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Rapport n° 54 (1998-1999) de M. André ROUVIÈRE , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 4 novembre 1998

N° 54

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 4 novembre 1998

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant la ratification d'une convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif ,

Par M. André ROUVIÈRE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait, Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle Bidard-Reydet, vice-présidents ; MM. Michel Caldaguès, Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès, secrétaires ; Bertrand Auban, Michel Barnier, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel, Roger Husson, Christian de La Malène, Philippe Madrelle, René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Jean-Luc Mélenchon, René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Michel Pelchat, Alain Peyrefitte, Xavier Pintat, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas, André Rouvière.

Voir le numéro :

Sénat : 4 (1998-1999).

Traités et conventions.

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi tend à autoriser la ratification d'une convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif, adoptée à New York, dans le cadre des Nations unies, le 12 janvier 1998.

Il convient de saluer la rapidité de mise en oeuvre, par notre pays, de sa procédure interne de ratification : en effet, dix mois très exactement sépareront la signature de ce texte par la France, de son examen en séance publique par notre Haute assemblée. Cette rapidité relativement inhabituelle tient au souci de faire en sorte que la France soit le premier pays signataire à ratifier la convention du 12 janvier 1998, afin de souligner par cet acte symbolique la part prise par la France dans l'élaboration de ce texte. La présente convention a, en effet, pour origine une demande exprimée par la France lors du sommet du G8 de juillet 1996 à Paris . Le texte qui est proposé à l'autorisation parlementaire résulte ainsi, dans une très large mesure, de propositions françaises, même si l'idée d'élaborer une telle convention a été exprimée en mars 1996, lors du Sommet des "bâtisseurs de la paix" à Charm-El Cheik, après qu'une vague d'attentats particulièrement meurtriers avaient frappé Israël.

La convention du 12 janvier 1998 fait partie d'un droit international du terrorisme dont l'élaboration a commencé en 1963, avec l'adoption de la convention de Tokyo relative aux infractions commises à bord d'aéronefs. Cet arsenal juridique destiné à assurer la répression des actes de terrorisme impliquant plusieurs Etats sera prochainement complété par une convention consacrée au terrorisme nucléaire, partiellement pris en compte par la présente convention, puis par un accord concernant le financement du terrorisme.

A ces divers textes portant sur des aspects sectoriels et spécifiques du terrorisme international succédera par la suite une convention globale, supposée cerner toutes les implications du terrorisme et toutes les formes d'attentat.

En attendant cette échéance, il importe, en vue de la ratification de la présente convention, de présenter un bilan de la menace terroriste à la fin des années 1990, d'évaluer les réponses qui lui ont été successivement opposées par la communauté internationale, avant de commenter la convention du 12 janvier 1998.

*

* *

I. UNE MENACE TERRORISTE OMNIPRÉSENTE, DANS UN PAYSAGE STRATÉGIQUE RENOUVELÉ

Les statistiques attestent la tragique permanence de la menace terroriste, en dépit des modifications intervenues, depuis la fin de la guerre froide, dans un contexte international désormais éclaté, rendant aujourd'hui le danger terroriste plus imprévisible que jamais.

1. Un danger permanent

Les statistiques publiées par le Département d'Etat américain sur les actes de terrorisme international, mettant en cause des étrangers (victimes ou auteurs des attentats), font état d'un risque aujourd'hui permanent et universel. C'est en 1985 que la menace du terrorisme international s'est intensifiée à un rythme effrayant. Mais la période antérieure a connu des attentats spectaculaires (détournement en 1968, par le Front populaire de libération de la Palestine de Georges Habache, de deux avions de la compagnie El Al, attentat de 1992 aux Jeux olympiques de Münich contre des athlètes israéliens...), à l'origine de la prise de conscience d'un danger qui n'a cessé, par la suite, de s'aggraver.

Entre 1976 et 1986, plus de 6 000 actes de terrorisme auraient ainsi, selon les sources américaines précitées, été perpétrés dans le monde, faisant 5 000 morts et 8 000 blessés 1 ( * ) . Pendant la seule année 1985, ont été recensés 785 attentats, ayant fait 2 042 victimes dont 825 morts. Les statistiques de 1986 font état de 774 actes de terrorisme, ayant fait 2 321 victimes dont 604 morts. En 1986, 64 % des actes de terrorisme enregistrés dans le monde ont visé la France, Israël et les Etats-Unis.

Parmi les attentats les plus tragiques commis pendant la décennie 1976-1986, on peut citer les attentats simultanés des aéroports de Romes et Vienne, en décembre 1985, puis la vague d'attentats dont Paris a été le cadre en septembre 1986, ainsi que l'attentat au camion piégé de Beyrouth, en 1983, qui provoqua la mort de 241 marines. En 1986, la découverte, par les forces de sécurité de la compagnie El Al, d'une bombe qu'un terroriste tentait d'introduire à bord d'un appareil en partance de Londres pour Tel Aviv, permit de prévenir la mort de quelque 500 passagers. Cette même année, le FBI déjoua un projet de terroristes Sikhs visant l'explosion d'une bombe à bord d'un avion d'Air India assurant le vol New York-Londres.

Les statistiques du Département d'Etat américain relatives à la période 1987-1997 font état de 4 804 actes de terrorisme international, soit une certaine baisse par rapport à la précédente décennie, en dépit de "pics" en 1987 (666 attentats) et 1991 (565 attentats).

La répartition des actes de terrorisme international par région souligne l' importance du risque terroriste en Europe , où 272 attentats ont été commis en 1995, soit 62 % de l'ensemble des attentats terroristes commis dans le monde (43 % en 1993, 41 % en 1996).

L'Europe détient le triste privilège du plus grand nombre d'attentats terroristes commis sur le territoire de ses Etats pendant la période 1992-1997. Sur 2 156 actes de terrorisme international, 831, soit 38,5 % , ont été perpétrés en Europe. Le ratio est également accablant en Amérique Latine (deuxième région concernée, soit 28 %) et, à un moindre degré, au Moyen-Orient (19,5 %), où le terrorisme vise à affecter le processus de paix (cf les quatre attentats-suicides commis en moins de dix jours par des islamistes palestiniens en Israël en février 1996, qui justifièrent la réunion, le 13 mars 1996, du sommet international contre le terrorisme de Charm-el-Cheikh).

En revanche, le danger paraît moins important en Amérique du Nord (0,7 %), en Afrique (3,3 %) et en Asie (5 %). Ces proportions plus faibles n'impliquent néanmoins pas que les pays de ces régions ne soient pas concernés par la menace terroriste. Les attentats de 1996 à Khobar Towers, en Arabie saoudite, puis d'août 1998 à Nairobi et Dar-el-Salam montrent, en effet, que le danger terroriste ignore les frontières des Etats. L'attentat de 1993 contre le World trade center avait, par ailleurs, déjà clairement illustré que le terrorisme d'origine moyen-orientale avait pris les Etats-Unis pour cible.

Une enquête effectuée dans le cadre du Conseil de l'Europe sur la menace terroriste en Europe pendant la période 1982-1986 2 ( * ) montre que, si "le plus grand nombre de décès est imputable à des groupes nationaux comme l'IRA au Royaume-Uni, le PKK en Turquie et l'ETA en Espagne", en revanche, les "attentats les plus meurtriers" sont imputables au terrorisme international . Ainsi l'attentat commis en 1988 contre un avion de la PANAM, détruit par une bombe au-dessus de Lockerbie en Ecosse, a-t-il fait à lui seul 270 morts. L'attentat commis en 1989 contre un avion d'UTA, qui a explosé au-dessus du désert de Ténéré au Niger, a quant à lui causé la mort de 171 personnes.

2. Un contexte international substantiellement transformé

Depuis la fin de la guerre froide, le terrorisme international a connu des évolutions sensibles, liées notamment à la disparition du soutien autrefois apporté par l'Union Soviétique.

. En cette fin des années 1990, le terrorisme international est caractérisé par 3 ( * ) :

- un soutien plus dispersé (les terroristes se trouvent dans un pays, les commanditaires dans un autre, les armes dans un autre encore, l'argent provenant d'un pays encore différent), qui accroît l' éclatement des groupes par rapport à l'époque où les mouvements terroristes avaient intérêt à maintenir leur unité face à un "sponsor" unique ;

- un fractionnement des mouvements , dû à des divergences de vues entre politiques et militaires, pragmatiques et jusqu'auboutistes, qui paraît n'épargner aucun mouvement et qui contribue à aggraver la menace ;

- une extension de la menace terroriste aux pays d'Europe centrale et orientale , qui étaient épargnés à l'époque soviétique, quand des organisations terroristes internationales étaient basées sur leur territoire : la perception d'un danger terroriste par ces pays (attestée par l'enquête effectuée dans le cadre du rapport précité du Conseil de l'Europe) tient notamment à l'augmentation rapide de la criminalité organisée, à l'apparition d'extrémistes sur les scènes politiques nationales, et à l'implantation de représentations diplomatiques et commerciales d'Israël dans ces pays ;

- une déprofessionnalisation des acteurs par rapport aux années 1970-1980, liée au remplacement des entités permanentes de l'époque par des groupuscules, mobiles et fanatisés : cette tendance contribue à rendre le terrorisme international beaucoup plus imprévisible qu'à l'époque où l'URSS, en apportant son soutien, contribuait aussi à tempérer certains excès ;

- une nouvelle forme d'internationalisation , du fait de la circulation des individus et des capitaux (ainsi l'attentat contre le World trade center, en 1993 à New York, mettrait-il en cause des réseaux comprenant des Egyptiens, des Pakistanais et des Palestiniens).

Cette dernière évolution souligne l'impossibilité de "diaboliser" un seul pays : ainsi le Hamas frappe-t-il en Israël, "mais ses "politiques" ont des bureaux en Jordanie ou en Syrie, tandis que ses militaires se terrent à Gaza ou en Cisjordanie. L'argent vient essentiellement des pays du Golfe ou de la diaspora palestinienne en Occident" 4 ( * ) .

La vague d'attentats qui a frappé la France en 1995 a confirmé ces diverses observations. Le terrorisme islamiste qui a ainsi été mis en cause était sensiblement différent des réseaux étatiques ou para-étatiques des années 1980, et ne paraissait pas disposer, selon les observateurs, de relais en profondeur dans la population musulmane française.

. Quant à la nature de la menace terroriste , elle pourrait avoir pris une tournure plus inquiétante encore, parallèlement à l' augmentation d'actes de violence aveugle perpétrés par des extrémistes religieux (cf les attentats commis en Egypte contre des touristes occidentaux) et des groupes "apocalyptiques" n'excluant pas le recours à des armes non conventionnelles comme les armes chimiques. L'attentat au sarin dans le métro de Tokyo, en mars 1995, pourrait illustrer cette tendance effrayante où les Etats-Unis voient l'émergence d'un "nouveau terrorisme".

Le terrorisme semble donc plus que jamais devenu "l' arme nucléaire du pauvre ". Les moyens chimiques et biologiques confèrent, en effet, aux nombreux groupuscules politiques et religieux susceptibles de commettre des attentats terroristes un pouvoir de destruction sans précédent (cf. le dépôt de substances radioactives dans un parc de Moscou vraisemblablement par un mouvement tchétchène).

. Selon d'autres interprétations cependant, la menace terroriste pourrait être relativisée par la constatation que les moyens auxquels ont recours les terroristes ne diffèrent pas de ceux qu'ils utilisaient avant la fin de la guerre froide. Il s'agit toujours d'explosifs, certes puissants, mais néanmoins ordinaires, aucun moyen biologique ou nucléaire n'ayant, à ce jour, été mis en oeuvre. Certains observateurs soulignent ainsi 5 ( * ) la permanence de modes opératoires traditionnels , comme l'attentat à la voiture piégée (attentats de Nairobi et Dar-el-Salam en août 1998, de Beyrouth en 1983 ...), ou comme le recours aux explosifs classiques utilisés par les terroristes pendant les deux grandes vagues d'attentats en France, en 1986 et 1995. Cette interprétation du terrorisme international s'appuierait notamment sur le fait que les terroristes cherchent avant tout à convaincre l'opinion de leur capacité à frapper n'importe où et n'importe quand, et non à exterminer de manière massive.

*

* *

Le précédent redoutable que constitue l'attentat au sarin dans le métro de Tokyo, joint à la simple constatation de la prolifération actuelle de groupuscules fanatisés et imprévisibles, et à l'évidence que l'effondrement du communisme est allé de pair avec une dispersion incontrôlée des armes de destruction massive , ne saurait toutefois occulter le fait que la menace terroriste semble bien s'être aggravée.

II. LA RECHERCHE DE RÉPONSES INTERNATIONALES ADAPTÉES

Dès le début des années 1960, la communauté internationale a cherché à opposer des réponses adaptées à la menace terroriste, par l'élaboration de conventions internationales destinées à mettre le terrorisme hors-la-loi, par le développement de la coopération internationale dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, et par l'adoption de sanctions contre les pays responsables d'actes de terrorisme.

1. L'élaboration d'un droit international contre le terrorisme

. Compte non tenu de la présente convention, dix conventions ont été conclues sous l'égide des Nations unies pour tirer les conséquences, essentiellement juridiques, de la menace terroriste :

- convention relative aux infractions et à certains autres actes survenus à bord des aéronefs (Tokyo, 14 septembre 1963) ;

- convention pour la répression de la capture illicite d'aéronefs (La Haye, 16 décembre 1970) ;

- convention pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile (Montréal, 23 septembre 1971) ;

- convention pour la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents diplomatiques (New York, 14 décembre 1973) ;

- convention internationale contre la prise d'otages (New York, 17 décembre 1979) ;

- convention sur la protection physique des matières nucléaires (Vienne, 26 octobre 1979) ;

- protocole pour la répression des actes illicites de violence dans les aéroports servant à l'aviation civile internationale (Montréal, 24 février 1988) ;

- convention pour la répression des actes illicites dirigés contre la navigation maritime (Rome, 10 mars 1988) ;

- protocole pour la répression d'actes illicites contre la sécurité des plates-formes fixes situées sur le plateau continental (Rome, 10 mars 1988) ;

- convention sur le marquage des explosifs plastiques aux fins de détection (Montréal, 1er mars 1988).

Cette première génération de conventions internationales antiterroristes a concerné des aspects sectoriels de la menace constituée par le terrorisme international. Ces conventions visent ainsi, de manière segmentée, les actes de terrorisme survenus à bord d'aéronefs, de navires, de plates-formes pétrolières, dans des aéroports ... Une forte proportion de ces textes a été inspirée par un événement ayant suscité une émotion particulière dans l'opinion internationale. Ainsi le détournement de l'Achille Lauro s'est-il trouvé à l'origine de la convention pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de la navigation maritime signée à Rome le 10 mars 1988 (et entrée en vigueur le 1er mars 1992). Dans le même esprit, les attentats perpétrés en décembre 1985 dans les aéroports de Vienne et de Rome ont inspiré un protocole à la convention de Montréal de 1971 pour la répression des actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile, protocole consacré à la répression des actes de violence dans les aéroports.

De même, la convention de La Haye (16 décembre 1970) a-t-elle été adoptée pour répliquer aux actes de piraterie aérienne qui s'étaient multipliés depuis la fin des années 1960, tandis que la convention de Montréal (23 septembre 1971) a été inspirée par la multiplication des attentats à la bombe contre des avions de ligne.

. Par rapport à cette première génération de conventions internationales, la présente convention présente le mérite de porter sur un spectre beaucoup plus étendu d'actes de terrorisme international, et de constituer ainsi une convention plus "généraliste" que les précédentes . En effet, la convention du 12 janvier 1998 concerne une très forte proportion des attentats terroristes commis dans le monde, puisque les attentats à l'explosif représentent quelque 60 % des actes de terrorisme international enregistrés chaque année (voir infra, III-1).

. D'autres conventions visent exclusivement à faciliter la répression des auteurs d'actes de terrorisme international. Il s'agit notamment de la convention européenne pour la répression du terrorisme du 27 janvier 1977. Elaborée dans le cadre du Conseil de l'Europe, cette convention a présenté le mérite de sortir du champ des infractions politiques les délits visés par les conventions de La Haye et de Montréal, de même que les actes commis au moyen de bombes, grenades, roquettes, armes automatiques ou colis piégés, ainsi que les enlèvements et les attaques contre des personnes jouissant d'une protection internationale. La convention de 1977 a donc constitué un progrès notable en faveur de la répression du terrorisme international , par rapport à la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 qui autorisait les Etats signataires à refuser l'extradition, si le délit pour lequel celle-ci était requise était un délit politique. Cette avancée est confirmée par la convention européenne d'extradition du 27 septembre 1996, dite "de Dublin ", qui vise en outre à racourcir les délais d'extradition.

. Parmi les réponses du droit international à la menace terroriste, on peut également citer des conventions à vocation régionale, comme la convention de Washington (2 février 1971) pour la prévention et la répression des actes de terrorisme prenant la forme de crimes contre des personnes, ou comme la convention arabe contre le terrorisme, signée le 22 avril 1998 au Caire par les 22 membres de la Ligue arabe, et non encore entrée en vigueur.

2. Le développement de la coopération internationale

La montée en puissance de la menace terroriste s'est traduite par la prise de conscience des Etats de la nécessité de développer la coopération internationale en matière de lutte antiterroriste, sous toutes ses formes. Ainsi la Déclaration ministérielle du Groupe des sept sur la lutte contre le terrorisme (Ottawa, 26 novembre 1995) vise-t-elle le renforcement de l'échange de renseignements et d'informations sur le terrorisme, et encourage-t-elle l'entraide judiciaire et l'extradition.

De même la résolution 49/60 des Nations unies du 17 février 1995 incite-t-elle les Etats, entre autres réponses au terrorisme international :

- à mettre en place des accords de coopération bilatéraux, régionaux et multilatéraux,

- à veiller au respect du principe "juger ou extrader" à l'égard des auteurs d'actes terroristes, conformément aux engagements souscrits dans le cadre des conventions antiterroristes ci-dessus évoquées (voir supra, 1),

- à aider les Etats à organiser des "cours de formation sur les moyens de lutter contre la criminalité liée au terrorisme international".

Dans la même logique, les Mesures visant à éliminer le terrorisme international adoptées par l'Assemblée générale des Nations unies le 17 décembre 1996 encouragent les échanges d'information entre Etats sur les faits liés au terrorisme.

Sur un plan plus pratique, on remarque que le développement de la coopération interétatique s'effectue, pour l'essentiel, à l' échelle régionale .

Ainsi l'Union européenne paraît-elle un cadre d'action privilégié, qu'il s'agisse des initiatives mises en place dans le cadre du Troisième ou du Deuxième pilier.

La coopération judiciaire et policière prend forme au sein du Troisième pilier. Une évaluation de la menace terroriste (interne et externe) à l'égard de l'Union européenne est effectuée chaque semestre, tandis qu'a été constitué un "répertoire des compétences" (c'est-à-dire une sorte d'annuaire des services) en vue d'une action antiterroriste commune. Dans le domaine judiciaire, l'adoption de la Convention d'extradition européenne du 27 septembre 1996 a pour objet d'améliorer les conditions de l'extradition entre les Etats membres en supprimant le principe de la double incrimination et en réduisant les délais nécessaires. Elle permettra d'éviter que le mobile politique puisse être invoqué par l'Etat requis pour refuser une demande d'extradition ou d'entraide judiciaire. Par ailleurs, dans le cadre de Schengen, il devient possible de poursuivre la surveillance policière, dans un autre pays, d'une personne soupçonnée d'avoir participé à une infraction, tandis que le système d'information Schengen vise à améliorer la circulation des informations.

Enfin, le groupe TREVI (terrorisme, radicalisme et violence internationale), créé en 1975 lors d'une réunion du Conseil de l'Europe, a établi un programme d'action relatif au renforcement de la coopération policière dans la lutte contre le terrorisme et les autres formes de criminalité organisée. Ce groupe réunit les ministres et les hauts fonctionnaires qui, dans chaque pays de l'Union européenne, sont responsables de la lutte contre le terrorisme. Il comporte quatre groupes de travail (terrorisme, formation de la police, trafic de drogue et autres formes de criminalité organisée, et coopération policière dans tous les domaines de la criminalité).

On relève également une amélioration récente de la coordination mise en place au sein du Deuxième pilier (politique étrangère et de sécurité commune) qui a débouché sur un dialogue avec d'autres forums internationaux (dialogue avec les PECOS, dialogue euroméditerranéen, dialogue transatlantique ...).

3. La question des sanctions

. A ce jour, deux Etats seulement se sont vu imputer par l' ONU la responsabilité d'actes de terrorisme international :

- la Libye , du fait des attentats contre les vols UTA 772 et PANAM à Lockerbie (résolutions 731 du 21 janvier 1992, 748 du 31 mars 1992, et 883 du 31 novembre 1993) ;

- l' Irak , mis en cause pour prise d'otages (affaire des "boucliers humains") lors de la guerre du Golfe (résolution 687 du 3 avril 1991.

Les résolutions onusiennes s'étaient toutefois bornées à constater que ces deux pays avaient commis des actes de terrorisme international (ou en avaient encouragé), à exiger de l'Irak et de la Libye qu'ils renoncent au terrorisme, et à constater qu'en ne se conformant pas à cette exhortation, la Libye constituait "une menace pour la paix et la sécurité internationale".

Il ne s'agissait donc pas véritablement de sanctions. A ce jour, la question des mesures susceptibles d'être adoptées par l'ONU à l'encontre d'un Etat qui, en commettant des actes de terrorisme international ou en soutenant des terroristes, violerait les principes des Nations unies, demeure entière. On peut imaginer que l'exclusion d'un tel Etat de l'Organisation des Nations unies ne constituerait pas une menace suffisamment grave pour justifier la renonciation au terrorisme.

. Certains Etats ont néanmoins déjà fait l'objet de sanctions unilatérales , le raid américain contre la Libye, en avril 1986, en ayant constitué le précédent le plus frappant.

Dans un genre différent, on peut rappeler que le Royaume-Uni a, en octobre 1986, rompu ses relations diplomatiques avec la Syrie, accusée de complicité dans l'attentat à la bombe projetée contre un avion d'El Al à Londres. En 1986, les Etats-Unis ont restreint leurs exportations d'équipements informatiques et de matériel de télécommunication vers la Syrie.

Notons que la législation américaine ("export administration act" de 1979 et "antiterrorism and arms export amendment act" de 1989) permet l'inscription d'un Etat sur la "terrorist list", réduisant ipso facto les exportations américaines vers ce pays. En 1998, la "terrorist list" comprend les Etats suivants : Cuba, Corée du Nord, Soudan, Syrie, Libye, Iran, Irak. Ce système de sanctions est aujourd'hui critiqué en raison de son caractère extra-territorial. Ainsi la loi d'Amato , adoptée après l'explosion en vol d'un avion de la TWA en juillet 1996, cette explosion ayant été imputée au terrorisme islamiste, prévoit-elle des sanctions contre toute société qui réaliserait un investissement de plus de 40 millions de dollars dans le secteur énergétique en Libye et en Iran. Ces sociétés peuvent se voir interdire d'exporter vers les Etats-Unis ou d'en importer des produits soumis à licence. Visant essentiellement des sociétés européennes, cette loi relève d'une conception très extensive des sanctions, puisqu'il s'agit là de punir ceux qui commercent avec des Etats soupçonnés de parrainer le terrorisme international, et non de sanctionner les Etats eux-mêmes ...

. Quant aux sanctions pénales contre les auteurs d'infractions, elles sont trop souvent contrariées par les obstacles apportés par certains Etats aux demandes d'extradition formulées par les Etats souhaitant effectuer des poursuites.

Ainsi l'Egypte, l'Italie et la Yougoslavie ont-elles, dans un premier temps, en 1986, refusé d'arrêter le principal organisateur du détournement de l'Achille Lauro, au motif que celui-ci, porteur d'un passeport diplomatique irakien, bénéficiait de ce fait de l'immunité diplomatique.

Une coopération judiciaire insuffisante se traduira prochainement par le jugement par contumace des six accusés libyens responsables de l'attentat contre le DC 10 d'UTA, et des six accusés djiboutiens responsables de l'attentat contre le café de Paris à Djibouti, en 1990.

III. LA CONVENTION DU 12 JANVIER 1998 : UN INSTRUMENT GLOBAL EN FAVEUR DE LA LUTTE ANTITERRORISTE

La présente convention vise à mettre en place un instrument juridique global destiné à la répression des attentats terroristes à l'explosif, quel qu'en soit le lieu ou le vecteur. Il s'agit donc d'une toute autre démarche que celle qui avait conduit, dans les années 1960 à 1980, à adopter des conventions internationales portant sur un secteur précis de l'activité terroriste internationale (attentats contre la sécurité des transports aériens, des transports maritimes, dans les aéroports ...).

Par ailleurs, la convention du 12 janvier 1988 s'inscrit dans une génération d'instruments juridiques s'appuyant sur une condamnation sans équivoque du terrorisme international , sans admettre aucune justification politique que ce soit . A ce titre, le préambule de la présente convention se réfère à la résolution 49/60 de l'Assemblée générale des Nations unies (17 février 1995) qui affirme que "les actes criminels qui, à des fins politiques, sont conçus et calculés pour provoquer la terreur dans le public, un groupe de personnes ou des particuliers sont injustifiables en toutes circonstances, quels que soient les motifs de nature politique, philosophique, idéologique, sociale, ethnique, religieux ou autre que l'on peut invoquer pour les justifier".

Les 24 articles de la présente convention déterminent successivement le champ d'application de celle-ci, ainsi que les règles de compétence applicables en vue de la répression des actes terroristes, définissent les modalités de l'entraide judiciaire et de la coopération technique à laquelle sont invitées les parties, et précisent la portée du principe "extrader ou juger" auquel se réfère la convention du 12 janvier 1998.

1. Un champ d'application défini pour s'appliquer à la plupart des actes de terrorisme international

- L'article 1er offre une définition particulièrement large des engins explosifs visés par la présente convention, puisqu'il s'agit non seulement "de toute arme ou de tout engin explosif ou incendiaire", c'est-à-dire des explosifs "classiques", mais aussi des armes ou engins agissant par l'émission, la dissémination ou l'impact de produits chimiques toxiques, d'agents biologiques, de toxines ou de rayonnements ou de matières radioactives. La présente convention s'appliquerait donc également dans l'hypothèse -particulièrement redoutable- d' attentats terroristes nucléaires, chimiques ou bactériologiques . Notons que les attentats mettant en cause des substances explosives "classiques" représentent 60 % des actes de terrorisme international répertoriés par le Département d'Etat américain. La présente convention est donc susceptible de s'appliquer à une forte proportion des actes de terrorisme international commis dans le monde, et à la totalité de ceux dont notre pays est -hélas- traditionnellement victime. Le champ d'application de la convention du 12 janvier 1998 est par conséquent potentiellement considérable.

- La définition des actes terroristes visés par la convention est, elle aussi, suffisamment large pour concerner la plupart des hypothèses envisageables. Il s'agit, en effet, des actes perpétrés en vue de provoquer non seulement la mort ou des dommages corporels graves, mais aussi des destructions matérielles massives, susceptibles d'entraîner des pertes économiques importantes. Dans le même esprit, l'article 2 vise les auteurs, mais aussi les complices et les organisateurs des attentats.

L'objet des attentats est également défini de manière extrêmement large : il s'agit de tout "lieu public" (c'est-à-dire accessible au public, même de façon occasionnelle, et "à usage commercial, culturel, historique, éducatif, religieux, officiel, ludique, récréatif ou autre"), ainsi que des systèmes de transport public (de personnes ou de marchandises), des installations gouvernementales, ou des infrastructures (équipements fournissant des services d'utilité publique, comme l'énergie, l'évacuation des eaux usées, le combustible ou les communications). La présente convention couvre donc les attentats susceptibles d'être commis contre des ambassades, des centrales nucléaires, des trains, des pipelines, des églises, des parcs d'attraction, des aéroports...

- La présente convention ne s'applique qu'aux actes de terrorisme international. Elle exclut de son champ d'application les infractions commises à l'intérieur d'un Etat, par un auteur ressortissant de cet Etat, se trouvant sur le territoire dudit Etat, et à l'encontre des victimes ressortissant à cet Etat.

- Enfin, le champ d'application de la présente convention exclut les activités des forces armées en période de conflit armé et dans l'exercice de leurs fonctions officielles.

2. Règles de compétence définies par la convention du 12 janvier 1998

L'article 6 définit à quelles conditions un Etat peut établir sa compétence pour réprimer un acte de terrorisme international.

Ces critères se réfèrent, de manière classique :

- au territoire sur lequel a été commise l'infraction,

- à la nationalité des coupables ou des victimes,

- à l'Etat du pavillon du navire (ou d'immatriculation de l'aéronef) à bord duquel a été commise l'infraction,

- à l'appartenance des installations publiques visées (y compris de locaux diplomatiques) situées hors du territoire d'un Etat,

- à l'Etat contre lequel l'acte terroriste est supposé constituer une menace.

L'article 6 prévoit deux types de compétences. L'une est obligatoire (territoire sur lequel a été commis l'attentat, nationalité de l'auteur). La seconde est facultative (nationalité de la victime, chantage contre cet Etat, appartenance de l'installation visée).

Chaque Etat-partie doit donc informer le secrétaire général de l'ONU, lors de la ratification de la présente convention, de la compétence qu'il a établie en vertu de sa législation interne.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, notre Représentation permanente auprès des Nations unies informera le Secrétaire général que la France, victime du terrorisme, établit sa compétence dans tous les cas prévus par l'article 6. Dans la même logique, les Etats-Unis sont fondés à établir leur compétence pour sanctionner les attentats commis à Nairobi et Dar es Salam en août 1998, puisque ces attentats visaient des ambassades américaines, et que des ressortissants américains figurent parmi les victimes de ces actes terroristes.

3. L'adaptation des législations des Etats

Deux stipulations concernent l'adaptation des législations internes des Etats.

. L'article 4 invite les Parties à prendre les mesures nécessaires pour "réprimer lesdites infractions par des peines prenant dûment en compte leur gravité", et pour qualifier d'infraction pénale les infractions visées par la convention.

. L'article 5 invite les Parties à faire en sorte que les attentats terroristes visés par la présente convention ne puissent être justifiés par des considérations politiques, philosophiques, religieuses où par "d'autres motifs analogues", et que ces infractions soient sanctionnées par des peines proportionnelles à leur gravité.

. La France devra procéder à des ajustements de sa législation pénale pour assurer la conformité de celle-ci à la présente convention.

Ces modifications concernent, selon les informations transmises à votre rapporteur :

- l'article 421-1 du code pénal, qui définit les actes de terrorisme et les qualifie d'infractions pénales. Parmi les infractions visées par cet article figurent la fabrication ou la détention d'engins explosifs ou de substances explosives, d'armes biologiques ou à toxines. L'article 421-1 ne prévoit donc pas expressément d'incrimination pour l'acquisition, la détention ou le transport de matières radioactives, et devra donc être modifié sur ce point (on peut toutefois observer que l'article 421-1 se réfère au décret-loi du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions, dont il proscrit l'acquisition, la détention, le transport ou le port illégitime. Or ce décret-loi a été modifié par le décret n° 95-589 du 6 mai 1995, qui intègre les engins nucléaires explosifs à la liste des matériels de guerre dont le décret-loi de 1939 fixe le régime) ;

- l'article 689 du code de procédure pénale, qui définit les règles de compétence applicables aux juridictions françaises en application des conventions internationales auxquelles la France est Partie.

L'article 689-2 tire les conséquences, en matière de procédure pénale, de la ratification de la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, du 10 décembre 1984. L'article 689-3 vise à appliquer la convention européenne pour la répression du terrorisme du 27 janvier 1977. La convention du 3 mars 1980 sur la protection physique des matières nucléaires fait l'objet de l'article 689-4 ; la convention de La Haye du 16 décembre 1970 sur la répression de la capture illicite d'aéronefs est visée par l'article 689-6, l'article 689-7 étant consacré à l'application du protocole de Montréal du 24 février 1988 pour la répression des actes illicites de violence dans les aéroports. L'article 689-5 tire quant à lui les conséquences de la convention pour la répression d'actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime et du protocole pour la répression d'actes illicites contre la sécurité des plates-formes fixes situées sur le plateau continental.

Il convient donc de compléter ces dispositions du code de procédure pénale pour établir la compétence des juridictions françaises dans les cas d'infraction prévus par la présente convention.

4. Obligations souscrites en matière de coopération judiciaire et d'extradition

a) Stipulations relatives à la coopération judiciaire entre les Parties

- L'article 7 oblige les Parties à " enquêter sur les faits portés à (leur) connaissance", dans l'hypothèse où l'auteur présumé d'un attentat à l'explosif se trouverait sur leur territoire, et à poursuivre ou extrader cette personne si "les circonstances le justifient" (voir infra, b).

- L'article 10 invite les Parties à s'accorder "l'entraide judiciaire la plus large possible dans toute enquête ou procédure pénale ou procédure d'extradition " relative à des attentats à l'explosif.

- L'article 13 autorise le transfert de détenus d'un Etat vers un autre Etat Partie, si la présence de ce détenu dans l'Etat requérant est nécessaire à des fins de témoignage ou d' identification , dans le cadre d'une enquête ou de poursuites conduites en vertu de la présente convention.

b) Stipulations relatives à l'extradition

- L'article 8 pose le principe, classique dans les conventions relatives à la lutte contre le terrorisme, " extrader ou juger " en vertu duquel un pays est tenu, s'il n'extrade pas l'auteur présumé d'un attentat terroriste à l'explosif, de "soumettre l'affaire à ses autorités compétentes pour l'exercice de l'action pénale".

- L'article 9 vise à accélérer les procédures d'extradition , en permettant que la présente convention se substitue à un traité d'extradition bilatéral, et constitue la base juridique d'une procédure d'extradition, dans les cas où un traité bilatéral d'extradition ne comprendrait pas les attentats terroristes à l'explosif visés par la présente convention.

Notons que la France ne subordonne pas l'extradition à l'existence d'un traité d'extradition avec l'Etat requérant.

- L'article 11 exclut qu'une demande d'extradition puisse être refusée au motif que l'attentat terroriste à l'explosif fondant ladite demande constituerait une infraction politique . Cette stipulation s'inscrit dans la logique ci-dessus commentée par votre rapporteur, tendant à une condamnation sans équivoque du terrorisme, qui n'admet plus aujourd'hui de justification politique , alors que la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 autorisait les Parties à opposer un refus à une demande d'extradition si le délit pour lequel celle-ci était requise était un délit politique. La présente convention confirme donc une tendance des traités onusiens à exclure toute justification pour les actes de terrorisme (tendance qui caractérisait déjà le G7 en 1987, si l'on se réfère à la déclaration publiée à l'issue du sommet de Venise).

c) Engagements souscrits par les Etats en vue du respect des droits de l'Homme

Diverses stipulations visent à protéger les auteurs présumés d'infraction faisant l'objet d'une demande d'extradition ou de poursuite dans un autre Etat.

- L'article 7 se réfère au droit de cette personne de "communiquer sans retard avec le plus proche représentant qualifié de l'Etat dont elle a la nationalité", et de bénéficier des droits de la défense prévus par la loi de l'Etat sur le territoire duquel elle se trouve.

- L'article 14 garantit à une personne détenue en application de la présente convention un "traitement équitable et tous les droits et garanties" conformes à la législation de l'Etat sur le territoire duquel cette personne se trouve en détention, ainsi que le bénéfice des dispositions du droit international relatives notamment aux droits de l'homme.

- Une demande d'extradition peut être refusée si l'Etat requis "a des raisons sérieuses de croire" que cette demande a été présentée afin de poursuivre ou de punir une personne "pour des considérations de race, de religion, de nationalité, d'origine ethnique ou d'opinions politiques". On peut néanmoins se demander si cette stipulation, au demeurant classique, n'est pas susceptible d' altérer la portée de l'article 11 qui exclut qu'un attentat terroriste à l'explosif puisse être considéré comme une infraction politique .

d) La coopération technique entre les Parties en vue de la prévention du terrorisme international

L'article 15 encourage la coopération entre Etats afin de prévenir les attentats terroristes à l'explosif.

Cette coopération, conçue de manière opérationnelle , concerne :

- la recherche relative à la détection et au marquage d'explosifs (destinés à en identifier l'origine lors d'enquêtes effectuées à la suite d'explosions),

- les échanges de renseignements et d'informations relatives aux mesures de prévention,

- les transferts de technologie et de matériel destinés à la prévention (comme par exemple les équipements aéroportuaires de sécurité),

- l'adoption de mesures, notamment législatives, visant à prévenir ou à contrarier la préparation d'attentats terroristes à l'explosif.

Sur ce dernier point, on note que la France s'est dotée d'une législation antiterroriste complète , et n'aura de ce fait pas à procéder à des adaptations de sa législation pour tirer les conséquences de l'article 15. Rappelons que les infractions en relation avec un attentat terroriste relèvent en France d'un régime spécifique et dérogatoire du droit commun :

- centralisation des poursuites, de l'instruction et du jugement au Tribunal de grande instance de Paris (service central de lutte antiterroriste du Parquet de Paris),

- allongement à quatre jours de la durée maximale de garde à vue,

- possibilité d'effectuer des perquisitions au cours de l'enquête sans l'accord des intéressés,

- dispositif d'exemption ou d'allégement de peine pour les terroristes ayant permis d'éviter que l'infraction entaîne mort d'homme, ou de faire cesser les agissements incriminés, voire d'éviter l'acte terroriste lui-même,

- extension de la définition d'acte terroriste au terrorisme écologique et à toute atteinte à la personne, définition de peines aggravées en cas d'acte terroriste,

- allongement des délais de prescription de la peine et de l'action publique en cas d'acte terroriste,

- extension de la liste des infractions susceptibles d'être qualifiées d'actes de terrorisme à l'association ou au recel de malfaiteurs,

- intervention de l'avocat différée à la 72e heure de garde à vue en matière de terrorisme.

Notons, par ailleurs, que les actions de coopération policière prévues par l'article 15 sont coordonnées et mises en oeuvre en France par l'Unité de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT).

CONCLUSIONS DU RAPPORTEUR : UN INSTRUMENT JURIDIQUE PAR NATURE IMPARFAIT MAIS NÉANMOINS NÉCESSAIRE

Il serait imprudent d'attendre de la présente convention plus que ce que peut apporter un traité international.

Tout d'abord, l'objet de la convention du 12 janvier 1998 n'est pas de prévenir les attentats terroristes à l'explosif, mais avant tout de les réprimer. Cette convention fixe donc essentiellement des règles relatives à l'entraide judiciaire entre Etats, afin de faire en sorte que les auteurs de ces actes terroristes soient punis.

La convention du 12 janvier 1998 est néanmoins susceptible de permettre une avancée non négligeable en matière de lutte contre le terrorisme à l'explosif , si l'on considère qu'une répression vigoureuse et sans concession de tels agissements peut, à terme, exercer un effet dissuasif sur les terroristes, et par conséquent prévenir certains attentats. Ainsi n'est-il pas exclu que la convention de La Haye (16 décembre 1970) se soit trouvée à l'origine de la baisse régulière des détournements d'avions constatée depuis son entrée en vigueur.

L'efficacité de la présente convention reste néanmoins subordonnée à son universalité. Or, sur les 31 signataires à ce jour recensés 6 ( * ) , on ne relève -faut-il le préciser ?- aucun des Etats généralement mis en cause dans le terrorisme international. L'Egypte n'a pas signé ce texte, alors même que, à travers l'effondrement des recettes provenant du tourisme, ce pays peut être considérée comme une victime du terrorisme.

Parmi les entraves à l'efficacité du droit international du terrorisme, on relève également l'absence de définition universellement admise du terrorisme, la frontière pouvant paraître ténue entre les organisations terroristes et les mouvements de lutte pour l'autodétermination ou pour l'exercice des droits démocratiques. Or, le recours à la violence par ces derniers semble excusable aux yeux de certains.

Enfin, les progrès du droit international se heurtent, en matière de lutte contre le terrorisme, à des obstacles pratiques, qui tiennent, par exemple, à des mesures de sécurité insuffisantes dans certains aéroports 7 ( * ) , ou à l'absence de contrôle dans les lieux publics, à une époque où la mobilité des personnes est telle que des lacunes de cet ordre affectent la sécurité de ressortissants de nombreux Etats. L'un des moyens de compenser ces défaillances est de développer les actions de coopération technique et les transferts de technologies entre Etats , ce que vise précisément -entre autres stipulations- la convention du 12 janvier 1998.

Il importe donc que la France, en procédant au plus vite au dépôt de ses instruments de ratification, encourage par son exemple l'adhésion de nombreux Etats, et qu'une entrée en vigueur rapide de la convention du 12 janvier 1998 montre la détermination de la communauté internationale à punir comme ils le méritent les auteurs d'attentats terroristes.

EXAMEN EN COMMISSION

Votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du 4 novembre 1998.

A l'issue de l'exposé du rapporteur, M. Robert Del Picchia est revenu, avec M. Michel Caldaguès, sur les conditions d'entrée en vigueur de la convention du 12 janvier 1998. M. André Rouvière, rapporteur, a rappelé que la France souhaite, en étant le premier pays signataire à déposer ses instruments de ratification, montrer son engagement dans la lutte contre le terrorisme international.

A la demande de M. Paul Masson, le rapporteur a commenté le champ d'application de la convention, conçu pour s'appliquer à de nombreux types d'attentats terroristes. M. Paul Masson ayant relativisé l'incidence réelle probable de la convention du 12 janvier 1998 sur la prévention du terrorisme international, M. André Rouvière a estimé que l'adhésion de nombreux pays à une telle convention illustrerait néanmoins la détermination de la communauté internationale à réprimer le terrorisme. M. Jean-Claude Gaudin a fait observer que les conventions internationales relatives à la répression des attentats terroristes pouvaient améliorer les rapports entre les pays concernés par le terrorisme international. Le rapporteur a également souligné l'importance des clauses de la convention relatives à la coopération technique entre Etats ainsi qu'à l'extradition.

A la demande de M. Philippe de Gaulle, M. André Rouvière, rapporteur, a commenté la portée de la stipulation autorisant un pays à opposer un refus à une demande d'extradition qui serait motivée par des motifs d'ordre racial, religieux ou politique.

M. Paul Masson ayant commenté la définition du terrorisme contenue dans le code pénal français, M. André Rouvière a indiqué que la France devrait prochainement, en conséquence de la ratification de la convention du 12 janvier 1998, étendre le champ d'application de l'article 421-1 du code pénal à la détention ou l'emploi de substances radioactives.

A la demande de M. Aymeri de Montesquiou, M. André Rouvière, rapporteur, a précisé qu'Israël ne figurait pas, à ce jour, parmi les signataires de la convention.

M. Xavier de Villepin, président, a estimé que les attentats commis en août 1998 conte les ambassades américaines de Nairobi et Dar-es-Salam justifiaient une réflexion sur la protection des ambassades et consulats français. Il a par ailleurs relevé que la convention du 12 janvier 1998 n'autorisait pas les répliques unilatérales aux attentats terroristes.

La commission a alors, suivant l'avis de son rapporteur, approuvé le projet de loi qui lui était soumis.

PROJET DE LOI

(Texte présenté par le Gouvernement)

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif, faite à New York le 12 janvier 1998, et dont le texte est annexé à la présente loi 8 ( * ) .

ANNEXE :
ÉTUDE D'IMPACT9 ( * )

1. Etat de la question

La convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l'explosif a été adoptée par l'Assemblée Générale des Nations-Unies à New York, par consensus, le 12 janvier 1998, à l'issue d'un travail préparatoire réalisé en deux sessions, en février et octobre 1997, par le Comité Spécial (6ème commission) créé à cet effet par la résolution 51/210 du 17 décembre 1996. Elle a été signée le même jour par la France.

Cette convention internationale a pour but de réprimer les attentats terroristes à l'explosif commis dans des lieux publics. Elle vise toute personne qui, intentionnellement, livre, pose, ou fait exploser ou détonner, ou tente de le faire, un engin explosif dans un lieu public, un système de transport public ou une infrastructure (tout équipement public ou privé fournissant des services d'utilité publique), pour peu que cet attentat vise à provoquer la mort ou des dommages corporels graves ou à causer des destructions massives entraînant ou risquant d'entraîner des pertes économiques considérables.

Nota : "engin explosif" s'entend de toute arme ou tout engin de type explosif ou incendiaire ; de toute arme ou engin à émission, à dissémination ou à impact de produits chimiques toxiques, d'agents biologiques, toxines ou substances analogues ou de rayonnements ou de matières radioactives, conçus pour provoquer la mort, des dommages corporels graves ou d'importants dégâts matériels, ou en avoir la capacité.

La tentative et la complicité de tels actes sont également réprimées.

Cette convention prévoit plusieurs dispositions (dernier alinéa du préambule, article 1/4, article 19/2) relatives à l'exclusion des forces armées de son champ d'application.

La France n'entend pas faire de réserve sur la procédure du règlement des différends, au terme de laquelle tout différend entre les Etats parties sur l'interprétation ou l'application de la convention, qui ne peut être réglé par la négociation, est soumis à l'arbitrage à la demande de l'un d'eux. Si dans les six mois qui suivent la date de la demande d'arbitrage les parties ne parviennent pas à se mettre d'accord sur l'organisation de l'arbitrage, l'une quelconque d'entre elles peut soumettre le différend à la Cour Internationale de Justice, en déposant une requête conformément au statut de la Cour.

Cette convention a été élaborée au lendemain d'attentats ayant profondément marqué l'opinion publique. C'est à partir des attentats terroristes à l'explosif au Moyen-Orient (et en particulier les attentats suicides en Israël), puis en Europe et en particulier en France, que la nécessité de réaliser une convention internationale dans ce domaine est apparue. C'est en fait depuis le sommet de mars 1996 des "bâtisseurs de la paix" de Charm El Cheik, décidé après la vague d'attentats qui à l'époque frappait Israël, que l'idée d'une telle convention a commencé à apparaître. C'est la présidence française du G8 qui, en juillet 1996, inscrit un tel projet au sein des "25 recommandations de Paris" pour lutter contre le terrorisme. Ce projet de convention est alors repris par les Nations Unies, dont la résolution 51/210 du 17 décembre 1996 prévoit précisément la mise en place d'un comité spécial destiné à élaborer cet instrument.

Cette convention est une convention d'incrimination, surtout destinée à mettre en place des mesures de coopération internationale renforcées, contraignantes pour les auteurs de tels actes. Elle demande aux Etats d'ériger en infraction pénale les faits précités, et comporte un dispositif juridique de coopération internationale fondé sur le principe "juger ou extrader", et des modalités classiques d'entraide et d'extradition.

Parallèlement, elle contient des garanties relatives à la protection des droits de la personne soupçonnée, en particulier quant à sa détention et à son extradition.

2. Un impact principal : l'amélioration de la lutte internationale contre le terrorisme

Cette convention cible la menace terroriste principale actuelle : en effet, elle traite d'un mode opératoire terroriste, les attentats à l'explosif qui représentent environ 60 % des actes du terrorisme international (selon les statistiques publiées par le Département d'Etat américain, en 1997, sur 304 actes de terrorisme international répertoriés, 194 concernaient les attentats à l'explosif couverts par cette convention ; 187 sur 296 en 1996 ; 304 sur 440 en 1995). Dans ce cadre, cette Convention présente des avantages sur le plan opérationnel pour la France, qui, Etat victime de ce type de terrorisme (cf. attentats de 1995 et 1996 à Paris) pourra utilement bénéficier des mesures prévues par cette convention (notamment l'extradition des auteurs ou des complices de tels actes).

Cette convention a été "portée", depuis l'origine, par la France . La France a demandé, dans le cadre des "vingt-cinq recommandations pour lutter contre le terrorisme" émises par le G8 sous sa Présidence en juillet 1996 à Paris, qu'une telle convention soit négociée. Elle en a élaboré le texte avec ses partenaires du G8 en novembre 1996. Elle l'a présentée aux Nations unies au nom du G8 en décembre 1998. Elle l'a soutenue avec ses partenaires du G8 et de l'UE à l'occasion des deux sessions du comité spécial de la Sixième Commission (février et octobre 1997) chargées d'en rédiger le texte. Elle a joué un rôle important lors des ultimes discussions de novembre 1997, en Sixième Commission, qui ont abouti à la résolution proposant l'adoption du texte.

Cette convention est destinée à favoriser la coopération internationale contre le terrorisme. Elle permet :

- à l'instar des autres conventions anti-terroristes, une prohibition du refus d'extrader pour motif politique contrebalancée par la possibilité réaffirmée de refuser l'extradition dans un certain nombre de cas : "pour les besoins de l'extradition ou de l'entraide judiciaire entre Etats Parties, aucune des infractions... n'est considérée comme une infraction politique, comme une infraction connexe à une infraction politique ou comme une infraction inspirée par des mobiles politiques. En conséquence, une demande d'extradition ou d'entraide judiciaire fondée sur une telle infraction ne peut être refusée pour la seule raison qu'elle concerne une infraction politique, une infraction connexe à une infraction politique, ou une infraction inspirée par des mobiles politiques" (art. 11). Cet article est contrebalancé par le suivant : "aucune disposition de la présente Convention ne doit être interprétée comme impliquant une obligation d'extradition ou d'entraide judiciaire si l'Etat Partie requis a des raisons sérieuses de croire que la demande d'extradition pour les infractions visées à l'article 2 ou la demande d'entraide concernant de telles infractions a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir une personne pour des considérations de race, de religion, de nationalité, d'origine ethnique ou d'opinions politiques, ou que donner suite à cette demande porterait préjudice à la situation de cette personne pour l'une quelconque de ces considérations".

- de mettre en place un dispositif juridique de coopération internationale fondé sur le principe "juger ou extrader" : l'Etat Partie sur le territoire duquel se trouve l'auteur présumé de l'infraction est tenu, s'il ne l'extrade pas, de soumettre l'affaire, sans retard excessif et sans aucune exception, que l'infraction ait été ou non commise sur son territoire, à ses autorités compétentes pour l'exercice de l'action pénale selon une procédure conforme à la législation de cet Etat" (art. 8) ;

-une mise en oeuvre classique des modalités d'extradition et d'entraide judiciaire : "les Etats Parties s'accordent l'entraide judiciaire la plus large possible pour toute enquête ou procédure pénale ou procédure d'extradition relative aux infractions visées à l'article 2, y compris pour l'obtention des éléments de preuve dont ils disposent et qui sont nécessaires aux fins de la procédure" (art. 10). Le transfert d'un individu vers un autre Etat partie aux fins de témoignage ou d'identification est également possible, dans certaines circonstances (art. 13). Enfin, ils enquêtent sur les faits portés à leur connaissance par un autre Etat partie (art. 7).

- la collaboration opérationnelle entre les Etats Parties. Ceux-ci échangent des renseignements, et coordonnent les mesures prises. Le cas échéant, grâce à la recherche-développement portant sur la détection d'explosifs , ils procèdent à des consultations sur l'établissement de normes pour le marquage des explosifs ; à des échanges d'informations relatives aux mesures de prévention ; au transfert de technologie (art. 15).

- enfin, elle engage les Etats parties à prendre des mesures sur le plan interne , destinées à qualifier d'infraction pénale les infractions de la Convention et à les réprimer par des peines prenant dûment en compte leur gravité (art. 4) ; à adopter des mesures internes pour assurer que les faits incriminés ne puissent en aucune circonstances être justifiés par des considérations de nature politique, philosophique, idéologique, raciale, ethnique, religieuse ou d'autres motifs analogues, et qu'ils soient passibles de peines à la mesure de leur gravité (art. 5) ; à prévenir ces infractions en adaptant leur législation interne (art. 15).

Elle comporte aussi plusieurs dispositions de nature à garantir les droits de la personne mise en cause. En particulier, les facilités accordées pour l'extradition et l'entraide judiciaire sont contrebalancées par les dispositions de l'article 12 : "il n'y a pas obligation d'extradition ou d'entraide judiciaire si l'Etat Partie requis a des raisons sérieuses de croire que la demande d'extradition ou d'entraide a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir une personne pour des considérations de race, de religion, de nationalité, d'origine ethnique ou d'opinions politiques, ou que donner suite à cette demande porterait préjudice à la situation de cette personne pour l'une quelconque de ces considérations".

En outre, cette convention complète le dispositif normatif existant en matière de terrorisme constitué de dix conventions internationales, toutes "spécialisées" :

- Quatre dans le domaine aérien : la Convention relative aux infractions et à certains autres actes survenant à bord des aéronefs, signée à Tokyo le 14 septembre 1963 : la convention pour la répression de la capture illicite d'aéronefs, signée à La Haye le 16 décembre 1970 ; la Convention pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile, signée à Montréal le 23 septembre 1971 ; le Protocole pour la répression des actes illicites de violence dans les aéroports servant à l'aviation civile internationale, complémentaire à la Convention pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile, signée à Montréal le 24 février 1988.

- Dans le domaine maritime : la Convention sur la répression d'actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime, signée le 10 mars 1988 à Rome par l'Organisation maritime internationale ; le Protocole pour la répression d'actes illicites contre la sécurité des plates-formes fixes situées sur le plateau continental, adopté le 10 mars 1988 à Rome par l'organisation maritime internationale.

-Deux visant des actes de terrorisme particuliers : la Convention sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents diplomatiques adoptée par l'Assemblée générale à New York le 14 décembre 1973 ; la Convention internationale contre la prise d'otage, adoptée par l'Assemblée Générale à New York le 17 décembre 1979.

- Deux visant l'utilisation de certains produits ou dispositifs à des fins terroristes : la Convention sur la protection physique des matières nucléaires adoptée le 26 octobre 1980 à Vienne par l'Agence internationale de l'Energie atomique (AIEA) ; la Convention sur le marquage des explosifs plastiques et en feuilles aux fins de détection, adoptée le ler mars 1991 à Montréal par l'OACI.

La France a ratifié toutes ces conventions à l'exception de la convention de 1979 contre la prise d'otages (procédure de ratification en cours), et la convention de 1973 sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents diplomatiques.

De plus, cette convention amènera la France à préciser le champ qu'elle entend donner à sa compétence :

L'article 6 de la convention prévoyant que "lors de la ratification, de l'acceptation ou de l'approbation de la présente Convention ou de l'adhésion à celle-ci, chaque Etat Partie informe le secrétaire général de l'Organisation des Nations-Unies de la compétence qu'il a établie en vertu de sa législation interne", notre Représentation Permanente devra informer le secrétaire général que, conformément à l'article 6-3, la France établi sa compétence sur les infractions visées à l'article 2 dans tous les cas prévus à l'article 6-1 et 6-2".

L'article 6-1 et 6-2 prévoit que :

"1. Chaque Etat Partie adopte les mesures qui peuvent être nécessaires pour établir sa compétence en ce qui concerne les infractions visées à l'article 2 lorsque :

a) L'infraction a été commise sur son territoire ;

b) L'infraction a été commise à bord d'un navire battant son pavillon ou d'un aéronef immatriculé conformément à sa législation au moment où l'infraction a été commise ;

c) L'infraction a été commise par l'un de ses ressortissants.

2. Chaque Etat Partie peut également établir sa compétence sur de telles infractions lorsque

a) L'infraction est commise contre l'un de ses ressortissants ;

b) L'infraction est commise contre une installation publique dudit Etat située en dehors de son territoire, y compris une ambassade ou des locaux diplomatiques ou consulaires dudit Etat ;

c) L'infraction est commise par un apatride qui a sa résidence habituelle sur son territoire ;

d) L'infraction est commise avec pour objectif de contraindre ledit Etat à accomplir un acte quelconque ou à s'en abstenir ;

e) L'infraction est commise à bord d'un aéronef exploité par le gouvernement dudit Etat".

Enfin cette convention, qui reconnaît la compétence de la Cour Internationale de Justice une fois épuisées les autres voies de règlement des différends, est susceptible d'amener un retour prudent de notre pays vers la Cour Internationale de Justice.

3. Impact sur l'emploi, impact d'intérêt général, impact financier

L'impact de cette Convention sur l'emploi est nul, cette convention ne contenant aucune disposition de ce champ.

L'impact financier de cette Convention est inexistant, cette Convention ne contenant aucune disposition contraignante en la matière.

Cette Convention n'a pas non plus d'impact en matière "d'intérêt général". Comme les dix autres conventions relatives au terrorisme, elle cerne une menace particulière (en l'occurrence les attentats à l'explosif).

4. La ratification de cette convention entraînerait les conséquences suivantes en termes de complexité de l'ordonnancement juridique, ainsi qu'en termes de formalités administratives.

L'article 53, premier alinéa, de la Constitution dispose que "les Traités de paix, les traités de commerce, les traités ou accords relatifs à l'organisation internationale, ceux qui engagent les finances de l'Etat, ceux qui modifient des dispositions législatives, ceux qui sont relatifs à l'état des personnes, ceux qui comportent cession, échange, ou adjonction de territoire, ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu'en vertu d'une loi". A cet égard, on rappellera qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant la détermination des crimes et délits, ainsi que les peines qui leur sont applicables. La loi fixe également les règles concernant la procédure pénale.

Les mesures pénales à prendre qui font l'objet de l'article 4 de la convention ("qualifier d'infraction pénale au regard de son droit interne les infractions visées" ; les "réprimer par des peines prenant dûment en compte le caractère grave de ces infractions"), entraînent la modification des textes suivants :

- l'article 421-1 du Code Pénal : en effet, cet article n'incrimine, au titre des infractions terroristes, la détention, l'acquisition, le transport ou l'emploi de substances explosives ou d'engins, que dans le cas où ces substances ou engins sont de nature classique, biologique, ou chimique. Il n'y a donc pas d'incriminaiton prévue pour les matières radioactives, et il conviendra en conséquence de modifier le code pénal dans son article 421-1 sur ce point.

- éventuellement, la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des poudres et substances explosives. En effet, ce texte ne prévoit pas d'incriminations spécifiques pour la production, l'importation, l'exportation, le commerce, l'emploi, le transport et la conservation des poudres et substances explosives quand celles-ci sont réalisées à des fins terroristes. Néanmoins, ces incriminations spécifiques font l'objet de l'article 421-1/4 du Code Pénal.

En outre, aux termes de l'article 6, paragraphe 4, chaque Etat partie "adopte les mesures qui peuvent être nécessaires pour établir sa compétence en ce qui concerne les infractions visées dans les cas où l'auteur présumé de l'infraction se trouve sur son territoire et où il ne l'extrade pas vers l'un quelconque des Etats parties qui ont établi leur compétence". Cette disposition concerne directement la procédure pénale puisqu'elle permet aux juridictions pénales françaises de bénéficier de ce que l'on appelle une "compétence universelle".

Enfin, cette convention n'emporte aucune modification de l'organisation particulière, et notamment des compétences, des Territoires d'Outre-Mer. Il n'y a donc pas lieu de consulter les Assemblées territoriales.

* 1 Assemblée de l'Atlantique Nord, rapport intérimaire de la sous-commission sur le terrorisme - septembre 1987.

* 2 Rapport sur la lutte contre le terrorisme en Europe , Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, septembre 1992. Doc 6669.

* 3 Le Figaro, Les nouveaux défis de la lutte antiterroriste, 14 mars 1996.

* 4 Le Figaro op. cit.

* 5 tel Gérard Chalian, Directeur du centre européen d'étude des conflits dans Perspectives stratégiques - n° 41 - octobre 1998.

* 6 Allemagne, Argentine, Autriche, Belgique, Burundi, Canada, Chypre, Costa Rica, Côte d'Ivoire, Espagne, Etats-Unis, Finlande, France, Grèce, Irlande, Islande, Italie, Japon, Lituanie, Luxembourg, Ouzbékistan, Panama, Pays-Bas, Philippines, Roumanie, Royaume-Uni, Russie, Sri lanka, Suède, Togo, Venezuela.

* 7 Ainsi a-t-il été établi que l'auteur du détournement d'un avion de la compagnie Air Afrique, en juillet 1987, avait embarqué soit à Brazzaville, soit à Bangui, alors même que le pirate de l'air transportait avec lui des explosifs et une arme à feu.

* 8 Voir le texte annexé au document Sénat n° 4 (1998-1999).

* 9 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.

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