IV. POUR AUTANT, LES LIGNES DIRECTRICES DE LA POLITIQUE D'ASSURANCE MALADIE DU GOUVERNEMENT N'APPARAISSENT PAS CLAIREMENT : DEUX EXEMPLES

A travers deux exemples, la politique de réduction des déséquilibres de la démographie médicale et la politique hospitalière, votre rapporteur souhaite montrer que les orientations de la politique d'assurance maladie du Gouvernement ne lui apparaissent pas clairement.

A. LA RÉDUCTION DES DÉSÉQUILIBRES DE LA DÉMOGRAPHIE MÉDICALE

1. L'avenir incertain du MICA

L'an dernier, votre rapporteur avait mis l'accent sur les orientations de la politique globale du Gouvernement en matière de démographie médicale, et avait fait part de son désaccord face au relèvement, en 1999, du numerus clausus des médecins. Le numerus clausus avait en effet été porté à 3.700, après 3.583 en 1999 et 3.576 en 1998.

Il ne lui paraissait pas répondre aux besoins de la population à l'horizon d'une dizaine d'années. En effet, le rapport Choussat, rédigé en 1996, a montré que l'offre de soins médicaux est globalement excédentaire, avec 178.538 médecins en activité, dont 119.585 médecins libéraux et 58.953 médecins salariés. L'ampleur des sureffectifs a été chiffré à 30.000 par M. Choussat, qui a recommandé la stabilisation du numerus clausus pendant plusieurs années à 3.570.

Votre rapporteur souhaite cette année mettre l'accent sur l'absence de lisibilité de la politique du Gouvernement en faveur de la cessation d'activité des médecins. Cette absence de lisibilité est soulignée par de nombreux médecins, qui avaient fait des projets de cessation d'activité et ne savent pas si, comme le prévoit pourtant la loi, le mécanisme d'incitation à la cessation d'activité des médecins (MICA) sera maintenu jusqu'en 2004.

Ce mécanisme d'incitation à la cessation d'activité a été rendu plus attractif par les dispositions de l'ordonnance du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins. En application de cette ordonnance, un décret du 21 avril 1997 a ainsi amélioré le système existant de trois manières :

- l'âge d'accès au MICA a été abaissé : il a été porté à 56 ans pour 1997 et 57 ans en 1998 et 1999 au lieu de 60 précédemment ;

- le plafond de l'allocation de remplacement (ADR) pour les adhérents de moins de 60 ans ;

- les conditions de cumul avec une activité salariée ont été assouplies.

L'historique, sur les trois dernières années, du nombre des nouveaux bénéficiaires, souligne l'impact de ces dispositions :

- 1996 : 651 entrées

- 1997 : 1.263 entrées

- 1998 : 1.429 entrées.

Les médecins ayant cessé leur activité grâce au MICA à la fin de l'année 1998 présentaient les caractéristiques suivantes :

- âge moyen : 59,45 ans,

- répartition par code convention (secteur 1/secteur 2) : 76,68 %/23,32 %,

- revenu moyen : 344.620 francs,

- répartition généralistes/spécialistes : 51,8 %/48,2 %,

- nombre de médecins ayant conservé une activité salariée : 683 (soit 25,10 % de ces médecins).

Les statistiques montrent que les pourcentages de départ par région ont été voisins de ceux observés dans la répartition régionale de l'ensemble des médecins avec, toutefois, des départs un peu plus importants en Champagne, Pays de Loire, Poitou-Charentes, Provence-Alpes-Côte d'azur et Bretagne, et un peu plus faibles en Franche-Comté et Ile-de-France.

Les spécialités médicales les plus concernées par les adhésions au MICA sont la neuropsychiatrie, la biologie, l'anatomo-pathologie et la pédiatrie. Le taux de départs des spécialistes est égal au taux de départ des omnipraticiens (1,2 %).

Ces données tendent à montrer que l'impact quantitativement très significatif du MICA sur la démographie médicale globale s'est accompagnée d'une relative neutralité de ce dispositif à l'égard de la répartition par région et par spécialité de l'offre de soins.

C'est pourquoi l'article 24 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a prorogé le dispositif du MICA jusqu'au 31 décembre 2004, pour les médecins âgés au moins de 57 ans, en instituant le principe d'une restriction à son accès et/ou une modulation du montant de l'ADR selon des critères de spécialités et de zone géographique, dans un souci de meilleure adaptation de cet outil de la démographie médicale aux besoins sanitaires.

La loi a laissé le soin aux partenaires conventionnels, pour une période de dix mois (jusqu'au 27 juin 1999), de définir les conditions d'application de ce principe. A défaut de convention, les dispositions nécessaires à l'application de la modification du dispositif à compter du 1 er juillet 1999, devaient être fixées par décret.

Le présent rapport a souligné la non-application de cette disposition législative, le décret relatif à la modulation du MICA n'ayant pas été publié.

Cette situation alimente les craintes des médecins de voir ce dispositif mis en cause, conscients qu'ils sont de la fragilité de son financement.

La montée en charge du dispositif issu de l'ordonnance du 24 avril 1996 s'est en effet traduite par une progression parallèle des coûts du MICA. Ceux-ci se sont élevés à :

- 310 millions de francs en 1996,

- 440 millions de francs en 1997,

- 710 millions de francs en 1998

- et, seront probablement de 861 millions de francs en 1999.

Le taux de cotisation a, par décret en date du 31 août 1998, donc été relevé et fixé pour 1998 et 1999 à 1,76 % du montant des revenus conventionnels, avec une répartition inchangée entre les caisses d'assurance maladie et les médecins (68,75 %/31,25 %).

Parallèlement, et pour limiter les engagements à terme du régime, les montants plafonds de l'allocation de remplacement pour les médecins âgés de moins de 60 ans ont été alignés, en 1999, sur ceux des 60 ans et plus.

2. La situation du FORMMEL

Le coût élevé du MICA pèse sur le budget du Fonds de modernisation de la médecine libérale (FORMMEL), qui avait été créé au sein de la CNAMTS par l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 précitée.

Il a vocation à financer, d'une part l'allocation de remplacement (ADR) servie aux médecins dans le cadre du mécanisme d'incitation à la cessation anticipée d'activité (MICA), et d'autre part des actions d'accompagnement de l'informatisation des cabinets médicaux.

Les ressources de ce fonds ont été constituées, à titre exceptionnel, par une part des économies ou recettes supplémentaires pour l'assurance maladie résultant de l'application de l'ordonnance du 24 janvier 1996 et du décret du 30 décembre 1996. A titre pérenne, le produit de la cotisation relative au MICA est affecté au FORMMEL.

En 1998, les dépenses pour les actions d'accompagnement de l'informatisation des cabinets médicaux se sont élevées à 408 millions de francs. En 1999, il reste un reliquat de dépenses à ce titre de 27,9 millions de francs. Il n'y a pas de dépenses prévues pour 2000. En effet, à compter de 2000, les aides à l'investissement pour l'acquisition du matériel vont cesser. En revanche, une aide pérenne pour la transmission des feuilles de soins électroniques sera accordée aux professionnels.

S'agissant de l'allocation de remplacement du MICA et à la suite de la révision, par le décret n° 98-788 du 31 août 1998, des montants plafond de l'allocation de remplacement (ADR), qui sont désormais identiques quel que soit l'âge du médecin bénéficiaire, l'année 1999 s'est caractérisée par une inflexion à la baisse du nombre d'entrées dans le MICA. Seuls 924 médecins auraient ainsi adhéré au MICA en 1999, contre 1.429 en 1998. Les dépenses du FORMMEL au titre du MICA devraient atteindre 906 millions de francs, avec un déficit prévisionnel de 114 millions de francs couvert par les réserves constatées au 31 décembre 1998.

Votre commission souhaiterait entendre l'engagement du Gouvernement à conforter, pour l'avenir, le mécanisme d'incitation à la cessation d'activité des médecins. Un tel engagement serait également de nature à rassurer de nombreux médecins.

Fonds de réorientation et de modernisation de la médecine libérale
Budget du FORMMEL
(droits constatés)


Section I
orientation, réorientation, conversion et cessation d'activité

 

1998

1999
prévision

RECETTES

954,0

793,0

dont : ressources permanentes :

 
 

cotisations MICA (2 ème semestre pour 97)

770,0

793,0

produits financiers

5,0

 

Divers

4,0

 

Virement de la section II

175,0

 

DEPENSES

746,5

929,0

Solde de l'exercice

207,5

- 136,0

Report du solde de n-1

43,5

251,0

Solde cumulé

251,0

115,0

Section II
Section de la modernisation de la médecine libérale

RECETTES

78,2

24,0

dont :

 
 

participation des régimes à l'aide à l'informatisation (2.000 francs)

51,5

répartition des recettes non connues

Produits financiers

19,2

 

Produits exceptionnels

7,5

 

DEPENSES

408,7

27,9

Dotations pour informatisation

231,6

0,9

Financement d'études et expérimentations

 

20,0

Divers

2,2

7,0

Virement à la section I

175,0

 

Solde de l'exercice

- 330,5

- 3,9

Report du solde de n-1

833,0

502,5

Solde cumulé

502,5

498,6