution de 400 millions de francs versée au budget de l'Etat par les organismes paritaires collecteurs agréés.

Lors de l'examen du projet de loi de finances, le montant de la réduction des crédits affectés aux primes à l'apprentissage, avait été accru de 100 millions de francs et porté à 500 millions afin de gager une partie de la reconduction pour 1998 du plan textile. En conséquence figure dans le budget voté du ministère de l'emploi et de la solidarité (section emploi) pour 1998 un chapitre 43-05 destiné à la formation en alternance et dont les crédits ouverts sont fixés à 4.774 millions de francs. De ce fait, afin de compenser intégralement cette réduction, ledit prélèvement sur les organismes paritaires devait être porté de 400 à 500 millions de francs.

2. Éléments d'appréciation du dispositif

a) Le prélèvement qu'il vous est demandé d'autoriser par le présent article vise à régulariser une opération financière " exceptionnelle " évoquée lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1998

• Votre rapporteur souhaiterait cependant que le gouvernement puisse, lors de la discussion en séance publique de cet article confirmer explicitement l'affectation de cette somme. En effet lors de l'examen de cet article à l'Assemblée nationale, M. le Secrétaire d'État au Budget avait indiqué que " ces 500 millions permettront de financer un effort supplémentaire dans le cadre des mesures de lutte contre l'exclusion et notamment par un développement de la formation en alternance " 48( * ) . Il a par ailleurs confirmé qu'il s'agissait " de transformer de l'argent passif, une trésorerie dormante, comme l'a expliqué le rapporteur général, en argent actif pour lutter contre l'exclusion et permettre à des jeunes ou peut-être des moins jeunes d'accéder à des formations en alternance " 49( * ) .

• A ce titre votre rapporteur tient à relever que dans le projet de loi d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions ainsi que dans le programme de prévention et de lutte contre les exclusions figurent des mesures similaires et d'un montant sensiblement identique, en faveur des contrats de qualification 50( * ) .

• Il estime donc nécessaire que le gouvernement confirme l'affectation des fonds ainsi dégagés, conformément aux engagements pris lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1998. Il importe en effet que, dès l'encaissement effectif de cette recette soit ouvert, en contrepartie un crédit de 500 millions de francs sur le chapitre 43-05 du ministère de l'emploi.

• Par ailleurs, votre rapporteur ne peut que rappeler le caractère "exceptionnel" de ce nouveau prélèvement devenu désormais récurrent et annuel , qui porterait à 3.335 millions de francs le montant total des sommes prélevées en moins de deux ans sur les excédents de trésorerie des organismes collecteurs des fonds de la formation continue.

Néanmoins, ce nouveau prélèvement, d'ampleur plus limitée que les deux précédents, eu égard au montant des excédents actuels de trésorerie de l'AGEFAL, ne devrait pas, selon les informations communiquées à votre rapporteur, perturber son fonctionnement.

b) Cette opération est contestable au regard des principes du droit budgétaire et de la nécessité d'un bonne gestion des finances publiques.

Ainsi que le relevait votre rapporteur spécial lors de l'examen dans le projet de loi de finances pour 1998 des crédits du ministère de l'emploi, " ces prélèvements inopinés sur les fonds de l'alternance posent un véritable problème du point de vue de l'unité budgétaire ". De façon plus générale, il apparaît en effet indispensable que les principes généraux du droit budgétaire, notamment en l'espèce, ceux de l'unité et de l'universalité budgétaire soient pleinement respectés par le gouvernement.

Ce prélèvement pose également un problème de principe qui est celui de la justification des prélèvements opérés sur les trésoreries d'organismes publics ou parapublics . De tels prélèvements sont le plus souvent le reflet d' une mauvaise gestion des finances publiques qui conduit à faire financer des dépenses courantes par des "recettes de poche", à caractère exceptionnel. Par ailleurs en pénalisant les trésoreries excédentaires, ces ponctions constituent, de fait, une incitation à la mauvaise gestion !

c) Ce prélèvement n'aborde pas la question de fond qui est celle du financement de la formation professionnelle

Au vu des excédents actuels de trésorerie de l'AGEFAL (1.510 millions de francs au 31 mars 1998), votre rapporteur est amené à s'interroger sur la pertinence et la logique intrinsèque de ce prélèvement.

Dans l'hypothèse où cette nouvelle ponction viendrait réduire fortement les excédents de cet organisme, ne peut-on pas craindre que cette mesure diminue à l'avenir le nombre de contrats de qualification financés ? Cela serait d'autant plus préoccupant que leur nombre devrait s'accroître notamment compte tenu des priorités affichées en ce domaine par le gouvernement dans le cadre de la lutte contre les exclusions.

A l'inverse, si les excédents de l'AGEFAL sont structurels, comme le sous-entend le gouvernement 51( * ) , ne faudrait-il pas en revoir le mode de financement et donc réduire, le cas échéant, les cotisations versées par les entreprises ?

3. La position de votre commission

Dans ce cadre, compte tenu de ces éléments, votre commission vous demande d'appliquer en l'espèce la doctrine qu'elle s'est fixée.

Une nouvelle proposition de prélèvement sur l'AGEFAL manifesterait que le gouvernement n'a réfléchi ni à la pertinence de l'emploi des fonds, ni à une éventuelle réduction de la recette. Par voie de conséquence, tout prélèvement ultérieur sera repoussé.

Cette doctrine, votre commission l'a encore appliquée récemment. Ainsi lors de l'examen en décembre dernier du projet de loi de finances rectificative pour 1998, le Sénat a refusé d'autoriser un nouveau prélèvement, le troisième en six ans, sur les réserves de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI). Votre commission avait en effet indiqué de façon solennelle au gouvernement en 1995 que le prélèvement alors opéré, compte tenu d'un précédent prélèvement en 1991, serait le dernier qu'elle pourrait accepter.

Compte tenu des principes ainsi rappelés et, dans la mesure où ce prélèvement apparaît compatible avec le niveau actuel de la trésorerie de l'AGEFAL, votre commission vous demande donc, sous les réserves et dans les conditions qu'elle vient de vous rappeler, d'autoriser pour la dernière fois un tel prélèvement sur la trésorerie des organismes chargés de collecter les fonds de la formation continue.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 46

Limitation de l'amortissement des biens donnés en location par une société de personnes

Commentaire : le présent article tend à réserver un dispositif fiscal très incitatif (la possibilité pour des investisseurs de minorer leur assiette imposable par l'imputation de déficits d'exploitation) qui s'appliquait jusqu'à présent à tous les secteurs économiques, aux seuls biens d'équipement lourds (avions, TGV, navires...) amortissables sur une durée au moins égale à 8 ans. Il fait ainsi d'un dispositif fiscal qui constituait jusqu'à présent le droit commun, une exception.

Pour cela il procède en deux étapes :

- dans une première étape, il interdit la déduction des amortissements des biens donnés en location au delà du montant des loyers diminué des autres charges, pour tous les investisseurs, personnes physiques ou personnes morales ;

- dans une seconde étape, il permet aux personnes morales assujetties à l'impôt sur les sociétés de déroger, sur agrément, à cette restriction lorsque qu'elles acquièrent un bien d'équipement qui présente pour la collectivité un intérêt économique et social, par l'intermédiaire d'une structure de financement relevant du régime des sociétés de personnes (GIE, SNC...), afin de le louer ou de le mettre à la disposition d'un utilisateur qui l'exploite dans le cadre de son activité habituelle.

A ce dispositif dérogatoire, les députés ont adjoint une exonération des plus-values de cession du bien lorsque la cession est effectuée au profit de l'utilisateur du bien.


Dans sa version initiale, le présent article avait pour objet de restreindre la possibilité de financer des investissements par l'intermédiaire de structures transparentes dont les associés sont passibles de l'impôt sur les sociétés, aux seuls projets agréés, sous certaines conditions, par le ministère du budget. Il s'agissait de faire obstacle à une certaine évasion fiscale, dans la mesure où le financement par ces structures transparentes permet la remontée des déficits d'exploitation du bien dans les comptes de l'investisseur, réduisant ainsi ses revenus imposables. Les services fiscaux ne semblaient en effet plus en mesure de contrôler le flux d'investissements financés grâce à ce mécanisme.

Enserré dans une contrainte budgétaire qui lui laisse peu de marges de manoeuvre, le gouvernement ne proposait rien moins qu'un durcissement de la législation fiscale avec le maintien d'une possibilité dérogatoire de déduire des amortissements fortement dégressifs pour les projets présentant pour la collectivité un intérêt économique et social, notamment en matière d'emploi.

Après son examen par l'Assemblée nationale, la portée de cet article a été considérablement modifiée par l' adjonction d'une disposition visant à exonérer d'impôt les plus-values de cession du bien lorsque cette cession intervient au profit de l'utilisateur du bien . En outre, la durée minimale de détention du bien ou des parts de la société par l'investisseur initial a été ramenée par les députés aux deux tiers de la durée normale d'utilisation.

C'est cette dernière disposition qui doit être regardée comme venant en substitution de l'abrogation de la loi tendant à encourager la souscription de parts de copropriété de navires, même si son champ d'application excède largement le cadre du financement des navires de commerce.

I. LA SUPPRESSION D'UN DISPOSITIF DE DROIT COMMUN

Le paragraphe I du présent article a pour objet d'étendre le mécanisme de limitation de la déduction des amortissements des biens donnés en location à toutes les opérations réalisées par des entreprises relevant du régime des sociétés de personnes, quels que soient le régime fiscal et la qualité des associés (alors qu'actuellement, seules les opérations réalisées par des personnes physiques sont concernées par cette limitation, en application de l'article 31 annexe II du code général des impôts).

A. LE RÉGIME ACTUEL DES GIE FISCAUX

Les services fiscaux s'inquiètent depuis une quinzaine d'années de voir échapper de la matière imposable à travers l'imputation des déficits réalisés par les sociétés de personnes sur les résultats bénéficiaires de leurs associés. En effet, les sociétés de personnes - qui peuvent être des sociétés en nom collectif, des copropriétés de navires ou encore des groupements d'intérêt économique (GIE), ce dernier cas étant le plus fréquent - sont des structures transparentes dont les résultats sont imposés entre les mains de leurs associés, copropriétaires ou membres.

Ainsi, les opérations de crédit-bail consenties, par exemple par des GIE, permettent-ils la remontée des déficits générés lors des premières années de l'activité de crédit-bail dans les comptes des membres de ces structures, réduisant ainsi leur résultat imposable.

Le crédit-bail est en effet une activité déficitaire tant que le montant des dotations comptables effectuées pour amortir le bien d'équipement excède celui des loyers encaissés au titre de la location du bien, diminué du montant des autres charges.

Or, la combinaison d'un amortissement effectué sur le mode dégressif (qui permet de majorer les premières annuités et de minorer les dernières annuités), de loyers progressifs et d'un prix de levée d'option élevé, a pour effet de dégager des déficits nets importants au début de la mise en oeuvre du contrat et des excédents nets à la fin du crédit-bail.

Les économies d'impôt ainsi obtenues par les associés durant les premières années d'exploitation sont compensées par les suppléments d'impôt qui apparaissent ensuite, lorsque la structure de financement réalise des bénéfices. Toutefois, ce décalage dans le temps permet de dégager un gain de trésorerie qui correspond à la différence actualisée entre les économies d'impôt des premiers exercices et les cotisations supplémentaires d'impôt des derniers exercices. Il est rétrocédé en partie à l'entreprise utilisatrice du bien sous forme de diminution du prix des loyers.

Les banques se servaient jusqu'à présent de ce type de montages pour financer des biens d'équipement lourds (avions, trains...) ou des investissements immobiliers industriels. Elles se prémunissaient par avance contre un éventuel redressement fiscal par les services fiscaux en obtenant des " lettres de confort " de la part du Service de la législation fiscale.

Enfin, il convient de préciser que seuls les associés assujettis à l'impôt sur les sociétés pouvaient bénéficier de l'intégralité de ce levier fiscal dans la mesure où le code général des impôts plafonne le montant des amortissements déductibles au niveau du montant des loyers perçus diminué des autres charges déductibles, lorsque le bailleur est une personne physique (article 31 de l'annexe II du CGI).

B. LA LIMITATION DE L'AMORTISSEMENT DES BIENS LOUÉS

Actuellement, l'article 31 de l'annexe II du CGI prévoit en effet que le montant de l'amortissement des biens loués, directement ou indirectement 52( * ) par des personnes physiques ne peut excéder le montant du loyer perçu pendant l'exercice considéré, diminué du montant des autres charges afférentes au bien donné en location 53( * ) .

Sont visés les particuliers relevant de l'impôt sur le revenu qui, directement ou par l'intermédiaire de sociétés ou d'organismes soumis au régime des sociétés de personnes, donnent des biens en location. L'objet de ce dispositif est d'éviter la constitution, par le biais d'une annuité d'amortissement supérieure au loyer diminué des charges, de déficits imputables sur les revenus de toute nature passibles de l'impôt sur le revenu.

Le paragraphe I du présent article a pour objet d'élever ce dispositif au niveau législatif et d'en étendre le champ d'application à l'ensemble des entreprises relevant des sociétés de personnes dont les membres sont des personnes morales passibles de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés .

Il vise également à étendre le mécanisme de la limitation de la déduction des amortissements à l'ensemble des opérations de " mise à disposition " de biens . Il semble que cette notion vise implicitement les opérations de crédit-bail dans la mesure où ces dernières ne présentent pas une nature strictement locative mais plutôt financière.

Les députés ont apporté une modification importante à ce dispositif général en permettant la remontée des amortissements, sans limitation, pour les résultats correspondants à la participation directe d'une entreprise au bien qu'elle exploite . Il s'agit donc du cas où l'exploitant du bien serait lui-même membre du tour de table d'investisseurs composant la société de personnes, la copropriété ou le groupement. Les députés ont souhaité ne pas décourager la constitution de GIE de moyens qui regroupent plusieurs entreprises industrielles pour la mise en oeuvre d'un investissement.

La limitation du droit à déduction des amortissements imposée par le présent article aura pour effet de supprimer tout résultat déficitaire de la structure soumise au régime des sociétés de personnes. S'agissant des amortissements dont la déduction serait empêchée par le présent dispositif, l'administration a, dans une instruction, précisé que la fraction de l'amortissement régulièrement comptabilisée dont la déduction en franchise d'impôt est écartée au titre d'un exercice peut néanmoins être admise en déduction ultérieurement , en sus de l'annuité normale, ou, à défaut, après l'expiration de la durée normale d'utilisation, à condition que l'ensemble des amortissements déduits au titre d'un exercice déterminé n'excède pas la limite fixée par l'article 31 de l'annexe II du CGI. Une solution de même nature devrait être prévue dans le cadre du nouveau dispositif.

Il n'a pas été possible à votre rapporteur d'obtenir un chiffrage du gain budgétaire que ce dispositif procurera à l'Etat. On peut cependant penser qu'il sera considérable compte tenu de la surface financière des investissements financés jusqu'à présent par le mécanisme de la déduction des amortissements. Il sera en partie employé pour financer le deuxième volet du dispositif.

C. ENTRÉE EN VIGUEUR

Le texte prévoit que la limitation de l'amortissement des biens loués ne s'applique qu'aux contrats de location ou aux mises à disposition conclus ou intervenues à compter du 25 février 1998, date à laquelle le présent dispositif a été rendu public. Il s'agit en évitant que le présent dispositif rétroagisse sur des situations acquises, de ne pas bouleverser l'équilibre économique et financier de projets financés par le biais de sociétés translucides. On peut penser qu'après cette date, les investisseurs auront eu la sagesse de ne plus compter sur l'avantage fiscal lié aux montages financiers de ce type.

Les députés ont souhaité en outre ne pas priver les investissements bénéficiant de l'aide fiscale à l'investissement outre-mer ou de l'aide fiscale à la souscription de parts de copropriété de navires du privilège de l'ancien régime de droit commun dès lors qu'ils auraient fait parvenir une demande d'agrément à l'autorité administrative avant le 15 septembre 1997.

Cette disposition est bienvenue dans la mesure où les auteurs de ces investissements avaient probablement intégré la possibilité de pratiquer des amortissements " agressifs " dans leurs calculs de rentabilité.

II. L'INSTITUTION D'UN RÉGIME DÉROGATOIRE EN FAVEUR DES BIENS D'ÉQUIPEMENT LOURDS PRÉSENTANT UN INTÉRÊT ÉCONOMIQUE ET SOCIAL SIGNIFICATIF

Conscient que le levier fiscal lié à ce type de financements " agressifs " s'avère parfois nécessaire pour rentabiliser des activités qui ne pourraient être financées autrement, le gouvernement ménage une dérogation au nouveau régime restrictif de droit commun afin d'encourager, sur agrément, le financement d'investissements lourds qui présentent "du point de vue de l'intérêt général, particulièrement en matière d'emploi, un intérêt économique et social significatif".

Pour cela, le présent article insère un nouvel article 39 CA dans le code général des impôts, afin de permettre aux associés, copropriétaires ou membres soumis à l'impôt sur les sociétés de structures de financement translucides 54( * ) d'imputer sur leurs résultats, sans limitation, les amortissements afférents à certaines opérations agréées.

Le gouvernement prévoit même une amélioration sensible du dispositif en majorant d'un point le coefficient de l'amortissement dégressif . Cette majoration aura pour effet d'accroître les résultats déficitaires de la structure translucide au cours des premiers exercices ce qui majorera d'autant la valeur actualisée des économies d'impôt.

Le tableau suivant indique les taux de l'amortissement dégressif praticable avant et après majoration :



Il convient de noter en outre que la participation à la structure translucide sera ouverte à toute société assujettie à l'impôt sur les sociétés ayant une capacité fiscale bénéficiaire pouvant faire partie de cette structure.

A. UNE DÉROGATION OUVERTE AUX BIENS MEUBLES AMORTISSABLES SELON LE MODE DÉGRESSIF SUR UNE DURÉE AU MOINS ÉGALE À HUIT ANS

Seuls pourraient bénéficier de la dérogation les biens meubles amortissables selon le mode dégressif sur une durée au moins égale à huit ans.

Compte tenu de ces conditions, ce dispositif concernerait en pratique essentiellement les biens d'équipement lourds tels que les avions, les rames de trains ou les machines-outils. Il est à noter que le mobilier de bureau est également amortissable sur une durée de 10 ans.

La durée minimale d'amortissement de huit ans conduirait en revanche à exclure du régime spécial certaines installations complexes spécialisées (ICS) amortissables sur une durée de 6 ans 2/3, sauf à considérer que ces biens seraient amortis sur huit ans au lieu de 6 ans 2/3, ce qui serait compatible avec une tolérance administrative 55( * ) .

Il convient également de noter que le texte de l'article aboutirait à écarter la réalisation de tout financement immobilier dans le cadre de ces schémas, y compris ceux qui concernent des biens immeubles admis au bénéfice de l'amortissement dégressif comme les installations de magasinage et de stockage ou immeubles des entreprises hôtelières.

Le dispositif serait en outre réservé au financement de biens acquis à l'état neuf , qui seuls bénéficient du régime de l'amortissement dégressif. Toutefois, les navires d'occasion qui peuvent, en vertu d'une instruction administrative (BIC-X-24430), déroger à ce principe, seront admis au bénéfice du présent dispositif.

Par ailleurs, deux conditions concernent l'utilisateur des investissements financés :

- En premier lieu, l'utilisateur du bien devra être une société qui l'exploite dans le cadre de son activité habituelle . Cette condition tend à écarter toute structure interposée pratiquant la sous-location dans la mesure où la notion d'utilisation serait exclusive de celle de location. Il ne faut cependant pas qu'une interprétation trop restrictive de cette clause conduise à écarter du bénéfice du présent dispositif les sociétés qui, par souci de saine gestion, diversifieraient leurs activités.

Elle conduirait également à écarter les biens utilisés par les entreprises n'ayant pas le statut de société, et notamment, les investissements financés au profit des collectivités territoriales ou de leurs démembrements.

- En second lieu, l'utilisateur est susceptible d'acquérir la propriété du bien à titre permanent : cette condition permettra à l'administration de refuser l'agrément lorsque le contrat de location ou de mise à disposition ne comprend pas une promesse de vente ou un mécanisme de levée d'option permettant à l'utilisateur d'acquérir le bien. il semble naturel d'imposer cette condition dans la mesure où le présent dispositif est conçu comme une aide à l'utilisateur.

En outre, une telle clause conduit à exclure du bénéfice d'une telle aide les biens concédés par une personne publique à une entreprise remplissant une mission de service public, le gouvernement ne souhaitant pas leur accorder un avantage fiscal supplémentaire. En effet, par définition, les biens mis en concession, biens dits " de retour ", sont censés revenir à la collectivité concédante à l'issue du contrat de concession. Ils ne peuvent rentrer dans le patrimoine du concessionnaire sauf décision législative contraire.

Enfin, il convient de noter que le texte ne pose aucune condition relative à la nationalité du preneur et à la localisation du bien. Sans préjudice des dispositions qui suivent, il pourrait donc s'agir d'une société étrangère qui prend le bien en location ou en crédit-bail en vue de son exploitation à l'étranger.

B. UNE DÉROGATION OUVERTE AUX BIENS AYANT FAIT L'OBJET D'UN AGRÉMENT

Pour bénéficier de l'avantage fiscal, le bien doit au préalable avoir reçu l'agrément du ministre chargé du budget. Le présent article subordonne la délivrance de l'agrément par ce dernier à six conditions cumulatives :

Le prix d'acquisition du bien doit correspondre au prix de marché , compte tenu de ses caractéristiques.

Il s'agit d'éviter de voir le prix de cession des biens majoré en raison de l'avantage fiscal. Le cédant et l'acquéreur peuvent en effet chacun avoir intérêt à surestimer le prix de cession, le premier pour réaliser une plus-value, le second pour accroître l'assiette de l'amortissement.

L'investissement doit présenter du point de vue de l'intérêt général, particulièrement en matière d'emploi, un intérêt économique et social significatif.

Cette disposition est inspirée d'une clause similaire subordonnant l'agrément des investissements productifs réalisés dans les départements d'outre-mer (cf. article 217 decies du CGI). La loi de finances pour 1998 a notamment inclus une clause prévoyant que l'agrément peut être accordé s'il favorise le maintien ou la création d'emplois dans le département concerné.

Il s'agit d'un moyen de favoriser les biens fabriqués sur le territoire national ou les financements réalisés au profit d'un utilisateur français.

Il reste que l'intérêt économique et social pourra parfois être difficile à démontrer lorsqu'une entreprise est en phase de restructuration.

L'utilisateur du bien doit démontrer que le bien est nécessaire à son exploitation .

Cette clause semble destinée à éviter le simple " portage " des biens. Néanmoins, on peut penser qu'un tel objectif est déjà poursuivi par la condition précédente tendant à ce que l'utilisateur du bien soit susceptible d'en acquérir la propriété à titre permanent.

L'utilisateur du bien doit démontrer que les modalités de financement retenues sont déterminées par des préoccupations autres que fiscales ou comptables .

Cette condition ne figurait pas dans la version initiale du présent article. Elle a été substituée par les députés à la condition tendant à ce que l'utilisateur démontre qu'il n'est pas en mesure d'acquérir directement le bien sans compromettre l'équilibre financier de l'entreprise, à la suite de l'adjonction du paragraphe tendant à exonérer les plus-values de cession du bien en cas de cession anticipée à l'utilisateur.

On voit cependant difficilement comment l'utilisateur pourra prouver que les modalités de financement retenues sont déterminées par des préoccupations autres que fiscales dans la mesure où le présent dispositif a précisément pour objet d'encourager des investissements lourds grâce à un levier fiscal très incitatif.

Il sera plus facile en revanche à l'utilisateur de démontrer que les modalités de financement choisies ne visent pas à éviter de dégrader son bilan comptable. Le dispositif ne vise en effet pas à favoriser les entreprises qui, par souci d'affichage, financeraient leurs biens d'exploitation par l'intermédiaire d'une structure transparente afin de ne pas avoir à consolider les investissements ainsi opérés à leur bilan.

Les deux tiers au moins de l'avantage fiscal obtenu par les membres de la structure de financement doivent être rétrocédés à l'utilisateur sous forme de diminution du loyer ou de minoration du montant de l'option d'achat . Le montant de l'avantage qui doit être rétrocédé est déterminé lors de la délivrance de l'agrément.

Il convient de noter que cette rétrocession de l'avantage fiscal à l'utilisateur avait déjà lieu dans le cadre des anciens " GIE fiscaux " mais que la norme était de rétrocéder la moitié de l'avantage fiscal obtenu. Le présent dispositif est donc plus favorable à l'utilisateur.

Par ailleurs, la disposition tendant à ce que le montant de l'avantage fiscal et donc de la rétrocession envisagée soit fixé dès le dépôt du dossier de demande de l'agrément est de nature à poser des difficultés au regard d'une autre disposition du texte qui institue un plafond d'imputation des pertes . En effet, pour les acquisitions agréées, les déficits réalisés par la structure de financement ne seront déductibles chaque année qu'à hauteur du quart des bénéfices imposables de chaque associé, sachant que les associés s'engagent à conserver leurs parts jusqu'à l'expiration du contrat de location. Le gouvernement avait pour souci en instituant ce plafond d'empêcher que les associés de la structure de financement puissent échapper complètement à l'impôt sur les sociétés. Cette condition impose en outre que les participants à l'opération disposent de perspectives bénéficiaires suffisamment assurées pour en retirer tout son intérêt fiscal.

Or, cette dernière disposition rend le dispositif inapplicable car aucune société ne peut prévoir ses résultats financiers sur une durée de huit années et donc le montant de l'avantage fiscal global qu'elle retirera in fine de son investissement.

Au surplus, cette disposition semble inutile . Outre qu'elle n'aura aucun impact sur la dépense fiscale finalement consentie par l'Etat, les investissements étant agréés a priori sur le fondement des conditions précédemment recensées, et non en fonction des membres de la structure de financement 56( * ) , l'objectif qu'elle poursuit (éviter qu'une société puisse annuler totalement son impôt) sera rempli naturellement par l'application par les investisseurs du principe de précaution. Aucun investisseur ne prendra le risque de financer seul des investissements aussi lourds que ceux que le présent projet de texte tend à encourager.

Votre commission vous proposera en conséquence un amendement de suppression de cette disposition.

Les associés, copropriétaires ou membres s'engagent à conserver les parts qu'ils détiennent dans la structure de financement jusqu'à l'expiration du contrat de location ou de mise à disposition du bien .

Cette obligation de conservation du bien tend à éviter qu'un associé revende ses parts à une société déficitaire au moment où les résultats de la structure de financement deviendraient bénéficiaires. Une telle situation conduirait à optimiser l'avantage fiscal et à s'écarter du schéma agréé.

Pour la même raison, le texte impose que les biens soient conservés par la structure de financement jusqu'à l'expiration du contrat de location ou de mise à disposition.

Il convient de noter cependant que la durée du contrat de location ou de mise à disposition peut être légèrement supérieure à la durée de l'amortissement. Ainsi, dans le cas d'un bien amortissable sur 15 ans comme une rame de TGV, les investisseurs devraient conserver leurs parts pendant 16 ou 17 ans, ce qui peut sembler très long.

L'absence de respect de cette condition était, dans le texte initial, sanctionnée par la réintégration du montant de l'avantage fiscal afférent aux parts cédées dans les résultats de l'exercice duquel il avait été déduit. Toutefois, l'investisseur peu scrupuleux n'était pas sanctionné :

- s'il s'engageait à conserver ses parts pendant une durée minimale de huit ans et à ne les céder qu'à l'utilisateur effectif du bien,

- et s'il produisait des éléments de nature à établir la pérennité de l'exploitation du bien jusqu'au terme du contrat initial de location ou de mise à disposition.

Ce dispositif a disparu au profit d'un nouveau dispositif introduit par l'Assemblée nationale (cf. infra).

C. LES AUTRES CONDITIONS

Le texte prévoit que le prix d'acquisition du bien pris en compte pour le calcul de l'amortissement est égal au prix de cession compris dans l'assiette de l'impôt sur les sociétés ou de l'impôt sur le revenu du constructeur . Il s'agit, semble-t-il, d'éviter de prendre en compte dans l'assiette de l'amortissement les frais accessoires nécessaires à la mise en état d'utilisation du bien, alors même que ces derniers sont compris dans les bases de l'amortissement (droits de douane, frais d'installation et de montage).

Il semble également, à la lecture du rapport de l'Assemblée nationale, qu'une telle disposition, qui pourrait apparaître comme redondante au regard de la condition imposant que le prix d'acquisition du bien corresponde au prix du marché, soit motivée par la volonté d'orienter le dispositif vers les biens construits en France, ce qui peut poser problème au regard du droit communautaire.

L'administration pourrait en effet choisir d'interpréter les termes " impôt sur les sociétés ou impôt sur le revenu du constructeur " comme excluant les biens acquis auprès de constructeurs qui ne seraient pas assujettis à l'impôt sur le revenu ou l'impôt sur les sociétés français. Votre rapporteur considère qu'une telle interprétation est trop restrictive et néglige l'existence d'impôts similaires à l'étranger. Il ne faudrait pas en effet que cette clause prive les entrepreneurs de la possibilité d'acquérir des biens à l'étranger, notamment dans les secteurs dont l'industrie française est absente (construction de porte-conteneurs, fabrication de certains avions spécialisés...).

Au demeurant, la condition tendant à réserver l'avantage fiscal aux investissements qui présentent " d'un intérêt économique et social significatif, notamment en matière d'emploi " devrait permettre d'écarter tout investissement effectué à l'étranger, lorsque l'acquisition aurait pu être effectuée dans les mêmes conditions en France.

Cette disposition suscite en outre trois types de difficultés :

- elle est inapplicable pour les navires d'occasion : si l'on devait en effet amortir ces derniers sur la base du prix de cession initial, on surévaluerait considérablement le prix du navire. Son application stricte engendrerait donc un coût non négligeable pour l'Etat.

- la pratique comptable constante veut que la base de l'amortissement d'un bien soit le prix de revient de ce bien (BIC-X-2600 s). En effet, il arrive que le prix de cession pris en compte dans l'assiette de l'impôt du constructeur résulte d'un arbitrage, conduisant à faire prendre en charge directement par l'armateur certains frais annexes. Il est difficilement envisageable de ne pas les intégrer, dès lors que ces frais seraient justifiés.

- le prix de cession compris dans l'assiette de l'impôt du constructeur peut être difficile à connaître , lorsque le constructeur est étranger et n'obéit pas aux mêmes règles comptables que les constructeurs français.

Votre commission vous proposera donc un amendement ayant pour objet de revenir à une définition simple de la base d'amortissement du bien, c'est-à-dire le prix de revient de ce bien, sans faire référence à l'assiette de l'impôt du constructeur.

D. L'AGRÉMENT PEUT PRÉVOIR UNE EXONÉRATION DES PLUS-VALUES EN CAS DE CESSION ANTICIPÉE DU BIEN À L'UTILISATEUR


L'Assemblée nationale a apporté une modification majeure au dispositif prévu par le gouvernement.

Elle a en effet introduit un dispositif d' exonération de la plus-value réalisée en cas de cession anticipée du bien ou des parts de la société de personnes à l'utilisateur du bien . Ce dispositif, réclamé de longue date par les armateurs, se substitue au mécanisme dérogatoire évoqué plus haut.

Tout contribuable qui souhaiterait en bénéficier devrait le requérir expressément au moment de la demande d'agrément, et devrait remplir les conditions suivantes :

Les deux tiers de la durée normale d'utilisation du bien sont écoulés.

La durée d'utilisation du bien correspond à la durée d'amortissement du bien. Elle est déterminée par les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation. En conséquence, pour un navire amortissable sur huit ans, les deux tiers de la durée normale d'utilisation correspondent à cinq ans un tiers. Pour un avion amortissable sur treize ans, les deux tiers de la durée normale d'utilisation correspondent à huit ans deux tiers.

L'utilisateur du bien démontre qu'il n'est pas en mesure de l'acquérir directement sans compromettre l'équilibre financier de l'entreprise .

Cette condition figurait initialement dans le premier volet de l'agrément. Elle est destinée à réserver l'avantage du dispositif aux entreprises les plus fragiles, qui exigent le plus d'être aidées.

Elle risque cependant de soulever des difficultés d'appréciation et de faire du présent dispositif un dispositif de subvention artificielle des plus mauvais risques.

Cet utilisateur est en mesure de garantir la pérennité de l'exploitation du bien jusqu'à la date prévue d'expiration du contrat initial de location ou de mise à disposition du bien .

Cette condition figurait également dans le texte initial parmi les conditions permettant aux investisseurs de céder leurs parts à l'issue d'une période de huit ans, à la différence près que c'est l'investisseur qui devait produire les éléments de nature à établir la pérennité de l'exploitation du bien jusqu'au terme du contrat initial de location ou de mise à disposition.

Le rapport de la commission des finances de l'Assemblée nationale faisait très justement observer que cette proposition manquait singulièrement de réalisme. " On imagine assez mal , écrit le rapporteur général, M. Didier Migaud 57( * ) , comment le contribuable crédit-bailleur pourrait produire dès le dépôt de la demande d'agrément, des éléments de nature à établir la pérennité de l'exploitation du bien jusqu'au terme du contrat initial de location ou de mise à disposition, alors que cette exploitation n'a pas encore commencé ! Qui peut dire ce que sera l'état du marché pétrolier en 2006 ou celui du transport aérien en 2011 ? "

Ce nouveau levier fiscal appelle deux observations :

- En premier lieu, il a pour effet de multiplier par deux l'avantage fiscal résultant de la première partie du dispositif. En effet, selon les informations recueillies par votre rapporteur, en actualisant au taux de 6 % (qui est relativement élevé) l'économie d'impôt résultant de la possibilité de déduire les amortissements des biens donnés en location, on obtient un avantage de 85 pour mille soit 8,5 % de la valeur de l'investissement. L'exonération des plus-values de cession en cas de cession anticipée porte cet avantage à 15 %. Il semble utile de préciser que c'est cet avantage global qui doit être rétrocédé à hauteur de 2/3 à l'utilisateur du bien.

- En second lieu, il convient de souligner que la rédaction du nouveau dispositif n'impose pas à l'administration d'accorder l'exonération des plus-values du bien ou des parts cédés dans l'hypothèse où les conditions d'octroi de l'avantage seraient remplies. Le texte précise en effet que " la décision d'agrément peut prévoir que la cession anticipée du bien ou des parts (...) n'entraîne pas d'impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés " si les conditions sont remplies.

Cette rédaction est éminemment problématique . En effet, on ne voit pas pourquoi un avantage fiscal de cette ampleur dépendrait du bon vouloir de l'administration, dès lors qu'un certain nombre de conditions seraient remplies. Une telle rédaction est de nature à nourrir un contentieux abondant sur le fondement de la rupture de l'égalité devant l'impôt.

Si l'objectif du gouvernement consiste à réserver le bénéfice de ce deuxième levier fiscal aux seuls navires de commerce, en remplacement de la loi relative à l'encouragement fiscal en faveur de la souscription de parts de copropriété de navires de commerce supprimée par la loi de finances pour 1998, il conviendrait alors de le préciser dans le texte de la loi.

III. APPRÉCIATION DU DISPOSITIF

A. UNE MESURE DE BONNE GESTION POUR LES FINANCES PUBLIQUES MAIS UN RISQUE DE TARISSEMENT DES INVESTISSEMENTS DANS CERTAINS SECTEURS DE L'ÉCONOMIE


Il peut apparaître comme de saine gestion de cibler un dispositif fiscal très incitatif sur les biens économiques à vie longue pour lesquels les investisseurs ne disposent pas d'une visibilité suffisante pour investir. Il s'agit en gonflant artificiellement la rentabilité d'un investissement, d'encourager les opérateurs privés à investir dans des secteurs que les lois du marché les inciteraient naturellement à négliger.

Il est vraisemblable en outre que l'on accroît l'incitativité et l'efficience économique (résultats/coût) d'un dispositif qui était jusqu'à présent trop largement accessible et qui donnait probablement prise à certains excès, même si les services fiscaux sont dans l'impossibilité de fournir un chiffrage du coût de ce dispositif.

Néanmoins, le nouveau dispositif risque le tarir les sources de financement dans des secteurs dont la rentabilité est très précaire. Il convient de se demander s'il s'agit d'une stratégie adéquate dans un pays notablement en retard en termes d'investissements, par rapport à ses concurrents.

Il convient de remarquer, à cet égard, que c'est la troisième fois en trois ans que les gouvernements successifs écornent un levier fiscal résultant de la possibilité d'imputer des déficits, après ce que l'on a appelé la " tunnélisation " des déficits 58( * ) opérée dans le cadre de la loi de finances pour 1996, étendue aux investissements réalisés dans les DOM-TOM par la loi de finances pour 1998.

Au demeurant, l'appréciation portée sur le dispositif général initial par le rapporteur général du budget de la commission des finances de l'Assemblée nationale dans son rapport sur le présent projet de loi est pour le moins sévère. M. Didier Migaud écrit en effet 59( * ) :

" On peut s'interroger sur l'adéquation du paragraphe I à la réalité économique en ce que cette interdiction (de l'imputation fiscale des amortissements au delà du montant du loyer acquis diminué du montant des autres charges) méconnaît, pour des systèmes de financement de biens coûteux, la nécessité de prendre en compte la dépréciation effective des biens. Son effet probable sera la disparition des financements par " GIE fiscaux " ou le report de la charge sur l'utilisateur du bien, par la dégressivité des loyers. Cette mesure intervient alors que les taux d'intérêt sont très bas, et, malgré des demandes réitérées, votre Rapporteur général regrette que l'on n'ait pu lui indiquer quel montant de recettes fiscales supplémentaires elle pourrait permettre. "

B. LA PROCÉDURE D'AGRÉMENT LAISSE UNE TROP GRANDE MARGE D'APPRÉCIATION À L'ADMINISTRATION


Compte tenu du nombre de conditions subordonnant l'octroi de l'agrément ministériel nécessaire pour bénéficier des avantages fiscaux résultant du présent dispositif et de la large marge d'appréciation laissée à l'administration, il n'est pas inutile de rappeler les observations du rapport public du Conseil d'Etat de 1995.

Le Conseil d'Etat se demande en effet si " lorsqu'il subordonne à un agrément par le ministre des finances, l'octroi d'un avantage fiscal, le législateur ne viole pas l'obligation que lui fait la Constitution de déterminer les règles d'assiette, dans la mesure où le renvoi à un agrément revient en fait à subordonner le bénéfice de l'exonération - donc le champ d'application de la loi au niveau du contribuable - à l'appréciation des services fiscaux, voire à l'arbitraire d'un ministre ".

Or, rappelle le rapport du Conseil d'Etat, le Conseil constitutionnel a précisé dans une décision n° 87-237 DC du 30 décembre 1987, que " l'exigence de l'agrément confère seulement au ministre [...] le pouvoir de s'assurer que [...] l'opération [...] satisfait aux conditions fixées par la loi ".

C. UNE MESURE MOINS FAVORABLE QUE LE PRÉCÉDENT DISPOSITIF QUIRATAIRE POUR LA FLOTTE DE COMMERCE

Les membres de copropriétés de navires bénéficiaient déjà de la possibilité d'imputer les déficits d'exploitation des navires sur leurs résultats puisque c'était le droit commun. Le premier volet du présent article ne leur apporte donc rien de plus, si ce n'est la possibilité de majorer d'un point le coefficient multiplicateur permettant de calculer l'amortissement dégressif.

Pour cette dernière raison, le dispositif initial ne recueillait pas l'assentiment des armateurs. En effet, alors que la loi " quirats " aboutissait à diminuer le coût d'achat d'un navire de près de 25 % sur 5 ans pour l'armateur et que le régime d'amortissement dégressif de 31,25 % sur 8 ans procurait un second avantage fiscal en permettant aux investisseurs assujettis à l'impôt sur les sociétés de dégager des déficits importants au cours des premiers exercices, l'administration chiffre à 6 ou 8 % de la valeur du navire l'avantage procuré par le premier volet du présent article.

Pour limiter cette pénalisation, les députés ont adjoint au dispositif initial une disposition visant à exonérer d'impôt les plus-values de cession du bien lorsque cette cession intervient au profit de l'utilisateur du bien . En outre, la durée minimale de détention du bien ou des parts de la société par l'investisseur initial a été ramenée par les députés à deux tiers de la durée normale d'utilisation du bien.

C'est cette dernière disposition qui doit être regardée comme venant en substitution de la loi n° 96-607 du 5 juillet 1996 tendant à encourager la souscription de parts de copropriété de navires supprimée par la loi de finances pour 1998, même si son champ d'application excède largement le cadre du financement des navires de commerce.

Elle a pour effet de porter à 15 % le montant de l'avantage fiscal total pour les investisseurs de la société translucide, avantage qui doit être rétrocédé à hauteur de deux tiers à l'armateur, soit 10 %. Cet avantage est légèrement inférieur à celui qu'ils retiraient du dispositif quirataire et qui s'élevait environ à 12 % de la valeur du navire (25 % partagé à égalité entre l'investisseur et l'utilisateur).

Le dispositif proposé se révèle donc moins ambitieux que la loi " quirats ".

L'objectif d'orienter l'épargne vers l'investissement maritime est abandonné.

Seules les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés pourront bénéficier du nouveau régime fiscal d'aide à l'investissement maritime : les personnes physiques et les personnes morales assujetties à l'impôt sur le revenu en seront exclues.


Or la loi du 5 juillet 1996 précitée autorisait les personnes physiques à déduire de leur revenu imposable les sommes investies dans les navires de commerce français , dans la limite annuelle d'un plafond de 500.000 francs pour une personne seule et 1 million de francs pour un couple marié.

L'article 163 unvicies du code général des impôts disposait que les personnes physiques pouvaient procéder à de telles opérations directement ou par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL), d'une société à responsabilité limitée (SARL) ou d'un fonds de placement quirataire.

Les personnes morales étaient par ailleurs autorisées à déduire de leur bénéfice imposable l'intégralité des sommes investies (article 217 nonies du CGI).

En pratique, les armateurs ne pourront plus faire appel à des investisseurs extérieurs au milieu maritime, à l'exception des sociétés à capacité financière élevée, qui trouveront avantage à investir dans des projets de grande dimension.

Il est donc peu probable que des projets de faible coût (navires de valeur inférieure 50 millions de francs) soient développés grâce à ce mécanisme d'incitation fiscale.

Le dispositif proposé vise l'ensemble des investissements " lourds " (amortissables sur une durée au moins égale à huit ans) sans tenir compte des spécificités de la filière maritime.

Il est symptomatique de constater que la procédure d'agrément prévue par le présent article ne mentionne que l'agrément du ministre chargé du budget.

La procédure d'agrément prévue au deuxième alinéa de l'article 238 bis HN du CGI disposait que celui-ci était délivré par le ministre du budget après avis du ministre chargé de la marine marchande et du ministre chargé de l'équipement naval.

L'abandon de cette expertise technique du dossier pourrait conduire à la délivrance d'agréments sur des considérations plus budgétaires que relatives à l'intérêt de l'investissement pour la flotte de commerce française.

Par ailleurs, du fait du caractère général du dispositif proposé, les conditions relatives au maintien sous pavillon français du navire ont disparu .

Il serait légitime d'introduire, éventuellement par le biais de la procédure d'agrément, une condition relative au pavillon, sauf à renoncer à l'objectif de maintien et de croissance de la flotte de commerce française.

Cependant, la cession anticipée du bien, lorsque les deux tiers de la durée d'amortissement sont écoulés, permettrait de s'affranchir très rapidement des conditions posées dans l'agrément.

Le récent rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques 60( * ) sur la politique maritime et littorale de la France évoquait, comme critique principale à la loi du 5 juillet 1996, les risques de dépavillonnement des navires (estimés à 30 %) qui, s'ils n'étaient pas contrecarrés, risquaient de transformer un avantage fiscal destiné à l'investissement maritime français en simple avantage de trésorerie pour les sociétés armatoriales.

Loin de régler ces questions, le présent article risque de les amplifier.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article ainsi amendé.

ARTICLE 46 bis (nouveau)

Institution d'une taxe communale sur les pylônes et antennes de téléphonie mobile

Commentaire : le présent article prévoit l'institution, au profit des communes , d'une taxe forfaitaire annuelle sur les installations de relais de téléphone mobile (de 6.670 francs pour les antennes et de 13.345 francs pour les pylônes) d'une hauteur supérieure à 12 mètres.

Cet article résulte d'un amendement de M. Michel Bouvard initialement adopté par l'Assemblée nationale contre l'avis du Gouvernement. Cette disposition a finalement été acceptée par le Gouvernement au terme de la seconde délibération dont le présent projet de loi a fait l'objet.

I - LES CARACTERISTIQUES DE LA NOUVELLE TAXE COMMUNALE

A. PRINCIPES ET TARIFS


Très largement inspiré dans son principe et pour ses tarifs de la taxe sur les pylônes électriques définie à l'article 1519 A du code général des impôts, ce nouvel article 1519 B du code général des impôts institue une imposition forfaitaire communale sur les " stations radioélectriques d'une hauteur supérieure à 12 mètres, implantées par les opérateurs de télécommunications " .

Les tarifs de cette imposition forfaitaire annuelle sont fixées par référence à ceux de la taxe sur les pylônes électriques , soit pour 1998, à 6.670 francs pour les antennes et à 13.345 francs pour les pylônes . Le montant de ces tarifs est revalorisé dans les mêmes conditions que ceux de la taxe sur les pylônes électriques, c'est à dire proportionnellement à la variation du produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties constatée au niveau national.

B. L'ASSIETTE

L'assiette de cette imposition est déterminée à partir de celle qui est définie pour les redevances pour occupation du domaine public à l'article R. 20-52 du code des postes et télécommunications, dans sa rédaction résultant du décret n° 97-683 du 30 mai 1997 relatif aux droits de passage sur le domaine public routier et aux servitudes prévus par les articles L. 47 et L. 48 du code des postes et télécommunications, pris en application de la loi n° 96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications (dite LRT).

Le 3° de l'article R. 20-52 du code des postes et télécommunications dispose en effet que " dans le cas d'installations de stations radioélectriques, la valeur maximale de la redevance exprimée en francs et par installation de plus de 12 mètres est de 1.000 pour des antennes et de 2.000 pour des pylônes ".

A cet égard, il convient de préciser que la hauteur de 12 mètres, retenue comme seuil pour l'application de cette taxation, résulte de la lecture combinée de deux dispositions du code de l'urbanisme dont il ressort que l'implantation de pylônes de plus de 12 mètres est soumise à une déclaration de travaux auprès du maire 61( * ) . Cette hauteur de 12 mètres ne correspond donc pas un seuil d'ordre technique, mais simplement à des exigences pratiques de recensement de l'assiette de cette imposition .

II. APPRÉCIATIONS SUR LE DISPOSITIF

A. UN PRODUIT ATTENDU D'UN MONTANT INCERTAIN


Cette disposition ayant été adoptée sans simulation préalable et eu égard aux incertitudes caractérisant la définition de l'assiette de ce prélèvement , il n'existe pas d'évaluation exacte du " rendement " de cette mesure. Cette évaluation est d'autant plus difficile à obtenir que les trois opérateurs qui seraient redevables de cette taxe se trouvent en situation de concurrence, et que les détails techniques de leurs réseaux respectifs sont couverts par le secret des affaires.

Cependant, d'après les informations recueillies à ce sujet par votre commission auprès du secrétaire d'Etat à l'industrie, M. Christian Pierret, " le produit de cette taxe, selon les estimations a minima données par les seuls opérateurs de radiotéléphone (France Télécom Mobiles, SFR et Bouyges Télécom) serait d'un montant d'au moins 353 millions de francs . "

S'agissant de la ventilation de ce prélèvement annuel entre les trois opérateurs, les éléments d'évaluation fournis par les trois opérateurs concernés recoupent dans une très large mesure (bien que légèrement inférieures) , celles qui ont été communiquées par le secrétariat d'Etat à l'industrie. Ainsi, le plus gros contributeur serait SFR-Cégétel à hauteur de 154 millions de francs 62( * ) , viendrait ensuite France Télécom Mobiles pour un montant de 120 millions de francs au minimum, puis enfin Bouygues Télécom qui aurait à acquitter près de 60 millions de francs 63( * ) .

B. LA PORTÉE DE CETTE TAXATION

1. La situation des opérateurs


En dehors des impositions nationales et locales acquittées par ces opérateurs, il apparaît tout d'abord, que les montants précédemment évoqués au titre de cette imposition nouvelle se cumuleraient avec la redevance pour occupation du domaine public fixée par le décret du 30 mai 1997 . Cette redevance, qui possède la même assiette que la taxe proposée par le présent article, ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, de 1.000 francs pour des antennes et de 2.000 francs pour des pylônes, sachant que ces tarifs s'appliquent automatiquement en l'absence d'une délibération de la collectivité territoriale concernée fixant des montants inférieurs.

Ensuite, il apparaît, notamment, que l'Etat perçoit, pour ce qui le concerne et en application du décret du 3 février 1993 modifié, des redevances de mise à disposition de fréquences radioélectriques et de gestion qui sont acquittées par les opérateurs de télécommunications 64( * ) .

Enfin, il convient de signaler l'annonce faite par Mme Dominique Voynet d'un projet de création d'une taxe sur le chiffre d'affaires des opérateurs de services de télécommunications destinée à abonder un fonds interministériel des technologies de l'information et de la communication.

2. L'impact environnemental

A la différence des lignes téléphoniques, les installations radioélectriques ne peuvent, par définition, être enterrées puisqu'il s'agit dans ce domaine de relayer des ondes. Le principe d'une taxation peut cependant avoir pour effet d'inciter au regroupement des relais et au partage des infrastructures par les opérateurs. Il pourrait en résulter une limitation du nombre de pylônes.

A l'inverse la détermination d'un seuil d'application fixé, pour les raisons précédemment évoquées, à plus de 12 mètres pourrait inciter les opérateurs à diminuer la taille des pylônes , ce qui induirait une augmentation de leur nombre, puisque l'importance de la zone couverte est directement fonction de la hauteur des installations.

3. Des conséquences ambiguës pour collectivités locales

a) Une ressource nouvelle pour les collectivités locales concernées

L'analyse des implications de cette taxation, conduit, de façon générale, à évoquer la problématique de la participation des collectivités locales aux prélèvements fiscaux assis sur les formes nouvelles de richesse qui se développent ou transitent par leurs territoires, eu égard au caractère souvent désuet des impositions dont elles perçoivent le produit.

En outre, cette réflexion soulève le débat de la valorisation de l'occupation du domaine public par les grands réseaux 65( * ) . Sur ce point, l'analyse faite par M. Robert Tiquet, président de l'association des ingénieurs des villes de France souligne les conséquences qui doivent être tirées du passage d'une époque marquée par un " service public, assuré en situation de quasi-monopole par un établissement public national (France Télécom, TDF ...) où on pouvait considérer que l'occupation était une contrepartie du service public, [à une époque caractérisée] par une logique de concurrence avec de multiples opérateurs , où on peut prétendre à juste titre que l'occupation du domaine public représente une valeur économique pour ces opérateurs . ".

b) Un risque pour l'aménagement du territoire


Malgré le bénéfice que cette taxe apporterait aux collectivités directement bénéficiaires de son produit, il convient de noter que cette imposition pourrait avoir un effet dissuasif sur la politique de couverture des " zones peu peuplées " à laquelle le législateur et, tout particulièrement, le Sénat a voulu inciter les opérateurs .

Le Sénat a en effet obtenu l'inscription dans la loi de réglementation des télécommunications du 26 juillet 1996 (à l'article L. 35-3 du code des postes et télécommunications) d'un lien entre l'exemption partielle du financement du service universel des opérateurs de téléphonie mobile soumis à des obligations de couverture nationale (fixées par la loi en pourcentage de la population ) et l'engagement de ceux-ci de contribuer au renforcement de la couverture des zones moins peuplées de notre territoire.

En application de cette disposition les opérateurs ont accepté de consacrer l'équivalent des sommes dont ils ont été exemptés à ce titre à l'extension géographique de leur zone de couverture.

A cet égard, il apparaît que cette taxe risque de constituer une mesure dissuasive pour l'implantation de relais de téléphonie mobile dans les portions du territoire à faible densité démographique et, par conséquent, de priver de nombreuses collectivités locales d'une couverture par un réseau de téléphonie mobile.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 47

Abaissement du seuil d'autorisation des cinémas " multiplexes "

Commentaire : le présent article tend à modifier l'article 36-1 de la loi d'orientation du commerce et de l'artisanat de 1973 tel qu'il résulte de la loi du 5 juillet 1996, pour abaisser les seuils à partir desquels les projets de création ou d'extension de cinémas multiplexes sont soumis aux commissions départementales d'équipement cinématographique.

Le développement des multiplexes 66( * ) a affecté la rentabilité des salles traditionnelles, risquant, ainsi, de porter atteinte à la vitalité des centres villes.

C'est ce qui a conduit le précédent gouvernement à mettre en place en 1996, d'abord à titre provisoire puis définitif, une procédure d'autorisation des implantations nouvelles -ou des extensions des établissements importants- sur le modèle de celle applicable aux grandes surfaces, en matière d'urbanisme commercial.

Le système, mis en place de façon transitoire avec la loi n° 96-314 du 12 avril 1996, a été confirmé et adopté par la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat.

Votre rapporteur n'entrera pas dans le détail de la procédure soumettant les implantations d'établissements de plus de 1.500 fauteuils (ou les extensions d'établissements ouverts depuis plus de cinq ans dépassant le seuil de 2.000 places) à l'accord des commissions départementales d'équipements cinématographiques sous le contrôle en appel d'une commission nationale.

En revanche, il parait intéressant de compléter l'information du Parlement en assortissant ce commentaire de la liste des multiplexes existants ou déjà autorisés.

Le présent article tend à abaisser les seuils de nombre de places au-dessus desquels les opérations doivent être autorisées par les commissions départementales d'équipement cinématographique : on passerait ainsi de 1.500 à 1.000 places pour les créations et de 2.000 à 1.500 pour les extensions d'établissements existant depuis plus de cinq ans.

Cet aménagement, envisagé depuis un certain temps déjà trouve sa justification dans la suppression d'un effet de seuil conduisant un certain nombre d'exploitants à tourner la loi en entreprenant des opérations d'un nombre de places juste inférieur aux seuils.

Très controversé par la profession au moment de sa mise en place, ce système ne semble plus soulever d'oppositions ouvertes ni dans son principe ni en ce qui concerne l'abaissement des seuils.

Votre rapporteur ne vous propose donc pas de modification du présent article -adopté par l'Assemblée nationale moyennant un amendement rédactionnel-, sous réserve que l'on n'en profitera pas pour appliquer une politique malthusienne susceptible de nuire au dynamisme du secteur : il s'agit d'organiser et de coordonner une activité dans un esprit d'aménagement du territoire, non d'entraver le développement d'un mode de consommation qui -les chiffres le prouvent- est approuvée par nos concitoyens et n'est pas sans lien avec l'augmentation de la fréquentation.

Les multiplexes ont représenté 17,3 % de la fréquentation et 18,4 % des recettes du cinéma français en 1997. Sur la base de l'implantation de 10 à 12 nouveaux établissements par an, la part de marché des multiplexes à la fin de l'an 2000 pourrait bien continuer de croître fortement pour s'établir aux alentours de 33 % avant de se stabiliser par suite de l'achèvement des équipements des grosses agglomérations.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.


ARTICLE 48 (nouveau)

Faculté de dérogation à l'obligation d'établissement d'un budget annexe pour les services d'eau et d'assainissement des petites communes

Commentaire : le présent article, résultant d'un amendement du rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale a pour objet d'instituer une faculté pour les communes de moins de 500 habitants de déroger, pour les services d'eau et d'assainissement gérés sous la forme d'une régie simple ou directe, à l'obligation d'établir un budget annexe.

Déposé et soutenu à titre personnel par le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, cet amendement a été adopté par la commission, puis par l'Assemblée nationale contre l'avis du gouvernement, qui a finalement accepté son maintien au terme de la seconde délibération dont le présent projet de loi a fait l'objet.

I. LE CONTEXTE

A. DES PRINCIPES FORTS ...


Sous des apparences de simple mesure d'allégement des contraintes administratives pesant sur les petites communes , cette disposition soulève en réalité une problématique complexe, puisqu'elle concerne le thème de la transparence du financement de la gestion de l'eau et, plus largement, celui du " juste prix " de l'eau. Or, une des principales ambitions de l'ensemble de cette réglementation, contraignante il est vrai, est de permettre de définir un " juste prix " de l'eau.

A cet égard, l'individualisation comptable, sous forme de budget annexe, des services publics industriels et commerciaux chargés de la distribution de l'eau et de l'assainissement constitue un instrument essentiel de cette transparence 67( * ) .

La finalité de cette réglementation est de garantir un financement du service par l'usager , c'est à dire à faire en sorte que le prix payé par l'usager corresponde à la valeur réelle du service qu'il reçoit. Il s'agit en particulier d'éviter que l'usager supporte, par manque de transparence entre le budget de la commune et celui du service d'eau et d'assainissement, une charge supérieure à celle du service rendu 68( * ) .

Il n'en reste pas moins que cette obligation (dont les modalités spécifiques sont définies par l'instruction budgétaire et comptable M. 49 applicable aux services d'eau et d'assainissement) est lourde à mettre en oeuvre pour les communes et, a fortiori , pour les plus petites d'entre elles.

B. ... AYANT DÉJÀ FAIT L'OBJET D'IMPORTANTES EXCEPTIONS

Cette difficulté de mise en oeuvre de ces principes a déjà conduit à l'adoption d'un certain nombre d'assouplissements :

1. La date d'entrée en vigueur de ces obligations (transcrites dans l'instruction budgétaire et comptable M 49 applicable depuis le 1 er janvier 1992 ) a presque d'emblée été différée (circulaire interministérielle du 10 novembre 1992) pour tenir compte des difficultés rencontrées par les petites communes : report au 1 er janvier 1996 pour les communes de 500 à 1.000 habitants, et au 1 er janvier 1997 pour les communes de moins de 500 habitants ;

2. Les communes de moins de 3.000 habitants sont, par ailleurs et en application de l'article L. 2224-6 du code général des collectivités territoriales, autorisées à déroger à la règle de l'établissement de deux budgets distincts (un pour l'eau et un pour l'assainissement) en recourant à une gestion commune des deux services dans un budget unique (à condition qu'ils soient soumis aux mêmes règles fiscales et de gestion) ;

3. Enfin, les mêmes communes de moins de 3.000 habitants bénéficient, en application de l'article 75 de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier modifiant l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales, d'une exception au principe d'interdiction de financement par le budget communal des dépenses de ces services.

S'agissant de cette dernière dérogation, il convient de rappeler qu'en application de l'article L. 2224-2, 2° du code général des collectivités territoriales, les communes pouvaient déjà prendre en charge en tout ou partie les investissements qui, en raison de leur importance et eu égard au nombre d'usagers, ne pouvaient être financés sans augmentation excessive des tarifs.

Cette dérogation à la règle de financement des services publics à caractère industriel et commercial par la redevance devait faire l'objet, à peine de nullité 69( * ) , d'une délibération motivée du conseil municipal, fixant les règles de calcul et les modalités de versement des dépenses du service prises en charge par la commune, ainsi que le ou les exercices auxquels elles se rapportaient.

Depuis la dérogation introduite par l'article 75 de la loi du 12 avril 1996, modifiant l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales, la délibération motivée et la production de justifications n'apparaissent plus obligatoires pour les communes de moins de 3.000 habitants et les groupements composés de communes dont la population ne dépasse pas 3.000 habitants. Par ailleurs, cette disposition ne limite pas la nature des dépenses qui peuvent faire l'objet d'une prise en charge .

Il en résulte que les dépenses d'exploitation, comme les dépenses d'investissement, entrent dans le champ d'application de la loi, et que l'interdiction posée à l'avant dernier alinéa de l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales de compensation pure et simple d'un déficit d'exploitation ne s'applique pas aux services d'eau et d'assainissement des communes de moins de 3.000 habitants et aux groupements composés de communes dont la population ne dépasse pas 3 000 habitants.

A cet égard, la circulaire du 23 décembre 1996 relative à l'application de l'article 75 de la loi du 12 avril 1996, note que " cette possibilité de prise en charge ouverte par la loi s'appliquant sans restriction, le coût des services d'eau et d'assainissement des communes et groupements composés de communes ne dépassant pas 3 000 habitants pourra valablement être répercuté sur la fiscalité directe locale ".

II. LA PORTÉE DE LA DISPOSITION

Faut-il renforcer encore les dérogations en approuvant le présent article qui autorise les communes de moins de 500 habitants à se libérer des contraintes comptables d'un budget annexe en n'ayant plus qu'à produire " un état sommaire présentant, article par article, les montants des recettes et de dépenses affectés à ces services " lorsque ceux-ci sont gérés sous forme de régie simple ou directe 70( * ) ?

Dans cette perspective, votre commission a examiné cette disposition en veillant à concilier la légitime expression d'une volonté de simplification administrative avec les exigences de transparence du financement de la politique de l'eau .

A cet égard, la mesure lui est apparu comme ne possédant qu'un intérêt limité pour les communes potentiellement concernées 71( * ) , tout en étant susceptible de faire naître pour celles-ci des risques juridiques.

A. UN INTÉRÊT PRATIQUE LIMITÉ...


L'article L. 2221-11 du code général des collectivités territoriales, dispose que :

" Les produits des régies dotées de la seule autonomie financière, y compris les taxes ainsi que les charges, font l'objet d'un budget spécial annexé au budget de la commune voté par le conseil municipal.

" Dans les budgets et les comptes de la commune, ces produits et ces charges sont repris dans deux articles, l'un pour les recettes, l'autre pour les dépenses. "


Le présent article complète ces dispositions en permettant aux communes de moins de 500 habitants d'y déroger, en limitant cette obligation à l'établissement d'un état sommaire , qui doit être produit en annexe au budget et au compte administratif , et qui présente, article par article, les montants de recettes et de dépenses affectés à ces services .

Concrètement, ces communes seraient donc dispensées de la tenue régulière des écritures qu'impliquent un budget annexe.

Extraits de la circulaire du 2 novembre 1995 relative à la mise à jour des nomenclatures budgétaires et comptables des communes, des départements, des régions et des établissements publics de ces collectivités (instructions M11, M12, M51, M4, M41, M42, M43, M49).

Documents de fin d'exercice

1) Régies simples ou directes

L'assemblée délibérante vote un budget annexé à celui de la commune et l'ordonnateur présente un compte administratif également annexé au compte administratif principal et voté avec ce dernier.

Le comptable de ces régies établit un compte de gestion qui comprend :

- l'exécution du budget ;

- la balance générale ;

- le compte de résultat ;

- le bilan.

A cet égard, votre commission a noté que cette volonté de simplification n'aurait en fait qu'une portée très limitée dans la mesure où celle-ci ne peut, en aucune façon, s'interpréter comme impliquant une suspension de l'ensemble des obligations budgétaires et comptables applicables à ces services .

Le principe de l'équilibre défini à l'article L 2224-1 du code général des collectivités territoriales qui dispose que " les budgets des services publics à caractère industriel ou commercial exploités en régie, affermés ou concédés par les communes doivent être équilibrés en recettes et en dépenses " , continueront en effet de s'appliquer. Il en ira de même pour l'ensemble des règles définies par l'instruction budgétaire et comptable M. 49 et, notamment, de celles qui impliquent la tenue d'écritures comptables comme la constitution d'amortissements des immobilisations et de provisions ou de celle des écritures de stocks.

La portée de cette dérogation à la règle de l'établissement d'un budget annexe apparaît donc singulièrement limitée.

B. ... SUSCEPTIBLE DE NUIRE À LA SÉCURITÉ JURIDIQUE

Cette mesure est en outre de nature à favoriser la naissance de risques juridiques. En effet, l'absence d'obligation de la tenue d'un budget annexe fera obstacle à un suivi financier en cours de gestion des services de l'eau et de l'assainissement , les collectivités concernées ne disposant plus d'un document leur permettant, en cours de gestion, de procéder à un contrôle précis de la disponibilité des crédits affectés à ces services. Tout éventuel dérapage financier des services d'eau et d'assainissement ne pourra être constaté qu'avec retard , puisque dans la mesure proposée les communes seront, in fine , simplement tenues de produire un état sommaire récapitulatif en annexe au compte administratif .

L'absence de transparence de la gestion de ces services qui en résultera risque, très certainement, d'exposer les communes concernées à des contentieux au sujet du prix de l'eau. A cet égard, il convient de rappeler que la Cour des Comptes, dans son rapport public particulier publié en janvier 1997 au sujet de la gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement, relevait que " les principaux dysfonctionnements de services publics d'eau et d'assainissement relevés au cours de l'enquête proviennent d'insuffisances techniques et financières . Ils pourraient être cependant corrigés si les procédures de contrôle de la gestion étaient mis en oeuvre et si l'information des usagers, que pourtant le mode de gestion en régie est censé favorisé, était organisé. " .

Enfin, cette disposition apparaît comme une mesure dissuasive au regard du développement de l'intercommunalité qui, dans ce domaine comme dans d'autres, est de nature à favoriser la réalisation d'économies d'échelle ainsi que la qualité du suivi technique des services de l'eau et d'assainissement.

Au total, sans méconnaître la lourdeur des contraintes qu'imposent aux petites collectivités l'ensemble de ces règles budgétaires et comptables, la commission a cependant relevé le faible intérêt pratique de la dérogation proposée ainsi que le " mauvais signal " que l'adoption de cette disposition pourrait constituer au regard de l'objectif d'un financement transparent de la politique de l'eau. Aussi a-t-elle décidé, sur cet article, de s'en remettre à la sagesse du Sénat.

Décision de la commission : votre commission a décidé, sur cet article, de s'en remettre à la sagesse du Sénat.

ARTICLE 49 (nouveau)

Extension du champ de la publicité en faveur
des boissons contenant de l'alcool

Commentaire : voté à l'unanimité par l'Assemblée nationale, cet article modifie l'article L.17 du code des débits de boissons en autorisant les producteurs et les fabriquants de boissons alcooliques à faire de la publicité pour leurs produits sur des objets " strictement réservés à la consommation d'alcool " offerts, à titre gratuit ou onéreux, lors de la vente directe de leurs produits ou de visites touristiques des sites de production.

I - L'ORIGINE DE LA MESURE


L'article 49 du présent projet de loi modifie l'article 10 de la loi n°91-32 du 10 janvier 1991, dite loi Evin. Cet article, devenu l'article L.17 du Code des débits de boissons et des mesures contre l'alcoolisme, détermine les cas dans lesquels " la propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques dont la fabrication et la vente ne sont pas interdites ".

Art. L.17 (L. n° 87-588, 30 juill. 1987, art. 97-I ; L. n° 91-32, 10 janv. 1991, art. 10-III et IV) (1). - La propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques dont la fabrication et la vente ne sont pas interdites sont autorisées exclusivement:

1° Dans la presse écrite à l'exclusion des publications destinées à la jeunesse, définies au premier alinéa à l'article 1 er de la loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse ;

2° Par voie de radiodiffusion sonore pur les catégories de radios et dans les tranches horaires déterminées par décret en Conseil d'Etat ;

3° (L. n° 94-679, 8 août 1994, art. 77). Sous forme d'affiches et d'enseignes ; sous forme d'affichettes et d'objets à l'intérieur des lieux de vente à caractère spécialisé, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat ;

4° Sous forme d'envoi par les producteurs, les fabricants, les importateurs, les négociants, les concessionnaires ou les entrepositaires, de messages, de circulaires commerciales, de catalogues et de brochures, dès lors que ces documents ne comportent que les mentions prévues à l'article L. 18 et les conditions de vente des produits qu'ils proposent.

5° Par inscription sur les véhicules utilisés pour les opérations normales de livraison des boissons, dès lors que cette inscription ne comporte que la désignation des produits ainsi que le nom et l'adresse du fabricant, des agents ou dépositaires, à l'exclusion de toute autre indication ;

6° En faveur des fêtes et foires traditionnelles consacrées à des boissons alcooliques locales et à l'intérieur de celle-ci dans des conditions définies par décret ;

7° En faveur des musées, universités, confréries ou stages d'initiation oenologique à caractère traditionnel ainsi qu'en faveur de présentations, de dégustations, dans des conditions définies par décret.

Toute opération de parrainage est interdite lorsqu'elle a pour objet ou pour effet la propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques.

Les dispositions de l'article L.17 ont donné lieu à un décret en Conseil d'Etat, n° 93-768 du 29 mars 1993.

L'article 4 du décret prévoyait que : " A l'occasion de la vente directe de leurs produits aux consommateurs ou aux distributeurs ou à l'occasion de la visite touristique des lieux de fabrication, les producteurs et les fabriquants de boissons contenant de l'alcool peuvent offrir, à titre gracieux ou onéreux, des objets strictement réservés à la consommation des dites boissons ".

Le Conseil d'Etat, auquel le texte du décret avait pourtant été soumis avant sa publication, a annulé l'article 4 du décret. Dans un arrêt du 9 juillet 1997, le Conseil a considéré que les dispositions prévues à cet article, " dans la mesure où elles ont pour objet d'autoriser l'offre à titre gratuit ou la vente d'objets à caractère publicitaire par les producteurs et les fabriquants de boissons alcooliques, alors que les autres dispositions du décret attaqué interdisent cette pratique dans les autres lieux de vente à caractère spécialisé, opèrent une discrimination qui n'est pas prévue par les dispositions (...) de l'article L.17 du code des débits de boissons et de lutte contre l'alcoolisme ".

Le présent article prend acte du fait que l'article 4 du décret du 29 mars 1997 était contraire à l'article L.17 du code des débits de boisson et des mesures contre l'alcoolisme.

Il a en effet pour objet d'inscrire dans la loi le texte de l'article 4 du décret de 1993 72( * ) , en l'intégrant à l'article L 17, auquel il était auparavant contraire.

II - LA PORTÉE DE LA MESURE


Votre rapporteur s'interroge sur la signification de l'expression " objets strictement réservés à la consommation de boissons contenant de l'alcool ". Le caractère plus ou moins restrictif de sa définition pourrait avoir des incidences sur la portée de la modification du Code des débits de boissons contenue dans le présent article.

Votre commission des finances n'a pas de jugement particulier à formuler sur l'opportunité de cette modification du code des débits de boissons. Elle n'est guère en mesure de se prononcer sur la compatibilité entre cet article et l'esprit de la loi Evin. Elle observe toutefois que l'Assemblée a rejeté un amendement qui revenait quant à lui sur le dispositif même de cette loi.

Décision de la commission : votre commission a décidé, sur cet article, de s'en remettre à la sagesse du Sénat.

ARTICLE 50 (nouveau)

Extension de la taxe à l'essieu aux véhicules de plus de 12 tonnes et suppression du droit de timbre sur les contrats de transport

Commentaire : cet article introduit par voie d'amendement par le gouvernement au cours de l'examen du présent projet de loi à l'Assemblée nationale, a pour objet d'étendre la taxe à l'essieu aux véhicules de 12 à 16 tonnes et de plus de 38 tonnes et d'en modifier les taux pour mettre la France en conformité avec une directive européenne de 1993.

Il propose en outre de supprimer le droit de timbre sur les contrats de transport. La perte de ressources fiscales pour les départements, qui touchaient jusqu'à présent le produit de la vignette acquittée par ces véhicules, sera intégralement compensée.


La taxe spéciale sur certains véhicules routiers dite " taxe à l'essieu " a été instaurée par l'article 16 de la loi de finances pour 1968 dans le but de compenser les dépenses d'entretien de la voirie occasionnée par la circulation de véhicules à fort tonnage. Ses tarifs n'ont pas été modifiés depuis 1974.

Cette taxe comprend à l'heure actuelle 1.008 taux déterminés en fonction du mode de paiement, de la nature juridique du transport des marchandises, de la zone de circulation des véhicules et du mode de déclaration des véhicules.

La directive n° 93/89/CEE du Conseil du 25 octobre 1993 73( * ) qui tend à harmoniser sur le plan communautaire les taux minima des taxes sur les véhicules de transport de marchandises par route de 12 tonnes et plus aurait dû être transposée en droit national le 1 er janvier 1995 .

Or, en raison de la sensibilité du secteur des transports routiers, cette mesure a été reportée à plusieurs reprises. Aussi, après une mise en demeure le 16 mai 1995, suivie d'un avis motivé le 27 juin 1996, la Commission européenne a-t-elle introduit un recours contre la France devant la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) le 5 mai 1997.

La France a été condamnée par la CJCE le 5 mars dernier pour non transposition de ces dispositions.

Le présent article tend donc à transposer en droit français les dispositions de cette directive.

Il devrait se traduire par :

- une extension du champ d'application de la taxe à l'essieu aux véhicules de plus de 12 tonnes et aux véhicules de plus de 38 tonnes ;

- une diminution du nombre des taux (124 au lieu de 1.008) ;

- la suppression des réductions de tarif liées aux modes de paiement de la taxe, aux zones de circulation et aux modalités juridiques du transport, ainsi que des abattements pour circulation sur autoroutes à péages ;

- l'application de deux grandes catégories de taux : des taux de base pour les véhicules équipés d'une suspension pneumatique ou reconnue équivalente (environ 80 % du parc) et des taux majorés pour les véhicules comportant un autre système de suspension (environ 20 % du parc) ;

- une modification des taux et une forte augmentation du produit de la taxe .

Selon les renseignements fournis par le gouvernement à votre rapporteur, le présent article figurait dans le projet de loi transmis au Conseil d'Etat. Ce dernier ayant émis des réserves sur la progressivité des taux de la taxe à l'essieu proposés dans la nouvelle grille tarifaire, le gouvernement a préféré le retirer du projet de loi déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale pour plus ample expertise auprès des professions concernées.

C'est la raison pour laquelle le présent article a été introduit par voie d'amendement au texte lors de son examen par les députés.

I - LE DISPOSITIF ACTUEL

La " taxe à l'essieu ", qui est perçue par la direction générale des douanes, frappe certains véhicules routiers dont le fort tonnage occasionne des dépenses particulières au titre de l'entretien et du renforcement de la voirie. Elle est visée aux articles 284 bis à 284 sexies du Code des douanes.

A. CHAMP D'APPLICATION

Les modalités de liquidation de la taxe à l'essieu varient selon les catégories de véhicules, celles-ci résultant du nombre d'essieux. Les plafonds des différentes tranches fixées en 1968 puis révisées en 1974 sont calqués sur les limites fixées par le code de la route.

Article R. 55 du code de la route

Le poids total autorisé en charge (PTAC) d'un véhicule ne doit pas dépasser les limites suivantes :

- véhicule à moteur à deux essieux ou véhicule remorqué à deux essieux : 19 tonnes ;

- véhicule à moteur à 3 essieux ou véhicule remorqué à 3 essieux ou plus : 26 tonnes ;

- véhicule à moteur à quatre essieux ou plus : 32 tonnes ;

Le poids total roulant autorisé (PTRA) d'un véhicule articulé d'un ensemble composé d'un véhicule à moteur et d'une remorque d'un train double ne doit pas dépasser :

- 38 tonnes si l'ensemble considéré ne comporte pas plus de quatre essieux ;

- 40 tonnes, si l'ensemble considéré comporte plus de quatre essieux.

Ainsi, la taxe à l'essieu frappe :

- les véhicules automobiles à 2 essieux de 16 à 19 tonnes de PTAC (catégorie A) ;

- les véhicules automobiles à 3 essieux de 25,501 à 26 tonnes de PTAC (catégorie B) ;

- les ensembles articulés composés d'une semi-remorque à 1 essieu attelée à un tracteur à 2 essieux de 25 à 32 tonnes de PTAC (catégorie C) ;

- les ensembles articulés composés d'une semi-remorque à 1 essieu attelée à un tracteur à 3 essieux de 31,501 à 35 tonnes de PTAC (catégorie D) ;

- les ensembles articulés composés d'une semi-remorque à 2 essieux attelée à un tracteur à 2 essieux de 35,001 à 38 tonnes de PTAC (catégorie E) ;

- les remorques à 2 essieux de 17,5 à 19 tonnes de PTAC (catégorie R).

Sont également imposables les véhicules dont le poids total en charge excède les maxima autorisés par le code de la route et qui bénéficient des autorisations de transport exceptionnel prévues à l'article R. 48 du même code.

Il s'agit :

- des véhicules à deux essieux dont le poids en charge excède 19 tonnes ;

- des véhicules à trois essieux dont le poids en charge excède 26 tonnes ;

- des ensembles de véhicules dont le poids total en charge excède 32 tonnes, 35 tonnes ou 38 tonnes selon la catégorie (C, D, E).

Les véhicules ou ensembles de véhicules dont le poids total effectif en charge excède les maxima autorisés par le Code de la route sans être autorisés à effectuer des transports exceptionnels sont soumis aux dispositions prévues pour les véhicules en surcharge :

Les véhicules dont le poids total en charge effectif (PTCE) excède de plus de 5 % leur poids en charge autorisé (PTAC) sont assujettis au paiement de la taxe qui correspond à ce PTCE. Les véhicules dont le PTCE est supérieur de plus de 5 % au poids total autorisé en charge maximale de la catégorie dans laquelle ils sont rangés (PTACM) sont assujettis au paiement d'une majoration de 25 % de la taxe qu'il ont acquittée pour chaque tranche de 5 % du PTCE du véhicule dépassant le PTAC.

Les véhicules immatriculés dans les Etats étrangers et circulant en France sont passibles de la taxe à l'essieu s'ils ne sont pas soumis à la taxe de réciprocité.

La taxe à l'essieu s'applique sur l'ensemble du territoire métropolitain à l'exception de la Corse.

B. TARIFS

Les tarifs de la taxe à l'essieu sont fixés par les dispositions de l'article 284 ter du Code précité. Les tarifs trimestriels sont fixés d'après la catégorie des véhicules et leur poids total autorisé en charge (PTAC) ou leur poids total roulant autorisé (PTRA) tel qu'il est inscrit sur la carte grise du véhicule.

Mais la taxe peut être payée selon un tarif journalier égal au 1/25 ème du tarif trimestriel. Il est donc plus avantageux si le véhicule circule moins de 25 jours par trimestre. Ce tarif vise également les véhicules qui doivent être utilisés occasionnellement en dehors de leur zone de rattachement, par exemple véhicule déclaré pour la zone de camionnage et amené à circuler en zone courte.

Les tarifs de cette taxe sont :

- majorés lorsque la taxe est acquittée pour un véhicule d'un poids total autorisé en charge déterminé, mais dont le numéro d'immatriculation n'est pas mentionné sur la déclaration fiscale souscrite par son propriétaire, ce qui permet à celui-ci la mise en circulation de plusieurs véhicules, non individualisés par leur numéro, sous un seul laissez-passer banalisé ;

- réduits pour les véhicules servant exclusivement à des transports pour compte propre ainsi que pour ceux qui sont exploités en zone de camionnage ou en zone courte.

Les réductions de taxe à l'essieu

Réductions applicables aux seuls transports pour son compte propre

Les véhicules utilisés pour transporter des marchandises pour son propre compte par l'entreprise propriétaire ou locataire, bénéficient d'une réduction. Cette dernière est de 20 % pour les véhicules qui appartiennent à l'entreprise utilisatrice et pris en crédit-bail et de 10 % pour les véhicules loués.

Cette réduction exige que les véhicules soient utilisés exclusivement à des transports pour compte propre. Les véhicules ayant une activité mixte de transport pour compte propre et pour compte d'autrui acquittent les taxes applicables à cette dernière catégorie.

Réductions applicables à tous les transports publics ou privés en zone de camionnage ou en zone courte

Ces réductions sont de 75 % pour les véhicules qui n'effectuent des transports que dans la zone de camionnage à laquelle ils sont rattachés, et de 50 % pour les véhicules qui circulent en dehors de la zone de camionnage mais restent dans les limites de la zone courte à laquelle ils sont rattachés (moins de 200 km).

Réduction en cas de transport combiné rail-route .

Une réduction de 75 % est accordée aux véhicules qui utilisent les systèmes mixtes rail-route, quelle que soit leur zone de circulation. Il s'agit par là d'encourager l'intermodalité : les marchandises sont entreposées dans des containers et transportées par train sur la plus grande partie du trajet, le camion n'intervenant qu'en fin de parcours pour acheminer le container jusqu'à sa destination finale.

Réduction en cas de demi-essieux en ligne

Le tarif de la taxe, après éventuellement application de la majoration de 15 % et de la réduction de 10 % ou 20 % est réduit de 50 % pour les véhicules articulés et ensembles comportant une ou plusieurs remorques visés dans le barème sous l'appellation " transports exceptionnels " lorsque l'un au moins des essieux de l'élément tracté est constitué par des demi-essieux en ligne.

Les différentes réductions et majorations peuvent se cumuler.

Enfin, les entreprises qui font circuler des véhicules imposables sur des autoroutes à péage peuvent, sur pièces justificatives, se faire rembourser une partie de la taxe à l'essieu acquittée et calculée chaque année en fonction des distances parcourues.

Le tableau ci-après récapitule les tarifs en fonction des différentes catégories de véhicules.

Tableau récapitulatif des tarifs de la taxe à l'essieu

 

Poids total

Tarif trimestriel (en francs)

Tarif journalier (en francs)


Catégories de véhicule

autorisé en charge (en tonnes)

Tarif plein (zone longue)

Zone de camionnage ou rail-route

Zone courte

Tarif plein (zone longue)

Zone de camionnage ou rail-route

Zone courte

Véhicules automobiles à deux essieux

16 à 16,500

16,501 à 17,500

17,501 à 18,500

18,501 à 19

100

350

750

1.250

25

87,50

187,50

312,50

50

175

375

625

4

14

30

50

1

3,50

7,50

12,50

2

7

15

25

Véhicules automobiles à trois essieux

25,500 à 26

225

56,25

112,50

9

2,25

4,50


Ensembles composés d'une semi-remorque à un essieu attelée à un tracteur à deux essieux

25 à 25,500

25,501 à 26,500

26,501 à 27,500

27,501 à 28,500

28,501 à 29,500

29,501 à 30,500

30,501 à 31,500

31,501 à 32

50

225

650

1.100

1.650

2.250

2.400

3.600

12,50

56,25

162,50

275

412,50

562,50

600

900

25

112,50

325

550

825

1.125

1.200

1.800

2

9

26

44

66

90

96

144

0,50

2,25

6,50

11

16,50

22,50

24

36

1

4,50

13

22

33

45

48

72

Ensembles composés d'une semi-remorque à un essieu attelée à un tracteur à trois essieux

31,501 à 32,500

32,501 à 33,500

33,501 à 34,500

34,501 à 35

225

550

950

1.400

56,25

137,50

237,50

350

112,50

275

475

700

9

22

38

56

2,25

5,50

9,50

14

4,50

11

19

28

Ensembles composés d'une semi-remorque à deux essieux attelée à un tracteur à deux essieux

35,001 à 36,5

36,501 à 37,5

37,501 à 38

400

850

1.300

100

212,50

325

200

425

650

16

34

52

4

8,50

13

8

17

26

Remorque à deux essieux

17,500 à 18,500

18,501 à 19

550

800

137,50

200

275

400

22

32

5,50

8

11

16

Remarques :

a) Majoration de tarif : majoration de 15 % pour la délivrance d'un laissez-passer fiscal "banalisé"

b) Réductions de tarif :

- transports pour propre compte : réduction de 10 % lorsque le véhicule est exploité sous le régime de la location et de 20 % lorsqu'il est exploité en propriété ;

- véhicules circulant sur autoroute à péage : réduction de 5 % du montant de la taxe pour chaque tranche entière de 3.500 km ;

- transports exceptionnels : réduction de 50 % lorsque l'un au moins des essieux de l'élément tracté est constitué par les demi-essieux en ligne ;

- véhicules utilisant les systèmes mixtes rail-route : réduction de 75 % du taux de base.

Les réductions de tarif ci-dessus peuvent se cumuler sur un même véhicule.


Compte tenu des réductions de tarif évoquées plus haut et de la possibilité de choisir entre un tarif journalier et un tarif trimestriel, l'administration fiscale a recensé 1.008 taux différents .

Les véhicules qui donnent lieu au paiement de la taxe à l'essieu sont corrélativement dispensés de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur (vignette) en vertu de l'article 1599 D du code général des impôts. En revanche, ceux dont le PTAC est inférieur aux seuils de tonnage figurant dans le tableau ci-dessus doivent acquitter la vignette.

En principe, le redevable de la taxe est le propriétaire du véhicule . Toutefois, lorsque celui-ci fait l'objet, soit d'un contrat de crédit-bail, soit d'un contrat de location de deux ans ou plus et comportent une faculté d'achat, le locataire est le redevable. S'agissant des véhicules faisant l'objet d'un contrat de location de 12 mois ou plus sans faculté d'achat, l'administration admet que le locataire puisse déclarer les véhicules et acquitter la taxe pour le compte du loueur propriétaire, sous réserve que le propriétaire ait délivré à cette fin un mandat écrit au locataire.

II - LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. TRANSPOSITION DE LA DIRECTIVE RELATIVE AUX TAXES SUR LES VÉHICULES DE TRANSPORT ROUTIER DE MARCHANDISES


Le présent article a pour objet de transposer l'article 6 de la directive européenne 93/89/CEE du Conseil du 25 octobre 1993 qui impose aux Etats membres de fixer des taux minimaux de taxes sur les véhicules destinés exclusivement au transport de marchandises par route et ayant un poids total en charge autorisé (PTAC) égal ou supérieur à 12 tonnes .

Or, comme expliqué plus haut, la taxe à l'essieu actuelle ne s'applique en France qu'aux véhicules dont le PTAC est égal ou supérieur à 16 tonnes. Au surplus, les tarifs de cette taxe n'ayant pas été revalorisés depuis 1974, ils sont parfois sensiblement inférieurs aux seuils planchers fixés par la directive.

Le présent article vise donc à revaloriser les taux, tout en redéfinissant les catégories de véhicules visées ainsi que les tranches d'imposition afin de se conformer aux taux minima visés dans la directive.

1. La nouvelle grille tarifaire fait apparaître de nouvelles catégories de véhicules et de nouvelles tranches d'imposition

Le présent article se propose de remplacer les tarifs énumérés dans le tableau figurant plus haut par les tarifs suivants :








Catégorie de véhicules

Poids total autorisé en charge ou poids total roulant autorisé (en tonnes)

Tarifs par trimestre (en francs)

 

égal ou supérieur à

inférieur à

Suspension pneumatique de l'(des)essieu(x) moteur(s)

Autres systèmes de suspension de l'(des)essieu(x) moteurs

I - Véhicules automobiles porteurs

 
 
 
 

a) à deux essieux

12

18

450

650

 

18

 

600

900

b) à trois essieux

12

 

450

650

c) à quatre essieux

12

27

450

650

 

27

 

600

890

II - Véhicules articulés composés d'un tracteur et d'une semi-remorque

 
 
 
 

a) semi-remorque à un essieu

12

20

620

860

 

20

27

950

1.160

 

27

 

1.450

1.650

b) semi-remorque à deux essieux

12

27

620

860

 

27

33

770

1.070

 

33

39

950

1.270

 

39

 

1.040

1.540

b) semi-remorque à trois essieux

12

27

620

860

 

27

38

770

1.070

 

38

 

860

1.160

III - Remorques

16

 
 

450

Ce tableau appelle les observations suivantes :

Les nouvelles catégories de véhicules diffèrent assez sensiblement des anciennes catégories énumérées plus haut. Le tableau opère en effet une césure générale entre les " véhicules automobiles porteurs " (véhicules d'un seul tenant) et les " véhicules articulés composés d'un tracteur et d'une semi-remorque ". Un troisième ensemble comprend les remorques.

Au sein du premier ensemble, les véhicules sont distingués selon qu'ils ont deux, trois ou quatre essieux (c'est-à-dire 4, 6 ou 8 roues). Il convient de noter que cette dernière catégorie n'existait pas dans l'ancienne grille de tarifs.

Au sein du deuxième ensemble, les véhicules sont taxés différemment selon que la semi-remorque comporte un, deux ou trois essieux, le nombre d'essieux du tracteur étant négligé, dans la mesure où il y a une corrélation entre le nombre d'essieux et le tonnage tracté. La catégorie " semi-remorque à trois essieux " constitue également une novation par rapport à l'ancienne grille.

Ces nouvelles catégories ont le mérite de la simplicité et de l'universalité. Elles englobent en effet tous les types de véhicules.

Les tranches d'imposition sont redéfinies à la baisse afin d'inclure les véhicules dont le PTAC est compris entre 12 et 16 tonnes . En conséquence, les nouvelles tranches diffèrent assez sensiblement des anciennes. Ainsi, la catégorie " véhicules articulés composés d'un tracteur et d'une semi-remorque à un essieu " comporte désormais trois tranches (" 12 à 20 tonnes ", " 20 à 27 tonnes " et " plus de 27 tonnes ") alors que le seuil plancher de la même catégorie dans la grille précédente était de 31,5 tonnes.

De même, la tranche " 33 à 39 tonnes " de la catégorie " véhicules articulés composés d'un tracteur et d'une semi-remorque à deux essieux " englobe les trois tranches de la catégorie similaire précédente (qui s'échelonnaient de 35 à 38 tonnes), tout en étant précédée de deux tranches inférieures (" 12 à 27 tonnes " et " 27 à 33 tonnes ") qui ne correspondent à rien de ce qui existait précédemment.

Les seuils plafonds disparaissent . Ainsi, alors que les anciennes séries de tranches n'excédaient pas, par catégorie de véhicules, le poids maximal autorisé en charge par le Code de la route, le nouveau tableau ne fixe pas de seuils plafonds. Il n'y a donc plus de " failles " dans le dispositif, plus d'interstices dans lesquelles de nouvelles catégories de véhicules autorisées par le Code de la route pourraient se glisser pour échapper à la taxe.

Les nouvelles tranches sont moins nombreuses . Si l'on considère par exemple la catégorie " véhicules automobiles porteurs à deux essieux " qui existait déjà dans la précédente grille, on constate que seules deux tranches subsistent contre quatre auparavant : une tranche " 12 à 18 tonnes " et une tranche " plus de 18 tonnes ". De même, un seul taux sera désormais appliqué à toutes les remorques de plus de 16 tonnes alors que le système actuel décompose les véhicules de cette catégorie en huit tranches selon leur PTAC.

Ainsi, la nouvelle grille ne comporte plus que 16 tranches contre 22 auparavant.

Les tarifs dépendent du type de suspension du véhicule . Ainsi, les véhicules équipés d'une suspension pneumatique (ou d'une suspension reconnue comme équivalente) du ou des essieux moteurs bénéficient d'une grille tarifaire plus favorable compte tenu de leur plus grande innocuité pour le revêtement des routes. En revanche, les tarifs applicables aux véhicules équipés d'un autre type de suspension sont majorés de 200 à 500 francs par trimestre.

La suspension pneumatique, qui équipe un nombre croissant de véhicules routiers (80 % du flux de véhicules nouveaux selon l'administration), est définie par référence à une directive européenne 92/7/CEE du 10 février 1992 modifiant la directive 85/3/CEE relative aux poids, aux dimensions et à certaines autres caractéristiques techniques de certains véhicules routiers. L'annexe III de cette directive définit ainsi la notion de suspension pneumatique :

" Un système de suspension est dit pneumatique lorsque l'effet de ressort est assuré à au moins 75 % par un dispositif pneumatique. "

La même annexe énumère ensuite un certain nombre de critères permettant à une suspension d'être reconnue comme " équivalente à une suspension pneumatique ".

Enfin, la fourchette de tarifs est plus resserrée . Alors que les anciens tarifs (hors réductions) s'échelonnaient entre 50 et 3.600 francs par trimestre, les nouveaux tarifs sont étagés entre 450 et 1.450 francs par trimestre pour les véhicules équipés de suspension pneumatique, et 650 à 1.650 francs par trimestre pour les véhicules équipés d'un autre système de suspension.

2. Les réductions de tarifs sont, pour l'essentiel, supprimées

La directive européenne 93/89/CEE du 25 octobre 1993 précitée dont le présent article porte transposition dispose (article 6, paragraphe 6) que " les Etats membres ne peuvent accorder aucune exemption ou réduction des taxes mentionnées à l'article 3 qui aurait pour effet de rendre le montant de la taxe due inférieur aux taux minimaux visés aux paragraphes 1 et 2 du présent article ".

Le présent article propose en conséquence de supprimer les réductions tarifaires qui bénéficiaient jusqu'à présent aux véhicules servant exclusivement à des transports pour compte propre, à ceux qui sont exploités en zone de camionnage ou en zone courte et aux véhicules dont l'un des essieux est constitué par des demi-essieux en ligne. En effet, dans la mesure où la France s'est conformée le plus fidèlement possible aux prescriptions de la directive en calquant strictement les nouveaux taux de la taxe à l'essieu sur les taux minimaux préconisés par la Commission, elle ne dispose plus de marges de manoeuvre pour accorder des réductions, sauf à contrevenir aux dispositions de l'article 6 ci-dessus.

En conséquence, la taxe à l'essieu s'appliquera uniformément pour les entreprises qui prennent en charge leur propre transport de marchandises et celles dont l'activité principale est le transport de marchandises. Il faut y voir une sorte d'encouragement aux entreprises de transport. De même, la taxe ne sera plus fonction de la distance parcourue.

De même, le présent article supprime la possibilité d'obtenir des abattements pour circulation sur autoroutes à péage. Il prévoit cependant un dispositif de transition pour permettre aux transporteurs de continuer à disposer de ce mécanisme jusqu'au 31 décembre 1998.

En revanche, la réduction de 75 % accordée aux véhicules qui utilisent les systèmes mixtes rail-route , quelle que soit leur zone de circulation, demeure . En effet, la directive prévoit 74( * ) que " le Conseil, statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission, peut autoriser un Etat membre à maintenir des exonérations ou des réductions supplémentaires des taxes sur les véhicules pour des raisons de politiques spécifiques de nature socio-économique ou liées aux infrastructures de cet Etat ".

Le gouvernement français a ainsi obtenu de maintenir la réduction relative aux systèmes mixtes rail-route, dans la mesure où l'intermodalité est un moyen d'encourager le recours au transport ferroviaire, de réduire le transport par route, et partant, les nuisances afférentes (émissions de gaz carbonique, congestion des axes, dégradation de la voirie...).

Par ailleurs, les majorations de tarifs n'ont plus lieu d'être puisque le tableau ne comporte plus de seuils d'imposition plafonds. Il ne peut donc y avoir dépassement de tonnage.

3. Le champ d'application de la taxe à l'essieu est restreint aux seuls véhicules immatriculés en France ou dans un État autre qu'un État membre de l'Union européenne

La directive 93/89/CEE du 25 octobre 1993 précise dans son article 5 que, " en ce qui concerne les véhicules immatriculés dans les Etats membre, les taxes visées à l'article 3 sont perçues uniquement par l'Etat membre d'immatriculation . "

Cette disposition a obligé le gouvernement à aménager, dans le présent article, le champ d'application de la taxe à l'essieu pour en exclure tous les véhicules immatriculés dans un Etat membre de l'Union européenne. Ainsi, le paragraphe I du présent article précise-t-il que seuls les véhicules immatriculés en France ou dans un Etat autre qu'un Etat membre de l'Union européenne sont soumis à la taxe spéciale.

Le maintien des véhicules immatriculés dans un autre Etat qu'un Etat membre de l'Union européenne dans le champ d'application de la taxe à l'essieu justifie la conservation du tarif journalier qui permet aux véhicules étrangers non communautaires ne faisant que traverser le territoire français, de n'acquitter qu'une fraction du montant de la taxe. Pour rappel, ce tarif journalier est égal au 1/25 ème du tarif trimestriel.

4. Le nouveau dispositif entrera en vigueur le 1 er janvier 1999 sauf pour les véhicules de moins de 16 tonnes

Le paragraphe IV du présent article fixe au 1 er janvier 1999 la date d'entrée en vigueur de la nouvelle taxe à l'essieu.

Néanmoins, deux assouplissements sont prévus :

• Le premier vise les véhicules qui étaient jusqu'à présent assujettis à la vignette et qui, en raison de l'extension de la taxe à l'essieu aux véhicules de 12 à 16 tonnes et aux véhicules de plus de 38 tonnes, devraient passer à la taxe à l'essieu. Ces véhicules ne seraient assujettis à la taxe à l'essieu qu'à compter du 1 er décembre 1999, c'est-à-dire 11 moins après la date d'entrée en vigueur de la nouvelle grille de la taxe.

Il convient en effet de prévoir une période de transition pour éviter une double taxation, dans la mesure où la vignette est un impôt annuel acquitté en novembre pour une période d'imposition qui court du 1 er décembre de l'année N au 30 novembre de l'année N + 1. En l'absence de cette période de transition, les véhicules dont le PTAC est compris entre 12 et 16 tonnes devraient acquitter la vignette en novembre 1998, puis la taxe à l'essieu à partir du 1 er janvier 1999.

• Le deuxième assouplissement vise à éviter que le dispositif soit rétroactif , s'agissant de la suppression des réductions de taxe. Il concerne les véhicules qui, en circulant au cours de l'année 1998 sur des autoroutes à péage, auraient accumulé un " crédit " de taxe à l'essieu imputable sur le montant d'impôt qu'ils auront à payer en 1999. En précisant que la réduction d'impôt correspondante cesse de s'appliquer aux véhicules " circulant sur autoroutes à péage à compter du 1 er janvier 1999 ", le texte fixe au 1 er janvier 1999 la date d'entrée en vigueur de la suppression de ce dispositif, tout en permettant aux routiers de se faire rembourser la fraction d'impôt correspondant aux autoroutes qu'ils auront empruntées en 1998.

5. La perte de recettes pour les départements sera intégralement compensée

Enfin, le paragraphe V du présent article prévoit un dispositif de compensation pour les départements qui se verraient privés de ressources " vignette " par le jeu des vases communiquants. Le paragraphe IV dispose que " les pertes de recettes résultant pour les départements de l'application du présent article sont compensées chaque année intégralement soit par des attributions, de dotation générale de décentralisation, soit par des diminutions des ajustements prévues au 2 ème alinéa de l'article L. 1614-4 du code général des collectivités territoriales. " Cette compensation est de droit, aux termes de l'article L.1614-5 dudit code.

La compensation sera égale en 1999 " au montant de la vignette perçue sur les véhicules à moteur de 12 tonnes au moins au titre de la période d'imposition du 1 er décembre 1998 au 30 novembre 1999 ". Elle évoluera les années ultérieures comme la dotation générale de décentralisation (DGD).

L'Etat devra donc consentir un effort de trésorerie puisqu'il remboursera par compte d'avances aux départements, une ressource qu'il n'encaissera qu'à partir de janvier de l'année suivante et de façon échelonnée sur l'année.

6. Le rendement de la taxe à l'essieu devrait augmenter fortement

Selon les chiffres fournis par le gouvernement, la taxe à l'essieu concernait 91.188 assujettis en 1996 (pour environ 263.000 véhicules). Elle rapporte 464 millions de francs à l'Etat.

L'application de la nouvelle grille tarifaire s'étalera sur deux ans :

En 1999
, la nouvelle grille ne s'appliquera qu'aux véhicules déjà assujettis à la taxe à l'essieu. Elle se traduira par une augmentation du produit de cette taxe de 325 millions de francs. Toutefois, l'Etat devra verser 381 millions de francs aux départements au titre de la compensation par anticipation de la perte de vignette pour ces derniers (cf. supra). La première année d'application devrait en conséquence se traduire par une perte de 56 millions de francs pour l'Etat (325 - 381 = - 56 MF), par rapport au rendement actuel de la taxe (soit 464-56 = 408 MF)..

En revanche, en 2000, l'extension du champ d'application de la taxe à l'essieu aux véhicules de 12 à 16 tonnes aura pour effet de soumettre 140.000 véhicules supplémentaires à cette taxe. L'Etat en escompte un gain budgétaire de 619 millions de francs. Le produit total devrait donc excéder 1 milliard de francs .

B. SUPPRESSION DU DROIT DE TIMBRE DES CONTRATS DE TRANSPORT

En contrepartie de l'accroissement du poids de la taxe à l'essieu résultant, pour la plupart des véhicules, de la réforme de la grille tarifaire, le présent article prévoit de supprimer le droit de timbre des contrats de transport.

Les droits de timbre s'entendent d'un ensemble d'impôts ou taxes qui, à l'origine, présentaient des caractéristiques communes d'être perçus au moyen de timbres constatant le paiement de l'impôt.

Le droit de timbre des contrats de transport est dû à raison des transports routiers, ferroviaires et aériens.

L'article 925 du CGI fixe ainsi à 4 francs le droit de timbre applicable aux lettres de voiture et à tous autres écrits ou pièces en tenant lieu, y compris le droit de la décharge donnée par le destinataire, et quelle que soit la dimension du papier employé.

De même, les contrats de transport de marchandises par air constatés par une lettre de voiture ou un récépissé, les bulletins de bagage délivrés aux voyageurs par les administrations des voies ferrées, les transports routiers de marchandises, les transports de colis postaux, les envois contre remboursement et transports de monnaies font l'objet d'un droit de timbre de 4 francs.

En revanche, les transports de colis agricoles et de colis de journaux d'un poids inférieur à 50 kilos en sont exemptés. Les entreprises de transports routiers dotées de moyens informatiques de transmission de données peuvent également, sous certaines conditions et sur demande adressée à la direction régionale de l'équipement, être dispensées d'avoir à bord des véhicules les récépissés timbrés ou les bordereaux de groupage.

Le dispositif actuel est très complexe du fait du nombre de régimes spéciaux, des exonérations, du caractère obsolète de plusieurs dispositions lié, notamment, à la modification de la réglementation des transports (suppression des zones de camionnage, de la notion de zone courte de rattachement, modification de l'étendue des zones courtes, abrogation des services réguliers) et des conditions d'exercice de la profession de transporteur (dématérialisation des documents, contrats d'abonnement). Il est source d'évasion fiscale .

En conséquence, par la simple phrase " Les articles 925 à 943 du code général des impôts sont abrogés à compter du 1 er décembre 1999 ", le présent article met fin au mécanisme du droit de timbre et supprime par la même occasion 18 article du CGI et 33 articles de l'annexe II de ce même code.

Cela représente une perte de ressources de 600 millions de francs pour l'Etat à partir de 2000. 40.000 entreprises sont concernées.

III - APPRÉCIATION DE VOTRE COMMISSION

A. UNE EXTENSION BIENVENUE DU CHAMP D'APPLICATION DE LA TAXE À L'ESSIEU


La réforme aura pour principale conséquence d'assujettir à la taxe à l'essieu :

- les véhicules et ensembles de véhicules dont le PTAC est inférieur à la limite de tonnage minimum de la catégorie à laquelle ils se rattachent (camion 3 essieux, de 25 tonnes de PTAC), ou dont le PTRA est supérieur à la limite de tonnage maximum de la catégorie à laquelle ils se rattachent (ensemble composé d'une semi-remorque à deux essieux attelée à un tracteur à deux essieux, de 38 tonnes de PTRA).

Il était en effet pour le moins injustifié que les véhicules de 12 à 16 tonnes soient assujettis à la vignette plutôt qu'à la taxe à l'essieu.

S'agissant du dernier cas de figure, les cas ne sont pas rares dans la mesure où le décret n° 92-495 du 5 juin 1992 a autorisé la mise en circulation de véhicules dont le poids total roulant peut aller jusqu'à 40 tonnes si l'ensemble considéré comporte plus de quatre essieux. Cette norme, qui excède de 2 tonnes le plafond de la dernière tranche de taxation à la taxe à l'essieu, s'étant désormais imposée, ce sont autant de véhicules qui échappaient jusqu'à présent à la taxe à l'essieu.

- les véhicules qui n'entraient jusqu'à présent dans aucune des catégories d'imposition prévues par la loi : tel est le cas, par exemple, des ensembles articulés composés d'un tracteur à trois essieux et d'une semi-remorque à deux essieux, quel que soit le PTAC de ces ensembles.

La suppression des réductions a par ailleurs pour conséquence de ramener le nombre de taux de la taxe à l'essieu de 1.008 à 124 . Les 31 taux de la grille deviennent en effet 62 si on leur applique la réduction de 75 % en faveur des systèmes mixtes rail-route et 124 dans la mesure où la faculté de pratiquer un tarif journalier demeure.

B. LE POIDS DE LA TAXE À L'ESSIEU DEVRAIT S'ACCROÎTRE POUR LA MAJORITÉ DES VÉHICULES

Votre rapporteur tient à souligner que la taxe à l'essieu n'avait pas été revalorisée depuis 1974. En conséquence, certains tarifs pouvaient sembler relativement dérisoires . Ainsi, les ensembles composés d'une semi-remorque à un essieu attelée à un tracteur à deux essieux dont le PTAC est compris entre 25 et 25,5 tonnes, étaient assujettis à une taxe trimestrielle de 50 francs, soit une taxe annuelle de 200 francs. Avec les réductions diverses pour circulation à l'intérieur de la zone de camionnage ou en cas d'utilisation de systèmes mixtes rail-route, les véhicules de cette catégorie pouvaient ramener leur taxe à 12,50 francs par trimestre !

La réforme de la grille indiciaire prévue par le présent article devrait en conséquence se traduire par une augmentation parfois forte du poids de la taxe à l'essieu pour les véhicules déjà assujettis à cette taxe .

Quelques exemples donnent un aperçu de la variation du poids de la taxe pour certains contribuables :

Ainsi, un véhicule automobile à trois essieux, utilisé pour compte propre dans la zone de camionnage et appartenant à l'entreprise utilisatrice n'acquittait jusqu'à présent que 45 francs de taxe à l'essieu par trimestre, soit 180 francs par an. Il devra désormais acquitter une taxe de 450 francs ou 650 francs par trimestre (soit 1.800 F ou 2.600 F par an) selon son type de suspension, ce qui représente un montant 10 ou 14 fois supérieur au tarif antérieur .

De même, un véhicule automobile à deux essieux d'un PTAC de 18,5 tonnes, utilisé pour compte propre dans la zone de camionnage et appartenant à l'entreprise utilisatrice verra sa taxe à l'essieu multipliée par 2,4 ou 3,6 : elle devrait en effet passer de 250 francs par trimestre à 600 ou 900 francs par trimestre.

Enfin, un ensemble composé d'un tracteur à deux essieux et d'une semi-remorque à deux essieux d'un PTAC de 38 tonnes, utilisé pour compte propre dans la zone courte et appartenant à l'entreprise utilisatrice verra sa taxe passer de 520 francs par trimestre à 950 francs (+ 82 %) ou 1.270 francs (+ 144%) par trimestre.

En revanche, un véhicule automobile à deux essieux d'un PTAC de 18,5 tonnes, utilisé pour compte propre dans la zone longue et appartenant à l'entreprise utilisatrice verra sa taxe passer de 1.000 francs à 600 ou 900 francs par trimestre .

De même, un ensemble composé d'un tracteur à deux essieux et d'une semi-remorque à deux essieux d'un PTAC de 38 tonnes, utilisé pour compte d'autrui dans la zone longue verra sa taxe diminuée de 350 ou 50 francs par trimestre selon le type de suspension.

En revanche, au regard du tarif moyen de la vignette correspondant aux véhicules de cette catégorie (puissance fiscale supérieure à 12 chevaux) les véhicules de 12 à 16 tonnes devraient être plutôt gagnants . En effet, leurs propriétaires devront acquitter une taxe à l'essieu annuelle comprise entre 1.800 francs et 2.600 francs selon le type de suspension équipant le véhicule, à la place d'une vignette dont les tarifs s'échelonnaient entre 1.440 francs et 4.540 francs par an selon la puissance fiscale du véhicule 75( * ) et le département d'immatriculation pour les véhicules de moins de cinq ans.

C. LES VÉHICULES DE 12 À 16 TONNES NE BÉNÉFICIERONT PAS DU DÉGRÈVEMENT DE TAXE PROFESSIONNELLE ACCORDÉ AUX VÉHICULES DE PLUS DE 16 TONNES PAR LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 1997

L'article 18 de la loi de finances rectificative pour 1997 du 31 décembre 1997 a accordé un dégrèvement de taxe professionnelle de 800 francs aux entreprises utilisant des véhicules routiers de plus de 16 tonnes . Le seuil de 16 tonnes correspondait au plancher retenu à l'époque et jusqu'à présent pour l'assujettissement à la taxe à l'essieu. Le dispositif était en conséquence cohérent avec la législation fiscale de l'époque.

Votre commission des finances s'était cependant demandée si une telle restriction du champ d'application du dégrèvement, qui semblait motivée par des considérations strictement budgétaires, n'était pas de nature à créer une distorsion de concurrence, aux dépens des poids lourds de moins de 16 tonnes. Elle ignorait alors que le gouvernement s'apprêtait à transposer la directive 93/89/CEE du 25 octobre 1993 afin d'étendre la taxe à l'essieu aux véhicules de moins de 16 tonnes et de plus de 12 tonnes.

Sa crainte s'avère donc aujourd'hui fondée puisque bien qu'étant désormais astreints aux mêmes obligations fiscales que les véhicules de plus de 16 tonnes au titre de la taxe à l'essieu, les véhicules de 12 à 16 tonnes sont exclus du bénéfice de l'allégement de la taxe professionnelle, sans raison particulière autre que leur moindre tonnage.

Votre rapporteur regrette donc que le gouvernement ait omis de lui faire part en décembre 1997 du contexte communautaire au regard duquel il aurait pu apprécier la mesure d'allégement de la taxe professionnelle des routiers soumise au Parlement.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article sans modification.

ARTICLE 51 (nouveau)

Régime fiscal transitoire concernant l'imposition des activités accessoires des exploitants agricoles soumis à un régime réel ou au régime transitoire

Commentaire : le présent article propose l'instauration d'un régime transitoire pour l'imposition des activités accessoires des exploitants agricoles soumis à un régime réel ou au régime transitoire, afin d'éviter des impositions imprévues.

I - LE DISPOSITIF ACTUEL


L'article 75 du code général des impôts (CGI) tel que modifié par la loi de finances rectificative pour 1997 76( * ) dispose que " les produits des activités accessoires relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et de celle des bénéfices non commerciaux réalisés par un exploitant agricole soumis à un régime réel ou au régime transitoire d'imposition peuvent être pris en compte pour la détermination du bénéfice agricole lorsque, au titre de l'année civile précédant la date d'ouverture de l'exercice , les recettes accessoires commerciales et non commerciales n'excèdent ni 30 % des recettes tirées de l'activité agricole, ni 200.000 F. "

Dans une précédente rédaction, l'article 75 prévoyait la prise en compte des recettes réalisées au cours de l'exercice faisant l'objet de l'imposition.

La modification de l'article 75 du CGI par la loi de finances rectificative pour 1997 a eu pour objet de permettre aux exploitants agricoles pluriactifs de connaître, dès le début d'un exercice, le régime fiscal auquel seront soumises les recettes, commerciales et non-commerciales, procurées par leurs activités accessoires. En effet, la possibilité de rattachement des recettes accessoires au bénéfice agricole est désormais déterminée en se référant aux recettes accessoires et aux recettes tirées de l'activité agricole au cours de l'année civile précédant la date d'ouverture de l'exercice et non plus à celles réalisées au cours de l'exercice faisant l'objet de l'imposition .

II - LE DISPOSITIF PROPOSE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Les nouvelles dispositions de l'article 75 du CGI issues de la loi de finances rectificative pour 1997 doivent s'appliquer pour la détermination des résultats des exercices clos à compter du 1 er janvier 1998.

Or cette situation peut poser problème dans le cas où le rattachement des recettes accessoires au bénéfice agricole (solution globalement plus favorable à l'exploitant que le non-rattachement) serait impossible au motif que les seuils auraient été dépassés au cours de l'année civile précédant la date d'ouverture de l'exercice alors même qu'ils ne le seraient pas au cours de l'exercice soumis à l'imposition. Le fait que ce nouveau dispositif fiscal concerne des exercices commencés avant que la nouvelle disposition ne soit connue motive donc l'instauration d'une période de transition.

Le présent article propose de laisser à l'exploitant le choix entre les deux dernières versions de l'article 75 du CGI, c'est-à-dire la prise en compte des recettes correspondant :

- soit à l'exercice faisant l'objet de l'imposition (il s'agit des " dispositions antérieures de l'article 75 du CGI "),

- soit à l'année civile précédant la date d'ouverture de l'exercice (ce qui correspond à la nouvelle rédaction de l'article 75 issue de l'article 16 de la loi de finances rectificative pour 1997).

Cette période transitoire concernerait l'imposition des résultats des deux premiers exercices clos à compter du 1 er janvier 1998. A l'issue de cette période transitoire, le dispositif prévu par l'article 75 du CGI s'appliquerait sans option possible.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 52 (nouveau)

Harmonisation du code général des impôts corrélative à la loi du 7 mars 1998 relative au fonctionnement des conseils régionaux

Commentaire : le présent article a pour objet de tirer les conséquences au sein du code général des impôts des modifications apportées aux dates limites d'adoption des budgets des conseils régionaux opérées par la loi n° 98-135 du 7 mars 1998 relative au fonctionnement des conseils régionaux.

Résultant d'un amendement déposé par M. René Dosière, cet article prévoit, en ce qui concerne les dates limite fixées pour la notification aux services fiscaux des décisions relatives aux impositions directes perçues par les collectivités locales, de transposer dans le code général des impôts les modifications apportées dans le code général des collectivités territoriales par la récente loi relative au fonctionnement des conseils régionaux.

I. LA RÉPARATION D'UN OUBLI

De l'aveu même de M. René Dosière, rapporteur, au nom commission des lois de l'Assemblée nationale, du projet de loi relatif au fonctionnement des conseils régionaux, le présent article a pour objet de réparer un " oubli " 77( * ) .

En effet, cette loi, qui apporte des modifications au calendrier d'adoption des budgets des conseils régionaux, n'a pas prévu d'adapter en conséquence les dates correspondantes au sein du code général des impôts.

A cet égard, il convient de distinguer, d'une part , les modifications correspondant à l'adoption du budget régional dans les conditions de droit commun l'année de renouvellement des conseils régionaux et, d'autre part , celles qui correspondent à la mise en oeuvre de la procédure d'adoption sans vote de ce budget qu'institue la loi relative au fonctionnement des conseils régionaux 78( * ) .

A. LES MODIFICATIONS DANS LE CADRE D'UNE PROCÉDURE D'ADOPTION DE DROIT COMMUN DU BUDGET RÉGIONAL

La première modification du code général des collectivités territoriales que le présent article se propose de transposer au sein de l'article 1639 A. du code général des impôts, concerne en effet le report au 30 avril de l'année de renouvellement de la date limite d'adoption du budget régional, à la place du 15 avril comme précédemment et comme c'est la règle pour les autres collectivités locales.

En conséquence, il est proposé de modifier la rédaction de l'article 1639 A. du code général des impôts, qui, en ce qui concerne le report de la date de notification des décisions relatives aux taux des impôts directs perçus la collectivité, distingue désormais le cas des conseils municipaux ou généraux, qui reste fixée au 15 avril l'année de renouvellement, et celui des conseils régionaux, dont la date limite pour la notification des taux est portée au 30 avril.

B. LES MODIFICATIONS DANS LE CADRE D'UNE PROCÉDURE D'ADOPTION SANS VOTE DU BUDGET RÉGIONAL


La seconde modification du code général des collectivités territoriales que le présent article se propose de transposer au sein de l'article 1639 A. du code général des impôts correspond au cas où la procédure d'adoption sans vote du budget régional est engagée .

A cette fin, il est proposé de compléter la rédaction de l'article 1639 A. du code général des impôts par un paragraphe spécifique qui prévoit des dates limite spécifiques correspondant d'une part à l'engagement de cette procédure à l'occasion d'une année " normale " et, d'autre part, à l'occasion d'une année de renouvellement des conseils régionaux.

Dans les deux cas, l'engagement de cette procédure implique un délai supplémentaire d'un mois , correspondant aux délais maximaux qui sont associés aux différentes étapes de celle-ci, ce qui porte le date limite pour la notification des décisions relatives aux taux des impôts locaux respectivement au 30 avril et au 31 mai l'année de renouvellement des conseils régionaux .

Le recours à la procédure du " 49-3 régional " qui implique en effet un délai supplémentaire total maximum d'un mois pour l'adoption du budget régional qui résulte de l'addition des différentes étapes de cette procédure :

1. il existe tout d'abord un délai de 10 jours, en cas de non adoption du budget avant la date limite de vote du 20 mars (le 30 avril, l'année de renouvellement) ou celle du vote de rejet de ce budget, si celui-ci est antérieur, pour la présentation par le président du conseil régional d'un nouveau projet ;

2. puis il y a un délai de 5 jours supplémentaires, à compter de la présentation par le président du conseil régional d'un nouveau projet, pour la présentation éventuelle d'un contre-projet de budget présenté en annexe d'une motion de renvoi présentée et adoptée par une majorité absolue des membres du conseil régional ;

3. ensuite il faut prévoir 7 jours supplémentaires pour recueillir l'avis du conseil économique et social régional sur ce contre-projet de budget ;

4. et enfin, 7 jours maximum , doivent en outre être prévus, à compter de cet avis, pour l'intervention du vote sur la motion comportant ce contre-projet en annexe.

II. LES INCERTITUDES SUR LA PORTÉE DE LA PROCÉDURE D'ADOPTION SANS VOTE D'UN BUDGET RÉGIONAL

L'objet du présent article est donc de veiller à ce qu'il existe une cohérence chronologique entre les dates limite d'adoption des budgets régionaux résultant des modifications apportées par la loi du 7 mars 1998 au code général des collectivités territoriales et celles concernant les dates limite de notification des décisions relatives aux taux des impôts locaux prévues par le code général des impôts, la notification de ces délibérations dans ces délais constituant un élément de la régularité juridique du taux des impôts locaux. De façon générale, la jurisprudence administrative relative au contentieux des impôts directs locaux considère en effet qu'une délibération fixant les taux peut voir sa légalité mise en cause au regard des règles de la périodicité des réunions, de la convocation aux séances, du quorum pour délibérer, ou encore des formalités de publicité et de transmission .

L'analyse du présent article soulève cependant des interrogations quant à la régularité juridique des délibérations fiscales d'un conseil régional dans le cas d'un recours à la procédure d'adoption sans vote de son budget. Dans le cas, en effet, où le recours à cette procédure n'aurait pas été précédé par une délibération en bonne et due forme du taux des impôts directs locaux, la question se posera de savoir si l'adoption sans vote du budget régional emporte l'adoption régulière de cette décision fiscale.

Il ressort en effet clairement des travaux préparatoires de la loi du 7 mars 1998, et le présent article en constitue en quelque sorte la preuve, que le législateur, en instituant des modalités dérogatoires d'adoption du budget régional, n'a pas de ce fait même, explicitement autorisé une adoption sans vote des taux des impôts directs locaux et, a fortiori , celle des décisions relatives à la création des taxes locales en général, à leur assiette ou aux exonérations temporaires qui doivent être prises avant le 1 er juillet.

L'analyse de la jurisprudence administrative met cependant en évidence que le budget primitif et les taux des impôts directs locaux forment un ensemble indivisible qui procède du principe de l'annualité budgétaire applicable aux budgets locaux . Il apparaît en effet que la finalité du vote des taux des impôts directs locaux est de garantir l'équilibre réel du budget. Dans ce sens, la jurisprudence administrative, considère que l'illégalité de la délibération ayant adopté le budget primitif, quelle qu'en soit la cause, prive de base légale les taux des impôts directs locaux.

Dans le cas d'une éventuelle contestation de la régularité juridique des délibérations relatives aux taux des impôts directs locaux dans le cadre d'une procédure d'adoption sans vote du budget régional, il appartiendra au juge administratif de déterminer la portée de la règle de l'indivisibilité du budget et des taux. A cet égard, il faut indiquer que le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 98-397 DC du 6 mars 1998 sur la loi du 7 mars 1998 relative au fonctionnement des conseils régionaux a jugé que " Considérant en deuxième lieu, que l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, aux termes duquel " Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée ", n'implique pas de règles particulières d'adoption, par l'organe délibérant, des dispositions financières et fiscales . "

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter le présent article sans modification.

ARTICLE 53 (nouveau)

Dispositif de sortie des prorogations du délai accordé pour construire
les terrains à bâtir avant le 31 décembre 1993

Commentaire : le présent article tend à inciter les professionnels de l'immobilier ayant acheté des terrains à bâtir exonérés de droits d'enregistrement mais n'ayant pas construit à respecter leurs engagements. En effet, alors que le code général des impôts prévoit dans ce cas le paiement des droits d'enregistrement et un droit supplémentaire de 6 %, cet article réduit les impositions supplémentaires de 25 à 75 % en fonction de la rapidité d'exécution des travaux par le professionnel après l'expiration du délai limite initial.

I - LE DISPOSITIF INITIAL


L'article 682 du code général des impôts fixe les dispositions générales relatives aux mutations à titre onéreux d'immeubles ou de droits immobiliers qui sont soumis au droit d'enregistrement.

Toutefois, l'article 691-II du même code prévoit que les acquisitions de terrains à bâtir qui sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée bénéficient d'un exonération de droits de mutation dès lors que l'acquéreur a pris dans l'acte d'achat l'engagement de construire dans un délai de quatre ans.

Ce délai peut être prorogé sans aucune formalité dans les conditions suivantes :

- pour les marchands de biens et lotisseurs, il est admis que ce délai de quatre ans soit prorogé automatiquement d'un an, même si à l'expiration de ce délai les travaux de construction ne sont pas encore commencés ;

- pour les acquéreurs, il est admis que ce délai de quatre ans soit prorogé systématiquement d'un an, dès lors que les travaux de construction ont été entrepris avant l'expiration dudit délai de quatre ans.

En outre, des prorogations annuelles peuvent être accordées. Ainsi, l'article 691-IV du code général des impôts dispose que " une prolongation annuelle renouvelable du délai de quatre ans [...] peut être accordée par le directeur des services fiscaux du lieu de la situation des immeubles dans des conditions fixées par décret, notamment en cas de force majeure ou lorsqu'il s'agit de la construction d'ensembles à réaliser par tranches successives . "

Par ailleurs, le III de l'article 266 bis de l'annexe III du code général des impôts dispose que " le directeur des impôts du lieu de la situation des immeubles est autorisé à proroger le délai de quatre ans prévu à l'article 691 du code général des impôts. La demande de prorogation doit être formulée au plus tard dans le mois qui suit l'expiration du délai précédemment imparti.

Lorsqu'il s'agit de la construction d'ensembles à réaliser progressivement par tranches successives, cette prorogation est accordée après avis du directeur des services départementaux du ministère de l'équipement.

Dans les autres cas, la demande de prorogation doit être motivée et énoncer le délai supplémentaire normalement nécessaire à la bonne fin des travaux entrepris. la durée de prorogation est d'un an. Elle peut être renouvelée dans les mêmes conditions.
"

Si l'acquéreur ne peut pas justifier, à l'expiration du délai de quatre ans, le cas échéant, prorogé d'un an, de l'exécution des travaux, l'article 1840 G ter du code général des impôts dispose que " l'acquéreur est tenu d'acquitter, à première réquisition, l'imposition dont il avait été exonéré et en outre, un droit supplémentaire de 6 %. " Il est en outre tenu de payer l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts.

Toutefois, ces règles ont été adoucies par deux instructions (A-3-94 et A-1-96) prises en 1994 et 1996 pour tenir compte de l'effondrement des prix de l 'immobilier. En effet, les professionnels qui avaient acheté en 1989 des terrains à bâtir à des prix très élevés se trouvaient dans l'incapacité de respecter leurs engagements sous peine de construire à perte, le prix des immeubles ayant chuté fortement.

C'est pourquoi l'instruction A-3-94 proposait de proroger automatiquement de deux ans, et au plus tard jusqu'au 31 décembre 1996, le délai accordé pour construire pour les terrains à bâtir et biens assimilés à ces terrains par l'article 691-1 du code général des impôts acquis avant le 1 er janvier 1993 par un professionnel, que celui-ci ait ou non commencé les travaux d'exécution.

L'instruction A-1-96 a de nouveau prorogé jusqu'au 31 décembre 1998 le délai pour construire pour les terrains à bâtir et biens assimilés acquis en 1989, 1990, 1991 et 1992 par un professionnel.

A l'expiration du délai prorogé, le défaut de respect de l'engagement de construire devait entraîner pour l'acquéreur du terrain le paiement des droits de mutation dont il avait été exonéré ainsi que du droit supplémentaire de 6 % et de l'intérêt de retard.

Or, à ce jour, la plupart des professionnels ayant bénéficié des deux prorogations successives n'ont toujours pas débuté la construction des immeubles prévus initialement. Le présent article tente donc de faciliter la résorption du stock de terrains à bâtir.

II - LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose de modifier l'article 1840 G ter du code général des impôts pour graduer l'obligation pour les professionnels, en cas de non respect de leurs engagements, de payer les droits d'enregistrement dont ils ont été exonérés ainsi qu'un droit supplémentaire de 6 % et les intérêts de retard.

Le premier et le deuxième alinéa sont transformés respectivement en I et III. De plus, un II est inséré, qui prévoit que les professionnels n'ayant pas construit au 31 décembre 1998 et devant, en conséquence, acquitter les droits d'enregistrement dont ils ont été exonérés, un droit supplémentaire de 6 % et les intérêts de retard verront le montant de ces impositions diminuer s'ils peuvent justifier l'exécution des travaux et de la destination des locaux achevés ou construits au-delà du 30 décembre 1998. La réduction du montant de l'imposition varie en fonction de la date à laquelle les acquéreurs présentent les justifications. Ces réductions s'élèvent respectivement à 75 %, 50 % et 25 % de la somme totale des impositions lorsque les justifications sont produites au plus tard au 31 décembre 2000, 2002 et 2004.

Le but de cette mesure est de mettre fin à la pratique des prorogations en incitant les acquéreurs à construire. En effet, jusqu'à présent, les professionnels ont pu échapper au paiement des droits d'enregistrement par les prorogations successives. Le système proposé réduit le montant des impositions si les constructions sont effectuées. En contrepartie, les prorogations demandées par les acquéreurs auprès des directeurs des services fiscaux seront plus difficiles à obtenir.

Cette mesure devrait donc permettre de concilier les intérêts des professionnels, dont les projets de construction ont été compromis par la crise de l'immobilier et le respect par tous de la loi à travers les articles 691 et 1840 G ter du code général des impôts.

Décision de la commission : votre commission propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 54 (nouveau)

Création d'assistants spécialisés auprès d'une ou plusieurs
cours d'appel ou d'un ou plusieurs tribunaux

Commentaire : le présent article tend à autoriser des fonctionnaires du ministère de l'économie et des finances à exercer les fonctions d'assistant spécialisé auprès d'une cour d'appel ou d'un tribunal de grande instance. Leur mission consisterait à assister, dans le déroulement de la procédure, les magistrats sous la direction desquels ils seraient placés pour l'instruction de dossiers à connotation financière.

I - LE DISPOSITIF ACTUEL


La formation des magistrats à l'Ecole nationale de la magistrature reste très généraliste. Or, l'instruction des affaires financières exige une spécialisation renforcée des magistrats dans les domaines financiers, fiscaux, douaniers et de la comptabilité publique...

En outre, la justice pénale tend à être de plus en plus saisie pour des affaires économiques et financières. Selon la Chancellerie, ce flux d'affaires répond à une double tendance. D'une part, on observe un nombre de saisine plus important de la part des corps de contrôle (chambres régionales des comptes, commission bancaire, direction des services fiscaux). D'autre part, un plus grand sentiment d'égalité devant la loi conduit à reconnaître que les délits financiers et économiques doivent être jugés et condamnés au même titre que les autres délits.

Devant la multiplication de ces affaires et leur degré croissant de technicité, la justice manque de juges qualifiés. En conséquence, le stock des affaires financières tend à augmenter et les délais d'instruction s'allongent.

Certaines améliorations ont été apportées, mais elles sont insuffisantes pour rendre le dispositif actuel réellement efficace. Ainsi, l'Ecole nationale de la magistrature a, dans le cadre de la formation continue, organisé en 1997 une session de formation sur les marchés publics. De même, dans certains tribunaux, les services ont été réorganisés pour permettre la création d'une section économique et financière. Les améliorations se heurtent toutefois à des limites. Ainsi, le juge d'instruction peut avoir recours à un expert, mais leur collaboration vise un point très précis de l'enquête et est limitée dans le temps. Par ailleurs, les magistrats ne peuvent faire appel à un conseiller technique extérieur sans risquer de provoquer un vice de procédure.

A moyen terme, l'Ecole nationale de la magistrature ne pourra pas faire l'économie d'une réflexion sur la formation initiale des futurs juges pour développer leurs connaissances en matière fiscale, comptable et douanière. mais une telle réforme nécessite une concertation entre tous les partenaires concernés et ne pourra être mise en place que progressivement. En attendant, il apparaît urgent d'introduire une mesure permettant de renforcer les moyens de la justice pour traiter de manière efficace les affaires financières. C'est l'objet du présent article qui propose d'autoriser la création d'assistants spécialisés qui assisteraient le juge dans l'instruction de ce genre d'affaire.

II - LE DISPOSITIF PROPOSE

Il est ainsi rétabli un article 706 du code de procédure pénale qui autorise des fonctionnaires de catégorie A ou B ainsi que les personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation économique, financière, juridique ou sociale d'une durée au moins égale à quatre années d'études supérieure après le baccalauréat, qui remplissent les conditions d'accès à la fonction publique et justifient d'une expérience professionnelle minimale de quatre années, à exercer les fonctions d'assistant spécialisé auprès d'une ou plusieurs cours d'appel ou d'un ou de plusieurs tribunaux de grande instance.

Concrètement, les personnes visées susceptibles de remplir ces fonctions sont des inspecteurs et des contrôleurs des impôts, du Trésor, de la Concurrence et de la Répression des fraudes, des Douanes ainsi que des agents de la Comptabilité publique. En effet, les assistants spécialisés seront amenés à examiner des dossiers bien précis.

Selon la Chancellerie, trois sortes de contentieux les concernent principalement :

- les contentieux financiers qui mettent en jeu le droit pénal des sociétés commerciales ;

- les contentieux économiques liés au droit des marchés publics et aux gestions publiques ;

- les contentieux socio-économiques, qui visent par exemple le travail illégal ou encore la fraude communautaire.

Dans la mesure où ils auront à examiner des dossiers très techniques, doivent être recrutées des personnes ayant déjà une bonne connaissance de leurs domaines respectifs. Le présent article retient comme critère une expérience professionnelle minimale de quatre ans.

Les assistants spécialisés sont susceptibles d'exercer leurs missions auprès de toutes les cours d'appel et de tous les tribunaux de grande instance, non seulement de métropole et des départements d'outre-mer, mais également des territoires d'outre-mer et de la collectivité territoriale de Mayotte. En réalité, les assistants spécialisés seront essentiellement affectés dans les juridictions de Paris, d'Aix-Marseille et de Corse qui concentrent la quasi-totalité des affaires économiques et financières.

Le deuxième alinéa de l'article 706 précise les missions des assistants : ceux-ci assistent, dans le déroulement de la procédure, les magistrats sous la direction desquels ils sont placés, sans pouvoir procéder par eux-mêmes à aucun acte. Les assistants spécialisés n'ont donc pas un rôle d'experts. Leur compétence ne se limite pas à un point précis de l'affaire. En effet, ils sont chargés, lorsqu'un juge d'instruction reçoit le dossier, de l'étudier puis d'assister le magistrat dans l'orientation de l'enquête, notamment en le conseillant dans le choix de la décision à prendre.

Pour pouvoir réaliser correctement leur mission, le troisième alinéa de l'article 706 prévoit que les assistants spécialisés ont accès au dossier de la procédure. En contrepartie, ils sont soumis au secret professionnel au même titre que les avocats, les médecins, les ministres des cultes, les banquiers, les commissaires aux comptes, les experts-comptables, les jurés, les notaires et les policiers. L'atteinte au secret professionnel est punie, conformément à l'article 226-11 du code pénal, d'un an de prison et de 100.000 francs d'amende.

Pour autant, les assistants spécialisés ne sont pas des magistrats bis . Ils ne peuvent procéder à aucun acte et le magistrat continue de décider seul de la procédure à suivre, de l'orientation de l'enquête, du déroulement des auditions etc.

Les avantages attendus de ce nouveau dispositif sont nombreux puisque la justice sera en mesure de mieux traiter et de manière plus rapide les contentieux relatifs aux affaires économiques et financières. Aujourd'hui, les délais nécessaires pour mener certaines enquêtes relèvent presque du déni de justice. Grâce au renfort que représentent les assistants spécialisés, ces derniers devraient être raccourcis de manière notable.

En outre, la présence d'un spécialiste pour l'examen du dossier améliorera la qualité de l'enquête. En effet, par manque de temps et de compétence, les juges d'instruction saisis d'une affaire techniquement complexe se voient parfois obligés de se décharger de l'enquête sur la police judiciaire. L'intervention d'un assistant spécialisé permettra d'accompagner la commission rogatoire d'instructions précises (recherche de telle ou telle pièce par exemple). Le juge continuera donc de diriger l'enquête même si les recherches sont effectuées par la police judiciaire.

Votre rapporteur a conscience que la présence d'assistants spécialisés travaillant avec des magistrats va considérablement modifier les méthodes de travail. Alors que le juge enquêtait seul jusqu'à présent, il aura désormais à travailler en équipe. Toutefois, cette pluridisciplinarité ne peut que renforcer l'efficacité du juge puisqu'il connaîtra mieux et plus rapidement les aspects techniques des dossiers qu'il a à traiter.

Le troisième alinéa de l'article 706 dispose qu'" un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application du présent article, notamment la durée pour laquelle les assistants spécialisés sont nommés et les modalités selon lesquelles ils prêtent serment. " Selon les informations recueillies par votre rapporteur, la durée choisie devrait être de 3 ans.

Le présent article propose par ailleurs d'autoriser par décret en Conseil d'Etat les juges d'instruction à exercer leur activité dans une commune du ressort de leur tribunal autre que celle du siège de la juridiction.

Cette mesure constitue une entorse à la règle qui veut que les juges d'instruction exercent leur activité au siège du tribunal de grande instance auquel ils appartiennent. Elle constitue pourtant une mesure de sécurité  nécessaire pour les juges d'instruction qui enquêtent sur des sujets très sensibles. En effet, certains juges peuvent courir des dangers tels qu'une sécurité rapprochée peut être nécessaire. Or, celle-ci est parfois plus difficile à assurer dans la commune du siège de la juridiction. Pour limiter au maximum les risques, le juge serait alors autorisé à exercer son activité dans une autre commune dans laquelle sa sécurité sera mieux assurée.

Décision de la commission : votre commission propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 55 (nouveau)

Exonération de cotisations sociales pour les options de souscription ou d'achat d'actions déjà attribuées par les sociétés de moins de quinze ans

Commentaire : cet article, qui résulte d'un amendement du rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, tend à exonérer de cotisations sociales les gains réalisés sur des options de souscription ou d'achat d'actions attribuées avant le 1er janvier 1997 par les sociétés de moins de quinze ans.

I. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION SUR LES OPTIONS D'ACHAT OU DE SOUSCRIPTION D'ACTIONS


Votre commission des finances a engagé dès 1995 une réflexion sur les plans d'options de souscription ou d'achat d'actions, qui s'est traduite par un rapport d'information fait par MM. Arthuis, Loridant et Marini, intitulé "Plans d'options sur actions : une clarification indispensable" (n° 274, 1994-1995).

Ce rapport d'information rappelait les deux principaux arguments en faveur du mécanisme des options sur actions, qui demeurent pertinents aujourd'hui plus que jamais:

- il s'agit d'un instrument particulièrement efficace de fidélisation et de motivation des cadres d'une société, pour qui les systèmes classiques d'intéressement et de participation ne sont pas suffisamment incitatifs ;

- il s'agit d'un instrument taillé sur mesure pour les sociétés qui se créent ou innovent, dont le succès repose tout entier sur la motivation de leur personnel et qui recèlent un potentiel de valorisation considérable tout en ne pouvant pas offrir dans l'immédiat des rémunérations consistantes.

Toutefois, le rapport d'information relevait certaines dérives bien réelles du mécanisme des options sur actions. En effet, au-delà de certaines pratiques frauduleuses marginales - abus de droit et délits d'initiés - il existe une tendance plus générale des sociétés à utiliser les options comme des substituts de rémunération, souvent en neutralisant le risque qui leur est inhérent.

Votre commission des finances, considérant que cette évolution est surtout une réaction à la pression fiscale et sociale croissante en France sur les salaires, appelait de ses voeux une diminution du taux global d'imposition des rémunérations d'activité.

Elle ne préconisait pas un durcissement du régime fiscal et social des plans d'options sur actions, mais une plus grande transparence dans leurs modalités de fonctionnement pour mettre un terme aux abus. Il s'agissait notamment de prévenir les délits d'initiés et d'améliorer l'information des actionnaires afin d'obtenir une autorégulation du système.

Votre commission des finances a toutefois admis la création d'un taux de prélèvement libératoire majoré de 30%, par l'article 70 de la loi de finances pour 1996, considérant que ce taux spécifique prenait convenablement en compte la nature mixte des gains sur options, qui sont à la fois des plus-values sur valeurs mobilières et des substituts de rémunérations.

Votre commission des finances a par ailleurs soutenu l'article 10 introduit à l'initiative de M. Philippe Marini dans le DDOEF du printemps 1996, tendant à améliorer la transparence des plans d'options sur actions.

En revanche, votre commission des finances n'a pas eu à connaître de l'article 11 introduit par le Sénat dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997, à l'initiative de sa commission des affaires sociales, tendant à assujettir aux cotisations sociales les gains sur options réalisés avant le terme du délai d'indisponibilité fiscal de cinq ans.

Elle s'est simplement contenté de corriger, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 1996, une imperfection matérielle du dispositif voté en loi de financement de la sécurité sociale, qui aurait eu pour effet involontaire d'exonérer de CSG et de CRDS les gains sur options réalisés au delà du délai de cinq ans.

Enfin, en proposant de créer, dans le cadre de la loi de finances pour 1998, un mécanisme de "bons de souscription de parts de créateur d'entreprise" exonéré de cotisations sociales et relevant du prélèvement libératoire au taux de droit commun de 16%, le Gouvernement actuel a implicitement reconnu que le durcissement récent du régime fiscal et social des options de souscription ou d'achat d'actions n'était pas justifié et avait des effets néfastes sur le dynamisme des entreprises françaises.

Pour sa part, votre commission des finances a considéré que la mesure proposée par le Gouvernement était inutilement complexe, avec un champ restreint et une multiplicité de conditions qui en restreignent la portée, induisent des effets de seuil et risquent de générer des contentieux. En effet, les "bons de souscription de parts de créateur d'entreprise" sont réservés aux sociétés non cotées créées depuis moins de sept ans, en dehors de certains secteurs d'activité, détenues directement de manière continue à plus de 75% par des personnes physiques, et correspondant à des activités entièrement nouvelles.

Tout en cherchant à améliorer les "bons de souscriptions de parts de créateur d'entreprise", votre commission des finances a proposé au Sénat de supprimer le taux d'imposition majoré de 30% pour les gains sur options de souscription ou d'achat d'actions, considérant que l'aggravation récente des prélèvements sociaux sur ces gains (cotisations sociales, CSG et CRDS) devait être compensée fiscalement. Cette mesure, votée par le Sénat en première lecture du projet de loi de finances pour 1998, n'a toutefois pas passé le cap de la seconde lecture à l'Assemblée nationale.



II. LA RECTIFICATION PROPOSÉE PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Lors de la discussion de la première loi de financement de la sécurité sociale à l'automne 1996, le Sénat a décidé, à l'initiative de sa commission des affaires sociales, de soumettre aux cotisations sociales les gains réalisés sur options de souscription ou d'achat d'actions, lorsque le délai d'indisponibilité fiscal de cinq ans n'est pas respecté.

Cette décision pose des problèmes de deux ordres :

1. Sur le plan des principes, elle assimile les gains sur options à des rémunérations ordinaires, alors qu'il s'agit de plus-values aléatoires, différées dans le temps, et qui supposent un investissement personnel de la part de leurs bénéficiaires. Du point de vue des bénéficiaires, il est désormais moins intéressant de bénéficier d'options de souscription ou d'achat d'actions plutôt que de salaires immédiats et certains.

Paradoxalement, les options d'achat ou de souscription d'actions sont ainsi la seule forme d'intéressement des salariés qui est soumise aux cotisations sociales. La CSG et la CRDS sont par ailleurs normalement dues, comme pour les autres instruments de participation.

2. Sur le plan pratique, le paiement des cotisations sociales est très délicat à gérer pour la société qui attribue les options. En effet, celle-ci choisit le moment où elle attribue l'option, mais elle ne décide ni du moment où le bénéficiaire lève l'option en achetant les titres, ni du moment où celui-ci revend les titres. Il lui est même difficile d'en être simplement informée. Les URSSAF et les services du Trésor ont dû mettre en place un circuit ad hoc de recoupement des informations, avec un retour vers l'entreprise concernée.

La société qui a attribué les options peut ainsi se trouver redevable de la part patronale des cotisations sociales plusieurs années après avoir attribué les options. Ce risque inhérent au simple fait de mettre en place un plan d'options sur actions doit être régulièrement provisionné, mais cette provision n'est pas fiscalement déductible.

Ceci explique que, depuis l'entrée en vigueur de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997, tous les plans d'options nouvellement mis en place sont assortis par les sociétés, sur une base contractuelle, d'une interdiction faite aux attributaires de céder leurs titres avant le terme du délai d'indisponibilité fiscal et social de cinq ans.

Ainsi, en pratique, l'assujettissement aux cotisations sociales des gains sur options réalisés avant cinq ans a eu pour effet d'aligner automatiquement sur ce délai l'ensemble des plans d'options. De ce fait, le rendement attendu de la mesure, soit 300 millions de francs destinés à l'époque à financer un assouplissement de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie, est en réalité proche de zéro.

Outre l'inconvénient de son rendement nul, la mesure votée en novembre 1996 souffre d'être "rétroactive", sinon au sens strictement juridique, du moins au sens économique du terme.

En effet, la nouvelle disposition assujettissant aux cotisations sociales les gains sur options s'applique au stock des options qui ont été attribuées antérieurement à son entrée en vigueur, c'est-à-dire dans des conditions d'exonération. Il y a donc bien un bouleversement de l'équilibre des plans d'options en cours, et un risque pour les entreprises de devoir payer a posteriori des cotisations sociales au titre d'options attribuées avant le 1er janvier 1997.

C'est pourquoi le présent article, qui résulte d'un amendement de la commission des finances de l'Assemblée nationale et qui a obtenu l'accord du Gouvernement, propose de revenir partiellement sur la "rétroactivité" de la mesure votée en 1996.

Il est ainsi proposé de rétablir, à compter du 1er avril 1998, l'exonération de cotisations sociales pour les options attribuées antérieurement au 1er janvier 1997 par les sociétés de moins de 15 ans.

Cet ajustement ne s'applique qu'à compter du 1er avril 1998, car il semble difficile de remonter jusqu'à la date d'entrée en vigueur de la disposition, sauf à rembourser les cotisations sociales qui ont été éventuellement déjà perçues.

III. L'EXTENSION PROPOSÉE PAR VOTRE COMMISSION

En revanche, la limitation aux entreprises de moins de 15 ans d'âge semble plus difficilement justifiable. D'après les débats de l'Assemblée nationale, cette limitation vise, d'une part, à " éviter que les grands groupes n'utilisent ce mécanisme " et, d'autre part, à " favoriser les PME et PMI innovantes, tournée vers les nouvelles technologies ".

Ces arguments soulèvent des objections de trois ordres différents.

1. En opportunité, la motivation du personnel résultant des options de souscription ou d'achat d'actions n'est pas moins utile dans les grands groupes que dans les petites entreprises, tandis que les difficultés résultant du caractère "rétroactif" de la mesure votée en 1996 n'y sont pas de nature différente.

2. En droit, le fait de distinguer selon l'âge de la société introduit une discrimination qui n'existait pas dans la mesure initiale d'assujettissement, et dont la constitutionnalité paraît douteuse. Elle provoque, en effet, une rupture au regard de l'égalité devant les charges publiques qui est par définition dépourvue de tout effet incitatif, puisqu'il s'agit d'options déjà attribuées, et ne peut être justifiée par un intérêt général.

3. En fait, le critère d'âge proposé n'apparaît pas pertinent. En effet, une entreprise récente n'est pas forcément une entreprise innovante, tandis qu'inversement, une entreprise centenaire peut être tout à fait innovante.

Par ailleurs, une société de création récente peut fort bien être une filiale d'une entreprise plus ancienne, et même de l'un des " grands groupes " que les députés cherchent à priver du bénéfice de la mesure. Inversement, une jeune société qui réussit peut être rachetée par un groupe déjà établi. Enfin, la situation devient inextricable en cas de fusions ou d'absorptions de sociétés, car les plans d'options existants qui peuvent être transférés portent alors sur les actions de la nouvelle entité issue de la restructuration.

C'est pourquoi votre commission des finances vous propose un amendement qui tend à étendre le bénéfice de la mesure à toutes les sociétés, indépendamment de leur âge. La "rétroactivité" de l'article 11 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 sera ainsi corrigée pour toutes les sociétés.

Il convient d'ailleurs de souligner que, lorsqu'un taux de prélèvement libératoire majoré de 30% a été créé pour les gains sur options par l'article 70 de la loi de finances pour 1996, ce nouveau taux ne s'est pas appliqué aux options déjà attribuées. Cette solution sage et équitable mérite d'être transposée en matière de cotisations sociales.

Votre commission des finances tient toutefois à souligner que son approbation de l'aménagement proposé de l'article 11 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997, sous réserve d'une extension à toutes les sociétés, ne vaut pas approbation de l'assujettissement aux cotisations sociales des gains sur options de souscription ou d'achat d'actions.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 55

Définition de périodes d'interdiction d'attribution d'options de souscription ou d'achat d'actions pour les sociétés cotées

Commentaire : cet article tend à définir, pour les sociétés cotées, certaines périodes sensibles durant lesquelles elles ne pourront pas attribuer d'options de souscription ou d'achat d'actions.

Par l'article additionnel qu'elle vous propose, votre commission des finances souhaite confirmer sa volonté d'apporter plus de rigueur et de transparence au mécanisme des options sur actions. En effet, il s'agit là d'une condition du retour à un régime fiscal et social plus favorable pour cette forme d'intéressement et de participation.

Dans le cadre de la loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier du printemps 1996, à l'initiative de M. Philippe Marini, le Sénat avait introduit un article 10 qui précisait le système des options sur deux points.

1. D'une part, cet article prévoit ce qu'il est convenu d'appeler une "consolidation de l'information" sur les plans d'options. En clair, lorsqu'un plan d'options sur actions est mis en place dans la filiale d'un groupe, il faut désormais en informer le conseil d'administration de la société mère, et non pas seulement celle de la filiale concernée. Cette mesure est d'application directe et ne pose pas de problème.

2. D'autre part, cet article prévoit que les options ne peuvent être attribuées durant une période précédant et suivant l'arrêté et la publication des comptes sociaux, ainsi que tout événement de nature à affecter significativement la situation et les perspectives de la société. Il s'agit d'empêcher que les options soient attribuées à un prix artificiellement bas, parce que n'intégrant pas toute l'information relative à la société. Ces périodes durant lesquelles il est interdit d'attribuer des options, ou "fenêtres négatives", devaient être fixées par décret.

Or, le décret prévu n'est jamais paru, car ce dispositif législatif est apparu difficilement applicable, parce que trop large.

En effet, dans les grandes sociétés, les comptes sont publiés trimestriellement. En définissant chaque "fenêtre négative" par une durée raisonnable d'un mois avant et d'un mois après la date de publication, ce sont huit mois de l'année qui se trouvent ainsi neutralisés. Si l'on ajoute les "événements significatifs" qui peuvent intervenir au cours des mois restants, l'attribution des options devient de fait problématique.

C'est pourquoi votre commission des finances vous propose un amendement qui précise le dispositif introduit dans le code des sociétés par l'article 10 du DDOEF de 1996, de manière à le rendre applicable.

Les modifications portent sur deux points :

1. D'une part, le champ de la mesure est limité aux seules sociétés cotées, car c'est uniquement pour elles qu'existe un risque d'utilisation indélicate d'informations privilégiées. En effet, dans les sociétés non cotées, la valeur des titres dépend de l'actif net, établi annuellement par l'arrêté des comptes sous le contrôle des commissaires aux comptes.

2. D'autre part, les "fenêtres négatives" sont définies en fonction de la date de publication des seuls comptes annuels, ou consolidés pour les groupes, à l'exclusion des comptes trimestriels provisoires. Elles restent par ailleurs définies en fonction de tout événement de nature à influencer le cours des titres de la société, notion bien circonscrite par la jurisprudence sur le délit d'initié.

Il convient enfin de signaler que, dans la nouvelle rédaction que votre commission des finances vous propose, l'ampleur des "fenêtres négatives" est précisée. Elle est d'un mois précédant et suivant la publication des comptes annuels dans le premier cas. Dans le second cas, elle court de la date à laquelle les organes sociaux de la société ont eu connaissance de l'information privilégiée, au mois suivant la date à laquelle cet événement est rendu public.

Ainsi, aucun décret d'application n'est nécessaire, la disposition législative étant d'application immédiate.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter le présent article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 55

Coordination par la Cour des comptes des comités administratifs chargés de vérifier les comptes des organismes locaux de sécurité sociale

Commentaire : cet article additionnel tend à compléter le code des juridictions financières de façon à donner une base légale expresse à la fonction de coordination qui a été conférée à la Cour des comptes à l'égard des comités administratifs chargés de contrôler les comptes des organismes locaux de sécurité sociale.

La Cour des comptes dispose d'une compétence générale pour contrôler les comptes des organismes de sécurité sociale de droit public, tels que les caisses nationales du régime général.

Pour le contrôle des organismes de sécurité sociale de droit privé visés à l'article L. 134-1 du code des juridictions financières, c'est-à-dire essentiellement les organismes locaux, la Cour des comptes est assistée par des comités départementaux d'examen des comptes (CODEC), présidés par les trésoriers payeurs généraux. Pendant longtemps, ces comités n'ont eu qu'une existence réglementaire. Un décret de 1961 détermine leurs modalités d'organisation et de fonctionnement. Ils associent, sous la présidence des trésoriers payeurs généraux (TPG), les administrations des ministères des Finances, des Affaires sociales et de l'Agriculture.

La loi du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale leur avait donné une assise législative. En effet, l'article 13 de cette loi, résultant d'un amendement du rapporteur pour avis de la commission des finances du Sénat, M. Jacques Oudin, prévoyait que la Cour des comptes transmet chaque année au Parlement un rapport sur les comptes de l'ensemble des comptes des organismes de sécurité sociale soumis à son contrôle et faisant une synthèse des avis émis par les CODEC.

Le rapport annuel de la Cour des comptes au Parlement sur la sécurité sociale a été depuis élevé au rang organique, par la loi n° 96-646 du 22 juillet 1996 relative aux lois de financement de la sécurité sociale. Cependant, dans le nouvel article L.O. 132-3 du code des juridictions financières qui en reprend le principe, la mention des CODEC a été remplacée par une référence plus générale aux " organismes de contrôle placés sous la surveillance " de la Cour des comptes.

Dès le vote de la loi du 25 juillet 1994, la Cour des comptes a entrepris de coordonner et de dynamiser le réseau des CODEC en animant un comité de pilotage réunissant la direction de la Comptabilité publique (Finances), la direction de la Sécurité sociale (Emploi et solidarité) et la direction des Exploitations, de la politique sociale et de l'emploi (Agriculture).

Des guides d'aide au contrôle ont été élaborés sur des thèmes choisis puis validés par les CODEC eux-mêmes, leur méthodologie a été harmonisée et leur information sur les suites données à leur travaux améliorée.

Les premiers rapports de la Cour des comptes au Parlement sur la sécurité sociale ont confirmé l'intérêt des avis des CODEC, dont l'approche de terrain permet d'identifier des dysfonctionnements très concrets des régimes sociaux.

Cette réorganisation a pris une importance nouvelle avec l'institution des lois de financement de la sécurité sociale. En effet, lors de la révision constitutionnelle de février 1996, la Cour des comptes s'est vue attribuer la fonction d'assister le Parlement et le Gouvernement dans le contrôle de l'exécution des lois de financement (article 47-1 de la Constitution).

Pour s'acquitter de cette mission, la Cour a modifié sa propre organisation interne, en créant en octobre 1997 une sixième Chambre dédiée à la sécurité sociale. Mais il semble opportun qu'elle puisse s'appuyer sur un réseau de CODEC modernisé, à l'égard duquel elle exercerait une fonction de coordination et d'impulsion. La Cour des comptes a ainsi mis en place une programmation pluriannuelle de ses travaux relatifs au rapport sur la sécurité sociale, ce qui implique une concertation prospective avec les CODEC.

Par ailleurs, la régionalisation du réseau des CODEC a été engagée. En effet, le niveau régional correspond déjà à l'organisation de trois des ministères concernés, avec les directions régionales des affaires sociales (DRASS) et les services régionaux de l'inspection du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricole (SRITEPSA). C'est aussi le niveau pertinent pour les organismes de sécurité sociale soumis au contrôle puisque, hormis la branche famille, les branches maladie et vieillesse sont organisée régionalement. Les organismes communs aux caisses locales, pour la gestion du personnel ou de l'informatique, dépassent également les frontières départementales.

A terme, les Comités régionaux d'examen des comptes des organismes de sécurité sociale (COREC) deviendront le véritable niveau de programmation, de concertation, de suggestion et d'harmonisation des méthodes de contrôle, ainsi que de formation des vérificateurs des CODEC. Deux COREC ont déjà été créés, à titre expérimental, en Franche-Comté et en Auvergne.

Les TPG départementaux seraient associés avec voix consultative aux COREC, seul le TPG régional disposant d'une voix délibérative.

Après la phase transitoire et expérimentale initiale, l'ensemble de cette réforme nécessite désormais une adaptation des textes en vigueur. Or, manifestement, il manque une disposition législative entre la loi organique laconique (article L.O. 132-3 du code des juridictions financières) et les textes réglementaires obsolètes (décrets du 11 février 1985 et du 8 août 1986, instruction du 4 février 1993).

Tel est l'objet de l'article additionnel proposé par votre commission des finances, qui tend à insérer dans le code des juridictions financières un article L. 134-2 ainsi rédigé : " Les comptes annuels des organismes visés à l'article L. 134-1 sont vérifiés, sous la surveillance de la Cour des comptes, par les Comités régionaux et départementaux d'examen des comptes, dans des conditions déterminées par décret ".

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter le présent article additionnel.

ARTICLE 56 (nouveau)

Possibilité de transférer la propriété des édifices des cultes aux établissements publics de coopération intercommunale

Commentaire : le présent article, résultant d'un amendement déposé par M. Charles de Courson, a pour objet de permettre le transfert de la propriété des édifices des cultes aux établissements publics de coopération intercommunale.

En application de l'article 12 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat, la propriété de certains biens mobiliers ou immobiliers utilisés pour la célébration du culte est attribuée soit à l'Etat, soit aux départements, soit aux communes . La propriété d'un certain nombre d'édifices cultuels à donc été confiée à des personnes publiques (1. édifices antérieurs à la loi du 18 germinal an X et qui, en vertu de cette loi, servait à l'exercice public d'un culte ; 2. les édifices cultuels acquis ou construits par ces personnes publiques entre le 18 germinal an X et le 9 décembre 1905 ; 3. les édifices du culte qui appartenaient aux établissements publics ecclésiastiques et qui n'ont pas été réclamés par les associations cultuelles) . Il est à noter que la propriété n'entraîne pas, en l'espèce, pour ces personnes publiques la jouissance de ces biens, aussi longtemps que la désaffection n'a pas été prononcée, car ces immeubles sont affectés au culte et mis à disposition soit des associations cultuelles, soit des fidèles et des ministres du culte.

Le dernier alinéa de l'article 13 de la loi de 1905, introduit par la loi du 13 avril 1908, ajoute que " l'Etat, les départements et les communes pourront engager les dépenses nécessaires pour l'entretien et la conservation des édifices du culte dont la propriété leur est reconnue par la présente loi ".

Toutefois certaines communes ne disposant pas des moyens financiers nécessaires à l'entretien des édifices cultuels dont elles sont propriétaires, l'état de nombreux édifices se détériore. Il a donc été envisagé de transférer cette propriété à des groupements de communes. Or, la loi de 1905 ne prévoit pas cette possibilité.

Cet article a donc pour objet de remédier à cette lacune en permettant le transfert de la propriété d'édifices cultuels, appartenant à communes, à des établissements publics de coopération intercommunale dont ces communes sont membres, dès lors que la compétence en matière des cultes leur a été confiée. Leurs dépenses d'investissement exposées à ce titre seront donc éligibles au FCTVA.

Le caractère pragmatique de cette " mise à jour " de la loi du 9 décembre 1905, qui ne pouvait anticiper le développement du phénomène intercommunal, dans la mesure où elle ne comporte aucune modification des principes fixés par cette loi , a conduit votre commission à proposer au Sénat l'adoption du présent article.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter le présent article sans modification.

ARTICLE 57 (nouveau)

Mesures de promotion ou de nomination applicables aux agents des douanes en cas d'acte de bravoure ou lorsqu'ils sont grièvement ou mortellement blessés dans l'exercice de leurs fonctions

Commentaire : le présent article prend acte des conditions difficiles dans lesquelles les agents des douanes exercent leurs fonctions et leur accorde le bénéfice de mesures de promotion ou de nomination similaires à celles existant déjà pour les sapeurs-pompiers professionnels et les fonctionnaires actifs des services de la police nationale.

I - LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Introduite par un amendement du gouvernement, adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale après " avis tout à fait favorable " de sa commission des Finances, cette mesure vise à faire bénéficier les agents des douanes de la branche de la surveillance de mesures de promotion ou de nomination dans un corps hiérarchiquement supérieur.

En cas d'acte de bravoure ou s'ils ont été grièvement ou mortellement blessés dans l'exercice de leurs fonctions, ces agents pourront faire l'objet d'une promotion d'échelon ou de grade. En cas de décès, l'autorité compétente pourra, en outre, à titre posthume, nommer les agents de catégorie B et C dans un corps hiérarchiquement supérieur, soit de catégorie A. En tout état de cause, lesdites promotions ou nominations se traduiront par l'attribution d'un indice supérieur.

Ces mesures sont comparables à celles déjà applicables à d'autres cadres de fonctionnaires, également confrontés, dans l'exercice de leurs missions, à de tels risques.

Il s'agit en premier lieu de l'article 125-II de la loi de finances pour 1984 qui dispose que les " sapeurs-pompiers professionnels cités à titre posthume à l'ordre de la Nation font l'objet d'une promotion au grade, ou à défaut, à l'échelon, immédiatement supérieur à celui qu'ils avaient atteint ."

Par ailleurs, l'article 36 du décret n° 95-654 du 9 mai 1995 sur les dispositions applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale 79( * ) prévoit également des mesures de promotion en cas d'acte de bravoure ou de blessure grave ou mortelle.

II - LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

La mesure proposée est du domaine législatif dans la mesure où les agents des douanes, n'ayant pas de statut spécial, relèvent de plein droit du statut général de la fonction publique de l'Etat auquel il est donc dérogé par le présent article.

Elle devrait concerner, outre les fonctionnaires titulaires, les fonctionnaires stagiaires des services des douanes.

Il s'agit par ailleurs de prendre acte des conditions difficiles dans lesquelles les agents des douanes de la branche de la surveillance doivent parfois accomplir leur mission. Ainsi, depuis 1995, deux agents des douanes sont décédés dans l'exercice de leurs fonctions et quatre ont été grièvement blessés, tandis que trois d'entre eux accomplissaient des actes de bravoure en procédant à l'arrestation d'un terroriste.

La disposition ainsi introduite par cet article apparaît donc à votre rapporteur tout particulièrement opportune et justifiée.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 58 (nouveau)

Modification du financement de la Chambre nationale
de la batellerie artisanale

Commentaire : le présent article modifie le mode de financement de la Chambre nationale de la batellerie artisanale de façon à lui permettre de mieux remplir ses missions dans la perspective de la libéralisation du transport fluvial.

La Chambre nationale de la batellerie artisanale (CNBA) est née de l'article 40 de la loi d'orientation des transports intérieurs (LOTI) n°82-1153 du 30 décembre 1982. Son mode d'organisation et ses missions ont été précisés par le décret n°84-365 du 14 mai 1984, dont l'article 3 dispose notamment que " doivent être immatriculées au registre de la batellerie artisanale les entreprises dont l'activité est le transport de marchandises par voies d'eau au moyen d'un ou plusieurs bateaux de navigation intérieure immatriculés en France et qui n'emploient pas plus de six salariés ".

Les artisans bateliers étaient environ 3500 à l'époque de la rédaction du décret. Aujourd'hui, la population pour laquelle la CNBA joue le rôle de chambre des métiers est d'environ 1000 personnes.

Les missions de la CNBA sont énumérées à l'article 2 du décret de 1984 :

a) tenir les registres des entreprises, des patrons et des compagnons ;

b) représenter les intérêts généraux de la batellerie artisanale ;

c) émettre un avis sur les projets de lois et les décrets relatifs au transport fluvial ;

d) gérer tout fonds qui serait créé en vue de favoriser l'adaptation de la capacité de la flotte artisanale ;

e) organiser ou concourir à l'organisation de l'apprentissage et de la formation continue ;

f) coordonner l'action des entreprises de batellerie artisanale, notamment par la création de services communs destinés à améliorer la rentabilité, la qualité, les techniques et les méthodes de cette batellerie ;

g) créer des institutions d'entraide et d'assistance ou concourir à leur fonctionnement.

Afin de donner à la CNBA les moyens de remplir ses missions, l'article 93 de la loi de finances pour 1985 (n°84-1208 du 29 décembre 1984) a organisé son financement en instaurant deux prélèvements :

- le premier, dit " taxe CNBA ", est destiné à financer le fonctionnement de la Chambre. Il est acquitté par les entreprises inscrites au registre des entreprises de la batellerie artisanale, selon la définition de l'article 3 du décret du 14 mai 1984 déjà cité. La taxe est égale à 0,105 centime par tonne kilométrique de marchandises transportées sur les voies navigables situées en territoire français, à l'exception des voies navigables à statut international ;

- le second prélèvement alimente un fonds dont la gestion est confiée à la CNBA, conformément au d) de l'article 2 du décret de 1984. Le rôle du Fonds d'adaptation des capacités de la flotte artisanale (FACFA) est contenu dans son intitulé. Contrairement à la " taxe CNBA " qui est acquittée uniquement par les artisans bateliers (mais tous les artisans), la " taxe FACFA " est payée par l'ensemble des bateliers (artisans ou compagnies 80( * ) ) qui effectuent du transport de marchandises générales 81( * ) . Elle s'élève à 0,13 centime par tonne kilométrique transportée sur les voies navigables situées en territoire français, à l'exception des voies navigables

I - LE MODE DE FINANCEMENT DE LA CNBA CONSTITUE UN OBSTACLE À UNE ALLOCATION OPTIMALE DES RESSOURCES

Les difficultés actuelles rencontrées par la CNBA ne proviennent pas d'un manque de ressources mais de l'organisation de son financement.

1. La " taxe CNBA " ne suffit pas à financer les dépenses de fonctionnement de la Chambre.

Depuis 1991, le produit de la " taxe CNBA " est inférieur aux dépenses de la Chambre. Toutefois, celle-ci a jusqu'à présent toujours pu équilibrer son budget en puisant dans les réserves constituées grâce aux excédents dégagés au cours des premières années d'activité et à la subvention de 2 millions de francs versée par l'Etat en 1985.

En 1997, pour la première fois, le montant du déficit d'exploitation est supérieur à celui des réserves (411 844 francs contre 393 315). Par conséquent, sans réforme de son mode de financement, la CNBA n'aurait pas été en mesure de financer seule ses dépenses de fonctionnement en 1998.

Montants perçus de la taxe CNBA depuis 1985

Année

Montant de la taxe perçue

Subvention de l'Etat

Recettes diverses

Dépenses

Reliquat

Résultat cumulé

1985

1.272.091,57

2.000.000,00

 

1.023.928,29

2.248.163,28

2.248.163,28

1986

2.358.118,50

 

640,00

1.525.813,25

832.945,25

3.081.108,53

1987

2.282.833,29

 
 

2.238.785,76

144.047,53

3.225.156,06

1988

2.268.267,52

 

4.315,66

2.077.483,75

195.099,43

3.420.255,49

1989

2.0408.601,88

 

1.095,00

2.276.749,94

131.946,94

3.552.202,43

1990

2.458.240,11

 

17.511,98

2.247.371,10

228.380,99

3.780.583,42

1991

2.455.171,86

 
 

2.660.026,18

- 204.854,32

3.575.729,10

1992

2.202.574,80

 

330.611,00

2.593.173,42

- 59.987,62

3.515.741,48

1993

1.961.403,22

 

192.524,00

2.455.454,15

- 301.526,93

3.214.214,55

1994

1.413.672,18

 

389.883,28

3.273.301,61

- 1.469.746,15

1.744.468,40

1995

1.795.540,74

 

347.187,21

2.815.397,24

- 672.669,29

1.071.799,11

1996

1.966.754,41

 

224.895,38

2.458.288,40

- 266.638,61

805.160,50

1997

1.819.120,08

 

204.231,00

2.435.195,80

- 411.844,72

393.315,78

2. Cette situation difficile est rendue incompréhensible par les réserves accumulées par le FACFA, dans lesquelles la CNBA n'a pas le droit de puiser.

L'origine des réserves du FACFA ne réside pas dans l'évolution du produit de la taxe, qui n'a jamais atteint l'objectif de 6 millions de francs par an avancé lors des débats parlementaire sur l'article 93 de la loi de finances pour 1985.

Les réserves s'expliquent par :

- le produit de la taxe perçue en 1985, année au cours de laquelle aucune dépense n'a été engagée ;

- des subventions de l'Etat importantes jusqu'en 1989, qui ont permis d'éviter de puiser dans les réserves de la CNBA ;

- des dépenses de montants variables selon les années, conduisant à de fréquents excédents budgétaires depuis 1991.

Montants perçus de la taxe FACFA depuis 1985

Année

Montant de la taxe perçue

Subvention de l'Etat

Recettes diverses

Dépenses

Reliquat

Résultat cumulé

1985

5.419.038,58

 
 

0,00

5.419.038,58

5.419.038,58

1986

5.173.867,60

5.000.000,00

 

10.458.045,42

- 284.177,82

5.134.860,76

1987

4.658.096,05

7.000.000,00

 

11.776.396,74

- 118.300,69

5.016.560,07

1988

4.416.299,92

1.000.000,00

 

6.661.405,80

- 1.245.105,88

3.771.454,19

1989

4.951.270,98

1.000.000,00

 

5.458.603,44

492.667,54

4.264.121,73

1990

5.402.526,55

 
 

5.856.635,00

- 554.108,45

3.710.013,28

1991

5.302.381,33

 
 

444.918,00

4.857.463,33

8.567.476,61

1992

4.775.797,90

 
 

2.191.875,00

2.583.922,90

11.151.399,51

1993

4.054.350,31

 

4.628,00

375.472,27

3.683.506,04

14.834.905,55

1994

2.895.691,53

 
 

9.337.842,86

- 6.442.151,33

8.392.754,22

1995

3.522.856,36

 
 

6.368.642,56

- 2.845.786,20

5.546.968,02

1996

4.219.592,53

 
 

907.679,41

3.311.913,12

8.858.881,14

1997

3.416.523,83

 
 

388.250,00

3.028.273,83

11.887.154,97

Les fluctuations de l'évolution des dépenses du FACFA proviennent de la nature de ses missions. Si le texte de la loi de finances pour 1985 définit les missions du fonds en termes très généraux (" favoriser l'adaptation de la capacité de la flotte artisanale "), le rapport de votre commission des finances précisait qu'il avait vocation à faciliter l'adaptation de la flotte aux mouvements de la conjoncture en finançant des " indemnités d'attente à l'affrètement pour les artisans sans chargement ou bien des aides au déplacement à vide afin d'inciter les bateliers à se déplacer dans les régions où une demande de fret est suffisamment importante " 82( * ) .

Ainsi, les années au cours desquelles les dépenses sont importantes, voire supérieures aux recettes de la taxe, correspondent généralement à celles où les conditions climatiques ont interrompu le trafic fluvial (crues, gels) et où la CNBA a par conséquent été amenée à soutenir financièrement les artisans.

3. Non seulement la CNBA fonctionne de manière précaire, mais les moyens dont elle dispose ne lui permettent d'assurer que ses missions de représentation.

La CNBA est un établissement public de très petite taille, dont les dépenses sont essentiellement consacrées à la rémunération des trois salariés et au paiement des vacations du président et des membres de son conseil d'administration. Ces effectifs réduits permettent tout juste à la CNBA d'assurer ses missions de représentation (les missions a) , b) et c) mentionnées plus haut) ainsi que la gestion du FACFA.

La Chambre n'a ni les moyens ni les personnels requis pour " créer des institutions d'entraide et d'assistance ou de concourir à leur fonctionnement " ou encore pour " organiser ou concourir à l'organisation de l'apprentissage et de la formation continue " des bateliers.

Quant à sa mission de " coordination de l'action des entreprises de batellerie artisanale par la création de services communs destinés à améliorer la rentabilité, la qualité, les techniques et les méthodes de cette batellerie ", elle aurait pu être confiée au FACFA, comme le laisse entendre la note de la direction des transports terrestres évoquée plus haut. Mais le fonds, s'il dispose de trop de crédits pour financer l'adaptation de la flotte à la conjoncture, n'a pas l'envergure nécessaire pour mener des opérations de restructuration de la profession, que la CNBA, qui gère le fonds, n'aurait pas pu assumer pour les raisons matérielles déjà évoquées.

4. Une telle situation est de plus en plus préjudiciable : les missions délaissées par la CNBA sont essentielles à l'accompagnement des artisans bateliers vers la libéralisation.

L'organisation du transport fluvial traverse actuellement une phase de profonds bouleversements. En effet, la directive n° 96-75 du 19 novembre 1996 organise le démantèlement du système actuel d' " affrètement au tour de rôle " 83( * ) . La période de transition entre le système administré actuel et la libéralisation, qui se traduit par le fait que " les contrats sont librement conclus entre les parties " (article 2), prendra fin le 1er janvier 2000.

Le France a anticipé la libéralisation par la loi n° 94-576 du 12 juillet 1994 relative à l'exploitation commerciale des voies navigables qui, par ses article 6, 7 et 8 notamment, prévoit que certains contrats sont (ou peuvent être) conclus en dehors du système du tour de rôle 84( * ) . De plus, l'article premier de la loi dispose qu'elle ne sera applicable que " pour une période de six années au plus ", soit jusqu'à l'an 2000.

Malgré cette loi, les artisans bateliers restent encore fortement dépendants du système du rôle puisque, selon les informations transmises à votre rapporteur par la CNBA, 80% des artisans bateliers travaillent dans une bourse d'affrètement réglementé.

Afin de mettre fin aux surcapacités du secteur et de préparer les bateliers aux échéances à venir, la France a mis en place dès 1986 un plan économique et social (PES) financé conjointement par l'Etat et Voies navigables de France. La prolongation de ce plan en 1997 et 1998 a été acceptée par la Commission européenne car il comporte des dispositions relatives à la formation des bateliers et des incitations aux regroupements, sous forme de coopérative notamment. Ces volets du plan économique et social sont particulièrement de nature à permettre aux bateliers de résister au choc de l'ouverture à la concurrence.

Dans ce contexte, il est souhaitable que la CNBA se saisisse enfin de ces questions. Elle doit notamment :

- aider les artisans à surmonter leurs réticences psychologiques au regroupement, et leur apporter un soutien plus appuyé en matière commerciale et de gestion ;

- inciter les artisans à développer leurs avantages comparatifs sur certains marchés de marchandises spécialisées qui nécessitent des prestations délicates et de qualité, dégageant une plus forte valeur ajoutée.

La diversification de l'activité des bateliers doit également être encouragée afin d'éviter que l'ensemble des artisans ne dépende des mêmes secteurs d'activité. Aujourd'hui, le transport de marchandises spécialisées ne représente que 5% des tonnes kilométriques transportées par la flotte artisanale, et une cinquantaine de bateliers.

II - POUR REMÉDIER AUX DIFFICULTÉS ACTUELLES, IL EST PROPOSÉ DE SUPPRIMER LE FACFA ET DE CRÉER UNE TAXE UNIQUE

L'article 58 du texte adopté en première lecture par l'Assemblée nationale dispose qu' " il est pourvu aux dépenses de la Chambre nationale de la batellerie artisanale au moyen d' une taxe acquittée par les entreprises inscrites au registre des entreprises de la batellerie artisanale . "

La création d'une taxe unique payée par les artisans comporte des avantages :

1. La taxe unique exonère les bateliers non artisans transportant des marchandises générales du paiement de l'ancienne " taxe FACFA ", dont le produit était réservé à des actions en faveur des artisans.

Les représentants des entreprises non artisanales, les compagnies, réclamaient depuis de nombreuses années la fin de leur assujettissement 85( * ) à la " taxe FACFA ", dont le bénéfice ne profitait qu'aux artisans.

Le paiement par les compagnies d'une taxe au profit des artisans s'expliquait par des considérations de solidarité entre les plus solides et les plus fragiles au sein du secteur de la batellerie. De plus, selon les informations recueilles par votre rapporteur auprès de Voies navigable de France, l'activité de nombreux artisans dépend des transports que leur sous-traitent les compagnies. Par conséquent, il n'était pas absurde que les compagnies participent au soutien aux artisans en période de basse conjoncture.

Néanmoins, à l'approche de la libéralisation, la situation financière des compagnies et la perspective d'une mise en concurrence avec les compagnies étrangères ont conduit à la nécessité de renforcer la compétitivité des armements industriels.

2. La taxe unique ne remet pas en cause les actions anciennement menées par le FACFA, que la CNBA exercera désormais directement et non plus par le truchement d'un fonds.

La disparition du FACFA n'emporte pas celle des actions financées par le fonds puisque ce dernier agissait dans le cadre général des missions de la CNBA, qui assurera dorénavant elle-même, en tant que chambre des métiers et en puisant des ses réserves, l'indemnisation des artisans en cas de difficulté conjoncturelle.

La libéralisation ne devrait pas remettre en cause le principe de ces aides, du moins tant qu'elles ne sont pas financées par des crédits budgétaires. De plus, une intervention communautaire est prévue par l'article 7 de la directive de 1996 qui dispose qu' " en cas de perturbation grave du marché 86( * ) , la Commission peut prendre (...) , à la demande d'un Etat membre les mesures appropriées, notamment des mesures visant à empêcher toute nouvelle augmentation de la capacité de transport offerte sur le marché concerné . "

Votre rapporteur s'inquiète néanmoins de la manière dont sera assurée l'indemnisation des artisans lorsque les réserves du FACFA seront épuisées et que le budget de fonctionnement de la CNBA consommera la quasi-totalité du produit de la taxe.

3. La taxe unique permet à la CNBA d'accroître ses moyens de fonctionnement et d'être en mesure d'assumer l'ensemble de ses missions.

Le dispositif proposé met fin au caractère absurde et bureaucratique du système actuel, dans lequel un établissement public perçoit le produit de deux taxes mais, en l'absence de fongibilité des crédits, doit faire cohabiter en son sein déficits de fonctionnement et excédents du fonds de soutien.

La CNBA voit aujourd'hui une de ses revendications satisfaites, il lui appartiendra à l'avenir de prouver qu'elle est capable d'accompagner les bateliers à travers les nécessaires mutations que leur profession va connaître dans les années à venir.

Le nouveau système comporte cependant un inconvénient : le volume des ressources à la disposition de la CNBA va diminuer puisque les compagnies transportant des marchandises générales n'acquitteront plus la " taxe FACFA ". Le chiffrage fournit plus loin évalue l'ampleur de la perte de recette pour la batellerie artisanale.

III - LA RÉFORME DOIT S'EFFECTUER À NIVEAU DE PRÉLÈVEMENT CONSTANT

Contre l'avis du Gouvernement, et afin de ne pas modifier le niveau de prélèvement pesant sur les artisans, l'Assemblée nationale a adopté un dispositif comportant deux taux, l'un applicable aux artisans bateliers transportant des marchandises générales et l'autre aux artisans transportant des marchandises spécialisées :

- les artisans transportant des marchandises générales acquittaient auparavant les deux taxes, la " taxe FACFA " et la " taxe CNBA ". Le nouveau système leur applique un taux équivalent à la somme des deux anciens taux, soit 0,105 + 0,13 = 0,235 centime par tonne kilométrique.

- les artisans transportant des marchandises spécialisées, en revanche, n'étaient redevables que de la " taxe CNBA " de 0,105 centime par tonne kilométrique. La nouvelle taxe leur sera appliquée au même taux.

Le Gouvernement ne souhaitait pas distinguer entre artisans selon le type de marchandises transporté. Il invoquait trois arguments, de portée inégale :

- si la distinction entre types de marchandises est pertinente dans certains cas, la CNBA fournit à l'ensemble des bateliers des prestations équivalentes. Par conséquent, une taxation différenciée n'est pas justifiée ;

- l'exonération de " taxe FACFA " accordée aux transporteurs de marchandises spécialisées se justifie dans le système actuel notamment par le fait que le FACFA est réservé aux transporteurs de marchandises générales. Aujourd'hui, le FACFA disparaissant, l'exonération perd son fondement ;

- la distinction entre marchandises générales et marchandises spécialisées est parfois difficile à établir.

Ce dernier argument souligne la nécessité d'harmoniser la terminologie utilisée en matière de type de marchandise transporté. En effet, il n'existe pas de critère précis d'appartenance à l'une ou l'autre catégorie.

Les marchandises spécialisées sont décrites comme étant tantôt les liquides 87( * ) (parfois associés aux pulvérulents), tantôt les produits dangereux (qui sont souvent liquides). La distinction liquide-solide n'est cependant pas totalement opérante car certains produits peuvent être liquides ou pas selon leur teneur en eau (les boues, par exemple, peuvent être sèches). Une distinction par type de bateau est également parfois mise en avant, les bateaux à cale sèche transportant des marchandises générales et les bateaux à cale citerne transportant les marchandises spécialisées.

L'absence de critère précis de distinction entre les types de marchandises ne suffit cependant pas à justifier une remise cause de l'exonération accordée aux transporteurs de marchandises spécialisées car, d'une part, le système a fonctionné correctement depuis 1985 et, d'autre part, le type de marchandises qu'un bateau est réputé transporter est précisé sur le certificat d'agrément délivré par Voies navigables de France 88( * ) .

L'argument selon lequel la suppression du FACFA, dont seuls les transporteurs de marchandises générales étaient censés bénéficier, doit conduire à mettre fin à l'avantage fiscal des transporteurs de marchandises spécialisées ne peut pas être retenu non plus.

En effet, le fait que le FACFA serait réservé aux transporteurs de marchandises générales est une idée reçue, qui ne repose sur aucun texte. En pratique, le FACFA a bénéficié aussi bien aux transporteurs de marchandises générales qu'aux transporteurs de marchandises spécialisées.

L'arbitrage entre le taux unique et les deux taux ne va cependant pas de soi :

- sur le plan des principes, votre commission des finances doit arbitrer entre sa volonté de mettre un terme aux niches fiscales et sa réticence à accepter des hausses de prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises ;

- en pratique, il est indéniable qu'il n'est pas justifié que les artisans bateliers, à qui la CNBA fournit des prestations similaires, rémunèrent ces services de manière différenciée selon le type de marchandise que leurs bateaux transportent.

Pour autant, la remise en cause de cet avantage ne serait pas forcément pertinente car :

- elle serait sans effet sur le niveau de prélèvement supporté par les autres artisans ;

- elle conduirait à accroître la pression fiscale sur le segment de l'activité batelière qu'il est souhaitable d'encourager à l'avenir ;

- la vraie inégalité fiscale ne provient pas des différences de taux applicables aux deux types de marchandise mais de la localisation géographique des bateliers. Les artisans installés dans des régions frontalières sont en effet amené à travailler dans des pays étrangers, exonérant ainsi leurs cargaisons du paiement de la taxe.

Il apparait donc que l'approche " égalitariste ", consistant à soumettre tous les bateliers au même taux, doit être écartée au profit du maintien du niveau actuel des prélèvements, qui a pour effet secondaire de provoquer une forme de " discrimination positive " entre les artisans bateliers.

IV - LE COÛT DE LA MESURE


La direction des transports terrestres a réalisé l'étude d'impact de la mesure en considérant que le produit actuel de la " taxe CNBA " était de 1,86 million de francs et celui de la " taxe FACFA " de 3,4 millions de francs. Les recettes de la CNBA s'élèvent donc aujourd'hui à 5,26 millions de francs.

La DTT considère également que le total des tonnes kilométriques actuellement transportées sur les voies navigables par les artisans bateliers est de 1 830 000 000 t/km.

Si la solution du taux unique était retenue, le produit de la taxe s'élèverait à :

1 830 000 000 t/km X 0,00235 F = 4 300 000 F

Sachant que VNF prélève 3% de frais de recouvrement, le produit de la taxe serait de 4 271 000 F.

Si le système des deux taux est maintenu, on peut estimer que le produit de la taxe serait de :

- s'agissant des marchandises spécialisées (5% des tonnes kilométriques) :

91 500 000 X 0,00105 = 96 075 F ;

- s'agissant des marchandises générales :

1 738 500 000 X 0,00235 = 4 085 475 F.

Compte tenu du prélèvement de 3% opéré par VNF, le produit total de la taxe s'élèverait à 4 056 103 francs .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 59 (nouveau)

Renforcement de la lutte contre le blanchiment des capitaux
provenant du trafic des stupéfiants

Commentaire : cet article tend à renforcer le dispositif de lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants instauré par la loi n °90-614 du 12 juillet 1990 en étendant l'obligation de déclaration de soupçon aux intermédiaires immobiliers.

I - LE DISPOSITIF ACTUEL

A. LE DISPOSITIF DE LA LOI DU 12 JUILLET 1990 RELATIVE À LA PARTICIPATION DES ORGANISMES FINANCIERS À LA LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT DES CAPITAUX PROVENANT DU TRAFIC DES STUPÉFIANTS


Créé lors du sommet de l'Arche des 14 et 15 juillet 1989 à l'initiative de la France, le Groupe d'Action Financière Internationale (GAFI), qui regroupe les 26 pays alors membres de l'OCDE a une double mission :

- évaluer les résultats de la coopération déjà mise en oeuvre pour prévenir l'utilisation du système bancaire et des institutions financières aux fins de blanchir l'argent ;

- étudier des mesures préventives supplémentaires dans ce domaine, y compris d'adaptation des systèmes juridiques et réglementaires de façon à renforcer l'entraide judiciaire multilatérale.

En conclusion de ses travaux, le GAFI a émis 40 recommandations dont les pays membres se sont inspirés pour élaborer un dispositif législatif de lutte contre le blanchiment des capitaux.

Ainsi, la France a publié le 12 juillet 1990 la loi n ° 90-614 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants.

Cette loi oblige les établissements de crédit, les sociétés d'assurance, les mutuelles, les société de bourse et les bureaux de change de déclarer les sommes inscrites dans leurs livres et les opérations qui portent sur ces sommes lorsque celles-ci paraissent provenir du trafic de stupéfiants ou de l'activité d'organisations criminelles.

Ces déclarations sont recueillies par Tracfin, un service placé sous l'autorité du ministre chargé de l'économie et des finances qui rassemble tous les renseignements propres à établir l'origine des sommes ou la nature des opérations faisant l'objet de la déclaration. Dès que les informations recueillies mettent en évidence des faits susceptibles de relever du trafic des stupéfiants ou de l'activité d'organisations criminelles, il en réfère au procureur de la République.

En outre, Tracfin accuse réception de la déclaration. L'accusé de réception, qui peut être assorti d'une opposition, est émis dans le délai d'exécution de l'opération. L'opposition oblige à un report de cette exécution qui ne peut toutefois pas excéder douze heures. Au-delà de cette échéance, seul le Président du tribunal de grande instance de Paris ou, le cas échéant, le juge d'instruction, a compétence pour ordonner la prorogation de l'opposition.

B. UNE LOI TRÈS EFFICACE MAIS QUI PEUT ENCORE ÊTRE AMÉLIORÉE

Cette loi s'est avérée très efficace.

En effet, les enquêtes conduites par Interpol et les informations recueillies par le GAFI soulignaient le rôle central du système financier international dans le blanchiment de l'argent.

L'instauration de la levée du secret professionnel en cas de transaction suspecte paraissant avoir un lien avec le trafic de stupéfiants a eu un effet très dissuasif.

Toutefois, et c'est le revers de la médaille, le resserrement du contrôle sur les opérations réalisées dans le secteur financier a entraîné un déplacement des systèmes de blanchiment vers d'autres professions.

Cette tendance a été renforcée par les disparités observées dans l'attitude des autorités de contrôle. L'article 7 de la loi du 12 juillet 1990 précise que l'autorité ayant pouvoir disciplinaire sur les organismes financiers engage une procédure sur le fondement des règlements professionnels ou administratifs et en avise le procureur de la République en cas de défaut grave de vigilance ou d'une carence dans l'organisation des procédures internes de contrôle.

Or, la diligence des autorités de contrôle varie fortement de l'une à l'autre. En témoigne le nombre de déclarations recueillies par Tracfin.

Depuis la publication de la loi jusqu'au 1er janvier 1997, les banques (soumises au contrôle de la commission bancaire) ont déposé 4.000 déclarations. En revanche, ce nombre s'élève seulement à 107 pour les compagnies d'assurance (contrôlées par la commission de contrôle des assurances) et à 13 pour les sociétés de bourse (contrôlées par le conseil des marchés financiers).

Devant ces disparités, Tracfin, qui s'est jusqu'en 1995 intéressé essentiellement aux établissements de crédit, s'est tourné vers les autres organismes financiers concernés par la loi, à savoir les sociétés d'assurance en 1997 et les sociétés de bourse à partir du 1er janvier 1998. Une telle politique apparaît efficace puisque pour la seule année 1997, les dépositions effectuées par les sociétés d'assurance se sont élevées à 123, soit plus que sur la période 1990-1996.

Toutefois, cette plus grande sensibilisation des organismes financiers pousse les responsables du blanchiment de l'argent à trouver de nouveaux canaux.

Depuis son premier rapport annuel datant de 1991, le GAFI appelle régulièrement l'attention de ses membres sur la diversification des filières de blanchiment pour contourner les mesures de prévention prises par le secteur bancaire. Les professions non financières dont l'activité consiste à vendre et à acheter des biens d'une grande valeur, parmi lesquelles celle d'agent immobilier, ou les professions liées, telle celle de notaire, sont présentées comme particulièrement exposées à une utilisation frauduleuse par les blanchisseurs.

Par ailleurs, la directive CEE du 10 juin 1991 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins de blanchiment, incite les Etats européens à étendre ses dispositions aux " professions... qui exercent des activités particulièrement susceptibles d'être utilisés à des fins de blanchiment de capitaux ". Le Conseil et le Parlement européen viennent de rappeler à la Commission la nécessité de s'assurer de l'effectivité de la transposition de ces dispositions dans le droit positif des Etats membres.

L'investissement de capitaux illicites dans le secteur immobilier constitue une méthode et un débouché classique pour le blanchiment.

En France, pays très attractif en raison de sa stabilité économique et monétaire, cette technique est utilisée au cours des deuxième et troisième étapes du processus de blanchiment, appelées respectivement empilage et intégration. Des transactions immobilières, souvent sous couvert de sociétés civiles immobilières, sont réalisés en chaîne pour empêcher de retracer l'origine illicite des fonds, ou bien les capitaux criminels sont investis dans l'activité économique, par le biais de complexes immobiliers touristiques ou loisirs, qui leur confèrent une apparence de légalité.

II - LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. L'EXTENSION DE L'OBLIGATION DE DÉCLARATION DE SOUPÇON AUX INTERMÉDIAIRES IMMOBILIERS


Le présent article propose donc de renforcer la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants en étendant le champ d'application de la loi du 12 juillet 1990 aux intermédiaires immobiliers.

Cet élargissement du champ d'application nécessite certaines adaptations.

Ainsi, le présent article propose d'insérer un alinéa à l'article premier de la loi du 12 juillet 1992 pour compléter la liste des six catégories déjà concernés et y ajouter une septième catégorie constituée par " les personnes qui réalisent, contrôlent ou conseillent des opérations portant sur l'acquisition, la vente, la cession ou la location de biens immobiliers ".

Pour éviter toute confusion, le présent article propose de préciser dans le dernier alinéa de l'article premier de la loi du 12 juillet 1990 que les six catégories déjà existantes sont désignées sous le nom d'organismes financiers.

Quant à la septième catégorie, elle est désignée sous le nom de " personnes ". Le premier alinéa de l'article 3 est modifié afin de soumettre les intermédiaires immobiliers de manière explicite à l'obligation de déclaration.

Enfin, l'article 11 est complété par un paragraphe III qui soumet les intermédiaires immobiliers aux mêmes obligations et aux mêmes sanctions que les organismes financiers.

B. LA QUESTION DU CONTRÔLE DU RESPECT DE LA LOI

Si votre rapporteur est favorable à l'extension du champ d'application de la loi relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants, il craint que le respect de cette loi par les personnes concernées soit de plus en plus difficile à contrôler.

Jusqu'à présent, ce contrôle était effectué par les autorités de contrôle de chaque catégorie d'organismes financiers et, au coup par coup, par les agents de Tracfin. Or, et ce problème a déjà été évoqué, l'implication des autorités compétentes est très variable.

En outre, l'extension du champ d'application de la présente loi se heurte à une difficulté lorsqu'il n'existe pas d'autorités de contrôle. Ainsi, concernant les intermédiaires immobiliers, si le Parquet a un pouvoir de contrôle sur les notaires, les agents immobiliers ne sont contrôlés par aucun organisme. Certes, le nombre des régions susceptibles de connaître du blanchiment d'argent à travers des opérations immobilières est limité, mais les 12 agents de Tracfin pourront difficilement contrôler l'activité de toutes les agences immobilières.

Cette question du contrôle s'avère d'autant plus cruciale que le champ d'application de la loi du 12 juillet 1990 a toutes les chances d'être peu à peu étendu. En effet, le blanchiment touche des secteurs aussi variés que les concessionnaires automobiles, les négociants en métaux précieux, les restaurants, les bars...

Même si la loi a essentiellement un but préventif, son efficacité ne manquera pas d'être affectée si l'obligation de déclaration des opérations douteuses ne peut pas être contrôlée.

Votre rapporteur souhaite donc que le gouvernement précise les moyens qu'il compte utiliser pour s'assurer que l'obligation de déclaration sera bien respectée.

Décision de la commission : votre commission propose d'adopter cet article sans modification .

ARTICLE 60 (nouveau)

Prolongation du dispositif de mise à la disposition de fonctionnaires
de l'Etat auprès de la CNP Assurances SA

Commentaire : le présent article a pour objet de prolonger de dix ans la période pendant laquelle des fonctionnaires de l'Etat en activité à la CNP Assurances SA peuvent être mis à la disposition de cette entreprise.

Cet article, introduit à l'Assemblée nationale par un amendement du gouvernement, vise à prolonger pour une période de dix ans le dispositif de mise à la disposition de fonctionnaires institué pour une durée maximale de six ans par l'article 5 de la loi n° 92-665 du 16 juillet 1992 portant adaptation au marché unique européen de la législation applicable en matière d'assurance et de crédit.

A l'issue de cette période de 10 ans, ces fonctionnaires devraient soit être réaffectés dans les services de la Caisse des Dépôts et Consignations, soit employés par la CNP Assurances SA et placés, par voie de conséquence dans l'une des positions prévues par la loi de 1984 portant statut de la Fonction publique de l'Etat.

I - LE STATUT DE LA CNP ASSURANCES SA

A. SON STATUT A ÉTÉ PROFONDÉMENT MODIFIÉ

D'établissement public à caractère administratif, la CNP est devenue une société anonyme d'assurances.


En 1850 a été créée la première caisse de retraite pour la vieillesse. Regroupée en 1949 avec la Caisse nationale d'assurance en cas de décès (1868), elle a formé la Caisse nationale d'assurance sur la vie. De la fusion de cette dernière et de la Caisse nationale d'assurance en cas d'accident (1868), est née en 1959 la Caisse nationale de prévoyance (CNP), établissement public à caractère administratif.

Le décret n° 87-833 du 12 octobre 1987 relatif à l'organisation et au fonctionnement de la CNP l'a transformée en établissement public industriel et commercial, permettant ainsi à celle-ci de rapprocher ses conditions de gestion de celles d'une entreprise.

Cette première étape vers une transformation plus importante, afin notamment de lui donner un statut juridique plus compatible avec les perspectives d'unification du marché européen de l'assurance, s'est traduite par la création d'une société anonyme à directoire et à conseil de surveillance soumise au droit commun du code des assurances et appartenant au secteur public en vertu notamment des dispositions de l'article 3 de la loi n° 92-665 précitée.

Par ailleurs, la "CNP Assurances" figure dans la liste des entreprises, annexée à l'article 2 de la loi n° 93-923 de privatisation du 19 juillet 1993.

La CNP Assurances SA, société anonyme d'assurance, dispose depuis le 9 décembre 1992 d'un capital social qui était composé, au 31 décembre 1997, de 126.880.000 actions, d'une valeur nominale de 25 francs, soit 3.172.000.000 francs. Ce capital est détenu à 42,5 % par l'Etat, 30 % par la Caisse des Dépôts et Consignations, 17,5 % par La Poste et 10 % par les Caisses d'Epargne.

B. LA CNP ASSURANCES SA EST LE PREMIER ASSUREUR DE PERSONNES EN FRANCE

Depuis ces dernières années, et notamment 1992, les résultats de la CNP ont régulièrement progressé , témoignant "d'une grande vitalité et d'un rapide développement", ainsi que l'avait déjà souligné votre rapporteur lors de l'examen en mai 1992 de la loi n° 92-664 précitée.

La CNP Assurances SA exerce un seul métier, celui de l'assurance des personnes pour lequel elle détient plus de 19 % de parts de marché devant Axa-UAP (12 %) et Prédica (10 %).

Premier assureur de personnes en France avec 14 millions d'assurés, elle est également au 6ème rang des entreprises européennes d'assurances. Elle a réalisé en 1997 un chiffre d'affaires de 110,8 milliards de francs qui se répartissait comme suit : épargne (78 %) ; assurance en couverture de prêts (8 %) ; retraite (7 %) ; prévoyance (6 %) ; et garantie rentes (1 %).

Le montant total de ses placements s'élève à 553 milliards de francs en 1997, contre 160 milliards de francs en 1992. Ils sont constitués à plus de 88 % par des obligations et assimilés. Son résultat pour 1997 est de 1,637 millions de francs (1,118 en 1992), soit une rentabilité sur fonds propres de 12 %.

Les indications chiffrées concernant le premier trimestre de 1998, qui ont été communiquées à votre rapporteur, font état d'une légère diminution de son chiffre d'affaires, de l'ordre de 4 à 5 %. En tout état de cause, la CNP Assurances SA continue à afficher de meilleures performances que le marché de l'assurance des personnes qui, de façon générale, a reculé de manière significative au cours de la même période.

Pour proposer ses produits au public, la CNP Assurances SA bénéficie d'un réseau de distribution original, constitué pour l'essentiel de ses principaux partenaires et actionnaires, à savoir la Poste, les caisses d'épargne et le Trésor public.

A ce titre, elle a créé en 1988 une filiale commune Écureuil Vie détenue à 50 % par le réseau et à 50 % par la CNP, et signé en 1994 une convention la liant avec La Poste pour dix ans. De même une convention similaire a été conclue en 1995 avec le Trésor public.

Parallèlement, depuis 1990 elle a mis en place des partenariats internationaux qui lui permettent d'échanger des savoir-faire complémentaires : des filiales ont ainsi été crées en Italie, Argentine, Pologne, et un bureau de représentation a été ouvert, au début de l'année 1997, en Chine.

II - LA SITUATION DES PERSONNELS DE LA CNP ASSURANCES SA

La CNP Assurances SA avait au 31 mars 1998, un effectif salarié de 2.186 personnes relevant de deux statuts différents : d'une part des fonctionnaires de l'Etat, d'autre part des salariés de droit privé.

Si la situation de ces derniers n'a pas été modifiée, celle des fonctionnaires travaillant au sein de la CNP a été affectée par les évolutions de son statut juridique.

A. LA SITUATION JUSQU'EN 1992

La CNP est alors un établissement public, soit une personne morale de droit public.


En 1992, près des deux tiers des agents de la CNP étaient des fonctionnaires. Cette proportion s'élevait à 85 % au sein des personnels non cadres. Ils dépendaient de la Caisse des dépôts et consignations et étaient simplement affectés auprès de la Caisse nationale de prévoyance. En effet, eu égard à son statut particulier, la Caisse des dépôts et consignations était assimilée à une direction d'administration centrale au sein de laquelle un fonctionnaire exerçait son activité.

B. L'ARTICLE 5 DE LA LOI DU 16 JUILLET 1992

La CNP devient la CNP Assurances SA, soit une personne morale de droit privé.


Les fonctionnaires qui, antérieurement, dépendaient de la Caisse des dépôts et consignations et étaient simplement affectés à la CNP, sont désormais, en vertu de l'article 5 de la loi n° 92-665 précitée, "mis à la disposition de la CNP Assurances SA pour une durée maximale fixée à 6 ans, à charge pour celle-ci de rembourser les charges correspondantes".

Ces charges qui comprennent les traitements et indemnités représentaient en 1997 un montant total de 270 millions de francs, soit 35 % de la masse salariale de la CNP Assurances SA 89( * ) .

Cette disposition avait alors fait l'objet d'un avis favorable de votre commission, votre rapporteur estimant que "la poursuite de la réussite des activités de la CNP reposera sur une bonne mobilisation de ses personnels, dont les grandes capacités d'adaptation n'ont plus, aujourd'hui, à être prouvées".

Cette position de mise à la disposition constituait cependant une dérogation et une exception par rapport au statut général de la fonction publique de l'Etat. La mise à disposition ne peut en effet s'effectuer qu'au sein d'une autre administration ou d'un organisme de droit privé d'intérêt général, ce qui n'était pas, en l'espèce, le cas. Par ailleurs, par nature, la mise à disposition est une procédure individuelle. Or, la mise à la disposition ainsi proposée présentait un caractère collectif.

De ce fait, une convention de gestion entre la CNP et la Caisse des dépôts et consignations fut conclue, après une concertation approfondie avec les organisations syndicales représentatives, qui fixait notamment le dispositif applicable à l'échéance de ces 6 ans, soit au 8 décembre 1998.

Il fut prévu, hors demande des intéressés, qu'aucun changement statutaire ne serait proposé ou imposé aux agents jusqu'à l'échéance fixée par le législateur. A son terme cependant, un choix leur était offert entre :

- une mise à disposition s'opérant par le biais d'une "disposition législative spécifique" non précisée qui aurait pu être considérée comme une dérogation au statut général de la fonction publique ;

- une mise à la disposition, dans l'hypothèse où le législateur aurait prolongé le dispositif législatif dérogatoire ;

- une mise en détachement, en position hors cadre ou en disponibilité. Ceci ne pouvant par ailleurs être effectué qu'avec l'accord des intéressés.

C'est donc la perspective de voir arriver à échéance le dispositif ainsi mis en place, et eu égard aux inquiétudes d'une partie de ses agents quant à leur avenir, que le gouvernement a souhaité vous proposer la mesure figurant au présent article.

C. LES EFFECTIFS DE LA CNP ASSURANCES SA AU 31 MARS 1998

Effectif de la CNP-Assurances SA au 31 mars 1998

 

Fonctionnaires (47 %)

Salariés de droit privé (53 %)

Total

Cadres (34 %)

152

588

740

Non cadres (66 %)

872

574

1.446

Total

1.024

1.162

2.186

Près de la moitié des agents de la CNP Assurances SA sont des fonctionnaires (47 %) cette proportion s'élève à 60 % chez les non-cadres, alors qu'elle n'est que de 20 % chez les cadres. Ces derniers qui représentent le tiers de l'effectif total relèvent donc pour les 4/5 d'un statut de droit privé.

Actuellement sur les 1.024 fonctionnaires travaillant à la CNP, 93 % d'entre eux sont considérés comme en position d'activité, c'est-à-dire qu'ils relèvent de la mise à la disposition. Ils ne sont que 73, soit 7 % à être placés en détachement ou hors cadre.

III - LA PROLONGATION DE LA MISE A LA DISPOSITION

A. LES ELEMENTS JURIDIQUES D'APPRECIATION


Deux éléments doivent être pris en compte afin de pouvoir porter un jugement sur le dispositif mis en place :

- d'une part, les dispositions de l'article 32 du statut de la fonction publique de l'Etat ;

- d'autre part, l'avis rendu le 23 septembre 1997 par la section des finances du Conseil d'Etat.

Les positions statutaires dans la fonction publique de l'Etat
(article 32 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984,
portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat)

" Les fonctionnaires peuvent, au cours de leur carrière, être placés en diverses positions statutaires. ... L'une, l'activité, est la position normale, et en tout cas celle de la quasi-totalité des fonctionnaires, alors que les autres ont un caractère plus ou moins exceptionnel " 90( * ) .

L'activité est la position du fonctionnaire qui exerce effectivement les fonctions correspondant à son grade. Il peut, le cas échéant, être mis à disposition , d'une autre administration que la sienne ou d'un organisme de droit privé d'intérêt général, avec son accord, en cas de nécessité de service, et pour une durée de 3 ans renouvelable.

Les autres positions statutaires lui ouvrent des possibilités diverses de sortie temporaire du corps d'origine. Il s'agit notamment :

- du détachement : le fonctionnaire est placé hors de son corps d'origine, mais continue à bénéficier de ses droits à l'avancement et à la retraite. Révocable avant terme dans l'intérêt du service, il s'effectue sur demande du fonctionnaire, dans un autre corps, une entreprise publique, une institution privée, pour une durée maximum de 5 ans renouvelable. Le fonctionnaire a toujours droit à réintégration dans son corps d'origine ;

- de la position hors cadre : elle bénéficie aux fonctionnaires ayant 15 ans de service, remplissant les conditions pour être détachés dans un emploi ne conduisant pas à pension du régime général de retraite, et qui souhaitent servir dans cette administration ou entreprise. Ils bénéficient d'un droit à réintégration, mais perdent leur droit à l'avancement et à la retraite dans leur corps d'origine ;

- de la disponibilité : prononcée pour permettre à son bénéficiaire de se livrer à "des études d'intérêt général" ou pour "convenances personnelles", elle exclut toute rémunération publique : les fonctionnaires perdent leur droit à l'avancement et à la retraite, et le droit à réintégration n'existe que tant que la mise en disponibilité n'a pas excédé une durée déterminée.

L'avis du Conseil d'Etat du 23 septembre 1997
Section des finances

Saisi par le ministre de l'économie de différentes questions relatives au statut des fonctionnaires de l'Etat en service au sein de la CNP, ainsi qu'à l'évolution de celui-ci, le Conseil d'Etat a dans son avis apporté les précisions suivantes ;

- à l'issue du délai de 6 ans fixé par l'article 5 de la loi du 16 juillet 1992 précitée, hors disposition législative nouvelle "les fonctionnaires de l'Etat encore en service à la CNP se trouveront automatiquement remis à la disposition de la CDC à laquelle sont rattachés les corps dont ils sont membres" .

- ils devront être alors placés dans l'une des positions définies par l'article 32 du statut général de la fonction publique. Cette position ne peut être la mise à disposition , la CNP n'ayant pas le caractère d'organisme d'intérêt général, mais serait le détachement, "procédure rendue possible du fait de l'appartenance de la CNP au secteur public".

- en tout état de cause, le "principe constitutionnel selon lequel les corps de fonctionnaires de l'Etat ne peuvent être constitués et maintenus qu'en vue de pourvoir à l'exécution de missions de service public fait obstacle à ce que les agents des corps concernés puissent se trouver directement placés en activité auprès de cette société la CNP" . De même, serait censuré tout dispositif de détachement ou de mise à disposition d'office auprès de la CNP, et cela sans limitation de durée puisque celle-ci ne participe pas à l'exécution d'une mission de service public ;

- en revanche, ce principe constitutionnel ne s'oppose pas à ce que le législateur puisse proroger la période transitoire instituée par la loi du 16 juillet 1992 précitée "afin de permettre à l'administration et, le cas échéant, aux agents concernés de tirer toutes les conséquences de la transformation de la CNP en société anonyme" . La reconduction de la " mise à la disposition " ne devrait cependant pas " excéder un délai raisonnable " non fixé de manière intangible, mais que le Conseil d'Etat "n'envisage pas" supérieur à une durée de 4 ans. "Dans ce cadre, le législateur peut être conduit à préciser les conditions auxquelles devraient obéir les mesures d'accompagnement ainsi que les options éventuellement ouvertes aux personnels durant cette période transitoire", et renvoyer à un décret en Conseil d'Etat le soin d'en préciser les modalités d'application.

B. LE DISPOSITIF PREVU

Les fonctionnaires de l'Etat travaillant au sein de la CNP Assurances SA ont été mis à sa disposition : ils sont donc actuellement considérés comme des fonctionnaires d'Etat en activité.

Le premier alinéa de cet article reconduit pour une nouvelle période de 10 ans le dispositif mis en place en 1992, pour une durée de 6 ans : les fonctionnaires sont mis à la disposition de la CNP Assurances SA qui continue à rembourser les charges correspondantes. Les fonctionnaires bénéficient cependant d'un droit à réintégration, au plus tard à la fin de ces 10 années, au sein des services de la Caisse des dépôts et consignations.

Le deuxième alinéa tend à régulariser la situation actuelle de ces fonctionnaires : eu égard au changement de statut de la CNP Assurances SA il apparaît difficile de pouvoir continuer à les considérer comme mis "à sa disposition" dans la mesure où cette position statutaire apparaît comme dérogatoire au droit commun de la fonction publique d'Etat.

De ce fait, les fonctionnaires concernés, se verront proposer par la CNP Assurances SA un contrat de travail et seront placés dans l'une des trois positions statutaires prévues à cet effet par le statut de la fonction publique de 1984 : le détachement, la position hors cadre ou la disponibilité. Le choix entre l'une de ces trois positions sera effectué par chaque fonctionnaire, en fonction des avantages et inconvénients respectifs de chacune d'entre elles. S'ils refusent, ceux-ci seront réaffectés automatiquement dans les services de la Caisse des dépôts et consignations.

 

1998

Au plus tard en 2008

 

Dans l'une des positions statutaires, hors de leur corps d'origine : détachés ou placés en situation hors cadre
(73 soit 7 %)

Dans l'une des positions statutaires de la loi de 1984

Fonctionnaires
travaillant au sein

de CNP Assurances
SA (1024)

 
 
 
Considérés comme en activité : mis à la disposition de la CNP Assurances SA

(951 soit 93 %)
 
 
 

Réaffectation au sein de la Caisse des dépôts et consignations

Le dernier alinéa de cet article prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat déterminera "en particulier les modalités d'application des positions visées aux 2°, 3° et 4° de l'article 32 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée". Il pourra s'agir notamment de tirer les conséquences des engagements qui ont pu être pris à l'issue de la grève du personnel de la CNP Assurances SA en février 1998.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission entend donner un avis favorable à l'adoption du présent article qui permettra de régler de façon définitive et dans le sens d'une plus grande rigueur juridique, conformément aux engagements qui ont pu être pris, le statut des fonctionnaires de l'Etat travaillant au sein de la CNP Assurances SA.

Néanmoins, votre rapporteur tient à rappeler, ainsi que M. le Secrétaire d'Etat au Budget l'avait souligné lors de la discussion de cet article à l'Assemblée nationale 91( * ) , qu'il y a "deux questions fondamentales qui conditionnent l'avenir de cette entreprise : la stratégie à moyen terme et le statut des personnels fonctionnaires".

Si cette dernière question est réglée par les dispositions du présent article, celle de la stratégie à moyen terme de la CNP Assurances SA, et notamment une éventuelle ouverture de son capital ne l'est pas encore.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 61 (nouveau)

Date d'entrée en vigueur du relèvement du plafond de la réduction d'impôt pour frais de long séjour hospitalier ou de cure médicale

Commentaire : cet article tend à reporter d'un an l'entrée en vigueur de l'article 90 de la loi de finances pour 1998, qui a relevé de 13.000 à 15.000 francs le plafond des frais de long séjour ou de cure médicale ouvrant droit, pour les personnes âgées de plus de 70 ans, à une réduction d'impôt.

L'article 199 quidecies du CGI prévoit que les sommes engagées par les personnes âgées de plus de 70 ans au titre de leur hébergement dans un établissement de long séjour hospitalier, ou dans une maison de retraite dotée d'une section de cure médicale, ouvrent droit à une réduction d'impôt égale à 25% de leur montant, dans une certaine limite de dépenses.

L'article 90 de la loi de finances pour 1998 a pour effet de porter de 13.000 à 15.000 francs ce plafond des dépenses d'hébergement.

Le cheminement qui a conduit à l'adoption de cet article a été assez tortueux :

- en première lecture, les députés l'avaient voté en première partie de du projet de loi de finances, contre l'avis du Gouvernement ;

- en seconde délibération sur la première partie du projet de loi de finances, le Gouvernement a obtenu sa suppression ;

- en deuxième lecture du projet de loi, la commission des finances de l'Assemblée nationale l'a rétabli, mais en deuxième partie et, cette fois, avec l'avis du Gouvernement.

Ce processus un peu chaotique explique sans doute que, contrairement à l'usage, le gage qui accompagnait le dispositif n'a pas été levé, bien que le Gouvernement ait finalement donné son accord. Le relèvement du plafond de la réduction fiscale décidé est donc théoriquement financé par une majoration des droits de consommation sur les tabacs.

Par ailleurs, dans le feu du débat, la date d'entrée en vigueur de la mesure n'a pas été pas précisée.

Dans l'intention des auteurs de l'amendement, comme dans celle du Gouvernement qui leur a donné son accord, le relèvement du plafond ne devait s'appliquer qu'à compter de 1999, pour les revenus déclarés de 1998. C'est d'ailleurs pour cette raison que la disposition figure en deuxième partie de la loi de finances, et non pas en première partie, comme cela avait été initialement envisagé.

Or, à défaut d'une précision expresse, le nouveau plafond s'applique automatiquement à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi de finances, au 1er janvier 1998. Cela signifie qu'il s'applique dès cette année, au titre des revenus déclarés de 1997.

Le présent article, qui résulte d'un amendement du Gouvernement devant l'Assemblée nationale, a donc deux objets :

- d'une part, lever le gage "tabac" qui subsiste dans la rédaction de l'article 90 de la loi de finances pour 1998 ;

- d'autre part, préciser que le relèvement de 13.000 à 15.000 francs du plafond de la réduction d'impôt pour frais de long séjour hospitalier ou de cure médicale, prévue à l'article 199 quindecies du CGI en faveur des personnes âgées de plus de 70 ans, ne s'applique qu'à compter de l'imposition des revenus de 1998.

Pour sa part votre commission des finances est heureuse d'avoir enfin, grâce à cette erreur technique, l'occasion de se prononcer sur la mesure concernée.

En effet, lors du dernier débat budgétaire, celle-ci a été effectivement votée en deuxième lecture seulement à l'Assemblée nationale. De son côté, en deuxième lecture sur le projet de loi de finances pour 1998, le Sénat a opposé la question préalable et n'a donc pas examiné les articles nouveaux provenant de l'Assemblée nationale.

Sur le fond, votre commission des finances ne voit évidemment aucune objection à une mesure favorable aux personnes âgées et malades.

Sur la forme, il lui semble difficile de refuser l'ajustement proposé par le Gouvernement, sauf à revenir sur l'équilibre de la dernière loi de finances.

Toutefois, l'enjeu budgétaire reste modeste. La dépense fiscale afférente est estimée, dans le fascicule des voies et moyens du projet de loi de finances pour 1998, à 220 millions de francs en 1997. En appliquant mécaniquement à ce montant le taux de 15,38 % qui correspond à une progression de 13.000 à 15.000 francs, on peut évaluer la dépense fiscale supplémentaire à 34 millions de francs.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 62 (nouveau)

Validation des opérations de recapitalisation de la Compagnie du BTP

Commentaire : cet article tend à valider les opérations de recapitalisation concernant la Compagnie du BTP financées par la Caisse des Dépôts et Consignations pour le compte de l'Etat suite au refus des grands groupes du bâtiment-travaux publics de participer à cette recapitalisation.

I - LA VALIDATION PROPOSÉE PAR LE PRÉSENT ARTICLE

A. LA LONGUE AGONIE DE LA COMPAGNIE DU BTP


BTP-Banque est une filiale de la Compagnie BTP, elle même détenue par trois catégories d'actionnaires :

- des grandes entreprises du BTP (Bouygues, Société générale d'Entreprise, la Lyonnaise des eaux, Spie-Batignolles) ;

- des fédérations professionnelles (Fédération nationale du bâtiment, Société mutuelle d'Assurance, Caisse nationale de surcompensation) ;

- et des établissements financiers (Crédit Foncier, Crédit lyonnais, Crédit national, CDC-Participations et Comptoir des entrepreneurs).

La BTP-Banque est spécialisée dans le financement des PME du bâtiment et également active auprès des professionnels de l'immobilier.

Avec la crise de ce secteur depuis le début des années 1990, la banque a connu une forte dégradation de son résultat d'exploitation et de la qualité de ses actifs.

Malgré une opération de défaisance portant sur 3,8 milliards de francs de créances immobilières réalisée en 1993 par les principaux actionnaires, la Compagnie du BTP et sa filiale la BTP-Banque ne sont pas parvenues en 1994 à rétablir leur situation financière, celle-ci est apparue comme irrémédiablement compromise dans les premiers mois de l'année 1995.

Sous l'égide de la Commission Bancaire et des Pouvoirs publics, il a alors été décidé de chercher à adosser la banque auprès d'un groupe extérieur et d'organiser simultanément une cessation progressive des autres activités.

Pour mener à bien ce programme, le gouverneur de la Banque de France a, en application de l'article 52-alinéa 1 de la loi, loi du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit dite "loi bancaire", invité les trois principaux groupes d'actionnaires à apporter à la Compagnie du BTP leur soutien financier pour que cet établissement respecte l'obligation de solvabilité à laquelle il est tenu.

L'ensemble des actionnaires, à l'exception des grandes entreprises du BTP, a accepté l'effort demandé, qui s'est traduit par l'émission de 800 millions de francs de titres subordonnés à durée indéterminée (TSDI). En outre, la Caisse des dépôts et consignations a dû intervenir à la demande des pouvoirs publics pour se substituer, temporairement, aux grandes entreprises n'assurant pas leur part de financement, à hauteur de 250 millions de francs.

Simultanément, la Compagnie du BTP a assigné les grandes entreprises devant le tribunal de commerce 92( * ) pour les contraindre à participer à ce plan. Elle a obtenu satisfaction en première instance mais les entreprises ont fait appel.

En raison de ce soutien financier, la Compagnie du BTP n'a pas fait faillite. Elle a mené un programme important de cession d'actif dès l'automne 1995 et a notamment signé un protocole de cession de la BTP-Banque au groupe du Crédit coopératif.

Toutefois, pour permettre cette cession et assurer l'extinction des dernières activités de la Compagnie, les actionnaires ont de nouveau été sollicités dans le cadre de l'article 52 de la "loi bancaire" précitée pour garantir à la Compagnie du BTP les ressources nécessaires à l'apurement de tout son passif. L'enveloppe de cette garantie s'est de nouveau élevée à 800 millions de francs Devant le refus des grandes entreprises du BTP de participer à cette recapitalisation, la Caisse des dépôts et consignations s'est une nouvelle fois et, à la demande de l'Etat substituée aux actionnaires défaillants pour un montant de 250 millions de francs. En outre, elle a dû financer la part du Crédit foncier, soit 90 millions de francs, celui-ci se trouvant dans l'incapacité d'avancer une telle somme.

Pour chacune de ces opérations de recapitalisation imposées par l'Etat à la Caisse des dépôts, l'Etat s'est engagé à ce que cette dernière ne subisse aucune perte. Il anticipait en effet sur le jugement de la Cour d'appel, espérant ainsi contraindre les grandes entreprises du BTP à souscrire la part leur incombant et ainsi permettre l'émission de titres souscrits à durée indéterminée permettant la recapitalisation à hauteur de 800 millions de francs de la Compagnie du BTP.

Or, la Cour d'appel 93( * ) a infirmé le jugement du tribunal de commerce. La Compagnie du BTP s'est pourvue en cassation mais les chances d'obtenir une participation financière de la part des grandes entreprises du BTP semblent aujourd'hui très faibles.

Pour l'Etat, cela signifie qu'il aura à rembourser à la Caisse des dépôts et consignations les sommes pour lesquelles il avait accordé sa garantie.

Or, aucune de ces garanties n'a fait l'objet d'une information du Parlement, et a fortiori, d'une demande d'autorisation. Cependant, elles risquent aujourd'hui d'avoir à jouer. C'est pourquoi le gouvernement a besoin de faire valider ces deux garanties pour leur donner une existence juridique et pouvoir les provisionner dans l'article 90 "garanties diverses" du chapitre 14-01 du budget des charges communes .

B. LA VALIDATION PROPOSÉE PAR LE GOUVERNEMENT ET CELLE ACCEPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article propose donc que, "sous réserve des décisions ayant force de chose jugée, sont validés dans la limite de 590 millions de francs en principal, dans la mesure où ils seraient contestés sur le fondement de l'absence d'autorisation législative, les actes accomplis et les garanties accordées par l'Etat dans le cadre de l'opération de recapitalisation de 1995, et de l'opération de couverture d'insuffisance d'actif en 1996, de la société dénommée Compagnie-BTP".

Votre rapporteur tient à faire remarquer que le gouvernement avait d'abord proposé à la commission des finances de l'Assemblée nationale une validation plus large qui ne mentionnait ni le montant de la garantie ni les opérations concernées. Devant le refus de cette dernière de voter cet article en l'état, le Gouvernement l'a rectifié pour le compléter.

Le montant de la garantie faisant l'objet de la validation s'élève à 590 millions de francs en principal. Cette somme correspond aux deux contributions de 250 millions de francs que n'ont pas payées les grandes entreprises du BTP et à la contribution du Crédit foncier de 90 millions de francs que ce dernier n'a pas pu verser. Cette somme ne comprend cependant pas les intérêts que l'Etat aura également à verser à la Caisse des dépôts et consignations pour compenser le manque à gagner que constitue l'immobilisation de cet argent.

II - UNE VALIDATION CRITIQUABLE SUR LA FORME ET SUR LE FOND

A. UN ENGAGEMENT DES DENIERS PUBLICS SANS AUTORISATION PREALABLE


L'article 47 de la constitution du 4 octobre 1958 dispose que " le Parlement vote les projets de loi de finances dans les conditions prévues par une loi organique".

Par ailleurs, l'article premier de l'ordonnance n °59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances dispose que :

" Les lois de finances déterminent la nature, le montant et l'affectation des ressources et des charges de l'Etat, compte tenu d'un équilibre économique et financier qu'elles définissent.

Les dispositions législatives destinées à organiser l'information et le contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques ou à imposer aux agents des services publics des responsabilités pécuniaires sont contenues dans les lois de finances ".


Il résulte de ces dispositions que la décision d'octroi d'une garantie est bien une décision dont non seulement le Parlement doit être informé, mais également qu'il doit autoriser puisqu'une disposition de loi de finances est nécessaire pour toute souscription d'engagement financier par l'Etat.

La pratique suivie est différente dans la mesure où le Parlement est toujours mis devant le fait accompli. Certes, les principes de l'information du Parlement et de l'autorisation préalable doivent être conciliés avec la nécessité de préserver la souplesse du régime d'octroi de la garantie de l'Etat, conformément aux exigences de la vie économique. Mais ils doivent être défendus avec force au nom de la démocratie. En effet, les décisions d'octroi de garanties sont des charges publiques potentielles qui, si elles se réalisent, seront financées par les contribuables. Elles doivent donc être autorisées par les représentants de la nation.

La crise du secteur bancaire a fortement accru l'ampleur des garanties implicites accordées par l'Etat, au détriment du droit à l'information du Parlement. Or, cette tendance est d'autant plus critiquable qu'elle oblige le Parlement à entériner des décisions que, dans un autre contexte, il n'aurait pas nécessairement votées.

B. UNE VALIDATION QUI CONTRAINT LE PARLEMENT À ENTÉRINER DES DÉCISIONS QU'IL N'AURAIT PAS ACCEPTÉES NÉCESSAIREMENT.

La présente validation en constitue un exemple.

En effet, et bien que la Compagnie du BTP constitue un groupe bancaire privé et de petite taille, l'Etat a souhaité lui éviter de faire faillite.

En outre, il n'a pas jugé nécessaire d'avertir le Parlement, certain que l'obligation pour les grandes entreprises du BTP de participer à la recapitalisation de la Compagnie du BTP serait reconnue par la Cour d'appel et que la garantie accordée à la Caisse des dépôts et consignations n'aurait donc pas à jouer.

Or, dans l'hypothèse d'un examen par le Sénat du projet d'accord de garantie, il n'aurait pas été évident que ce dernier eût adopté la position du gouvernement. Celle-ci aurait été en tous les cas soumise à l'appréciation critique de la commission des finances. Elle va, en effet, à l'encontre de certaines remarques contenues dans le rapport d'information " Banques : votre santé nous intéresse " qui condamne et le dogme de l'immortalité et le principe de la solidarité illimitée des actionnaires.

1. Le dogme de l'immortalité des banques

Comme le rappelle le rapport "Banques " 94( * ) , "chaque fois que des établissements de crédit public ont connu des difficultés, l'Etat, actionnaire pendant les années 84-93 d'une grande partie (sinon la majeure) du secteur bancaire, a recapitalisé ces établissements (ce qui était normal) sans exiger de façon systématique une réduction des activités des établissements en mauvaise posture (ce qui non seulement constituait un encouragement à la mauvaise gestion, mais a entraîné des surcapacités). [...]"

"Indépendamment de la question de savoir si l'Etat a été un bon gestionnaire, qui sera évoquée plus loin, on remarquera qu'il n'a pas su traiter avec efficacité les difficultés de ses propres banques.

Schématiquement, l'Etat dispose de quatre moyens pour venir à la rescousse d'une banque défaillante. La liquidation
[...]. La fermeture par fusion [...]. Les dotations budgétaires, ou les garanties gouvernementales [...]. La nationalisation [...].

En écartant systématiquement l'option de la liquidation et celle de la vente, les gouvernements successifs n'ont fait que rendre ces options plus coûteuses, une fois l'inefficacité du renflouement avérée ."

Ces remarques s'appliquent parfaitement à la Compagnie du BTP. Non seulement ce groupe bancaire avait été privatisé, mais sa petite taille empêchait que son éventuelle faillite provoque un risque systémique.

2. Le principe de la solidarité illimitée des actionnaires

Lors de l'examen de cet article à l'Assemblée nationale, le rapporteur général de la commission des finances s'est déclaré défavorable à cette mesure. Elle reviendrait en effet à accepter que l'Etat prenne en charge les conséquences du refus des grands groupes du BTP de participer à la recapitalisation de BTP-Banque, refus qui serait, selon lui, contraire à la loi bancaire et aux engagements pris.

Votre rapporteur ne partage pas ce sentiment.

D'une part, la " loi bancaire " ne contraint pas les actionnaires à fournir de soutien financier à un établissement de crédit en difficulté. L'alinéa premier de l'article 52 de la loi bancaire du 24 janvier 1984 prévoit seulement que le gouverneur de la Banque de France " invite " les actionnaires ou sociétaires d'un établissement de crédit à fournir à celui-ci le soutien qui lui est nécessaire. Cette invitation n'est pas coercitive, aucune sanction n'est prévue en cas de refus des actionnaires. Il serait en effet économiquement très dommageable de pouvoir obliger des actionnaires à "recapitaliser un établissement dont ils savent par avance qu'il va faire l'objet d'un retrait d'agrément ou d'une liquidation." 95( * )

D'autre part, dans le cas de la Compagnie du BTP, la Cour d'appel de Paris a estimé que les termes du document souscrit par les grandes entreprises du BTP, dans lequel elles s'engagent à prendre "d'une part les mesures permettant de couvrir les risques latents de pertes, d'autre part les dispositions de caractère structurel permettant de régler durablement les difficultés de la Compagnie du BTP" n'étaient pas assez précis pour pouvoir en conclure que ces dernières avaient accepté l'émission de 800 millions de francs de titres subordonnés à durée indéterminée.

Cette validation est donc critiquable non seulement dans son principe, mais également dans son objet. Pour autant, votre rapporteur peut difficilement proposer de la refuser. En effet, une telle attitude conduirait à faire peser sur la Caisse des dépôts et des consignations les conséquences financières des décisions de l'Etat. Votre commission est donc en quelque sorte tenue par les conséquences des actes qu'il s'agit aujourd'hui de valider.

Votre rapporteur souhaite cependant que le ministre précise en séance publique les modalités d'information des commissions des finances en temps réel sur les garanties que le gouvernement pourrait accorder à l'avenir.
Certes, votre rapporteur est conscient de la difficulté d'arriver à concilier l'information du Parlement avec l'urgence et la discrétion dans lesquelles une telle décision est prise. Plusieurs solutions sont envisageables, comme, par exemple, la tenue d'une réunion à huis clos au sein de la commission des finances. Votre rapporteur compte sur le débat en séance publique pour que cette question fondamentale du respect des droits des contribuables soit abordée et pour que le ministre y apporte une réponse constructive.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 29 avril 1998, sous la présidence de M. Christian Poncelet, la commission a d'abord procédé à l'examen du rapport de M. Alain Lambert, rapporteur général , et de M. Philippe Marini (Titre II) sur le projet de loi n° 373 (1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant diverses dispositions d' ordre économique et financier .

La commission a examiné, en premier lieu, le Titre premier, relatif aux dispositions concernant les simplifications administratives.

La commission a adopté sans modification l' article premier relatif à l'harmonisation de l'assiette des contributions dues par les employeurs au titre de la formation professionnelle continue, l' article 2 relatif à la suppression de l'autorisation préalable en matière de télétransmission de factures, l' article 3 relatif à l'harmonisation des dates de dépôt des principales déclarations professionnelles, l' article 3 bis (nouveau) relatif à l'harmonisation des délais concernant les obligations fiscales liées à la cession ou à la cessation d'activité, l' article 4 relatif à la simplification des dispositions relatives aux régimes d'imposition, l' article 5 relatif à la simplification de la gestion des emplois occasionnels, l' article 6 relatif à la suppression de la déclaration d'embauche et de licenciement aux caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), l'article 7 relatif à la suppression de l'obligation de tenue du livre de paie et à la simplification du bulletin de paie, l' article 8 relatif à l'aménagement des règles de prescription applicables aux majorations de retard, l' article 9 relatif au délai d'inscription des créances sociales au greffe du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance, l' article 10 relatif à l'autorisation d'exercer une activité commerciale dans un local d'habitation et l' article 11 relatif à la modification du mécanisme de la déduction en cascade de la TVA en cas d'autoliquidation.

Elle a ensuite adopté deux articles additionnels présentés par M. Alain Lambert, rapporteur , après l'article 11 relatifs respectivement au droit d'option des collectivités locales pour l'assujettissement à la TVA au titre des déchetteries et, pour les réseaux de chaleur utilisant du bois, au taux réduit de TVA applicable au bois de chauffage.

A l' article 11 bis (nouveau) relatif à la prorogation du régime d'amortissement des logements locatifs neufs, M. Jean-Philippe Lachenaud a souligné l'importance de ce dispositif, facteur de développement du secteur immobilier. M. Philippe Marini a rappelé que le Gouvernement avait choisi de se rallier à la prorogation d'un an de l'"amortissement Périssol". M. Alain Lambert, rapporteur , a fait part de sa volonté de demander, en séance publique, des explications au Gouvernement, sur les réflexions qu'il mène en matière d'incitations à la construction. M. Henri Collard a regretté la trop courte durée de cette prolongation. La commission a ensuite adopté cet article sans modification, ainsi que l' article 11 ter (nouveau) relatif à l'extension du taux réduit de la TVA sur le logement social aux acquisitions de terrains à bâtir des sociétés d'économie mixte.

Puis, la commission a examiné le titre II portant diverses dispositions relatives à l'adaptation de la législation française et à la modernisation des activités financières en vue de la troisième phase de l'Union économique et monétaire, sur le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur (le compte-rendu de l'examen du titre II figure dans le tome II du présent rapport) .

La commission a alors examiné le Titre III, relatif aux dispositions concernant le secteur public et les procédures publiques.

A l' article 35 relatif au schéma directeur de desserte gazière, la commission a adopté, sur proposition de M. Alain Lambert, rapporteur, un amendement visant à autoriser les collectivités locales à entrer dans le capital des distributeurs de gaz qui desservent leur territoire, et un amendement de précision. M. Michel Charasse s'est demandé, si dans la mesure où le plan de desserte gazière est révisé tous les trois ans, Gaz de France ne risquait pas de mettre à profit le délai de trois ans qui lui était accordé pour retarder la desserte des communes qu'il est censé desservir sans que ces dernières puissent recourir à l'opérateur de leur choix. M. Alain Lambert, rapporteur , lui a indiqué que la rédaction restrictive de l'article 35, adoptée par l'Assemblée nationale, pourrait accroître en effet ce risque. M. Christian Poncelet , président , a souligné que seules les communes non rentables pourraient être desservies par des entreprises du secteur privé. La commission a adopté l'article 35 ainsi amendé.

A l' article 36 relatif à l'ouverture du capital et à l'actionnariat salarié de la Compagnie nationale Air France, M. Alain Lambert, rapporteur , s'est demandé si le projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier était le cadre le plus approprié pour traiter de ce sujet très important. Il a également rappelé la réaction hostile des salariés de la Compagnie nationale d'Air France à cette mesure et il a souligné que la commission s'était déjà prononcée en faveur de la privatisation d'Air France. M. Michel Charasse a fait remarquer que cet article posait un problème juridique, dans la mesure où son entrée en vigueur était subordonnée à la conclusion d'un accord professionnel qui n'a pas été encore signé et qui n'est pas connu du Parlement. Mme Marie-Claude Beaudeau s'est déclarée défavorable à la logique de privatisation évoquée par le rapporteur. Après l'intervention du président Christian Poncelet , la commission a adopté l'amendement de suppression proposé par M. Alain Lambert, rapporteur.

Puis, la commission a adopté sans modification l' article 37 relatif au régime des actifs de la Société nationale des poudres et explosifs, l' article 38 relatif à la modification des règles d'attribution du versement transport en Ile-de-France, et l' article 38 bis (nouveau) relatif à l'extension des compétences de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) à la transformation en logements de locaux agricoles situés dans une zone de revitalisation.

A l' article 38 ter (nouveau) relatif à l'aménagement du statut des sociétés anonymes coopératives d'HLM, la commission a adopté un amendement présenté par son rapporteur et visant à supprimer le II de cet article, puis l'article ainsi amendé.

Par ailleurs, la commission a adopté, sans modification, l' article 38 quater relatif à la transformation des sociétés coopératives de location-attribution en sociétés coopératives de production d'HLM et l' article 38 quinquies (nouveau) relatif au régime fiscal des ventes de logements sociaux à leurs occupants.

La commission a alors examiné le Titre IV, relatif aux dispositions fiscales et financières relatives à la protection de l'environnement et à la santé publique.

Après les interventions de MM. Alain Lambert, rapporteur et Christian Poncelet, président , et tout en soulignant son accord de principe sur l'esprit de cet article, la commission a réservé son vote sur l' article 39 relatif à la modification des modalités d'évaluation de la puissance administrative de certaines catégories de véhicules, afin de permettre à son rapporteur d'analyser l'étude reçue le matin même et qui avait été demandée au Gouvernement pour connaître l'incidence de cette réforme sur les recettes des collectivités locales.

Puis elle a adopté, sans modification, l' article 40 relatif à l'adaptation du régime de responsabilité civile et de l'obligation d'assurance des propriétaires de navires pour les dommages résultant de la pollution par les hydrocarbures.

A l' article 41 relatif au financement de l'élimination des farines animales non conformes, la commission a examiné un amendement proposé par M. Alain Lambert , rapporteur, visant à relever le seuil d'exonération du paiement de la taxe additionnelle à la taxe d'équarrissage de trois millions de francs de chiffre d'affaires hors taxe à cinq millions. La commission s'est félicitée de cet amendement et elle a adopté l'article ainsi amendé.

Elle a également adopté l' article 41 bis (nouveau) relatif à l'élargissement des missions du fonds de gestion de l'espace rural.

La commission a ensuite examiné les dispositions diverses du Titre V .

Elle a adopté, sans modification, l' article 42 A (nouveau) relatif à l'extension du régime des scissions aux caisses de crédit municipal, l' article 42 relatif à l'aménagement des modalités de paiement des impôts par virement ou prélèvement automatique, l' article 43 relatif aux emprunts russes, après les interventions de MM. Philippe Marini, Alain Lambert, rapporteur, et Christian Poncelet, président, et l' article 44 relatif à la gestion administrative et financière de l'institut d'études politiques de Paris. A l' article 45 relatif au prélèvement sur l'Association de gestion du fonds des formations en alternance (AGEFAL), M. Alain Lambert , rapporteur , a fait remarquer que cette mesure, imposée par le Gouvernement, avait déjà été dénoncée par la commission. M. Christian Poncelet , président , a craint que le rejet de cette mesure ne soit interprété comme une volonté d'obstruction systématique du Sénat. M. Philippe Marini a souligné l'importance d'adopter une attitude cohérente avec les prises de position antérieures de la commission des finances.

A l' article 46 relatif à la limitation de l'amortissement des biens donnés en location par une société de personnes, la commission a adopté deux amendements de son rapporteur tendant, d'une part, à modifier la base de calcul de l'amortissement du bien dont l'acquisition a été agréée, et d'autre part, à supprimer le plafond d'imputation des déficits fixé à 25 % du résultat imposable des associés de la société de personnes. M. Jacques Oudin a considéré que l'article 46 constituait un pâle succédané du dispositif quirataire voté en 1996. Il a également observé que le plafond de 25 % du résultat imposable des associés pouvait être détourné en multipliant le nombre des actionnaires et il a fait part de son intention de présenter des amendements sur ce sujet lors de la prochaine réunion de la commission. La commission a alors adopté cet article ainsi amendé.

A l' article 46 bis (nouveau) relatif à la taxe communale sur les pylônes de téléphonie mobile, M. René Trégouët a fait part de sa crainte de voir les investissements des opérateurs de téléphonie mobile retardés, voire découragés en zone rurale en cas d'adoption de cette mesure. A cet égard, M. Philippe Marini a déclaré que les départements ruraux ne seraient pas les plus défavorisés. Puis MM. Jacques Oudin et Henri Collard ont souligné l'intérêt d'une telle ressource pour les communes concernées. La commission a ensuite adopté sans modification cet article ainsi que l' article 47 relatif à l'abaissement du seuil d'autorisation de cinémas "multiplexes".

A l' article 48 (nouveau) relatif à la dérogation à l'obligation d'établissement d'un budget annexe pour les services de distribution d'eau potable et d'assainissement (pour les communes de moins de 500 habitants), M. Jean-Philippe Lachenaud a souligné qu'il s'opposerait, en accord avec M. Joël Bourdin, à l'adoption de cette mesure, qui porte atteinte à la transparence du financement de la politique de l'eau. M. Jacques Oudin s'est, pour sa part, déclaré partagé entre un souci de rigueur et la volonté d'alléger les contraintes administratives pesant sur les petites communes. Mme Maryse Bergé-Lavigne a insisté sur ce point, en rappelant que les petites communes situées dans les zones de montagne subissaient de très lourdes contraintes au titre de la gestion de l'eau et qu'il convenait, en conséquence, d'adopter cette disposition. Puis M. Alain Lambert, rapporteur , a proposé de s'en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet article. La commission a suivi cette suggestion.

Puis la commission s'en est remise à la sagesse du Sénat sur l' article 49 (nouveau) relatif à la publicité des boissons alcooliques et elle a adopté, sans modification, l' article 50 (nouveau) relatif à l'extension de la taxe à l'essieu aux véhicules de plus de 12 tonnes, l' article 51 (nouveau) relatif au régime fiscal transitoire pour l'imposition des recettes accessoires des exploitants agricoles, l' article 52 (nouveau) relatif à l'harmonisation du code général des impôts avec la procédure permettant de considérer comme adopté, sans vote, le budget régional, l' article 53 (nouveau) relatif au dispositif de sortie des prorogations du délai accordé pour construire sur les terrains à bâtir acquis avant le 31 décembre 1993 et l' article 54 (nouveau) relatif à la création d'assistants spécialisés auprès de cours d'appel et de tribunaux de grande instance.

A l' article 55 (nouveau) relatif à l'exonération de cotisations sociales sur les options d'achat ou de souscription d'actions déjà attribuées par les sociétés de moins de quinze ans, la commission a adopté un amendement visant à étendre cette mesure à toutes les sociétés, quelle que soit leur ancienneté, et elle a adopté cet article ainsi amendé. M. Philippe Marini s'est félicité du vote de cet amendement.

Elle a ensuite adopté deux articles additionnels après l'article 55 visant, d'une part, à définir des périodes d'interdiction d'attribution d'options d'achat ou de souscription d'actions pour les sociétés cotées et d'autre part, à donner une base légale incontestable à la fonction de coordination conférée à la Cour des Comptes à l'égard des comités administratifs chargés de vérifier les comptes des organismes locaux de sécurité sociale. M. Jacques Oudin s'est félicité du vote de cet amendement qui n'avait pas pu être adopté en 1994, mais qui se révèle pourtant indispensable pour compléter le dispositif de contrôle de la sécurité sociale.

Puis, la commission a adopté sans modification l' article 56 (nouveau) relatif à la possibilité de transférer la propriété des édifices des cultes aux établissements publics de coopération intercommunale, l' article 57 (nouveau) relatif aux mesures de promotion ou de nomination des agents des douanes en cas d'actes de bravoure, l' article 58 (nouveau) relatif à la taxe au profit de la Chambre nationale de la batellerie artisanale, l' article 59 (nouveau) relatif au renforcement de la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants, l' article 60 (nouveau) relatif à la prolongation de la mise à disposition de fonctionnaires auprès de la Caisse nationale de prévoyance (CNP) Assurances SA, l' article 61 (nouveau) relatif à la date d'entrée en vigueur du doublement du plafond de la réduction d'impôt pour primes d'hospitalisation et de cure et l' article 62 (nouveau) relatif à la validation des opérations de recapitalisation de la compagnie du BTP.

La commission a ensuite approuvé, à la majorité des membres présents, l'ensemble du projet de loi ainsi modifié, à l'exception de l'article 39 sur lequel elle a réservé sa position.



1 N° 3492 Assemblée nationale, enregistré à la présidence le 2 avril 1997.

2 N° 96-314 du 12 avril 1996.

3 Celle-ci était prévue par l'article 44 du projet de DDOEF de 1996

4 Au sens, notamment de l'article 231 du code général des impôts, il s'agit des " traitements, salaires, indemnités et émoluments, y compris la valeur des avantages en nature ".

5 L'article L.242-1 du code de la sécurité sociale les définit comme les " sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire ".

6 D'autres modifications resteront à effectuer, mais relèveront, elles, de décrets de codification : il s'agira ainsi, par exemple, de procéder à un tel remplacement dans les articles 163 de l'annexe II et 58 J de l'annexe III du code général des impôts.

7 Le contribuable doit alors déclarer le montant exact de son bénéfice.

8 Le bénéfice fait l'objet d'une évaluation par le service des impôts en fonction des renseignements fournis par le contribuable et de tous autres éléments en sa possession.

9 Le bénéfice imposable est calculé par application sur le montant des recettes déclarées d'un abattement de 25 % représentatif de frais.

10 Cette mesure s'inspire du titre emploi saisonnier agricole (TESA) qui prévoit de regrouper 10 formalités liées à l'embauche et à l'emploi d'un travailleur saisonnier.

11 L'affiliation désigne le rattachement d'une personne à un régime de sécurité sociale et à celle des caisses de ce régime qui doit lui verser ses prestations. L'immatriculation est l'opération administrative qui matérialise cet assujettissement par son inscription sous forme d'un numéro codifié de valeur permanente. Ces deux opérations administratives distinctes, immatriculation et affiliation, se réalisent dans la quasi totalité des cas de façon simultanée.

12 Voir "Pour une fiscalité compétitive au service de l'emploi" - Sénat n° 118 - 1997/1998 - Alain Lambert - page 41 (développement sur la notion de "coin socio-fiscal).

13 Il s'agissait des services locaux exploités sous forme de régies, de sociétés d'économie mixte dans lesquelles les collectivités détenaient plus de la majorité du capital ou bien de SICAE (Sociétés d'intérêt collectif agricole pour l'électricité) ou de coopératives d'usagers.

14 Le seuil B/I est une mesure de profitabilité où B est la somme des bénéfices actualisés et I le montant total actualisé des investissements. La circulaire du 3 mai 1996 a porté de 20 à 25 ans la durée d'actualisation.

15 Déclaration du Secrétaire d'Etat à l'industrie, M. Christian Pierret, le 8 décembre 1997 à l'issue du Conseil au cours duquel les ministres chargés de l'énergie sont parvenus à un accord sur la libéralisation du marché du gaz.

16 Le rapport de l'Assemblée fait état d'un rythme de 1.000 à 1.200 communes desservies sur cette période contre 600 à 750 selon les objectifs assignés à Gaz de France par le contrat Etat-entreprise du 1 er avril 1997. Le Gouvernement a déclaré que le coût engendré par ces investissements supplémentaires serait compensé par un avenant au contrat d'entreprise.

17 Et si même elle l'était, il faudrait y voir un aiguillon salutaire pour Gaz de France.

18 Cet amendement est inspiré de l'article 8 de la loi de nationalisation de 1946 qui exclut du champ de la nationalisation les producteurs et transporteurs de gaz si le transport est assuré par un établissement public ou une société dont le capital est détenu à hauteur de 30 % au moins par l'Etat ou des établissements publics.

19 modifié par la loi dite
Armengaud n° 46-1090 du 2 août 1949, puis par la loi de privatisation n° 93-923 du 19 juillet 1993.

20 Le taux de marge rapporte l'excédent brut d'exploitation à la valeur ajoutée par la compagnie.

21 Jean Faure, le président de la SNPE a récemment annoncé un profit net de 50 millions de francs en 1997, contre 39 millions en 1996. Le résultat courant est passé de 143 à 210 millions de francs et le résultat d'exploitation de 165 à 209 millions de francs.

22 Le ministre de la défense a précisé devant les députés que le déficit était supérieur à 100 millions de francs en 1997, avant qu'une subvention de 50 millions de francs prélevée sur le budget de l'Etat le ramène à 60 millions de francs. JO des débats, 2 ème séance du 1 er avril 1997, p. 2394.

23 Regroupement d'activité, mise en oeuvre de plusieurs plans d'adaptation des effectifs sur les sites de Bergerac, de Sorgues et d'Angoulême.

24 La loi fixe les règles concernant (...) les nationalisations d'entreprises et le transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé.

25 Rapport AN, n° 781, p. 334.

26 Le périmètre de la " région des transports parisiens " coïncide aujourd'hui avec le territoire de la région Ile-de-France.

27 Le montant du financement des transports collectifs en Ile-de-France chaque année est d'environ 42 milliards de francs, dont 32 de fonctionnement et 10 d'investissements. Le VT représente donc presque 30% des ressources consacrées aux transports collectifs en Ile-de-France. En province, le taux est légèrement supérieur à 40% (le produit du VT s'élevait à 8,7 MDF en 1995, pour des dépenses totales de 21,5MDF).

28 Telle est la formule retenue par les comptes d'exploitation de la RATP et de la SNCF.

29 Le manque de rationalité du processus de prise de décision en matière d'infrastructures ne se résume évidemment pas au fait que la région soit absente du STP. Les enjeux sont bien identifiés par la Cour des comptes et par notre collègue député Michel Bouvard.

30 L'article 2531-7 organise les modalités de perception de frais de recouvrement par les organismes collecteurs.

31 Celle-ci faisant l'objet de modifications à l'article 50 du présent projet de loi.

32 Circulaire du 28 décembre 1956 , du Secrétariat d'Etat aux travaux publics, aux transports et au tourisme, relative à l'évaluation de la puissance administrative des différentes catégories de véhicules automobiles et circulaire du 23 décembre 1977 du ministère de l'équipement et de l'aménagement du territoire, relative à l'évaluation de la puissance administrative de certaines catégories de véhicules

33 La validation législative de ces deux circulaires faisait suite à un arrêt de la Cour de Cassation du 6 avril 1993 qui constatait que la " taxe différentielle sur les véhicules à moteur " était sans base légale, faute pour le législateur d'avoir précisé son assiette.

34 Rapport général n° 86 de la Commission des finances du Sénat sur le projet de loi de finances pour 1997, 21 novembre 1996, page 150. Rapport général n° 85 de la Commission des finances du Sénat sur le projet de loi de finances pour 1998, 20 novembre 1997, page 107.

35 Pour des moteurs correspondants, la cylindrée du moteur diesel est légèrement supérieure à celle du moteur essence, ce qui explique le calcul d'un écart de 20 à 30 %.

36 Cette étude est réalisée à partir des immatriculations des véhicules neufs vendus en France métropolitaine en 1997, couverts par la directive 93/116 pour lesquels les mesures d'émission de CO² sont disponible, soit 77,6 % du total des immatriculations de l'année 1997. Pour évaluer les recettes fiscales, le tarif des vignettes est celui indiqué par la direction générale des impôts au titre de la vignette millésime " 1998 ".

37 Source : Direction générale des collectivités locales du ministère de l'intérieur

38 Séance du 9 décembre 1997, J.O. Débats du 10 décembre page 5044.

39 L'article 169 du Traité sur l'Union européenne prévoit que "
si la Commission estime qu'un Etat membre a manqué à une des obligations qui lui incombent en vertu du présent traité, elle émet un avis motivé à ce sujet, après avoir mis cet Etat en mesure de présenter ses observations. Si l'Etat en cause ne se conforme pas à cet avis dans le délai déterminé par la Commission, celle-ci peut saisir la Cour de justice "

40 Le professeur Dormont est directeur du laboratoire de neurovirologie du CEA.

41 Les paramètres minimaux pour la transformation de déchets animaux de mammifères, à l'exclusion des graisses, sont : des particules d'une taille maximale de 50 millimètres, une température de chauffage supérieure à 133° celsius, une durée de chauffage de 20 minutes, sous une pression (absolue) de 3 bars.

42 Les entreprises fonctionnant pour la plupart en flux tendus, il n'y a pratiquement pas de stock.

43 Il a été fait appel au FEOGA car les crédits budgétaires destinés à subventionner ce type d'investissement ne permettaient de financer l'effort particulier induit par la nécessité d'accélérer la mise aux normes.

44 Le journal officiel du 12 avril 1998 a complété la liste des établissements aux normes parue au JO du 11 février 1998, qui comprenait cinq sites, par un sixième, situé à Auch. Huit autres devraient être régularisés avant la fin de l'été 1998. Selon le président du Syndicat des industries françaises de co-produits animaux, les sept premiers sites dont la mise aux normes est prévue ont la capacité de traiter 70% de la production de farines animales .

45 La seule incertitude qui pèse sur le scénario du " tout retraitement " réside dans la baisse du cours du soja qui, si elle devait se poursuivre dans des proportions importantes, pourrait priver les farines animales de tout caractère compétitif, rendant leur production inutile et leur incinération fatale.

46 Le chiffre de 250 millions de francs résulte de l'étude d'impact à laquelle s'est livré la Gouvernement. Toutefois, le rapport de l'Assemblée nationale retient le chiffre de 290 millions de francs.

47 Données brutes de production (abattages, production indigène brute et consommation indigènes brutes) : SCEES-1995 ; Données de production en valeur : AGRESTE-Enquête annuelle d'entreprises 1994 auprès des industriels agro-alimentaires (abattoirs, ateliers de découpe de 10 salariés et plus) ; données du commerce extérieur en valeur : AGRESTE, Douanes-1995 ; Comptes du commerce de vente au détail par produit, année 1994 : Annuaire statistique de la France-INSEE-édition 1996 ; Enquête annuelle du commerce 1994 pour estimer le nombre de commerçants et leur chiffre d'affaire : Annuaire statistique de la France-INSEE-édition 1996.

48 JO Débats Assemblée nationale, 2 avril 1998 p. 2437

49 JO Débats Assemblée nationale, 2 avril 1998 p. 2438

50 Il s'agit d'une part au titre du programme de prévention " d'accroître les formations en alternance " pour un coût estimé en 1998 à 355 millions de francs, et d'autre part, en application de l'article 13 du projet de loi d'orientation d'étendre " aux demandeurs d'emploi de 26 ans et plus rencontrant des difficultés sociales et professionnelles " les contrats de qualification pour un montant de 114 millions de francs en 1998

51 Mme Martine AUBRY, ministre de l'emploi et de la solidarité, :"l'AGEFAL est aujourd'hui le dispositif le plus excédentaire en matière de prélèvement de la collecte pour la formation professionnelle" - JO Débats Sénat 1er décembre 1997, p. 4300. Discussion des crédits de l'emploi et de la solidarité - Projet de loi de finances pour 1998.

52 Cet adverbe fait référence aux biens loués par l'intermédiaire de sociétés visées à l'article 8 du CGI, de copropriétés de navires ou d'étalons (articles 8
quater et 8 quinquies ) ou de GIE, GIP ou GEIE (articles 239 quater , 239 quater B et 239 quater C) lorsque les associés, copropriétaires ou membres sont des personnes physiques.

53 Frais d'entretien, de réparation, d'assurance, frais financiers, impôts et taxes.

54 Il s'agit de personnes morales détenant des droits dans une société ou un groupement mentionnés aux articles 8, 8 quinquies, 239 quater, 239 quater B ou 239 quater C ou de groupements

55 L'administration ne remet pas en cause les durées d'amortissement retenues par une entreprise en raison de circonstances particulières lorsqu'elles ne s'écartent pas de plus de 20 % des usages professionnels.

56 Au demeurant, si l'objectif du gouvernement était de limiter la dépense fiscale en fixant un plafond d'imputation, il serait aisément détourné par la multiplication du nombre des investisseurs et donc la base de résultats imposables sur laquelle viendront s'imputer les déficits.

57 Rapport AN n° 781, page 475.

58 L'article 72 de la loi de finances pour 1996 a interdit aux non professionnels la possibilité d'imputer directement sur leur revenu global les déficits générés par leurs activités industrielles et commerciales accessoires. Ces déficits ne peuvent plus désormais être imputés que sur des revenus de même nature.

59 Rapport AN n° 781, page 476.

60 "Rapport sur les actions menées en faveur de la politique maritime et littorale de la France" par M. Philippe Marini, sénateur. N° 771 Assemblée Nationale. N° 345 Sénat (6 mars 1998)

61 D'une part, le e) de l'article R. 422-2 du code de l'urbanisme prévoit une exemption de permis de construire " en ce qui concerne les activités de télécommunications autorisées en vertu de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications [...] les poteaux et pylônes de plus de 12 mètres au dessus du sol et les installations qu'ils supportent ; " ; d'autre part, l'article L. 422-2 du code de l'urbanisme, dispose que les " constructions ou travaux exemptés du permis de construire [...] font l'objet d'une déclaration auprès du maire de la commune avant le commencement des travaux. ".

62 Sachant que cet opérateur précise que selon que la définition retenue pour l'assiette de cette, le montant du prélèvement se situerait entre 56 millions de francs et 205 millions de francs par an.

63 Sachant que cet opérateur possède le réseau le plus récent, c'est à dire le moins étendu, et qu'en raison de sa technologie spécifique, celui-ci doit comporter un plus grand densité d'installations que celui de ses concurrents.

64 A cet égard, votre commission des finances a reçu des informations en provenance de France Télécom et de SFR-Cégétel indiquant qu'ils versent chacun 54 millions de francs au titre de la redevance annuelle pour l'utilisation des fréquences radioélectriques.

65 Cf à ce sujet l'analyse développée par M. Jean Aury dans la revue mensuelle " Maires de France " n° 23 de juin 1997.

66 Etablissements comportant au moins dix salles et offrant plus de 1.500 places.

67 L'article L. 2221-1 du code général des collectivités territoriales prévoit que les communes et les syndicats de communes peuvent gérer des services à caractère industriel et commercial, dont les conditions de fonctionnement sont similaires à celles des entreprises privées. Ces services doivent être financés par l'usager au travers d'une redevance, ce qui suppose la connaissance exacte du coût du service, connaissance qui ne peut s'obtenir que par l'individualisation des dépenses et des recettes qui s'y rapportent.

68 Cf. la réponse du 13 mai 1996 à la Question écrite n° 35997 de M. Maurice Depaix : " les services publics a caractère industriel et commercial s'équilibrent par la redevance perçue sur l'usager. Ce principe général, posé à l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales, a pour objet de maintenir une totale égalité de traitement entre la gestion privée ou déléguée et la gestion en régie directe. Simultanément, il garantit à la collectivité qui a compétence pour l'exercer une totale neutralité financière, puisque le coût se trouve intégralement répercuté sur l'usager . ".

69 Cf. Conseil d'Etat 14 avril 1995 " Consorts Dulière " : " Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le vote de participations du budget général de la commune au budget annexe du service de l'assainissement , au titre des exercices ci-dessus mentionnés, ait été justifié par l'une des raisons énoncées à l'article L. 322-5 [du code des communes, devenu l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales]; qu'il n'est pas non plus établi, contrairement aux allégations de la commune, qu'une partie d'ailleurs non précisée de ces subventions aurait été destinée à financer le réseau d'évacuation des eaux pluviales ; que ces participations correspondent, en réalité, à des subventions d'équilibre interdites par les dispositions législatives précitées ; qu'ainsi les délibérations par lesquelles le conseil municipal a voté ces participations sont entachées d'illégalité ; que les tarifs de la redevance d'assainissement qui ont été établis compte tenu de ces subventions illégales sont de ce fait entachés d'illégalité par voie de conséquence ".

70 La gestion d'un service en régie directe consiste à placer le service sous la responsabilité de la collectivité, celle-ci assurant seule la totalité du service, avec ses propres moyens.

71 Il n'existe pas de recensement officiel des formes juridiques retenues par les communes pour la gestion de leurs services d'eau et d'assainissement.

72 Le texte de l'article 49 reprend exactement celui de l'article 4 du décret de 1993, mais inverse l'ordre des membres de phrase.

73 relative à l'application par les Etats membres des taxes sur certains véhicules utilisés pour le transport de marchandises par route, ainsi que des péages et droits d'usage perçus pour l'utilisation de certaines infrastructures.

74 Article 6, paragraphe 5 de la directive.

75 Les véhicules utilitaires sont actuellement soumis à deux types de tarifs de vignette selon que leur puissance fiscale est comprise entre 12 et 16 chevaux ou selon qu'elle est égale ou excède 17 chevaux. Le tarif le moins élevé de la première catégorie est de 1.444 francs (Marne) et le tarif le plus élevé de la seconde catégorie est de 4.542 francs (Vaucluse). Le tarif moyen national pour les véhicules de la première catégorie est de 2.720 francs et le tarif moyen national pour les véhicules de la seconde catégorie est de 3.800 francs.

76 Loi de finances rectificative pour 1997 (n° 97-1239 du 29 décembre 1997)

77 Journal officiel des débats de l'Assemblée nationale de la 2 e séance du 2 avril 1998, page 2471.

78 Ces modifications figurent à l'article 3 de la loi n° 98-135 du 7 mars 1998 relative au fonctionnement des conseils régionaux insérant un article L. 4311-1-1 dans le code général des collectivités territoriales.

79 Ce décret a été pris sur la base de l'article 19 de la loi du 21 janvier 1995 de programmation et d'orientation relative à la sécurité qui précise que "le statut spécial de ces personnels peut déroger au statut général de la fonction publique afin d'adapter l'organisation des corps et des carrières aux missions spécifiques de la police nationale".

80 Faute de définition juridique précise, on considère que les bateaux qui n'appartiennent pas à des artisans, au sens de l'article 3 du décret du 14 mai 1984, relèvent de compagnies.

81 Par opposition à " marchandise spécialisée ". Les difficultés à définir les critères de cette distinction seront évoquées plus loin.

82 Une note de la direction des transports terrestres transmises à votre rapporteur (non datée) prévoyait également que les crédits du FACFA devaient servir à " motiver le regroupement des artisans en structures plus ou moins coopératives afin d'aborder au mieux les échéances de libéralisation du transport par voie d'eau ". Pourtant, il semble qu'aucun crédit ai jamais été dépensé à cette fin.

83 Selon l'article premier de la directive, le système d'affrètement au tour de rôle est " un système qui consiste à répartir dans une bourse d'affrètement, à partir de prix fixés préalablement et selon des conditions affichées, les demandes de transport émanant de la clientèle, selon le rang dans lequel les bateaux deviennent disponibles après leur déchargement. Les transporteurs sont invités, dans l'ordre de leur inscription à tour de rôle, à choisir successivement un transport parmi ceux qui sont offerts. Ceux qui ne choisissent pas conservent néanmoins le bénéfice du rang de leur inscription. "

84 Les Pays-Bas, où le transport fluvial est autrement développé qu'en France, ont adopté une stratégie différente. En effet, ils n'ont pas retenu la solution de mesures intermédiaires avant la libéralisation totale et s'apprêteraient, au contraire, à mettre entièrement fin au système du rôle dès la fin de l'année 1998. La Belgique, en revanche, a fait un choix comparable à celui de la France, avec une libéralisation en deux temps.

85 Selon les informations transmises par le Comité des armateurs fluviaux (CAF) à votre rapporteur, 4,6 des 5,6 milliards de tonnes kilométriques transportées chaque année par ses adhérents étaient redevables de la taxe FACFA.

86 L'article premier de la directive définit l'expression " perturbation grave du marché " comme " l'apparition (...) de problèmes spécifiques à ce marché de nature à entraîner un excédent grave, susceptible de persister, de l'offre par rapport à la demande et impliquant une menace sérieuse pour l'équilibre financier et la survie d'un nombre important d'entreprises de transports de marchandises par voie navigable, à condition que les prévisions à court et à moyen terme sur le marché considéré n'indiquent pas d'améliorations substantielles et durables ".

87 Le décret n° 96-584 du 27 septembre 1996 fixant les conditions d'utilisation par VNF des ressources du fonds d'assainissement des transports fluviaux de marchandises distingue d'ailleurs marchandises liquides et marchandises générales.

88 VNF, d'après les informations recueillies par votre rapporteur, identifie un bateau transportant des marchandises spécialisées au fait qu'il ne peut transporter qu'un seul type de marchandise, compte tenu du matériel spécifique dont il est équipé.

89 Dans la mesure où ces fonctionnaires dépendent de la Caisse des dépôts et consignations qui les paie sur ses ressources propres, le remboursement des "charges correspondantes" par la CNP Assurances SA se fait au profit de la Caisse des dépôts et consignations, et non au budget de l'Etat.

90 in R. CHAPUS, Droit administratif général, Tome II, 10ème édition 1997, p. 208.

91 JO Débats Assemblée nationale -2 avril 1998 - p. 2482.

92 Jugement du tribunal de commerce de Paris (19 e Chambre) en date du mardi 28 novembre 1995.

93 Arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 13 janvier 1998 (1 ère chambre, section A)

94 "Banques : votre santé nous intéresse" Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances (n° 52, 1996-1997, pages 56-57)

95 "Banques : votre santé nous intéresse" rapport précité,, page 68


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