II. LES DÉFIS ACTUELS

A. LE DÉFI ENVIRONNEMENTAL

Le défi environnemental peut être qualifié de " global ", en ce sens qu'il recouvre à la fois une dimension spatiale (il concerne l'ensemble de la planète) et temporelle (il touche aussi les générations futures). Nouveau paramètre de l'équation énergétique, il constitue sans doute un des principaux éléments que notre politique en ce domaine devra prendre en considération, ceci en concertation avec nos partenaires européens.

1. Les risques

La France est apparue au sommet de Kyoto comme un pays vertueux : elle est, parmi les pays de l'OCDE, un de ceux qui émet le plus bas taux de CO2 par habitant, essentiellement grâce à une large utilisation de l'énergie nucléaire et de l'hydraulique pour la production d'électricité.

Le risque environnemental ne doit pourtant pas être négligé, car malgré nos performances, le bilan tant en matière de pollution atmosphérique qu'en termes d'émission de gaz à effet de serre s'est dégradé au cours des dernières années.

Une pollution atmosphérique préoccupante

Celle-ci se manifeste tout d'abord par des pics de pollution qui frappent l'opinion publique. Ainsi, à Lyon, en janvier 1997, les autorités ont interdit la circulation des poids lourds après trois jours consécutifs de pollution au dioxyde d'azote de niveau 3 (à partir de 400 microgrammes/m 3 d'air) ; à Paris, le niveau 2 a été atteint le 10 mars et le 19 septembre 1997 et, le 1er octobre, le niveau 3 ayant été dépassé, le système de circulation alternée prévu par la loi sur la qualité de l'air du 30 décembre 1996 a été mis en place, dans la capitale et dans 22 communes limitrophes.

Toutefois, le vrai problème ne réside pas dans ces pics de pollution, mais dans l'exposition des individus à celle-ci tout au long de leur vie.

Dans ce domaine, on constate malheureusement que si certaines formes de pollution ont diminué, d'autres se sont transformées ou ont augmenté. Ainsi, on rejette globalement moins de poussières dans l'atmosphère mais celles qui sont émises par le secteur des transports sont plus nombreuses ; de plus, elles ont changé de nature et les poussières issues des trains du début du siècle étaient différentes de celles qui proviennent d'un moteur diesel et dont la dimension (0,2 u) leur permet de s'infiltrer dans le système respiratoire.

Un rapport récent du ministère de l'environnement indiquait que la qualité de l'air s'était améliorée depuis 1991, mais que les mesures variaient fortement en fonction des polluants : dans les agglomérations de plus de 100.000 habitants, la présence de plomb dans l'air, issu des carburants, est passée d'une moyenne annuelle maximale de 0,71 microgramme par mètre cube d'air en 1991 à 0,28 microgramme en 1996. Quant au dioxyde de soufre, qui constituait un polluant majeur il y a trente ans, et qui a été visé avec succès par la taxe sur la pollution atmosphérique, ses émissions ont été réduites de 20 % sur l'ensemble du territoire.

En revanche, les émissions de dioxyde d'azote et de monoxyde d'azote sont en hausse et sont dues, pour les trois-quarts selon Airparif (le réseau de surveillance de la qualité de l'air en Ile-de-France), à la circulation automobile et proviennent notamment des voitures fonctionnant au diesel ou à l'essence sans pot catalytique.

Enfin, la diffusion de dioxyde de carbone ou gaz carbonique (CO 2 ), polluant classé parmi les gaz à effet de serre, a augmenté de 2 % alors qu'on la pensait stabilisée.

TABLEAU SUR LES PARTICULES DANGEREUSES

Les transports et les activités industrielles et agricoles sont à l'origine de l'émission de polluants rejetés dans l'air :

Le dioxyde d'azote (NO 2 ) : puissant irritant des voies pulmonaires, il aggrave les symptômes des personnes atteintes de maladies respiratoires. 6 000 tonnes sont produites annuellement par le transport routier, soit douze fois moins que par le secteur agricole et forestier. Le seuil d'alerte (niveau 3) est atteint à partir de 400 microgrammes par mètre cube d'air. Les oxydes d'azote (NOX) contribuent également à la formation d'ozone.

L'ozone (O 3 ) : formé à partir de divers polluants atmosphériques (composés organiques volatils, hydrocarbures, solvants et oxydes d'azote) sous l'influence des rayons solaires, il occasionne des difficultés respiratoires notamment chez les enfants, les personnes âgées et les asthmatiques. A long terme, il peut provoquer une altération chronique des fonctions pulmonaires. L'ozone affecte également les végétaux. Le seuil d'alerte de niveau 3 est atteint à 360 microgrammes par mètre cube.

Le dioxyde de soufre (SO 2 ) : il peut occasionner des broncho-constrictions et des essoufflements chez les asthmatiques. Il provoquerait chaque année le "décès prématuré" de 215 personnes hospitalisées dans les grandes villes. 150 000 tonnes par an sont émises par les transports routiers, soit la moitié de ce qui est produit par les secteurs de l'énergie et de l'industrie de transformation. Le niveau 3 est atteint à 600 microgrammes par mètre cube d'air.

Le monoxyde de carbone (CO) : ce gaz peut aggraver les angines de poitrine et d'autres maladies coronariennes, altérer certaines fonctions du système nerveux et présenter un risque pour le développement du foetus. 5,2 millions de tonnes sont attribuées à la circulation routière, soit 46 % de la production nationale.

Le dioxyde de carbone (CO 2 ) : 118 millions de tonnes sont rejetées chaque année sur les routes, soit le tiers de la production française tous secteurs confondus. Classé parmi les gaz à effet de serre, il contribuerait au réchauffement du climat.

Les particules : les plus nocives sont d'une dimension inférieure à 10 microns, ce qui leur permet de s'infiltrer dans le système respiratoire. Produites entre 50 et 80 % par les véhicules automobiles, elles occasionnent des atteintes pulmonaires, particulièrement chez les enfants. Des études américaines montrent que l'exposition prolongée peut réduire l'espérance de vie et entraîner des risques de cancer. En France, elles seraient chaque année responsables de 870 morts prématurées chez des malades cardiaques ou insuffisants respiratoires. En zone urbaine, 90 % des émissions attribuables aux transports seraient issues de véhicules à moteur Diesel.

Source : Corinair-1994, Erpurs - AQMD-Californie.

Etude citée par "Le Monde" du 2 octobre 1997.

L'émission de gaz à effet de serre

Le rayonnement solaire est absorbé par la terre qui renvoie à son tour de la chaleur vers l'atmosphère, mais une partie de ce rayonnement thermique peut être piégée par certains gaz contenus dans la partie basse de l'atmosphère, la troposphère : vapeur d'eau, gaz carbonique, méthane, oxydes d'azote, ozone, fluoro carbures. Cet " effet de serre " entraîne un réchauffement de la terre qui est, à l'origine, bénéfique puisqu'il permet d'élever la température globale moyenne de notre planète de - 18° C à + 15° C. Toutefois, l'activité humaine a provoqué une forte et rapide augmentation de la concentration de gaz à effet de serre dans l'atmosphère. Ainsi pour le gaz carbonique, cette concentration est passée de 280 ppm (parties par millions) à 360 ppm en un siècle, alors que pour les 200.000 ans précédents, elle avait varié dans une fourchette de 170 ppm à 280 ppm.

L'accroissement de ce gaz dans l'atmosphère tient principalement à deux causes : la combustion brutale des substances fossiles, charbon et hydrocarbures gazeux et liquides (le pétrole) et la déforestation non compensée par le reboisement. Les émissions totales de CO 2 liées à l'activité humaine sont évaluées à environ 7,1 milliards de tonnes de carbone par an dont 5,5 milliards proviennent de l'utilisation d'énergies à base de combustibles fossiles et 1,6 milliard de la déforestation .

Selon les rapports du GIEC (Groupe intergouvernemental sur l'évolution du climat), la température de notre planète s'élèverait de 2° C d'ici 2100 si la concentration des gaz à effet de serre doublait. Cette hypothèse est optimiste car, si les émissions de gaz à effet de serre continuaient à progresser de 10 à 20 % par décennie, leur concentration pourrait tripler, voire quadrupler au cours du prochain siècle. Le GIEC estime qu'une augmentation de la température de 2° C entraînerait une élévation du niveau moyen des océans de 50 cm et aurait des conséquences très variables selon les régions du monde. Il prévoit une intensification du cycle hydrologique entraînant des sécheresses ou des inondations accrues, une modification de certains courants marins, une plus grande vulnérabilité de la santé humaine et la disparition de terres habitées ou cultivées.

Même si l'on peut espérer que ces prévisions seront tempérées par des phénomènes naturels encore mal connus et qu'il faut étudier très sérieusement (rétroaction des océans, courants marins, comportement des nuages et de la glace, effet parasite des aérosols, gaz, poussières ou cendres qui refroidissent l'atmosphère...), l'attitude à adopter devant l'accroissement de la concentration des gaz à effet de serre va au-delà du principe de précaution et débouche sur la nécessité d'une stricte réglementation des émissions polluantes.

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