N° 89

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000

Annexe au procès verbal de la séance du 25 novembre 1999.

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Deuxième partie de la loi de finances)


ANNEXE N° 10

CULTURE ET COMMUNICATION :

PRESSE


Rapporteur spécial : M. Claude BELOT

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 1805 , 1861 à 1866 et T.A. 370 .

Sénat : 88 (1999-2000).


Lois de finances.

OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR

La dispersion des aides directes à la presse au départ un peu surprenante, s'agissant d'interventions dont l'unité de compte est parfois inférieure au million de francs, se justifie par la fragilité, si ce n'est du secteur dans son ensemble, du moins de certains titres et par la nécessité de préserver une diversité qui en font toute la richesse et le dynamisme.

Dix articles se partagent 260 millions de francs. Si l'on retire les remboursements à la SNCF et le plan social des NMPP, c'est 145 millions qui se répartissent sur huit postes ; soustraction faite de l'aide au portage qui constitue désormais le point de concentration de l'effort budgétaire, cela donne une moyenne par article inférieure à 12 millions de francs.

La diversité que ces aides tendent à perpétuer, est une condition de la démocratie . Et c'est dans cette perspective que votre rapporteur examine le présent budget sans oublier pour autant que la presse agit désormais dans un espace éminemment concurrentiel : elle est en concurrence avec des grands groupes internationaux et avec d'autres médias qu'il s'agisse de la télévision ou, peut-être, demain, d'Internet.

A. AIDES DIRECTES : UNE DISPERSION CONDITION DU PLURALISME

Le Gouvernement a fait " clairement le choix d'un plan de développement de la presse quotidienne ". Cette priorité se traduit par un effort particulier en faveur du portage mais aussi de l'investissement et de la modernisation par rapport au fonctionnement.

L'intention ne peut qu'être approuvée, même si appliqués de façon trop rigide, de tels principes peuvent aboutir à une répartition plus arbitraire voire ponctuellement contestable.

1. La priorité au portage

Il s'agit de relancer la vente de la presse quotidienne d'information politique et générale. Dans un monde saturé d'informations, les patrons de presse comme les responsables gouvernementaux ont pris conscience de l'importance d'un mode de distribution, qui seul peut fidéliser une clientèle qui veut des nouvelles au tout début de sa journée.

La diffusion par portage connaît de fortes disparités selon les familles de presse et les zones géographiques. Alors que dans l'Est et le Nord de la France, ce mode de diffusion est bien implanté, il demeure encore marginal sur le reste du territoire et peu développé pour la presse quotidienne nationale. La situation du secteur de la presse écrite au regard du portage est donc contrastée.

Une des questions qui fait l'objet de débats au sein de la presse et par voie de conséquence entre une partie de la presse et le gouvernement, porte sur les parts respectives qu'il faut accorder à l'aide au stock par rapport à celle favorisant l'effort à la marge. S'il faut bien admettre que la majeure partie de l'aide doit aller aux journaux qui font l'effort de développer un réseau de portage, il est paradoxal que l'aide ne concerne que marginalement la presse notamment dans l'Est où le portage est traditionnellement très développé et donc les marges d'expansion relativement faibles.

2. Le Fonds de modernisation : une mise en place laborieuse

C'est l'article 62 de la loi de finances pour 1998 qui a institué un compte d'affectation spéciale n°902-32 intitulé : "Fonds de modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale " et l'a alimenté par une taxe de 1 % sur certaines dépenses de publicité " hors médias ".

La création de ce fonds procède d'une initiative parlementaire. C'est en effet à la suite d'un amendement de M. Le Guen que l'Assemblée nationale, a institué une taxe sur la publicité hors médias.

A la base de cette taxe, il y a une analyse : la pénurie de moyens dont souffre la presse résulte en partie de ce qu'elle doit faire face auprès des annonceurs à la concurrence du hors médias, prospectus distribués sans les boites aux lettres ou journaux gratuits .

En taxant le " hors médias " et en l'affectant à des aides à l'investissement, on ferait d'une pierre deux coups : d'un côté, on contribue à maîtriser une concurrence anormale ; de l'autre, on donne des moyens supplémentaires de modernisation à un secteur qui doit s'adapter à un environnement technologique mouvant et toujours plus concurrentiel.


Sur le plan des intentions, on ne peut que souscrire aux objectifs affichés par la ministre de la culture et de la communication lorsqu'elle a déclaré qu'il fallait " rompre avec la logique de compensation des charges au profit d'une logique d'incitation à la modernisation " et que " La presse d'information politique et générale a davantage besoin de restaurer son esprit entrepreneurial , ses performances éditoriales et économiques, plutôt que de se voir appliquer toujours les mêmes remèdes pour compenser ses déficits. "

Mais si l'idée était simple, l'application l'était beaucoup moins, tant au niveau du prélèvement de la ressource que des modalités de sa distribution. Cela explique largement le retard dans la mise en oeuvre de ce fonds , comme votre rapporteur l'a déjà souligné l'année dernière.

Les principales recettes du fonds sont constituées par le produit de la taxe instituée à l'article 302 bis MA du code général des impôts, ainsi que, ultérieurement, - et s'il y a lieu, car les bénéficiaires préfèrent les subventions aux avances remboursables... - par le remboursement des avances consenties par le fonds.

Aux termes de l'article 302 bis MA du code général des impôts, la taxe qui alimente le fonds de modernisation de la presse, est due par toute personne assujettie à la TVA dont le chiffre d'affaires de l'année civile précédente est supérieur à 5.000.000 F hors TVA.

Cette taxe, dont le taux est fixé à 1 %, est assise sur les dépenses hors taxes engagées au cours de l'année civile précédente et ayant pour objet :

1°) la réalisation ou la distribution d'imprimés publicitaires

2°) les annonces et insertions dans les journaux mis gratuitement à la disposition du public.

Sont exclues de l'assiette de la taxe :

a) les dépenses engagées par les associations à but non lucratif en application des dispositions des articles 256 B et 261 du code général des impôts ;

b) les dépenses afférentes à la réalisation ou à la distribution de catalogues adressés, destinés à des opérations de vente par correspondance ou à distance.

La surestimation de la base taxable, la nécessité de soustraire certaines activités (ventes par correspondance et organisations à but non lucratif) expliquent la faiblesse du produit annoncé.

Avec 139 millions de francs de produit annoncé pour 1998 et entre 155 et 160 millions de francs pour 1999, on est assez loin des espérances exprimées lors du vote du dispositif, qui se situaient plutôt aux alentours de 300 à 400 millions de francs.

Les recettes prévues pour 2000 sont maintenues au même niveau de 160 millions de francs, même si les 155 millions de francs déjà perçus au titre de 1999, laissent espérer un rendement supérieur proche de 200 millions de francs.

Les bénéficiaires du fonds sont :

a) les entreprises de presse éditrices d'au moins un quotidien ou d'une publication hebdomadaire régionale ayant obtenu la certification d'inscription délivrée par la commission paritaire des publications et agences de presse et relevant de la presse d'information politique et générale ;

b) les agences de presse inscrites sur la liste prévue à l'article l er de l'ordonnance n°45-2646 du 2 novembre 1945 portant réglementation provisoire des agences de presse.

Les aides accordées prennent la forme de subventions, d'avances remboursables ou de dépenses d'études. Les décisions d'attribution sont prises par le ministre chargé de la communication après avis d'un comité d'orientation.

Le décret n° 99-79 du 5 février 1999 relatif au fonds de modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale , modifié par le décret n° 99-356 du 7 mai 1999, définit les actions éligibles et les dépenses prises en compte pour le calcul des aides.

Ces critères sont présentés comme très ouverts et permettent tous les projets de modernisation, qu'il s'agisse des rédactions, des imprimeries, des services commerciaux ou des réseaux de distribution, à l'exception des investissements de simple renouvellement.

Le comité d'orientation du fonds s'est réuni pour la première fois en juin dernier afin d'étudier les premières demandes au titre du " régime dérogatoire " permettant d'apporter une aide à des opérations d'investissement déjà engagées à la date de la réunion du comité d'orientation . Il a été indiqué à votre rapporteur que d'autres demandes au titre de ce régime dérogatoire, ainsi que des demandes au titre du régime normal doivent être examinées au comité d'orientation du mois de décembre 1999.

A ce jour, la part respective des demandes de subventions et celles des demandes d'avances remboursables représentent respectivement 95 % et 5 % des aides du fonds, alors que la proportion attendue était de 45 % / 55 %.

Il a également été précisé à votre rapporteur spécial qu'un " bilan de l'action de ce fonds doit par ailleurs être réalisé par le comité lui-même au printemps 2000 pour la gestion de l'année précédente " et qu'au " titre du régime dérogatoire environ 150 dossiers ont été déposés par une centaine d'éditeurs. Les investissements sont de natures très diverses montrant que les besoins des entreprises de presse sont eux-mêmes très diversifiés. Une partie des propositions concernent des actions de numérisation. "

A la connaissance de votre rapporteur aucune n'aide n'a été encore arrêtée et a fortiori versée au titre du fonds de modernisation. Les difficultés déjà signalées au niveau collecte se doublent de problèmes sur le plan de la distribution. Il faut en effet bien constater que le volontarisme qui marquait les premières déclarations, semble avoir laissé la place à une attitude réaliste conduisant les pouvoirs publics à ratifier au nom de l'urgence et de l'efficacité des projets déjà lancés du fait du jeu normal de la concurrence.

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