Projet de loi de finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale, TOME III - Les moyens des services et les dispositions spéciales (deuxième partie de la loi de finances) Annexe n° 18 - Emploi et solidarité : I. - Emploi

OSTERMANN (Joseph), Rapporteur spécial

RAPPORT GENERAL 89-TOME III Annexe n° 18 (1999-2000) - COMMISSION DES FINANCES

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Table des matières




N° 89

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000

Annexe au procès verbal de la séance du 25 novembre 1999.

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Deuxième partie de la loi de finances)


ANNEXE N° 18

EMPLOI ET SOLIDARITÉ :

I
. - EMPLOI

Rapporteur spécial : M. Joseph OSTERMANN

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 1805 , 1861 à 1866 et T.A. 370 .

Sénat : 88 (1999-2000).


Lois de finances.

PRINCIPALES OBSERVATIONS

Votre rapporteur spécial est amené à formuler trois principales observations sur le budget de l'emploi pour 2000.

A - L'EXÉCUTION DU BUDGET DE L'EMPLOI RÉVÈLE DE NOMBREUSES IMPERFECTIONS

Votre rapporteur spécial rappelle que la Cour des comptes a présenté, dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 1998, sa première monographie consacrée au budget de l'emploi, dont il convient de relever les principales conclusions.

Le budget de l'emploi est désormais le deuxième budget civil de l'Etat , après celui de l'enseignement scolaire. Ses dotations ont progressé de plus de 36 % depuis 1994 , et même de 51 % si on y associe le chapitre 44-75 du budget des charges communes (" Mesures diverses en faveur de l'emploi "). Les dotations de ce chapitre (20,4 milliards de francs en 1994 mais 43 milliards de francs en 1998) ont néanmoins été intégrées au fascicule budgétaire de l'emploi par la loi de finances initiale pour 1999 , ce dont il convient de se féliciter.

D'une manière générale, le budget de l'emploi est soumis à une inertie qui en rend la réorientation difficile.

La Cour des comptes se montre assez sévère sur l'effort de maîtrise des dotations budgétaires, qualifié d' " insuffisant " .

Elle conclut sur ce point que s'est affirmée constamment " une sorte de dialectique entre l'enregistrement obligé des charges liées aux dispositifs existants ou aux nouvelles interventions mises en place, et la recherche d'économies, par la suppression ou le recadrage de certains dispositifs ". Elle ajoute toutefois : " toutes les mesures d'économies prévues ne sont pas nécessairement entrées en vigueur " , tandis que d'autres " n'ont pu être mises en oeuvre que de façon différée ".

Cette analyse conforte celle développée par votre rapporteur spécial lors de l'examen du budget de l'emploi pour 1999. Il avait en effet souligné, à cette occasion, le financement des priorités gouvernementales par la réalisation d'économies significatives, pour un montant de 11 milliards de francs, baptisées, pour la circonstance, " recentrages ".

Par ailleurs, la Cour des comptes a fait un ensemble d'observations relatives aux modifications intervenues en cours de gestion.

Elle constate notamment que le budget de l'emploi subit de fréquentes adaptations, suite à l'intervention de décrets d'avance. En outre, le budget de l'emploi fait l'objet d'ouvertures de crédits très importantes par voie de fonds de concours.

Elle considère que le budget de l'emploi fait l'objet de " marges de gestion non négligeables " : le principe de la spécialité budgétaire est affecté par ce phénomène, l'assouplissement de la spécialité des crédits élargissant les marges de manoeuvre des gestionnaires.

La Cour des comptes estime que les résultats d'exécution sont biaisés par des défauts d'ordre méthodologique.


Elle considère notamment que la nomenclature budgétaire ordinaire nuit au suivi des crédits de l'emploi et se révèle insuffisante pour décrire correctement la politique de l'emploi.

Elle conclut que " le budget de l'Etat ne retrace qu'une partie des financements publics de la politique de l'emploi et de la formation professionnelle ".

Au regard de ces observations, votre rapporteur spécial estime que des choix opérés par le projet de budget de l'emploi pour 2000 sont contestables.

C'est le cas, par exemple, de la création de 130 emplois. Le gouvernement indique 1( * ) que ces créations d'emplois interviendront " particulièrement dans les sections d'inspection du travail, fortement mobilisées par la mise en oeuvre du dispositif d'aménagement et de réduction du temps de travail ".

Or, le Sénat a déjà manifesté son hostilité au caractère autoritaire du dispositif de réduction du temps de travail présenté par le gouvernement.

D'autre part, les effectifs budgétaires du ministère seraient portés à 10.115 en 2000, soit une augmentation des emplois de 5,4 % depuis 1997.

Or, la Cour des comptes s'est montrée très critique sur la gestion des emplois par le ministère de l'emploi et de la solidarité.

Dans une lettre datée du 28 juillet 1998 et adressée à la ministre de l'emploi et de la solidarité, le Premier président de la Cour des comptes écrivait : " la Cour a relevé que les effectifs dont disposait le ministère étaient éloignés des prévisions et autorisations de la loi de finances initiale ". Il poursuivait : " La description des effectifs qui figure en loi de finances initiale, seule information dont dispose la représentation nationale en la matière, ne correspond pas à la réalité ". Puis il concluait : " Une amélioration de la gestion prévisionnelle des effectifs est indispensable ".

Mais dans ce contexte, la création de nouveaux emplois paraît donc inopportune.

B - LE COÛT CROISSANT DES EMPLOIS JEUNES


Les emplois jeunes constituent l'une des deux priorités du gouvernement en matière d'emploi, avec la réduction du temps de travail. Il s'agit en effet pour lui de " faciliter le retour à l'emploi des populations les plus fragiles, notamment grâce aux emplois jeunes ".

Or, cette priorité est extrêmement coûteuse, et son coût croît régulièrement chaque année.

Le chapitre 44-01 Programme " nouveaux services - nouveaux emplois " du budget de l'emploi comporte, pour 2000, des crédits à hauteur de 21,34 milliards de francs , soit une augmentation de 53,3 % par rapport à 1999 (13,92 milliards de francs).

Les mesures nouvelles inscrites au projet de budget pour 2000 au titre des emplois jeunes s'élèvent à 7,46 milliards de francs : 4,38 milliards de francs au titre de l'ajustement des crédits aux besoins, et 3,08 milliards de francs pour le financement des entrées nouvelles.

L'objectif que s'est fixé le gouvernement en matière d'emplois jeunes est la création de 60.908 emplois en 2000, soit un total de 300.000 emplois créés. A terme, le nombre total d'emplois jeunes devrait s'élever à 350.000, soit un coût en année pleine de 33,25 milliards de francs 2( * ) pour le seul budget de l'emploi.

En effet, le budget de l'emploi ne regroupe pas l'ensemble des crédits destinés au financement de ce dispositif.

En effet, les 65.000 emplois jeunes recrutés par l'éducation nationale comme aides éducateurs, et les 20.000 jeunes embauchés par le ministère de l'intérieur comme adjoints de sécurité sont financés, respectivement, par le budget de l'enseignement scolaire à hauteur de 1,1 milliard de francs et par le budget de la sécurité pour 698,8 millions de francs.

Par ailleurs, l'outre-mer bénéficie de 11.000 emplois jeunes, dont 3.000 créations d'emplois en 2000, pour des crédits s'établissant à 795,5 millions de francs.

Le coût total des emplois jeunes en 2000 s'élève donc à 23,93 milliards de francs.

Votre rapporteur spécial rappelle que ce dispositif consiste à créer des emplois dans le secteur non marchand de manière artificielle. Il s'agit même d'un succédané d'emplois publics, leur contrat ne devant durer que trois ans : le travail précaire dans le secteur public ou parapublic s'en trouve accentué.

Par ailleurs, l'avenir de la grande majorité des jeunes embauchés dans le cadre de ce dispositif est très incertain.

Du reste, la Commission européenne exprime son scepticisme sur la pertinence de ce dispositif, que la France a présenté comme " bonne pratique " au titre de la mise en oeuvre de son plan national d'action pour l'emploi (PNAE). Elle écrit dans son rapport sur l'emploi 1999 que les emplois jeunes " ont contribué au recul du chômage des jeunes en 1998 " , mais que " la survie de ces postes, une fois qu'aura pris fin le soutien financier des pouvoirs publics, dépendra de la capacité du programme à générer des emplois économiquement viables ".

Votre rapporteur spécial doute de cette capacité, et estime qu' il est à craindre qu'une part importante d'entre eux intègre définitivement la fonction publique , ce qui ne peut qu'accroître les effectifs des fonctionnaires et, par conséquent, les dépenses du budget général. Par ailleurs, cela ne peut qu'accroître la précarité au sein de la fonction publique.

C - LE FINANCEMENT DES 35 HEURES N'EST PAS ASSURÉ

La réduction du temps de travail est l'autre priorité du gouvernement en matière d'emploi. Il s'agit de " promouvoir l'emploi par la réduction négociée du temps de travail et les allégements de charges sociales ".

Or, seuls 4,3 milliards de francs sont inscrits au budget de l'emploi pour 2000 au titre du passage aux " 35 heures ", alors que son coût est estimé à 65 milliards de francs pour l'année prochaine.

Votre rapporteur spécial souhaiterait rappeler les modalités du financement des 35 heures telles qu'elles étaient prévues par le gouvernement. Dans son projet initial

Elles sont relativement complexes car elles reposent en grande partie sur les dispositions du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, et, surtout, sur un raisonnement postulant le succès du le passage aux 35 heures, le dispositif s'autofinançant en partie.

Trois éléments sont à distinguer :

- le coût des allégements de charges sociales existants ;

- celui de l'extension des mesures d'allégement ;

- et celui des aides à la réduction du temps de travail proprement dites.

Ces deux derniers points recouvrent le financement des 35 heures.

La création d'un fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale

Afin d'individualiser le coût des allégements, présents et à venir, des charges sociales, le gouvernement a décidé de créer, dans le PLFSS pour 2000, un fonds de financement auquel sera affecté l'ensemble des recettes destinées à financer cette mesure d'allégement. Le gouvernement reconnaît ainsi, implicitement, la pertinence d'une telle disposition en matière de créations d'emplois.

Les dépenses engagées au titre de la " ristourne dégressive " dite Juppé (allégement de charges sociales jusqu'à 1,3 SMIC), soit 39,5 milliards de francs , seraient ainsi " sorties " du budget de l'emploi et supportées par le fonds de financement.

Par ailleurs, l'allégement des charges sociales serait étendu de 1,3 à 1,8 SMIC, soit un coût estimé à 7,5 milliards de francs en 2000.

Cette mesure bénéficierait uniquement aux entreprises passées aux 35 heures
, les autres continuant à bénéficier de la " ristourne Juppé " jusqu'à 1,3 SMIC.

Pour l'année 2000, le coût total des allégements de charges sociales, supporté par le nouveau fonds, devrait donc s'établir à 47 milliards de francs.

Cette mesure sera financée, en partie, par un transfert de ressources de l'Etat au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale .

La plus grande part, soit 39,5 milliards de francs, des 46,2 milliards de francs attendus par l'Etat en 2000 au titre du droit de consommation sur les tabacs manufacturés sera affectée au fonds de financement, afin de financer la " ristourne Juppé ".

Une autre partie du produit du droit de consommation sur les tabacs sera affecté, d'une part, à la caisse nationale d'assurance maladie, à hauteur de 3,5 milliards de francs, afin de compenser la perte des cotisations d'assurance personnelle précédemment versées par les départements et l'Etat et supprimées par la loi créant la couverture maladie universelle, et, d'autre part, au fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante créé par la loi de financement de la sécurité sociale, pour un montant de 200 millions de francs.

D'une manière générale, les mesures d'allégements de charges sociales devraient être favorables à l'emploi, puisqu'elles élargissent la zone de dégressivité de l'allégement sur les bas salaires et transposent, sous la forme d'un allégement général, l'idée de la franchise de cotisations.

Il apparaît cependant que le financement de ces mesures n'est que partiel.

En effet, l'affectation de 39,5 milliards de francs sera insuffisante, le coût de l'ensemble de ces allégements de charges sociales s'établissant à 47 milliards de francs en 2000.

La différence, soit 7,5 milliards de francs, ne pourra être financée que par la création de deux nouveaux prélèvements :

- en premier lieu, l'" écotaxe " , c'est-à-dire l'extension, en 2000, de l'assiette de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) aux granulats, aux phosphates et aux produits phytosanitaires (puis à la consommation d'énergie en 2001), serait à la charge des entreprises et devrait engendrer un produit fiscal estimé à 3,2 milliards de francs en 2000 ;

- en second lieu, une contribution sociale, au taux de 3,3 %, sur les bénéfices des sociétés réalisant plus de 50 millions de francs de chiffre d'affaires viendrait prendre le relais de la surtaxe temporaire sur les bénéfices des sociétés instaurée en 1997, et devrait rapporter 4,3 milliards de francs - cela maintiendrait l'imposition des bénéfices des sociétés à un haut niveau.

Le total de ces recettes nouvelles, affectées au fonds de compensation des exonérations de charges sociales servirait à financer l'extension de l'allégement des charges sociales de 1,3 à 1,8 SMIC, réservée aux seules entreprises qui passent aux 35 heures.

A terme, c'est-à-dire à partir de 2002, ces recettes devraient s'établir à 25 milliards de francs, soit 12,5 milliards de francs pour chacune des deux impositions.

Un financement en grande partie incertain

L'aide incitative à la réduction du temps de travail
- aide pérenne et générale, appelée aide structurelle - prendrait, quant à elle, la forme d'un allégement des cotisations patronales de 4.000 francs par salarié et par an, et sera réservée, ici encore, aux entreprises passées aux 35 heures : son coût est évalué à 17,5 milliards de francs en 2000, mais à 40 milliards de francs en 2002.

Le financement de l'aide structurelle serait assuré
de deux manières :

- par une dotation budgétaire de 4,3 milliards de francs , qui est inscrite au budget de l'emploi pour 2000, et qui peut être considérée comme une subvention de l'Etat au fonds de compensation des exonérations de charges sociales (par ailleurs, 2,5 milliards de francs sont destinés aux aides incitatives à la réduction du temps de travail dans le cadre de la loi Robien mais n'ont pas vocation à être intégrés dans le nouveau fonds 3( * ) ) ;

- par une mise à contribution des organismes de protection sociale, évaluée entre 13,5 et 15,5 milliards de francs : l'UNEDIC pour un montant compris d'environ 8 milliards de francs (les négociations sont en cours), et les caisses de sécurité sociale à hauteur de 5,5 milliards de francs.

Le gouvernement argue en effet que, en raison des moindres dépenses et des suppléments de recettes résultant, pour les régimes sociaux, des créations d'emplois engendrées par la réduction du temps de travail, les organismes de protection sociale doivent participer au financement des 35 heures. Le gouvernement parle du " recyclage " des économies de la sécurité sociale.

Or, ce " recyclage ", parfois aussi appelé " autofinancement ", est particulièrement hasardeux : il constitue un véritable pari, reposant sur le présupposé d'une corrélation quasi mécanique et proportionnelle entre réduction du temps de travail et créations d'emplois.

En tout état de cause, les partenaires sociaux sont opposés à cette formule, que notre commission avait critiquée dans le rapport relatif au débat d'orientation budgétaire, la qualifiant d' " usine à gaz ", et qui est contraire aux dispositions de la loi Veil du 25 juillet 1994 selon laquelle tout allégement de cotisations sociales décidé par l'Etat doit être intégralement compensé.

Elle porte aussi atteinte à l'autonomie des organismes de protection sociale, gérés par les partenaires sociaux sur une base paritaire.

En outre, si les 35 heures créaient réellement de nombreux emplois, l'amélioration des comptes sociaux devrait se traduire, non par un prélèvement, mais par une baisse du taux des cotisations sociales.

Enfin, il convient de rappeler que l'équilibre des comptes sociaux est très précaire , la CNAM étant même déficitaire en 1999 (- 12,1 milliards de francs) et devant l'être encore en 2000 (- 3,7 milliards de francs).

Le caractère hasardeux de ce mode de financement ne se pose donc pas tant pour 2000 que pour les années suivantes. La contribution des organismes sociaux pourrait ne plus être supportable, qui plus est si les 35 heures ne créent pas d'emplois à la hauteur des espérances du gouvernement et des complexes mécanismes financiers qu'il a échafaudés. Il n'y aurait pas, dès lors, d'économies à " recycler ". Le gouvernement n'a donc pas assuré le financement ex ante d'une mesure qu'il a pourtant imposée de manière autoritaire, tant aux entreprises qu'aux partenaires sociaux.

Le 25 octobre 1999, le gouvernement a annoncé qu'il renonçait finalement à imposer aux partenaires sociaux de contribuer au financement des 35 heures. Il a préféré faire financer une partie de son dispositif de réduction du temps de travail par le produit de la taxation des heures supplémentaires ainsi que par l'affectation au fonds de financement créé par le PLFSS pour 2000 des droits pesant sur les alcools, aujourd'hui affectés au fonds de solidarité vieillesse et à la CNAMTS.

" L'usine à gaz " s'est transformée en " bricolage ".

Selon une étude conjointe de l'Insee, de la DARES 4( * ) et de la Direction de la prévision du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, seuls 7 % environ des emplois créés entre juin 1997 et juin 1999 sont dus à la réduction du temps de travail.



Les allégements de charge, préconisés par notre commission sont donc plus efficaces que les 35 heures en terme de créations d'emplois.

Le financement des 35 heures n'est donc pas seulement incertain, il est aussi potentiellement dangereux pour l'équilibre de la sécurité sociale et des comptes sociaux.

La réduction " négociée " du temps de travail a été proposée par la France comme sa seconde " bonne pratique " dans le cadre de son PNAE.

La Commission européenne se montre très réservée. Elle note en effet : " Pour mesurer les retombées de la réduction du temps de travail sur l'emploi, il faut enregistrer les créations et les pertes d'emplois entraînées par la réorganisation des entreprises. Le résultat net dépendra principalement de l'évolution des salaires et des gains de productivité et ne deviendra donc visible qu'à moyen terme. Il convient en outre de tenir compte du coût budgétaire des emplois créés ou préservés ".

Quant au FMI, il écrit, à propos de notre pays : " Des politiques contestables, telles que des réductions statutaires du temps de travail, doivent être mises en oeuvre avec souplesse si elles ne peuvent être évitées ".

AVANT-PROPOS

Dans le projet de loi de finances pour 2000 , les crédits du ministère de l'emploi s'élèvent à 122,06 milliards de francs . Ils s'établissaient à 162,05 milliards de francs en 1999.

La baisse apparente des crédits est donc de 24,68 %, en diminution de près de 40 milliards de francs.

Toutefois, il convient de préciser, dès à présent, que le financement de la ristourne générale sur les bas salaires, dite " ristourne Juppé ", n'est plus inscrit au budget de l'emploi dans le projet de loi de finances pour 2000. Les dépenses engagées à ce titre, soit 39,49 milliards de francs , seront en effet prises en charge par le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale créé par l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Une part du droit de consommation sur les tabacs manufacturés sera affectée à ce nouveau fonds pour assurer, à même hauteur, le financement de la " ristourne dégressive ".

La nomenclature budgétaire subit ainsi une seconde modification très importante en deux ans. En effet, les crédits concernant des " mesures exceptionnelles en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle ", qui étaient inscrits au budget des charges communes pour un montant de 43 milliards de francs en 1998, avaient été intégrés au sein du budget de l'emploi en 1999.

Toutefois, à périmètre constant, le budget de l'emploi croît de 2,3 % par rapport à 1999. Il s'agit donc d'un budget prioritaire, les dépenses du budget général augmentant, en moyenne, de 0,9 %.

CHAPITRE PREMIER

PRÉSENTATION GÉNÉRALE

I. L'EXÉCUTION DU BUDGET DE L'EMPLOI (1994-1998)

Le rapport de la Cour des comptes relatif à l'exécution des lois de finances pour 1998 contient la première monographie consacrée au budget de l'emploi.

La Cour relève que le budget de l'emploi est le deuxième budget civil de l'Etat , après celui de l'enseignement scolaire, et observe que, depuis 1994, il a connu une croissance considérable de ses dotations : + 36,2 %, et même + 51 % si on y associe le chapitre 44-75 du budget des charges communes (" Mesures diverses en faveur de l'emploi "). Les dotations de ce chapitre ont néanmoins été intégrées au fascicule budgétaire de l'emploi dans la loi de finances initiale pour 1999. Il convient toutefois de préciser que la Cour appelle " budget consolidé de l'emploi " l'ensemble constitué par le budget de l'emploi proprement dit et le chapitre 44-75 du budget des charges communes.

La monographie sur le budget de l'emploi donne à la Cour des comptes l'occasion de faire un certain nombre de remarques et d'observations qui peuvent être analysées en cinq points.

A. DES CRÉDITS DE L'EMPLOI EN FORTE AUGMENTATION

Les crédits inscrits sur ce fascicule s'établissaient, en 1998, à 112,6 milliards de francs. Le titre III a, en comparaison de l'ensemble du budget, évolué modérément (2,06 % en moyenne annuelle). Toutefois, les crédits alloués à l'ANPE ont fortement cru, de 17 % entre 1993 et 1998.

Le titre IV a, lui, connu une évolution beaucoup plus importante, puisqu'il a progressé de 39,3 % entre 1994 et 1998. Les crédits de la 4 ème partie de ce titre (" Action économique ") sont à l'origine de cette forte croissance : ils sont passés de 42,8 à 69,5 milliards de francs.

B. UN BUDGET DE L'EMPLOI BIS ?

Le chapitre 44-75 du budget des charges communes a été doté de montants considérables en loi de finances initiale, souvent largement complétés par les lois de finances rectificatives et des décrets d'avance.

Les dotations sont passées de 20,4 à 43 milliards de francs de 1994 à 1998. Elles ont été -rappelons-le- intégrées au budget de l'emploi en 1999.

C. UN EFFORT DE MAÎTRISE DES DOTATIONS INSUFFISANT

La Cour estime que " l'élaboration des lois de finances montre un effort pour maîtriser la croissance des dotations, effort d'une ampleur insuffisante par rapport à la tendance constatée " , ajoutant que cet effort s'est principalement manifesté dans la révision des services votés figurant dans le projet de loi de finances.

En 1998, les mesures d'ajustement ont été négatives de 4,5 milliards de francs, les réductions l'emportant largement sur les ajustements positifs.

Les principales réductions de crédits ont porté sur :

- les contrats initiative emploi (CIE), pour 4.801 millions de francs ;

- les dispositifs en faveur des retraits d'activité -allocations spéciales du FNE et préretraites progressives- pour un montant de 1.786 millions de francs ;

- la suppression des emplois de ville, soit 430 millions de francs.

Parmi les majorations de crédits , figuraient notamment :

- une forte augmentation des dotations destinées au dispositif d'incitation à la réduction du temps de travail (loi de Robien), pour 1.323,5 millions de francs ;

- et l'inscription d'une dotation de 708 millions de francs pour la subvention à l'association pour la gestion de la structure financière.

Les moyens nouveaux étaient particulièrement élevés (10,7 milliards de francs) :

- 8,35 milliards pour le programme en faveur de l'emploi des jeunes, financé en 1997 par décret d'avance ;

- la revalorisation, à hauteur de 539,7 millions de francs, de l'allocation spécifique de solidarité (ASS) ;

- les crédits destinés aux stages de chômeurs de longue durée, majorés de 571,7 millions de francs pour l'ouverture de 30.000 places supplémentaires en stage d'initiation et de formation à l'emploi (SIFE) ;

- 200 millions de francs pour un nouveau dispositif d'encouragement au développement d'entreprises nouvelles par les jeunes.

La révision des services votés ne s'élevait, en 1998, qu'à 1,3 milliard de francs, soit le montant le plus faible sur la période examinée :

- les dispositifs de retrait d'activité font l'objet d'une révision entraînant une réduction de crédits de 388,8 millions de francs ;

- la suppression des emplois de ville engendre une économie de 183,3 millions de francs ;

- la suppression de l'exonération de cotisations sociales en faveur des travailleurs indépendants créant ou reprenant une activité se traduit par un allégement de charges de 243 millions de francs ;

- un financement à concurrence de 400 millions de francs par voie de fonds de concours des primes d'apprentissage était initialement prévu : cette opération a été réalisée en cours d'année, mais dans des conditions différentes, par un prélèvement de 500 millions de francs sur les fonds de l'AGEFAL, institué par voie législative.

La Cour conclut que, sur les quatre années sous revue, s'est affirmée constamment " une sorte de dialectique entre l'enregistrement obligé des charges liées aux dispositifs existants ou aux nouvelles interventions mises en place, et la recherche d'économies, par la suppression ou le recadrage de certains dispositifs ". Mais elle ajoute : " toutes les mesures d'économies prévues ne sont pas nécessairement entrées en vigueur " , tandis que d'autres " n'ont pu être mises en oeuvre que de façon différée ".

D. DE NOMBREUSES MODIFICATIONS INTERVENUES EN COURS DE GESTION

La Cour des comptes a fait un ensemble d'observations relatives aux modifications intervenues en cours de gestion.

Elle constate de fréquentes adaptations du budget de l'emploi par des décrets d'avance. Les crédits ouverts ont notamment concerné des dispositifs nouveaux, à deux reprises : le financement des emplois de ville en 1996, pour 200 millions de francs, et celui des emplois jeunes en 1997, pour 2 milliards de francs.

Elle observe que les annulations de crédits ont relativement épargné les moyens d'intervention, le budget consolidé de l'emploi bénéficiant d'une sorte de " sanctuarisation ".

Surtout, la Cour relève que " le budget de l'emploi compte parmi les budgets faisant l'objet des ouvertures de crédits par voie de fonds de concours les plus importantes ". Deux sources sont principalement à l'origine des rattachements : les concours du fonds social européen, et la contribution des entreprises aux dispositifs de retrait d'activité. Ainsi, entre 1994 et 1998, les majorations d'autorisations budgétaires par fonds de concours ont-elles augmenté de 47,2 %, cette progression étant due, pour l'essentiel, à celle des concours du FSE. Ces derniers alimentent directement les programmes financés sur le budget de l'emploi, à hauteur d'environ un milliard de francs.

La Cour note également des modifications de la répartition des crédits tenant largement à la " dissociation entre le budget de l'emploi et le budget des charges communes ".

L'année 1998 a été marquée par une rupture dans l'évolution de la contribution nette du budget consolidé de l'emploi aux autres budgets avec une forte croissance de cette contribution, passée à 4,2 milliards de francs. Cette évolution provient essentiellement du budget de l'emploi proprement-dit, en raison du programme en faveur de l'emploi des jeunes, à l'origine d'importantes répartitions vers l'enseignement scolaire et l'intérieur.

En outre, la Cour constate de nombreux mouvements de crédits, dans les deux sens, entre le budget du ministère de l'emploi et le chapitre 44-75 du budget des charges communes. Ces mouvements compliquent inutilement la gestion des crédits. Elle se félicite, dès lors, de la suppression du chapitre 44-75 en 1999, et de l'inscription des dotations correspondantes sur le budget de l'emploi, considérant qu'il s'agit d' " une simplification appréciable au dispositif budgétaire de l'emploi ".

La Cour des comptes relève également des taux de reports considérables sur l'ensemble de la période , notamment en ce qui concerne les dépenses en capital. Elle estime qu'il faut y voir " une difficulté manifeste à consommer les dotations ouvertes ".

Enfin, la Cour considère que le budget de l'emploi fait l'objet de " marges de gestion non négligeables ". Elle observe que des modifications de la sous-répartition des crédits en cours d'exécution ont été très importantes sur certains chapitres, notamment les chapitres 44-74 " Fonds national pour l'emploi " et 44-78 " Exonérations de cotisations sociales en faveur de l'emploi ".

Elle estime que le principe de la spécialité budgétaire lui-même est affecté par ce phénomène, l'assouplissement de la spécialité des crédits élargissant les marges de manoeuvre des gestionnaires. Ces derniers bénéficient également de " la surabondance de certaines dotations " , notamment celles destinées aux contrats initiative-emploi (CIE) et aux dispositifs de préretraite.

E. DES RÉSULTATS D'EXÉCUTION BIAISÉS PAR DES DÉFAUTS MÉTHODOLOGIQUES

Selon la Cour, l'analyse des résultats d'exécution du budget de l'emploi impose de prendre des précautions d'ordre méthodologique.

D'une part, la nomenclature budgétaire ordinaire doit être dépassée.
La cour observe que " le budget de l'emploi, pour ce qui est des interventions, manque de lisibilité " : quelques grands chapitres sont gérés comme de larges enveloppes de crédits dont la ventilation est donnée à titre indicatif dans les fascicules budgétaires annexés au projet de loi de finances initial. Cette situation ne peut que nuire à la clarté et au suivi des crédits de l'emploi.

Elle ajoute que la portée essentiellement juridique de la nomenclature budgétaire traditionnelle explique l' insuffisance de cette dernière à décrire correctement la politique de l'emploi. Elle estime donc nécessaire, pour apprécier l'évolution des dépenses de ce budget sur plusieurs années, de les regrouper selon la nomenclature par agrégats, qui constitue, selon elle, " le cadre nature pour le rapprochement des prévisions et des résultats ".

D'autre part, il conviendrait d'améliorer la portée des dépenses budgétaires.

La Cour constate que " le plus souvent, la dépense constatée en matière d'interventions pour l'emploi n'est pas la dépense finale et ne rend pas compte du coût budgétaire des actions menées au cours de l'exercice ".

Il conviendrait, selon elle, de distinguer trois notions ayant une incidence budgétaire distincte : la déconcentration des crédits, la déconcentration de la décision, et la délégation à des organismes tiers de gestion de certaines procédures. La mise en relation des dépenses budgétaires et des résultats physiques doit donc être entreprise avec de grandes précautions. La Cour note en effet : " Il est notamment malaisé de déterminer avec précision, pour chaque dispositif, le coût unitaire des mesures individuelles pour l'Etat à partir des seules données budgétaires ".

La Cour des comptes tire trois conclusions de son examen des crédits de l'emploi :

- le budget de l'Etat ne retrace qu'une partie des financements publics de la politique de l'emploi et de la formation professionnelle ;

- le budget de l'emploi est soumis à une inertie qui en rend la réorientation difficile ;

- toutefois, les dépenses d'intervention en matière d'emploi traduisent de nouvelles priorités : l'allégement du coût du travail et la prise en charge des cotisations sociales sur les bas salaires par l'Etat, des mesures en faveur des jeunes et la réduction du temps de travail.

II. LES CRÉDITS DU MINISTÈRE POUR 2000

Les crédits du ministère de l'emploi s'établissent, pour 2000, à 122,06 milliards de francs, soit une progression de 2,3 % par rapport à 1999, à structure constante.

Les dépenses du budget de l'emploi sont à hauteur de 8,1 % consacrées aux moyens de fonctionnement, et de 91,4 % aux dépenses d'intervention. Le montant des dépenses en capital n'est que de 561,78 millions de francs, soit 0,5 % de l'ensemble des crédits.

Le titre III comporte l'essentiel des moyens de gestion de la politique de l'emploi : il s'agit des crédits de fonctionnement du ministère du travail et de l'Agence nationale pour l'emploi, qui s'élèvent à 9,95 milliards de francs.

Le titre IV regroupe les crédits du ministère consacrés aux mesures pour l'emploi, qu'il s'agisse de la formation professionnelle, de l'insertion des jeunes, des aides apportées aux publics en difficulté ou de la lutte contre le chômage. Ces crédits s'établissent à 111,54 milliards de francs.

Le titre V retrace les investissements pris directement en charge par l'Etat. La dépense concerne presque exclusivement les services déconcentrés. 74,3 millions de francs sont inscrits sur ce titre.

Le titre VI retrace les subventions d'investissement accordées dans le cadre des contrats de plan Etat-régions, ainsi qu'à l'AFPA 5( * ) et à l'ANPE 6( * ) soit 487,48 millions de francs.

III. LA CONJONCTURE ET L'INTERVENTION DE L'ÉTAT EXPLIQUENT L'AMÉLIORATION DE LA SITUATION DE L'EMPLOI

A. L'AMÉLIORATION DE LA SITUATION DU MARCHÉ DU TRAVAIL

En termes quantitatifs, l'amélioration de la situation de l'emploi est indéniable, et votre rapporteur spécial s'en réjouit.

Selon une étude récente de l'INSEE 7( * ) , le nombre de chômeurs a diminué de 302.000 personnes en deux ans, depuis juin 1997. Selon la définition du BIT 8( * ) , la France comptait 2.932.000 chômeurs en juin 1999, soit un taux de chômage de 11,3 % de la population active. Les chiffres du mois de septembre font même état d'un taux de chômage de 11,1 %.

La croissance de l'emploi a débuté au milieu de l'année 1996, s'est amplifiée à la fin de l'année 1997 et s'est poursuivie en 1998, cette année ayant vu la création de 372.000 emplois. L'emploi a progressé de 1 %, soit 134.000 créations, au cours du premier semestre 1999.

Toutefois, cette amélioration de la situation de l'emploi résulte, en grande partie, d'une conjoncture économique favorable, et de l'intervention de l'Etat sur le marché du travail, par la création d'emplois non marchands.

B. UNE SITUATION QUI DEMEURE PRÉOCCUPANTE

En réalité, la situation de l'emploi, en France, demeure préoccupante, pour au moins trois raisons principales.

D'abord, les créations d'emplois non marchands sont nombreuses, en raison de l'objectif que s'est fixé le gouvernement de recruter, à terme, 350.000 emplois jeunes, le financement de 300.000 contrats étant d'ores et déjà prévu pour 2000. Un tel dispositif ne peut, bien-sûr, que contribuer à améliorer l'emploi des jeunes, traditionnellement plus touchés par le chômage.

En second lieu, il existe des catégories particulièrement fragiles, qui bénéficient de la bonne conjoncture économique, mais dans une mesure moindre que l'ensemble de la population active. Les jeunes, les salariés de plus de 50 ans, les chômeurs de longue durée, ou les salariés les moins qualifiés restent plus fragiles sur le marché du travail.

Ainsi, une récente enquête de l'INSEE a montré que les inégalités continuaient de s'accroître, alors que le phénomène bien connu aux Etats-Unis sous le nom de " working poors ", des personnes vivant en état de pauvreté alors qu'elles travaillent, prend de l'ampleur en France.

Enfin, et surtout, les " bons " chiffres de l'emploi mis en avant avec insistance par le gouvernement doivent être relativisés au regard des comparaisons internationales.

Alors que, selon l'OCDE, la France, en 1999, devrait afficher un taux de chômage de 11,3 % sur l'ensemble de l'année, ce taux s'établit à 10,1 % dans l'ensemble de l'Union européenne, à 9,5 % dans l'ensemble des pays européens de l'OCDE et à 7,1 % pour l'OCDE dans son ensemble. Quant aux Etats-Unis, leur taux de chômage devrait s'élever à 4,2 %.

Le tableau ci-dessous montre, du reste, que le chômage n'est pas un phénomène européen. Le Royaume-Uni devrait avoir un taux de chômage de 6,7 % en 1999, et les Pays-Bas de 3,9 %.

Le graphique ci-dessous montre que la situation de la France, comparée au plan international, devrait perdurer en 2000.

Un autre élément suscite l'interrogation de votre rapporteur.

Les chiffres du chômage reposent sur l'exploitation des statistiques relatives aux demandeurs d'emploi des catégories 1 (personne sans emploi, immédiatement disponible, qui recherche effectivement un emploi à durée indéterminée à plein temps) et 6 (demandeur d'emploi exerçant une activité occasionnelle ou réduite de plus de 78 heures dans le mois).

Il faut espérer que certains demandeurs d'emploi ne sont pas " sortis " des catégories 1 et 6 et reclassés dans les autres catégories (ce sont les radiations des fichiers de l'ANPE), afin de pouvoir afficher des statistiques de l'emploi flatteuses.

C. UNE POLITIQUE DE L'EMPLOI INAPPROPRIÉE

L'appréciation de la situation de l'emploi en France ne saurait être, et n'est d'ailleurs pas, seulement nationale. Des organisations internationales sont amenées, chaque année, à analyser ou à émettre un avis sur la politique de l'emploi conduite dans notre pays. Or, ces analyses ou avis sont loin d'être toujours flatteuses.

C'est le cas des institutions de l'Union européenne.

La Commission européenne a adopté, en septembre 1999, le Rapport conjoint sur l'emploi 1999 , qui repose sur une analyse des rapports de mise en oeuvre des plans d'action nationaux 1998 soumis par les Etats membres et des mesures prises au niveau national pour la mise en oeuvre des lignes directrices pour l'emploi de 1999. Il s'agit, par conséquent, de la première évaluation des résultats obtenus dans le cadre de chaque plan d'action national.

Le rapport comporte deux parties : la première offre une vue d'ensemble comparative des résultats des Etats membres en matière d'emploi ; la seconde présente la situation de l'emploi dans chacun des Etats membres de l'Union européenne.

La Commission européenne a ainsi établi les grandes lignes de l'emploi en Europe, dont l'évolution est favorable.

Elle estime notamment que " les résultats de l'Union européenne dans son ensemble en matière d'emplois s'améliorent, mais les progrès sont variables suivant les Etats membres ". En effet, en 1998, l'UE a atteint un taux de croissance de 2,9 % et engendré 1,8 million d'emplois. Pour la première fois depuis 1990, l'emploi a progressé dans tous les Etats membres, " bien que cette augmentation ait été pratiquement négligeable en Allemagne ". La croissance de l'emploi dans l'UE s'est ainsi accompagnée d'une diminution constante du chômage qui est tombé à 9,9 % de la main-d'oeuvre en 1998, cette tendance se poursuivant en 1999.

Toutefois, la Commission européenne se montre assez critique sur plusieurs aspects des politiques de l'emploi.

Elle souligne notamment que " d'importants défis structurels persistent sur les marchés du travail des Etats membres ". Le taux d'emploi dans l'Union reste faible : avec 61 %, il accuse toujours un retard considérable par rapport à celui de nos principaux partenaires commerciaux, les Etats-Unis et le Japon, le faible taux d'activité concernant en particulier les femmes jeunes et les personnes d'un certain âge. Quant au chômage de longue durée, il " reste un problème persistant et grave, qui touche 5,2 millions de personnes en 1998 ".

La Commission formule d'autres critiques, en particulier : la lenteur de la réforme des systèmes d'indemnisation du chômage, l'absence d'objectifs et le manque de précision des initiatives visant à améliorer l'esprit d'entreprise.

La France ne se situe pas parmi les Etats européens ayant accompli le plus de progrès en matière d'emploi, en dépit d'un contexte économique très favorable.

La Commission européenne formule un
avis passable sur la politique française de l'emploi , dans les termes suivants :

" Le net décollage de la croissance économique observé en 1997 s'est poursuivi en 1998, avec une hausse du PIB de 3,2 % et une forte croissance de l'emploi atteignant 1,3 %. Bien qu'ayant augmenté, le taux d'emploi, à 60,8 %, reste en dessous de la moyenne de l'UE. Les taux d'emploi des travailleurs les plus âgés sont toujours particulièrement faibles. Le chômage (11,7 % en 1998) diminue, mais continue de dépasser la moyenne de l'UE. A 5,1 %, le chômage de longue durée reste élevé. Le chômage des jeunes a reculé, mais le passage de l'école au monde du travail demeure difficile.

Le plan d'action national français de 1999 poursuit et renforce la stratégie conçue en 1998. Il vise à augmenter le potentiel de croissance, à renforcer l'intensité d'emploi de la croissance et à faire profiter toute la population des bénéfices de celle-ci. Cependant, sur de nombreux sujets problématiques, tels que la participation des catégories les plus âgées, seule une première ébauche d'action a été entreprise et les mesures adoptées pour renverser la tendance anticipée ne sont pas encore suffisantes. Enfin, les problèmes rencontrés par les jeunes devraient être abordés de manière plus efficace ".


En clair, la croissance a été insuffisamment mise à profit pour réduire le chômage en France.

En outre, la Commission européenne se montre sceptique sur la pertinence des " bonnes pratiques " proposées par la France
au titre de la mise en oeuvre de son plan d'action national, à savoir la réduction négociée du temps de travail et la programme " Nouveaux services - emplois jeunes ".

En ce qui concerne les " 35 heures ", la Commission note : " Pour mesurer les retombées de la réduction du temps de travail sur l'emploi, il faut enregistrer les créations et les pertes d'emplois entraînées par la réorganisation des entreprises. le résultat net dépendra principalement de l'évolution des salaires et des gains de productivité et ne deviendra donc visible qu'à moyen terme. Il convient en outre de tenir compte du coût budgétaire des emplois créés ou préservés ".

Du reste, l'amélioration de la situation de l'emploi en Europe infirme la thèse du gouvernement français selon laquelle la réduction du temps de travail serait déterminante dans l'embellie du marché de l'emploi, notre pays étant le seul à emprunter cette voie.

S'agissant des emplois jeunes, elle estime qu'ils " ont contribué au recul du chômage des jeunes en 1998 " , mais que " la survie de ces postes, une fois qu'aura pris fin le soutien financier des pouvoirs publics, dépendra de la capacité du programme à générer des emplois économiquement viables ".

Le marché du travail au Royaume-Uni

Au Royaume-Uni, le taux d'activité des personnes de 16 ans ou plus est sensiblement plus élevé qu'en France (63 % contre 56 %). Le taux de chômage y est au contraire plus bas (respectivement 7 % et 12 %). 49 % des personnes en France (y compris les militaires du contingent) et 58 % au Royaume-Uni (où la conscription n'existe pas) ont un emploi.



Avec, en toile de fond ces trois données, une étude de l'INSEE souligne que le temps partiel est " beaucoup plus répandu " au Royaume-Uni qu'en France, mais il y est davantage la conséquence d'un choix que d'une contrainte.

Le temps partiel est pratiqué au Royaume-Uni par " une personne sur quatre ayant un emploi, contre une sur six en France " , souligne l'institut dans un numéro d' INSEE Première intitulé Le marché du travail en France et au Royaume-Uni. La différence est forte pour les jeunes (32 % des jeunes actifs de moins de 25 ans ayant un emploi travaillent à temps partiel au Royaume-Uni contre 24 % en France) mais l'est plus encore chez les personnes proches de la retraite (32 % des actifs occupés de plus de 50 ans au Royaume-Uni contre 18 % en France). " Dans un pays comme dans l'autre " , poursuit l'INSEE, " les femmes, quel que soit leur âge, demeurent les plus concernées ". " Une grande partie des actifs qui travaillent à temps partiel au Royaume-Uni trouve peut-être dans cette forme d'emploi un moyen de concilier vie professionnelle et vie privée. De fait, une minorité occupe un tel emploi faute d'en avoir trouvé à temps complet " constate l'étude. Alors que le temps partiel est plus répandu au Royaume-Uni, la proportion des personnes ainsi employées, faute d'avoir obtenu un travail à temps complet, y est beaucoup plus faible : 12 % des personnes à temps partiel contre 31 % en France. Dans l'ensemble de la population ayant un emploi, la proportion de personnes occupées à temps partiel à défaut d'un temps complet est plus élevée en France : 5,1 % contre 3,1 % au Royaume-Uni. Quant au temps partiel correspondant au souhait de la personne ou à une impossibilité personnelle de travailler à temps complet, il est beaucoup plus répandu au Royaume-Uni. En particulier, 41 % des femmes britanniques exercent ce type de temps partiel contre 22 % en France.

" Contrairement à ce qui se passe en France, le taux de chômage des femmes au Royaume-Uni est moins fort que celui des hommes , et cela, quel que soit l'âge " , note l'institut.



" On peut tenter d'expliquer cette spécificité par différentes raisons telles que le système d'inscription au chômage et de son indemnisation en vigueur au Royaume-Uni, mais aussi la possibilité de trouver plus facilement un emploi par le biais du temps partiel " , poursuit l'étude. " En effet, la pratique du temps partiel - particulièrement répandue chez les femmes - pourrait faciliter le passage de l'inactivité à l'emploi " . La nature de l'emploi recherché par les chômeurs tend à confirmer cette dernière hypothèse. Pour obtenir un emploi, les chômeurs britanniques focalisent moins leurs recherches exclusivement sur un travail à temps complet. Ainsi, seulement 17,5 % de ces chômeurs recherchent uniquement un travail à temps complet (30,1 % des Français) et 13,9 % souhaitent exercer exclusivement un travail à temps partiel (contre 5,6 % des Français). Mais, qu'ils soient britanniques ou français, environ les deux tiers des chômeurs sont prêts à abandonner leurs exigences pour occuper un emploi, le plus souvent en s'orientant vers le temps partiel. Celui-ci semble ainsi représenter une alternative pour sortir du chômage , estime l'INSEE.

Au Royaume-Uni, l'emploi est moins concentré sur la tranche d'âge 25-54 ans : 73 % des actifs occupés se situent dans cette tranche d'âge contre 84 % en France. " Il y a ,à la fois, plus de jeunes ayant un emploi et plus de personnes de 55 ans ou plus qui continuent à travailler " , note l'INSEE. La séparation entre le monde du travail et celui des études apparaît par ailleurs plus nette en France qu'en Grande-Bretagne . Les Britannique qui suivent des études sont davantage présents sur le marché du travail que leurs homologues français. Il y a, au Royaume-Uni, à la fois davantage de personnes qui poursuivent des études initiales tout en travaillant, et davantage de personnes qui reprennent des études ou une formation ont un emploi, contre 6 % en France.

Autre caractéristique : au Royaume-Uni, les inactifs à la marge de l'activité sont beaucoup plus nombreux qu'en France. Les inactifs forment un groupe assez hétérogène qui comprend des étudiants, des retraités et des femmes au foyer, etc. Au Royaume-Uni comme en France, la majorité des inactifs (respectivement 85 % et 96 %) ne souhaitent ni ne recherchent un emploi. Les autres inactifs (2.558.000 au Royaume-Uni et 843.000 en France ) se trouvent en marge de l'activité, soit parce qu'ils cherchent ou souhaitent un emploi mais ne sont pas disponibles , soit parce qu'ils souhaitent travailler, sont disponibles, mais ne cherchent pas d'emploi. L'étude note que les inactifs à la marge de l'activité, disponibles et souhaitant un emploi mais n'en recherchant pas pour des raisons personnelles ou liées à leur appréciation du marché du travail, sont six fois plus nombreux au Royaume-Uni qu'en France .

CHAPITRE DEUX

LA GESTION DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI

Cet agrégat regroupe les moyens de fonctionnement du ministère de l'emploi, la subvention versée à des organismes qui concourent au service public de l'emploi, celle versée à divers organismes d'étude et de recherche, ainsi que les moyens d'intervention de la politique des relations du travail.

Les crédits relatifs à la gestion de la politique de l'emploi s'élèvent à 15,22 milliards de francs, en progression de 7,1 % par rapport à 1999. Ils représentent 12,5 % de l'ensemble des dépenses du budget.

I. LES DÉPENSES DE PERSONNEL

Les dépenses de personnel du ministère (administration centrale et services déconcentrés) évoluent en 2000 de la façon suivante :

(en millions de francs)

 

1999

2000

2000/1999

Rémunérations

1 752,8

1 870,9

+ 6,7 %

Pensions

415,9

420,1

+ 1,0 %

Charges sociales

194,2

202,4

+ 4,2 %

Total

2 362,9

2 493,4

+ 5,5 %

La progression de 6,7% des rémunérations d'activité correspond pour l'essentiel à :

- la création nette de 130 emplois , contre 315 en 1999 - pour un effectif total de 9.985 emplois budgétaires au 31 décembre 1999 - ; celle-ci représente un coût budgétaire de 26,7 millions de francs et se décompose principalement comme suit :

13 emplois à l'administration centrale ;

117 emplois au sein des services déconcentrés du ministère pour faire face aux charges imposées par les priorités du gouvernement, notamment en matière de réduction de la durée du travail : 15 inspecteurs du travail, 5 directeurs adjoints, 88 contrôleurs, 7 agents contractuels, et 2 médecins.

- des mesures statutaires prises au titre de la mise en oeuvre du plan de résorption de l'emploi précaire, qui se traduisent par un coût supplémentaire d'environ 15 millions de francs ;

- la transformation de 640 emplois pour un coût total de 5,7 millions de francs ;

- une provision de 5 millions de francs dans le cadre de la réforme du statut de l'inspection du travail et de la création d'un statut d'emploi de directeur départemental ;

- une revalorisation indemnitaire à hauteur de 26,9 millions de francs ;

- un abondement à hauteur de 10 millions de francs des crédits de remboursement de personnel mis à disposition par d'autres administrations ;

- l'extension en année pleine des mesures de revalorisation des rémunérations publiques décidées en 1999.

II. LE FONCTIONNEMENT ET L'ÉQUIPEMENT

Les dépenses de matériel et fonctionnement des services progressent de 2,7 % et atteignent 508,1 millions de francs. Il convient de préciser qu'une mesure nouvelle de 56,8 millions de francs est consacrée aux dépenses d'informatique et de télématique.

Les crédits d'équipement passent de 75 millions de francs à 74,3 millions de francs, soit une baisse d'à peine 1 %. L'essentiel des crédits, soit 68,4 millions de francs, est consacré à l'entretien, la rénovation et l'extension des locaux des services déconcentrés.

III. LES SUBVENTIONS DE FONCTIONNEMENT

A. L'AGENCE NATIONALE POUR L'EMPLOI

1. Le 3ème contrat de progrès

Les deux premiers contrats de progrès conclus entre l'ANPE et l'Etat ont été axés sur la qualité de l'accueil des demandeurs d'emploi et le renforcement de sa présence sur le marché des recrutements. La mission de service public de l'ANPE a été renforcée. Le second contrat de progrès a notamment permis de clarifier les relations avec les ASSEDIC auprès desquelles s'opère l'inscription tandis que l'ANPE se concentre sur son métier : l'emploi.

Le troisième contrat de progrès porte sur les années 1999 à 2003. Son ambition est de renforcer la qualité des services rendus aux demandeurs d'emploi et aux entreprises, et de poursuivre la modernisation de l'agence. Il vise également à accroître ses moyens afin de lui permettre de remplir les objectifs fixés par le plan national d'action pour l'emploi (PNAE) adopté par le gouvernement en avril 1998.

Le contenu du troisième contrat de progrès entre l'Etat et l'Agence nationale pour l'emploi

(1999-2003) - Les grands axes

1) Prévenir et réduire le chômage de longue durée

2) Faciliter les recrutements

3) " Globaliser " les moyens de lutte contre le chômage

4) Travailler en complémentarité avec l'AFPA

5) Développer les services à distance et de proximité

6) Moderniser l'Agence

2. Les crédits pour 2000

Pour 2000, la subvention de fonctionnement augmente de 10,3 % pour s'établir à 6.357,85 millions de francs et accompagner ainsi le Plan national d'action pour l'emploi présenté à la suite du conseil de Luxembourg du 21 novembre 1997 9( * ) , ainsi que l'application de la loi contre les exclusions. Cela se traduit par l'extension en année pleine de mesures décidées en 1999, notamment la création de 500 emplois (+ 138,7 millions de francs), et par des mesures nouvelles à hauteur de 303,5 millions de francs, dont 70 millions de francs au titre de la création de 500 emplois supplémentaires.

B. LES AUTRES ORGANISMES

Les subventions aux autres organismes évoluent de la manière suivante :

Évolution des crédits aux autres organismes

 

En millions de francs

1999/1998

Centre d'études de l'emploi

34,1

+ 1,85 %

Centre d'études et de recherches sur les qualifications


14,5


+ 6,70  %

Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail


70,1


+ 0,86 %

Office de protection contre les rayonnements ionisants


25,3


+622,86 %

Autres

12

-

TOTAL

156

+ 18,09 %

La très forte augmentation des crédits de l'OPRI correspond, à hauteur de 21,8 millions de francs, à la mise en place d'un nouveau système de dosimètrie (mesure de radioactivité des personnels soumis aux radiations des installations nucléaires civiles).

C. L'ASSOCIATION POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE DES ADULTES (AFPA)

La contribution de l'Etat versée à l'AFPA représente 4.693,6 millions de francs, en progression de 5,4 % par rapport à 1999. La subvention de fonctionnement augmente de 5 %, pour s'établir à 4.334,9 millions de francs, et les moyens en capital qui s'élèvent à 358,7 millions de francs progressent de 10,7 %. L'augmentation de ces moyens s'inscrit dans le contrat de progrès signé avec l'Etat.

Dans le cadre du contrat de progrès, les liens avec l'ANPE ont été renforcés, celle-ci se concentrant sur l'information des demandeurs d'emploi.

CHAPITRE TROIS

LA PARTICIPATION DE L'ÉTAT À LA FORMATION PROFESSIONNELLE

Les crédits relatifs à la formation professionnelle s'élèvent à 26 milliards de francs , en diminution de 1,6 % par rapport à 1999. Ils représentent 21,3 % de l'ensemble des dépenses de ce budget.



Cet agrégat regroupe l'ensemble des crédits destinés aux actions de soutien à la formation professionnelle : formation en alternance, actions de formation à la charge de l'Etat, et dotation globale de décentralisation.

I. LA FORMATION EN ALTERNANCE

Les crédits alloués à la formation en alternance passent de 12,6 milliards de francs en 1999 à 12,2 milliards de francs en 2000 , soit une diminution de 3,2 %.

A. LES CONTRATS D'APPRENTISSAGE

En matière de contrats d'apprentissage, l'Etat compense auprès des régimes sociaux l'exonération des cotisations salariales et patronales assises sur les rémunérations des apprentis. En outre, dans le cadre de la loi du 6 mai 1996, l'Etat verse à l'entreprise une aide à l'embauche, ainsi qu'une indemnité de soutien à la formation (de 10.000 francs pour les apprentis de moins de 18 ans, et de 12.000 francs pour les apprentis de plus de 18 ans).

En 1999, l'aide à l'embauche a été " recentrée " sur les publics de niveau de formation correspondant au BEP ou au CAP. Votre commission s'était opposée à l'adoption de cette disposition qui excluait un grand nombre d'apprentis des dispositifs de la formation professionnelle.

Les crédits affectés aux contrats d'apprentissage s'établissent à 8,83 milliards de francs (4,11 milliards de francs pour les primes, et 4,72 milliards de francs au titre de l'exonération de cotisations sociales), soit une diminution de 4,5 % par rapport à 1999.

Cette limitation des crédits entraîne une diminution des entrées en stage, le gouvernement surévaluant les chiffres prévisionnels. En 1998, la loi de finances initiale avait évalué à 240.000 le nombre de nouveaux contrats, mais 218.000 ont été réalisés. En 1999, la prévision portait sur 230.000 nouveaux contrats : elle est revue à la baisse, soit 220.000, dans le projet de loi de finances pour 2000. Le chiffre de 220.000 est également retenu pour 2000 : il paraît également surévalué compte tenu de la réduction des crédits.

B. LES CONTRATS DE QUALIFICATION - JEUNES

L'aide de l'Etat à la formation en alternance dans le cadre des contrats de qualification - qui s'effectuent à l'école et dans l'entreprise et doit mener à une qualification reconnue - prend la forme d'exonération de charges sociales aux entreprises : la dotation prévue pour 2000 s'établit à 2,66 milliards de francs , soit une augmentation de près de 2 %. Le nombre d'entrées prévu est de 125.000 en 2000, pour 120.000 en 1999.

La dotation pour les primes de qualification est de 233 millions de francs , soit une diminution de 32 %.

C. LES CONTRATS DE QUALIFICATION - ADULTES

Le contrat de qualification destiné aux adultes a été institué par la loi de lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998. Il est destiné aux adultes de plus de 25 ans au chômage depuis plus de 6 mois.

Les crédits destinés à ce dispositif s'élèvent à 516 millions de francs, 396 millions de francs au titre de l'exonération de cotisations sociales, et 120 millions de francs pour le financement de primes, soit une progression de plus de 48 %. Il convient toutefois de rappeler que, lors de l'examen du projet de loi, le gouvernement entendait consacrer à ce dispositif près de 1,5 milliard de francs en 2000. 15.000 entrées sont prévues l'année prochaine.

II. LA FORMATION DES SALARIÉS PRISE EN CHARGE PAR L'ÉTAT

Les crédits consacrés aux actions de formation à la charge de l'Etat représentent 5.931,3 millions de francs en 2000, contre 5.995,1 millions de francs en 1999 (- 1,06 %).

A. LES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE

Elles baissent de 7,1 % pour s'établir à 1.239,3 millions de francs en 2000.

1. La politique contractuelle

Les crédits passent de 335,125 millions de francs en 1999 à 335 millions de francs en 2000, soit une légère diminution de 0,04 %.

Cette politique repose notamment sur les accords d'engagement de développement de la formation professionnelle, négociés entre l'Etat et les organisations professionnelles, afin d'appuyer les plans d'adaptation aux mutations technologiques.

2. Les contrats de plan Etat-régions (CPER)

Le contenu du volet formation professionnelle de la nouvelle génération de contrats de plan Etat-régions (2000-2006) sont encore en cours de négociation entre l'Etat et les régions. Ils comportent traditionnellement des actions conjointes en fonctionnement et en investissement.

Les crédits inscrits en 2000 s'élèvent à 397 millions de francs, soit une diminution de 2,07 %.

3. Les autres dispositifs

Il s'agit de formations financées par le fonds de la formation professionnelle et de la promotion sociale (FFPPS), destinées, soit à des publics défavorisés, soit à développer la promotion sociale au sein des entreprises, ou d'aides versées à des organismes de formation ou d'information sur la formation.

Ces crédits diminuent de 14,6 % et représentent 507,32 millions de francs.

Il convient de préciser que les dépenses en faveur des actions catégorielles (en faveur des illettrés, détenus et réfugiés) s'établissent à 119 millions de francs, en progression de 19,4 %.

B. LES DÉPENSES DE RÉMUNÉRATION

Les dépenses de rémunération regroupent :

- la rémunération des stagiaires de l'AFPA : 1 milliard de francs (+ 11,1 %) ;

- la rémunération des stagiaires relevant du programme national de formation professionnelle, et des actions en faveur des jeunes de Mayotte et de Corse, qui restent à la charge de l'Etat : 926 millions de francs pour le premier (+ 0,27 %), et 13,25 millions de francs pour les secondes (comme en 1999) ;

- le versement à l'UNEDIC au titre de l'allocation de formation-reclassement (AFR), destinée à assurer la rémunération des demandeurs d'emploi entrant en formation : 2,54 milliards de francs (- 6,4 %).

C. LES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT DANS LA FORMATION PROFESSIONNELLE

Il s'agit des dotations en capital du programme national de formation professionnelle et de celles figurant dans les contrats de plan Etat-régions : 105,63 millions de francs (- 2,4 %).

III. LES DOTATIONS DE DÉCENTRALISATION

L'ensemble des crédits destinés à la dotation de décentralisation relative à la formation professionnelle et à l'apprentissage s'élève à 7.937,6 millions de francs en 2000, contre 7.872,94 millions de francs en 1999, soit une progression de 0,8 %.

A. L'APPLICATION DE LA LOI DU 7 JANVIER 1983

Cette loi, complétée par celle du 23 juillet 1987 portant réforme de l'apprentissage, transfère aux régions la compétence de droit commun en matière de formation professionnelle continue et d'apprentissage, et vise par ailleurs à compenser l'allongement de la durée des formations en centre de formation des apprentis.

Les crédits s'élèvent à 3.352,8 millions de francs, dont 107,9 millions de francs au titre de la loi du 23 juillet 1987.

B. LA LOI QUINQUENNALE DU 20 DÉCEMBRE 1993

Cette loi quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle pose le principe de la décentralisation des actions de type qualifiant pour les jeunes de 16 à 25 ans, à compter du 1 er juillet 1994.

Elle comporte une dotation globale calculée à partir des dépenses des régions au titre du fonctionnement des actions de la rémunération des stagiaires, et des frais de gestion des conventions. Cette dotation représente 1.862,3 millions de francs en 2000. Elle est complétée par une enveloppe de rééquilibrage géographique versée sur des critères d'aménagement du territoire pour compenser les coûts supplémentaires des actions de formation en milieu rural. Son montant est de 56 millions de francs en 2000.

C. LA DÉCENTRALISATION DES AUTRES ACTIONS

Depuis le 1 er janvier 1999, toutes les actions pré-qualifiantes, de mobilisation ainsi que les mesures d'accompagnement sont décentralisées aux régions. Entre 1994 et 1999, les crédits avaient fait l'objet de délégations de compétence qui permettaient aux régions d'anticiper ainsi sur ce mouvement de décentralisation.

Les crédits représentent 2.665 millions de francs, dont 1.364,5 millions de francs au titre des dépenses de fonctionnement et 1.300,5 millions de francs pour les rémunérations.

Depuis le 1 er janvier 1999, l'ensemble du dispositif de formation continue des jeunes est de la compétence des régions.

Les fonds de la formation professionnelle selon la mission d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée nationale

L'usage des fonds de la formation professionnelle a fait l'objet d'un examen par la mission d'évaluation et de contrôle (MEC) de la commission des finances de l'Assemblée nationale. Cette étude constitue l'annexe n° 4 du rapport d'information relatant les travaux de la MEC.

Le rapporteur, M. Jacques Barrot, insiste sur la grande complexité des dispositifs de la formation professionnelle, en raison d'une " inflation normative " dans ce domaine, mais aussi d'une intervention d'acteurs multiples et peu coordonnés. L'Etat, dont le rôle de financeur est considérable, intervient également à travers l'AFPA, dont la MEC a mis en exergue le contraste existant entre l'importance des moyens et la faiblesse relative des résultats. L'Etat exerce également un contrôle sur le respect, par les entreprises, de l'obligation légale du financement de la formation professionnelle et la gestion des organismes collecteurs et des organismes dispensateurs de formation ; ce contrôle est toutefois considéré comme " insuffisant ". Par ailleurs, les partenaires sociaux et les régions, depuis 1983, exercent aussi des responsabilités en matière de formation professionnelle.

La complexité des dispositifs est accentuée par une répartition peu cohérente des tâches, en ce qui concerne la prise en charge de l'établissement des bilans de compétence, de l'orientation et de la formation proprement dite, l'autonomie des ASSEDIC et l'insuffisante collaboration entre l'ANPE et l'AFPA ne concourant pas à une clarification du système. De même, il existe une distinction entre les financeurs, les prescripteurs et les prestataires de formation, qui entretiennent pourtant des relations prenant la forme de cofinancements et de transferts financiers.

Le rapport note que, si l'efficacité du dispositif de collecte des fonds s'est améliorée, en raison de la mutualisation des excédents financiers ou de la trésorerie des organismes collecteurs mais aussi de leur meilleure gestion, la qualité des formations délivrées est encore insuffisamment contrôlée. C'est le cas, par exemple, du dispositif du congé individuel de formation (CIF).

Dès lors, le rapport estime que le ratio coût/efficacité du système de formation professionnelle doit être amélioré, et suggère trois voies :

- accroître l'efficacité de l'AFPA, grâce à un système comptable plus opérationnel et à un meilleur suivi des stagiaires ;

- renforcer le contrôle de l'Etat sur les organismes partiaires collecteurs agréés, tout en développant le paritarisme ;

- prendre en compte l'aspect qualitatif des formations, en privilégiant le rôle des partenaires sociaux.

CHAPITRE QUATRE

L'ACTION DE L'ÉTAT EN FAVEUR DES PUBLICS PRIORITAIRES

Cet agrégat regroupe les actions consacrées à l'insertion professionnelle spécifique en faveur des jeunes, des publics en difficulté et des travailleurs handicapés.

L'ensemble des crédits alloués à ces actions s'élève à 52,78 milliards de francs , en progression de 7,6 % par rapport à 1999. Ils représentent 43,25 % de l'ensemble des dépenses du budget de l'emploi.

I. LES ACTIONS MENÉES EN FAVEUR DES JEUNES

Ces crédits s'établissent à 21,93 milliards de francs, soit une augmentation de 52,3 % par rapport à 1999. Ils correspondent pour l'essentiel à la mise en place des emplois jeunes, qui sont à l'origine d'une progression considérable et régulière des dépenses : l'année dernière, ils avaient entraîné une hausse de 71,5 % des crédits de cet agrégat.

A. LE RÉSEAU D'ACCUEIL ET TRACE10( * )

Le réseau d'accueil des jeunes est composé des missions locales et des permanences accueil-information-orientation (PAIO). Il est chargé de définir et de mettre en oeuvre des parcours personnalisés d'insertion au profit des jeunes en difficulté sociale ou professionnelle.

Les subventions versées par l'Etat aux missions locales et PAIO diminuent en 2000 de 5,9 %, et s'établissent à 392 millions de francs en raison du renforcement du réseau d'accueil des jeunes.

Le programme TRACE, mis en place par la loi du 29 juillet 1998 de lutte contre les exclusions, est un programme d'accompagnement personnalisé vers l'emploi d'une durée maximum de 18 mois en faveur des jeunes confrontés à de graves difficultés sociales ou familiales ou d'accès à l'emploi, jeunes sortis du système éducatif sans diplôme ou qualification (niveaux VI et V bis). La réalisation du programme est confiée aux missions locales et PAIO ainsi qu'à des opérateurs externes. Les crédits inscrits pour 2000 s'élèvent à 102,1 millions de francs, dont 32,10 millions de francs en mesures nouvelles incluses dans la subvention destinée au réseau d'accueil, et 70 millions de francs pour le paiement des opérateurs externes.

B. LES EMPLOIS-JEUNES

Le projet de loi de finances pour 2000 prévoit l'inscription de 21,34 milliards de francs correspondant au financement de la loi du 16 octobre 1997, soit une hausse des crédits de 53,3 %.

L'Etat fournit une aide par emploi égale à 80 % du SMIC charges sociales comprises - soit 93.840 francs - pour des contrats de droit privé conclus avec des associations ou des collectivités locales, en vue de répondre à des besoins non satisfaits ou émergents.

Cette aide atteint 100 % pour les emplois jeunes recrutés directement par le ministère de l'éducation nationale, et par celui de l'intérieur.

Il est prévu la création, dans le secteur non marchand, de 60.908 emplois en 2000, soit un total de 300.000 emplois jeunes en 2000. L'objectif que s'est fixé le gouvernement est de 350.000 emplois créés.

Une partie de ceux-ci doit être affectée à la lutte contre les exclusions (en principe 20 % de ces contrats).

En contrepartie, le dispositif des emplois-ville est progressivement supprimé : étant considéré comme devant être absorbé par le dispositif plus général des emplois jeunes 11( * ) , ses crédits sont de 124 millions de francs en 2000, contre 141,2 millions de francs en 1999.

II. LES ACTIONS EN FAVEUR DES PUBLICS EN DIFFICULTÉ

Évolution des crédits

(en millions de francs)

 

1999

2000

2000/1999

Contrat retour à l'emploi

412,5

65

- 84,2 %

Programme chômage longue durée

3.114,5

2.861,1

- 8,1 %

FNE cadre

102

81

- 20,6 %

Insertion par l'économie

746,4

910

+ 21,9 %

Contrats initiative emploi

Primes

Exonérations

3.498,1

6.001,9

2.496,2

4.517,1

- 28,6 %

- 24,7 %

Contrats emploi solidarité (CES)

9.904

9.010,6

- 9 %

Emplois consolidés (CEC)

5.250

5.323,7

+ 1,4 %

Emplois ville

141,2

124

- 12,2 %

TOTAL

29.170,6

25.388,7

- 13 %

A. LE CONTRAT INITIATIVE EMPLOI (CIE)

Le CIE est un instrument de lutte contre le chômage de longue durée par la réinsertion dans le secteur marchand. Le dispositif a été recentré en 1997 sur les publics connaissant les plus graves difficultés d'accès à l'emploi, et la prime a été réservée et modulée en fonction des catégories de publics embauchés.

Ses crédits s'établissent à 7 milliards de francs , soit une diminution de 26,2 % par rapport à 1999. Ils ne cessent de diminuer depuis le " recentrage " du dispositif : ils étaient de 9,5 milliards l'année dernière.

Le montant des primes (aide forfaitaire de l'Etat, aide à la formation et aide au tutorat) diminue de 28,6 %. 155.000 entrées dans le dispositif sont prévues pour 2000. Le montant des crédits au titre de l'exonération des charges patronales de sécurité sociale diminue de 24,7 % : 4,5 milliards de francs.

A leur création, à partir du 1 er juillet 1995, les CIE ont remplacé les contrats de retour à l'emploi. Le solde de ces contrats continue d'être financé au titre des exonérations pour un montant de crédits de 65 millions de francs en 2000.

B. LES CONTRATS EMPLOI-SOLIDARITÉ ET EMPLOIS-CONSOLIDÉS : CES ET CEC

Les CES sont des contrats à durée déterminée à mi-temps d'une durée de 3 à 12 mois visant à la réinsertion de demandeurs d'emploi de longue durée ou de personnes en difficulté, embauchés pour des activités répondant à des besoins collectifs non satisfaits par des collectivités locales ou le secteur privé non lucratif. L'Etat prend en charge une part importante de la rémunération des bénéficiaires. En outre, les employeurs bénéficient d'une exonération de l'ensemble de leurs charges patronales, à l'exception des cotisations d'assurance chômage.

Ces contrats bénéficient de 9 milliards de francs en 2000, soit une réduction de crédits de 9 %.

Le projet de loi de finances pour 2000 prévoit 360.000 CES, soit 50.000 de moins qu'en 1999. 75 % devraient, selon le gouvernement, être réservés aux publics prioritaires dans le cadre de la loi de lutte contre les exclusions.

Créés en 1992, les CEC étaient mis en place à l'issue d'un CES. Ce sont des contrats aidés permettant de pérenniser dans le secteur non marchand la situation des publics les plus prioritaires issus des CES. Ils bénéficient d'un taux de prise en charge dégressif sur cinq ans : 60 % la première année, 20 % la cinquième, dans la limite de 120 % du SMIC.

La loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998 a fait évoluer ces dispositifs. Désormais, les CEC ne sont plus réservés aux seuls publics sortant des CES : ils sont directement accessibles par les publics éligibles aux CES.

Les crédits des CEC progressent de 1,4 % : 60.000 contrats sont budgétisés en 2000, soit le double de 1998. Toutefois, le nombre de CEC prévus en 1999 est revu à la baisse : il était de 60.000, il n'est plus que de 50.000.

Ils représentent 5,32 milliards de francs.

C. LES STAGES POUR CHÔMEURS DE LONGUE DURÉE

Il s'agit principalement des stages d'insertion et de formation à l'emploi 12( * ) qui peuvent être à accès individuel ou à entrées collectives et sont destinés aux chômeurs de longue durée ou menacés par le chômage de longue durée pour lesquels un besoin de formation a été diagnostiqué.

Le nombre d'entrées dans ces stages a été réduit de 200.000 à 175.000, et les dépenses baissent de 8,1 % pour s'établir à 2.861,1 millions de francs. Elles se répartissent entre 1.443,7 millions de francs de dépenses de fonctionnement et 1.417,3 millions de francs de dépenses de rémunération.

Les aides à l'emploi vues par la mission d'évaluation
et de contrôle de l'Assemblée nationale

La mission d'évaluation et de contrôle (MEC) mise en place par la commission des finances de l'Assemblée nationale a étudié les aides à l'emploi. Ses conclusions ont été publiées à l'été 1999 13( * ) .

Le rapporteur, M. Gérard Bapt, estime que " l'architecture d'ensemble des aides apparaît globalement fixé " , le bilan coût/efficacité d'un dispositif devant prendre en considération non seulement l'approche strictement économique, mais également les aspects sociaux de la mesure.

Chaque pays a mis en oeuvre une politique de l'emploi adaptée à ses spécificités nationales, la situation de la France étant marquée par " une importante dépense de préretraites et un montant de plus en plus important d'aides à la création d'emplois " . Par ailleurs, la dépense pour l'emploi a constamment augmenté dans notre pays, passant de 0,90 % du PIB en 1973 à environ 4 % aujourd'hui. Cette tendance haussière est à l'origine d'une volonté de réorienter la politique de l'emploi, de manière à la rendre plus efficace.

Les dispositifs d'aide à l'emploi sont souvent complexes, mais leur efficacité passe par leur stabilité, la simplification des aides, et l'octroi d'une certaine latitude de mise en oeuvre aux services locaux. Le rapport recommande, dès lors, de " privilégier les dispositifs anciens, même au prix d'adaptations plutôt que les dispositifs nouveaux, sauf à procéder par substitution ".

Le rapport insiste sur la difficulté d'apprécier la dépense pour l'emploi, en raison, notamment, de la coexistence de deux définitions - celle de l'OCDE et celle de la DARES du ministère de l'emploi - et sur l'incertitude des résultats des différentes évaluations entreprises, du fait de l'existence d'effets d'aubaine.

Pour la MEC, " la création nette d'emplois peut ne pas constituer l'unique critère d'évaluation d'une aide à l'emploi " , l'amélioration de " l'employabilité " des personnes les plus touchées par le chômage pouvant constituer l'objectif de certaines mesures ciblées. Il s'agit donc de définir strictement les publics cibles : le rapport justifie ainsi le " recentrage " du CIE ou du CES sur les publics prioritaires.

Le rapport prend clairement position en faveur de l'abaissement du coût du travail non qualifié comme créateur d'emplois. En revanche, il reste délibérément muet sur la politique de réduction du temps de travail imposée par le Gouvernement aux entreprises.

III. LES ACTIONS EN FAVEUR DES HANDICAPÉS

En 2000, les crédits consacrés aux travailleurs handicapés progressent de 2,5 %, principalement sous l'effet de la garantie de ressources qui s'établit en 2000 à 5,39 milliards de francs . Cette augmentation correspond à la création de 2.000 places dans les centres d'aide par le travail, et de 500  places en atelier protégé.

CHAPITRE CINQ

LA PROMOTION DE L'EMPLOI
ET LES ADAPTATIONS ÉCONOMIQUES

Cet agrégat regroupe les dispositifs d'incitation à la réduction du temps de travail, les mesures d'allégement du coût du travail, les dispositifs pour la promotion de l'emploi et l'accompagnement des restructurations.

Les crédits relatifs à la promotion de l'emploi et aux adaptations économiques, qui représentent 10,4 % de l'ensemble du budget de l'emploi , s'élèvent à 12,72 milliards de francs , soit une diminution apparente de 77 % par rapport à 1999.

Toutefois, les crédits auparavant inscrits à l'article 30 du chapitre 44-77, alloués, à hauteur de 39,49 milliards de francs, à la réduction dégressive des cotisations sociales patronales sur les bas salaires, sont " sortis " du budget de l'emploi. En effet, le gouvernement a prévu de faire financer la " ristourne Juppé " par le produit du droit de consommation sur les tabacs qui serait affecté au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale créé par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.

I. LA RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL

A. LA LOI DU 13 JUIN 1998 (" 35 HEURES ")

La loi du 13 juin 1998 abaisse la durée légale du travail à 35 heures par semaine au 1 er janvier 2000 pour les entreprises employant plus de 20 salariés et au 1 er janvier 2002 pour les entreprises de 20 salariés au plus.

Le gouvernement a mis en place une incitation financière pour les entreprises qui négocieront le passage à 35 heures avant le 1 er janvier 2000, tout en créant ou préservant des emplois. Cette incitation sera un abattement forfaitaire des cotisations sociales employeurs : 9.000 francs par salarié d'ici à la fin 1998, puis 1.000 francs de moins chaque année.

Un nouveau projet de loi - la " seconde loi " - prévoit d'instituer un dispositif d'allégement pérenne des cotisations sociales.

Les crédits alloués à la réduction du temps de travail dans le budget de l'emploi s'élèvent à 4,45 milliards de francs : 4,3 milliards de francs au titre de l'exonération de cotisations sociales (3,5 milliards en 1999) et 150 millions de francs au titre des aides au conseil accordées pour la réflexion menée sur la réorganisation du travail (200 millions de francs en 1999).

B. LA LOI DU 11 JUIN 1996 (LOI DE ROBIEN)

Cette loi a été remplacée par la loi du 13 juin 1998. Les crédits afférents pour 2000 s'élèvent cependant à 2,72 milliards de francs, contre 3,05 milliards de francs en 1999, afin d'honorer les conventions conclues antérieurement à l'application de la nouvelle loi, et qui prévoyaient une aide étalée sur sept ans.

II. L'ALLÉGEMENT DU COÛT DU TRAVAIL

Les crédits consacrés à l'allégement du coût du travail représentent pour 2000, 3,38 milliards de francs , contre 46,05 milliards de francs en 1999 et 3,33 milliards de francs hors ristourne dégressive, soit une progression de 1,7 % à périmètre constant.

III. LA PROMOTION DE L'EMPLOI

Ces crédits représentent 551,4 millions de francs en 2000, soit une diminution de près de 2 %. Ils figurent au chapitre 44-79 et concernent des aides à l'ingénierie ainsi qu'au diagnostic conseil, notamment au titre de l'encouragement au développement d'entreprises.

IV. L'ACCOMPAGNEMENT DES RESTRUCTURATIONS

La dotation diminue de 27,7 % et s'établit à 1.406,8 millions de francs pour 2000 : il s'agit de l'aide publique au chômage partiel, des conventions de conversion, de la dotation globale déconcentrée de restructuration et des allocations temporaires dégressives.

CHAPITRE SIX

LE FINANCEMENT DU RETRAIT D'ACTIVITÉ ET LA PARTICIPATION DE L'ÉTAT AUX DÉPENSES DE CHÔMAGE

Cet agrégat regroupe les dépenses d'indemnisation accordées dans le cadre des mesures de cessation anticipée d'activité, de la participation au financement de l'indemnisation chômage et de certains régimes de retraite. Ces dépenses, qui financent des revenus de remplacement, s'opposent aux dépenses dites " actives ", qui visent à soutenir le marché de l'emploi et à développer les formations professionnelles.

Les crédits s'élèvent à 15,33 milliards de francs en 2000, contre 16,84 milliards de francs en 1999, soit une diminution de 8,98 % . Ils représentent 12,6 % de l'ensemble des dépenses du budget de l'emploi .

I. LES DÉPENSES DE PRÉRETRAITE

Évolution des crédits

(en millions de francs)

 

1999

2000

2000/1999

Les " préretraites " du FNE

4.844

4.150

- 14,3 %

Les " préretraites " progressives

1.998

1.600

- 19,9 %

Mesures particulières

865,9

423,1

- 51,1 %

TOTAL

7.707,9

6.173,1

- 19,9 %

La contribution de l'Etat au financement des préretraites baisse de plus d'un milliard de francs, passant de 6,84 milliards de francs à 5,75 milliards de francs en 2000, en diminution de près de 16 %.

Les préretraites FNE sont octroyées essentiellement dans le cadre de plans sociaux, et permettent à leurs bénéficiaires de percevoir environ 65 % de leur salaire brut antérieur. Elles sont ouvertes aux salariés de plus de 57 ans, et sont cofinancées par l'Etat et les entreprises. La diminution des crédits est due à la diminution du nombre d'entrées (18.000 contre 20.000 ).

Les préretraites progressives concernent les personnes de plus de 55 ans acceptant la transformation de leur emploi à temps plein en emploi à temps partiel. Elles perçoivent alors, outre leur rémunération au titre de ce temps partiel, une allocation représentant environ 30 % de leur salaire brut antérieur prise en charge par l'Etat. En 2000, le nombre de bénéficiaires devrait diminuer, passant de 18.000 en 1999 à 12.600 14( * ) .

Les mesures particulières : il s'agit de deux dispositifs en extinction, le premier concerne les préretraites de la sidérurgie, pour 421,7 millions de francs, le second concerne les mesures spéciales de retraite anticipée à la SEITA, à hauteur de 1,36 million de francs.

II. LES DÉPENSES D'INDEMNISATION

L'indemnisation du chômage " de solidarité " est assurée par une subvention de l'Etat au fonds de solidarité.

Toute personne justifiant de 5 ans d'activité salariée durant les 10 dernières années, et ayant épuisé ses droits à indemnisation dans le cadre du régime d'assurance à l'UNEDIC, perçoit l'allocation de solidarité spécifique (ASS). Par ailleurs, le fonds de solidarité attribue également l'allocation d'insertion à certaines catégories de demandeurs d'emplois qui n'ont pu acquérir des droits d'indemnisation supérieurs à 3 mois au titre du régime d'assurance chômage.

L'article 131 de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions a posé le principe de l'indexation annuelle de ces allocations sur l'évolution des prix.

Les recettes du fonds de solidarité sont constituées par le produit de la contribution de solidarité des fonctionnaires, soit 1 % de leur traitement brut, et par une subvention de l'Etat.

En 2000, cette dernière s'élève à 9.126,3 millions de francs , en augmentation de 8,8 %.

En outre, l'Etat verse 28 millions de francs à l'UNEDIC au titre des allocations complémentaires.

ARTICLE 70 RATTACHÉ


Cet article tend à centraliser les excédents financiers du capital de temps de formation au niveau d'une section particulière créée au sein du fonds national habilité à gérer les excédents financiers du congé individuel de formation.

I. LA SITUATION ACTUELLE

A. LE CAPITAL DE TEMPS DE FORMATION


Le capital de temps de formation (CTF) a pour objet de permettre aux salariés de suivre au cours de leur vie professionnelle, à leur demande, pendant le temps de travail, des actions de formation prévues au plan de formation de leur entreprise, dans le but de se perfectionner, d'élargir ou d'accroître leur qualification.

Sa mise en oeuvre a été confiée aux partenaires sociaux par la voie d'un accord national interprofessionnel, complété par des conventions de branche ou des accords professionnels étendus.

Le CTF, proposé par la loi n°93-1313 quinquennale sur l'emploi du 20 décembre 1993, a véritablement été mis en place dans certaines branches et secteurs professionnels à compter de 1996. En effet, après la conclusion par les partenaires sociaux, de l'avenant du 5 juillet 1994 à l'accord national interprofessionnel du 3 juillet 1991, et d'un certain nombre d'accords de branche ou professionnels, la publication de plusieurs textes, légaux et réglementaires, fut nécessaire pour sa mise en place effective, en particulier en ce qui concerne son financement.

L'article 78 de la loi n° 95-116 du 4 février 1995 portant diverses dispositions d'ordre social a confirmé le principe posé par l'avenant du 5 juillet 1994, selon lequel le CTF sera financé , par voie d'accords de branche, sur 50 % au plus de la participation des entreprises au financement du congé individuel de formation (CIF) à hauteur de 0,20 % des salaires . Cette disposition a été codifiée au 1° de l'article L. 951-1 du code du travail.

Les modalités de collecte de la contribution destinée au CTF ont été déterminées par l'avenant du 18 novembre 1996. Dans le cadre du financement des actions de formation professionnelle continue, les entreprises versent à l'organisme paritaire collecteur agréé (OPCA) de la branche professionnelle concernée, avant le 1 er mars de chaque année, la contribution CTF, dont le montant est égal au plus à 0,10 % des salaires de l'année de référence.

B. LE FONDS DE GESTION DES EXCÉDENTS FINANCIERS DU CONGÉ INDIVIDUEL DE FORMATION

L'article L. 931-1 du code du travail définit le congé individuel de formation (CIF) comme un droit, pour le salarié, de bénéficier d'une formation au cours de sa vie professionnelle, de façon indépendante du plan de formation de l'entreprise.

L'employeur ne peut différer qu'une seule fois le CIF, qui se déroule pendant le temps de travail.

Le CIF est financé par une participation des entreprises égale à 0,20 % des salaires, versée à un organisme paritaire agréé par l'Etat au titre du CIF (OPACIF). Un OPACIF a pour mission statutaire de collecter les contributions des entreprises dues au 28 février de chaque année. Les sommes collectées au titre du congé individuel de formation s'élèvent à environ 3 milliards de francs.

Or, par le passé, les OPACIF ont dégagé d'importants excédents financiers : 3,5 milliards de francs bruts et 1,9 milliard de francs nets en 1995.

C'est pourquoi, l'article 29 de la loi n° 95-1346 de finances pour 1996 a rendu possible la mutualisation de ces excédents , en créant un fonds national habilité à gérer les excédents financiers dont peuvent disposer certains organismes collecteurs paritaires gérant les contributions des employeurs au financement du CIF. La gestion de ce fonds a été confiée au comité paritaire du congé individuel de formation (COPACIF), organisme créé en 1982 et investi d'une mission de coordination en matière de CIF.

Il convient de préciser que le système engendre presque nécessairement des disponibilités excédentaires.

En effet, un certain temps s'écoule entre le moment de la collecte et celui où l'OPACIF verse des fonds à un organisme, car la formation commence généralement plus tard : elle concerne deux exercices, voire plus. L'OPACIF est cependant amené à collecter de nouveau, avant d'avoir financé l'ensemble des formations prévues au titre des exercices précédents.

Toutefois, lors de son audition devant la mission d'évaluation et de contrôle (MEC) de l'Assemblée nationale sur le sujet des fonds de la formation professionnelle, M. Gilles Loffredo, directeur général de l'association pour la gestion des fonds de l'alternance (AGEFAL) et du COPACIF, déclara : " les excédents se régulent, lentement mais sûrement, à la baisse ".

II. LA MESURE PROPOSÉE PAR LE GOUVERNEMENT

A. LA CENTRALISATION DES EXCÉDENTS FINANCIERS DU CAPITAL DE TEMPS DE FORMATION

Le présent article propose d'étendre le champ de compétence du fonds
créé par la loi de finances pour 1996 précitée, et qui, actuellement, gère les excédents financiers des organismes collectant les fonds du CIF, à la gestion des excédents financiers dont disposent les OPCA gérant les contributions des employeurs affectées au financement du capital de temps de formation (CTF).

L'exposé des motifs précise que, au sein de ce fonds, serait créée une section particulière à laquelle seraient affectés les excédents financiers du capital de temps de formation. En effet, le CTF, comme les autres dispositifs de formation professionnelle, engendre des excédents, pour les raisons évoquées plus haut.

Le COPACIF centraliserait et gérerait ces excédents financiers, s'établissant à un milliard de francs au 31 décembre 1998 mais évalués à environ 700 millions de francs aujourd'hui.

L'exposé des motifs apporte une autre précision : la centralisation des disponibilités excédentaires du CTF permettrait de procéder à l'affectation d'une contribution de 500 millions de francs, versée par le COPACIF au budget de l'emploi par voie de fonds de concours, afin de compenser la diminution des crédits destinés au financement de l'indemnité compensatrice forfaitaire à l'apprentissage.

En effet, le chapitre 43-70 " Financement de la formation professionnelle " du budget de l'emploi voit son article 11 " Formation en alternance. Primes des contrats d'apprentissage " passer de 4.664,6 millions de francs en 1999 à 4.113,8 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 2000, soit une diminution de 550,8 millions de francs (-11,8 %).

La position de votre commission :

Le présent article ne tend, finalement, à centraliser les disponibilités du CTF auprès du COPACIF que pour mieux opérer un futur prélèvement sur ce dernier au profit du budget de l'Etat.


La " rationalisation du financement de la formation professionnelle " invoquée par le gouvernement apparaît donc, avant tout, comme un argument destiné, une fois encore, à procéder à un prélèvement exceptionnel, cette fois-ci qualifié de " volontaire " , mais qui est, en réalité, récurrent :

- la loi de finances pour 1996 avait réalisé un prélèvement exceptionnel de 60 % sur les excédents financiers du fonds d'affectation qu'elle venait de créer, soit 1,465 milliard de francs ;

- la loi de finances pour 1997 avait autorisé un prélèvement exceptionnel de 40 % sur la trésorerie de l'AGEFAL, soit 1,37 milliard de francs ;

- enfin, la loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier pour 1998 a opéré un nouveau prélèvement, de 500 millions de francs cette fois, sur la trésorerie de l'AGEFAL.

Après avoir sollicité les fonds de la formation en alternance, la nouvelle contribution concernerait désormais ceux du capital de temps de formation. Cette technique budgétaire permet ainsi au gouvernement d'afficher une économie de 500 millions de francs sur le budget de l'emploi, cette diminution de crédits étant, en fait, annulée grâce au prélèvement opéré.

Le gouvernement avancera probablement l'argument selon lequel il mobilise une " trésorerie dormante " au profit de la formation en alternance.

Votre commission observe que de tels prélèvements, en principe " exceptionnels ", sont de plus en plus fréquents, presque annuels. Ils traduisent également une mauvaise gestion des finances publiques , qui conduit à faire financer des dépenses courantes par des " recettes de poche ", à caractère exceptionnel. Par ailleurs, en pénalisant les trésoreries excédentaires, ces ponctions constituent, de fait, une incitation à la mauvaise gestion.

Au regard du caractère récurrent des prélèvements opérés sur les fonds de la formation professionnelle, il apparaît que ces excédents sont structurels. Il conviendrait, dès lors, de revoir le mode de financement des organismes collecteurs de fonds, et de réduire, le cas échéant, les cotisations versées par les entreprises. Il s'agit sans doute du meilleur moyen de faire disparaître les " trésoreries dormantes ".

Or, votre commission s'est désormais fixée une doctrine en ce qui concerne les prélèvements opérés sur les trésoreries d'organismes publics ou parapublics. Si de tels prélèvements peuvent, dans certains cas, être légitimes, leur caractère systématique, en revanche, est le reflet d'une mauvaise gestion.

Lors du dernier prélèvement sur les fonds de l'AGEFAL, décidé en 1998, votre rapporteur général écrivait : " votre commission vous demande d'autoriser pour la dernière fois un tel prélèvement sur la trésorerie des organismes chargés de collecter les fonds de la formation professionnelle ".

Mettant en oeuvre sa doctrine, votre commission estime légitime la suppression du présent article.

MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

I. MODIFICATION DES CRÉDITS

Les crédits du budget de l'emploi ont été majorés, à titre non reconductible, de 6.175.000 francs sur le titre IV, et de 500.000 francs sur le titre VI.

Les chapitres concernés sont les suivants :

- 43-70 Financement de la formation professionnelle, article 41 Dépenses de fonctionnement des organismes. Subventions à divers organismes : 55.000 francs ;

- 43-71 Formation professionnelle des adultes, article 20 Subventions à divers organismes : 30.000 francs ;

- 44-70 Dispositifs d'insertion des publics en difficulté : 890.000 francs, dont 130.000 francs sur l'article 11 Programme en faveur des chômeurs de longue durée (fonctionnement), 580.000 francs sur l'article 51 Insertion par l'économique : entreprises d'insertion, associations intermédiaires et entreprises d'intérim d'insertion, et 180.000 francs sur l'article 80 Réseau d'accueil, d'information et d'orientation des jeunes ;

- 44-73 Relations du travail et amélioration des conditions de travail, article 11 Formation économique et sociale des travailleurs appelés à exercer des responsabilités syndicales et actions d'études et de recherche syndicales : 5.000.000 francs ;

- 44-79 Promotion de l'emploi et adaptations économiques, article 15 Promotion de l'emploi : dotations déconcentrées pour la promotion de l'emploi : 200.000 francs ;

- 66-71 Formation professionnelle des adultes, article 10 Opérations d'intérêt national, hors association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) : 500.000 francs en autorisations de programme et crédits de paiement.

II. MODIFICATION DE L'ARTICLE 70 RATTACHÉ

L'amendement de la commission des finances de l'Assemblée nationale vise à préciser l'utilisation des excédents financiers collectés au titre du capital temps de formation (CTF), et gérés par le comité paritaire du crédit individuel de formation (COPACIF).

Toutefois, cette précision rédactionnelle ne change rien au fond du problème. Les fonds de la formation professionnelle, en l'occurrence ceux du CTF, feront, une fois encore, l'objet d'un prélèvement au profit du budget de l'Etat.

Il convient donc de maintenir l'amendement de suppression de cet article déposé par votre commission.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 27 octobre 1999 sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial , sur les crédits de l'emploi et de la solidarité : I.- Emploi et article 70 rattaché .

M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial , a d'abord attiré l'attention de la commission sur un point essentiel du projet du budget de l'emploi pour 2000, portant sur une modification importante de la nomenclature budgétaire. Rappelant que les crédits du ministère de l'emploi s'élèvent dans le projet de loi de finances pour 2000 à 122,6 milliards de francs, alors qu'ils s'établissaient à 162,06 milliards de francs l'année dernière, il a expliqué que cette diminution de près de 25 % des crédits résultait de la non-inscription du financement de la " ristourne dégressive " sur les bas salaires au budget de l'emploi pour 2000.

En effet, les dépenses engagées à ce titre, soit 39,49 milliards de francs, seront prises en charge par le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, dont la création est prévue par l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Une part du produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés devrait alors être affectée à ce nouveau fonds pour assurer, à même hauteur, le financement de la " ristourne dégressive ". La nomenclature budgétaire subit ainsi une seconde modification importante en deux ans, les crédits finançant cette ristourne étant inscrits avant 1999 au budget des charges communes pour un montant de 43 milliards de francs . M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, a rappelé que la Cour des comptes avait recommandé cette modification. En effet, la prise en compte de ces 43 milliards de francs permettait, selon la Cour, de disposer d'une vue d'ensemble de l'effort budgétaire consenti en faveur de l'emploi. La Cour des comptes ayant auparavant formulé des critiques sur l'inscription au budget des charges communes de crédits considérables destinés à l'emploi, le rapporteur spécial s'est interrogé sur le jugement qu'elle pourrait porter à l'avenir sur un financement des allégements de charges sociales distinct du budget de l'emploi.

M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, a ainsi précisé que, à périmètre constant, le budget de l'emploi augmentait en 2000 de 2,3 %, la croissance moyenne des dépenses de l'Etat étant limitée à 0,9 %.

Concernant l'article 70 du projet de loi de finances, rattaché au budget de l'emploi, il a expliqué qu'il tendait à centraliser les excédents financiers du capital de temps de formation (CTF), estimés à 700 millions de francs, au niveau d'une section particulière créée au sein du fonds national habilité à gérer les excédents financiers du congé individuel de formation (CIF). Il a ajouté que ce dispositif permettrait de procéder à l'affectation d'une contribution de 500 millions de francs, versée par le comité paritaire du CIF (COPACIF) au budget de l'emploi, par voie de fonds de concours, afin de compenser la diminution des crédits destinés au financement de l'indemnité compensatrice forfaitaire à l'apprentissage. Le rapporteur spécial a rappelé que la commission s'était fixée une doctrine au sujet de tels prélèvements, selon laquelle, s'ils peuvent être dans certains cas légitimes, leur caractère systématique, en revanche, est le reflet d'une mauvaise gestion. Ainsi, lors du dernier prélèvement de 500 millions de francs réalisé en 1998 sur les fonds de l'Association pour la gestion des fonds de l'alternance (AGEFAL), la commission avait décidé d'autoriser, pour la dernière fois, un tel prélèvement. Le rapporteur spécial, mettant cette doctrine en pratique, a proposé de supprimer l'article 70 rattaché.

Puis M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, a fait part des observations que lui inspiraient les dotations allouées à l'emploi pour 2000.

Il a d'abord constaté que l'exécution du budget de l'emploi avait donné lieu à de nombreux dysfonctionnements. Il a rappelé que la Cour des comptes avait présenté, dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 1998, sa première monographie consacrée au budget de l'emploi. Après avoir observé que ce dernier était désormais le deuxième budget civil de l'Etat après celui de l'enseignement scolaire, ses dotations ayant progressé de plus de 36 % depuis 1994, la Cour a considéré que ce budget était soumis à une inertie qui en rendait la réorientation difficile. Elle s'est également montrée sévère sur l'effort de maîtrise des dotations budgétaires, qu'elle a qualifié " d'insuffisant ". Le rapporteur spécial a ainsi estimé que l'analyse de la Cour des comptes confirmait la sienne, l'année dernière, lorsqu'il avait souligné que le financement des priorités gouvernementales était assuré par la réalisation d'économies significatives, baptisées, pour la circonstance, " recentrages ". Dans ces conditions, il a considéré que le projet de budget pour 2000 opérait des choix très contestables, par exemple la création de 130 emplois, motivée, d'après le Gouvernement lui-même, par la mise en place de la réduction autoritaire du temps de travail. Ainsi, les effectifs budgétaires du ministère ne cessent de croître, alors même que la Cour des comptes avait rappelé le caractère non optimal de la gestion des emplois. Il a donc jugé que la création de ces nouveaux emplois lui paraissait inopportune.

M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, a ensuite indiqué que les emplois-jeunes étaient à l'origine d'un coût budgétaire croissant. En effet, le budget de l'emploi pour 2000 prévoit 21,34 milliards de francs au titre du financement des emplois jeunes, soit une augmentation de 53,3 % des crédits par rapport à 1999. Le nombre total d'emplois jeunes devant s'élever à 350.000, leur coût en année pleine s'établirait à 33,25 milliards de francs pour le seul budget de l'emploi. En outre, ce dernier ne regroupe pas l'ensemble des crédits destinés au financement de ce dispositif, l'éducation nationale ayant recruté des aides éducateurs, le ministère de l'intérieur, des agents de sécurité, et l'outre-mer bénéficiant de 11.000 emplois jeunes. Ainsi, le coût total des emplois jeunes en 2000 s'élèvera à 33,83 milliards de francs.

Le rapporteur spécial a ajouté que l'avenir de ces jeunes était pour le moins incertain, et qu'il était à craindre qu'une partie importante d'entre eux ne vienne accroître les effectifs des fonctionnaires, et, par conséquent, les dépenses les plus rigides du budget de l'Etat.

M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial , a, enfin, estimé que le financement des 35 heures n'était pas assuré. Il a rappelé que seuls 4,3 milliards de francs étaient inscrits à ce titre au budget de l'emploi pour 2000, alors que le coût global est évalué à 25 milliards de francs environ pour l'année prochaine. Il a qualifié le financement des 35 heures " d'usine à gaz ", ses modalités reposant en grande partie sur les dispositions du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, et sur un raisonnement postulant le succès du passage aux 35 heures, le dispositif s'autofinançant en partie.

Il a constaté que cette mesure décidée par le Gouvernement conduisait à créer de nouvelles impositions : une contribution sociale sur les entreprises et une écotaxe. Il a rappelé que la version initiale du projet gouvernemental prévoyait de mettre à contribution les organismes de protection sociale, les caisses de sécurité sociale et l'UNEDIC. Devant l'hostilité que n'a pas manqué de susciter une telle formule auprès des partenaires sociaux, le Gouvernement, reconnaissant implicitement son erreur, a fini par reculer lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale. La ministre de l'emploi et de la solidarité a, en effet, annoncé que le produit de la taxation des heures supplémentaires ainsi que celui des droits sur les alcools, aujourd'hui affectés au fonds de solidarité vieillesse et à la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), viendraient finalement abonder le fonds de financement. D'autofinancement et de " recyclage ", il n'est désormais plus question : le Gouvernement, renonçant à imposer une contribution à l'UNEDIC et au régime général de la sécurité sociale, a préféré priver ce dernier d'une partie de ses ressources.

M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial , a conclu en estimant que ce dispositif de financement était passé de " l'usine à gaz " au " bricolage ".

A l'issue de cette présentation, la commission a décidé de réserver son vote sur les crédits du budget de l'emploi pour 2000 ainsi que sur l'article 70 rattaché jusqu'à l'audition de la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Réunie à nouveau le 10 novembre 1999, la commission s'est prononcée sur les crédits du budget de l'emploi, précédemment réservés . La commission a décidé de proposer au Sénat le rejet du budget de l'emploi, ainsi que la suppression de l'article 70 du projet de loi de finances pour 2000 .

Réunie le 27 octobre 1999 sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission des finances a procédé à l'examen des crédits de l'emploi et de la solidarité : I - Emploi et article 70 rattaché sur le rapport de M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial.

La commission a alors décidé de réserver son vote jusqu'à l'audition de la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Réunie à nouveau le 10 novembre, la commission a décidé de proposer au Sénat le rejet du budget de l'emploi, ainsi que la suppression de l'article 70 du projet de loi de finances pour 2000.

Elle a confirmé cette position lors de sa réunion du jeudi 25 novembre après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale.



1 Dossier de presse de présentation du PLF pour 2000, rubrique " Dépenses ", page 29

2 Sur la base d'un coût annuel unitaire de 95.010 francs.

3 Le coût pour le budget de l'Etat des aides à la réduction du temps de travail sera donc, au total, de 6,8 milliards de francs en 2000.

4 Direction de l'animation de la recherche et des études statistiques

5 Association pour la formation professionnelle des adultes

6 Agence nationale pour l'Emploi

7 INSEE Première, n° 680, novembre 1999

8 Bureau international du travail

9 L'objectif est d'offrir un nouveau départ aux jeunes chômeurs et adultes menacés d'exclusion, ce qui représenterait à l'horizon 2002, et à l'issue de la montée en charge, 1.800.000 personnes

10 Programme Trajectoire d'accès à l'emploi

11 A compter du 1 er janvier 1998, en application de l'article 114 de la loi de finances pour 1998, les emplois villes ont été supprimés

12 SIFE

13 Annexe n° 3 au rapport d'information n° 1781, Assemblée nationale, commission des finances (11 ème législature)

14 Leur nombre est en diminution depuis 1996, notamment du fait de la mise en place de l'allocation de remplacement pour l'emploi (ARPE) ; il convient de relever que le dispositif de l'ARPE ne donne pas lieu à inscription budgétaire car il résulte d'un accord entre partenaires sociaux



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