III. VOTRE COMMISSION DES LOIS APPROUVE CETTE NOUVELLE RÉFORME DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE MAIS PROPOSE D'APPORTER PLUSIEURS AMÉNAGEMENTS AU PROJET DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Votre commission tient tout d'abord à souligner que cette nouvelle réforme du Conseil supérieur de la magistrature n'est sans doute pas la réforme la plus urgente à mener à bien en matière judiciaire.

En effet, la préoccupation essentielle des Français dans ce domaine tient d'abord à la lenteur et à l'engorgement de la justice quotidienne confrontée à un manque chronique de moyens, bien plus qu'à une éventuelle réforme du Conseil supérieur de la magistrature.

Ainsi que l'avait souligné votre commission dans le cadre de la mission d'information sur les moyens de la justice qu'elle avait constituée en 1996 sous la présidence de votre rapporteur, les réformes les plus prioritaires sont donc aujourd'hui celles qui concernent l'amélioration du fonctionnement de la justice au quotidien.

Votre commission approuve cependant les principaux objectifs poursuivis par le présent projet de loi constitutionnelle, à savoir l'extension des compétences du Conseil supérieur de la magistrature et l'ouverture de sa composition à une majorité de personnalités extérieures à la magistrature.

Elle vous propose néanmoins d'y apporter quelques aménagements et compléments.

Si elle est favorable à l'accroissement des prérogatives du Conseil supérieur de la magistrature à l'égard des magistrats du parquet, elle considère en revanche nécessaire le maintien de deux formations spécifiques respectivement compétentes à l'égard des magistrats du siège et des magistrats du parquet, en raison de la profonde différence de nature de leurs fonctions. Elle a par ailleurs jugé opportun de modifier les modalités prévues pour la désignation des membres du Conseil supérieur de la magistrature n'appartenant pas à la magistrature.

A. LA COMMISSION APPROUVE L'EXTENSION DES COMPÉTENCES DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE MAIS SOUHAITE ENCADRER LA PRATIQUE DES AVIS

En ce qui concerne les nominations , la commission se montre favorable à ce que soit désormais exigé un avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature pour les nominations des magistrats du parquet actuellement soumises à un simple avis.

Elle approuve également le transfert au CSM du pouvoir de prononcer les sanctions disciplinaires à l'encontre des magistrats du parquet, actuellement détenu par le garde des sceaux après un avis simple du Conseil.

En dehors des nominations, la commission souhaite cependant encadrer la compétence du Conseil supérieur de la magistrature en matière d' avis .

Elle considère en effet que la pratique d'autosaisine qui s'est instaurée, le Conseil supérieur de la magistrature ayant émis, de sa propre initiative, des avis sur des questions relatives au statut des magistrats du parquet, excède ses compétences telles qu'elles étaient explicitement prévues par l'article 65 de la Constitution et pourrait le conduire à jouer un rôle qui n'est pas le sien. Il paraît indispensable de bien définir les missions du CSM afin d'éviter toute possibilité de confusion sur son rôle véritable.

Afin d'éviter de tels risques de dérive, la possibilité pour le Conseil supérieur de la magistrature d'émettre des avis devrait être subordonnée à la seule demande du Président de la République agissant là dans le rôle de garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire que lui confie l'article 64 de la Constitution ; ces avis ne devraient porter que sur des questions générales intéressant le statut des magistrats, et non sur des affaires particulières, de manière à éviter toute interférence avec les compétences disciplinaires du Conseil supérieur de la magistrature.

Aussi la commission a-t-elle souhaité préciser dans le texte même de l'article 65 de la Constitution que le CSM se réunirait en formation plénière pour répondre aux demandes d'avis formulées par le Président de la République.

Enfin, votre commission vous propose de prendre en compte une suggestion formulée par notre excellent collègue Daniel Millaud dans une proposition de loi constitutionnelle concernant les modalités de nomination des présidents de certaines juridictions d'outre-mer en réparant une omission actuelle de la rédaction de l'article 65 de la Constitution de manière à aligner les modalités de nominations des présidents des tribunaux de première instance et des tribunaux supérieurs d'appel sur celles de leurs collègues qui président les juridictions équivalentes en métropole.

Par ailleurs, la commission estime que le renforcement des garanties d'indépendance assurées aux magistrats doit s'accompagner d'une réaffirmation solennelle des exigences déontologiques qui s'imposent à eux. Le respect par les magistrats du devoir de réserve lui paraît à cet égard tout à fait fondamental.

C'est pourquoi elle souhaite qu'une réflexion soit engagée en vue d'une modification de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature afin de faire apparaître explicitement dans le statut que le manquement par un magistrat au devoir de réserve constitue une faute disciplinaire.

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